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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 41e Législature,
Volume 148, Numéro 28

Le mardi 15 novembre 2011
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le mardi 15 novembre 2011

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune des officiers et des membres de la Marine royale canadienne suivants : le capitaine de corvette Donna Barnett, le lieutenant Chris M. Devita, le matelot-chef Jarris W. Sampson, le matelot-chef Kurt Sheppard, le matelot-chef J. Kurt Swanson et le matelot de 1re classe Scott Darbison. Ces personnes ont reçu des prix plus tôt aujourd'hui dans le cadre d'une cérémonie que nous avons organisée à l'occasion de la Journée de remerciement à l'intention de la Force navale. Elles sont les invitées des sénateurs Mercer et Segal.

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

La Journée de remerciement à l'intention de la Force navale

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, c'est aujourd'hui la Journée de remerciement à l'intention de la Force navale, et c'est grâce au travail de personnes comme celles qui viennent d'être présentées que les contributions faites par la Marine royale canadienne à la défense intérieure, à la sécurité internationale et aux efforts d'aide humanitaire sont reconnues par nos partenaires et nos alliés dans le monde entier. Ce ne sont que six des milliers de marins et d'aviateurs maritimes canadiens qui travaillent tous les jours dans certaines des régions les plus troublées du monde.

En demandant à tous mes collègues au Sénat et à tous les Canadiens de célébrer les innombrables exploits, missions héroïques, déploiements complexes et sacrifices consentis par les hommes et femmes de la Marine royale canadienne, je ne tiens pas à attirer l'attention sur le passé. Toutefois, lorsque nous examinons notre histoire navale, nous constatons que les membres de la Marine royale canadienne méritent toute notre gratitude et notre reconnaissance. Le centenaire de la Marine royale canadienne en 2010 a donné à tous les Canadiens l'occasion rare de mieux connaître notre histoire navale qui, à bien des égards, est au cœur du développement du Canada depuis 100 ans. La visite de Sa Majesté et les revues navales ont souligné l'importance que cet événement revêtait pour tous les Canadiens.

C'est le moment aujourd'hui de nous tourner vers l'avenir. Le Canada est maintenant doté d'une force navale moderne, adaptable et à la fine pointe de la technologie, qui est devenue réalité grâce à une équipe grandissante composée des Canadiens les plus talentueux et les plus brillants qui soient. Nous disposons de 33 navires de combat et navires-écoles et avons des plans d'acquisitions afin de moderniser et de remettre à neuf notre flotte. Les membres de notre force navale possèdent un vaste éventail de compétences en matière d'armement, de navigation, de sécurité- incendie, de guerre électronique, de renseignements et de leadership qui sont inégalées dans le monde. Il est beaucoup plus difficile de devenir le commandant en second ou le commandant adjoint sur de petits navires canadiens de Sa Majesté que d'accéder à la fonction de sous-ministre dans l'un des ministères fédéraux les plus importants.

[Français]

Un cadre supérieur a reçu la formation nécessaire, subi les examens, reçu sa certification et subi une évaluation en situation de répondant d'importantes compétences spécialisées dans des domaines divers, tout comme que d'autres personnes en uniforme. La marine représente une fonction hautement technique. Les hommes et les femmes qui portent l'uniforme de la Marine royale canadienne doivent affronter une mer implacable, une grande variété de risques sérieux et des dangers maritimes, sans oublier une foule d'exigences rigoureuses sur les plans de la stratégie, de l'environnement, de l'intelligence et des capacités d'agir.

[Traduction]

Alors que les Russes et les Chinois taillent de l'acier, que nos amis russes ont l'Arctique dans leur ligne de mire, que le risque que l'on ferme le détroit d'Ormuz fait partie intégrante de toute analyse stratégique du Moyen-Orient actuel et du golf Persique, il n'y a jamais eu de période d'après-guerre plus importante que maintenant pour être solidaire des membres de la marine. Qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie que, en soulignant cette journée, nous nous engageons à ce qu'aucun navire canadien ne reste amarré à cause d'une pénurie d'hommes et de femmes formés pour naviguer, à ce qu'aucune limite budgétaire factice pour le carburant ne restreigne la capacité de notre flotte sur les trois côtes à effectuer leur travail et à patrouiller nos frontières océaniques. Cela signifie que l'on ne permet pas qu'il y ait loin de la coupe aux lèvres entre les milliards de dollars promis et l'argent réellement investi parce que des fonctionnaires au Conseil du Trésor ou des employés civils de la Défense ne sont que trop heureux de briser leur promesse.

[Français]

Que ce soit en luttant contre les pirates de la Corne de l'Afrique pour sécuriser les couloirs de navigation au profit d'activités maritimes légitimes, ou encore en participant aux efforts en vue d'enrayer l'acheminement de drogues vers nos rives ou de soulager la détresse lors de catastrophes naturelles, que ce soit en Haïti ou ici, en Nouvelle-Écosse, les marins de la MRC contribuent à améliorer les conditions de vie partout dans le monde.

[Traduction]

Ils ont servi au large des côtes de la Libye. Ils ont servi dans un contexte difficile. Ils ont aidé à libérer Misrata de la pire et de la plus négative des forces.

La devise de la marine est « Prêt, oui, prêt ». En cette Journée de la marine, disons à nos marins : « Nous sommes avec vous, hommes et femmes de la Marine royale canadienne. »

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, je veux faire écho aux paroles du sénateur Segal à l'occasion de la Journée de la marine. Je le remercie de coparrainer l'événement de ce soir et je tiens aussi à remercier le Président d'avoir présidé une petite cérémonie qui a eu lieu au Sénat ce matin pour rendre hommage à nos six héros de la marine. J'invite tous les sénateurs à se joindre à nous ce soir lors de la réception donnée en l'honneur de la Marine royale canadienne par la Ligue navale du Canada, où nous aurons l'occasion de rencontrer six jeunes Canadiens remarquables.

Je suis le fils d'un ancien combattant de la marine et le père d'un ancien cadet de la marine qui est maintenant un jeune officier dans un corps de cadets de la marine en Nouvelle-Écosse et, à ce titre, je suis très fier des hommes et des femmes en uniforme qui donnent tant d'eux-mêmes au service du Canada.

La Journée nationale de la philanthropie

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, cette journée est aussi très spéciale pour moi. Le 15 novembre est la Journée nationale de la philanthropie. Cette année, plus de 50 000 personnes de 125 collectivités partout dans le monde participeront aux célébrations. Aujourd'hui, nous soulignons de façon tout à fait particulière les immenses contributions d'organismes de charité, de bénévoles, de donateurs et de simples citoyens qui jouent un rôle actif pour créer un Canada et un monde meilleurs.

Honorables sénateurs, grâce à la gentillesse et à la générosité des Canadiens, nous avons pu faire en sorte que les plus vulnérables des nôtres aient de la nourriture et des vêtements, que nos chercheurs et nos médecins puissent travailler aussi fort qu'ils le peuvent pour éradiquer des maladies et pour que nos enfants grandissent dans un monde où ils peuvent réussir au meilleur de leurs capacités.

Ce ne sont que quelques exemples de ce que la philanthropie peut accomplir. La capacité des bénévoles et des donateurs est sans limite lorsque nous ne ménageons pas nos efforts pour les encourager à continuer de faire ce qu'ils font le mieux.

Comme vous le savez, honorables sénateurs, je parraine le projet de loi S-201, Loi instituant la Journée nationale de la philanthropie. Dans son préambule, on lit notamment « qu'il est important de rendre hommage à tous les Canadiens qui se démarquent par leur générosité, en reconnaissant [officiellement] la Journée nationale de la philanthropie ». Je vous demande donc d'appuyer le projet de loi lorsqu'il nous reviendra.

Je sais que vous vous joindrez à moi pour remercier les dizaines de milliers de personnes, au Canada et ailleurs dans le monde, qui donnent temps et énergie pour améliorer leur collectivité, rendre leur pays plus prospère et instaurer la paix dans le monde.

(1410)

La restauration de pièces d'artillerie

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, cette intervention pourrait s'intituler « L'histoire de deux canons ». La semaine dernière, une importante cérémonie de dévoilement s'est déroulée relativement à un canon de six pouces — que certains appellent une pièce d'artillerie — récupéré sur l'île Partridge qui garde le port de Saint John, au Nouveau-Brunswick.

À l'origine, le canon était installé sur un croiseur équipé de 16 canons, le NCSM Niobe, lequel faisait partie de la flotte britannique envoyée pour combattre durant la guerre des Boers en 1897. Le NCSM Niobe est resté au service de la Marine de Sa Majesté jusqu'à ce qu'il soit offert à la Marine royale canadienne naissante en 1910. Le navire est resté en service actif jusqu'à l'explosion de Halifax en 1917. Le navire ayant été endommagé, il fut mis au rebut, à l'exception des canons, qui furent envoyés dans diverses fortifications au Canada. Deux d'entre eux furent installés sur l'île Partridge. Là, ils furent utilisés par le 3e Régiment d'artillerie de campagne, également appelé The Loyal Company, jusqu'à ce que les canons soient mis hors service en 1947.

Le commandant du régiment, le lieutenant-colonel Stephen Stachan, a déclaré, durant la cérémonie de dévoilement, que les unités d'artillerie, contrairement à la plupart des unités d'infanterie, n'ont pas leur propre drapeau, mais seulement leurs canons et que, par conséquent, il ne semblait pas approprié de laisser ces canons à l'abandon. Ils ont donc été envoyés aux unités qui les ont si fièrement utilisés.

C'est pour cette raison que les deux canons ont été déterrés, au prix de grands efforts, sur l'île Partridge, en 1981. Lorsqu'ils ont été mis hors service, en 1941, les canons ont été enterrés, soi-disant pour les préserver, mais ils ont été oubliés, avant d'être retrouvés, dans le cadre d'un projet de recherche historique réalisé sur l'île, puis récupérés par des membres du 3e Régiment d'artillerie de campagne.

Grâce, notamment, aux efforts des Forces canadiennes et de la généreuse contribution du colonel honoraire John Irving, l'un de ces canons trône maintenant fièrement au manège militaire Barrack Green, à Saint John, en souvenir de tous ceux qui l'ont utilisé pour défendre le Canada. L'autre est installé sur le NCSM Brunswicker, l'unité de la Réserve de la Marine royale canadienne de Saint John.

Au moment où les Forces canadiennes évoluent rapidement afin de relever les défis du nouveau siècle, il importe tout de même de prendre le temps de réfléchir à l'histoire de notre pays. Le brigadier général Christopher Thurrott, commandant des forces terrestres pour la région de l'Atlantique, a fait allusion à cet aspect lors de la cérémonie, lorsqu'il a déclaré que nous devons apprécier et célébrer notre passé au moment où nous préparons l'avenir.

Honorables sénateurs, je pense que nous sommes tout à fait d'accord avec lui.

La Semaine de sensibilisation face à l'intimidation

L'honorable Salma Ataullahjan : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour souligner la neuvième Semaine de sensibilisation face à l'intimidation, qui se déroule du 13 au 19 novembre.

La Semaine de sensibilisation face à l'intimidation est l'initiative d'un éducateur canadien très respecté, Bill Belsey. Cet événement vise à prévenir l'intimidation par la sensibilisation et l'éducation, ainsi que par une approche positive et proactive. Partout au pays et dans le monde, des écoles participent à des activités tout au long de la semaine, dont le thème est « Mettez fin à l'intimidation ». Les enfants sont encouragés à participer et à devenir des acteurs du changement, compte tenu du fait que 85 p. 100 des cas d'intimidation se produisent lorsque les jeunes sont en groupe et que celui qui s'adonne à l'intimidation va s'arrêter 10 secondes après que ses pairs s'opposent à son comportement.

Honorables sénateurs, l'intimidation n'est pas un rite de passage ou une étape normale de la vie. C'est un problème universel qui touche les enfants directement ou indirectement, indépendamment de leur âge, de leur sexe, de leur culture, de leur religion ou de leur nationalité. Les enfants qui sont victimes d'intimidation éprouvent de graves problèmes d'anxiété et de dépression, et ils peuvent envisager le suicide. On parle souvent de « peine d'emprisonnement » lorsque des enfants sont tourmentés quotidiennement à l'école, un lieu qui devrait être sûr et rassurant.

De nos jours, l'intimidation continue au-delà de la cour d'école, souvent jusqu'à l'intérieur de la maison familiale. En effet, avec l'utilisation de plus en plus répandue d'appareils tels que les téléphones cellulaires et les ordinateurs par les jeunes, la cyberintimidation est devenue la nouvelle frontière.

L'intimidation préoccupe vraiment les Canadiens. Chaque mois, il y a 282 000 cas d'intimidation dans les écoles secondaires du Canada et un grand nombre de ces incidents ne sont pas signalés. Dans une étude qui date de 2001-2002, l'Organisation mondiale de la santé a classé le Canada au 26e et au 27e rang, sur 35 pays, pour ce qui est des mesures prises face à l'intimidation et à la victimisation.

Il suffit de songer à la récente vague de suicides au pays. Le suicide est maintenant la deuxième cause de décès chez les jeunes Canadiens. Chaque semaine, quatre jeunes de moins de 19 ans se suicident. Le mois dernier, James Hubley, qui était âgé de 15 ans et qui était le fils d'un conseiller municipal de la Ville d'Ottawa, Allan Hubley, s'est suicidé après avoir été victime d'intimidation et de railleries méchantes.

En septembre, Mitchell Wilson, un garçon de 11 ans de Pickering, en Ontario, atteint de dystrophie musculaire, s'est enlevé la vie après avoir été brutalement attaqué et agressé par un petit dur. Dans son cas, l'intimidation ne s'est même pas terminée au moment de sa mort. Elle s'est poursuivie en ligne.

L'intimidation et la cyberintimidation ne sont pas des problèmes uniquement scolaires; ils touchent l'ensemble de la collectivité. Ce sont des problèmes nationaux qui exigent des interventions à tous les niveaux. En tant que membre du Comité sénatorial permanent des droits de la personne, je puis vous assurer que cette question se trouve au sommet de la liste de nos intérêts. Je félicite les villes de Calgary et de North Bay d'avoir proclamé officiellement la Semaine de sensibilisation face à l'intimidation, et j'espère que beaucoup d'autres suivront leur exemple.

Maurice Guitton

Félicitations à l'occasion de l'hommage rendu par l'Association des industries aérospatiales du Canada

L'honorable Wilfred P. Moore : Honorables sénateurs, mercredi dernier, le 2 novembre, l'Association des industries aérospatiales du Canada, ou l'AIAC, offrait un dîner et un gala à Ottawa, à l'occasion de son 50e anniversaire. L'AIAC est un organisme sans but lucratif qui se prononce sur les politiques ayant des répercussions directes sur les sociétés aérospatiales et les emplois dans ce domaine au Canada. C'est la voix nationale de l'industrie aérospatiale du Canada.

En 2009, l'AIAC a créé le prix James C. Floyd en l'honneur de M. Floyd, concepteur en chef chez Avro Canada, qui a joué un rôle fondamental dans la mise au point de certains des meilleurs avions jamais produits au Canada, dont l'avion de ligne à réaction C-102, le chasseur CF-100 et l'Avro Arrow. Ce prix est présenté annuellement par l'AIAC à un visionnaire ayant apporté une contribution marquante à l'industrie.

À l'occasion du gala, l'AIAC a présenté son prix James C. Floyd à Maurice Guitton, de Lunenburg, en Nouvelle-Écosse, dont la carrière constitue une inspirante histoire de leadership, d'esprit d'entreprise et d'ardeur au travail. M. Guitton a fondé Composites Atlantic Limited à Lunenburg en 1993. Cette entreprise est devenue un chef de file en conception, mise à l'épreuve, certification et fabrication de matériaux composites de pointe pour les industries spatiale et aérospatiale, pour la défense et pour le commerce. Ayant démarré avec une équipe de 8 personnes, il a créé une entreprise florissante qui compte maintenant 320 employés.

M. Guitton a révolutionné l'industrie aérospatiale, notamment en aidant les PME à améliorer leurs normes de qualité afin de respecter les exigences de l'industrie. Il a aussi piloté la mise au point de nouvelles technologies qui ont contribué à l'amélioration de la qualité des pièces. Parmi les produits fabriqués de matériaux composites de pointe conçus et fabriqués par Composites Atlantic, on remarque les pylônes qui fixent les moteurs aux ailes du nouveau Dreamliner 787 de Boeing, un avion de ligne à réaction ultraléger.

Il est l’un des fondateurs de l’Aerospace and Defence Industries Association of Nova Scotia, dont il a été le président et l’un des directeurs, et il a contribué à la création d’autres associations du domaine aérospatial dans le Canada atlantique.

Nous félicitons donc Maurice Guitton d’avoir reçu cette marque de reconnaissance bien méritée. C’est un véritable visionnaire du secteur aérospatial canadien, et je suis fier de le compter parmi mes amis.

Herbert H. Carnegie, C.M., O. Ont.

L’honorable Don Meredith : Honorables sénateurs, le 8 novembre 2011, on célébrait le 92e anniversaire d’un héros pour son pays et sa collectivité, Herbert H. Carnegie.

Contrairement à la plupart des jeunes Noirs de son époque, M. Carnegie rêvait de jouer un jour dans la Ligue nationale de hockey; il s’entraînait deux heures par jour avant d’aller à l’école. Né à Toronto de parents jamaïcains, il fut le premier Afro-Canadien à se voir offrir la possibilité de jouer dans la LNH.

En 1938, alors qu’il regardait Herbert H. Carnegie s’entraîner avec les Young Rangers de Toronto, le propriétaire des Maple Leafs de Toronto, Conn Smythe, impressionné par son talent naturel, dit qu’il aurait aimé pouvoir « transformer Carnegie en Blanc ».

Des décennies plus tard, M. Carnegie affirma ceci : « À l’époque, je croyais que mon rêve de jouer dans la LNH avait été anéanti. » On lui offrit de signer un contrat de ligue mineure avec les Rangers de New York, mais il a dû refuser en raison de ses obligations familiales et financières. C’était la fin de son rêve.

(1420)

Il est revenue dans la Ligue de hockey senior du Québec, où il a joué avec de futurs joueurs des Canadiens de Montréal, comme Jean Béliveau. Il a néanmoins ouvert la voie à de futurs joueurs de hockey noirs. Malheureusement, la barrière de la couleur dans le hockey professionnel n'est tombée qu'en 1958, lorsque Willie O'Ree a porté les couleurs des Bruins de Boston.

M. Carnegie a rédigé son autobiographie, dans laquelle il parle avec franchise de l'adversité qu'il a dû affronter. Voici ce qu'il a déclaré :

Même si mon frère et moi avions terminé la saison parmi les meilleurs marqueurs de la ligue, les dépisteurs de la LNH nous ont complètement ignorés. Ossie et moi en avons parlé et il ne faisait aucun doute dans notre esprit que nous avions été traités ainsi en raison de la couleur de notre peau [...] J'avais le sentiment qu'en continuant de jouer au maximum de mes capacités et de me surpasser, on me donnerait bien une chance tôt ou tard. Je continuais d'espérer que quelqu'un aurait du cœur.

Herbert H. Carnegie a joué un rôle encore plus important à l'extérieur de la patinoire en fondant la Future Aces Hockey School, une des premières écoles de hockey au Canada, et la Herbert H. Carnegie Future Aces Foundation. Il est l'auteur d'un credo populaire destiné à aider les jeunes à apprendre à se connaître et à avoir confiance en eux. Ce credo a été adopté par de nombreuses écoles, tant en Ontario qu'ailleurs. Honorables sénateurs, j'aimerais que ce système soit étendu à la grandeur de notre réseau scolaire.

M. Carnegie a été décoré de l'Ordre de l'Ontario en 1996 et de l'Ordre du Canada en 2003. Il a reçu un doctorat honorifique en droit de l'Université York pour son travail en tant que leader communautaire. Une école a même été nommée en son honneur, la Herbert H. Carnegie Public School, qui a officiellement ouvert ses portes à Vaughn, en Ontario, en 2008-2009. J'ai eu le privilège d'accueillir des élèves de cette école ici même le 5 mai dernier.

Herbert H. Carnegie est toujours une source d'inspiration pour une nouvelle génération de Canadiens qui souhaitent surmonter des obstacles et travailler d'arrache-pied pour atteindre leurs objectifs. Honorables sénateurs, je vous invite à vous joindre à moi pour rendre hommage à ce remarquable mentor canadien à l'occasion de son 92e anniversaire de naissance.


AFFAIRES COURANTES

Le receveur général du Canada

Les comptes publics du Canada—Dépôt du rapport de 2011

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, les Comptes publics du Canada de 2011.

[Français]

L'Accord sur les revendications territoriales concernant la région marine d'Eeyou

Dépôt du document

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, l'Accord sur les revendications territoriales concernant la région marine d'Eeyou.

Projet de loi sur le libre choix des producteurs de grains en matière de commercialisation

Avis de motion tendant à autoriser le Comité de l'agriculture et des forêts à étudier la teneur du projet de loi

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, conformément à l'article 74(1) du Règlement, le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit autorisé à étudier la teneur du projet de loi C-18, Loi réorganisant la Commission canadienne du blé et apportant des modifications corrélatives et connexes à certaines lois, présenté à la Chambre de communes le 18 octobre 2011, avant que ce projet de loi ne soit soumis au Sénat.

Le Sénat

La Loi sur l'abrogation des lois—Avis de motion tendant à faire opposition à l’abrogation de la loi et de dispositions d’autres lois

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, conformément à l'article 3 de la Loi sur l'abrogation des lois, L.R., 2008, ch. 20, le Sénat a résolu que la loi suivante et les dispositions des autres lois ci-après, qui ne sont pas entrées en vigueur depuis leur adoption, ne soient pas abrogées :

1. Loi de mise en œuvre du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires, L.C. 1998, ch. 32;

2. Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire et abrogeant la Loi sur les marchés de grain à terme, L.C. 1998, ch. 22 :

-par. 1(1) et (3), art. 2 à 5, par. 6(1) et (2), art. 7, 9, 10, 13 à 16, 17 en ce qui concerne l'al. 88(1)a) de la version anglaise de la Loi sur les grains du Canada et en ce qui concerne le passage ci-après du par. 88(1) de la version française de la Loi sur les grains du Canada : « soit pénétrer dans une installation ou dans les locaux d'un titulaire de licence d'exploitation d'une installation ou de négociant en grains ou en cultures spéciales, s'il a des motifs raisonnables de croire que des grains, des produits céréaliers ou des criblures s'y trouvent, qu'ils appartiennent au titulaire ou soient en sa possession, ainsi que des livres, registres ou autres documents relatifs à l'exploitation de l'installation ou du commerce », et art. 18 à 23, par. 24(2) et (3) et art. 26 à 28;

3. Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence, L.C. 1998, ch. 17 :

-par. 6(3), art. 7, par. 18(1), 19(4), art. 22, et art. 25 en ce qui concerne de l'art. 47 de la Loi sur la Commission canadienne du blé;

4. Loi sur les programmes de commercialisation agricole, L.C. 1997, ch. 20 :

-art. 44 à 46;

5. Loi sur les grains du Canada, L.R., ch. G-10 :

-al. d) et e) de la définition « installation » ou « silo » à l'art. 2,

-par. 55(2) et (3);

6. Loi sur la Commission canadienne du blé, L.R., ch. C-24 :

-art. 20 à 22;

7. Loi d'exécution du budget de 1998, L.C. 1998, ch. 21 :

-art. 131 et 132;

8. Loi portant mise en œuvre de l'Accord sur le commerce intérieur, L.C. 1996, ch. 17 :

-art. 17 et 18;

9. Loi autorisant l'aliénation de Nordion et de Theratronics, L.C. 1990, ch. 4 :

-art. 9;

10. Loi sur le précontrôle, L.C. 1999, ch. 20 :

-art. 37;

11. Loi sur les contraventions, L.C. 1992, ch. 47 :

-al. 8(1)d), art. 9, 10, 12 à 16, par. 17(1) à (3), art. 18, 19, 21 à 23, 25, 26, 28 à 38, 40, 41, 44 à 47, 50 à 53, 56, 57, 60 à 62, 84 en ce qui concerne les articles 1, 2.1, 2.2, 3, 4, 5, 7, 7.1, 9, 10, 11, 12, 14 et 16, et 85;

12. Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations, L.C.2000, ch. 12 :

-art. 89, 90, 97, par. 107(1) et (3), art. 109, 128 et 174, par. 175(2), 176(1), art. 177, 178, 180 à 186, 275, 277, 286 à 288 et 290;

13. Loi sur les armes à feu, L.C. 1995, ch. 39 :

-al. 24(2)d), art. 39, 42 à 46, 48 et 53;

14. Loi sur la responsabilité en matière maritime, L.C. 2001, ch. 6 :

-art. 45

15. Loi maritime du Canada, L.C. 1998, ch. 10 :

-art. 140, 178, 185, 201,

-Partie 2 de l'annexe;

16. Loi sur l'Office d'investissement des régimes de pensions du secteur public, L.C. 1999, ch. 34 :

-art. 155, 157, 158, par. 161(1) et (4).

Projet de loi sur l'accord sur les revendications territoriales concernant la région marine d'Eeyou

Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes un message accompagné du projet de loi C-22, Loi portant mise en vigueur de l'Accord entre les cris d'Eeyou Istchee et Sa Majesté la Reine du chef du Canada sur la région marine d'Eeyou.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Carignan, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après- demain.)


(1430)

[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

La défense nationale

L'achat d'avions F-35

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur la question des F-35. Je me demande si la ministre pourrait se rendre à la page de son cahier d'information qui parle de cette question, car bien des facteurs sont en cause.

Les coûts montent en flèche, et il ne semble y avoir aucun consensus à leur égard. Les porte-parole du gouvernement prétendent toujours que chaque unité coûtera 75 millions de dollars tandis que le directeur parlementaire du budget a déclaré que chacune coûtera 128 millions de dollars. Par la suite, le coût a été évalué à 150 millions de dollars par unité. Enfin, selon le directeur du budget des États-Unis et d'autres consultants, il semble plutôt être question, en fait, de 200 millions de dollars. Les Canadiens n'adhèrent plus à ce projet et ils ne croient plus aux arguments du gouvernement selon lesquels nous aurions besoin de cet appareil.

Si nous choisissons de ne plus en commander 65 et d'en réduire le nombre afin de conserver la même enveloppe budgétaire, il n'est plus possible d'obtenir ces appareils. C'est ce qu'a déclaré le chef d'état-major de la Défense.

Le gouvernement cherche peut-être à trouver une façon raisonnable de se sortir de ce dilemme. Selon moi, personne ne serait blâmé si on décidait qu'il s'agissait d'un contrat de développement qu'on peut annuler à n'importe quel moment.

La ministre pourrait-elle nous dire si le gouvernement est prêt à suivre ce conseil?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, il me semble que ceux qui siègent du côté du sénateur sont des spécialistes de l'annulation des marchés.

Je le répète, honorables sénateurs, il est évident que le Canada a besoin d'avions militaires pour protéger sa souveraineté. Nous continuerons de veiller, comme nous l'avons toujours fait depuis que nous tenons les rênes du pouvoir, à ce que les hommes et les femmes des forces armées aient le meilleur matériel disponible pour faire leur travail efficacement. Pour ce qui est de répondre aux besoins du Canada, le F-35 est l'appareil qui nous en donne le plus pour notre argent, et c'est le seul qui répondra aux besoins des forces armées.

Nous avons prévu un budget de 9 milliards de dollars pour l'acquisition des F-35. Le Canada achètera la version la plus efficace par rapport au coût, et il le fera au plus fort de la production, au moment où les coûts seront les plus bas.

Je le répète, honorables sénateurs, je me demande avec perplexité pourquoi les libéraux veulent remettre en question le programme des F-35, puisque c'est le gouvernement précédent qui a mis ce programme en route.

Le sénateur Day : Honorables sénateurs, je remercie madame le ministre de sa réponse. Je soupçonne qu'elle verra dans son cahier d'information que ce montant de 9 milliards de dollars a été porté à 29 milliards de dollars par toutes les instances budgétaires qui s'y connaissent, aussi bien au Canada qu'aux États-Unis.

Je me demande cependant si la ministre est au courant du fait que la Turquie, les Pays-Bas, la Norvège, Israël et l'Australie ont tous fait partie du consortium de développement, et que tous ces pays ont déclaré qu'ils réduiraient leur commande ou la retiendraient entièrement en raison de la dernière annonce au sujet d'un retard de deux ans.

Madame le ministre sait-elle également que le secrétaire américain à la Défense, M. Leon E. Panetta, a déclaré hier que, si les compressions budgétaires attendues aux États-Unis se concrétisaient, elles pourraient se traduire par l'abolition complète du programme du F-35? Si elle sait tout cela, pourquoi continue-t- elle de prétendre que nous pouvons acheter ces appareils pour environ le tiers de leur coût réel, et pourquoi ne nous retirons-nous pas tout de suite de ce projet?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, dans sa question, le sénateur a dit que, si telle ou telle chose se produisait, telle ou telle chose pourrait en découler. De toute évidence, je ne vais pas répondre à des si et à des peut-être.

Je le répète, le gouvernement a prévu un budget de 9 milliards de dollars pour acheter ces appareils. Il achètera la version la plus efficace par rapport au coût, et il fera l'acquisition au plus fort de la production, lorsque les coûts seront au plus bas. Il ne fait aucun doute, honorables sénateurs, que les CF-18 seront au bout de leur vie utile d'ici 2016, 2017 ou 2018, et nous avons besoin d'un autre appareil. Cela nous donne encore quelques années, comme vous le savez, mais nous avons besoin d'un appareil pour remplacer les CF- 18.

Le sénateur Day : J'espérais que la ministre retienne ma proposition et décide que nous devons abandonner ce marché.

Le Canada a dit qu'il commanderait 65 appareils. À supposer que la position du gouvernement demeure celle que madame le ministre vient d'énoncer, est-elle d'accord pour dire que le nombre d'appareils sera de 65 et qu'il ne sera pas réduit de façon à respecter l'enveloppe de 9 milliards de dollars?

Le sénateur LeBreton : Honorable sénateurs, le sénateur Day aura beau essayer, il ne me mettra pas des mots dans la bouche. Comme je l'ai déjà dit, nous avons prévu un budget de 9 milliards de dollars pour acquérir ces appareils. Il ne fait pas de doute que nous en avons besoin, étant donné que les CF-18 touchent à la fin de leur cycle de vie et que nous aurons besoin d'appareils pour les remplacer. Voilà quels sont les plans du gouvernement et c'est ainsi que nous entendons nous y prendre.

L'honorable Wilfred P. Moore : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Étant donné les coûts prévus dont le sénateur Day a fait état, et si ces coûts continuent d'augmenter pour atteindre peut-être les 150 ou 160 millions de dollars par appareil, le gouvernement a-t-il songé à la possibilité que, à un moment donné, il faille retourner à la planche à dessin et lancer un concours ouvert pour acheter un appareil capable de répondre aux besoins du Canada?

Le sénateur LeBreton : Je crois avoir déjà répondu à cette question. Le processus d'acquisition des F-35 a débuté sous le gouvernement précédent. Je le répète, je ne vois pas pourquoi le choix de cet appareil par le gouvernement précédent pouvait être bon alors que maintenant, parce qu'un autre gouvernement est en place, c'est un mauvais choix.

Le sénateur Moore : La ministre ne pourra pas indéfiniment revenir sur ce que le gouvernement précédent a fait. Le gouvernement va devoir commencer à prendre ses propres décisions en fonction de la conjoncture. Le gouvernement a hérité de nous une excellente conjoncture. Il doit maintenant gérer la situation qui est la sienne et répondre aux questions qui lui sont posées.

Je voudrais revenir sur ce que le sénateur Day a dit au sujet de la lettre rendue publique hier par le secrétaire d'État américain à la Défense, Leon E. Panetta. Il a dit que, si un comité spécial de législateurs ne peut s'entendre sur la réduction du déficit américain d'ici le 23 novembre, soit dans huit jours, cela déclencherait ce qu'on appelle une séquestration, c'est-à-dire que les dépenses fédérales seraient automatiquement réduites. Il y aurait des coupes d'environ un billion de dollars dans le budget du département américain de la Défense.

(1440)

C'est une question très réelle. Il ne s'agit pas de conjectures. Nous parlons d'un délai de huit jours. Quel est notre plan? Si le département américain de la Défense ne réussit pas à s'entendre avec le comité législatif sur ces coupes, le projet des F-35 sera très probablement annulé, de même que d'autres grandes dépenses liées à la défense.

Qu'est-ce que le gouvernement du Canada s'attend à faire dans cette situation? Il doit sûrement y avoir pensé parce que tout cela est très réel.

Le sénateur LeBreton : Je remercie le sénateur de cette question. Il m'interroge en se basant sur des bulletins d'actualités traitant de ce qui a été dit aux États-Unis. De toute évidence, nos responsables suivent très attentivement la situation. Toutefois, je ne m'aventurerai pas à répondre, au nom du gouvernement, à des questions hypothétiques.

Le sénateur Moore : Honorables sénateurs, aussi hypothétique que soit ma question, il s'agit quand même d'une lettre qui n'a rien d'hypothétique. C'est une lettre du secrétaire américain à la Défense aux sénateurs John McCain and Lindsey Graham. C'est très réel. On s'attend à ce que cela se produise. Je crois que nous devrions examiner la situation et décider de ce que nous ferons.

On ne peut nier que les coûts du F-35 sont tout à fait incontrôlés. Je n'ai rien vu dans les observations de madame le leader qui permette de croire qu'elle a décidé d'envisager le F-18 Super Hornet, comme d'autres gouvernements l'ont fait, y compris celui des États- Unis.

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je n'ai pas de commentaires à faire sur le contenu d'une lettre envoyée par M. Panetta à deux sénateurs américains. La seule chose que je puisse dire, c'est que je suis absolument sûre que les responsables du ministère de la Défense nationale suivent la situation de très près.

Le sénateur Moore : Madame le leader sera-t-elle prête à répondre à ces questions le 23 novembre?

Le sénateur LeBreton : Encore une fois, il n'est pas question que je prenne un engagement de ce genre. Je m'en tiens à ce que j'ai dit : nous suivons de très près la situation chez nos voisins du Sud.

Les affaires étrangères

La Convention sur les armes à sous-munitions

L'honorable Elizabeth Hubley : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Des dizaines de milliers de civils ont été tués ou blessés un peu partout dans le monde par des bombes à dispersion. En moyenne, un quart des victimes civiles déclarées sont des enfants.

Pour appuyer l'éradication de ces armes, le Canada a signé la Convention des Nations Unies sur les armes à sous-munitions le 3 décembre 2008, mais ne l'a pas encore ratifiée. Depuis, j'ai pris la parole ici à six reprises pour demander si le Canada comptait ratifier cette convention. Chaque fois, on m'a donné l'assurance que le gouvernement était déterminé à le faire et que la rédaction des mesures législatives nécessaires était en cours.

Comme cela fait maintenant près de trois ans que le Canada a signé la convention, est-ce que le leader peut nous dire quand nous pouvons nous attendre à recevoir le projet de loi de ratification?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je remercie madame le sénateur de la question. Elle ne sera sans doute pas satisfaite de la réponse parce que c'est la même que je lui ai donnée par le passé.

Le Canada a bien entendu, été l'un des premiers pays à signer la convention à Oslo en décembre 2008. Le travail visant la ratification est en cours. Comme les sénateurs le savent, le Canada n'a jamais ni produit ni utilisé d'armes à sous-munitions, et est en train de détruire la totalité de ses stocks. Je n'ai pas de réponse définitive à donner au sujet du moment où la convention sera ratifiée.

Le sénateur Hubley : Honorables sénateurs, j'attends avec impatience le dépôt du projet de loi. Je serai en particulier fort curieuse d'examiner en détail la mise en œuvre de l'article 21 de la convention concernant les dispositions d'interopérabilité.

Madame le leader peut-elle donner au Sénat l'assurance que le gouvernement étudie soigneusement les incidences de l'article 21 et que, dans le projet de loi attendu, l'interprétation ne sera pas inutilement élargie de façon à affaiblir la convention?

Le sénateur LeBreton : Je remercie madame le sénateur de sa question. Je vais devoir en prendre note pour obtenir des renseignements précis sur l'interprétation.

[Français]

Les ressources humaines et le développement des compétences

Le Conseil canadien sur l'apprentissage

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le 11 octobre dernier, le Conseil canadien sur l'apprentissage, dont le financement ne sera pas renouvelé à compter de 2012, a publié son rapport sur l'état des systèmes d'éducation des provinces canadiennes.

Le constat en est plutôt sombre. Le manque de volonté politique, la crainte de conflits intergouvernementaux et un manque de financement ont pour résultats un piètre niveau de littératie, une régression des résultats scolaires et un sérieux retard dans la recherche de pointe. De plus, ces facteurs affectent directement le niveau d'éducation et la compétitivité mondiale des Canadiens.

À la lumière des lacunes que soulève le rapport du Conseil canadien sur l'apprentissage, le gouvernement reconnaîtra-t-il enfin le caractère urgent de la situation et la nécessité d'exercer le leadership nécessaire dans l'élaboration d'une stratégie nationale sur l'apprentissage?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : J'ai dit très clairement par le passé que le Conseil canadien sur l'apprentissage est semblable à de nombreux autres programmes : il a un commencement et une fin, et ne peut pas durer éternellement.

Le conseil a reçu un financement ponctuel de 85 millions de dollars sur cinq ans en 2004. Par conséquent, son financement devait prendre fin en 2009. Notre gouvernement l'a prolongé d'un an, jusqu'à mars 2010.

Il est parfaitement inexact de dire que le financement a été coupé. Le conseil a disposé d'une enveloppe de financement de cinq ans, que nous avons portée à six ans.

[Français]

Le sénateur Tardif : Je crois que madame le leader n'a pas très bien compris ma question, qui ne portait pas nécessairement sur les compressions du financement au Conseil canadien sur l'apprentissage, mais plutôt sur une de ses recommandations.

L'absence d'une stratégie et d'un mécanisme de coordination national en matière d'éducation fait du Canada un cas unique, alors que des fédérations semblables, comme l'Australie, la Suisse et l'Allemagne sont pourvues d'un mécanisme fédéral permanent de planification ou d'un ministère fédéral de l'Éducation.

Étant donné le portrait plutôt sombre dépeint par le Conseil canadien sur de l'apprentissage, est-il vraiment sage pour le gouvernement de rester à l'écart des pays industrialisés en ne reconnaissant pas la nécessité d'adopter une stratégie nationale sur l'apprentissage?

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : J'ai parlé du Conseil canadien sur l'apprentissage parce que le sénateur Tardif l'avait mentionné auparavant et avait dit à tort que le financement avait été coupé.

De toute évidence, honorables sénateurs, l'éducation postsecondaire joue un grand rôle dans l'économie du pays. Le budget de 2011 permet de radier une partie des prêts d'études canadiens des omnipraticiens et des infirmières qui acceptent de travailler dans des collectivités rurales et isolées mal desservies. Le budget de 2011 double le montant exonéré du revenu en cours d'études, le faisant passer de 50 $ à 100 $ par semaine, ce qui aidera près de 100 000 étudiants. Le budget élimine en outre l'intérêt pour les étudiants à temps partiel pendant leurs études et facilite l'accès au Programme de bourses du Canada.

Dans le cas des métiers spécialisés, le budget rend admissibles au crédit d'impôt pour les frais de scolarité tous les frais d'examen des gens de métier et des professionnels. Environ 30 000 Canadiens devraient bénéficier de cette mesure. Nous avons également introduit le Programme canadien de bourses aux étudiants. Notre Programme d'aide au remboursement a aussi été utile à quelque 160 000 emprunteurs l'année dernière.

Les bourses sont maintenant exemptes d'impôt. Nous avons établi le crédit d'impôt pour les manuels et les outils. Nous aidons les jeunes à acquérir l'expérience professionnelle dont ils ont besoin. Comme les sénateurs le savent, nous avons augmenté en permanence de 10 millions de dollars le financement des emplois d'été, ce qui permet d'engager 3 500 étudiants de plus, de façon à porter le total à 40 000 emplois d'été pour les étudiants.

Le programme Objectif carrière aide les employeurs à offrir des stages aux diplômés récents. En 2010-2011, 2 800 diplômés ont pu en bénéficier. Le budget de 2011 prévoit 20 millions de dollars pour la Fondation canadienne des jeunes entrepreneurs.

Je crois, honorables sénateurs, qu'il est inexact de dire que le gouvernement n'a pas un plan national pour l'avancement de l'éducation dans notre société.

La justice

Les rapports sur les coûts des mesures législatives

L'honorable James S. Cowan (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, je voudrais revenir sur une question que j'ai posée pour la première fois au leader en octobre 2010. C'est une question que j'ai soulevée à la période des questions le 27 septembre ainsi que les 6 et 25 octobre de cette année. Elle concernait deux rapports payés, il va sans dire, par les contribuables et que le gouvernement a reçus en 2009. J'ai demandé que ces rapports soient déposés.

(1450)

Chaque fois, madame le leader a promis de consulter son collègue, le ministre de la Justice. Elle a dit, en septembre, qu'elle ferait le point à ce sujet après la pause de l'Action de grâce. Lorsque j'ai soulevé de nouveau la question le 25 octobre, madame le leader a encore une fois dit qu'elle consulterait le ministre.

Nous n'en n'avons plus entendu parler. La dernière fois que j'en ai parlé, j'ai signalé qu'un autre projet de loi sur la criminalité était à l'étude à la Chambre des communes. Nous en serons saisis. Nous nous attendons à ce que le gouvernement fasse pression sur les sénateurs pour qu'ils l'adoptent rapidement.

J'ai alors dit, et je le redis aujourd'hui, que nous ferons notre travail, qui est de bien étudier les mesures législatives dont nous sommes saisis, y compris les coûts qui y sont rattachés. Si le gouvernement s'attend à ce que nous traitions cette affaire rapidement, comme nous en avons l'intention, pourquoi madame le leader n'a-t-elle pas accédé à la demande répétée de déposer ici les rapports que son gouvernement retient depuis 2009?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je me suis effectivement engagée à consulter mon collègue, Rob Nicholson. Je l'ai fait et j'attends sa réponse.

Le sénateur Cowan : Combien de temps faudrait-il normalement au ministre Nicholson pour décider s'il va divulguer un document? Ne comprend-il pas que, en voyant cela, n'importe qui conclurait bien évidemment que le gouvernement ne divulgue pas le document parce que celui-ci contient de l'information qu'il ne veut pas rendre publique? La seule façon de prouver le contraire est de déposer le document. Combien faudra-t-il de temps au ministre pour décider s'il divulguera ou non le document?

Le sénateur LeBreton : Comme je l'ai mentionné, je consulterai le ministre de la Justice.

Réponses différées à des questions orales

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer la réponse à la question orale posée par l'honorable sénateur Hubley, le 15 juin 2011, concernant l'infrastructure et l'amélioration de la transmission d'électricité entre l'Île-du-Prince-Édouard et le Nouveau-Brunswick.

[Français]

Honorables sénateurs, j'ai également l'honneur de déposer la réponse à la question orale posée par l'honorable sénateur Sibbeston, le 22 juin 2011, concernant l'infrastructure, le projet de la route MacKenzie.

L'infrastructure

L'amélioration de la transmission d'électricité entre l'Île-du-Prince-Édouard et le Nouveau-Brunswick

(Réponse à la question posée le 15 juin 2011 par l'honorable Elizabeth Hubley)

Le gouvernement du Canada et le gouvernement de l'Île- du-Prince-Édouard ont discuté d'un éventuel projet de ligne de transmission d'électricité. Le gouvernement de l'Île-du-Prince- Édouard a identifié ce projet comme étant une priorité provinciale en vue d'un possible financement dans le cadre du Fonds pour l'infrastructure verte.

Le Fonds pour l'infrastructure verte est un fonds basé sur le mérite qui cible des projets qui améliorent la qualité de l'environnement et qui mènent à une économie plus durable à long terme. Infrastructure Canada étudie actuellement un certain nombre de propositions, dont cette proposition de projet, en vue d'affecter les fonds restants aux termes de ce programme.

Le gouvernement du Canada continue de collaborer avec la province de l'Île-du-Prince-Édouard relativement à sa demande de financement.

Les transports, l'infrastructure et les collectivités

Les routes des territoires du Nord-Ouest

(Réponse à la question posée le 22 juin 2011 par l'honorable Nick G. Sibbeston)

Le gouvernement du Canada effectue des investissements stratégiques dans les infrastructures, ce qui contribue à renforcer l'économie, à créer des emplois, à assainir l'environnement et à rendre les collectivités plus fortes et plus prospères. Dans le Budget 2011, le gouvernement a annoncé un financement de 150 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2012-2013, pour appuyer la construction d'une route toutes saisons entre Inuvik et Tuktoyaktuk, dans les Territoires du Nord-Ouest. Identifiée depuis longtemps comme une priorité par le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, cette route permettra de relier les Canadiens d'un océan à l'autre, grâce au prolongement de l'autoroute de Dempster jusqu'à la côte arctique. Elle permettra également de renforcer la présence canadienne dans l'Arctique et contribuera à la croissance économique et sociale du Nord.

Le gouvernement reconnaît les avantages importants que la route toutes saisons Inuvik-Tuktoyaktuk apportera sur le plan économique et social, et il reste engagé à collaborer avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, le secteur privé, l'Inuvialuit Regional Corporation et les collectivités locales pour appuyer ce projet.

Le gouvernement du Canada reconnaît que la route toutes saisons Inuvik-Tuktoyaktuk fait partie d'une initiative territoriale plus vaste qui consiste à terminer un axe routier toutes saisons de 1 000 km, entre Tuktoyaktuk et Inuvik, qui rejoigne le réseau routier des Territoires du Nord-Ouest, plus au sud, à Wrigley. En janvier 2010, dans le cadre d'un partenariat avec le gouvernement des Territoires du Nord- Ouest (GTNO), le gouvernement du Canada a alloué 3 millions de dollars pour l'achèvement d'un rapport de description de projet de 7 millions de dollars pour le tronçon Wrigley-Dempster.

Grâce à ses programmes d'infrastructure, en particulier le Financement de base pour les provinces et les territoires, le gouvernement du Canada a fait d'importants investissements dans le Nord. Nous sommes heureux que la mise en œuvre de ce programme dans les Territoires du Nord-Ouest soit une telle réussite et que l'affectation de 185,8 millions de dollars accordée aux T.N-O. au titre du Financement de base pour les P/T soit allouée à des priorités en matière d'infrastructure choisies par le gouvernement territorial.


ORDRE DU JOUR

Projet de loi d'harmonisation no 3 du droit fédéral avec le droit civil

Troisième lecture

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) propose que le projet de loi S-3, Loi no 3 visant à harmoniser le droit fédéral avec le droit civil du Québec et modifiant certaines lois pour que chaque version linguistique tienne compte du droit civil et de la common law, soit lu pour la troisième fois.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

[Traduction]

L'étude de la proposition relative aux frais d'utilisation

La sécurité publique—Adoption du cinquième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

Le Sénat passe à l'examen du cinquième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (proposition relative aux frais d'utilisation de la Commission des libérations conditionnelles du Canada, sans amendement mais avec des observations), présenté au Sénat le 3 novembre 2011.

L'honorable John D. Wallace propose que le cinquième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, qui traite de la proposition relative aux frais d'utilisation de la Commission des libérations conditionnelles du Canada soit adopté.

— Honorables sénateurs, j'aimerais aujourd'hui parler de ce rapport et en résumer certains des points essentiels. La proposition dont il est question a été soumise à cette Chambre et à notre comité par la Commission des libérations conditionnelles du Canada; il est question de faire passer de 150 $ à 631 $ les frais imposés pour le traitement d'une demande de pardon.

On propose d'augmenter les droits exigés pour le traitement des demandes de réhabilitation afin de recouvrer tous les frais associés à leur traitement, ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle.

Les droits actuels de 150 $ ne permettent pas, par exemple, de couvrir les coûts indirects liés au traitement des demandes de réhabilitation. Ils ne sont pas non plus suffisants pour couvrir les frais associés aux nouveaux critères prévus dans le projet de loi C- 23A et dont doit tenir compte la Commission des libérations conditionnelles du Canada lorsqu'elle examine les dossiers de délinquants ayant été trouvés coupables d'un acte criminel, ce qui fait que les coûts additionnels ne sont pas couverts par l'argent amassé grâce aux droits imposés pour présenter une demande de traitement, mais bien par celui des contribuables.

Dans son rapport, notre comité recommande que le Sénat approuve la proposition de la Commission des libérations conditionnelles du Canada, qui consiste à faire passer de 150 à 631 $ les droits actuels de traitement d'une demande de réhabilitation.

J'aimerais aussi attirer l'attention des sénateurs sur un autre élément, que notre comité voit évidemment comme une partie importante de son travail, même si notre tâche principale consistait à examiner cette proposition précise. En effet, quand nous nous penchons sur un sujet, si nous remarquons des occasions d'améliorer le système, nous trouvons très important d'en faire part aux personnes et aux instances concernées, dans le cas qui nous intéresse le ministre de la Sécurité publique, la Commission des libérations conditionnelles du Canada et, bien sûr, nos collègues du Sénat.

Cela dit, nous formulons un certain nombre d'observations dans notre rapport. Je le répète, ces observations ne se rapportent pas à la demande qu'a présentée la Commission des libérations conditionnelles, mais plutôt aux demandes futures et aux possibilités d'améliorer ou de bonifier le processus. Nous formulons plusieurs observations, et je vais en parler brièvement.

Premièrement, notre comité avait l'obligation d'examiner cette question en vue de formuler des recommandations quant aux frais d'utilisation appropriés. Dans le cadre du processus, la Commission des libérations conditionnelles était tenue d'identifier les éléments de coût en lien avec la demande. Ces derniers figuraient, bien sûr, dans la proposition.

Après avoir examiné la question et avoir réfléchi à certains témoignages que nous avions entendus, nous étions d'avis qu'il fallait, à l'avenir, présenter davantage de détails sur ces éléments de coût, notamment le calcul et la répartition des coûts, de manière exhaustive et détaillée. L'information de base fournie par la Commission des libérations conditionnelles dans ce cas-ci satisfaisait aux exigences de la loi, mais nous sommes d'avis que de l'information complémentaire et plus détaillée pourrait être utile à l'avenir.

Deuxièmement, la Loi sur les frais d'utilisation ne s'applique pas uniquement à la Commission des libérations conditionnelles, mais, dans ce cas-ci, il s'agit des frais facturés par ladite commission. Elle devait informer les clients et les autres organismes de réglementation qui ont une clientèle similaire de sa proposition relative aux frais d'utilisation, ce qu'elle a fait. La Commission des libérations conditionnelles a satisfait à cette exigence.

Cependant, comme les témoins au comité l'ont déclaré haut et fort, outre les clients, c'est-à-dire les contrevenants, d'autres personnes ont un intérêt à l'égard de ces questions. Selon le comité, l'avis devrait être diffusé à plus grande échelle et viser un plus grand public afin d'inclure non pas seulement ce groupe de citoyens intéressés, mais aussi ceux qui défendent les droits des victimes. Plus précisément, nous pensons que ceux qui s'intéressent à ces questions devraient être avisés de ces propositions.

(1500)

Troisièmement, la législation sur les frais d'utilisation exige la tenue d'une consultation entre, dans ce cas-ci, la Commission des libérations conditionnelles, les clients et les autres intervenants mentionnés dans la loi. Nous croyons qu'il serait utile de prévoir une période minimale de consultation dans la loi et que cette dernière devrait être modifiée en conséquence. À notre avis, une période minimale de 30 jours serait utile. Nous sommes conscients que le gouvernement sent une certaine pression pour faire avancer les choses rapidement. Toutefois, il est important de faire une consultation approfondie, d'où l'utilité d'une disposition imposant une période minimale de consultation.

Quatrièmement, comme je l'ai indiqué au départ, la proposition que nous avons étudiée repose sur un modèle de recouvrement complet des coûts, qui découle plus particulièrement du projet de loi C-23A de la législature précédente. Ce projet de loi ajoute de nouveaux critères, dont la commission doit tenir compte dans le cas des infractions punissables par mise en accusation. Il s'agit de veiller à ce que les frais d'utilisation couvrent tous les coûts directs et indirects.

Certaines personnes sont reconnues coupables d'infractions punissables par voie de déclaration sommaire de culpabilité et d'autres sont reconnues coupables d'infractions punissables par mise en accusation. Toutes les infractions sont graves, mais les infractions punissables par mise en accusation le sont encore plus que les autres. La commission doit consacrer plus de temps et d'argent à l'examen des demandes pour ce genre d'infraction. Dans le cadre d'un modèle de recouvrement complet des coûts, nous pensons qu'il serait possible de partager les frais d'utilisation exigés pour recouvrer ces coûts entre les personnes qui présentent une demande de réhabilitation dans le cas d'une infraction punissable par mise en accusation et celles qui présentent une telle demande dans le cas d'une infraction punissable par voie de déclaration sommaire de culpabilité.

Selon les témoignages que nous avons entendus, il semble que les coûts liés au traitement des demandes d'individus reconnus coupables par voie de mise en accusation seraient plus élevés, considérablement plus d'ailleurs, que pour les demandes présentées par des individus reconnus coupables par voie de procédure sommaire. Ce n'est peut-être pas la façon de le dire mais, compte tenu de cette différence, nous estimons que les demandeurs reconnus coupables par voie de procédure sommaire ne devraient pas subventionner, pour ce qui est des frais d'utilisation, les demandeurs condamnés par voie de mise en accusation. Partant, nous recommandons que le ministre de la Sécurité publique et la Commission des libérations conditionnelles examinent sérieusement les avantages d'une structure de frais à deux niveaux. Si, au terme d'un examen approfondi de la répartition des coûts entre les deux groupes de demandeurs, on constate une différence minimale, il faudrait peut-être alors opter pour des frais d'utilisation uniques. Toutefois, si la différence est substantielle, il serait peut-être approprié de mettre en place une structure de frais à deux niveaux.

La cinquième observation du comité porte sur les demandeurs condamnés par voie de procédure sommaire qui demandent à être réhabilités. Certains témoins ont déclaré que, pour certaines personnes, le processus peut être compliqué et lourd. Cela dit, je signale, à la décharge de la Commission des libérations conditionnelles, que celle-ci a une ligne sans frais 1-800 et que ses agents tentent d'aider le mieux possible les personnes à remplir leur demande. Des témoins nous ont dit que de nombreux demandeurs, peut-être la majorité, doivent retenir les services de consultants pour les aider dans ce processus et dans le traitement des formalités administratives. Il peut en coûter de 450 $ à 1 000 $ par demande. Nous croyons que la Commission des libérations conditionnelles et le ministre pourraient peut-être voir s'il est possible de rationaliser — je ne dirai pas simplifier — la procédure pour les demandeurs condamnés par voie de procédure sommaire afin qu'elle soit plus accessible et moins coûteuse. On suivrait encore un modèle de recouvrement intégral des coûts puisque l'ensemble des coûts seraient répartis entre les deux groupes de demandeurs précités.

Honorables sénateurs, c'était là les cinq observations du comité. Dans la conclusion de son rapport, le comité demande que le ministre et la Commission des libérations conditionnelles lui fassent part, d'ici un an, de leur réaction à ces cinq observations.

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, le sénateur Wallace accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Wallace : Oui.

Le sénateur Segal : Dans la ville de Kingston, il y a beaucoup de familles dont un membre est incarcéré aux frais de Sa Majesté dans un établissement fédéral ou provincial. Lorsque ces personnes sortent de prison, elles travaillent très fort pour rebâtir leur vie. Manifestement, ces efforts méritoires justifient qu'elles demandent à être réhabilitées, une fois que le délai prévu est écoulé. Dois-je conclure que le comité du sénateur accepte que les gens qui ont de l'argent aient plus facilement accès à la réhabilitation que ceux qui n'en ont pas? De plus, compte tenu de l'information fournie au comité, le coût correspond-il vraiment aux dépenses réelles engagées dans ce genre de procédure? Les frais administratifs sont-ils excessifs et sont-ils voués à augmenter inéluctablement au fil du temps suivant le raisonnement que quelqu'un d'autre paie de toute manière?

Sachant à quel point le sénateur et ses collègues du comité sont soucieux de se montrer équitables envers tout le monde, il me semble qu'ils ne devraient pas facilement accepter que seulement les personnes un peu plus à l'aise financièrement puissent faire une demande de réhabilitation.

Le sénateur Wallace : Honorables sénateurs, cela va sans dire, mais il est important de le souligner.

La réhabilitation a une très grande valeur pour le délinquant. Sans réhabilitation, certains emplois lui sont interdits. Manifestement, elle lui est bénéfique, et notre société veut que les gens puissent progresser dans leur vie. La réhabilitation est bénéfique aussi pour la société, car, si le délinquant ne peut pas travailler, il dépend du filet de sécurité sociale pour vivre. C'est avantageux pour tout le monde.

Nous avons entendu des témoins défendre les deux points de vue. Des groupes représentant les délinquants nous ont dit que le coût serait difficile à assumer pour certains et serait même prohibitif. En revanche, les représentants des victimes et d'autres personnes sont d'avis que le coût de la réhabilitation fait partie des responsabilités que le délinquant doit assumer pour se racheter. Il doit reconnaître sa responsabilité, payer, et passer à autre chose.

Tout le monde n'a pas les mêmes moyens financiers. Cependant, un argument m'a particulièrement interpellé dans les témoignages que nous avons entendus. Les demandes de réhabilitation peuvent être faites trois, cinq ou 10 ans après la remise en liberté. La réhabilitation ayant une grande valeur pour le délinquant, il devrait prévoir en conséquence. Par exemple, si une personne fait une demande de réhabilitation au bout de cinq ans, les frais de 600 $ équivalent à seulement 10 $ par mois pendant cette période. Des témoins nous ont dit que, vu sous cet angle, le coût de la demande de réhabilitation devrait être abordable. Quoi qu'il en soit, la majorité des membres du comité ont accepté ce coût.

Le sénateur Segal : Le sénateur peut-il garantir aux honorables sénateurs que les frais ne continueront pas d'augmenter à mesure qu'augmentent les coûts généraux et n'atteindront pas un niveau tel qu'une personne qui a purgé sa peine dans une des prisons de Sa Majesté, qui s'est suffisamment bien comportée pour mériter d'être libérée à la fin de sa peine ou d'obtenir la liberté conditionnelle, qui travaille dans la collectivité et dont le comportement est irréprochable, devra, lorsqu'elle fait sa demande, soit assumer le coût des excès bureaucratiques, soit purger, en quelque sorte, une peine supplémentaire parce que la bureaucratie n'a pas bien géré les fonds mis à sa disposition, sans que cette personne n'ait fait quoi que ce soit de mal depuis sa mise en liberté alors qu'elle essayait de reconstruire sa vie?

(1510)

Le sénateur Wallace : Je remercie le sénateur de sa question.

Premièrement, je suis certain que le sénateur Segal comprend que je ne puis prendre la parole devant les sénateurs et me prononcer quant aux demandes que la Commission des libérations conditionnelles du Canada transmettra au ministre de la Sécurité publique à l'avenir. Je ne peux bien évidemment pas me prononcer à ce sujet. Cependant, je suis en mesure de réitérer ce que j'ai dit plus tôt, soit que les membres du comité étaient conscients du coût des demandes de réhabilitation. C'est justement un des facteurs importants qui ont motivé nos observations.

À notre avis, il faut harmoniser le système. Nous pourrions, par exemple, améliorer les services fournis aux personnes qui appellent le numéro sans frais de façon à ce qu'elles puissent remplir leurs demandes toutes seules. Nous voulons réduire les coûts et faire en sorte que les gens aient les moyens de faire une demande de réhabilitation. Je suis tout à fait d'accord.

L'honorable Jim Munson : Honorables sénateurs, à propos du recouvrement de coûts, j'aimerais savoir si le gouvernement a donné une raison au sénateur de penser que... désolé.

Son Honneur le Président : Le temps de parole du sénateur Wallace est écoulé.

Le sénateur Tardif : Nous aimerions qu'on nous accorde cinq minutes de plus.

Son Honneur le Président : Acceptez-vous de les lui accorder?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Wallace : Oui, cinq minutes.

Le sénateur Munson : J'aimerais poser rapidement deux questions sur le fait qu'on envisage réellement d'instaurer un système à deux niveaux.

Premièrement, le sénateur a-t-il eu une quelconque indication que le gouvernement va bel et bien envisager d'instaurer le système de tarif à deux niveaux qui a été recommandé? Je crois que cette question a d'abord été soulevée du côté du sénateur, par le sénateur Runciman.

Deuxièmement, le modèle de recouvrement de l'intégralité des coûts m'intrigue. J'en ai d'ailleurs parlé au comité. S'agira-t-il d'un guide pour tous les autres modèles de recouvrement de l'intégralité des coûts, par exemple ceux liés à l'obtention d'un passeport?

Le sénateur Wallace : Honorables sénateurs, il est évident que je ne peux pas formuler de commentaires s'il est question de demandes qui ne sont pas liées à la Loi sur les frais d'utilisation; je m'abstiendrai donc de commenter.

Il ne fait aucun doute pour moi que le gouvernement et le ministre savent pertinemment qu'il faut maîtriser les coûts. Le principe fondamental de la demande dans sa forme actuelle est d'attribuer les coûts, et, dans ce cas, il s'agit de les attribuer à ceux qui bénéficient de la réhabilitation. Je suis convaincu qu'un système à deux niveaux, qui pousse ce principe un peu plus loin et traite différemment les personnes reconnues coupables par voie de mise en accusation et les personnes reconnues coupables par voie de procédure sommaire, sera examiné sérieusement.

L'honorable Joan Fraser : Honorables sénateurs, je veux remercier le sénateur Wallace d'avoir, comme à l'habitude, si bien parlé de notre travail en fournissant une réponse complète et réfléchie à la question. Le sénateur ne tient pas de propos extrêmes, ce qui est probablement une très bonne chose, mais je ne peux pas dire que je suis toujours ses traces à cet égard.

Comme le sénateur Wallace l'a dit, cette proposition se traduira par une augmentation des frais associés à une demande de réhabilitation, qui s'élèveront maintenant à 631 $. Il y a moins d'un an, moins de 11 mois que ces frais sont passés de 50 $ à 150 $, et maintenant, ils augmenteront pour atteindre 631 $, une somme quatre fois plus élevée que celle que je viens tout juste de mentionner. De ces 631 $, environ 400 $ découlent des nouveaux critères que la Commission des libérations conditionnelles du Canada doit maintenant respecter à cause du projet de loi C-23A, lequel a grandement intensifié les exigences imposées à la commission en ce qui concerne la rigueur avec laquelle elle doit évaluer les demandes. Comme le sénateur Wallace l'a indiqué, cette somme de 631 $ correspond en fait au coût moyen de traitement d'une demande de réhabilitation; elle ne correspond pas au coût d'une demande de réhabilitation donnée. Il s'agit d'une moyenne.

[Français]

Il faut signaler tout de suite que notre comité a pleinement accepté le principe qu'un pardon n'est pas un droit. Personne n'a droit à être pardonné dans notre système. Toutefois, il est intéressant qu'on ait eu au moins un témoin qui a indiqué qu'il y aurait peut-être un droit à l'accès équitable au processus de demande de pardon. On n'a eu qu'un seul témoin qui en a parlé. On n'a pas vraiment exploré le sujet, mais il serait intéressant quand même de le faire.

[Traduction]

Si le pardon — ou la réhabilitation — n'est pas un droit, il est assurément, comme le sénateur Wallace l'a dit, un avantage pour la personne qui en fait la demande et l'obtient peut-être, et pour la société dans son ensemble. La raison d'être de la réhabilitation est la réinsertion sociale correcte d'anciens délinquants comme membres productifs, constructifs et engagés de la société. Dans bien des cas, c'est la réhabilitation qui leur permet cette réinsertion complète, qui leur permet de trouver un emploi ou de faire les études nécessaires pour devenir ce que nous voudrions que soient tous les Canadiens : productifs, constructifs, engagés dans la société. Chose curieuse, l'analyse des coûts et avantages réalisée par la Commission des libérations conditionnelles du Canada n'a pas tenté de quantifier l'avantage de la réhabilitation pour la société.

Nous n'avons pas reçu toute l'information que nous aurions souhaitée, mais on nous en a donné beaucoup. On nous a notamment communiqué de l'information sur les consultations que la commission a menées, comme elle y est tenue par la loi. Je dois dire que je ne me souviens pas d'avoir vu des données de consultation aussi — je me permets d'employer un mot très fort — accablantes que les réponses suscitées par ces consultations.

Le grand public a été consulté par Internet, au fond, et il y a eu 1 086 réponses, dont seulement 12 appuyaient cette majoration des frais. Toutes les autres étaient défavorables. Ceux qui ont appuyé la proposition ont dit que toute personne qui commet un crime devrait avoir à assumer les frais associés au traitement de sa demande de réhabilitation et que le programme de réhabilitation ne devrait pas être financé par des citoyens et contribuables qui respectent les lois et qui travaillent fort pour gagner leur vie.

Les 1 074 personnes qui n'ont pas appuyé la hausse ont estimé qu'il s'agirait d'un fardeau financier pour les demandeurs, et que plusieurs d'entre eux ne seraient pas en mesure d'assumer le montant proposé; que cela rendrait difficile, voire impossible, l'obtention de la réhabilitation dont certaines personnes ont besoin pour se trouver un emploi ou poursuivre leurs études; qu'il s'agirait d'une pénalité qui viendrait s'ajouter à la peine déjà imposée par le tribunal.

Les ONG ont été consultées. Elles ont dit essentiellement la même chose, soit que l'augmentation proposée semblait contraire aux objectifs de la réhabilitation et de la sécurité publique, que la majoration des frais proposée était considérée comme punitive et que les demandeurs avaient déjà payé leur dette à la société en purgeant leur peine et en s'abstenant de tout crime pendant le nombre voulu d'années, soit de trois à 10 ans, comme le sénateur Wallace l'a dit, avant même de présenter leur demande.

Des ministères et des organismes du gouvernement ont été consultés, comme la GRC, le ministère de la Justice et l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels. Ils ont dit eux aussi qu'une forte augmentation constituerait une charge financière et un obstacle pour bien des demandeurs qui cherchent à réintégrer la société. Selon eux, cette augmentation risquait de nuire aux femmes et aux Autochtones, ajoutant qu'une annulation des frais pourrait être envisagée dans certains cas. Ils ont aussi évoqué la possibilité que cette hausse donne lieu à des contestations fondées sur la Charte.

Outre ces consultations, la commission a aussi reçu des plaintes. Aux termes de la loi, lorsqu'une plainte est reçue au sujet de frais d'utilisation, il faut mettre sur pied un comité consultatif indépendant. Il y en a eu un, effectivement, et il comprenait bien entendu un représentant du gouvernement. Les recommandations du comité n'ont pas toutes été unanimes, mais en voici certaines qui l'étaient : que la Commission des libérations conditionnelles du Canada maintienne les frais au montant actuel, soit 150 $, et que le gouvernement fournisse des ressources suffisantes pour assumer les coûts qui excèdent ce montant; que le gouvernement revoie la loi afin d'y ajouter un mécanisme permettant d'annuler les frais pour les demandeurs défavorisés ou à faible revenu tout en assurant un financement suffisant; que pour l'examen préliminaire de chaque demande, et j'aurais cru que cela allait de soi, des frais de seulement 50 $ soient exigés au lieu du montant intégral de 631 $. Voilà qui tombe sous le sens, d'autant plus qu'environ 40 p. 100 des demandes sont rejetées pour des raisons de forme, comme le fait que le formulaire n'est pas rempli correctement, avant même que le fond de la demande ne soit étudié. Enfin, le comité consultatif indépendant a recommandé à l'unanimité que le gouvernement ne fonde pas ses pratiques sur le principe du recouvrement des coûts.

(1520)

Une chose curieuse, signalée par le sénateur Wallace, c'est que les victimes de crime ou leurs représentants n'ont pas été consultés. Comme le sénateur l'a dit, nous avons entendu au comité des représentants des victimes de crime qui ont soutenu fermement, et on peut le comprendre, qu'ils auraient dû participer aux consultations. Il nous est facile à tous de comprendre pourquoi ils éprouvent ce sentiment bien que, à strictement parler, les victimes n'ont pas un intérêt direct à l'égard de ce processus, qui porte sur la réhabilitation, et non sur la victimisation.

Cela m'a fait songer à une chose qui est devenue de plus en plus claire au cours de nos travaux, soit le problème du sens du terme « pardon », qui veut dire clémence ou absolution. Il y a un problème à confier à un organisme de l'État la capacité de pardonner. À de très rares exceptions près, le pardon n'est pas l'affaire de l'État; c'est une question très personnelle. Par conséquent, les honorables sénateurs seront tous étonné d'apprendre l'existence d'un certain élément que j'approuve dans le projet de loi C-10, maintenant à l'étude aux Communes, mais qui nous sera sans doute bientôt renvoyé. Ce projet de loi élimine le terme « pardon » en anglais et le terme « réhabilitation » en français pour les remplacer par « record suspension » ou « suspension de casier », ce qui se compare du reste à ce qui se dit dans bien d'autres administrations. Il me semble utile de préciser les notions en jeu. Nous ne parlons pas de pardon, mais de gens qui ont gardé leur casier impeccable pendant le nombre d'années voulu et souhaitent avoir la possibilité de participer plus pleinement à la vie de la société.

Comme le sénateur Munson l'a fait remarquer, c'est le sénateur Runciman qui, dans nos audiences, a rappelé le premier, et avec le plus d'insistance, une idée élémentaire : il n'est pas juste d'imposer les mêmes frais très élevés à quelqu'un qui a été condamné par procédure sommaire pour une peccadille, comme de passer un joint à quelqu'un quand il avait 19 ans, et à quelqu'un qui s'est rendu coupable d'un crime horrible, comme l'homicide involontaire. Bien sûr, il n'y a pas de pardon pour le meurtre. Toutefois, au bout de 10 ans, l'auteur d'un homicide involontaire peut présenter une demande. Pourquoi ces gens dont la demande impose une charge de travail bien différente à la Commission des libérations conditionnelles du Canada devraient-ils payer les mêmes frais?

[Français]

Par conséquent, le comité a recommandé que le ministre et la commission étudient sérieusement la possibilité d'établir une structure de frais d'utilisation à deux niveaux. Un délinquant reconnu coupable, par voie de mise en accusation, ne paierait pas les mêmes frais qu'un délinquant reconnu coupable par voie de procédure sommaire. Il semble y avoir là un élément de justice fondamentale élémentaire et j'espère que le gouvernement fera suite à notre observation à ce sujet.

Nous n'avons malheureusement pas pu faire de recommandation sur les niveaux de frais appropriés étant donné, comme l'honorable sénateur Wallace l'a indiqué, que nous ne disposions pas des chiffres nécessaires. La commission nous a dit que les chiffres n'étaient pas disponibles.

[Traduction]

Je crois fermement que les chiffres peuvent être obtenus, qu'ils devraient être obtenus le plus tôt possible et que notre comité aurait dû y avoir accès pour faire son travail.

Il y a d'autres mesures que, personnellement, j'aurais aimé voir. J'aurais bien aimé qu'il y ait une disposition d'exonération des droits dans le cas des demandeurs dont le revenu est très faible, comme par exemple les personnes qui touchent des prestations sociales, ou quelque chose comme une avance remboursable, semblable aux prêts étudiants, qui pourrait couvrir le coût d'une demande de réhabilitation dans le cas des personnes qui sont de toute évidence dans le besoin.

Des témoins nous ont dit que pour certaines personnes, notamment celles qui ont besoin de l'aide sociale, il sera extrêmement difficile, voire impossible d'économiser 631 $. En effet, dans certains territoires, le simple fait d'économiser cet argent entraînerait la réduction ou la récupération des prestations d'aide sociale, ce qui semble aller tellement à l'encontre du but visé qu'il est pratiquement impossible de comprendre la logique de cette mesure.

Pour répondre à la question du sénateur Segal, il semblerait que ce soit presque le coût réel. Selon les renseignements dont nous disposons, tous les représentants du gouvernement qui ont été consultés et qui comprennent ces choses disent que l'établissement des coûts a été fait de façon impeccable et conformément aux directives du Conseil du Trésor. Toutefois, quelque 90 $ en coûts indirects n'ont pas été pris en compte.

Les coûts vont-ils continuer à grimper? C'est difficile à dire. D'autres mesures législatives vont imposer de nouvelles exigences à la Commission des libérations conditionnelles du Canada. Cela dit, si la commission donnait suite à notre recommandation de simplifier ses processus, elle pourrait économiser beaucoup d'argent, surtout si elle optait pour un système à deux niveaux qui serait bien conçu.

Honorables sénateurs, je signale que M. Thomas, représentant de la Fédération canadienne des contribuables, organisme qui ne fait certainement pas partie de la brigade des cœurs sensibles, nous a dit qu'il n'essaierait jamais de remplir le formulaire de demande de réhabilitation de la commission, parce que ce document est trop complexe, et que c'est un peu comme remplir une déclaration de revenus lorsqu'on a des choses compliquées à déclarer

Honorables sénateurs, vous aurez deviné que la recommandation selon laquelle le droit devrait être porté à 631 $ n'a pas fait l'unanimité. Toutefois, le comité a voté et la proposition a été adoptée. Par conséquent, lorsque nous sommes arrivés aux observations, nous avons travaillé fort pour formuler des observations auxquelles nous pouvions tous souscrire, compte tenu du vote qui avait déjà été tenu. À mon avis, les observations que nous avons annexées à notre rapport renferment des suggestions très sensées pour le gouvernement et pour la Commission des libérations conditionnelles du Canada. Je regrette que nous en soyons là où nous sommes, mais, comme le sénateur Wallace l'a laissé entendre, j'espère que les choses iront en s'améliorant.

[Français]

L'honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Effectivement, le travail du comité fut ardu et sérieux. Nous avons appris des choses intéressantes, que j'ignorais, malgré le fait que j'œuvre dans ce domaine depuis presqu'une décennie. Entre 97 et 99 p. 100 des gens qui demandent un pardon l'obtiennent. Ce taux est très élevé.

J'ai été surpris également d'apprendre que, en 2001, 9 p. 100 des criminels faisaient une demande de pardon par le biais d'une firme privée. En 2010, on estimait ce chiffre à 75 p. 100.

[Traduction]

Son Honneur le Président intérimaire : Je suis désolé, mais je dois faire savoir au sénateur Fraser que le temps de parole dont elle disposait est écoulé.

Le sénateur Fraser : Puis-je avoir encore cinq minutes?

Son Honneur le Président intérimaire : Acceptez-vous d'accorder plus de temps, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Son Honneur le Président intérimaire : S'il vous plaît, continuez.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : En 2010, environ 75 p. 100 des personnes qui ont demandé un pardon ont versé jusqu'à 1 000 $ à des firmes privées pour traiter leur dossier. Or, le gouvernement fédéral offre ce service gratuitement. On peut voir une contradiction entre le fait de contester une augmentation des coûts et la payer en grande partie.

Le témoignage qui nous a le plus surpris est celui de Sheldon Kennedy. Vous connaissez cette histoire. Il s'agit du joueur de hockey qui a été victime d'abus sexuel par son entraîneur pendant quelques années. Dans son témoignage très touchant, il indiquait que, dans le fond, il faudrait traiter les criminels et les victimes sur un même pied d'égalité. Les victimes ont très peu de compensation dans notre système. Les criminels, s'ils sont incarcérés et travaillent, reçoivent un salaire; s'ils étudient, ils reçoivent un salaire. Les victimes, elles, sont souvent oubliées.

M. Kennedy a demandé ceci, et c'est l'objet de ma question : le fait de payer entièrement le coût d'un pardon n'est-il pas, pour le criminel, la dernière étape de sa responsabilisation à l'égard du crime commis envers la société — ce qu'on appelle payer sa dette à la société et aussi envers la victime?

(1530)

Le fait que le criminel assume tous les coûts ou la majorité des coûts n'est pas une façon de le responsabiliser.

Le sénateur Fraser : C'est un point de vue plus que légitime. Ce n'est pas exactement mon point de vue. Tous les membres du comité ont accepté, aux fins de nos observations, le principe de plein recouvrement des coûts, mais peut-être pour diverses raisons. Certains, comme le sénateur Boisvenu sans doute, pensant que c'est la dernière étape de responsabilisation de la personne qui demande le pardon. D'autres, comme moi, l'ont accepté surtout à la lumière des compressions budgétaires que nous vivons en ce moment. Je peux accepter facilement l'idée que ce n'est pas là la priorité pour un gouvernement qui doit essayer de contrôler les coûts en général, ce qui est le cas actuellement.

Toutefois, un des problèmes est que les victimes de crimes sont souvent cicatrisées pour le reste de leur vie, c'est certain. Très souvent, même aujourd'hui, alors que la situation a progressé, les victimes sont oubliées au début du processus, au moment du procès du criminel, de la personne qui aura commis le crime. À un moment donné, leur implication devient beaucoup moins pertinente que l'implication de la société en général et c'est la raison pour laquelle, si nous n'avions pas ce problème budgétaire, j'aurais accepté l'idée, que puisqu'un pardon ou une suspension de dossier confère un bénéfice ou un avantage pour la société en général, que la société en général puisse aussi défrayer une partie, pas tout, mais une partie des coûts de ce pardon.

L'honorable Pierre Claude Nolin : Dans sa question, le sénateur Boisvenu a soulevé le point du « dédommagement aux victimes ». Afin de compléter la réponse fort éloquente que le sénateur Fraser a donnée, madame le sénateur peut-elle me dire si le comité a été informé que, dans certaines provinces — à tout le moins au Québec, même s’il ne s’agit pas d’une compensation équivalente à la compensation accordée aux victimes au niveau provincial —, on attribue des fonds aux victimes « en compensation » du tort qui leur a été causé? Le comité en a-t-il été informé?

Le sénateur Fraser : Il s'agit là d'un très bon point. Le comité en a déjà été informé pour d'autres études. Cette fois-ci, pas tellement, non, mais il est évident que cela fait partie du tableau général, que nous devons prendre en considération lorsque nous faisons des études comme celle-ci. C'est le cas dans certaines provinces, mais pas dans toutes. C'est une des difficultés à auxquelles nous sommes confrontés lorsque nous essayons de trouver un système équitable pour tous.

[Traduction]

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, je voudrais poursuivre le débat, d'autant plus que la question que le sénateur Segal a soulevée correspond à une préoccupation que j'ai exprimée devant le comité. J'ai participé aux réunions du comité chargé d'examiner la question.

J'ai écouté attentivement les experts et les témoins, tant ceux qui ont défendu le point de vue des groupes de victimes que ceux qui représentaient les délinquants. En quittant le comité et au moment du vote sur le rapport que le sénateur Wallace a si éloquemment recommandé dans son intervention d'aujourd'hui, une préoccupation m'est restée en tête. Elle a trait au groupe de délinquants qui se retrouvent tout au bas de la société, et qui est composée principalement d'Autochtones, qui sont surreprésentés dans notre système pénitentiaire, tout comme le sont les femmes. La plupart de ces délinquants ne se retrouvent pas dans les 75 p. 100 mentionnés par le sénateur Boisvenu qui ont les moyens de faire appel à une entreprise privée et de payer et pour les frais de la demande et pour les services des conseillers qui remplissent leurs formulaires. Comme le sénateur Fraser l'a mentionné, même le représentant de la Fédération canadienne des contribuables ne voudrait pas avoir à remplir ces formulaires. En d'autres mots, les formalités administratives sont assez lourdes. Nous avons, à toutes fins utiles, recommandé au comité d'alléger ces formalités administratives, particulièrement dans le cas des délinquants qui sont condamnés pour méfait ou en vertu de procédures simples.

Je rappelle aux sénateurs que plus de trois millions de Canadiens ont un casier judiciaire. C'est 10 p. 100 de tous les Canadiens. Nous ne parlons pas que de deux ou trois personnes, mais d'un grand nombre de Canadiens qui, à un moment donné dans leur vie, sont confrontés à la nécessité d'intégrer pleinement la société et de suivre les formalités de demande de pardon.

Bien sûr, on trouve parmi eux des gens qui n'ont pas de grands moyens, qui vivent de l'aide sociale ou qui n'ont aucune forme d'aide pour réintégrer pleinement la société, ce qui leur permettra de vivre ensuite une vie normale. Il incombe à ces gens de demander leur réhabilitation, mais il nous incombe à nous de déterminer les conséquences d'une hausse des frais qui les porterait à 600 $ — ou 631 $.

Au comité, j'ai suggéré que nous demandions au ministère de vérifier l'effet de cette hausse sur le nombre de demandes de réhabilitation pour les années à venir et de déterminer s'il faudrait corriger le problème, advenant que des gens soient injustement lésés.

Cela me préoccupe, parce qu'on nous a dit, au comité, que l'Ontario a un service d'aide aux assistés sociaux mais que, au Manitoba, on détermine les besoins au cas par cas. À Terre-Neuve-et-Labrador ainsi qu'au Nouveau-Brunswick, un tel service est aussi accessible pour ceux qui touchent une aide au revenu, mais il n'y a rien de tel en Colombie-Britannique, en Alberta et dans les Territoires du Nord-Ouest.

Autrement dit, la situation des intéressés diffère selon leur lieu de résidence. Dans certaines provinces, une personne qui vit de l'aide sociale bénéficiera d'une certaine assistance, mais ce ne sera pas le cas dans d'autres provinces. Dans certaines provinces, l'aide est conditionnelle et toutes sortes de variables entrent en jeu.

L'Association du Barreau canadien a écrit au comité, et j'aimerais faire connaître son point de vue aux sénateurs concernant cette catégorie de personnes. Je cite son mémoire daté du 18 octobre 2011.

La procédure d'octroi d'une réhabilitation n'est ni rapide, ni facile. Il est possible que même des frais modiques puissent empêcher certaines gens d'en faire la demande. L'iniquité sur le plan financier ne devrait pas servir de fondement pour entraver l'obtention d'une réhabilitation pour ceux et celles qui ont très peu de ressources financières ou qui n'en ont pas. La hausse de frais proposée, qui ferait en sorte que ces derniers s'élèvent à quatre fois le montant des frais actuels, pourrait effectivement empêcher ceux et celles qui ont le plus besoin d'une réhabilitation (par exemple, pour obtenir un emploi) d'en faire la demande. Nous proposons, au contraire, que ces frais ne soient pas exigés des demandeurs indigents. Si le traitement de certains types de demandes de réhabilitation est plus coûteux, un régime de frais à différents volets pourrait s'avérer une solution juste, dans la mesure où il y a possibilité de ne pas exiger de frais des demandeurs qui ont très peu de ressources financières.

Autrement dit, c'est un motif de préoccupation majeure même pour le Barreau. Cette préoccupation a aussi été clairement exprimée dans la recommandation no 2 du comité consultatif, qui faisait remarquer que, en vertu de la Loi sur les frais d'utilisation, la Commission des libérations conditionnelles devait étudier l'augmentation proposée et formuler des recommandations.

(1540)

J'aimerais citer la recommandation no 2 du comité consultatif :

Comme la loi actuelle ne permet pas à la Commission des libérations conditionnelles du Canada de modifier les frais d'utilisation selon la situation économique individuelle des demandeurs, il est recommandé que le gouvernement revoie la législation afin de prévoir un mécanisme de dispense des frais pour les demandeurs à faible revenu, tout en maintenant un financement adéquat à la CLCC.

Autrement dit, honorables sénateurs, la société civile se préoccupe des répercussions de ces augmentations. J'ai suggéré à mes collègues du comité que nous devrions demander à la Commission des libérations conditionnelles du Canada d'étudier si ces augmentations influeraient sur la capacité des membres des groupes défavorisés, qui sont principalement des Autochtones et des femmes, à s'intégrer pleinement à la société.

Malheureusement, une majorité des membres du comité se sont opposés à ma suggestion. Je me sers de mes privilèges en tant que sénateur pour vous faire part de cette préoccupation. Il est très important de le faire parce que cette mesure pourrait faire l'objet d'une contestation judiciaire en vertu de l'article 3 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, qui dit ceci :

Pour l'application de la présente loi, les motifs de distinction illicite sont ceux qui sont fondés sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l'âge, le sexe, l'orientation sexuelle, l'état matrimonial, la situation de famille, l'état de personne graciée ou la déficience.

Autrement dit, comme le sénateur Fraser l'a mentionné, la réhabilitation n'est pas un droit, mais tous les Canadiens devraient y avoir un accès égal. Si on enlève à une personne la possibilité d'être réhabilitée et qu'on lui fait subir de la discrimination parce qu'elle possède un casier judiciaire, cela pourrait, à mon humble avis, donner lieu à une contestation judiciaire.

La contestation judiciaire pourrait également être fondée sur l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui dit que la loi doit s'appliquer également à tous. Quand une personne ne peut pas obtenir sa réhabilitation ou être protégée contre la discrimination en raison de frais, je pense qu'elle peut intenter des poursuites devant les tribunaux.

Ce n'est peut-être pas la dernière fois que nous entendons parler de l'augmentation des frais si on ne les module pas et qu'un groupe de Canadiens ne peut pas accéder au système. Nous savons qui sont ces personnes. Je regarde mon collègue le sénateur St. Germain, qui comprendra sans peine que, pour une personne habitant dans une réserve, il est difficile de remplir le formulaire de demande de réhabilitation, surtout lorsqu'elle ne dispose pas des 600 $ nécessaires. Comment peut-on s'attendre à ce qu'une personne qui est pratiquement illettrée remplisse un formulaire comptant un certain nombre de pages pour demander sa réhabilitation et, de surcroît, soit capable de payer 650 $? Nous devons nous en inquiéter.

En entendant nos témoins, je me suis dit que la majorité des membres du comité devaient réfléchir à cette objection bien réelle. Bien entendu, nous pouvons nous bander les yeux comme la déesse de la justice et faire semblant que le problème n'existe pas, mais il existe bel et bien. Pour ma part, je crains que, dans les années à venir, la Commission des libérations conditionnelles du Canada ne nous remette un rapport nous montrant les conséquences de ce problème et nous invite à améliorer le système dans le sens de ce que préconise le sénateur Segal.

Le sénateur Segal : Puis-je poser une question à mon collègue?

Le sénateur a parlé de la proportion de 10 p. 100 de Canadiens qui ont un casier judiciaire. Par ailleurs, au cours des travaux du Comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, sous la présidence à l'époque du sénateur Eggleton, nous avons parlé d'une autre proportion de 10 p. 100, soit celle des Canadiens qui vivent sous le seuil de la pauvreté. Ce ne sont pas nécessairement les mêmes Canadiens. Cependant, nous savons que 85 p. 100 des personnes détenues aux frais de Sa Majesté, dans les établissements fédéraux et provinciaux du pays, proviennent de ces 10 p. 100, c'est- à-dire de la couche sociale située sous le seuil de la pauvreté.

Le sénateur pourrait-il nous dire s'il pense que le comité a bien examiné la possibilité que le résultat concret soit une augmentation de 400 p. 100 du coût d'une demande de réhabilitation, dès le départ, pour les Canadiens les plus pauvres, bien que ce ne soit pas l'intention de qui que ce soit?

Le sénateur Joyal : Je vous répète, honorables sénateurs, que le comité n'a pas examiné pleinement les répercussions. Voilà pourquoi essentiellement je voulais personnellement que la Commission des libérations conditionnelles du Canada fasse une étude et nous la remette dans le futur. Nous serions alors mieux placés pour comprendre les conséquences imprévues de l'augmentation des frais de demande de réhabilitation sur les Canadiens appartenant aux 10 p. 100 inférieurs, pour ce qui est du revenu.

Il est révélateur que, sur le nombre total de réhabilitations accordées pour diverses infractions criminelles, près de 8 000 concernaient des Canadiens qui avaient commis un vol de moins de 200 $. Qui vole pour moins de 200 $? Ce ne sont certainement pas les gros voleurs de banques et les criminels en col blanc. Ce sont plutôt les gens les plus démunis qui volent de la nourriture, par exemple.

Il en va de même pour d'autres infractions généralement commises par des gens qui se trouvent dans une situation désespérée. Je ne parle pas de ceux qui conduisent avec un taux d'alcoolémie supérieur à 0,08 p. 100. À ce sujet, les sénateurs trouveront intéressant d'apprendre que 67 000 Canadiens ont un casier judiciaire pour conduite avec facultés affaiblies et que ce sont eux qui demandent à être réhabilités en plus grand nombre.

Parmi ceux qui demandent à être réhabilités, il y a les conducteurs qui possèdent une Mercedes ou une BMW, mais il y a également des gens qui — du point de vue économique — ne correspondent absolument pas à l'idée voulant que tous les criminels soient bien nantis. Il faut comprendre que sur les trois millions de Canadiens qui possèdent un casier judiciaire, certains sont dans une situation désespérée. Je crois qu'il convient que nous, les sénateurs, nous nous penchions sur leur cas. Malheureusement, nous n'avons pas été en mesure de faire rapport des répercussions sur ce groupe. J'avais espéré inclure cette observation dans notre rapport. Cela ne s'est pas fait, mais j'espère que les personnes qui liront nos délibérations d'aujourd'hui tiendront compte de votre inquiétude, de la mienne et de celle exprimée par d'autres sénateurs et qu'elles suivront cela de près. Je considère qu'il s'agit d'une question très sérieuse, qui touche les Canadiens qui ont le plus besoin d'une aide financière et qui vivent dans des conditions sociales difficiles.

L'honorable Gerry St. Germain : Le sénateur Joyal accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Joyal : Oui.

Le sénateur St. Germain : La question porte sur la complexité de la documentation qui devra être produite. Les gouvernements se succèdent et nous en sommes à un point où il est presque impossible de produire sa déclaration de revenus sans avoir d'abord suivi un cours.

Je crois que ce commentaire sur la complexité de la documentation à produire est pertinent. Je sais que les groupes dont parle le sénateur sont nos peuples autochtones. Le sénateur Joyal est-il prêt à soumettre son avis au moyen d'un rapport minoritaire du comité, ou bien le processus est-il déjà trop avancé?

Son Honneur le Président intérimaire : Sénateur Joyal, souhaitez- vous demander plus de temps avant de répondre à la question?

Le sénateur Joyal : Oui, honorables sénateurs, je souhaite dispose de plus de temps.

Son Honneur le Président intérimaire : La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

(1550)

Le sénateur Joyal : Je vous remercie, honorables sénateurs. Pour être équitable envers tous les sénateurs membres du comité — je crois que le sénateur Wallace a parlé avec éloquence de cet aspect —, je dois dire que le comité s'est inquiété, comme l'a mentionné le sénateur St. Germain, de l'insurmontable obstacle que représente parfois, pour presque n'importe qui, l'obligation de remplir ces formulaires. Le comité a recommandé de mettre en place une procédure simplifiée, surtout dans le cas des Canadiens condamnés pour un délit mineur ou par voie de procédure sommaire, pour qu'il soit possible de traiter les demandes plus rapidement et à moindres coûts. C'est la raison pour laquelle le comité a également recommandé de prévoir une variante fondée sur la somme investie par la bureaucratie pour étudier ou traiter un dossier.

Vous comprendrez facilement que si une personne qui a volé moins de 200 $ doit remplir un formulaire de 10 pages que doit traiter la Commission des libérations conditionnelles, le temps, l'effort et l'enquête nécessaires ne sont pas les mêmes que si la personne a volé un million de dollars à une banque, par exemple, et s'occupe de blanchir de l'argent pour d'autres personnes. Dans ce contexte, la commission voudra étudier l'affaire d'une façon plus détaillée que dans le cas d'une personne qui a volé moins de 200 $.

Le comité s'est inquiété de cet aspect et a formulé deux recommandations, dont la première consistait à simplifier le formulaire et, surtout, à l'adapter au régime à deux volets que nous voudrions voir établir. Cela répond partiellement à la préoccupation du sénateur. Encore une fois, la réponse n'est pas complète parce qu'une personne pratiquement illettrée serait incapable de remplir ces formulaires. C'est la raison pour laquelle les groupes qui ont comparu devant le comité, comme la Société John Howard, souhaitaient qu'on accorde une aide supplémentaire à ces gens parce qu'il est de l'intérêt de la société canadienne qu'ils soient pleinement réintégrés. Nous devons parfois tendre la main aux gens pour les amener à ce niveau. Je crois que la recommandation que j'ai proposée nous permettra d'aller dans cette direction.

L'honorable Wilfred P. Moore : Puis-je poser une question sénateur Joyal?

Son Honneur le Président intérimaire : Allez-y.

Le sénateur Moore : Je ne sais pas si la question s'inscrit dans le mandat de l'étude du comité. On me dit que les Canadiens qui ont un casier judiciaire et qui ont été réhabilités, ou même qui se sont adressés à un tribunal pour faire détruire leur casier, sont refoulés par les douaniers américains lorsqu'ils essaient d'entrer aux États- Unis. Cette question a-t-elle été soulevée au cours de votre étude? Les candidats à la libération conditionnelle sont-ils conscients de ce fait? Le comité a-t-il discuté de la possibilité pour notre gouvernement de prendre contact avec les autorités compétentes américaines pour qu'elles reconnaissent les décisions rendues par nos tribunaux et par la Commission des libérations conditionnelles?

Le sénateur Joyal : Je remercie le sénateur de sa question. Nous n'avions pas pour mandat d'examiner le fonctionnement global de la Commission des libérations conditionnelles. Comme l'a mentionné le sénateur Wallace, notre mandat se fondait sur l'article 5 de la Loi sur les frais d'utilisation, qui ne laisse au Parlement qu'une très courte période pour examiner les majorations proposées. Nous n'avions pas à examiner le fonctionnement du système. Nous devions seulement étudier l'augmentation proposée. Si, à l'expiration du délai prescrit, nous n'avions pas présenté un rapport au Parlement, l'augmentation aurait été réputée adoptée. Autrement dit, nous n'avions qu'un nombre limité d'heures pour examiner la question. Encore une fois, nous n'avions pas un mandat général. Le sénateur Cools a soulevé cette question à maintes et maintes reprises, préconisant d'examiner le fonctionnement de la Commission des libérations conditionnelles. Je me souviens qu'elle avait demandé cet examen lorsqu'elle était membre permanent du comité. Nous aurons peut-être l'occasion de le faire dans les mois qui viennent. Toutefois, pour le moment, notre mandat ne nous le permettait pas.

L'honorable George Baker : Honorables sénateurs, j'ai juste un mot à ajouter à ce sujet particulier. Une libération conditionnelle influence la Loi sur le casier judiciaire. Selon l'article 6.1 et le paragraphe 6.1(2), si la commission ou un tribunal accorde une libération, le dossier judiciaire détenu par le commissaire ou par n'importe quel ministère ou organisme fédéral ne peut plus être communiqué.

Toutefois, si le dossier est détenu par un service de police ou un ministère provincial, la Loi sur le casier judiciaire ne s'applique pas. Bien sûr, si on obtient un pardon royal, avec décision prise par le Cabinet — nous avons chaque année beaucoup de ces cas qui sont examinés en secret —, le casier judiciaire est détruit comme si l'événement ne s'était jamais produit. En vertu de la loi, l'infraction ne peut jamais plus être mentionnée, mais il s'agit là d'une réhabilitation administrative.

Par conséquent, le sénateur a tout à fait raison de dire que, à certains postes frontaliers où l'information est gardée dans un ordinateur par un service de police provinciale, le casier sera toujours là. Même une simple accusation peut empêcher quelqu'un d'être admis aux États-Unis, compte tenu des récentes décisions américaines.

Honorables sénateurs, nous ne parlons ici que de la Loi sur les frais d'utilisation. Cette loi exige de quiconque demande une majoration des frais de faire un certain nombre de choses, et notamment de comparer les frais à ceux d'un service semblable offert dans un autre pays. Or, le comité a entendu des témoignages incroyables selon lesquels aucun autre pays du monde n'a un système semblable ou comparable à celui que nous avons au Canada.

L'ensemble des témoins ont dit que, aux États-Unis, par exemple, on accorde automatiquement la réhabilitation aux personnes reconnues coupables par voie de procédure sommaire ou reconnues coupables d'une infraction mixte dont la gravité peut être évaluée en termes d'argent. Le sénateur Joyal a précisé les montants en dollars établis pour le vol et pour la fraude. Les infractions de fraude sont maintenant évaluées au-dessus ou en deçà de 5 000 $. Lorsque la fraude est inférieure à 5 000 $, elle est punissable par voie de procédure sommaire et lorsqu'elle est supérieure à 5 000 $, elle est punissable par voie de mise en accusation. Pour ce qui est du vol, s'il est de moins de 1 000 $, il est punissable par voie de procédure sommaire et s'il est de plus de 1 000 $, il est punissable par voie de mise en accusation.

Aucun autre pays au monde n'a un système comme le nôtre. Quand on jette un coup d'œil aux statistiques, on est atterré de constater que 10 p. 100 des Canadiens ont un casier judiciaire et que 15 p. 100 des électeurs au Canada ont un casier judiciaire, parce qu'aucun autre pays au monde n'affiche de telles statistiques. Voilà ce qu'ont révélé les témoignages présentés devant le comité.

Nous devrions peut-être charger un comité sénatorial d'examiner le système de casiers judiciaires et la façon dont ils sont traités dans notre société.

L'honorable Daniel Lang : Honorables sénateurs, je souligne qu'il y a eu des audiences complètes sur le recouvrement des coûts et sur son incidence.

(1600)

Je rappelle aux sénateurs que cette question n'est pas nouvelle pour le Sénat puisque nous avons parlé de ce principe au début de l'an dernier lorsqu'il a été question d'une première mesure visant à porter les frais de suspension de casier de 50 $ à 150 $, et que nous savions pertinemment que le gouvernement nous demanderait plus tard d'examiner le recouvrement intégral du coût des demandes de suspension de casier ou de réhabilitation.

Nous avons obtenu ces chiffres; ils nous ont été présentés. J'estime que le recouvrement des coûts incombe aux individus qui font la demande et non à l'État, peu importe que ce soit après trois, cinq ou 10 ans. Je peux assurer aux sénateurs que la population en général ne sait pas que jusqu'ici elle a assumé presque tous les frais liés au traitement et à l'acceptation des demandes de réhabilitation.

Le sénateur Fraser, qui compte parmi mes bons amis, a parlé des consultations publiques qui ont été et devaient être faites par la Commission des libérations conditionnelles. Mille soixante-huit personnes se sont opposées en principe au recouvrement des coûts, alors que 12 les ont appuyées.

Je dirai aux sénateurs qu'environ 1 100 personnes seulement ont eu accès d'une façon ou d'une autre à ces consultations publiques. Lorsque le sénateur Baker, moi-même et le reste du comité avons accueilli des groupes de victimes, nous avons constaté qu'on n'avait pas sollicité leur opinion.

Le sénateur Fraser a dit tout à l'heure que les organisations des victimes n'avaient pas vraiment à intervenir à cette dernière étape du système judiciaire, celle de la demande et de l'obtention de la réhabilitation. Je ne suis pas de son avis. J'estime que les victimes et les groupes qui les représentent ont parfaitement le droit d'être prévenus et devraient l'être lorsque ces personnes franchissent la dernière étape de la réinsertion sociale.

Un autre sénateur a fait observer que, dans certaines provinces, les victimes étaient indemnisées. C'est le cas dans la plupart des provinces. Il a toutefois été signalé au comité que les organisations qui défendent les victimes ne reçoivent pas de fonds du gouvernement. Pourtant, toutes les organisations qui s'occupent des délinquants reçoivent des millions de dollars pour leur fonctionnement. À mon avis, c'est inacceptable.

C'est l'une des raisons pour lesquelles des projets de loi de cette nature sont soumis au Sénat et à la Chambre des communes : le système judiciaire est allé si loin dans le sens des délinquants qu'il a perdu de vue les victimes. Il a oublié les personnes qui garderont des séquelles pendant toute leur vie. Nous prenons ici la parole et demandons : « Et le délinquant? Peut-il payer cette dernière étape, ce droit, ce privilège de laver son casier judiciaire, ou le contribuable doit-il payer? » Je vous dirai que je réponds non, que je ne veux pas payer, et j'ajouterai que la plupart des Canadiens ne veulent pas payer non plus.

Voilà un autre chose dont personne ne parle : l'importance du montant en jeu. Il s'agit de 8 millions de dollars. J'admets que ce n'est pas grand-chose auprès des milliards consacrés à ceci ou cela, mais ce sont tout de même 8 millions de dollars de l'argent des contribuables que nous n'aurons pas à dépenser pour ce programme parce que chacun devra assumer la responsabilité de ses actes. Cela fait partie de l'ensemble.

L'un des moments sans doute les plus émouvants de nos audiences a été le témoignage de Sheldon Kennedy, le joueur de hockey qui a été perturbé au point qu'il en restera marqué toute sa vie. Selon lui, lorsqu'on demande une suspension de casier judiciaire, il faut payer les frais.

Autre chose encore : 631 $, ce n'est pas 650 $, mais 631 $. Pour celui qui demande une suspension de casier au bout de 10 ans, cela représente 6 $ par mois. Pour celui qui la demande au bout de cinq ans, c'est 10 $ par mois.

Abordons la question sous l'angle de la personne et de sa responsabilité. On a dit une fois au comité que l'aide sociale ira chercher l'argent dans le compte en banque de celui qui épargne pour demander la suspension de son casier. Je ne marche pas. Nous faisons certainement assez confiance à nos collègues des provinces : le bon sens prévaudra.

Si je puis me permettre, honorables sénateurs, je voudrais encore aborder un ou deux points. Il importe de prendre conscience du fait que le rapport à l'étude traite d'un projet qui dit que, si jamais il y a une autre hausse des frais, nous devons de nouveau être saisis de la question. On ne peut pas dire que, tout à coup, cette mesure tombe dans les dédales de l'administration et qu'on ajoutera continuellement des coûts à ce que nous avons déjà approuvé ici. Tous les sénateurs auront la possibilité d'examiner et d'analyser la question pour voir où cela nous mène.

Je ne crois pas que quiconque parmi nous souhaite que les frais deviennent lourds au point qu'il soit impossible de demander une suspension de casier. Pourtant, j'estime qu'il y a chez la plupart d'entre nous, j'aime à le penser, le sentiment juste que chacun a la responsabilité de payer, pourvu que les frais demeurent raisonnables. Pour ma part, j'estime que 6 $ ou 10 $ par mois, c'est un prix raisonnable à payer pour obtenir la suspension de son casier.

À mon sens, nous avons eu des audiences exhaustives. Nous avons tous beaucoup appris et la Commission des libérations conditionnelles aussi. À propos d'une recommandation sur la page web permettant de faire des demandes, j'espère qu'elle a compris le message : il faut qu'elle fasse appel à quelqu'un, peut-être pas à l'interne, mais à quelqu'un de la rue qui comprend l'anglais simple pour lui demander de revoir cette page et de la transformer de telle sorte qu'elle permette de faire rapidement une demande.

Pendant les audiences, honorables sénateurs, nous avons aussi appris, comme le sénateur Boisvenu l'a signalé, que des demandeurs doivent, outre les frais de la demande de suspension de casier, payer parfois 1 000 $, voire davantage, à un courtier qui essaie de les aider à suivre le processus. Voilà un motif d'inquiétude légitime, et j'estime que nous devons y mettre bon ordre. Il n'y a pas de raisons qu'on ne puisse pas simplifier les formulaires et les mettre à la disposition des intéressés pour qu'ils se sentent à même de les remplir et de suivre toute la démarche.

Honorables sénateurs, je voudrais dire pour conclure que, pour moi, nous avons pris la bonne décision. C'est une décision qui est bonne pour les contribuables.

L'honorable Tommy Banks : Honorables sénateurs, c'est évidemment une bonne décision parce que le processus s'est déroulé selon les règles et que le sénateur Wallace et le sénateur Fraser nous ont présenté des comptes rendus complets de ce qui s'est passé au comité.

Toutefois, nous devons nous rappeler, honorables sénateurs, qu'il y a différentes formes de recouvrement des coûts. En Chine, lorsqu'un criminel passe devant un peloton d'exécution, sa famille reçoit la facture des balles qui ont servi à le tuer. Voilà le recouvrement des coûts.

Nous pouvons dire, comme l'a signalé le sénateur Mitchell, que le prix d'un procès devrait être assumé par le criminel.

Le sénateur Mitchell : Pourquoi pas le processus au complet?

(1610)

Le sénateur Banks : Chaque fois qu'on fait une analyse de rentabilité, l'utilité du résultat dépend de l'hypothèse de départ.

Le plus important pour nous est de nous souvenir des recommandations évoquées par le sénateur Wallace et le sénateur Fraser et du fait que nous avons demandé au gouvernement d'y répondre dans un délai précis.

Le sénateur Segal a parlé d'autres augmentations possibles. Comme l'a dit le sénateur Lang, si une telle augmentation nous était soumise, encore une fois en vertu de la Loi sur les frais d'utilisation — je ne serai plus ici quand cela se produira —, j'espère qu'on se souviendra d'une chose.

Honorables sénateurs, comme je n'ai jamais été victime d'un crime, je ne comprends pas le sujet aussi bien que le sénateur Boisvenu. Je n'ai certainement pas passé, comme lui, des années à m'occuper de victimes d'actes criminels.

Nous avons entendu dire que le coût de la demande relative à ce qu'on appellera désormais la suspension du casier judiciaire fait partie de la responsabilité assumée par le criminel condamné et, si je puis m'exprimer ainsi, de la punition. Honorables sénateurs, nous devrons bien veiller, lorsque nous examinerons cette question dans un an, à établir une nette distinction entre la punition et la rentabilité de la réintégration d'une personne dans la société.

Je souscris à l'idée que lorsqu'un criminel est condamné par un tribunal, la sentence prononcée représente le point de vue de la société sur ce que le criminel doit payer pour son acte.

Je ne crois pas que nous devons — il y a des vues divergentes à ce sujet comme nous avons pu nous en rendre compte en écoutant le sénateur Lang, le sénateur Boisvenu et d'autres — ajouter à la sentence imposée par le tribunal une autre punition qui viendra plus tard et à laquelle personne ne pense au moment du procès. Cette punition représenterait, si vous voulez, un prolongement de la sentence. Il s'agit d'un coût qui, comme nous venons de l'entendre, a quadruplé. Il avait déjà triplé lorsque le comité s'était occupé de cette question, il y a quelques mois, après quoi il a quadruplé. Par conséquent, il est raisonnable de supposer que ce qui s'est produit par le passé se reproduira probablement à l'avenir : nous serons témoins d'un recouvrement encore plus complet des coûts. Le Parlement a maintenant accepté le principe du recouvrement. Il y a là un précédent qui vient d'être établi au sujet de ce qui portera le nom de suspension du casier judiciaire.

Honorables sénateurs, lorsque cette question sera abordée à l'avenir — que ce soit lorsqu'une autre demande sera présentée en vue de hausser les coûts, ou lorsque le gouvernement répondra au message envoyé par le sénateur Wallace —, j'espère que nous allons tenter de définir si les coûts liés à la présentation d'une demande de suspension de peine devraient être considérés comme faisant partie de la punition ou de la responsabilité du criminel condamné ou si les tribunaux — et eux seulement — imposent des peines à ces criminels.

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, je voulais poser une question. Il est peut-être un peu tard pour poser une question, mais j'ai suivi le débat et j'ai de la difficulté à comprendre le motif qui sous-tend ces propositions. J'ai de la difficulté à discerner les principes sur lesquels les proposants de cette mesure se fondent pour étayer leurs conclusions. J'ai écouté tout particulièrement les propos du sénateur Lang. Je serais heureuse que quelqu'un puisse répondre à mes questions.

Honorables sénateurs, je m'intéresse beaucoup aux principes, parce que j'ai toujours cru que la libération conditionnelle et la réhabilitation n'avaient rien à voir avec l'innocence, la culpabilité ou la punition. Il a toujours été clair pour moi que les tribunaux déterminent si une personne est innocente ou coupable, qu'ils imposent une peine et qu'ils délivrent des mandats. Ensuite, le détenu purge la peine prévue.

J'ai toujours cru que, en matière de libération conditionnelle et de réhabilitation, il est établi que l'individu a été reconnu coupable et qu'il s'est vu imposer une peine qu'il purge ou qu'il a purgée. Nous arrivons ensuite à ce qu'on appelle les pouvoirs de clémence, qui ne sont pas liés à la peine, puisque l'individu a déjà payé sa dette à la société.

Je n'ai pas suivi le débat. Je ne siège à aucun comité. Tous les sénateurs le savent. C'est un privilège que je n'ai pas. Par conséquent, il arrive souvent que je ne sois pas au courant de ces questions avant qu'on en discute devant moi.

Honorables sénateurs, quelqu'un pourrait-il m'expliquer comment ces principes ont été modifiés de façon si fondamentale et soudaine, sans débat et sans étude? La réhabilitation, la libération conditionnelle et la réduction de peine sont des aspects du droit qui relèvent de la clémence et du pardon de Sa Majesté et ceux-ci n'incluent aucune forme de sanction financière ou autre.

J'aimerais que quelqu'un clarifie les principes appliqués, parce que, compte tenu de ce que j'ai entendu, nous ne parlons pas de réhabilitation ou de clémence, mais bien d'une taxe.

Je vais proposer l'ajournement et conclure mes remarques. J'espérais que quelqu'un tente de me donner une réponse.

Son Honneur le Président intérimaire : Le sénateur Chaput était debout et voulait prendre la parole. En fait, j'ai vu le sénateur Chaput avant que vous commenciez votre intervention.

Le sénateur Cools : Très bien. Considérez que j'ai posé une question et que je suis en attente d'une réponse.

[Français]

L'honorable Maria Chaput : Honorables sénateurs, je suis membre du comité depuis quelques années. J'ai deux préoccupations que je veux partager avec vous aujourd'hui. Ma première concerne le recouvrement des coûts, ou recouvrement des dépenses. Je ne suis pas contre le recouvrement des dépenses, au contraire, mais, dans mon esprit, après avoir écouté attentivement comment les témoins en sont venus à établir que les frais d'utilisation étaient de 631 $ au lieu de 650 $, à titre d'exemple, ce n'était pas clair. Selon les explications que j'ai reçues et les documents que j'ai lus, je ne suis pas sûre qu'ils avaient vraiment des réponses à toutes les questions pour pouvoir nous dire comment ils en étaient arrivés à 631 $. Je ne suis pas sûre non plus qu'ils ne reviendront pas au comité, peut-être dans un an ou un an et demi, en nous disant : « Ah-ah! le montant du recouvrement des coûts et des dépenses est beaucoup plus élevé que ce qu'on avait prévu, donc maintenant, nous demandons une telle somme. » J'ai donc des préoccupations à cet égard.

L'autre préoccupation que j'ai et que je veux aussi partager se traduit en termes de complexité. Des honorables sénateurs présents aujourd'hui ont souligné la complexité du formulaire de demande qui doit être rempli. On en a beaucoup entendu parler au comité. Il ne faut pas oublier que c'est un droit de demander de remplir le formulaire, mais c'est ensuite un privilège de recevoir ce que j'appellerais le pardon, même si ce n'est pas le bon terme.

Pour avoir le droit de remplir le formulaire, il faut être capable de le faire. Je me souviens que nous avons reçu des témoins qui donnaient l'exemple de Terre-Neuve, où des demandeurs, dans un pourcentage assez élevé, avaient commencé à remplir le formulaire, mais que ces demandes avaient été abandonnées.

(1620)

Lorsque nous avons voulu savoir pourquoi, nous n’avons pas obtenu de réponse car il n’y avait aucune statistique disponible à cet égard. Je me suis donc demandé ceci : si un grand pourcentage de demandes ont été abandonnées à Terre-Neuve, est-ce à cause de la complexité des formulaires? Ces demandeurs étaient-ils si démunis qu’ils ne pouvaient se permettre de payer d’autres personnes pour remplir les formulaires, comme d’autres l’ont fait? Je n’ai pas obtenu de réponse à ces questions non plus.

Cette préoccupation sur la complexité du formulaire se retrouve dans nos recommandations, et j'en suis fort heureuse.

[Traduction]

Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : L'honorable sénateur Wallace, avec l'appui de l'honorable sénateur Plett, propose que le rapport soit adopté maintenant.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : Oui.

Le sénateur Tardif : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence, et le rapport est adopté.)

Conflits d'intérêts des sénateurs

Budget et autorisation d'embaucher du personnel—Adoption du deuxième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du deuxième rapport du Comité permanent sur les conflits d'intérêts des sénateurs (budget—mandat conformément à l'article 86(1)r) du Règlement—autorisation d'embaucher du personnel), présenté au Sénat le 3 novembre 2011.

L'honorable Terry Stratton : Honorables sénateurs, je propose l'adoption de la motion inscrite à mon nom.

Son Honneur le Président intérimaire : Quelqu'un souhaite-il prendre la parole?

Le sénateur Stratton : Personne. Le vote, s'il vous plaît.

Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

L'étude sur l'état actuel et les perspectives d'avenir du secteur forestier

Deuxième rapport du Comité de l'agriculture et des forêts—Motion d'amendement—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Mockler, appuyée par l'honorable sénateur Wallace, tendant à l'adoption du deuxième rapport du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, intitulé Le secteur forestier canadien : Un avenir fondé sur l'innovation, déposé auprès du greffier du Sénat le 5 juillet 2011;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Robichaud, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Mahovlich, que la motion d'adoption du rapport soit modifiée, par l'ajout de ce qui suit :

« et que, conformément à l'article 131(2) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre des Ressources naturelles étant désigné ministre chargé de répondre à ce rapport ».

L'honorable Nicole Eaton : Honorables sénateurs, je suis heureuse d'intervenir aujourd'hui dans le débat sur la motion tendant à l'adoption du deuxième rapport du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts.

Comme d'autres l'ont dit avant moi, le comité a accueilli de nombreux témoins représentant différents secteurs, notamment des producteurs de copeaux de bois, des producteurs de pâtes et papiers, des fabricants, des économistes et des enseignants.

Au cours des délibérations, nous avons entendu des prévisions fort négatives et d'autres fort positives. Je me suis dit, avec un optimisme prudent, qu'avec beaucoup de travail, le secteur forestier pourrait reprendre la place de choix qu'il a occupée par le passé dans l'économie et dans les collectivités canadiennes.

Voilà pourquoi le gouvernement a fait des investissements sans précédent afin de relancer le secteur forestier au Canada. En fait, au cours des deux dernières années, le gouvernement a consacré plus de ressources à ce secteur que le gouvernement précédent ne l'avait fait en cinq ans, et cela porte des fruits. Par exemple, 13 000 nouveaux emplois ont été créés dans le secteur forestier et les exportations de bois d'œuvre vers la Chine ont progressé de 600 p. 100.

Le gouvernement du Canada continue de s'attaquer aux difficultés auxquelles se heurtent le secteur forestier et les travailleurs et collectivités qui en dépendent. Le budget de 2011, La prochaine phase du Plan d'action économique du Canada, consacre 60 millions de dollars sur un an pour favoriser la transformation du secteur forestier. Le gouvernement se concentre sur le développement de nouveaux marchés et sur les technologies et les produits émergents qui amélioreront la compétitivité du secteur forestier canadien.

Les mesures prévues dans La prochaine phase du Plan d'action économique du Canada viennent s'ajouter aux initiatives fédérales déjà en cours qui contribuent à veiller à ce que le secteur forestier canadien puisse continuer d'offrir des emplois de qualité. Par exemple, le Programme d'écologisation des pâtes et papiers, d'une valeur de 1 milliard de dollars, jette les bases d'un secteur plus vert en mettant à la disposition des usines de pâtes et papiers des fonds pour améliorer leur rendement sur le plan environnemental.

Le Programme des technologies transformatrices...

Le sénateur Mitchell : Est-ce un programme libéral?

Le sénateur Eaton : Non. Ce programme vient appuyer le développement de technologies émergentes. On a récemment annoncé un financement de 25 millions de dollars pour faire fond sur les réalisations des quatre dernières années.

Le Programme de projets pilotes de démonstration des technologies transformatrices, d'une valeur de 40 millions de dollars, vient appuyer le développement de nouveaux procédés et produits forestiers.

Le programme intitulé Investissements dans la transformation de l'industrie forestière, doté d'une enveloppe de 100 millions de dollars, vient appuyer la mise en marché de technologies novatrices qui contribueront à la diversification du secteur forestier.

Cependant, honorables sénateurs, je ne peux m'empêcher de dire qu'il nous arrive parfois d'oublier la forêt lorsqu'on a le nez collé sur l'arbre.

La semaine dernière, le sénateur Robichaud a parlé d'un des aspects essentiels de notre étude, soit l'éducation. Les enseignants, les chercheurs, les architectes et les ingénieurs nous répètent sans cesse qu'il y a de grandes lacunes, dans l'ensemble du pays, dans les cours universitaires sur l'utilisation du bois dans la construction. C'est d'autant plus le cas dans la construction non résidentielle.

En Europe, on utilise fréquemment le bois dans la construction non résidentielle, mais, au Canada, c'est rare et compliqué. Cette lacune est en partie attribuable au manque de cours universitaires sur l'utilisation du bois. Elle est également attribuable à certaines restrictions dans le code du bâtiment, ainsi qu'aux préjugés et aux mythes qu'entretient le public à propos du bois.

Force est de constater que, au Canada, les codes du bâtiment correspondent à une autre époque et ne suivent pas les tendances. Souvent, les autorités doivent être forcées de reconnaître les nouvelles méthodes et les nouveaux matériaux de construction qui sont depuis longtemps utilisés ailleurs. Ajoutez à cela qu'il y a plusieurs codes du bâtiment — un code fédéral, 12 codes provinciaux et territoriaux et des milliers de codes municipaux. Modifier un code peut donc exiger un effort herculéen.

Une façon évidente de régler ce problème au Canada est de promouvoir une culture du bois qui encourage l'utilisation du bois et le rende attrayant pour la construction non résidentielle. Cela inciterait l'industrie de la construction à exiger une plus grande souplesse dans les codes du bâtiment afin de permettre son utilisation.

Comme le signale le rapport, pour instaurer une véritable culture du bois, l'industrie forestière canadienne doit lever le doute de l'opinion publique quant à l'image de « tueuse d'arbres » dont elle est affublée. L'industrie doit également dissiper les craintes relatives à la résistance au feu des produits fabriqués en bois et à leur inaccessibilité au grand public.

Ce qui est triste, curieusement, c'est que le bois est l'un des secrets les mieux gardés au Canada. Le bois est un choix intelligent. Le bois est une ressource renouvelable et durable. Les avantages du bois en font un matériau de construction très attrayant. Ses caractéristiques sur le plan de l'environnement, de la résistance, de la polyvalence, de la résistance au feu, de l'esthétique et de l'isolation de même que sa valeur économique sont extraordinaires. Par exemple, saviez-vous qu'une pièce construite en bois piège une quantité de carbone égale aux émissions d'une voiture familiale pendant une année? Par conséquent, il faut commencer par en faire la promotion dans les milieux universitaires.

Durant l'étude, j'ai été surprise de constater que peu d'heures sont consacrées au bois dans les programmes d'études des facultés de génie, d'architecture et de design. Toutefois, ce n'est pas seulement la faute des universités. Les industries du béton, de l'acier et du fer mènent des campagnes d'information sur leurs matériaux auprès des étudiants des universités. Elles organisent des séminaires spéciaux sur l'utilisation de leurs matériaux dans la construction. Elles font activement la promotion de leurs produits et soulignent les améliorations et les nouvelles applications dans l'industrie. Les fabricants de bois font peu de ce genre de promotion. Il n'y a pas de promotion ni de séminaires ou de campagnes d'information.

C'est la raison pour laquelle je suis en faveur de la création de chaires de recherches pluridisciplinaires dans le domaine de la conception et de la construction de bâtiments en bois partout au pays. Une fois en place, ces chaires attireraient des spécialistes canadiens et étrangers qui diffuseraient largement les résultats de leurs recherches.

Toutefois, comme le souligne notre rapport, si nous voulons véritablement établir une culture du bois dans les milieux universitaires canadiens, l'expertise en construction d'édifices en bois doit se développer à l'extérieur des facultés de foresterie.

(1630)

Les 11e prix annuels Branché sur le BOIS! ont été décernés tout près d'ici, au nouveau Centre des congrès d'Ottawa, le 3 novembre, il y a deux semaines à peine. Le programme Branché sur le BOIS! tend à promouvoir le bois dans notre pays, où le bois constitue un matériau de premier choix pour tous les genres de construction. La campagne nationale Branché sur le BOIS! vise à augmenter l'utilisation du bois dans la construction commerciale, industrielle et organisationnelle. Elle est dirigée par le Conseil canadien du bois, qui bénéficie du soutien financier de l'industrie du bois, du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux. Le secteur forestier contribue à l'économie de nombreuses régions canadiennes, et c'est ce qui amène le gouvernement à investir, plus que jamais auparavant, dans le renouvellement de ce secteur. Ainsi, au cours des deux dernières années, le gouvernement actuel a investi plus d'argent dans ce secteur que le gouvernement précédent n'en avait investi en cinq ans.

Honorables sénateurs, je siège au Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts et je suis très fière du rapport que vous avez entre les mains. L'étude que nous avons menée afin de mieux connaître l'état actuel et l'avenir du secteur forestier canadien était nécessaire, et elle s'est révélée fascinante. Je vous encourage à appuyer avec moi ce rapport, qui contribuera grandement au débat sur les nouveaux enjeux du secteur forestier canadien.

(Sur la motion du sénateur Mahovlich, le débat est ajourné.)

Les services concernant la santé mentale, la maladie et la toxicomanie au Canada

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Hubley, attirant l'attention du Sénat sur le 5e anniversaire du rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie intitulé De l'ombre à la lumière : La transformation des services concernant la santé mentale, la maladie et la toxicomanie au Canada.

L'honorable Elizabeth Hubley : Honorables sénateurs, il y a cinq ans, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a porté à notre attention les conséquences dévastatrices de la maladie mentale sur la société canadienne. Le rapport détaillé du comité, intitulé De l'ombre à la lumière : la transformation des services concernant la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie au Canada, est le premier rapport national sur la santé mentale de l'histoire canadienne. Faisant plus de 600 pages et contenant 118 recommandations destinées à améliorer le système canadien de santé mentale, à lutter contre les préjugés et la discrimination et à composer avec la maladie et la toxicomanie, le rapport est une invitation à passer à l'action et une feuille de route pour opérer une révolution en matière de santé mentale.

Cinq ans plus tard, quels progrès avons-nous réalisés?

Mon espoir, en lançant cette interpellation, est que nous puissions continuer d'améliorer notre système de santé mentale en prenant la mesure des progrès réalisés depuis 2006, ainsi qu'en examinant et en renouvelant notre engagement à aller de l'avant. Malheureusement, comme ce rapport est très volumineux, il m'est impossible d'aborder tous les sujets dont j'aimerais traiter aujourd'hui. Par conséquent, je vais me contenter de parler d'une grande réussite — la Commission de la santé mentale du Canada — et d'un secteur qu'il faut améliorer sans tarder, à savoir les initiatives en santé mentale destinées aux Autochtones.

La création d'une commission nationale de la santé mentale et, par l'entremise de celle-ci, d'une stratégie en matière de santé mentale pour le Canada figurait au nombre des principales recommandations contenues dans le rapport rédigé en 2006 sous la direction de l'ancien sénateur et ancien président du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, Michael Kirby. Créée en 2007, la Commission de la santé mentale du Canada a pour mission de promouvoir activement la santé mentale au Canada et de collaborer avec des partenaires pour changer l'attitude de la population canadienne à l'égard des problèmes de santé mentale et pour améliorer les services et le soutien. Aujourd'hui, la Commission de la santé mentale du Canada est une organisation solide, à l'avant-garde du changement.

La commission a entrepris les sept initiatives suivantes : Changer les mentalités, Premiers soins en santé mentale, Stratégie en matière de santé mentale pour le Canada, Centre d'échange de connaissances, Chez soi, Projet des pairs et Partenaires en santé mentale. Ces projets visent à éradiquer les préjugés, à améliorer l'accès aux soins de santé mentale, à mettre en contact et à mobiliser des particuliers et des groupes intéressés et à jeter les bases de futures initiatives nationales.

Le projet Chez soi revêt une importance et un intérêt particuliers. Ce projet pilote de recherche porte sur les liens entre l'itinérance et la santé mentale et se déroule dans cinq villes canadiennes. En date du mois dernier, plus de 2 200 personnes ont été recrutées pour participer au projet, et la moitié d'entre elles sont maintenant logées. Ce projet est la plus importante étude scientifique du genre sur la maladie mentale et l'itinérance, et elle pourrait transformer la façon dont nous traitons les problèmes de dépendance et les maladies. Ce type d'étude correspond tout à fait à la démarche axée sur les données qui a été recommandée dans le rapport du comité sénatorial. Il est encourageant de constater que la Commission de la santé mentale du Canada a pris les mesures nécessaires pour donner suite au rapport du comité d'une manière aussi novatrice. J'ai bien hâte de suivre le déroulement de cette étude et de prendre connaissance des résultats.

Honorables sénateurs, je crois que nous faisons des progrès et que la Commission de la santé mentale du Canada a clairement pris des mesures importantes, les premières du genre, pour améliorer notre système de santé mentale. Cela dit, elle n'a pas encore publié sa stratégie nationale. J'espère seulement que, lorsqu'elle le fera l'année prochaine, elle mettra davantage l'accent sur l'importance d'appuyer dans une plus grande mesure les recherches en neurologie et les traitements médicaux pour les maladies mentales. Les scientifiques canadiens effectuent actuellement des recherches de pointe dans le domaine des neurosciences afin de mieux comprendre et de prévenir le suicide. J'espère que l'on appuiera et que l'on encouragera adéquatement leur travail. Plus nous en apprendrons sur les causes médicales et biologiques des maladies mentales, plus nous pourrons traiter efficacement les patients. Comme André Picard l'a si bien dit dans le Globe and Mail, nous devons nous garder d'accorder trop de crédibilité aux sciences sociales et pas assez aux neurosciences

Il est évident que la Commission de la santé mentale du Canada a bien des raisons d'être fière, mais on ne saurait en dire autant du gouvernement du Canada en ce qui concerne les Autochtones de notre pays. Il n'est pas du tout surprenant que les Autochtones du Canada traversent une crise en matière de santé mentale. Il suffit de considérer les taux de suicide, de toxicomanie et d'emprisonnement, qui sont vertigineux, pour constater l'urgence de la situation. Or, les progrès sont lents. Le rapport du comité indique que, malgré des années de vastes consultations, de discussion et de planification approfondie, le bilan du Canada en ce qui concerne le traitement de ses citoyens autochtones est une honte nationale. Le comité a donc consacré tout un chapitre de son rapport aux questions relatives à la santé mentale des Autochtones et il a formulé 14 recommandations visant précisément les Premières nations, les Inuits et les Métis. Or, cinq bonnes années plus tard, on n'y a toujours pas donné suite.

L'une des principales raisons qui expliquent cette inertie persistante, c'est ce que le rapport désigne comme une « ambivalence sur le plan des champs de compétence ». Autrement dit, nous nous retrouvons dans la situation où le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, lorsqu'il est question d'offrir des services aux Autochtones, nient leurs responsabilités et s'en déchargent. Les personnes sont trop souvent laissées pour compte lorsque les gouvernements et les organismes gouvernementaux s'affrontent. Pour remédier à cette situation, le comité a recommandé que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership, ce qui suppose qu'il prenne la responsabilité de l'ensemble du dossier de la santé mentale des Autochtones en coordonnant mieux les initiatives des ministères fédéraux et en améliorant les relations intergouvernementales avec les provinces et les territoires.

Plus particulièrement, le comité a recommandé que le gouvernement du Canada crée un comité interministériel présidé par le Bureau du Conseil privé et que ce comité prépare pour le Parlement un rapport sur l'efficacité des programmes fédéraux et sur le bien-être des peuples autochtones. En outre, le comité sénatorial a constaté qu'il fallait améliorer la collecte des données et l'accès. Il a donc recommandé que la liste de tous les programmes fédéraux destinés aux Premières nations, aux Inuits et aux Métis soit établie, que le rapport coût-efficacité de ces programmes soit analysé et qu'un rapport soit présenté au Parlement à cet égard. Enfin, le comité a recommandé la désignation d'un ombudsman, qui serait habilité à enquêter sur des plaintes individuelles, de même que des préoccupations générales.

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En outre, chaque année, cet ombudsman présenterait au Parlement un rapport sur ses conclusions, un peu comme le fait l'enquêteur correctionnel ou l'ombudsman des Forces canadiennes. Le comité a soutenu que ces mesures permettraient de régler les problèmes actuels d'ambivalence entourant les champs de compétence et de mieux garantir que les programmes sont efficaces, que l'argent est dépensé à bon escient et que des progrès concrets sont réalisés.

Le comité espérait que, grâce au renforcement de la coordination interministérielle et de la surveillance parlementaire annuelle, les gens qui en ont le plus besoin recevraient enfin de l'aide.

Outre ce cadre amélioré visant à renforcer la responsabilité et la surveillance, le comité du Sénat a également recommandé que le gouvernement mette immédiatement en place un plan pour s'attaquer aux taux élevés de suicide et de toxicomanie chez les Autochtones. Le rapport laissait entendre que la Commission de la santé mentale du Canada pourrait assumer une partie de cette responsabilité. Avec les ressources dont elle dispose, son dynamisme et son orientation nationale, la commission a un pouvoir unique de transformer la santé mentale des collectivités autochtones. Je crois qu'elle pourrait être un intermédiaire efficace pour acheminer de l'information, des fonds et des idées créatrices. Cela dit, la responsabilité incombe, en fin de compte, au gouvernement fédéral, et je l'exhorte à enfin prendre des mesures décisives à cet égard.

Honorables sénateurs, je trouve très inquiétant qu'aucune des principales recommandations relatives aux Autochtones contenues dans le rapport n'ait été mise en œuvre. Lorsqu'il est question de santé mentale, je crois que les enjeux sont trop importants pour que l'on continue à rester indifférent comme on l'a toujours fait. Je crains qu'on soit condamné à répéter les erreurs du passé et que l'on continue à laisser pour compte les Premières nations, les Inuits et les Métis si on n'agit pas dès maintenant. Le gouvernement fédéral doit faire figure de chef de file en matière de santé mentale chez les Autochtones. Les recommandations formulées dans le rapport du comité sénatorial constituent des étapes logiques dans le processus d'évaluation des programmes actuels et de création des nouveaux programmes. On devrait les mettre en œuvre immédiatement.

Depuis les cinq dernières années, les Canadiens sont plus réceptifs, dans l'ensemble, aux problèmes de santé mentale. Même si le rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a manifestement eu un effet positif, il n'en demeure pas moins qu'il y a place à l'amélioration, qu'il reste une foule de recommandations à mettre en œuvre et que beaucoup de Canadiens ont encore besoin d'aide. Nous avons peut-être levé le voile sur la santé mentale, mais il nous reste encore beaucoup à faire pour veiller à la santé mentale et au bien-être de tous.

(Sur la motion du sénateur Cordy, le débat est ajourné.)

Droits de la personne

Autorisation au comité de recevoir les documents liés à l'étude du projet de loi S-4 réalisée pendant la troisième session de la quarantième législature et à l'étude sur la répartition des biens immobiliers matrimoniaux dans les réserves effectuée lors de la première session de la trente-huitième législature et de la deuxième session de la trente-septième législature aux fins de l'étude du projet de loi S-2 actuellement en cours

L'honorable Dennis Glen Patterson, au nom du sénateur Jaffer et conformément à l'avis donné le 2 novembre 2011, propose :

Que les documents reçus, les témoignages entendus, et les travaux accomplis par le Comité sénatorial permanent des droits de la personne au cours de son étude du projet de loi S- 4, Loi concernant les foyers familiaux situés dans les réserves des premières nations et les droits ou intérêts matrimoniaux sur les constructions et terres situées dans ces réserves, pendant la troisième session de la quarantième législature et son étude spéciale sur le partage des biens immobiliers matrimoniaux situés dans une réserve, pendant la première session de la trente-huitième législature et la deuxième session de la trente- septième législature, soient renvoyés au Comité pour l'étude du projet de loi S-2, Loi concernant les foyers familiaux situés dans les réserves des premières nations et les droits ou intérêts matrimoniaux sur les constructions et terres situées dans ces réserves.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 16 novembre 2011, à 13 h 30.)


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