Journaux du Sénat
2e Session, 41e Législature
Numéro 46 - Annexe
Le mardi 1er avril 2014
14 heures
L'honorable Noël A. Kinsella, Président
Le mardi 1er avril 2014
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones a l'honneur de présenter son
TROISIÈME RAPPORT
Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-9, Loi concernant l'élection et le mandat des chefs et des conseillers de certaines premières nations et la composition de leurs conseils respectifs a, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 27 février 2014, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement, mais avec des observations qui sont annexées au présent rapport.
Respectueusement soumis,
Le président,
DENNIS GLEN PATTERSON
OBSERVATIONS au
troisième rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones (projet
de loi C-9)
Le projet de loi C-9 vise à offrir aux premières nations un nouveau régime d'élection, général et modernisé, qui viendrait s'ajouter aux trois principaux régimes d'élection actuellement disponibles en vertu de la Loi sur les Indiens : 1) élections tenues conformément aux dispositions électorales de la Loi sur les Indiens, 2) mécanismes de sélection communautaires fondés sur la coutume, 3) élections tenues conformément aux dispositions des ententes d'autonomie gouvernementale.
Le comité sénatorial permanent des peuples autochtones a constaté, au terme de son examen du projet de loi C-9, qu'il existait un soutien important et de longue date à un cadre législatif qui puisse combler plusieurs des lacunes propres au régime électoral instauré par la Loi sur les Indiens. Ce cadre permettrait, notamment, de prolonger la durée des mandats des chefs, de prévoir des peines pour les infractions relatives aux élections, ainsi que de resserrer les procédures de mise en candidature et d'envoi des bulletins par la poste.
Le comité a cependant entendu un certain nombre de témoins exprimer d'importantes réserves quant à l'article 3 du projet de loi qui confère au ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord canadien le pouvoir d'ordonner qu'une élection soit tenue dans une Première Nation, y compris dans une Première Nation fonctionnant selon un code électoral coutumier, lorsqu'« il est convaincu qu'un conflit prolongé lié à la direction de la première nation a sérieusement compromis la gouvernance de celle-ci ». Le comité a constaté que le ministre dispose déjà de ce pouvoir en vertu du paragraphe 74(1) de la Loi sur les Indiens. Cependant, l'alinéa 3(1)b) du projet de loi C-9 confère au ministre un pouvoir plus limité que celui qu'il détient actuellement en vertu de la Loi sur les Indiens, qui lui confère, quant à lui, le pouvoir d'ordonner une élection dans toute Première Nation, « [l]orsqu'il le juge utile à la bonne administration d'une bande ».
Le paragraphe 74.1 et l'alinéa 3(1)b) confèrent des pouvoirs similaires, mais, alors que la première disposition assujettit les Premières nations à la Loi sur les Indiens, dont le régime électoral est dépassé et inefficace, la deuxième disposition assujettit les Premières nations au régime plus moderne et plus strict du projet de loi C-9.
Le principal commentaire formulé est que toute décision ministérielle prise en vertu de l'alinéa 3(1)b) pourrait, sur requête, être soumise à l'examen des tribunaux. Qui plus est, le libellé, « conflit prolongé lié à la direction de la première nation [qui] a sérieusement compromis la gouvernance de celle-ci », place la barre assez haute, pour le ministre, lorsqu'il s'agit de justifier le recours à ce pouvoir.
Enfin, le comité a entendu des témoins objecter que l'alinéa 3(1)b) perpétue le pouvoir dont dispose le ministre sur les affaires des Premières nations. Après examen de cette objection, le Comité a constaté que le pouvoir de dissolution que possède tout gouvernement (notamment fédéral, provincial ou municipal) est une caractéristique commune et nécessaire au Canada.
Le comité convient qu'il est arrivé, à de rares occasions par le passé, et qu'il pourrait encore arriver, que, dans une Première Nation, il ne soit possible de mettre un terme à l'absence de gouvernement fonctionnel en raison d'un conflit prolongé qu'en ordonnant la tenue d'une élection, mais le comité juge également que le libellé de l'alinéa 3(1)b) entérine la pratique établie qui veut que cette décision grave ne puisse être prise qu'avec la plus grande prudence, et seulement dans les très rares cas où toute autre forme de réforme démocratique et de règlement des différends à échoué, et ce, tout particulièrement lorsqu'il s'agit d'appliquer l'alinéa 3(1)b) à des Premières nations fonctionnant selon un code électoral coutumier.