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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 42e Législature
Volume 150, Numéro 156

Le mardi 7 novembre 2017
L’honorable George J. Furey, Président


LE SÉNAT

Le mardi 7 novembre 2017

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

Les victimes de la tragédie

Sutherland Springs—Minute de silence

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j’aimerais prendre un moment pour souligner un acte de violence insensé qui a été commis dimanche à Sutherland Springs, au Texas.

[Traduction]

Cette tragédie a coûté la vie à 26 personnes, dont des enfants, et a fait au moins 20 blessés.

J’invite les honorables sénateurs à se lever pour observer un moment de silence à la mémoire des victimes.

(Les honorables sénateurs observent une minute de silence.)


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le Sénat

Le cent cinquantième anniversaire de sa première séance

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, le 150e anniversaire du Canada marque une étape importante et donne l’occasion de faire une rétrospective pour voir dans quelle mesure, au cours des 150 dernières années, le Parlement a respecté les principes de paix, d’ordre et de bonne gouvernance qui constituent les véritables fondements de la Confédération canadienne. Certains diront que le Parlement s’est fort bien acquitté de cette tâche.

Vu dans son ensemble, le Canada possède de très solides racines démocratiques qui ne cessent de se renforcer au fil du temps. Cependant, quand on y regarde de plus près, on constate que la démocratie est en constante évolution. Songeons par exemple aux Pères fondateurs du Canada. Même si leurs intentions étaient fort louables, les Pères de la Confédération formaient, comme leur nom le laisse entendre, un groupe plutôt exclusif. Néanmoins, ils ont créé un cadre dans lequel la nation pouvait évoluer.

Au cours des 150 dernières années, de nombreux changements ont fait du Canada un pays plus inclusif et plus démocratique. Cependant, la transition n’a pas été facile et ne l’est toujours pas.

[Français]

Chaque jour, lorsque nous entrons dans cette Chambre, nous passons près du buste de James Gladstone, le premier sénateur autochtone, et de ceux de Mariana Jodoin, la première sénatrice francophone, et de Cairine Wilson, la première femme nommée au Sénat. Ce n’est pas par hasard qu’ils ont été placés à l’entrée de la Chambre. Ces bustes nous rappellent le rôle du Sénat au sein du Parlement canadien, qui consiste à lutter pour la justice, l’inclusion et la représentation des minorités.

En 1867, la représentation des minorités évoquait surtout des régions peu peuplées. Au fil des ans, notre vision de la représentation minoritaire a pris de l’envergure pour inclure les personnes exclues à cause de leur sexe, de leur langue, de leur religion, de leur ethnicité ou de leur identité ou expression de genre.

[Traduction]

La démocratie canadienne se trouve renforcée par le Sénat qui, d’une voix forte, attire l’attention de la Chambre élue et des Canadiens sur certains enjeux, ou sur les conséquences d’une mesure législative qui sont mises au jour grâce à un second examen objectif. Le Sénat permet de renforcer la démocratie parce qu’il effectue un travail complémentaire à celui de l’autre endroit, en adoptant une vision à long terme, sans être influencé par des visées électorales à court terme.

Mesdames et messieurs les sénateurs, tout au long de ma carrière, j’ai souvent été inspiré par les mots de Karl Reinhold Niebhur, un théologien germano-américain, qui a écrit que :

La capacité de l’homme pour la justice rend la démocratie possible, mais l’inclination de l’homme pour l’injustice rend la démocratie nécessaire.

En ce jour très spécial, célébrons la capacité des Canadiens, hommes et femmes, pour la justice. En tant que parlementaires, soyons fiers d’avoir une démocratie qui évolue au service des Canadiens et de la justice. L’arc de l’histoire est long, mais il tend vers la justice.

[Français]

L’honorable Larry W. Smith (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, grâce à cette Chambre, le Canada jouit d’une renommée internationale en ce qui a trait à son excellent système de gouvernement, souvent appelé un « gouvernement stable ». Le maintien de notre réputation depuis 150 ans témoigne du fait qu’il vaut mieux faire preuve de prudence lorsqu’on parle de changement.

[Traduction]

Depuis 2015, des pressions constantes sont exercées pour modifier le système en créant de nouveaux concepts, de nouveaux groupes et de nouveaux titres et en affichant un mépris fondamental pour les traditions qui servent bien notre pays depuis 150 ans.

Je veux prendre le temps de rendre un hommage particulier au personnel clé qui a travaillé pour le Sénat tout au long des 150 dernières années ainsi qu’aux personnes qui détiennent le savoir institutionnel qui guide nos délibérations. Je remercie le greffier du Sénat, le greffier principal, les greffiers des comités, les greffiers au Bureau, les conseillers juridiques du Sénat et l’huissier du bâton noir d’avoir travaillé avec diligence pendant cette période de pressions constantes pour forger de nouvelles règles et modifier toutes les conventions.

Après avoir passé près de sept ans au Sénat, je suis infiniment reconnaissant envers l’Administration du Sénat, qui s’efforce avec fierté et honneur de transmettre les traditions profondément ancrées du Parlement. Nous devons profiter de cette journée pour réfléchir à la façon dont les règles et les procédures pérennisent la démocratie dans notre grand pays. Nous devons féliciter les gardiens de notre mémoire institutionnelle et les encourager à insister fermement pour que les traditions soient conservées.

L’avenir de notre système n’est plus assuré, et je mets en garde ceux qui demandent instamment de faire changer le Règlement sous le couvert de la modernisation. Des pressions ont été exercées pour que l’on élimine le processus d’ajournement des débats pour y substituer un comité qui déterminerait au préalable le calendrier des débats. Selon moi, il s’agit d’un affront à la démocratie, qui retire aux membres du public le privilège d’entrer en relation avec les parlementaires, d’exprimer leur point de vue et de modifier les délais impartis au débat. De surcroît, cette pratique enlève aux parlementaires le privilège de participer spontanément à un débat et de mener de plus amples recherches, un privilège que protège le système actuel.

(1410)

Le débat au Parlement est crucial pour notre démocratie. Un processus législatif efficace accorde autant de place à la promotion qu’à l’opposition. Le processus d’examen et de critique permet d’améliorer tous les projets de loi. Je suis persuadé que vous conviendrez tous que, lorsqu’il s’interroge convenablement sur les projets de loi dont il est saisi, le Sénat réussit toujours à les améliorer. Le système de Westminster est structuré de manière à ce que les règles applicables au débat permettent de mener le second examen objectif auquel nous aspirons afin de bien servir l’ensemble de la population canadienne.

Nous soulignons cette année les 150 ans du système de Westminster au Canada et nous saluons ses 150 prochaines années.

L’honorable Yuen Pau Woo : Honorables collègues, j’interviens aujourd’hui pour souligner le 150e anniversaire de la première séance du Sénat du Canada. Cet anniversaire arrive à point nommé pour nous rappeler le rôle que la Chambre haute a joué dans l’édification du Canada en tant que nation et il nous donne l’occasion de souligner l’importance que continuera de revêtir l’institution du Sénat pour les générations à venir.

Contrairement à la Chambre des communes, le Sénat repose avant tout sur la notion d’indépendance. Le Sénat peut réaliser son mandat de base, qui consiste à procéder à un examen critique des projets de loi et à étudier des questions d’importance nationale, en soustrayant ses délibérations aux calculs à court terme des politiques électoralistes qui sont inhérentes à la Chambre basse. Comme l’ancien sénateur Arthur Roebuck l’a dit en 1951 :

Organisme judiciaire, le Sénat, à mon humble avis, s’est acquitté de ses fonctions avec un égal succès par le passé, en étudiant les mesures dont il était saisi avec indépendance et plus ou moins de désintéressement, ayant toujours devant les yeux la répercussion du projet de loi à l’étude sur le Canada dont les sénateurs sont de fiers citoyens.

Il va sans dire que la création du Sénat a joué un rôle essentiel dans la Confédération. Comme nous le savons, le Sénat avait pour but d’offrir une meilleure représentation aux régions canadiennes qui, puisqu'elles n'avaient qu’une faible population à l’époque, détenaient moins de sièges à la Chambre des communes. Ce sont les travaux du Sénat en vue de mettre au point l’accord qui verrait l’établissement du Canadien Pacifique Limitée qui ont incité ma propre province, la Colombie-Britannique, à se joindre à la Confédération en 1871. Le chemin de fer et l’appartenance de la Colombie-Britannique à la Confédération sont à l’origine de la devise du pays, « d’un océan à l’autre ». Cela dit, le chemin de fer avait également pour but de relier le Canada à l’océan Pacifique et aux pays d’Asie, comme le Japon et la Chine, ainsi qu’à d’autres parties de cette région.

Les liens du Canada avec l’Asie datent effectivement d’aussi loin que la Confédération elle-même, et des gens débarquent au Canada depuis l’autre côté du Pacifique depuis plus de 150 ans; c’est d’ailleurs une caractéristique qui définit notre pays. Je suis fier de faire partie d’une institution qui s’est opposée aux pires des politiques gouvernementales discriminatoires à l’endroit des Canadiens d’origine asiatique. À partir des années 1880, il y a eu des débats animés au Parlement au sujet d’éventuelles mesures visant à exercer de la discrimination contre les Canadiens d’origine chinoise et les migrants chinois, débats qui ont mené à l’adoption de la tristement célèbre Loi de l’immigration chinoise de 1923, communément appelée la Loi d’exclusion des Chinois.

Chers collègues, c’est ici au Sénat que l’indépendance d’esprit et la défense des minorités ont primé. De nombreux sénateurs, outrés par les restrictions imposées sur l’immigration chinoise et les mesures répressives comme la taxe d’entrée, s’y sont opposés. Comme l’a dit l’ancien sénateur James Dever :

Nous, qui sommes fiers de la liberté que nous procurent nos institutions et de l’abolition de l’esclavage aux États-Unis et qui rêvons de faire le tour du monde, lanterne à la main, pour répandre la lumière partout où nous allons — que nous devions devenir des exploiteurs d’esclaves et empêcher les étrangers de gagner nos rivages hospitaliers parce que leur langue, leurs habits et la couleur de leur peau diffèrent des nôtres, afin de ménager les sensibilités de quelques habitants de la Colombie-Britannique, c’est une chose que je ne comprends pas.

En tant que 942e sénateur dans l’histoire de 150 ans du Sénat, c’est un honneur pour moi de suivre les traces d’un si grand nombre de nos prédécesseurs qui ont maintenu l’importance fondamentale d’un Sénat indépendant, défendu les minorités, représenté les régions d’où nous venons et agi dans l’intérêt à long terme du Canada. Le meilleur est à venir.

[Français]

L’honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, c’est un privilège que de pouvoir souligner aujourd’hui le 150e anniversaire de la première séance du Sénat, qui s’est tenue le 6 novembre 1867.

Le Canada d’aujourd’hui est bien différent de celui d’il y a 150 ans. C’est un pays à nul autre pareil dans le monde occidental. Certes, nous le devons à l’esprit de conciliation qui animait nos fondateurs, mais aussi au rôle particulier qu’a joué le Sénat dans cette évolution, et c’est ce que je voudrais expliquer aujourd’hui et célébrer avec vous tous.

En 1864, lorsque les fondateurs ont été confrontés à l’objectif de fonder un seul grand pays, tout en respectant les droits de ses deux grandes communautés linguistiques et la volonté de chacune de ses régions de continuer à se développer selon son caractère propre, ils ont convenu de privilégier la formation d’une fédération où on attribuerait au centre ce qu’il y a de commun à tous, mais où chaque province retiendrait la capacité de se développer selon ses choix et ses caractères régionaux.

[Traduction]

Le Canada n’est pas né d’une idéologie, d’une vaste entreprise, d’une guerre ou d’un conflit civil. Sa création découle essentiellement d’une approche pragmatique visant à unifier deux communautés linguistiques et diverses régions avec différents niveaux de richesses et d’aspirations dans le but de créer un plus grand pays.

C’est le Sénat qui a été chargé de la responsabilité de faire entendre la voix des régions au cœur du gouvernement et de représenter ses minorités afin que celles-ci ne soient pas oubliées sous le poids de la majorité. Autrement dit, c’est au Sénat que le principe fédéral a été inscrit et c’est pour cette raison qu’on lui a accordé un pouvoir législatif égal à celui de la Chambre des communes relativement à l’adoption des lois.

Le Sénat a joué un rôle fondamental dans l’édification du Canada. À deux reprises, soit en 1980 et en 2014, la Cour suprême du Canada a confirmé et souligné le rôle unique de la Chambre haute au sein de notre système gouvernemental.

Honorables sénateurs, nous ne devrions jamais oublier le serment d’office que nous avons tous prononcé avant d’entrer en fonction, selon lequel nous devons nous exprimer au nom de notre région et des minorités linguistiques et culturelles qui caractérisent le tissu social du pays. On a élargi et confirmé cette responsabilité en 1982 avec l’adoption de la Charte des droits.

Les droits et libertés des Canadiens et des Autochtones sont toujours mieux assurés lorsque le Sénat évalue en toute indépendance l’incidence des projets de loi du gouvernement sur les personnes qui ont du mal à se faire entendre par la majorité, ou qui n’en ont pas les capacités, afin qu’on tienne compte de leurs intérêts et de leurs attentes.

Tant que le Sénat remplit son devoir constitutionnel, le Canada continuera de prospérer et d’être un symbole de liberté et de dignité pour tout le monde.

Voilà ce que la médaille, qui a été décernée lors du 150e anniversaire du Sénat, vise à célébrer, à savoir le lien essentiel entre le Sénat et la réussite du Canada en tant que fédération.

Que cet anniversaire soit l’un parmi tant d’autres dans notre quête d’un monde plus humain et démocratique.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de François Caron-Melançon et de Rebecca Gasarabwe. Ils sont les invités de l’honorable sénateur Gold.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

ENSEMBLE pour le respect de la diversité

L’honorable Marc Gold : Honorables sénateurs, le Canada ne se définit pas uniquement par sa géographie, même si elle a contribué à façonner ce que nous sommes d’innombrables façons. Il se définit également par les principes et les valeurs qui sont partie intégrante de ses institutions juridiques et politiques : la démocratie, l’égalité, le pluralisme et le respect de la diversité.

Nous devrions être fiers — ou, devrais-je plutôt dire, nous estimer privilégiés — de vivre dans un pays qui accorde la priorité à ces valeurs et qui s’inspire de ces grands principes pour s’attaquer aux injustices, du passé et actuelles, qui nous affligent encore aujourd’hui. C’est d’autant plus important dans le contexte actuel, alors que nous constatons l’émergence de valeurs antidémocratiques et l’érosion des principes qui nous sont chers, un peu partout dans le monde et de plus en plus près de chez nous.

(1420)

La situation mondiale nous rappelle que ces principes et ces valeurs démocratiques sont fragiles et ne doivent pas être tenus pour acquis. En effet, la solidité de nos institutions démocratiques repose sur l’engagement des citoyens à participer aux activités de celles-ci.

C’est pour cette raison qu’il est essentiel de mobiliser les jeunes dans leur apprentissage de la vie citoyenne. Il importe de les écouter, de leur donner l’occasion de s’exprimer et de les aider à acquérir les outils nécessaires pour vivre dans un monde de plus en plus diversifié et exigeant. Il importe également de travailler avec eux pour qu’ils puissent comprendre les conséquences de leurs actions – et même de leur inaction – en tant que citoyens, et de leur faire connaître les institutions politiques et juridiques qui sont le fondement de l’ordre constitutionnel au Canada.

[Traduction]

Je prends quelques minutes pour vous parler d’un excellent organisme avec qui j’ai le privilège de collaborer depuis près de 20 ans et dont j’ai présidé le conseil d’administration pendant 10 ans : ENSEMBLE pour le respect de la diversité. Je vous ai parlé il y a quelques instants de l’obligation que nous avons, envers nous-mêmes et envers les jeunes; or, c’est ce qui est au cœur même d’ENSEMBLE.

Cet organisme a été fondé à Montréal en 1996. Il s’appelait alors la Fondation de la tolérance. Il organisait d’abord, dans les écoles secondaires francophones du Québec, des ateliers interactifs et multimédias sur les préjugés, la discrimination et même le génocide.

Par la suite, il a étendu ses activités au réseau d’écoles anglophones et il a aussi proposé des ateliers sur l’intimidation, tant en français qu’en anglais, ainsi que des programmes spécialisés sur le sexisme, l’homophobie, le racisme, le colonialisme et, récemment, sur la déradicalisation.

Je suis particulièrement fier du travail qu’accomplit ENSEMBLE dans les communautés autochtones. Après être allé, il y a quelques années, dans la communauté atikamekw de Manawan, au Québec, cet organisme donnera cette année des ateliers dans un certain nombre de communautés cries, innues et algonquines.

ENSEMBLE se déplace aussi à l’extérieur du Québec. Grâce aux fonds qu’il reçoit des gouvernements et du secteur privé, il offre maintenant des ateliers et des programmes dans l’ensemble du pays, le plus souvent en collaboration avec les réseaux d’écoles francophones des provinces. Cette année, les équipes d’animateurs travaillent par exemple avec des élèves de la Nouvelle-Écosse…

Son Honneur le Président : Je suis désolé, sénateur Gold. Il vous reste 10 secondes pour conclure. Vous avez déjà dépassé de beaucoup votre temps de parole.

Le sénateur Gold : Je suis très fier de cet organisme. Je vous invite à venir avec moi à la salle 238-S de l’édifice du Centre, à 17 heures, pour discuter avec les animateurs qui seront présents.

La Médaille commémorative du Sénat

L’honorable David M. Wells : Honorables sénateurs, je prends la parole pour célébrer l’histoire et le travail exceptionnel. Hier, à l’Amphithéâtre national de la presse, les sénateurs Joyal, C.P., Bovey, Unger et moi avons été heureux d’annoncer la Médaille commémorative du 150e anniversaire du Sénat. Le Sénat avait décidé de frapper une médaille après que le gouvernement fédéral eut décidé de ne pas créer de médaille du 150e. Beaucoup de sénateurs estimaient qu’il fallait reconnaître les personnes désintéressées d’un océan à l’autre qui cherchent continuellement à améliorer les collectivités et le pays. La médaille vise aussi à reconnaître les 150 années d’existence du Sénat en tant que Chambre de second examen objectif et catalyseur d’idées et d’examen législatif.

Le Sénat unit un groupe diversifié de Canadiens accomplis au service de leur pays. Cependant, aujourd’hui et au cours de l’année qui vient, les sénateurs remettront des médailles commémoratives à de nombreux Canadiens exceptionnels. Nous profitons de l’occasion du 150e anniversaire du Canada pour reconnaître des Canadiens incroyables dont les contributions, le travail bénévole et le dévouement dans leur collectivité ont contribué à faire de notre pays un meilleur endroit où vivre.

Comme il y a énormément de Canadiens qui s’impliquent pleinement dans leur collectivité et qui, par leur générosité, leur dévouement, leur bénévolat et leur travail remarquable, font de leur ville, de leur collectivité, de leur région, de leur province ou de leur territoire un meilleur endroit où vivre, il n’a pas été facile de choisir les lauréats. Tout comme l’a dit la sénatrice Unger lors de la conférence de presse d’hier, j’aimerais être en mesure de remettre ce prix à tous les bénévoles de ma province.

Lorsque j’ai joint les personnes nommées, certaines ont pleuré de joie et toutes étaient véritablement surprises d’avoir été choisies en vue de recevoir un tel honneur. Les personnes nommées viennent de différents milieux, mais elles ont toutes apporté des contributions considérables à leur collectivité. Je vous en présenterai trois.

Patrick Hickey est un étudiant du premier cycle qui défend la cause de la santé mentale depuis l’époque où il était à l’école secondaire. Il a d’abord organisé à son école une activité ayant pour thème la santé mentale. Il a ultérieurement fondé le Metro Youth Mental Health Committee, un groupe d’élèves formé de représentants des 13 écoles secondaires de la région de St. John’s. Il a siégé à des comités consultatifs pour Jeunesse, J’écoute et la Fondation Movember ainsi qu’au comité consultatif en santé mentale et toxicomanies du ministre de la Santé et des Services communautaires. M. Hickey m’a dit que la première étape consiste simplement à défendre la cause de la santé mentale quotidiennement.

Sam et Pearl King, de Deer Lake, ont constaté qu’il n’y avait rien pour nourrir les gens qui n’ont pas assez à manger dans leur localité. Ils ont commencé par donner à manger aux enfants de l’école élémentaire Elwood dans le cadre du programme des petits-déjeuners de l’école. En 1996, ils ont ouvert dans leur sous-sol une banque alimentaire, qu’ils ont tenue pendant 15 ans.

Ils ont par la suite déménagé dans un immeuble et ont recruté des bénévoles et créé un conseil d’administration formé de bénévoles, et ils continuent de nourrir les personnes dans le besoin dans leur localité. Maintenant octogénaires, leur plus grand legs, c’est ce qu’ils ont créé et ceux qui reprendront le flambeau.

Brenda Jeddore est une enseignante de la côte sud de Terre-Neuve, dans la communauté des Premières Nations de Conne River. Mme Jeddore y a accepté son premier poste dans l’enseignement comme professeure de première année et professeure de musique. Depuis de nombreuses années, à Conne River, elle participe aux cérémonies traditionnelles, plus particulièrement la partie des tambours et des chants. Elle a appris la langue mi’kmaq des anciens et, aujourd’hui, elle travaille avec des linguistes mi’kmaq pour que cette langue soit utilisée dans le programme de musique qu’elle a lancé.

Honorables sénateurs, bien qu’il y ait d’innombrables Canadiens admirables, je suis heureux que le Sénat ait choisi d’honorer ces nombreux Canadiens méritants et leurs efforts en vue de faire de notre pays et de nos collectivités des endroits formidables.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune d’un groupe de quatorze femmes néo-écossaise d’origine africaine, les Young Women of Excellence de l’Église baptiste unie d’East Preston, dirigée par la pasteure LeQuita Porter. Elles sont accompagnées de George Bernard, époux de la sénatrice de la sénatrice Bernard, et elles sont les invitées.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

La Nouvelle-Écosse

L’Église baptiste unie d’East Preston—Le groupe Young Women of Excellence

L’honorable Wanda Thomas Bernard : Honorables sénateurs, je suis certaine que vous connaissez tous la place de la Nouvelle-Écosse dans l’histoire du Canada. Cependant, je prends la parole aujourd’hui pour vous parler de la communauté noire d’East Preston.

Établie sous forme de collectivité ségréguée dans les années 1700 et 1800, la collectivité d’East Preston a été marginalisée au cours de l’histoire en raison du racisme systémique. Toutefois, j’ai le privilège aujourd’hui d’accueillir un groupe des Young Women of Excellence de l’Église baptiste unie d’East Preston. Sous la gouverne de la pasteure LeQuita Porter, la communauté de l’Église baptiste unie d’East Preston vient de fêter ses 175 ans en septembre. Étant donné que le Parlement a 150 ans, la présence de ce groupe, le premier groupe de Noirs de la Nouvelle-Écosse à revendiquer sa place à la tribune du Sénat du Canada, me comble d’une fierté qu’il m’est difficile d'exprimer. Je vous remercie de me donner l’occasion de les nommer officiellement ici, dans cette extraordinaire institution.

Les Young Women of Excellence sont — et je les prie de se lever à mesure que je les nommerai — Adrionna Brooks, Tanamya Brooks, Jalisa Colley, Senai Colley, Hailey Diggs, Marguerite Dunkley, Janaysha Hum, Nylita Grant, Rokeesha Grant, Santia Grant, Kahlyn McIntyre, Beyonca Payne, Andrea Thomas, et Kendra Slawter.

(1430)

Elles sont accompagnées d’un groupe de chaperons formidables, que j’appelle des mentors : Melinda Diggs, Margaret Fraser, Maxine Maxwell, la révérende Joyce Ross, Tamara Thomas et leur organisatrice, la pasteure LeQuita Porter.

Le seul homme du groupe est George Bernard, mon paparazzi attitré, qui s’est porté volontaire pour être notre photographe.

Je vous remercie de nous donner cette occasion et d’accueillir chaleureusement le groupe Young Women of Excellence d’East Preston, qui sont venues célébrer l’histoire avec nous. Merci.


AFFAIRES COURANTES

Le directeur parlementaire du budget

Le Budget supplémentaire des dépenses (B) de 2017-2018—Dépôt du rapport

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport du Bureau du directeur parlementaire du budget intitulé Budget supplémentaire des dépenses (B) 2017-2018, conformément à la Loi sur le Parlement du Canada, L.R.C. 1985, ch. P-1, par. 79.2(2).

[Français]

La Loi sur les Indiens

Évaluation des répercussions démographiques possibles des modifications qui pourraient être apportées à l’article 6 de la Loi sur les Indiens—Dépôt de document

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, un document intitulé Évaluation des répercussions démographiques possibles des modifications qui pourraient être apportées à l’article 6 de la Loi sur les Indiens.

L’ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes

Dépôt du rapport annuel de 2016-2017

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport annuel de 2016-2017 du Bureau de l’ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes.

[Traduction]

ParlAmericas

La rencontre du Réseau parlementaire sur le changement climatique, tenue les 3 et 4 août 2017—Dépôt du rapport

Hon. Tobias C. Enverga, Jr. : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la Section canadienne de ParlAmericas concernant sa participation à la 2e rencontre du Réseau parlementaire sur le changement climatique, tenue à Panama, au Panama, les 3 et 4 août 2017.


PÉRIODE DES QUESTIONS

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, conformément à la motion adoptée par le Sénat le jeudi 2 novembre 2017, la période des questions aura lieu à 15 h 30.

[Français]

Dépôt de la réponse à une question inscrite au Feuilleton

La justice—Les sondages publics en ligne sur le système de justice criminelle

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 56, en date du 3 octobre 2017, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Boisvenu, concernant un sondage effectué pour le ministère de la Justice.

[Traduction]

Réponses différées à des questions orales

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer les réponses aux questions orales suivantes : la question posée par l’honorable sénateur Downe, le 20 septembre 2017, concernant la sécurité publique et la cybersécurité; la question posée par l’honorable sénateur Kenny, le 21 septembre 2017, concernant la défense nationale et le processus judiciaire militaire; la question posée par l’honorable sénatrice Wallin, le 5 octobre 2017, concernant la santé et les directives anticipées; et, enfin, la question posée par l’honorable sénatrice Dyck, le 19 octobre 2017, concernant les affaires autochtones et du Nord et les modifications à la Loi sur les Indiens.

La sécurité publique

La cybersécurité

(Réponse à la question posée le 20 septembre 2017 par l’honorable Percy E. Downe)

Le gouvernement du Canada prend la question de la vie privée des Canadiennes et des Canadiens et de la protection de leurs renseignements personnels très au sérieux.

Le ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique (ISDE) est responsable de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (LPRPDE), la loi fédérale de protection de la vie privée pour les organisations du secteur privé.

Les organisations du secteur privé qui exercent leurs activités au Canada sont assujetties à la LPRPDE et à la responsabilité de protéger les renseignements personnels dont ils ont la garde, peu importe leur emplacement géographique.

ISDE a récemment publié un règlement modifiant la LPRPDE qui habilite les consommateurs et encourage les entreprises à améliorer leurs pratiques en matière de sécurité.

Lorsqu’il sera en vigueur, ce règlement imposera de nouvelles exigences aux entreprises qui devront divulguer de manière proactive toutes atteintes à la vie privée.

Ce règlement est fondé sur des principes mondialement reconnus, tels que la nécessité d’obtenir un consentement valable, la transparence et la reddition de comptes.

En ce qui a trait à la récente atteinte à la protection des données chez Equifax, Equifax Canada confirme qu’elle a été la cible d’une cyberattaque qui a entraîné des atteintes à la vie privée et qui pourrait avoir touché des consommateurs canadiens.

L’entreprise a annoncé publiquement qu’elle posterait des lettres de notifications directement aux consommateurs touchés, en collaboration avec le commissaire à la protection de la vie privée.

Le gouvernement comprend, le commissaire à la protection de la vie privée a demandé à Equifax Canada de remettre un rapport complet au sujet de l’atteinte à la sécurité, qui comprend les détails sur la manière dont les Canadiennes et Canadiens ont été touchés.

ISDE surveille cette situation de près.

La défense nationale

Le processus judiciaire militaire

(Réponse à la question posée le 21 septembre 2017 par l’honorable Colin Kenny)

Le système de justice militaire du Canada est un système de justice distinct et parallèle qui fait partie intégrante de la mosaïque juridique canadienne. Il partage de nombreux principes sous-jacents avec le système de justice pénale civile et est assujetti au même cadre constitutionnel, notamment à la Charte. La Cour suprême du Canada a fait valoir directement, à plus d’une occasion, l’importance d’un système de justice militaire distinct pour répondre aux besoins des Forces armées canadiennes.

L’efficacité opérationnelle dépend de la capacité du commandement à inculquer et à maintenir la discipline. Le besoin particulier de discipliner est un élément essentiel de la raison d’être du système. Les procès sommaires permettent de juger les infractions d’ordre militaire moins graves plus rapidement et efficacement dans les unités.

L’honorable Patrick LeSage, ancien juge en chef de la Cour supérieure de l’Ontario, a été nommé par l’ancien ministre de la Défense nationale comme responsable de l’examen indépendant de la Loi sur la défense nationale. Cet examen fait suite au travail de deux anciens juges en chef de la Cour suprême du Canada, Brian Dickson et Antonio Lamer. Dans son examen, le juge en chef LeSage dit que « le procès sommaire est essentiel au maintien de la discipline dans les unités et donc indispensable dans le travail de vie ou de mort que les forces armées accomplissent quotidiennement ».

La santé

Les directives anticipées

(Réponse à la question posée le 5 octobre 2017 par l’honorable Pamela Wallin)

En décembre 2016, le gouvernement a entrepris des examens indépendants sur l’aide médicale à mourir dans trois cas complexes : les demandes faites par des mineurs matures, les demandes anticipées et les demandes où la maladie mentale est le seul problème de santé sous-jacent. Le Conseil des académies canadiennes (CAC), un organisme indépendant sans but lucratif qui effectue des évaluations d’experts reposant sur des faits visant à appuyer et à enrichir l’élaboration des politiques publiques au Canada, a été mandaté pour mener ces examens.

Le CAC a mis sur pied un comité d’experts formé de 44 membres qui possèdent une expertise dans des domaines tels que le droit, la médecine, l’éthique, les sciences sociales et les sciences de la santé. Les trois groupes de travail du comité se sont tous rencontrés à au moins une reprise et se rencontreront de nouveau en novembre 2017. Ils examineront alors les données probantes disponibles et détermineront quelles autres données probantes ou quels autres renseignements doivent être recueillis à l’appui de l’élaboration des rapports  finaux.

Le comité d’experts a également invité les groupes canadiens qui sont touchés par les cas visés par les examens à lui soumettre leurs commentaires par écrit au plus tard le 6 octobre 2017.

Les rapports finaux seront mis à la disposition des parlementaires et du public d’ici décembre 2018. Ces rapports présenteront un résumé des données probantes et des renseignements recueillis dans le cadre des examens et serviront de point de départ à un dialogue éclairé entre les Canadiens et Canadiennes ainsi que les décideurs.

Pour obtenir de plus amples renseignements sur le CAC et le comité d’experts sur l’aide médicale à mourir, consulter l’adresse suivante : http://www.sciencepourlepublic.ca/fr/assessments/in-progress/medical-assistance-dying.aspx.

Les affaires autochtones et du Nord

Les modifications à la Loi sur les Indiens

(Réponse à la question posée le 19 octobre 2017 par l’honorable Lillian Eva Dyck)

Le gouvernement a reçu une analyse démographique révisée de la part de M. Clatworthy, laquelle inclut des données sur un nombre de scénarios potentiels. Le coût total du contrat est de 23 049.60 dollars

Le rapport inclut des données tirées du Registre des Indiens et de l’Enquête nationale sur les ménages de 2011, lesquels présentent tous deux des limites. Puisque le Registre des Indiens a initialement été construit à partir des listes de traités et de bandes après la Loi sur les Indiens de 1951, plusieurs individus qui ont été retirés de ces listes avant cette période (et leurs descendants) ne peuvent pas être identifiés à l’aide du Registre des Indiens. Les données sur l’ascendance autochtone tirées de l’Enquête nationale sur les ménages de 2011 demeurent la meilleure option pour obtenir un ordre de grandeur des scénarios potentiels. Cependant, cette source demeure imprécise puisque les données sont sujettes à des fluctuations de l’auto-déclaration dans le temps.

Le 25 octobre 2017, Statistique Canada a diffusé les données du Recensement de 2016 sur les peuples autochtones. Le gouvernement a mis sous contrat M. Clatworthy afin qu’il mette à jour ses analyses démographiques en utilisant les données du Recensement 2016. Le coût total de ce contrat est de 4 592.00 dollars.


ORDRE DU JOUR

La Loi sur les Indiens

Projet de loi modificatif—Amendements des Communes—Motion tendant à approuver les premier et troisième amendements et à amender le deuxième amendement—Débat

Le Sénat passe à l’étude des amendements apportés par la Chambre des communes au projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (élimination des iniquités fondées sur le sexe en matière d’inscription) :

1.Titre intégral, page 1 : Substituer le titre intégral par ce qui suit :

« Loi modifiant la Loi sur les Indiens pour donner suite à la décision de la Cour supérieure du Québec dans l’affaire Descheneaux c. Canada (Procureur général) »

2.Article 2, page 2 : Supprimer les lignes 5 à 16

3.Article 11, page 9 : Substituer la ligne 30 par ce qui suit :

« Charte canadienne des droits et libertés, de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et, si »

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) propose :

Que le Sénat agrée les amendements 1 et 3 apportés par la Chambre des communes au projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (élimination des iniquités fondées sur le sexe en matière d’inscription);

Que, au lieu de l’amendement 2, le projet de loi S-3 soit modifié,

a)à la page 2, à l’article 2, par suppression des lignes 5 à 16;

b)à la page 5, par adjonction, après la ligne 34, de ce qui suit :

« 2.1 (1) Les alinéas 6(1)c.01) à c.2) de la même loi sont abrogés.

(2) Les alinéas 6(1)c.4) à c.6) de la même loi sont abrogés.

(3) L’alinéa 6(1)c) de la même loi devient l’alinéa a.1) et est déplacé en conséquence.

(4) L’alinéa 6(1)c.3) de la même loi devient l’alinéa a.2) et est déplacé en conséquence.

(5) Le paragraphe 6(1) de la même loi est modifié par adjonction, après l’alinéa a.2), de ce qui suit :

a.3) elle est un descendant en ligne directe d’une personne qui a droit à l’inscription, ou qui avait ou aurait eu ce droit, en vertu de l’un des alinéas a.1) ou a.2) et elle est née soit avant le 17 avril 1985, que ses parents aient été ou non mariés l’un à l’autre au moment de sa naissance, soit après le 16 avril 1985 et ses parents se sont mariés à n’importe quel moment avant le 17 avril 1985;

(6) Le passage du paragraphe 6(3) de la même loi précédant l’alinéa a) est remplacé par ce qui suit :

(3) Pour l’application des alinéas (1)a.3) et f) et du paragraphe (2) :

(7) L’alinéa 6(3)b) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

b) la personne qui est visée à l’un des alinéas (1)a.1), d), e) ou f) ou au paragraphe (2) et qui est décédée avant le 17 avril 1985 est réputée avoir le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa ou du paragraphe en cause;

(8) L’alinéa 6(3)c) de la même loi est abrogé.

(9) L’alinéa 6(3)d) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

d) la personne qui est visée à l’un des alinéas (1)a.2) ou a.3) et qui est décédée avant la date d’entrée en vigueur de l’alinéa en cause est réputée avoir le droit d’être inscrite en vertu de celui-ci. »;

c)à la page 7,

(i)par adjonction, après la ligne 23, de ce qui suit :

« 3.1 (1) L’alinéa 11(1)c) de la même loi est remplacé par ce suit :

c) elle a le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa 6(1)a.1) et a cessé d’être un membre de cette bande en raison des circonstances prévues à cet alinéa;

(2) Les alinéas 11(3)a) et a.1) de la même loi sont remplacés par ce qui suit :

a) la personne dont le nom a été omis ou retranché du registre des Indiens ou d’une liste de bande dans les circonstances prévues à l’un des alinéas 6(1)a.1), d) ou e) et qui est décédée avant le premier jour où elle a acquis le droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de la bande dont elle a cessé d’être membre est réputée avoir droit à ce que son nom y soit consigné;

a.1) la personne qui, n’eût été son décès, aurait eu le droit d’être inscrite en vertu des alinéas 6(1)a.2) ou a.3) à la date d’entrée en vigueur de l’alinéa en cause et qui aurait eu, à cette date, le droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de bande est réputée avoir droit à ce que son nom y soit consigné;

(3) Les alinéas 11(3.1)a) à i) de la même loi sont remplacés par ce qui suit :

a) elle a le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa 6(1)a.2) et son père a droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de bande ou, s’il est décédé, avait ce droit à la date de son décès;

b) elle a le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa 6(1)a.3) et l’un de ses parents ou un autre de ses ascendants, selon le cas :

(i) a cessé d’avoir le droit d’être membre de la bande en raison des circonstances prévues à l’alinéa 6(1)a.1),

(ii) n’avait pas droit d’être membre de la bande le 16 avril 1985.

3.2 Les paragraphes 64.1(1) et (2) de la même loi sont remplacés par ce qui suit :

64.1 (1) Une personne qui a reçu un montant supérieur à mille dollars en vertu de l’alinéa 15(1)a), dans sa version antérieure au 17 avril 1985, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui de cet alinéa, du fait qu’elle a cessé d’être membre d’une bande dans les circonstances prévues aux alinéas 6(1)a.1), d) ou e) n’a pas le droit de recevoir de montant en vertu de l’alinéa 64(1)a) jusqu’à ce que le total de tous les montants qu’elle aurait reçus en vertu de l’alinéa 64(1)a), n’eût été le présent paragraphe, soit égal à l’excédent du montant qu’elle a reçu en vertu de l’alinéa 15(1)a), dans sa version antérieure au 17 avril 1985, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui de cet alinéa, sur mille dollars, y compris les intérêts.

(2) Lorsque le conseil d’une bande prend, en vertu de l’alinéa 81(1)p.4), des règlements administratifs mettant en vigueur le présent paragraphe, la personne qui a reçu un montant supérieur à mille dollars en vertu de l’alinéa 15(1)a) dans sa version antérieure au 17 avril 1985, ou en vertu de toute autre disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui de cet alinéa, parce qu’elle a cessé d’être membre de la bande dans les circonstances prévues aux alinéas 6(1)a.1), d) ou e) n’a le droit de recevoir aucun des avantages offerts aux membres de la bande à titre individuel résultant de la dépense d’argent des Indiens au titre des alinéas 64(1)b) à k), du paragraphe 66(1) ou du paragraphe 69(1) jusqu’à ce que l’excédent du montant ainsi reçu sur mille dollars, y compris l’intérêt sur celui-ci, ait été remboursé à la bande. »,

(ii)à l’article 4, par substitution, à la ligne 31, de ce qui suit :

« (2) Les termes des articles 5 à 10.1 s’entendent au »,

(iii)à l’article 5, par substitution, aux lignes 35 et 36, de ce qui suit :

« date de la prise du décret visé au paragraphe 15(1). »;

d)à la page 8, à l’article 7, par substitution, aux lignes 13 et 14, de ce qui suit :

« la prise du décret visé au paragraphe 15(1) — le registraire est tenu de re- »;

e)à la page 9,

(i)à l’article 10, par substitution, à la ligne 1, de ce qui suit :

« d’entrée en vigueur du présent article et que l’un »,

(ii)par adjonction, après la ligne 4, de ce qui suit :

« 10.1 Il est entendu qu’aucune personne ni aucun organisme ne peut réclamer ou recevoir une compensation, des dommages-intérêts ou une indemnité de l’État, de ses préposés ou mandataires ou d’un conseil de bande en ce qui concerne les faits — actes ou omissions — accomplis de bonne foi dans l’exercice de leurs attributions, du seul fait qu’une personne n’était pas inscrite — ou que le nom d’une personne n’était pas consigné dans une liste de bande — à la date d’entrée en vigueur du présent article et que la personne ou l’un de ses parents ou un autre de ses ascendants a le droit d’être inscrit en vertu de l’un des alinéas 6(1)a.1), a.2) ou a.3) de la Loi sur les Indiens. »;

f)à la page 11, à l’article 15:

(i)par substitution, à la ligne 23, de ce qui suit :

« 15 (1) La présente loi, sauf les articles 2.1, 3.1, 3.2 et 10.1, entre en vigueur ou est répu- »,

(ii)par adjonction, après la ligne 26, de ce qui suit :

« (2) Les articles 2.1, 3.1, 3.2 et 10.1 entrent en vigueur à la date fixée par décret, laquelle doit être postérieure à la date fixée en vertu du paragraphe (1). »;

Qu’un message soit transmis à la Chambre des communes pour l’en informer.

— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour présenter une motion en réponse au message de la Chambre des communes relativement au projet de loi S-3.

(1440)

D’emblée, j’aimerais remercier les sénateurs de leur patience dans ce dossier.

J’aimerais également remercier les sénateurs, et particulièrement les chefs de file autochtones au Sénat, dont l’engagement à consulter le gouvernement, tant par principe qu’à des fins constructives, a mené à la motion d’aujourd’hui.

Je suis heureux d’annoncer que la motion à l’étude supprimerait de la Loi sur les Indiens toute discrimination fondée sur le sexe.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Harder : En même temps, le gouvernement honorera sa promesse de consulter à l’égard de la mise en œuvre en faisant entrer en vigueur la disposition portant sur la date limite de 1951 après la conclusion des consultations élaborées en collaboration avec des groupes autochtones et des personnes touchées. Ces consultations commenceront au début de l’année prochaine dans le cadre d’un plan global de mise en œuvre, dont je vous communiquerai quelques détails dans un instant.

[Français]

En tant que représentant du gouvernement au Sénat, je tiens à préciser que le contenu de cette motion est l’exemple d’un gouvernement qui est à l’écoute de ses citoyens et qui s’est engagé en faveur de la vérité et de la réconciliation. Cette motion est aussi le fruit du travail de cette Chambre, qui s’est acquittée de ses fonctions parlementaires en matière de complémentarité, de représentation des minorités et de protection des valeurs énoncées dans la Charte.

[Traduction]

Comment sommes-nous parvenus jusqu’ici? Il pourrait s’avérer utile, dans l’étude de la motion, de passer en revue les étapes qui nous ont menés au point où nous en sommes.

L’automne dernier, en réaction directe à la décision de la Cour suprême du Québec dans l’affaire Descheneaux et al., le gouvernement a présenté le projet de loi S-3 au Sénat. Le but du projet de loi était, d’une part, de remédier à ce qui, dans la situation des plaignants, constitue une violation de la Charte selon la cour et, d’autre part, d’éliminer les autres iniquités fondées sur le sexe en matière d’inscription connues dans la Loi sur les Indiens, outre celles signalées dans l’arrêt en question.

Comme le savent les honorables sénateurs, la démarche a été entreprise dans le contexte d’un délai imposé par la cour. En effet, la cour avait donné au Parlement jusqu’au 3 février 2017 pour remédier aux violations de la Charte fondées sur le sexe précisément relevées dans l’affaire Descheneaux.

Étant donné que le gouvernement s’est engagé à apporter en partenariat et à la faveur de consultations les modifications qui touchent les Premières Nations, et étant donné les contraintes de temps imposées par les tribunaux, il fallait, après l’adoption du projet de loi S-3, mener de larges consultations au sujet des iniquités alléguées en matière d’inscription non liées au sexe et de la réforme plus large portant sur l’inscription et l’appartenance aux bandes.

À la demande insistante du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, le gouvernement a demandé et obtenu que le délai fixé par les tribunaux soit reporté au 3 juillet pour permettre des discussions plus poussées sur la nécessité de nouvelles modifications pour redresser d’autres iniquités fondées sur le sexe dans l’inscription aux termes de la Loi sur les Indiens.

[Français]

Grâce au travail assidu du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, d’autres sénateurs de cette Chambre et des témoins qui ont comparu devant le comité, et grâce au soutien et à la coopération du gouvernement, de nombreuses améliorations ont été apportées au projet de loi S-3.

Plusieurs groupes que nous ne connaissions pas et qui ont été touchés par des inégalités basées sur le genre ont été désignés par les témoins de ce comité sénatorial. Ils ont été inclus dans le projet de loi par la suite.

[Traduction]

Le gouvernement a travaillé avec les sénateurs pour s’attaquer au problème de la paternité non déclarée en garantissant dans le projet de loi S-3 de nouvelles protections procédurales. Le projet de loi a également été amendé pour exiger du gouvernement qu’il fasse rapport au Parlement à un certain nombre d’occasions et de diverses manières, de façon à informer tous les parlementaires et tous les Canadiens des progrès accomplis vers une réforme plus large du régime d’inscription et d’appartenance aux bandes.

Le gouvernement a accueilli favorablement et appuyé tous ces amendements.

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones a également ajouté un amendement au projet de loi S-3 afin d’adopter ce qu’on a fini par appeler « l’application universelle de l’alinéa 6(1)a) ». Cet amendement voulait que soit accordé le droit au statut d’Indien inscrit aux termes de cet alinéa à tous ceux qui l’avaient perdu en 1869 et à tous leurs descendants nés avant 1985.

Le Sénat a adopté le projet de loi amendé avec un solide appui de tous les groupes de sénateurs, y compris cet amendement prévoyant l’application universelle de l’alinéa 6(1)a), et il l’a renvoyé à l’autre endroit.

(1450)

Le printemps dernier, nous avons reçu de l’autre endroit un message nous signifiant que la vaste majorité des amendements du Sénat étaient acceptés. Toutefois, son amendement prévoyant l’application universelle de l’alinéa 6(1)a) avait été retiré du projet de loi.

Compte tenu des préoccupations que continuaient d’exprimer des sénateurs et des interlocuteurs autochtones, craignant que, sans cet amendement, le projet de loi S-3 ne parvienne toujours pas à éliminer toutes les iniquités fondées sur le sexe dans le régime d’inscription aux termes de la Loi sur les Indiens, je n’ai pas mis le message à l’étude en juin.

Le gouvernement a plutôt demandé une autre prorogation de délai aux tribunaux afin d’avoir plus de temps pour travailler avec les législateurs, les Premières Nations et d’autres parties intéressées et, ainsi, adopter une version du projet de loi qui garantisse aux sénateurs la suppression de toutes les iniquités fondées sur le sexe dans les dispositions de la Loi sur les Indiens concernant l’inscription.

Bien que la Cour supérieure du Québec ait rejeté cette demande, la Cour d’appel du Québec a accepté de repousser le délai au 22 décembre prochain. Elle a également dit clairement que ce serait le dernier report accordé.

L’été dernier, le gouvernement a aussi commandé une analyse démographique sur les divers scénarios découlant de divers amendements qu’on pourrait apporter au projet de loi S-3.

[Français]

Le 19 octobre dernier, je me suis engagé dans cette Chambre à partager avec tous les sénateurs une analyse démographique qui a été préparée pour favoriser des débats qui soient les plus exhaustifs possible. Dans le cadre de l’examen de cette analyse démographique, le gouvernement a mis à jour cette dernière pour y inclure les données du recensement de 2016 portant sur les Autochtones, qui ont été publiées le 25 octobre 2017. J’ai transmis ces renseignements mis à jour à tous les sénateurs hier, et ils sont maintenant déposés au Sénat.

Dans le cadre de la motion d’aujourd’hui, j’ai le grand plaisir de vous annoncer que le gouvernement s’engage à travailler avec des parlementaires, des membres des Premières Nations, des individus touchés et des experts pour s’assurer que toutes les inégalités basées sur le genre seront retirées des dispositions de la Loi sur les Indiens qui concernent l’inscription.

[Traduction]

Quant au seuil de 1951, le gouvernement a estimé et estime toujours que l’état actuel du droit n’exige pas que les recours de la Charte au sujet de la discrimination fondée sur le sexe dans les dispositions sur l’inscription de la Loi sur les Indiens soient étendus avant 1951, soit l’année où le registre moderne est entré en vigueur. Cette position est fidèle à l’arrêt rendu par la Cour d’appel de la Colombie-Britannique dans l’affaire McIvor. On parle couramment à ce sujet du seuil de 1951.

Néanmoins, le gouvernement estime aussi que la conformité à la Charte est un minimum, et non un maximum, pour justifier des mesures. Il a toujours reconnu l’existence d’importants problèmes concernant l’inscription aux termes de la Loi sur les Indiens par le passé, problèmes qui ont découlé d’injustices non fondées sur le sexe, en plus des iniquités fondées sur le sexe, qui remontent avant 1951.

Conformément à l’engagement gouvernemental voulant que les modifications touchant les Premières Nations soient apportées en partenariat, il fallait que ces problèmes soient abordés grâce à de larges consultations sur les problèmes d’inscription et d’appartenance aux bandes qui doivent commencer au début de la prochaine année.

Le gouvernement reconnaît également le scepticisme et la méfiance, compréhensibles et justifiés, des Premières Nations, et notamment des femmes et des parlementaires autochtones, compte tenu des décennies d’inaction des gouvernements de toutes allégeances au sujet de ces problèmes, et notamment au sujet du seuil de 1951.

[Français]

Néanmoins, pendant que des Canadiens autochtones et non autochtones travaillent ensemble pour favoriser la réconciliation, la motion d’aujourd’hui représente un pas important dans la bonne direction. Elle représente un progrès tant en ce qui a trait au principe qu’elle inscrit dans la loi et au dialogue qu’elle a rendu possible qu’au plan de mise en œuvre et à d’autres efforts visant la réconciliation.

Comme le sénateur Christmas et la ministre Wilson-Raybould l’ont dit récemment dans cette Chambre, nous avons beaucoup de travail à faire comme pays. Les sénateurs peuvent et doivent jouer un rôle de leadership, comme cela a certainement été le cas dans le cadre de l’élaboration de ce projet de loi.

[Traduction]

Honorables sénateurs, en ce qui concerne le projet de loi S-3, le gouvernement a prêté attention aux arguments que le Sénat et des interlocuteurs autochtones ont avancés, et il propose maintenant d’amender le projet de loi à l’étude au sujet du seuil de 1951.

J’ai bon espoir que l’amendement du message appuyé par le gouvernement fera en sorte que le projet de loi S-3 élimine toutes les iniquités fondées sur le sexe dans les dispositions de la Loi sur les Indiens concernant l’inscription. La disposition proposée assure le statut aux termes de l’alinéa 6(1)a) à toutes les femmes qui ont perdu ce statut à cause d’iniquités fondées sur le sexe ainsi qu’à leurs descendants nés avant 1985. Cela englobe des cas qui remontent avant 1951 et permet de redresser des injustices fondées sur le sexe qui remontent à 1869.

Le gouvernement tient aussi à ce que cette mesure soit appliquée de la bonne façon, tant du point de vue des communautés des Premières Nations que de celui des personnes qui acquerront le droit de se faire inscrire.

[Français]

Le gouvernement a été clair sur le fait que les grands changements concernant les Premières Nations devraient être faits en consultation et en partenariat. En effet, avec les changements apportés par cette motion, je crois que le gouvernement a démontré qu’écouter, c’est bien, mais qu’écouter et agir, c’est mieux.

[Traduction]

Cette approche est conforme à l’engagement d’établir une relation renouvelée et empreinte de respect, un partenariat fondé sur la reconnaissance des droits et l’application de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

L’application de la disposition sur le seuil de 1951 devra toujours faire l’objet de vastes consultations avec les communautés, les personnes en cause et les experts, si nous voulons trouver la bonne solution.

J’insiste cependant sur le fait que le gouvernement a un plan d’action clair pour passer à la mise en œuvre.

Si le reste du projet de loi S-3 doit entrer en vigueur immédiatement après la sanction royale, la disposition qui porte sur le seuil de 1951 entrera en vigueur seulement au terme de consultations conçues de concert qui doivent s’amorcer au début de l’an prochain et une fois qu’un plan complet portant sur les problèmes décelés aura été élaboré en partenariat pour mise en œuvre simultanée.

Chers collègues, je serai clair : ces consultations porteront sur la façon de supprimer ce seuil, et non sur le bien-fondé de sa suppression. Les consultations seront axées sur les mesures ou les ressources supplémentaires nécessaires pour faire les choses correctement et sur le travail en partenariat visant à élaborer un plan complet de mise en œuvre.

Étant donné que les données du registre des Indiens n’ont qu’une valeur limitée dans le cas des personnes qui ont perdu leur statut avant 1951 et leurs descendants, les données du recensement sont celles qui fournissent la meilleure information disponible pour estimer les effets possibles de l’amendement proposé.

Toutefois, ces données ne fournissent qu’une indication sur le nombre de personnes qui se sont déclarées de descendance autochtone et qui pourraient demander à se faire inscrire. Elles ne disent pas nécessairement combien seraient jugées dignes d’obtenir le statut d’Indien, au bout du compte.

Tous les sénateurs ont maintenant en main l’analyse démographique à jour de M. Clatworthy, que le gouvernement a commandée. Les estimations actuelles du nombre de personnes qui pourraient demander le statut d’Indien varient entre 750 000 et 1,3 million de personnes environ.

Par souci de transparence, le gouvernement a rendu publiques ces données démographiques, mais il ne croit pas qu’il s’agisse là d’un moyen sûr d’estimer les effets possibles de diverses mesures. Il estime que ces chiffres surestiment nettement le nombre de personnes qui pourraient obtenir le statut d’Indien.

Les limites des projections démographiques dont nous disposons, même avec les travaux complémentaires indépendants réalisés l’été dernier, font ressortir encore plus nettement la nécessité de consultations sérieuses sur le meilleur plan de mise en œuvre.

Le gouvernement poursuivra son travail afin de préciser les estimations démographiques et il a hâte aux larges consultations sur l’inscription aux termes de la Loi sur les Indiens et l’appartenance aux bandes, qui se tiendront à compter du début de 2018. Elles constitueront un moyen de faciliter ce travail.

Cet amendement est une déclaration claire et sans équivoque de l’engagement du gouvernement à supprimer ce seuil de 1951 en ce qui concerne les iniquités fondées sur le sexe dans la Loi sur les Indiens. En outre, le projet de loi contient de nombreuses dispositions qui obligent le gouvernement à rendre des comptes au Parlement en ce qui concerne l’application de cette mesure législative.

Le projet de loi exige que les consultations sur l’application de la disposition en cause ainsi que sur une réforme plus large du régime d’inscription aux termes de la Loi sur les Indiens et d’appartenance aux bandes débutent dans les six mois suivant la sanction royale.

Je crois savoir que ces consultations doivent normalement commencer au début de 2018, et on a déjà amorcé l’élaboration de ces consultations, de concert avec les Premières Nations.

Dans les cinq mois suivant la sanction royale, le gouvernement doit faire rapport au Parlement de la conception des consultations et de leur déroulement, et il doit de nouveau informer le Parlement dans les 12 mois suivant la sanction royale. Le projet de loi prévoit également un examen au bout de trois ans.

(1500)

Le Parlement aura de nombreuses occasions garanties par la loi d’exiger des comptes du gouvernement au sujet des progrès accomplis en vue de la suppression du seuil de 1951.

Cette approche se démarque de celle du Sénat, soit l’application universelle de l’alinéa 6(1)a), car, fidèle à la portée du projet de loi, elle est axée exclusivement sur les problèmes d’iniquités fondées sur le sexe dans les modalités d’inscription de la Loi sur les Indiens. L’amendement antérieur prévoyant l’application universelle de cet alinéa aurait porté aussi sur d’autres problèmes de perte de statut, en plus des iniquités fondées sur le sexe.

Conformément à l’engagement d’apporter les modifications touchant les Premières Nations en partenariat et après consultation, les autres iniquités alléguées de la Loi sur les Indiens en matière d’inscription découlant de motifs autres que le sexe seront abordées à la faveur de larges consultations sur les problèmes d’inscription et d’appartenance aux bandes, à compter du début de l’an prochain.

Outre la portée de l’amendement prévoyant l’application universelle de l’alinéa 6(1)a), des juristes indépendants ont exprimé des réserves au sujet de son libellé, qui a fait apparaître une ambiguïté non négligeable quant à ses effets réels. L’amendement proposé par le gouvernement tient compte d’autres articles contradictoires de la Loi sur les Indiens et les élimine pour faire disparaître cette ambiguïté. Le gouvernement estime que cet amendement du message est le meilleur moyen de consacrer dans la loi le principe déclaré du projet de loi S-3 : l’élimination de toutes les iniquités fondées sur le sexe dans les dispositions sur l’inscription de la Loi sur les Indiens.

Je profite également de l’occasion pour souligner les contraintes temporelles qui s’imposent aux législateurs. Le gouvernement n’a ménagé aucun effort pour présenter cette mesure modifiée le plus rapidement possible, tout en prenant les précautions voulues pour tracer la voie à suivre. Si nous ne légiférons pas avant le 22 décembre, par suite de l’arrêt Descheneaux, les articles annulés par les tribunaux cesseront de s’appliquer au Québec. Compte tenu de la dernière décision de la Cour d’appel du Québec prorogeant le délai, le gouvernement ne croit pas que nous puissions espérer que les tribunaux repoussent ce délai une fois de plus.

La registraire a déclaré qu’elle ne serait pas en mesure d’inscrire des personnes aux termes de dispositions jugées non conformes à la Charte au Québec et qu’elle n’inscrirait pas non plus d’autres personnes en vertu de ces dispositions dans le reste du Canada.

Quatre-vingt-dix pour cent des Indiens inscrits le sont en vertu des dispositions annulées par l’arrêt Descheneaux. Nous ne devons pas oublier les milliers de personnes qui seront incapables de s’inscrire si le délai fixé par les tribunaux n’est pas respecté et que les dispositions en question cessent de s’appliquer.

Je dirai pour conclure que, selon moi, le gouvernement a prêté attention aux préoccupations exprimées par beaucoup de sénateurs et de témoins entendus au comité sénatorial. Le message modifié, qui comprend l’amendement que le gouvernement propose pour supprimer le seuil de 1951, tient compte de ces préoccupations et nous propose un projet de loi qui est à la hauteur de l’objectif déclaré, soit l’élimination des iniquités fondées sur le sexe dans les dispositions sur l’inscription de la Loi sur les Indiens.

De nouveau, je remercie tous les sénateurs qui, par leur leadership, ont contribué à la motion dont nous sommes saisis, et j’exhorte tous les sénateurs à appuyer le projet de loi amendé. Je les exhorte à l’adopter avant l’ajournement de cette semaine.

Son Honneur le Président : Monsieur le sénateur Brazeau, avez-vous une question à poser ou souhaitez-vous prendre la parole?

L’honorable Patrick Brazeau : J’ai une question à poser au sénateur Harder, s’il vous plaît.

Je remercie le sénateur Harder d’avoir présenté la motion. De toute évidence, c’est un beau jour pour le Canada, car le gouvernement est allé au-delà de sa position initiale sur le projet de loi S-3.

Vous avez parlé du recensement et des statistiques. En fin de compte, je ne crois pas que des facteurs d’ordre économique puissent justifier la discrimination sexuelle dans la Loi sur les Indiens.

Pour ce qui est de la mise en œuvre, vous avez parlé d’une période de consultation de trois ans. Une fois que le projet de loi aura reçu la sanction royale, des consultations porteront sur les dispositions de la Loi sur les Indiens entachées de discrimination sexuelle. Ai-je raison de dire que ces consultations dureront trois ans?

Le sénateur Harder : Le gouvernement espère assurément qu’il ne faudra pas trois ans.

D’abord, la majeure partie des dispositions du projet de loi entreront en vigueur le jour de la sanction royale. Les dispositions qui feront l’objet de nouvelles consultations sont celles qui portent sur le seuil de 1951. Les consultations commenceront immédiatement, et le gouvernement sera tenu de faire rapport au Parlement dans les 5 et 12 mois suivant la sanction royale. Les parlementaires auront donc amplement la possibilité de connaître le plan, sa mise en œuvre, son échelonnement et ainsi de suite.

Enfin, j’admets et j’appuie ce que vous avez dit de ces droits. Les coûts ne sont pas un facteur qui doit jouer. C’est pourquoi j’ai décrit le contexte des données démographiques. Pour commencer, il ne s’agit pas d’un guide fiable. Ensuite, au nom du gouvernement, je prends l’engagement que la démarche ne portera pas sur l’abolition ou non du seuil, mais bien sur les modalités de son abolition. Le gouvernement prend, bien entendu, ces engagements en sachant qu’il y aura des coûts à assumer.

Le sénateur Brazeau : Au cours des deux prochaines années, il y aura d’autres élections fédérales, et nous n’en connaissons pas l’issue. Le gouvernement actuel en sortira-t-il intact, ou y aura-t-il changement de gouvernement? Cela dit, je voudrais faire une sorte de mise en garde.

Lorsque le projet de loi C-31 est entré en vigueur, en 1985, le gouvernement alors en poste nous a dit qu’il y aurait une période de consultation. Cette période de consultation a duré 25 ans, soit jusqu’en 2010.

Après l’arrêt McIvor, en 2010, le gouvernement précédent a dit qu’il y aurait une période de consultation. Sept années ont passé.

J’espère pour ma part que tout pourra se faire avant les prochaines élections fédérales. Si le gouvernement peut affirmer clairement qu’il peut y parvenir, ce sera extraordinaire.

Le sénateur Harder : Je donnerai une simple assurance à l’honorable sénateur : à la différence de ce qui est arrivé par le passé, le projet de loi à l’étude, qui deviendra loi quand la sanction royale sera donnée, exige non seulement la tenue de consultations, mais aussi la production de rapports au Parlement à intervalles réguliers.

L’intention, l’espoir du gouvernement, c’est certainement que les parlementaires resteront vigilants pour assurer la mise en œuvre expéditive de cette mesure, tout en reconnaissant qu’il faut mener des consultations convenables.

L’honorable Serge Joyal : L’honorable sénateur accepterait-il de répondre à une autre question? Je remercie le sénateur Harder. Ma question fait suite à celle du sénateur Brazeau.

Pour commencer, je remercie le gouvernement d’être allé de l’avant avec cette mesure en acceptant le principe de l’élimination de toute discrimination, en théorie, dans la Loi sur les Indiens. Ma préoccupation est double.

Dans l’amendement, le gouvernement ne s’engage pas à proclamer cette mesure à une date donnée. Il n’y a aucune date, aucune limite de temps proprement dite. Le gouvernement s’engage à mener des consultations et à faire rapport, mais il n’a aucune obligation de proclamation.

Pourquoi le gouvernement ne veut-il pas s’engager à l’égard de la proclamation, mettons au bout de deux ans, si c’est ce qu’il envisage, au vu de la participation, du facteur économique et de l’engagement des bandes? Nous comprenons tous. Cependant, si le gouvernement est de bonne foi, pourquoi se fie-t-il aux parlementaires pour le pousser à aller de l’avant, au lieu de prendre lui-même la responsabilité de proclamer la mesure en vigueur?

Le sénateur Harder : Le gouvernement estime que son obligation de consulter les communautés touchées et les Autochtones qui participeront à la mise en œuvre doit, idéalement, se situer dans un contexte de bonne foi et de bonne volonté, tout en donnant dans la loi l’assurance que le plan sera public et que les parlementaires, à intervalles réguliers, auront la possibilité d’examiner le comportement du gouvernement et des autres parties dans les négociations. Voilà l’approche que le gouvernement a retenue, et j’espère qu’elle trouvera grâce aux yeux de tous les sénateurs et des membres de l’autre Chambre.

Le sénateur Joyal : Je vais me comporter en avocat. Si mon client ne peut pas recevoir l’assurance qu’il obtiendra les résultats auxquels il a droit, aux termes de la loi, quel est son recours pour contraindre le gouvernement à tenir parole?

L’honorable sénateur n’estime-t-il donc pas qu’une bande indienne devrait pouvoir en appeler aux tribunaux pour contraindre le gouvernement à proclamer la loi en vigueur, puisque la mesure est liée essentiellement à un rapport au Parlement? Une fois que le délai prévu pour le dépôt du rapport sera écoulé, pensez-vous qu’une bande aura le droit de s’adresser aux tribunaux afin d’obliger le gouvernement à se conformer à la disposition du projet de loi interdisant la discrimination?

(1510)

Le sénateur Harder : Monsieur le sénateur Joyal, contrairement à vous, je ne suis pas avocat, alors il serait risqué que je me prononce sur les obligations légales et les possibilités de poursuite devant les tribunaux.

Permettez-moi de répéter que l’amendement que je présente ne vise pas à déterminer si la discrimination doit prendre fin, mais à choisir le moyen d’y mettre fin. Le gouvernement propose l’amendement que j’ai eu le plaisir de présenter aujourd’hui dans le but de nous permettre de procéder aussi rapidement que possible, de bonne foi, et tout en prenant le temps de faire les consultations qu’il s’est engagé à réaliser.

L’honorable Lillian Eva Dyck : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet de la motion présentée par le sénateur Harder. Comme vous avez pu vous en apercevoir lorsqu’il lisait la motion, elle a cinq pages de long et elle est éminemment technique et complexe. Je remercie le sénateur Harder de m’avoir transmis la motion au préalable pour que je puisse bien en prendre connaissance et que je sois prête à en parler aujourd’hui.

Je n’ai pas l’intention de discuter en détail de la dimension technique de l’amendement proposé, bien que je l’aie analysé attentivement en ayant à l’esprit l’amendement qui visait l’application universelle de l’alinéa 6(1)a) et de la raison d’être de cet amendement. Je m’exprimerai brièvement sur cette question.

Toutefois, avant de parler de la motion d’aujourd’hui, je voudrais la remettre dans son contexte, un peu comme le sénateur Harder l’a fait, mais plus succinctement.

Pour ce qui est du contexte très récent, comme vous le savez, le message de la Chambre des communes demande essentiellement au Sénat d’accepter de revenir à la version du projet de loi S-3 qui a été déposée par le gouvernement en mai 2017. En juin 2017, la Chambre des communes a retiré l’amendement du Sénat visant l’application universelle de l’alinéa 6(1)a). Cet amendement avait été rédigé par Sharon McIvor et son groupe et il avait été déposé par notre collègue, la sénatrice McPhedran.

L’amendement visant l’application universelle de l’alinéa 6(1)a) aurait permis de retirer de la Loi sur les Indiens toute forme de discrimination fondée sur le sexe à l’endroit des femmes, y compris à l’endroit des personnes touchées avant 1951, ce qui, à notre avis, en faisait un amendement clé.

La motion à l’étude aujourd’hui déferait essentiellement le changement apporté par la Chambre des communes au projet de loi S-3 et ramènerait celui-ci à peu près à la forme qui avait été adoptée par le Sénat le 1er juin 2017. La motion propose des dispositions dont l’effet serait comparable à l’application universelle de l’alinéa 6(1)a), mais d’une façon différente de l’amendement McIvor. Le résultat est le même, mais on pourrait dire que le mécanisme législatif proposé est meilleur que celui de l’amendement McIvor. Si nous adoptons le projet de loi S-3, tel que modifié par la motion d’aujourd’hui, toute forme de discrimination fondée sur le sexe à l’endroit des femmes sera éliminée de la Loi sur les Indiens.

Les personnes qui avaient perdu leur statut avant le 4 septembre 1951 pourront également le faire rétablir, mais à une date ultérieure qui sera fixée par décret. Les personnes concernées, celles touchées avant 1951, représentaient une question épineuse pour le gouvernement. Ce dernier craignait au départ qu’entre 80 000 et 1 ou 2 millions de personnes de plus ne puissent être enregistrées en tant qu’Indiens. En fonction des données obtenues dans le rapport Clatworthy, on constate qu’il est impossible d’obtenir une estimation fiable. Il faut donc aller de l’avant, car nous ne pouvons savoir quel sera le nombre réel. Je suis cependant contente que le gouvernement ait décidé d’entreprendre ce processus, même sans avoir un nombre définitif.

La motion à l’étude ajoute des dispositions au projet de loi qui permettront aux gens nés avant 1951 de regagner leur statut d’Indien, à une date ultérieure. Il s’agit d’un accomplissement de taille. Ainsi, le projet de loi tiendra compte de ces personnes.

Voyons ce que visait l’amendement du Sénat, appelé « application universelle de l'alinéa 6(1)a) » par rapport aux amendements proposés par le sénateur Harder. Les objectifs de l’« application universelle de l'alinéa 6(1)a) » et des amendements proposés aujourd’hui sont les mêmes. Premièrement, il s’agit d'éliminer tout acte de discrimination qui empêcherait les femmes autochtones de transmettre leur statut à leurs descendants à cause des dispositions prévues à l’alinéa 6(1)c) de la Loi sur les Indiens. Cet alinéa est problématique en ce sens qu’il favorise les hommes autochtones qui peuvent retrouver leur statut en vertu de la règle « mère grand-mère » et qu’il autorise les femmes qui ont perdu leur statut à le retrouver dans trois cas différents, à savoir : premièrement, une Indienne ayant épousé un homme non inscrit, deuxièmement, la fille illégitime d’une Indienne et, troisièmement, une Indienne émancipée en raison de la perte de statut de son mari.

On pourrait penser que ces cas de figure auraient permis de tout régler, mais, malheureusement, l’amendement à l’alinéa 6(1)c) pose problème dans toutes sortes de cas d’exception, d’où la situation difficile dans laquelle nous nous trouvons.

L’amendement à l’alinéa 6(1)c) et l’amendement d’aujourd’hui visaient à régler le problème recensé et validé dans de nombreuses affaires telles que l’affaire Descheneaux et l’affaire Sharon McIvor, entre autres. Si nous adoptons la motion d’aujourd’hui, nous réglerons d’ici le 22 décembre le problème de discrimination fondée que pose l’alinéa 6(1)c). D’ici là, nous ne réglerons pas le problème des descendants nés avant 1951. Toutefois, les dispositions qui les concernent se trouvent dans l’amendement. En conséquence, ces mesures seront prévues dans la loi, mais seront promulguées à une date différente.

Essentiellement, il n’y aura aucune différence juridique entre les droits des personnes assujetties au nouvel alinéa 6(1)c) qu’accompagne une longue liste de sous-dispositions et ceux des personnes assujetties à l’alinéa 6(1)a). C’est ce que visaient essentiellement les critiques exprimées dans l’affaire McIvor, à savoir que les droits prévus à l’alinéa 6(1)a) étaient supérieurs à ceux prévus à l’alinéa 6(1)c). Ce ne sera plus le cas si nous adoptons aujourd’hui le projet de loi tel qu’amendé.

Autrement dit, honorables sénateurs, nous supprimons la catégorie inférieure, ou de seconde classe, que constituaient les personnes visées par l’alinéa 6(1)c). Elles seront dorénavant visées par l’alinéa 6(1)a). En adoptant la disposition finale traitant du seuil d’exclusion fixé à 1951, nous modifierons encore davantage le projet de loi en en retirant des pages et des pages de sous-dispositions prévues à l’alinéa 6(1)c). Nous le simplifierons en faisant en sorte que l’objet de cet alinéa relève plutôt de l’alinéa 6(1)a), ce que voulait précisément le groupe de Sharon McIvor.

En résumé, c’est ce que le groupe de Sharon McIvor souhaitait obtenir. Il a dit qu’il s’agissait de « se débarrasser des sous-catégories ». Pour y parvenir, il a proposé un amendement qui visait à modifier l’alinéa 6(1)a) en ajoutant deux sous-alinéas, soit 6(1)a)(i) et 6(1)a)(ii).

Deuxièmement, l’amendement touchant l’application universelle de l’alinéa 6(1)a) et l’amendement figurant dans les motions à l’étude aujourd’hui visent tous deux à accorder le statut aux personnes qui en ont été privées parce qu’elles sont nées avant 1951. Il est important de s’en souvenir. Comme je l’ai dit, c’était une pierre d’achoppement majeure. Même si l’amendement touchant l’application universelle de l’alinéa 6(1)a) et les personnes nées avant 1951 devait entrer en vigueur en même temps que les amendements liés au paragraphe 6(1)c), la motion d’aujourd’hui prévoit que les dispositions devant inclure les personnes nées avant 1951 entreront en vigueur à une date ultérieure. Lorsque ces amendements entreront en vigueur, on pourra simplifier les sous-catégories figurant au paragraphe 6(1)c) et les ajouter à la catégorie prévue au paragraphe 6(1)a), comme je l’ai dit tout à l’heure. J’espère que mes explications sont claires, car ce projet de loi est très complexe, compte tenu de ses nombreux détails techniques.

Devrions-nous être préoccupés par la décision de retarder la date d’entrée en vigueur touchant les personnes nées avant 1951? La disposition d’entrée en vigueur — une date précise —, ne figure pas dans le projet de loi. Évidemment, cette situation nous préoccupe tous, moi y compris. Toutefois, il faut se rappeler que le mécanisme législatif visant à inclure les personnes nées avant 1951 figure bel et bien dans le projet de loi. Il s’agit d’une étape importante dans le processus visant à accorder le statut d’Indien inscrit à ces personnes. Cela n’a jamais été fait auparavant.

(1520)

Par convention, les gouvernements n’incluent pas, dans les projets de loi qu’ils comptent adopter, des dispositions qu’ils n’ont pas l’intention de mettre en œuvre, quelle que soit la date d’entrée en vigueur. Donc, le gouvernement déclare clairement son intention. C’est beaucoup mieux que les promesses vagues de consultation qui ont été faites par le passé. Comme nous le savons et comme le sénateur Brazeau l’a souligné, des consultations avaient été promises dans le cas des projets de loi C-31 et C-3, sur le même sujet. Les consultations ont eu lieu, mais aucune suite n’y a été donnée. L’amendement et le projet de loi actuels constituent un engagement beaucoup plus solide parce qu’une disposition incluse dans le projet de loi prévoit des consultations et le dépôt d’un rapport, ce qui permettra au Sénat de jouer très fermement son rôle et de veiller à ce que la loi soit respectée.

Ce qui nous est soumis aujourd’hui est de loin supérieur aux promesses de consultations pour déterminer si le groupe des personnes dont le nom a été omis ou retranché avant 1951 devrait conserver le droit de récupérer le statut. Cela mérite d’être répété, parce qu’il me semble que nous devons très bien assimiler cette idée. Nous essayons d’arriver à ce résultat depuis des décennies, alors nous avons peine à croire que nous y sommes enfin. Lorsque je vous ai écouté, sénateur Harder, je me suis presque mise à pleurer, parce que beaucoup de femmes — pas nécessairement moi, mais de très très nombreuses femmes — réclament ce changement depuis longtemps. L’annonce que vous avez faite officiellement a été à mes yeux un moment charnière.

Le groupe des femmes dont le nom a été omis ou retranché avant 1951 se voit accorder ce droit dans l’amendement du projet de loi S-3 qui nous est proposé aujourd’hui. Comme vous l’avez dit, monsieur le sénateur Harder, la discussion qui suivra avec les Premières Nations, au sujet du projet de loi S-3, ne visera pas à déterminer si le groupe des femmes dont le nom a été omis ou retranché avant 1951 doit être inclus dans le projet de loi ou non. Elle visera à déterminer plutôt comment les Premières Nations appliqueront la disposition en question. De quelle manière votre population sera-t-elle touchée? Nous savons en effet que certaines personnes ne sont pas favorables au projet de loi. C’est le cas, par exemple, d’un groupe de la nation de Kahnawake qui a témoigné devant le comité des Communes. Leur position est assez simple : une femme qui épouse un homme de l’extérieur perd automatiquement son statut. Je ne crois pas que la vaste majorité des Premières Nations soient du même avis, mais nous devons être conscients que ce ne sont pas toutes les bandes qui sont en faveur de cette amélioration majeure.

En ce qui concerne les consultations, si on regarde l’article 11 du projet de loi, qui porte sur les consultations et les rapports, allons-nous approuver cette motion aujourd’hui ou allons-nous tenter de forcer le gouvernement à mettre en œuvre les dispositions du projet de loi portant sur la date limite de 1951 en modifiant la règle du sénateur Harder? Allons-nous tenter d’inscrire une date fixe? Nous pourrions le faire, mais je pense sincèrement que cela ne nous avancerait pas vraiment.

Nous sommes sur le point de remporter une victoire de taille, et je pense que nous avons un pouvoir en tant que sénateurs, individuellement — comme la sénatrice Lovelace Nicholas et moi au comité en tant que femmes autochtones, et le sénateur Patterson en tant que vice-président du comité. Le Comité des peuples autochtones a exercé des pressions et, vous pouvez me croire, il va continuer de le faire. Nous allons continuer d’exercer une surveillance. C’est ce que nous pouvons avoir de mieux. Nous ne pourrions pas avoir mieux.

En réalité, quand le message de la Chambre nous a été transmis, nous n’avions pas grand-chose. Il s’agit d’une nette amélioration par rapport à ce que nous avions. Comme je l’ai déjà dit, et je vais me répéter, le Sénat peut continuer de jouer un rôle concret et exercer une surveillance de la mise en œuvre de ce nouvel amendement par le gouvernement. Comme cet amendement sera en fait inscrit dans la loi, peu importe la composition du prochain gouvernement — si nous avons des élections qui ne sont pas remportées par les libéraux ou si nous n’avons pas un gouvernement majoritaire —, le Sénat pourra continuer d’exercer des pressions sur le gouvernement du moment pour que cette disposition entre en vigueur et continuer de demander des comptes au gouvernement pour qu’il élimine toute discrimination fondée sur le sexe dans la Loi sur les Indiens qui découle de la date limite de 1951.

Je pense que cela met en relief l’importance du Sénat. Nous avons collaboré tous ensemble de manière non partisane pour en arriver à ce stade, comme je suis convaincue que nous allons continuer de le faire pour veiller à ce que les promesses faites dans ce projet de loi se concrétisent.

En fin de compte, la motion d’aujourd’hui représente une bonne décision du gouvernement. J’estime qu’il s’agit d’un grand pas en avant, surtout par rapport au message qui, selon moi, excluait essentiellement le groupe des femmes ayant perdu leur statut d’Indien avant 1951 et de leurs descendants, qui forment probablement un grand nombre de personnes. Ce groupe mérite d’être reconnu et d’être inclus dans le projet de loi. Cette motion représente une nette amélioration par rapport à la version du projet de loi S-3 qui nous a été renvoyée par la Chambre des communes. Je pense qu’il s’agit d’un énorme progrès pour les femmes des Premières Nations et leurs descendants, vraiment.

Dans une lettre de la ministre datée du 31 octobre, le gouvernement parle maintenant des discussions de nation à nation qui auront lieu. Je dirais que tout Indien non inscrit dont la mère, la grand-mère ou l’arrière-grand-mère a perdu son statut parce qu’elle a épousé un homme non inscrit, ou parce qu’elle est issue de parents non mariés, devrait participer à ces discussions. Les discussions avaient pour but d’inclure les gens qui ne sont pas actuellement inscrits dans le registre, et ceux-ci devraient y participer. Ils figurent dans la loi et devraient donc prendre part aux discussions. Je les encourage à le faire. Nous tenterons certainement de communiquer avec eux pour que cela se concrétise.

J’aimerais souligner le rôle du Comité des peuples autochtones, qui a suspendu son étude du projet de loi il y a 11 mois, le 6 décembre 2016. C’est notre comité qui a ajouté l’amendement prévoyant l’application universelle de l’alinéa 6(1)a), déposé par notre collègue, la sénatrice McPhedran, et adopté par le Sénat en juin. Je tiens aussi à souligner que les sénateurs Patterson et Sinclair et moi avons envoyé une lettre à la ministre pour l’informer que nous voulions travailler avec elle et que nous ne voulions pas amorcer immédiatement la discussion au Sénat. Nous souhaitions laisser du temps pour que des recherches et des analyses soient menées afin que nous puissions produire un meilleur projet de loi.

Le Comité des peuples autochtones a joué un rôle déterminant. Nous avons étudié le projet de loi initial de façon exhaustive. Nous avons procédé résolument, mais dans un esprit de collaboration. Si nous avons réussi à accomplir ce travail, c’est uniquement grâce à l’appui fourni par nos collègues conservateurs, qui formaient la majorité au sein du comité.

Puis-je avoir cinq minutes de plus?

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

La sénatrice Dyck : Je remercie nos collègues conservateurs parce que, à ce moment-là, les libéraux étaient en minorité, et il n’y avait que deux sénateurs indépendants au comité. Ils auraient pu faire à leur guise, mais ils ont choisi d’adopter une approche non partisane et de prendre la décision qu’ils croyaient la meilleure.

Je remercie également les témoins Sharon McIvor et Pamela Palmater, dont le témoignage clair et convaincant nous a incités à inclure l’amendement sur l’application universelle de l’alinéa 6(1)a), présenté par notre collègue, la sénatrice McPhedran. La version du gouvernement est plus concise et plus simple, et elle prévoit notamment l’élimination de l’alinéa 6(1)c.4), qui fixe la date limite de 1951. D’après l’amendement relatif à l’application universelle de l’alinéa 6(1)a) présenté par la sénatrice McPhedran, cette disposition aurait été conservée dans le projet de loi et elle aurait donné lieu à un conflit. Ce n’était donc pas nécessairement la meilleure solution. De plus, l’amendement ne contenait aucun amendement de coordination. Il créait donc de la confusion. En fait, M. Clatworthy l’a examiné également, et on constate qu’il a eu lui aussi eu du mal à comprendre ce que cela signifiait au juste. Ce que nous avons présenté ici aujourd’hui représente une solution différente, mais le résultat sera le même. L’objectif est le même.

J’aimerais aussi mentionner que l’Association des femmes autochtones du Canada, l’Association des femmes autochtones de l’Ontario et l’Alliance canadienne féministe pour l’action internationale appuient un amendement comme celui relatif à l’application universelle de l’alinéa 6(1)a). L’Association des femmes autochtones de l’Ontario a présenté une pétition signée par plus de 700 personnes. Après que la pétition de l’Alliance canadienne féministe pour l’action internationale a été rendue publique, il y a une semaine, il y a eu un déluge de réactions de la part de Canadiens qui estiment qu’il s’agit d’une mesure importante sur le plan de la réconciliation. Neuf cents organismes et de 300 à 400 particuliers ont signé la lettre destinée au premier ministre. La pétition comprend 14 pages de signatures. Voilà qui montre à quel point ce sujet important pour les Canadiens et à quel point nous adhérons au principe de la réconciliation.

Je pense que le gouvernement, les responsables et les fonctionnaires ont trouvé une solution acceptable qui permet d’éviter un affrontement entre le Sénat et la Chambre des communes. Un tel affrontement aurait eu de graves conséquences, dont la fermeture du registre et la perte des gains énormes que la motion d’aujourd’hui apporte aux femmes des Premières Nations. J’exhorte tous les sénateurs à adopter la motion du sénateur Harder d’ici la fin de la semaine. Je soutiens complètement cette motion. Proposons-la et exhortons tous les députés à l’entériner.

Pour conclure, permettez-moi de vous rapporter une anecdote. Je me suis réveillée ce matin en pensant à une réplique célèbre du film 2001, l’odyssée de l’espace, qui dit ce qui suit :

Quelque chose va arriver, quelque chose de merveilleux.

Si nous adoptons la motion d’aujourd’hui, chers collègues, quelque chose de merveilleux va arriver, quelque chose que les femmes des Premières Nations attendent depuis près de 150 ans.

(1530)

Enfin, on reconnaîtra en droit que les femmes autochtones pourront, à l’instar des hommes autochtones, transmettre leur statut d’Indien inscrit et tous les avantages qui l’accompagnent — la langue, la culture, les liens familiaux, les liens avec la communauté, et cetera. Par conséquent, les nombreuses femmes des Premières Nations comme Mary Two-Axe Earley, Jeannette Corbiere Lavell, Yvonne Bédard, Sharon McIvor, Lynn Gehl et la sénatrice Sandra Lovelace Nicholas peuvent pousser un soupir de soulagement. Je sais que c’est ce que je vais faire. Merci.

Le sénateur Patterson : Je propose l’ajournement du débat.

La sénatrice Lankin : J’étais sur la liste pour prendre la parole aujourd’hui.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, nous devrons y revenir de toute façon; il est maintenant 15 h 30, et la ministre est là. Nous y reviendrons après la période des questions.


PÉRIODE DES QUESTIONS

Les travaux du Sénat

Conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 10 décembre 2015, visant à inviter un ministre de la Couronne, l’honorable Catherine McKenna, ministre de l’Environnement et du Changement climatique, comparaît devant les honorables sénateurs durant la période des questions.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, nous avons aujourd’hui avec nous pour la période des questions l’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique. Madame la ministre, au nom de tous les sénateurs, bienvenue.

Le ministère de l’Environnement et du Changement climatique

La Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures—Les projets et les normes concernant les pipelines

L’honorable Larry W. Smith (leader de l’opposition) : Madame la ministre, bienvenue. J’ai une question au sujet de la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures.

Madame la ministre, le projet de loi omnibus d’exécution du budget du gouvernement accorde au Canada le pouvoir de se joindre à la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures et d’y transférer jusqu’à 500 millions de dollars. L’année dernière, cette banque a approuvé un prêt de 600 millions de dollars américains pour la construction d’un gazoduc de l’Azerbaïdjan jusqu’à la Turquie. On a décrit ce gazoduc comme le plus important projet d’exploitation de combustibles fossiles de l’Europe.

Madame la ministre, si un projet équivalent était proposé au Canada, votre gouvernement ne l’appuierait vraisemblablement pas parce qu’il exige que les évaluations tiennent compte des émissions de gaz à effet de serre en amont et en aval. Comment pouvez-vous justifier que les fonds publics canadiens servent à financer des pipelines étrangers qui ne sont pas soumis, contrairement aux projets canadiens, à de telles évaluations en amont et en aval? Pourquoi y a-t-il deux poids deux mesures?

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Je vous remercie, honorable sénateur. Bonjour à tous. C’est toujours un plaisir de venir au Sénat.

[Français]

Je suis très heureuse d’être ici.

[Traduction]

Le gouvernement sait que l’environnement et l’économie vont de pair et qu’il faut commencer à réduire les émissions de carbone. La transition demandera du temps. Elle ne se fera pas du jour au lendemain. Je suis très contente que le premier ministre, les premiers ministres des provinces et les chefs autochtones se soient réunis pour parler du plan proprement canadien de lutte contre les changements climatiques. En ce qui concerne les évaluations environnementales, nous ne ménageons aucun effort pour restaurer la confiance des gens en leur proposant de bons projets auxquels ils peuvent se rallier.

C’est pour cette raison que nous avons annoncé des principes provisoires qui nous permettent de nous ouvrir sur le monde. Oui, il faut tenir compte de nos émissions de gaz à effet de serre dans le cadre des projets communs. Il faut aussi étudier les répercussions et trouver des façons d’établir de meilleurs partenariats avec les Autochtones. Il faut également que les décisions se fondent sur des données scientifiques probantes et qu’un système rigoureux aux règles claires prévoie un cadre réglementaire bien défini qui permette aux bons projets de progresser rapidement. Voilà ce à quoi s’est engagé le gouvernement, et je suis ravie qu’il aille de l’avant.

Le sénateur Smith : Madame la ministre, sans vouloir vous manquer de respect, ma question portait sur le fait d’investir dans la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures. Il s’agit de donner de l’argent à une banque étrangère pour qu’elle l’investisse ailleurs qu’au Canada. Il s’agit surtout d’accepter que les projets ainsi financés à l’étranger soient assujettis à des conditions différentes de celles qui ont cours au Canada, notamment en ce qui concerne les paramètres de mesure. La réglementation canadienne est si stricte qu’elle a contribué à faire échouer le projet Énergie Est, mais nous investissons 500 millions de dollars américains dans une banque asiatique pour financer un projet qui n’a pas besoin de répondre aux mêmes normes que les projets canadiens.

Je sais que vous allez me servir la même réponse prémâchée, quelle que soit ma question, mais comment peut-on investir dans une banque qui brasse des affaires ailleurs qu’au Canada et qui n’applique pas les mêmes règles qu’ici? Quand on investit de l’argent, on s’attend à un certain rendement pour notre propre pays.

Prenons aussi l’exemple de Keystone XL. Le gouvernement tient compte des émissions en aval et en amont pour évaluer les projets énergétiques ici, au Canada, mais il soutient des projets canadiens en sol américain qui ne sont pas soumis aux mêmes exigences. Nous avons donc deux exemples de projets dans lesquels nous investissons et qui ne sont pas soumis aux mêmes règles ici qu’à l’étranger. Pourquoi les gens voudraient-ils investir au Canada? Comment peut-on accepter une chose pareille?

Mme McKenna : Je vous remercie, honorable sénateur. Si j’ai bien compris, vous voulez savoir si, à notre avis, nous avons besoin d’autres grands projets d’infrastructures, y compris des pipelines, et la réponse est oui.

Je tiens préciser en passant que c’est pour des motifs commerciaux que le projet Énergie Est a été abandonné. C’est le marché qui fixe les prix. Ce n’est pas notre faute si le baril de pétrole se vend 50 $. Cette décision ne nous appartient pas. Nous avons approuvé deux pipelines. Le gouvernement précédent, lui, n’a réussi à en raccorder aucun avec les côtes. Si nous avons réussi là où les conservateurs ont échoué, c’est parce que nous avons compris qu’environnement et économie vont de pair. Nous devons trouver des moyens de réduire nos émissions de gaz à effet de serre, parce que les changements climatiques sont bien réels et qu’ils ont de graves répercussions. À l’heure où l'on se parle, les phénomènes météorologiques extrêmes coûtent plus de 2 milliards de dollars par année au gouvernement du Canada. Nous devons aussi saisir au bond les 30 billions de dollars que peut représenter la croissance verte.

Le mois dernier, j’ai rencontré le gouverneur de la Banque d’Angleterre, Mark Carney, ainsi que des représentants de grandes compagnies d’assurance telles que BlackRock et Lloyd’s of London. Nous avons tous parlé des moyens à prendre pour dégager les billions de dollars nécessaires au financement de la croissance propre, ainsi que des débouchés et des emplois dans ce secteur. C’est justement dans ce domaine que nous travaillons d’arrache-pied, et je me félicite que le Canada soit un chef de file à cet égard.

La tarification du carbone au Nunavut

L’honorable Dennis Glen Patterson : Bienvenue, madame la ministre. J’aimerais vous poser une question à propos de l’Arctique.

Le mois dernier, on a constaté à l’étranger un regain d’intérêt pour le pétrole de l’Arctique. En même temps, le Canada impose un moratoire sur l’exploitation pétrolière et gazière dans cette région et veut maintenant donner à un ministre fédéral le pouvoir de désigner sans consultation une zone de protection marine temporaire, qui lui permettrait d’interdire comme bon lui semble certaines catégories d’activités grâce au projet de loi C-55.

C’est ce genre de décisions que, encore la semaine dernière, le premier ministre des Territoires-du-Nord-Ouest Bob McLeod, qui est lui-même autochtone, a qualifié d’attaque coloniale. Cette question a également été soulevée par le premier ministre du Nunavut Taptuna, lui aussi Autochtone et surpris d’apprendre l’annonce du moratoire en décembre 2016. Sa surprise, madame la ministre McKenna, venait de ce que cette décision a été prise sans la moindre consultation.

Même le premier ministre a dit qu’aucune relation n’est aussi importante pour le gouvernement que celle qu'il entretient avec la population autochtone. Pourquoi le gouvernement continue-t-il d’imposer ce moratoire qui, si je ne m’abuse, contrevient à deux ententes sur le transfert des responsabilités, à une entente de principe sur le transfert de responsabilités et à deux accords sur les revendications territoriales globales conclus avec les Inuits?

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Aucune relation ne nous importe autant que celle que nous avons avec les peuples autochtones. J’étais extrêmement fière de me rendre cet été dans l’Extrême-Arctique pour faire l’annonce, de concert avec les communautés inuites, de Tallurutiup Imanga. C’est le nom donné en inuktitut au détroit de Lancaster, où nous avons protégé 2 p. 100 de l’océan, en accord complet avec la population inuite. C’est la voie à suivre.

Nous œuvrons en outre avec les Gwich’in pour bien faire savoir au gouvernement des États-Unis que nous n’appuyons pas les activités de forage dans la Réserve faunique nationale de l’Arctique.

Je suis tout à fait d’accord pour dire que nous devons travailler ensemble. Nous devons aussi veiller à ce qu’il y ait des débouchés économiques pour les Autochtones. Encore une fois, l’environnement et l’économie vont de pair. Je suis ravie de participer, dans quelques jours, à la COP23, à Bonn, en compagnie de dirigeants autochtones de l’ensemble du pays. Nous avons réussi à faire pleinement reconnaître les droits des Autochtones ainsi que les connaissances traditionnelles dans l’Accord de Paris. De plus, nous travaillons très fort afin d’annoncer une plateforme axée sur les Autochtones afin de convaincre les pays à travers le monde de l’importance de travailler en qu'il entretient avec les Autochtones.

(1540)

Les engagements en matière de changements climatiques

L’honorable Serge Joyal : Madame la ministre, bienvenue. Au cours des 30 dernières années, à quatre occasions différentes sur la scène internationale, le Canada a accepté une cible très précise afin de combattre le changement climatique. Il a accepté une cible à Rio, en 1992, à Quito, en 2005, à Copenhague, en 2012 et, bien sûr, à Paris, en 2015. D’après la commissaire à l’environnement, depuis 30 ans, le Canada n’a pas réussi à atteindre ces cibles; il lui manque 230 millions de tonnes pour y arriver.

Comment pouvez-vous expliquer que, sous votre direction et le gouvernement actuel, nous serions en mesure de rattraper ce retard malgré le fait que le gouvernement continue d’autoriser l’exploitation des ressources naturelles, qui contribue à notre retard? Quelles mesures prendrez-vous afin de respecter l’engagement du Canada à l’échelle internationale et d’atteindre les cibles énoncées?

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Merci beaucoup, honorable sénateur. Je suis tout à fait d’accord. Il ne sert à rien d’avoir une cible si on ne l’atteint pas. C’est exactement l’annonce que nous avons faite l’année dernière.

J’étais très fière que le premier ministre s’unisse avec les autres premiers ministres pour présenter le plan du Canada.

Nous ne pouvons pas y arriver seuls. Il faut collaborer avec les provinces et les territoires. Voici quelques-unes des initiatives que nous prenons pour atteindre notre cible.

Premièrement, nous tarifons la pollution. Nous savons que les pollueurs devront payer. C’est une façon non seulement de réduire les émissions, mais aussi de favoriser l’innovation dont nous avons désespérément besoin.

Deuxièmement, nous éliminons progressivement l’utilisation du charbon. Nous savons que la combustion du charbon est une source énorme de gaz à effet de serre et qu’elle est très mauvaise pour la santé humaine.

Troisièmement, nous accordons un financement jamais vu dans l’histoire du pays au transport en commun et aux infrastructures vertes. À Ottawa, l’argent consacré à la deuxième phase du train léger entraînera la plus importante réduction des émissions de gaz à effet de serre depuis que la ville existe.

Quatrièmement, nous finançons les technologies propres. Nous aidons une formidable entreprise néo-écossaise du nom de CarbonCure. Elle injecte les polluants générés par l’industrie dans le ciment pour le renforcer. Je me suis rendue en Californie, avec cette entreprise, à une usine de ciment où l’on emploie cette technologie, qui est désormais exportée dans le monde entier.

Nous agissons concrètement. Nous avons un plan. Nous collaborons avec les provinces et les territoires et nous obtiendrons des résultats.

Les changements climatiques—Les infrastructures

L’honorable Rosa Galvez : Madame la ministre McKenna, dans la version intégrale de son rapport de 2017, la commissaire à l’environnement et au développement durable constate qu’Environnement et Changement climatique Canada n’a pas joué adéquatement son rôle de chef de file et de conseiller auprès des autres ministères pour fixer les priorités en vue d’élaborer un plan d’adaptation aux risques créés par les changements climatiques.

Bien que le gouvernement ait récemment attribué de l’argent à divers programmes pour favoriser l’adaptation aux changements climatiques, ces programmes restent encore à mettre en œuvre. Les événements météorologiques extrêmes se font de plus en plus fréquents, et les coûts qui en résultent augmentent. Le Bureau d’assurance du Canada nous informe que les pertes catastrophiques assurées qui résultent de ces événements ont considérablement augmenté depuis 20 ans et ont atteint 5 milliards de dollars en 2016. Il prévoit en outre que cette tendance à l’augmentation des coûts se maintiendra au cours des prochaines années.

Compte tenu du plan établi dans le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, quelles mesures concrètes le gouvernement est-il en train de prendre pour que le Canada puisse mieux résister aux risques bien réels qui découlent des changements climatiques et des événements météorologiques extrêmes? L’harmonisation et l’amélioration des normes du Code national du bâtiment pourraient-elles protéger les infrastructures contre les risques climatiques et réduire le coût des pertes catastrophiques pour les Canadiens?

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Je vous remercie de cette question, honorable sénatrice. Je suis on ne peut plus d’accord avec vous. Il ne s’agit pas seulement de réduire nos émissions et d’atténuer les répercussions des changements climatiques. Les changements climatiques ont déjà commencé. Nous les vivons en ce moment. Nous voyons des phénomènes météorologiques extrêmes dans tout le pays, de l’Île-du-Prince-Édouard, dont le littoral recule de 43 centimètres par année, aux inondations que nous avons vues à Ottawa et au Québec, et aux immenses feux de forêts dans l’Ouest. Nous devons vraiment agir.

J’ai été très heureuse de voir que le budget de 2017 prévoyait 2 milliards de dollars pour l’atténuation des catastrophes et l’adaptation aux changements climatiques. Cet argent vise à financer les infrastructures requises pour contrer les répercussions des changements climatiques.

Dans le budget, on annonçait également 260 millions de dollars sur cinq ans pour remplir nos engagements concernant le volet sur l’adaptation et la résilience du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques. Cela comprend un Centre canadien des services climatiques. Nous devons aider les municipalités et les provinces à faire de bons choix pour la construction.

Je suis tout à fait d’accord pour dire qu'on ne peut construire de maisons ou d’immeubles sans prendre en considération les répercussions des changements climatiques au cours de l’année suivante de même que dans les 5, 10 et 20 prochaines années. Nous sommes certainement conscients de la nécessité de disposer de très bonnes modélisations et de données scientifiques sur lesquelles nous appuyer, de manière à pouvoir faire le maximum pour protéger les Canadiens et leurs maisons.

Les engagements en matière de changements climatiques

L’honorable Diane F. Griffin : Madame la ministre, merci d’être venue nous rencontrer aujourd’hui.

Ma question porte sur le premier objectif des Buts et objectifs canadiens pour la biodiversité d’ici 2020, soit que, d’ici 2020, au moins 17 p. 100 des zones terrestres et des eaux intérieures sont conservées par l’entremise de réseaux d’aires protégées, et d’autres mesures efficaces de conservation dans des superficies clairement définies.

D’après la base de données du Système de rapport et de suivi pour les aires de conservation, en date de décembre dernier, seulement 10,57 p. 100 des régions terrestres sont protégées. De ce pourcentage, le gouvernement fédéral protège directement 52 millions d’hectares.

Quelles sommes d’argent le gouvernement s’est-il engagé à verser pour veiller à ce que la nature soit protégée et faire en sorte que les objectifs de 2020 puissent être atteints?

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Merci beaucoup, honorable sénatrice. Personne ne se soucie plus que moi de la protection de nos lieux emblématiques et de notre patrimoine national. J’aime les parcs et les aires protégées, et les Canadiens les aiment tout autant.

Cette année, l’admission aux parcs nationaux et aux lieux historiques était gratuite, et le nombre de visiteurs enregistré a été sans précédent. Les Canadiens s’identifient à la nature. Ils veulent prendre contact avec la nature et ils veulent la protéger.

L’objectif de 17 p. 100 est certes ambitieux, mais j’ai l’appui d’un comité national. Je travaille directement avec la coprésidente, la ministre de l’Environnement et des Parcs et ministre responsable du Bureau du changement climatique de l’Alberta, pour tracer la voie à suivre afin d’atteindre l’objectif de 17 p. 100. Un comité constitué de membres de peuples autochtones nous aide également. Je crois que l’une des façons d’atteindre notre objectif, c’est le recours aux aires protégées autochtones.

Le mois dernier, j’ai été ravie de me rendre dans le sud de l’Okanagan, où j’ai annoncé, de concert avec la nation syilx d’Okanagan et le gouvernement de la Colombie-Britannique, que nous allons finalement de l’avant avec la création d’un parc national dans le sud de l’Okanagan.

Nous devons prendre des mesures concrètes. J’ai hâte de prendre connaissance du rapport du comité national afin d’établir avec exactitude notre façon de procéder. Les aires protégées ont une grande importance pour l’atténuation des changements climatiques. Elles agissent comme des puits de carbone. Elles sont importantes, parce que nous souhaitons qu’un plus grand nombre de Canadiens sortent de chez eux pour profiter de la nature. Elles sont importantes pour les écosystèmes et la biodiversité. De nombreuses espèces sont en péril. Les aires reliées sont extrêmement importantes pour la survie de nombreuses espèces. Nous sommes déterminés à agir et nous le ferons en collaboration avec les provinces, les territoires, les municipalités et les peuples autochtones.

Le moratoire sur la circulation des pétroliers

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Madame la ministre, les beautés naturelles et les ressources du Canada sont chères à tous, mais nous savons que, en réalité, il faut à la fois une économie forte et du travail pour les Canadiens. L’un ne va pas sans l’autre. Nous devons adopter une approche équilibrée.

Ma question concerne un autre moratoire, celui que votre gouvernement a proposé dans le projet de loi C-48 relatif à la circulation des pétroliers le long de la côte nord de la Colombie-Britannique. Or, ces pétroliers favorisent l’emploi dans la province ainsi que partout au pays. En instituant un moratoire sur la circulation des pétroliers transportant du brut, votre gouvernement détruit le développement économique de la région et mine la capacité du Canada à exporter ses ressources naturelles.

(1550)

Madame la ministre, vous ne cessez de répéter que l’économie et l’environnement vont ensemble. Comment pouvez-vous faire croître l’économie et créer des emplois alors que, en même temps, vous dressez des obstacles pour empêcher l’exportation des ressources et vous refusez des possibilités aux investisseurs?

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Je vous remercie, honorable sénatrice.

Je suis vraiment heureuse d’avoir l’occasion de parler de la forte croissance économique au Canada, qui est de 4,5 p. 100 cette année. C’est plus que le double de tout autre pays du G7, à l’exception des États-Unis. Nous avons créé 400 000 emplois l’année dernière. C’est d’une grande importance. Nous devons en effet assurer la croissance de l’économie, mais nous le faisons tout en prenant des mesures pour protéger l’environnement.

Permettez-moi de vous dire que l’environnement a une grande valeur, et les Canadiens en sont bien conscients. Ils veulent que nous protégions l’environnement. C’est ce que nous continuerons de faire. Nous continuerons de collaborer avec les provinces. J’ai été très heureuse de rencontrer le ministre de l’Environnement de la Colombie-Britannique, George Heyman, pas plus tard que la semaine dernière, pour discuter de ce que nous pourrons faire en partenariat avec le gouvernement de la Colombie-Britannique pour protéger l’environnement dans cette province, mais aussi pour faire croître l’économie.

Les habitations éconergétiques

L’honorable Nancy Greene Raine : Madame la ministre McKenna, ma question porte sur les changements proposés au Code national du bâtiment.

Des témoins qui ont comparu récemment devant le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles ont indiqué que le Conseil national de recherches du Canada travaille à l’élaboration de codes de l’énergie de plus en plus rigoureux afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Bien que ce soit un objectif louable, un nouveau modèle, code ou ligne directrice devra être terminé d’ici 2022.

Madame la ministre, je suppose que votre ministère participe à ces discussions. Si c’est le cas, comment a-t-on analysé les coûts que les propriétaires de maison pourraient avoir à assumer à la suite de la révision du code?

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Merci beaucoup, honorable sénatrice.

C’est un autre exemple de situation où l’environnement et l’économie vont de pair. Nous savons qu’on peut construire de meilleures maisons et de meilleurs immeubles plus éconergétiques. En quoi est-ce utile? Cela permet de réaliser des économies pendant la durée de vie de l’immeuble. Il est beaucoup plus judicieux de construire des maisons à la fois mieux adaptées aux effets des changements climatiques et plus éconergétiques. Cela fera économiser de l’argent aux Canadiens.

À Edmonton, j’ai pu visiter l’entreprise Landmark Homes. C’est une entreprise locale formidable qui construit des maisons qui ressemblent en tous points à des maisons de banlieue et qui se vendent environ au même prix. Vous savez quoi? Ces maisons permettent aux propriétaires de vendre de l’électricité au réseau électrique. Les propriétaires gagnent de l’argent. Voilà comment on devrait construire des maisons.

Nous savons que l’environnement bâti, les maisons et les immeubles comptent pour 20 p. 100 de nos émissions. Nous pouvons faire mieux, et nous allons fournir les moyens d’y parvenir. Ainsi, nous pourrons exporter de l’énergie, créer de bons emplois et stimuler l’économie.

Son Honneur le Président : Je suis désolé, sénatrice Raine. Si vous avez une question complémentaire, je vais vous inscrire sur la liste pour la prochaine série de questions.

La sénatrice Raine : Elle n’a répondu à aucune question. Je parlais des maisons déjà existantes.

Les parcs nationaux

L’honorable Joseph A. Day (leader des libéraux au Sénat) : Merci beaucoup de votre présence, madame la ministre. Ma question porte sur Parcs Canada.

Cette année marque le 25e anniversaire du sentier Fundy. Dans ma province, le Nouveau-Brunswick, nous sommes particulièrement fiers du magnifique sentier Fundy, qui mène au parc national du même nom. Le sentier fait partie des sites du patrimoine mondial de l’UNESCO. Nous pouvons vanter la beauté du parc national Fundy, qui est le théâtre de marées parmi les plus fortes au monde.

Récemment, le parc a organisé des sorties où les Canadiens pouvaient nager avec les saumons dans la baie de Fundy et faire de la plongée en compagnie d’une équipe de biologistes afin d’en apprendre davantage sur la population de saumons atlantiques. C’est certainement un domaine où nous avons besoin de beaucoup de données supplémentaires.

Ma question porte plus précisément sur Parcs Canada. Vous avez annoncé que, à l’occasion du 150e anniversaire du Canada, il y a eu une augmentation du nombre des visiteurs dans les parcs parce que l’entrée était gratuite cette année. Quelles leçons avons-nous tirées de la hausse de l’achalandage dans les parcs canadiens? Les Canadiens aiment leurs grands espaces et leurs parcs. Quelles initiatives envisagez-vous de prendre pour rendre les parcs plus accessibles à la population?

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Merci beaucoup, sénateur.

J’ai eu l’occasion de visiter le parc national Fundy avec mes enfants. Je n’ai toutefois pas eu la chance de nager avec les saumons. Comme j’aime nager, c’était très décevant pour moi. Cela dit, j’ai pu voir les recherches extraordinaires que Parcs Canada mène, en collaboration avec une communauté autochtone locale, sur les moyens novateurs en vue de rétablir la population de saumons.

Il est renversant de découvrir les travaux des biologistes dans nos parcs. J’attache beaucoup d’importance aux sciences et à la promotion des gens extraordinaires qui travaillent à Parcs Canada. J’espère que tout le monde a pu visiter certains des parcs nationaux cette année. L’entrée demeure gratuite pour le reste de 2017.

En ce qui concerne les leçons tirées, je pense que nous sommes encore en train d’apprendre de l’expérience de cette année. C’était vraiment extraordinaire de voir les gens visiter en grand nombre les parcs nationaux, mais il est vrai que nous devons en faciliter l’accès.

J’avais hâte de travailler avec le sénateur Eggleton sur l’agrandissement du parc urbain national de la Rouge. Certains parcs sont facilement accessibles aux Canadiens, d’autres pas. Il y a une navette gratuite pour quiconque souhaite aller de Toronto au parc de la Rouge. Des initiatives comme celle-là font qu’il est plus facile, surtout pour les Canadiens à faible revenu qui ont moins souvent l’occasion de visiter des parcs, de s’y rendre. Le parc de la Rouge est merveilleux, car il n’est qu’à une heure de transport en commun. Je suis toutefois persuadée qu’il faut améliorer l’accès aux parcs.

Dès l’année prochaine, l’accès aux parcs sera gratuit pour les enfants de moins de 18 ans et pour les nouveaux arrivants. Nous travaillons avec Citoyenneté et Immigration Canada pour que les immigrants reçoivent dans leur dossier de citoyenneté un laissez-passer gratuit aux parcs et de l’information sur les parcs afin de les inciter à y aller. Nous voulons être certains que les nouveaux arrivants pourront aussi en profiter.

Nous en apprenons davantage sur la façon dont les gens visitent les parcs. Souvent, les Canadiens y vont pour la journée. Ils n’y font pas de longs séjours. Nous devons veiller à ce que les parcs soient accessibles pour les excursions d’une journée.

Certains parcs, qui ont eu un grand nombre de visiteurs, en ont possiblement subi les contrecoups. La protection de l’intégrité écologique de ces parcs est une priorité. Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour les protéger. Dans l’ensemble, c’était une histoire incroyable.

Nous examinons également les données économiques. Il est très important de parler des parcs, non seulement des droits d’entrée, mais également des retombées pour les populations locales. Nous savons qu’elles ont déjà grandement profité du nombre de touristes qui traversent leurs quartiers pour accéder aux parcs. Nous pouvons en faire beaucoup plus.

Je me consacre à l’environnement, à l’économie et à l’appui aux petites entreprises. Parfois, des événements autochtones ont lieu dans les parcs. Il y a des artistes locaux. Nous pouvons en faire davantage en créant des partenariats afin de veiller à ce que les populations locales en profitent le plus possible.

Le Musée national du portrait

L’honorable Patricia Bovey : Madame la ministre, je vous remercie d’être parmi nous aujourd’hui.

Je sais que vous êtes bien consciente du fait que les artistes et les citoyens d’un bout à l’autre du pays souhaitent vivement que l’on ouvre un musée national du portrait ici, dans la région de la capitale nationale. Les gens se reconnaissent les uns dans les autres. Nous avons tous des albums de photos. Beaucoup de photographies sont prises dans les parcs. Nous avons des fichiers contenant des images numériques des membres de notre famille et de nos amis. Les portraits racontent des histoires. Ils ouvrent une importante fenêtre sur notre histoire et sur la place que nous occupons.

Un musée national du portrait dresse le portrait d’une nation. Il montre ses nombreuses dimensions et sa diversité sociale, tout en alimentant la fierté nationale. Les gens veulent voir des représentations de héros, de dirigeants, de personnes connues et inconnues, ainsi que d’amis et de collègues.

L’été dernier, le premier ministre a écrit ceci : « Nous sommes impatients de poursuivre la discussion sur la création d’un musée national du portrait dans la région de la capitale nationale. »

Comme vous venez de cette région, je veux vous poser la question suivante : quand et où ce musée ouvrira-t-il ses portes?

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Merci beaucoup, honorable sénatrice.

J’ai certes constaté un grand intérêt à l’égard d’une telle initiative. J’ai pris conscience de l’importance de créer un musée national du portrait après avoir écouté parler de nombreux sénateurs, y compris vous, ainsi que beaucoup de députés de la région de la capitale nationale. Comme vous, je crois que nous devons parler de notre histoire et la faire connaître, que ce soit au moyen de vieux portraits ou de portraits numériques. Il y a des façons de le faire.

Il y a des gens qui voulaient qu’on ouvre un musée du portrait au 100, rue Wellington. On a décidé plutôt d’y abriter un centre qui célèbre la communauté autochtone canadienne, ce qui — d’après moi — est aussi une initiative fort louable. Je continue toutefois avec plaisir à chercher des emplacements possibles pour le musée. Malheureusement, une très grande partie des artefacts et des objets historiques du Canada prennent la poussière dans des archives, par exemple à Gatineau Personnellement, je compte faire tout ce qui est en mon pouvoir pour leur donner un jour une vitrine.

(1600)

Il n’y a pas de raison de s’en tenir à seulement à la région de la capitale nationale. Parcs Canada, par exemple, montre les trésors en tous genres que recèlent ses archives un peu partout au pays.

Je crois, oui, que nous devrions en faire plus. Nous devons célébrer notre histoire. C’est extrêmement important que les Canadiens la connaissent et la fassent connaître aux autres.

[Français]

Les engagements en matière de changements climatiques

L’honorable Paul J. Massicotte : Madame la ministre, je ferai le même commentaire que certains de mes collègues. La lutte contre les changements climatiques n’est pas encore perdue, mais elle est très mal partie et le temps est compté.

Selon un rapport alarmant publié la semaine dernière par l’ONU, même si tous les États signataires de l’Accord de Paris respectaient leur engagement, la terre connaîtra une hausse de température d’au moins 3 degrés Celsius d’ici 2100.

De plus, deux ans après la conclusion de l’accord, l’ONU évoque ce qui suit, et je cite :

[...] un « écart catastrophique » entre les engagements pris par les États pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et les efforts nécessaires pour respecter l’Accord de Paris.

[Traduction]

Certains pays, comme le Brésil, la Chine, l’Inde et la Russie, semblent en bonne voie d’atteindre les cibles qu’ils se sont fixées pour 2030 en ne changeant rien à leurs politiques, tandis que le Canada en sera incapable s’il ne modifie pas ses politiques, ce qui vaut d’ailleurs aussi pour la plupart des pays du G7. C’est désormais une évidence : le Canada doit en faire plus et il doit agir vite.

[Français]

Madame la ministre, la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique, la COP23, s’est ouverte hier, en Allemagne. J’imagine que vous comptez vous y rendre. Quel message entendez-vous y communiquer, compte tenu de ces données qui sont assez décourageantes en ce qui concerne les engagements du Canada? Le Canada participera-t-il au dialogue entre les parties signataires qui est prévu dans le cadre de l’Accord de Paris en 2018 pour revoir à la hausse sa contribution?

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Merci, sénateur Massicotte. Tout d’abord, il faut dire que l’Accord de Paris est historique. Auparavant, il n’existait pas d’accord auquel tous les pays du monde ont accepté de collaborer. C’est important, mais ce n’est pas tout. Nous savons que, malgré l’intention de chaque pays, on ne pourra contenir la hausse de température à moins de 2 degrés. C’est pourquoi l’Accord de Paris prévoit un mécanisme permettant à chaque pays d’en faire plus. D’ailleurs, c’est ce que nous ferons.

Je serai certainement présente en Allemagne. Il est très important que le Canada joue un rôle de chef de file alors que les États-Unis indiquent, pour leur part, qu’ils reculeront, qu’ils ne soutiendront pas l’Accord de Paris. De notre côté, nous travaillerons avec les États, les villes et les entreprises américaines qui savent que nous devons tous mettre la main à la pâte afin de réduire nos émissions.

Je suis également heureuse du fait que, en collaboration avec le Royaume-Uni, avec d’autres pays et provinces, avec des États et des entreprises, nous mettrons sur pied un accord afin d’éliminer le charbon. Nous savons que nous devons le faire. Nous conclurons donc une alliance que nous annoncerons en Allemagne. Nous savons que le charbon est très mauvais pour la santé, mais qu’il est également une grande source d’émissions de gaz à effet de serre. Cette alliance fera une grande différence, et je ferai tout ce que je peux pour asseoir le leadership du Canada à ce chapitre. Je serai heureuse d’y être en compagnie de mes homologues des autres partis et avec des chefs autochtones des provinces et des territoires. Si l’administration américaine recule, de notre côté, nous nous tiendrons debout et nous irons de l’avant.

[Traduction]

La taxe sur le carbone

L’honorable Denise Batters : Madame la ministre, vous avez assisté à la période des questions du Sénat en décembre 2016. Je vous avais alors demandé les détails de la taxe nationale sur le carbone que le gouvernement libéral entendait imposer à la Saskatchewan. Onze mois plus tard, la Saskatchewan n’a toujours pas eu réponse à ses questions. Presqu'un an s’est écoulé depuis la première fois que je vous ai posé ces questions, alors je vous laisse encore une fois la chance d’y répondre.

Madame la ministre, c’est pour ainsi dire un fait établi : la Saskatchewan ne se dotera pas d’une taxe sur le carbone. Si on en croit ce que vous avez annoncé, cela veut dire que le gouvernement Trudeau imposera sa propre taxe à la Saskatchewan.

Madame la ministre, pourriez-vous nous donner les détails de la taxe nationale sur le carbone qui sera imposée à la Saskatchewan? À quoi, exactement, s’appliquera-t-elle? Y aura-t-il des exceptions dans certains secteurs, comme l’agriculture? Si oui, lesquelles? Pourriez-vous nous fournir un résumé écrit de la taxe sur le carbone que le gouvernement Trudeau mettra en œuvre en Saskatchewan?

Madame la ministre, vous avez maintenant l’occasion de répondre à ces questions cruciales pour la Saskatchewan. Quel est votre plan? Quand imposerez-vous la taxe sur le carbone à la Saskatchewan? Pouvez-vous nous donner une date d’entrée en vigueur?

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Merci de votre question, honorable sénatrice.

L’espoir est éternel. Je souhaite toujours que la Saskatchewan fasse ce qui s’impose : élaborer un plan typiquement saskatchewanais.

Nous savons que nous devons réduire nos émissions. Nous savons que cela représente des possibilités économiques d’une valeur de plusieurs billions de dollars. Nous savons que l’innovation propre est une réalité.

J’étais en Saskatchewan. J’ai vu cette innovation de mes propres yeux. Qu’il s’agisse de captage et de stockage du carbone, de récoltes résilientes aux fluctuations climatiques ou d’agriculture sans labour, des choses merveilleuses ont lieu en Saskatchewan.

Je suis également ravie de dire que le reste du pays a mis les bouchées doubles. Au total, 97 p. 100 des Canadiens vivront dans une province ou un territoire où il y a une tarification de la pollution. La pollution a un prix, et les phénomènes météorologiques extrêmes d’un bout à l’autre du pays, notamment les sécheresses en Saskatchewan, nous le prouvent.

Il est très préoccupant de constater que le gouvernement de la Saskatchewan ne comprend pas que l’environnement et l’économie vont de pair. J’espère toutefois qu’une nouvelle administration et de nouveaux dirigeants favoriseront la création d’une occasion d’aller de l’avant.

J’ai pour objectif de collaborer avec tout le monde. J’ai été élue pour représenter tous les Canadiens, et je suis déterminée à travailler avec tous les Canadiens. Nous avons été bien clairs : il existe un filet de sécurité pour les provinces qui ne prennent pas leurs responsabilités, qui ne mettent pas un prix sur la pollution. Je serais heureuse de vous fournir les détails qui ont été présentés dans le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques. Nous vous ferons parvenir de plus amples détails sous peu.

Il est évident que toutes les provinces et tous les territoires doivent établir une tarification élargie du carbone. D’ailleurs, la Saskatchewan a déjà un cadre visant à imposer un prix aux gros pollueurs. Voilà une partie de la solution. Malheureusement, le gouvernement ne prend pas de mesures pour faire avancer les choses.

Je suis résolue, et je m’y engage de nouveau devant le Sénat, à collaborer avec le gouvernement de la Saskatchewan et à collaborer avec la nouvelle administration. Je sais que les gens de la Saskatchewan ressentent l’incidence des changements climatiques, qu’ils veulent profiter des occasions économiques. Je crois que la Saskatchewan est la mieux placée pour déterminer quel doit être son propre plan, et je suis ravie d’appuyer ses efforts à cette fin.

Le moratoire sur la circulation des pétroliers

L’honorable Tobias C. Enverga, Jr. : Madame la ministre, votre lettre de mandat de la part du premier ministre vous demande « de veiller à ce que les décisions se fondent sur la science, les faits et les preuves [...] ».

Dans ce contexte, madame la ministre, pourriez-vous je vous prie expliquer pourquoi le gouvernement cherche à interdire le transport de pétrole brut par pétrolier au large de la côte nord de la Colombie-Britannique alors qu’aucune autre côte au Canada n’est visée par une telle interdiction? Pouvez-vous nous faire part des analyses scientifiques qui appuient cette interdiction? En outre, le gouvernement a-t-il l’intention d’interdire la circulation de pétroliers sur la côte Est, comme il tente de le faire sur la côte Ouest au moyen du projet de loi C-48?

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Je remercie le sénateur de sa question. Je profite de l’occasion pour parler de notre conviction selon laquelle il faut prendre des décisions fondées sur les connaissances scientifiques et les données probantes. C’est pour cette raison que nous avons décidé de refaire nos évaluations environnementales. Nous voulons regagner la confiance des Canadiens, cette confiance qui a été perdue sous l’ancien gouvernement parce que celui-ci ne prenait pas des décisions fondées sur des données scientifiques et probantes solides, qu’il ne consultait pas adéquatement les Autochtones et qu’il ne tenait pas compte des émissions de gaz à effet de serre. D’ailleurs, l’ancien gouvernement n’a pas réussi à faire construire quoi que ce soit.

Nous sommes résolus à collaborer avec les Canadiens et à les mobiliser. Nous comprenons que c’est la meilleure chose à faire. C’est ce qu’attendent les Canadiens et c’est ce que nous continuerons de faire.

Je suis extrêmement fière des scientifiques qui travaillent pour le gouvernement. Nous pouvons nous compter très chanceux que des scientifiques aussi extraordinaires travaillent pour Environnement et Changement climatique Canada, Pêches et Océans Canada et ailleurs au sein du gouvernement.

Il y a quelques semaines, lors d’un séjour en Colombie-Britannique, j’ai eu le bonheur de participer à une table ronde sur les océans avec des spécialistes scientifiques de partout au Canada. C’était le premier voyage de la nouvelle conseillère scientifique en chef du Canada, qui a parlé des effets des changements climatiques sur les océans et de l’importance de protéger…

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, à l’ordre, s’il vous plaît. La ministre a la parole.

Vous avez le temps pour une brève question, sénatrice Raine.

Les habitations éconergétiques

L’honorable Nancy Greene Raine : Madame la ministre McKenna, vous n’avez pas répondu à ma question. Je vous ai demandé précisément de nous parler du code type pour les immeubles existants, et non ceux qui sont en construction. Je suis ravie que vous ayez parlé de l'entreprise Landmark Homes. Je n’y vois aucun problème. Cependant, ce que j’aimerais vraiment savoir, c’est le coût que les nouvelles exigences imposeront aux propriétaires actuels. Pouvez-vous garantir que le gouvernement n’imposera pas de coûts additionnels aux Canadiens lorsqu’ils vendront leur maison?

(1610)

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Encore une fois, je suis ravie que nous comprenions que l’environnement et l’économie vont de pair. La façon dont nous bâtissons nos maisons est cruciale. À l’heure actuelle, les maisons au Canada sont extrêmement énergivores. Lorsque je fais du porte-à-porte — et j’en fais beaucoup —, les gens me disent souvent qu’ils veulent payer moins, qu’ils veulent que leur maison ait un meilleur rendement énergétique, qu’elle soit mieux isolée, qu’elle ait de meilleures fenêtres. Bref, ils veulent du soutien.

Nous collaborons avec les provinces et les territoires, dans le cadre du Fonds pour une économie à faibles émissions de carbone, afin de trouver des mesures éconergétiques qui permettront de faire économiser de l’argent aux Canadiens. Le fait de mieux construire les maisons fait économiser de l’argent aux Canadiens. Nous travaillons avec des organisations comme le Conseil du bâtiment durable du Canada parce que nous voulons que les gens paient moins, au final.

Je suis extrêmement fière que nous veillions à avoir les logements sociaux les plus éconergétiques qui soient. Pourquoi? Parce que les personnes qui gagnent le moins d’argent devraient réaliser des économies sur leurs factures d’électricité chaque mois, et non l’inverse.

Nous allons donc poursuivre en ce sens. Nous allons continuer de nous pencher sur les façons dont nous pouvons réduire les coûts pour les Canadiens, faire croître l’économie, créer de bons emplois, grâce à des entreprises comme Landmark Homes, et réduire nos émissions.

Son Honneur le Président : Sénateur Patterson, nous avons le temps pour une très brève question si vous voulez une réponse, car il reste un peu moins d’une minute.

La tarification du carbone au Nunavut

L’honorable Dennis Glen Patterson : Merci. Madame la ministre, je vous ai déjà posé une question au sujet de la situation difficile au Nunavut et de la décision de votre gouvernement de collaborer avec les territoires pour étudier les effets de la tarification du carbone. Malheureusement, nous ne disposons d’aucune filière énergétique de rechange.

Je me demande si, à l’approche de 2018, vous seriez prête à appuyer le ralentissement de la mise en œuvre de la tarification du carbone au Nunavut, d’ici à ce que nous ayons terminé les travaux prévus de l’étude conjointe des effets sur notre coût de la vie déjà si élevé.

L’honorable Catherine McKenna, C.P., députée, ministre de l’Environnement et du Changement climatique : Je vous remercie, honorable sénateur, de votre question.

Je suis d’accord avec vous, nous devons examiner le coût de la mise en œuvre de la tarification de la pollution au Nunavut. Je crois qu’il est très important de ne pas augmenter le fardeau des gens qui n’ont aucune solution de rechange.

Nous sommes prêts à travailler avec le gouvernement du Nunavut. J’ai déjà rencontré plusieurs fois mon homologue.

De plus, nous devons en faire davantage pour aider ces communautés à cesser de dépendre du diesel. Je le répète, les effets de la pollution, notamment celle générée par l’utilisation du diesel, ne se limitent pas au changement climatique. La pollution affecte directement la santé des gens. Nous croyons que les investissements que nous faisons, notamment les 220 millions de dollars pour la réduction du recours au diesel dans les communautés éloignées, auront des retombées tangibles.

Je veux également m’assurer de travailler avec les communautés de façon à profiter de cette occasion pour créer de bons emplois. L’environnement et l’économie vont de pair. C’est ce que je me plais à répéter, mais c’est aussi ce sur quoi le gouvernement fonde son action.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, la période des questions est terminée. Je suis sûr que l’ensemble des honorables sénateurs se joignent à moi pour remercier la ministre McKenna d’avoir été parmi nous aujourd’hui.

Merci, madame la ministre. Nous serons heureux de vous recevoir de nouveau.


ORDRE DU JOUR

La Loi sur les Indiens

Projet de loi modificatif—Amendements des Communes—Motion tendant à approuver les premier et troisième amendements et à amender le deuxième amendement—Ajournement du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Harder, C.P., appuyée par l’honorable sénatrice Bellemare,

Que le Sénat agrée les amendements 1 et 3 apportés par la Chambre des communes au projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (élimination des iniquités fondées sur le sexe en matière d’inscription);

Que, au lieu de l’amendement 2, le projet de loi S-3 soit modifié,

a)à la page 2, à l’article 2, par suppression des lignes 5 à 16;

b)à la page 5, par adjonction, après la ligne 34, de ce qui suit :

« 2.1 (1) Les alinéas 6(1)c.01) à c.2) de la même loi sont abrogés.

(2) Les alinéas 6(1)c.4) à c.6) de la même loi sont abrogés.

(3) L’alinéa 6(1)c) de la même loi devient l’alinéa a.1) et est déplacé en conséquence.

(4) L’alinéa 6(1)c.3) de la même loi devient l’alinéa a.2) et est déplacé en conséquence.

(5) Le paragraphe 6(1) de la même loi est modifié par adjonction, après l’alinéa a.2), de ce qui suit :

a.3) elle est un descendant en ligne directe d’une personne qui a droit à l’inscription, ou qui avait ou aurait eu ce droit, en vertu de l’un des alinéas a.1) ou a.2) et elle est née soit avant le 17 avril 1985, que ses parents aient été ou non mariés l’un à l’autre au moment de sa naissance, soit après le 16 avril 1985 et ses parents se sont mariés à n’importe quel moment avant le 17 avril 1985;

(6) Le passage du paragraphe 6(3) de la même loi précédant l’alinéa a) est remplacé par ce qui suit :

(3) Pour l’application des alinéas (1)a.3) et f) et du paragraphe (2) :

(7) L’alinéa 6(3)b) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

b) la personne qui est visée à l’un des alinéas (1)a.1), d), e) ou f) ou au paragraphe (2) et qui est décédée avant le 17 avril 1985 est réputée avoir le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa ou du paragraphe en cause;

(8) L’alinéa 6(3)c) de la même loi est abrogé.

(9) L’alinéa 6(3)d) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

d) la personne qui est visée à l’un des alinéas (1)a.2) ou a.3) et qui est décédée avant la date d’entrée en vigueur de l’alinéa en cause est réputée avoir le droit d’être inscrite en vertu de celui-ci. »;

c)à la page 7,

(i)par adjonction, après la ligne 23, de ce qui suit :

« 3.1 (1) L’alinéa 11(1)c) de la même loi est remplacé par ce suit :

c) elle a le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa 6(1)a.1) et a cessé d’être un membre de cette bande en raison des circonstances prévues à cet alinéa;

(2) Les alinéas 11(3)a) et a.1) de la même loi sont remplacés par ce qui suit :

a) la personne dont le nom a été omis ou retranché du registre des Indiens ou d’une liste de bande dans les circonstances prévues à l’un des alinéas 6(1)a.1), d) ou e) et qui est décédée avant le premier jour où elle a acquis le droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de la bande dont elle a cessé d’être membre est réputée avoir droit à ce que son nom y soit consigné;

a.1) la personne qui, n’eût été son décès, aurait eu le droit d’être inscrite en vertu des alinéas 6(1)a.2) ou a.3) à la date d’entrée en vigueur de l’alinéa en cause et qui aurait eu, à cette date, le droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de bande est réputée avoir droit à ce que son nom y soit consigné;

(3) Les alinéas 11(3.1)a) à i) de la même loi sont remplacés par ce qui suit :

a) elle a le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa 6(1)a.2) et son père a droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de bande ou, s’il est décédé, avait ce droit à la date de son décès;

b) elle a le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa 6(1)a.3) et l’un de ses parents ou un autre de ses ascendants, selon le cas :

(i) a cessé d’avoir le droit d’être membre de la bande en raison des circonstances prévues à l’alinéa 6(1)a.1),

(ii) n’avait pas droit d’être membre de la bande le 16 avril 1985.

3.2 Les paragraphes 64.1(1) et (2) de la même loi sont remplacés par ce qui suit :

64.1 (1) Une personne qui a reçu un montant supérieur à mille dollars en vertu de l’alinéa 15(1)a), dans sa version antérieure au 17 avril 1985, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui de cet alinéa, du fait qu’elle a cessé d’être membre d’une bande dans les circonstances prévues aux alinéas 6(1)a.1), d) ou e) n’a pas le droit de recevoir de montant en vertu de l’alinéa 64(1)a) jusqu’à ce que le total de tous les montants qu’elle aurait reçus en vertu de l’alinéa 64(1)a), n’eût été le présent paragraphe, soit égal à l’excédent du montant qu’elle a reçu en vertu de l’alinéa 15(1)a), dans sa version antérieure au 17 avril 1985, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui de cet alinéa, sur mille dollars, y compris les intérêts.

(2) Lorsque le conseil d’une bande prend, en vertu de l’alinéa 81(1)p.4), des règlements administratifs mettant en vigueur le présent paragraphe, la personne qui a reçu un montant supérieur à mille dollars en vertu de l’alinéa 15(1)a) dans sa version antérieure au 17 avril 1985, ou en vertu de toute autre disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui de cet alinéa, parce qu’elle a cessé d’être membre de la bande dans les circonstances prévues aux alinéas 6(1)a.1), d) ou e) n’a le droit de recevoir aucun des avantages offerts aux membres de la bande à titre individuel résultant de la dépense d’argent des Indiens au titre des alinéas 64(1)b) à k), du paragraphe 66(1) ou du paragraphe 69(1) jusqu’à ce que l’excédent du montant ainsi reçu sur mille dollars, y compris l’intérêt sur celui-ci, ait été remboursé à la bande. »,

(ii)à l’article 4, par substitution, à la ligne 31, de ce qui suit :

« (2) Les termes des articles 5 à 10.1 s’entendent au »,

(iii)à l’article 5, par substitution, aux lignes 35 et 36, de ce qui suit :

« date de la prise du décret visé au paragraphe 15(1). »;

d)à la page 8, à l’article 7, par substitution, aux lignes 13 et 14, de ce qui suit :

« la prise du décret visé au paragraphe 15(1) — le registraire est tenu de re- »;

e)à la page 9,

(i)à l’article 10, par substitution, à la ligne 1, de ce qui suit :

« d’entrée en vigueur du présent article et que l’un »,

(ii)par adjonction, après la ligne 4, de ce qui suit :

« 10.1 Il est entendu qu’aucune personne ni aucun organisme ne peut réclamer ou recevoir une compensation, des dommages-intérêts ou une indemnité de l’État, de ses préposés ou mandataires ou d’un conseil de bande en ce qui concerne les faits — actes ou omissions — accomplis de bonne foi dans l’exercice de leurs attributions, du seul fait qu’une personne n’était pas inscrite — ou que le nom d’une personne n’était pas consigné dans une liste de bande — à la date d’entrée en vigueur du présent article et que la personne ou l’un de ses parents ou un autre de ses ascendants a le droit d’être inscrit en vertu de l’un des alinéas 6(1)a.1), a.2) ou a.3) de la Loi sur les Indiens. »;

f)à la page 11, à l’article 15:

(i)par substitution, à la ligne 23, de ce qui suit :

« 15 (1) La présente loi, sauf les articles 2.1, 3.1, 3.2 et 10.1, entre en vigueur ou est répu- »,

(ii)par adjonction, après la ligne 26, de ce qui suit :

« (2) Les articles 2.1, 3.1, 3.2 et 10.1 entrent en vigueur à la date fixée par décret, laquelle doit être postérieure à la date fixée en vertu du paragraphe (1). »;

Qu’un message soit transmis à la Chambre des communes pour l’en informer.

L’honorable Frances Lankin : Honorables sénateurs, je comprends qu’il y a eu une certaine confusion et je reconnais que le sénateur Patterson a cru qu’il était approprié d’ajourner le débat à ce moment-là. Je suis heureuse d’avoir l’occasion de prendre la parole et je remercie tous ceux qui ont participé au débat.

Je laisse de côté mes notes, étant donné que les deux discours prononcés aujourd’hui sur le projet de loi S-3 et les modifications apportées au message à renvoyer à l’autre endroit ont été informatifs et éloquents, voire enflammés, surtout dans le cas de la sénatrice Dyck. Je suis, en fait, heureuse d’avoir profité d’une pause. J’ai été très touchée, car j’ai senti un élan du cœur et un sentiment d’émerveillement à la perspective de voir une telle chose se réaliser au cours de votre vie, surtout compte tenu de tous les efforts que vous et d’autres y avez consacrés.

Je veux prendre un instant pour faire quelques remerciements. Je souhaite tout d’abord remercier les sénateurs autochtones qui ont fait preuve de leadership dans le dossier. La sénatrice Dyck, par exemple, a fait un travail remarquable au cours des derniers mois lors de ses discussions avec le gouvernement pour tenter de trouver un moyen d’aller de l’avant et d’élaborer une solution qui rendrait possible ce moment historique. Puis, il y a la sénatrice Lovelace Nicholas qui, pendant des années, a fait de cette cause un combat personnel, servant d’exemple aux autres femmes autochtones et leur permettant d’acquérir davantage de droits. C’est là un héritage exceptionnel à léguer. Il est merveilleux qu’elle soit parmi nous au Sénat et qu’elle puisse participer à ce moment plus tard cette semaine.

Je désire remercier les sénateurs Sinclair, Christmas et Watt. Je tiens aussi à remercier le vice-président du Comité des peuples autochtones, le sénateur Patterson, et tous les membres de ce comité. Un travail important a été fait. On a proposé des idées concrètes, et on a présenté une vision idéale de ce que représente ce pays que l’on partage. On a aussi parlé de la nécessité de finalement reconnaître la discrimination dont sont victimes les femmes autochtones et d’y mettre fin.

D’autres personnes ont joué un rôle crucial dans ce dossier. La sénatrice Dyck a mentionné de nombreuses femmes qui ont été mes héroïnes au fil des ans. Dans le cadre de ce processus, j’ai eu l’honneur de rencontrer Sharon McIvor, que je n’avais jamais rencontrée avant, et Lynn Gehl. Ces femmes se sont battues pour leur propre cause, mais aussi pour celle d’autres femmes, et qui ont cherché à faire du Canada un pays où toutes les nations veulent vivre et peuvent coexister. Je leur sais gré de leur travail.

Je tiens également à exprimer mes remerciements et ma gratitude à la ministre Carolyn Bennett, ainsi qu’au personnel de son bureau et de son ministère. Ils ont contribué de façon importante à faire avancer l’étude de ces changements jusqu’à aujourd’hui.

Je connais la ministre Bennett depuis bien des années, mais, tout au long de ce processus, j’ai eu l’occasion de collaborer avec elle d’une nouvelle façon pour que nous trouvions ensemble des solutions. Je tiens à dire que la ministre ne voyait pas cela comme des négociations entre des gens qui n’ont pas la même vision ni les mêmes intentions. Elle a elle-même dit que la Charte n’est pas un plafond, mais un plancher. Cette femme défend depuis bien des années les droits garantis par la Charte et les principes d’égalité.

Par ailleurs, elle est résolument déterminée à promouvoir les relations de nation à nation. La sénatrice Dyck a dit notamment que ce sera un énorme changement pour certaines communautés. Nous espérons qu’il sera bien accueilli par toutes les communautés concernées, mais nous savons qu’il faudra consulter ces gens afin de déterminer comment on pourra mettre en œuvre les dispositions de ce projet de loi lorsqu’elles entreront en vigueur, comment on pourra les adapter aux communautés, et comment utiliser les transferts fédéraux afin d’apporter les changements qui s’imposent aux mesures d’aide, aux services et au cadre juridique concernant le processus décisionnel, le droit de vote, les droits fonciers ainsi qu’une foule de mesures sur lesquelles ces communautés autochtones n’ont pas, jusqu’à présent, eu l’occasion de se pencher pour en déterminer les effets et pour éviter les conséquences non prévues. C’est pour cette raison que ces consultations sont importantes. Elles sont importantes pour promouvoir les relations de nation à nation et pour remplir l’obligation du Canada, qui, selon les décisions de la Cour suprême, a le devoir de collaborer avec les communautés des Premières Nations et les gouvernements autochtones.

Je tiens à la remercier. Il n’était pas facile de reprendre le processus d’approbation, puis de renvoyer le projet de loi au Cabinet et au ministère des Finances. Comme vous le savez, les organismes centraux sont souvent ceux qui hésitent le plus à modifier les processus existants et à revenir sur les décisions qui ont été prises. De plus, même lorsqu’ils ont de bonnes intentions, ils se montrent parfois intransigeants quand vient le temps de trouver des solutions. Je pense que le groupe a accompli un travail incroyable, fruit d’une collaboration avec la sénatrice Dyck et le sénateur Sinclair, sans parler du sénateur Harder, qui a joué un rôle essentiel.

(1620)

À titre de marraine du projet de loi, je me suis mise à certains moments en retrait pour laisser la place à des leaders dont la compétence et l’expérience ont permis d’obtenir un « oui » et qui ont travaillé d’arrache-pied en ce sens. Je leur rends hommage.

Je pense que l’équilibre que nous avons trouvé est important, parce que l’on reconnaît la nécessité non seulement de collaborer avec les communautés autochtones, mais aussi de consacrer les droits des femmes et de les mettre en rapport avec la discrimination fondée sur le sexe. Le sénateur Brazeau a soulevé un point important, auquel a répondu la sénatrice Dyck.

À ceux qui craignent que l’on ne donne jamais suite à ces mesures, qui ont des doutes, je dis qu’ils ont le droit de l’être. Tout au long de notre histoire, nous avons manqué à nos obligations, que ce soit par rapport aux droits issus de traités, aux ententes que nous avons conclues, ou simplement par rapport à nos engagements et à nos promesses de consultation et d’action. Les gens ont donc le droit de se méfier, d’être prudents. Nous devrions l’être. L’issue dépend du processus de consultation entre les peuples autochtones et le Canada, entre les gouvernements autochtones et le Canada, et au sein du Parlement composé de la Chambre des communes et du Sénat.

Aux termes du projet de loi S-3, il y aura un régime de rapports et une structure de consultations mis au point en commun en ce moment — nous sommes à mi-chemin du processus de consultation — ainsi qu’un rapport à l’étape finale. Cette façon de procéder nous permet de poursuivre nos efforts. Je crois personnellement qu’il n’y a aucune raison d’attendre la fin des consultations pour appliquer cette clause. Ces consultations seront l’occasion de parler de bien des enjeux, notamment de l’existence même du registre des Indiens et de sa pertinence dans la société contemporaine et par rapport aux relations que nous souhaitons avoir avec les administrations et les peuples autochtones.

Cependant, on pourrait se concentrer tout particulièrement sur les consultations, surtout en ce qui a trait à l’entrée en vigueur de l’article qui prévoit l’élimination du seuil d’exclusion fixé à l’année 1951.

Je souhaite aussi revenir sur le point très important soulevé par la sénatrice Dyck. Elle a parlé des femmes qui ont été laissées pour compte et qui ont été victimes de discrimination. Elle a aussi parlé des femmes et de leurs descendants qui ont été tenus à l’écart de leurs communautés. Il est essentiel que ces femmes participent aux discussions et aux consultations. D’ailleurs, la ministre a pris un engagement à cet égard lors de nos discussions. Je tiens à le signaler, car il s’agira d’un élément très important de notre façon de procéder à l’avenir.

Je ne vais pas parler des détails de l’amendement. Je vais simplement répéter qu’il s’agit d’une réponse au message émanant de la Chambre des communes. Nous allons renvoyer à la Chambre un message accompagné d’un amendement que le gouvernement s’est engagé à accepter. J’espère que, demain, nous serons tous réunis ici pour entendre les sénateurs Patterson, Christmas et Sinclair, et peut-être deux ou trois autres intervenants. Je pense que la sénatrice Pate pourrait aussi prendre la parole demain. J’espère que nous serons tous ici pour les écouter demain et que, jeudi, nous voterons sur ce projet de loi et que nous célébrerons un moment historique, non seulement pour les femmes autochtones et leurs enfants et descendants, ainsi que toutes celles qui ont été victimes d’intimidation, mais aussi pour nous tous, car nous franchirons une autre étape très importante en vue d’une véritable réconciliation.

[Français]

L’honorable Renée Dupuis : La sénatrice Lankin accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Lankin : Oui.

La sénatrice Dupuis : Sénatrice Lankin, ma question porte sur le choix des termes utilisés dans le projet de loi.

[Traduction]

Dans la version anglaise, le projet de loi S-3 vise à modifier la Loi sur les Indiens en éliminant les iniquités fondées sur le sexe en matière d’inscription.

[Français]

Dans la version française, on parle de l’« élimination des iniquités fondées sur le sexe en matière d’inscription ». Dans les deux langues, on parle de l’élimination des iniquités, alors que le fondement même du projet de loi S-3 est la discrimination à l’endroit des femmes. Cela avait été soulevé dès le départ; des arrêts comme l’arrêt McIvor et l’arrêt Descheneaux parlent de la discrimination qui est inscrite dans la Loi sur les Indiens. On retrouve dans l’idée de ce titre la référence à des iniquités, un concept extrêmement vague qui ne renvoie pas directement à l’inégalité dans la façon dont sont traitées les femmes autochtones par rapport aux hommes autochtones.

Lors des discussions que vous avez eues avec le gouvernement, a-t-il été question de ce qui semble être la dilution d’un concept très clair et très délimité juridiquement, soit la discrimination ou l’interdiction de discrimination, et de la référence à un terme moral, soit l’injustice évoquée par les iniquités?

[Traduction]

La sénatrice Lankin : En ce qui a trait aux discussions qui ont eu lieu ces derniers temps, la question n’a pas été soulevée. Des membres du Comité des peuples autochtones ont présenté au comité un amendement en vue de changer le nom de la mesure législative, et il a été adopté par le Sénat. Le nom de la mesure législative découle de ce processus. Il n’a jamais été question de diluer quoi que ce soit en ce qui concerne les iniquités, l’égalité ou la discrimination fondée sur le sexe.

Je sais que nous n’avons reçu les amendements qu’aujourd’hui, mais, quand vous aurez eu l’occasion d’en prendre connaissance et d’en saisir l’incidence, vous allez voir qu’il s’agit de mettre un terme à toute forme de discrimination fondée sur le sexe. Cet élément est important. C’était là la portée initiale de la mesure législative; je suis consciente que vous le savez, mais je tiens à le préciser.

Tant les hommes que les femmes font l’objet d’autres formes de discrimination, mais ces dernières ne sont pas fondées sur leur sexe. Ce sujet sera étudié et sera abordé dans le cadre de la consultation, c’est-à-dire la deuxième phase dont il a été question plus tôt. Ces aspects seront inclus, mais ils ont été délibérément omis de ce projet de loi, car il ne s’agit pas de discrimination fondée sur le sexe. Cette question était importante, je vous remercie de l’avoir posée.

L’honorable Nancy Greene Raine : J’ai une question pour la sénatrice, si elle le veut bien. Il s’agit d’une simple précision. En ce qui concerne cette mesure législative, le projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (élimination des iniquités fondées sur le sexe en matière d’inscription), les termes « sex-based » et « gender-based » en anglais renvoient-ils à la même notion?

La sénatrice Lankin : Pour les fins de cette mesure législative, oui.

(Sur la motion du sénateur Patterson, le débat est ajourné.)

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L’honorable Gwen Boniface propose que le projet de loi C-46, Loi modifiant le Code criminel (infractions relatives aux moyens de transport) et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je suis heureuse de pouvoir prendre la parole à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi C-46, qui vise à modifier les dispositions du Code criminel concernant les infractions relatives aux moyens de transport et à apporter des modifications corrélatives à d’autres lois.

Le Sénat a reçu ce projet de loi la semaine dernière après de longues délibérations à l’autre endroit, notamment aux étapes du rapport et de la troisième lecture et lors de l’étude au Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Le comité permanent a entendu 70 témoins.

(1630)

Le projet de loi propose des modifications importantes au Code criminel concernant la conduite avec facultés affaiblies par l’alcool ou la drogue, et je suis convaincue qu’il aura une incidence positive sur la sécurité des routes et des autoroutes.

Chers collègues, il s’agit d’un projet de loi très important puisque la conduite avec facultés affaiblies continue de faire des ravages dans la vie de familles canadiennes innocentes. Des histoires tragiques de blessures et de décès insensés causés par la conduite avec facultés affaiblies continuent de faire les manchettes au Canada.

Permettez-moi de citer deux chiffres pour la gouverne du Sénat : 1 000 et 60 000. Ces chiffres représentent le nombre de personnes qui sont tuées et blessées chaque année sur les routes au Canada à la suite de collisions causées par la conduite avec facultés affaiblies. Autrement dit, chaque année, la conduite avec facultés affaiblies tue 1 000 Canadiens et en blesse 60 000 autres.

Les témoignages de membres de la famille qui ont perdu des êtres chers donnent une perspective personnelle et sensible à la question. Dans leur témoignage, Markita Kaulius et Sheri Arsenault de Families for Justice et Patricia Hynes-Coates des Mères contre l’alcool au volant ont eu le courage de partager leur émouvant récit de perte avec le Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Ce récit démontre la souffrance qu’éprouvent les familles à la suite de ces actes insensés.

Des cas comme ceux-ci ne sont pas rares au Canada. La plupart des sénateurs ont probablement déjà entendu de telles histoires de membres de la famille et d’amis ou ont eux-mêmes été touchés par une tragédie semblable.

Il est tout à fait possible de prévenir l’immense chagrin que vivent les familles. Pourtant, la conduite avec facultés affaiblies tue ou blesse des milliers de Canadiens chaque année et impose d’énormes coûts sociaux et économiques à la société. La conduite avec facultés affaiblies constitue la principale cause criminelle de décès et de blessures au Canada. Il s’agit de l’un des dangers auxquels les policiers en patrouille sont confrontés en tout temps dans l’exercice de leurs fonctions.

L’objectif du projet de loi C-46 est de diminuer la prévalence de la conduite avec capacités affaiblies et, par conséquent, de réduire le nombre de décès et de blessures sur les routes. L’objectif du projet de loi C-46 est de sauver des vies, et j’espère que vous vous joindrez à moi pour appuyer les mesures proposées.

Comme je l’ai mentionné, le projet de loi C-46 propose de lutter contre la conduite avec capacités affaiblies tant par la drogue que par l’alcool. Les mesures législatives proposées en vue de lutter contre la conduite avec capacités affaiblies par la drogue sont essentielles, étant donné que le gouvernement s’apprête à légaliser et à réglementer le cannabis. Grâce à ces mesures, ceux qui choisissent de conduire avec les capacités affaiblies courraient plus de risques de se faire épingler lors d’un contrôle et de se faire poursuivre. Le gouvernement est d’avis — avis que je partage — qu’il faut adopter ces mesures avant la légalisation du cannabis. On pourrait ainsi empêcher, idéalement, la hausse éventuelle du nombre de personnes qui conduisent avec les capacités affaiblies par la drogue qui pourrait en découler, comme on l’a constaté partout dans les États du Colorado et de Washington peu après la légalisation du cannabis.

La plupart des sénateurs ne sont pas sans savoir que la conduite avec capacités affaiblies par une drogue est une infraction criminelle depuis 1925. Or, les policiers ont toujours eu du mal à enquêter sur cette infraction, et il est difficile pour les procureurs de la Couronne de la prouver. En 2008, on s’est efforcé de régler certaines de ces difficultés en mettant en place de nouveaux outils en vue de détecter la conduite avec capacités affaiblies par la drogue et de mener des enquêtes à cet effet. Ces outils comprennent notamment les tests de sobriété normalisés administrés sur place, qui se composent de trois tests simples qu’on fait passer à un conducteur au cours d’un contrôle routier. Les tests de sobriété normalisés aident les policiers à déterminer si les capacités d’un conducteur sont affaiblies ou non. Les outils comprennent aussi l’autorisation d’effectuer une évaluation en reconnaissance de drogues, qui est un protocole de 12 étapes administré par un policier spécialement formé. Cette évaluation aide à déterminer si l’affaiblissement des capacités observé est causé par la drogue. Ces deux outils ont été utiles, mais il est évident qu’il faut en faire davantage.

Le projet de loi C-46 maintient et améliore de diverses manières l’approche existante. Premièrement, la loi autoriserait les policiers à exiger d’un conducteur qu’il fournisse, sur la voie publique, un échantillon de liquide buccal. Les policiers auraient le droit d’exiger l’échantillon lorsque, après avoir arrêté un véhicule de manière légale, ils auraient des motifs raisonnables de soupçonner le conducteur d’avoir de la drogue dans son organisme. Le liquide buccal serait prélevé en insérant un petit appareil portatif dans la bouche du conducteur. Une fois qu’une quantité suffisante de liquide buccal serait recueillie, elle serait analysée pour déterminer s’il y a présence de drogue dans l’organisme ou non. Pour l’instant, les tests effectués serviraient à dépister les trois drogues les plus souvent consommées par les conducteurs : le cannabis, la cocaïne et la méthamphétamine.

Le test de dépistage de drogue ne révélerait aucune information personnelle ou sensible à propos de la personne. Il indiquerait strictement un résultat « positif » ou « négatif » relativement à la présence de drogue. Il ne détecterait pas la quantité de drogue présente. Le test de dépistage servirait uniquement à déterminer si une personne a de la drogue dans son organisme. De plus, le test de dépistage ne mesure pas l’affaiblissement des facultés, mais ne fait que révéler qu’une personne a peut-être consommé de la drogue récemment.

Lorsqu’un test de dépistage indiquerait qu’une personne a de la drogue dans son organisme, le policier serait en mesure de dire qu’il a des motifs raisonnables de croire qu’une infraction liée à la conduite avec capacités affaiblies a été commise et pourrait passer à l’étape suivante de l’enquête, où une évaluation de reconnaissance de drogues ou un test sanguin serait effectué.

Deuxièmement, le projet de loi nous propose d’autres dispositions tout aussi importantes qui consistent à créer trois nouvelles infractions criminelles pour avoir dépassé la limite légale de drogue dans les deux heures après avoir pris le volant. Ces infractions seraient prouvées au moyen d’un échantillon de sang et seraient définies de manière semblable aux infractions actuelles de conduite avec les capacités affaiblies par l’alcool, où la limite à ne pas dépasser est de 80 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang. S’il existe au Canada une infraction relative à l’alcool au volant depuis 1969, aucune infraction n’a jamais été définie en ce qui a trait à la drogue au volant.

La création de ces infractions permettrait de libérer la Couronne du fardeau de la preuve; elle n’aurait plus à prouver que les capacités d’une personne sont affaiblies. Le procureur devrait alors seulement prouver que le conducteur avait une quantité illégale de drogues dans le sang.

J’aimerais attirer l’attention des honorables sénateurs sur le témoignage de Douglas Beirness, du Centre canadien sur les dépendances et l’usage des substances. Il a comparu devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne de l’autre endroit pour témoigner au sujet de ce projet de loi.

M. Beirness a indiqué que, en plus de faciliter la tâche à la Couronne pour ce qui est de prouver qu’un conducteur avait les facultés affaiblies par les drogues, ce type d’infractions a également un effet très dissuasif. C’est ce qu’on a observé quand les infractions liées à la limite légale d’alcool dans le sang ont été mises en œuvre, et M. Beirness a affirmé qu’il n’y a aucune raison de croire que cet effet dissuasif généralisé ne sera pas observé dans le cas des infractions proposées.

Les limites légales proposées ne sont pas incluses dans le texte du projet de loi. C’est parce qu’elles seront fixées par règlement. L’emploi d’un règlement permettra d’ajuster plus rapidement les limites légales pour répondre aux progrès scientifiques ou pour y ajouter de nouvelles drogues.

Le gouvernement a fait savoir qu’il prévoit établir des limites prescrites pour un certain nombre de drogues qui affaiblissent les capacités, notamment le cannabis, la cocaïne, la méthamphétamine, le LSD et le 4-hydroxybutanoate, qui est une drogue utilisée dans les boîtes de nuit comme drogue du viol. Les limites proposées ont été publiées le 14 octobre 2017 dans la partie I de la Gazette du Canada aux fins de consultation publique; je recommande aux sénateurs d’en prendre connaissance.

En ce qui a trait au THC, on propose la mise en œuvre de trois limites légales distinctes. Il y en aurait une pour l’infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, dans le cas où le conducteur aurait entre 2 et 5 nanogrammes de THC par millilitre de sang. Cette infraction serait passible d’une amende maximale de 1 000 $ et d’une interdiction discrétionnaire de conduire pendant au plus un an.

La deuxième constituerait une infraction mixte, une infraction criminelle plus grave qui interviendrait lorsqu’un conducteur présente un taux d’au moins 5 nanogrammes de THC par millilitre de sang.

Il y aurait également une troisième infraction mixte, qui s’appliquerait aux conducteurs qui présentent un taux de plus de 2,5 nanogrammes de THC par millilitre de sang combiné à un taux de 50 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang. Cette infraction vise à répondre aux dangers propres à la consommation combinée d’alcool et de drogue.

Les deuxième et troisième infractions seraient passibles d’une peine obligatoire de 1 000 $ pour une première infraction et de peines de plus en plus importantes pour les récidives. Les peines maximales correspondraient à celles de la conduite avec facultés affaiblies.

Les limites proposées quant au taux de drogue sont fondées sur différents éléments. Un des principaux facteurs a été le rapport sur les limites légales de drogue produit par le Comité des drogues au volant de la Société canadienne des sciences judiciaires. Une limite légale établit le seuil à partir duquel une infraction donnée est commise. Le comité fournit depuis de nombreuses années une orientation d’ordre scientifique au gouvernement sur des questions liées à la conduite avec facultés affaiblies par la drogue et il a travaillé sans relâche au cours des dernières années, à titre bénévole, afin de formuler des avis scientifiques.

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Les niveaux proposés ont été établis en tenant compte de l’approche adoptée ailleurs dans le monde, notamment celles du Colorado et de Washington, qui ont fixé à 5 nanogrammes la limite maximale de THC — le composant actif du cannabis qui affaiblit les facultés — dans le sang des conducteurs. D’autres pays, comme le Royaume-Uni, où le cannabis est illégal, ont fixé la limite maximale à 2 nanogrammes.

Lorsque la ministre de la Justice a comparu devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, elle a souligné que l’établissement de limites permises qui s’appliquent aux drogues affaiblissant les facultés est beaucoup plus complexe que l’établissement de limites pour l’alcool, puisque les données scientifiques au sujet des facultés affaiblies par la drogue ne sont pas aussi exhaustives. Elle a précisé qu’elle continuerait de demander des données scientifiques et de les évaluer au fur et à mesure qu’elles évolueront.

La ministre de la Justice a aussi affirmé à plusieurs occasions que, compte tenu de l’incertitude qui plane sur ce qui constitue un taux sécuritaire de THC, l’approche la plus prudente à l’heure actuelle consiste à procéder comme s’il n’y avait pas de niveau sécuritaire. L’objectif ultime, c’est de faire en sorte que les gens ne prennent pas le volant après avoir consommé du cannabis ou toute autre drogue affaiblissant les facultés.

Dans l’intérêt de la sécurité publique, j’appuie cette approche prudente.

Certains de mes honorables collègues se demandent peut-être dans quelle mesure l’approche proposée est semblable à l’approche prévue dans le projet de loi d’intérêt public du Sénat, le projet de loi S-230, Loi modifiant le Code criminel en ce qui concerne la conduite avec les capacités affaiblies par les drogues, qui a été présenté par notre collègue, le sénateur Carignan. Comme vous le savez, ce projet de loi visait également à modifier le Code criminel afin de tenir compte de la conduite avec facultés affaiblies par la drogue, et le Sénat l'a adopté le 15 décembre 2016.

Le projet de loi S-230 avait un objectif semblable à celui du projet de loi C-46, dans la mesure où il visait à fournir à la police plus d’outils pour mieux reconnaître les conducteurs ayant les facultés affaiblies par la drogue. Il proposait d’autoriser l’utilisation d’appareils de détection et de donner le pouvoir d’ordonner le prélèvement de substances corporelles à des fins d’analyse.

Toutefois, il y a une différence importante entre ces projets de loi qui m’amène à conclure que le projet de loi C-46 propose une approche bien plus complète. Le projet de loi C-46 propose de nouvelles infractions pour ceux qui dépassent une limite fixée pour les drogues et il propose une réponse complète à la question de la conduite avec facultés affaiblies par la drogue, tout en tenant compte des efforts louables que représente le projet de loi d’intérêt public du Sénat.

Ces deux éléments du projet de loi C-46 — les tests de dépistage des drogues au bord de la route et les nouvelles infractions liées à la conduite — sont les principaux éléments visant à contrer la conduite avec facultés affaiblies par la drogue, mais il y a d’autres changements pour remédier aux lacunes du cadre actuel pour la conduite avec facultés affaiblies par la drogue. Grâce à ces changements, il serait plus facile d’obtenir un échantillon de sang d’un automobiliste susceptible d’avoir les facultés affaiblies; il serait plus facile pour un expert formé en reconnaissance des drogues de témoigner dans un procès pour conduite avec facultés affaiblies par les drogues, puisqu’on n’exigerait pas de démontrer sa qualité d’expert; et, enfin, on créerait un lien entre les résultats des échantillons d’une substance corporelle prélevés par l’expert en reconnaissance des drogues et l’affaiblissement des capacités observé lors du contrôle routier. Ces éléments entreraient en vigueur lors de la sanction royale pour que les dispositions sur la conduite avec facultés affaiblies par la drogue soient en vigueur bien avant la légalisation du cannabis.

J’aimerais consacrer le temps de parole qu’il me reste aux modifications proposées dans le projet de loi C-46 pour la conduite avec facultés affaiblies par l’alcool.

Le projet de loi C-46 propose d’abroger toutes les dispositions du Code criminel sur les transports, y compris celles sur la conduite avec facultés affaiblies. Il propose de les remplacer par une nouvelle partie du Code criminel qui est claire, simplifiée et plus moderne. Ces éléments contiennent des changements relatifs aux enquêtes, aux poursuites et aux peines dans les cas de conduite avec facultés affaiblies et ils devraient se traduire par un régime plus cohérent et efficient pour la conduite avec facultés affaiblies.

Un des principaux éléments qui devraient faciliter les enquêtes sur les cas de conduite avec facultés affaiblies est le dépistage obligatoire d’alcool, aussi appelé contrôle aléatoire de l’alcoolémie. Cet élément a beaucoup attiré l’attention et a suscité beaucoup de discussions, et j’aimerais en parler un peu plus en détail.

Le dépistage obligatoire de l’alcool est un outil largement utilisé dans le monde afin de repérer les conducteurs aux capacités affaiblies. Cela se trouve dans la loi depuis longtemps en Australie, en Nouvelle-Zélande et dans de nombreux autres États européens tels que la Suisse, la Finlande, le Danemark et la République tchèque, et depuis peu en Irlande et en Écosse. En fait, dans son témoignage devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, le professeur Robert Solomon, de l’Université Western Ontario, a indiqué que 121 pays ont mis en place une forme ou une autre de dépistage obligatoire.

Le dépistage obligatoire de l’alcool autoriserait un agent de police à ordonner à tout conducteur de fournir un échantillon d’haleine après l’avoir arrêté légalement, et ce, sans qu’il ait des motifs raisonnables de soupçonner que le conducteur a de l’alcool dans l’organisme.

Il existe suffisamment de données probantes qui démontrent que le dépistage obligatoire de l’alcool est un outil efficace pour sauver des vies. Pour reprendre de nouveau les propos du professeur Solomon, une étude de 2004 a conclu que le programme de dépistage obligatoire de la Nouvelle-Zélande a entraîné une diminution de 54 p. 100 des accidents graves et mortels la nuit.

Un autre témoin, M. Barry Watson, de l’Australie, a également dit aux membres du comité permanent que la mise en place des alcootests aléatoires a été associée à une diminution additionnelle de 18 p. 100 des décès, en plus des résultats obtenus avec le programme des contrôles de la sobriété.

Le dépistage obligatoire de l’alcool a fait ses preuves pour sauver des vies. Je félicite le gouvernement de l’avoir inclus dans ce projet de loi.

Depuis la présentation du projet de loi C­46, des préoccupations ont été soulevées selon lesquelles le dépistage obligatoire de l’alcool entraînera une hausse du profilage racial, c’est-à-dire que les agents de police utiliseront cette nouvelle disposition pour cibler injustement les membres de minorités visibles. Je tiens à dire que je condamne catégoriquement le profilage racial. Cependant, je suis convaincue que le dépistage obligatoire de l’alcool n’y contribuerait pas.

Comme je l’ai dit, le projet de loi C-46 prévoit clairement qu’on ne peut demander à quelqu’un de subir un alcotest que dans le cadre d’un contrôle routier légal. Il est bien établi au Canada que les lois et la common law accordent déjà aux policiers le pouvoir de faire passer à tout moment un contrôle routier à un conducteur afin de vérifier s’il respecte le code de la route. Les contrôles routiers illégitimes — qui, par exemple, ne se fonderaient que sur la couleur de la peau du conducteur — contreviendraient à la loi.

Le dépistage obligatoire ne modifierait en rien la responsabilité qui incombe aux policiers et aux autres agents d’application de la loi de veiller à ce que les pouvoirs des policiers s’exercent de façon juste et équitable, conformément aux droits et libertés prévus dans la Charte.

Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a donc amendé le préambule du projet de loi de façon à préciser que tous les pouvoirs d’enquête, y compris le dépistage obligatoire, doivent s’exercer conformément à la Charte. Même si cette idée est implicite dans toutes les lois canadiennes, il était important de l’expliciter, compte tenu des craintes exprimées au sujet des répercussions possibles du dépistage obligatoire.

J’ajouterais que les renseignements recueillis au moyen d’un échantillon d’haleine, à l’instar de ceux qui se trouvent sur le permis de conduire, ne servent qu’à vérifier si le conducteur respecte l’une des conditions imposées dans le contexte hautement réglementé de la conduite automobile, c’est-à-dire qu’il ne faut pas avoir bu quand on conduit. Le prélèvement d’un échantillon d’haleine ne révèle aucune information personnelle ou confidentielle et se fait rapidement, sans avoir recours à un procédé intrusif.

À mon avis, le dépistage obligatoire est nécessaire, car les recherches nous apprennent que la courte durée des interactions avec les conducteurs interceptés sur le bord de la route ne donne pas le temps aux policiers d’avoir les soupçons que requiert la loi pour exiger un test d’alcoolémie.

Selon certaines études, jusqu’à 50 p. 100 des cas d’alcoolémie supérieure à la limite légale chez le conducteur ne sont pas détectés lors des contrôles routiers. Il est clair que l’exigence actuelle selon laquelle le policier doit soupçonner la présence d’alcool dans l’organisme pour effectuer un alcootest pose un danger pour la sécurité publique, puisque beaucoup de conducteurs aux facultés affaiblies échappent à la détection lors des contrôles routiers.

Le professeur Barry Watson et le commissaire adjoint de Road Policing Command, Doug Fryer, de Victoria, en Australie, ont tous deux fourni un point de vue intéressant pour déterminer si le dépistage obligatoire de l’alcool mènerait à du profilage racial. Les deux témoins ont dit que le dépistage obligatoire est en fait un moyen de surmonter le problème du profilage, puisque toutes les personnes contrôlées par la police peuvent s’attendre à subir un alcootest. Le pouvoir discrétionnaire du policier, qui l’amène à demander un échantillon d’haleine à un conducteur et à ne pas en demander à un autre, pour des motifs potentiellement inappropriés, est éliminé.

Les membres du public peuvent donc s’attendre à être tenus de fournir un échantillon d’haleine, et ce, à tous les contrôles légaux effectués par la police. Comme cette façon de procéder sauve des vies ailleurs, je pense que nous avons le devoir, en tant que législateurs, d’appuyer cette proposition.

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Un autre élément central du projet de loi touche la preuve de l’alcoolémie. Comme bien des gens le savent, il est interdit par la loi de conduire avec une alcoolémie supérieure à 80 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang. Dans la majorité des cas, la preuve de cette infraction est faite en prélevant un échantillon de l’haleine du conducteur qui est ensuite analysé pour déterminer la concentration d’alcool dans le sang. L’analyse est effectuée au moyen d’un instrument scientifique qu’on appelle un « alcootest approuvé » dans le Code criminel. En anglais, on parle souvent de cet instrument en utilisant le mot Breathalyzer, qui est la marque de commerce du premier instrument approuvé, et ce, en 1969.

Aujourd’hui, les conducteurs accusés de conduite avec facultés affaiblies contestent couramment l’alcoolémie établie et remettant en question la fiabilité de l’alcootest comme tel. Toutefois, ces instruments font l’objet d’une évaluation et d’essais rigoureux réalisés par le Comité des analyses d’alcool de la Société canadienne des sciences judiciaires, l’organisme scientifique qui conseille le ministre sur les questions liées à la conduite avec facultés affaiblies par l’alcool. Dans tous les cas, ce sont des instruments qui ont été recommandés au procureur général du Canada aux fins d’utilisation par les corps policiers.

Je suis convaincue que, lorsque ces instruments sont utilisés par un technicien qualifié selon les consignes du Comité des analyses d’alcool, ils produisent une mesure fiable et valable de l’alcoolémie d’un conducteur. En fait, ces instruments sont conçus expressément pour cesser de fonctionner dès qu’il se présente toute erreur qui pourrait avoir un effet sur la validité ou l’exactitude du résultat.

Les membres du Comité permanent de la justice et des droits de la personne ont entendu le président du comité des analyses d’alcool, Daryl Mayers, assurer avec beaucoup de conviction que les appareils qui servent à mesurer l’alcoolémie au Canada sont à la fois exacts et fiables lorsqu’ils sont utilisés conformément à la procédure établie.

Ainsi, une fois le projet de loi C-46 adopté, il sera plus facile de prouver l’alcoolémie d’un conducteur. En effet, la mesure de l’alcoolémie sera désormais considérée comme une preuve concluante si la Couronne peut prouver que l’appareil a été utilisé correctement, conformément à une procédure établie. Ainsi, deux échantillons devront être prélevés à 15 minutes d’intervalle, et il devra y avoir une différence de moins de 20 milligrammes par 100 millilitres entre les deux résultats. On ne pourra plus remettre en question la validité ou la fiabilité des appareils. La modification proposée reflète plus fidèlement les processus scientifiques sur lesquels reposent les éthylomètres. Le résultat est que les procès se dérouleront plus rondement, car l’accusé ne pourra plus faire perdre un temps précieux aux tribunaux avec des théories sans fondement scientifique.

Une autre proposition importante du projet de loi C-46 concerne la divulgation de la preuve par la Couronne dans les affaires de conduite avec facultés affaiblies. La disposition précise ce que le procureur est tenu de dévoiler, selon les recommandations scientifiques du comité des analyses d’alcool concernant les conditions nécessaires pour assurer l’exactitude des résultats d’une analyse d’haleine. Voilà qui permettra de réduire le temps passé à débattre d’éléments de preuve non pertinents et libérera la Couronne et la police du fardeau de la preuve, qui consiste souvent à produire de grandes quantités d’informations non pertinentes ou difficiles à obtenir.

Le projet de loi C-46 vise également à éliminer la défense du dernier verre et à limiter la défense du verre d’après. La défense du dernier verre consiste à prendre un dernier verre et à sauter aussitôt dans sa voiture. C’est la défense que le conducteur invoque lorsqu’il dit avoir consommé de l’alcool juste avant de prendre le volant ou pendant qu’il était au volant; il prétend alors que son taux d’alcoolémie n’était pas au-dessus de la limite permise au moment où il était sur la route et que ce n’est que plus tard, au poste de police, une fois l’alcool absorbé par son organisme, que la limite a été dépassée.

La défense du dernier verre récompense les personnes qui boivent une grande quantité d’alcool peu de temps avant de prendre le volant, et perpétue le mythe selon lequel il est sécuritaire de conduire lorsque les taux d’alcoolémie sont légèrement sous la limite permise.

La défense du verre d’après est soulevée lorsqu’un automobiliste consomme de l’alcool après s’être fait arrêter par un policier ou après avoir été impliqué dans un accident, mais avant d’avoir fourni un échantillon d’haleine. Les conducteurs affirment souvent qu’ils avaient besoin de boire un verre pour se calmer. Cette défense mine l’intégrité du système judiciaire, puisqu’elle encourage et récompense un comportement qui n’est adopté que pour contrecarrer le processus du test d’haleine.

Ainsi, le projet de loi C-46 propose d’éliminer complètement la défense du dernier verre et de limiter la défense du verre d’après à des circonstances très précises où la consommation d’alcool après avoir conduit n’est pas utilisée simplement pour nuire aux processus du test d’haleine. Le projet de loi propose alors de modifier le délai dans lequel l’infraction liée à une alcoolémie supérieure à 80 milligrammes par 100 millilitres de sang peut être commise. Donc, au lieu de commettre une infraction pour avoir un taux d’alcoolémie supérieur à la limite permise au moment de la conduite, le projet de loi propose que l’infraction soit commise si un conducteur a un taux d’alcoolémie supérieure à 80 milligrammes par 100 millilitres de sang dans les deux heures suivant le moment où il a cessé de conduire.

Certains témoins se préoccupent de la façon dont ce nouveau barème fonctionnera. Ils ont notamment soulevé des préoccupations au sujet d’une situation où, par exemple, un conducteur arrive à la maison complètement à jeun après le travail, en toute sécurité, et qu’il consomme par la suite de l’alcool. Les policiers seraient-ils en mesure de se présenter chez lui quelques heures plus tard, lui demander un échantillon d’haleine, puis l’accuser de conduite avec facultés affaiblies? Le projet de loi propose une exception pour ce genre de situation où le verre d’après n’a pas été consommé dans des circonstances qui pourraient nuire à une enquête.

Après tout, si le conducteur en question n’avait aucune raison de croire qu’un échantillon de salive lui serait demandé et que son alcoolémie était inférieure à la limite permise au moment où il était au volant, pourquoi serait-il accusé de quoi que ce soit?

À en croire certains avocats de la défense, ce serait inutile d’éliminer ces motifs de défense, puisqu’ils ne sont presque jamais invoqués. Je me suis toutefois fait dire que, à la lumière des plus récents jugements concernant l’alcool au volant, ils sont au contraire invoqués de plus en plus souvent, ce que confirment d’ailleurs les procureurs. Il faut dire que les motifs de défense que peuvent invoquer les contrevenants sont de moins en moins nombreux, surtout depuis que l’arrêt R. c. St-Onge Lamoureux a fait tomber la défense dite « des deux bières ».

En fait, du point de vue des politiques publiques, ces motifs de défense encouragent les comportements risqués et dangereux et peuvent alourdir inutilement les procédures judiciaires, donc l’appareil de justice, et c’est ça qui est grave. À mes yeux, elles n’ont pas leur place dans notre régime de justice criminelle.

Le projet de loi C-46 modifierait en outre les dispositions du Code criminel sur les infractions relatives aux moyens de transport en harmonisant les sanctions prévues et en les rendant proportionnelles à la gravité des dommages causés. Pour ce faire, il assujettit la conduite avec facultés affaiblies et diverses autres infractions relatives aux moyens de transport à de nouvelles peines obligatoires minimales, il en resserre d’autres et il rehausse certaines peines maximales.

Le projet de loi ferait, par exemple, augmenter l’amende obligatoire qui est imposée aux conducteurs ayant une concentration élevée d’alcool dans le sang et qui en sont à leur première infraction ou à ceux qui refusent de se conformer à une demande valable. Ces amendes vont de 1 000 à 2 000 $ selon l’alcoolémie de la personne fautive. Les chauffards qui en sont à leur première infraction et qui refusent de fournir un échantillon d’haleine recevraient une amende de 2 000 $ afin qu’ils ne soient pas tentés de refuser volontairement d’obtempérer.

Les peines d’emprisonnement obligatoires infligées aux récidivistes demeureraient inchangées : 30 jours pour une deuxième infraction et 120 jours pour les infractions subséquentes.

Les peines maximales pour conduite avec facultés affaiblies seraient relevées lorsqu’il n’y a pas de blessure ni de décès. Ces peines passeraient à 2 ans moins un jour d’emprisonnement sur déclaration sommaire de culpabilité, comparativement aux 18 mois actuels, et à 10 ans d’emprisonnement sur mise en accusation, comparativement aux 5 ans actuels.

Le rehaussement de la peine maximale sur mise en accusation est particulièrement important, car il s’agit de l’une des conditions pour que le tribunal détermine qu’une personne est un délinquant à contrôler ou un délinquant dangereux. À l’heure actuelle, la Couronne ne peut pas demander une telle décision, et ce, même si la personne visée a été condamnée à répétition pour conduite avec facultés affaiblies. Il ne devrait pas être nécessaire d’attendre qu’un individu tue ou blesse quelqu’un avant de l’assujettir à une ordonnance de surveillance de longue durée.

Le projet de loi propose également d’autoriser les deux types de procédure dans le cas des infractions causant des lésions corporelles afin d’accorder un plus grand pouvoir discrétionnaire aux procureurs dans les affaires les moins graves. À l’heure actuelle, la conduite avec facultés affaiblies causant des lésions corporelles est une infraction punissable sur mise en accusation, qui fait l’objet de procédures plus complexes et qui nécessite plus de temps et de ressources judiciaires. Ces procédures sont souvent perçues comme étant trop compliquées dans le cas de blessures mineures, comme une fracture au poignet.

En rendant cette infraction mixte, on permettra à la Couronne de procéder par déclaration sommaire de culpabilité dans les cas où elle juge que les blessures sont moins graves. Cette mesure permettra aussi de réduire les délais judiciaires, car les déclarations sommaires de culpabilité sont plus simples et elles prennent moins de temps.

La peine maximale pour la conduite dangereuse causant un décès serait relevée à l’emprisonnement à perpétuité, comparativement aux 14 ans actuels. Cette peine est conforme à la peine maximale imposée pour d’autres infractions en matière de transport qui entraînent la mort.

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De nombreuses autres dispositions relatives à la détermination de la peine proposées dans le projet de loi C-46 devraient permettre de régler plus rapidement les affaires de conduite avec facultés affaiblies et, donc, de réduire le nombre d’affaires qui se rendent jusqu’au tribunal. Ces dispositions comprennent l’exemption limitée des peines minimales obligatoires et un accès plus rapide à un programme d’utilisation d’antidémarreurs éthylométriques, que j’expliquerai plus en détail.

Le projet de loi propose d’autoriser le juge à reporter, avec le consentement de la Couronne, la détermination de la peine dans les affaires de conduite avec facultés affaiblies où l’infraction n’a pas causé la mort ou de lésions corporelles, le temps que le contrevenant suive un programme de désintoxication approuvé par la province où il réside.

Si la détermination de la peine est reportée et que le contrevenant termine le programme de désintoxication avec succès, le tribunal n’est pas tenu d’imposer la peine minimale obligatoire.

L’autre élément qui permettra de régler plus rapidement les affaires de conduite avec facultés affaiblies est lié aux antidémarreurs éthylométriques. Ces dispositifs empêchent un véhicule de démarrer à moins que le conducteur fournisse un échantillon d’haleine sans alcool. Il a été démontré que ces dispositifs réduisent le taux de récidive et encouragent les gens à dissocier la consommation d’alcool de la conduite.

Aux termes du cadre législatif actuel, une personne reconnue coupable de conduite avec facultés affaiblies doit attendre un délai prescrit avant que la province puisse l’inscrire au programme d’utilisation d’antidémarreurs éthylométriques.

Le projet de loi réduirait le délai pendant lequel un contrevenant doit attendre avant de pouvoir s’inscrire à un programme d’utilisation d’antidémarreurs éthylométriques approuvé par la province. Il n’y aurait aucun délai pour une première infraction, un délai de trois mois pour une deuxième infraction et un délai de six mois pour toute infraction subséquente.

Dans l’ensemble, les modifications proposées représentent les modifications les plus importantes aux lois relatives à la conduite avec facultés affaiblies depuis la création de l’infraction liée à une alcoolémie supérieure à 80 milligrammes par 100 millilitres de sang il y a près de 50 ans et elles permettraient au Canada de devenir un chef de file mondial dans la lutte contre la conduite avec facultés affaiblies par l’alcool ou la drogue.

Le projet de loi C-46 pourrait envoyer le message clair à tous les Canadiens qu’il est inacceptable de consommer de l’alcool ou des drogues et de conduire et qu’il y a de graves conséquences si on le fait.

Le dernier élément que je tiens à aborder, c’est la préoccupation selon laquelle certaines des propositions du projet de loi C-46 contribueraient aux délais dans le système de justice pénale.

Actuellement, les dispositions relatives à la conduite avec capacités affaiblies sont les plus contestées du Code criminel. Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a étudié récemment cette question et il s’est dit préoccupé par le temps que consacrent les tribunaux à ces affaires.

Dans son rapport final du 14 juin 2017, intitulé Justice différée, justice refusée, il a indiqué que les causes liées à la conduite avec capacités affaiblies représentaient 11 p. 100 de toutes les affaires pénales en 2013-2014, la plus forte proportion parmi tous les types d’infractions. Le comité a déclaré que ces causes peuvent poser problème aux policiers lorsqu’il s’agit de recueillir et de présenter des preuves et, par conséquent, elles ont tendance à prendre plus de temps à être traitées par les tribunaux. J’estime que c’est pour cette raison que le projet de loi C-46 est particulièrement crucial.

Le dépistage obligatoire s’est révélé très efficace dans d’autres pays afin de prévenir les cas de conduite avec capacités affaiblies, ce qui entraînerait, idéalement, une diminution des cas portés devant les tribunaux.

De plus, le projet de loi s’attaque à certaines des difficultés auxquelles les policiers doivent faire face, qui ralentissent le travail des tribunaux, lorsqu’ils recueillent et présentent des preuves. On espère que certains éléments du projet de loi limiteront les contestations et permettront de tenir des procès plus courts.

Bon nombre des propositions dont j’ai déjà discuté visent à réduire les délais et à simplifier les procès. Par exemple, le dépistage obligatoire, la simplification des règles de droit relatives à la preuve de l’alcoolémie, l’élimination ou la limitation de certains moyens de défense et la clarification de la communication des renseignements sont toutes des propositions qui amélioreraient l’efficacité des procès et qui contribueraient à réduire les délais.

En outre, l’exemption de l’application du régime des peines minimales obligatoires et l’inscription, tôt dans le processus, au programme d’utilisation d’antidémarreurs éthylométriques favoriseraient tous les deux un règlement plus rapide des accusations. On prévoit donc que le projet de loi C-46 ne retardera pas davantage le système judiciaire. Il pourrait même contribuer à accélérer le traitement des dossiers dans un domaine déjà lourd pour l’appareil judiciaire. De plus, la ministre a déposé un énoncé concernant la Charte et une mise en contexte législative qui visent à préciser l’objet de plusieurs changements proposés.

Honorables sénateurs, il est dans l’intérêt de tous les Canadiens que l’étude de la mesure législative soit efficace et que le projet de loi franchisse rapidement les étapes du processus législatif afin que ces ajouts cruciaux au régime qui s’applique en cas de conduite avec facultés affaiblies puissent être en vigueur avant que le cannabis soit légalisé. L’adoption du projet de loi permettra aussi aux provinces et aux territoires d’élaborer et d’adopter les modifications qu’ils voudront apporter à leur code de la route. Les façons de faire des provinces et le régime pénal fédéral en matière de conduite avec facultés affaiblies pourront ainsi continuer de fonctionner harmonieusement dans le cadre d’une bonne collaboration.

J’attire aussi votre attention sur l’amendement proposé pendant l’étude du Comité de la justice et des droits de la personne, qui instaure un examen triennal et prévoit une disposition relative à la production de rapports. Le ministre de la Justice doit ainsi procéder à un examen approfondi de la mise en œuvre et de l’application des dispositions édictées par le projet de loi et rédiger un rapport dans les trois ans suivant la date d’entrée en vigueur de la loi. Ces mesures nous permettront de suivre et d’évaluer les modifications proposées dans le projet de loi.

Comme vous le constatez sans doute, le projet de loi C-46 est très technique. Il faut écouter ce que les spécialistes et les experts ont à dire afin de mieux en comprendre les subtilités juridiques et scientifiques. J’estime que, le temps venu, le projet de loi devra faire l’objet d’une étude approfondie au comité.

Pour terminer, nous devons en faire plus pour décourager les conducteurs de prendre le volant lorsqu’ils ont consommé de l’alcool ou de la drogue. De plus, nous devons bien outiller les responsables de l’application de la loi afin qu’ils puissent repérer les conducteurs coupables. Le projet de loi C­46 propose certaines mesures importantes pour s’en assurer.

Je vous remercie, sénateurs.

[Français]

L’honorable Claude Carignan : La sénatrice accepterait-elle de répondre à quelques questions?

[Traduction]

La sénatrice Boniface : Oui, bien sûr.

[Français]

Le sénateur Carignan : Dans un premier temps, le projet de loi vise la mise en application de contrôles à la suite de la volonté de légaliser la marijuana. Vous avez traité un peu du dépistage aléatoire par un agent de la paix. Le paragraphe 2 de l’article 320.27 se lit comme suit :

L’agent de la paix qui a en sa possession un appareil de détection approuvé peut, dans l’exercice légitime de ses pouvoirs en vertu d’une loi fédérale, d’une loi provinciale ou de la common law, ordonner à la personne qui conduit un véhicule à moteur de fournir immédiatement les échantillons d’haleine [...]

Donc, le gouvernement met en place un système de contrôle aléatoire de l’alcool, mais non pas un système de contrôle aléatoire pour le dépistage des drogues. Le projet de loi est donc plus sévère à l’égard de la conduite avec facultés affaiblies par l’alcool que par la drogue. Pouvez-vous nous expliquer ce fait?

[Traduction]

La sénatrice Boniface : Je crois que nous disposons de meilleures connaissances scientifiques à l’égard de l’alcool et, comme le sénateur le sait bien, d’une longue expérience de gestion de cet aspect.

En ce qui a trait aux drogues, nous ne disposons pas de connaissances scientifiques aussi approfondies. Je crois comprendre que le Comité des drogues au volant a recommandé que nous procédions de cette manière pour l’instant, en raison de ces connaissances limitées.

[Français]

Le sénateur Carignan : À l’article 1 du projet de loi, qui crée l’infraction liée à la conduite avec facultés affaiblies, on peut lire ce qui suit, et je cite :

[...] commet une infraction quiconque a, dans les deux heures suivant le moment où il a cessé de conduire un véhicule [...]

Donc, l’infraction en question se produit dans les deux heures. Pourtant, dans le pouvoir de vérification prévu à la disposition visant à modifier le paragraphe 254(2) du Code criminel, il est indiqué ce qui suit :

L’agent de la paix qui a des motifs raisonnables de soupçonner qu’une personne a dans son organisme de l’alcool ou de la drogue et que, dans les trois heures précédentes, elle a conduit un véhicule [...]

On crée donc une infraction dans les deux heures, mais on donne le pouvoir de prendre un échantillon dans les trois heures. Pouvez-vous nous expliquer cette contradiction?

[Traduction]

La sénatrice Boniface : Sénateur, je vous remercie de la question. Je me posais justement cette question, et j’espère que nous nous y pencherons en comité. Pour ce qui est de l’aspect des drogues en particulier, si je comprends bien, on parle du taux d’absorption de la drogue dans l’organisme. Les trois heures donnent plus de temps pour s’assurer que ce soit fait. C’est ce que j’ai cru comprendre, mais il existe peut-être une meilleure réponse à cette question, que nous pourrons explorer en comité.

(1710)

[Français]

Le sénateur Carignan : Je vous remercie. Nous pourrons évaluer cet aspect en comité.

Une autre question me vient en tête. La limite permise pour le taux d’alcoolémie est établie dans un article du Code criminel, mais, en ce qui a trait aux drogues, on semble donner au gouvernement le pouvoir d’adopter un règlement pour modifier la limite permise. C’est assez exceptionnel. On donne au ministre le pouvoir de déterminer quel sera l’acte criminel. Le Parlement délègue au ministre son pouvoir de déterminer ce qu’est un acte criminel. Est-ce bien là votre compréhension?

[Traduction]

La sénatrice Boniface : Je vous remercie de votre question, honorable sénateur. C’est ma compréhension que ce que vous avez dit est juste, en partie. Pour l’alcool, cela fait partie du Code criminel; pour les drogues, cela fera partie des règlements. Le but des règlements est de permettre d’ajouter d’autres informations au fur et à mesure que les recherches scientifiques permettent de détecter d’autres drogues. Si je comprends bien, le comité se renseigne sur d’autres drogues, et une fois que la recherche scientifique sera suffisamment évoluée, on pourra ajouter d’autres drogues aux règlements. En termes de quantité, les règlements prévoiront une certaine flexibilité.

L’honorable Paul E. McIntyre : L’honorable sénatrice accepterait-elle de répondre à une autre question?

La sénatrice Boniface : Très volontiers.

Le sénateur McIntyre : Tout d’abord, merci pour votre exposé. Je constate que le projet de loi contient trois parties, et j’attire votre attention sur la partie 2, qui porte sur les infractions relatives aux moyens de transport.

La partie 2 du projet de loi C-46 apporte un certain nombre de modifications à d’autres lois, notamment la Loi sur le casier judiciaire. Avant le dépôt du projet de loi C-46, d’autres projets de loi, comme le projet de loi C-73 et le projet de loi C-226, visaient également à apporter des modifications à la Loi sur le casier judiciaire. Ces autres projets de loi auraient abrogé l’exclusion qui permet à une personne de garder sa réhabilitation — qu’on appelle aujourd’hui une suspension de casier — dans le cas où elle est subséquemment reconnue coupable d’une infraction de conduite avec facultés affaiblies. Comme nous le savons, ces projets de loi sont morts au Feuilleton.

Dans une affaire d’infraction pour conduite avec facultés affaiblies, la Couronne, comme vous le savez, peut procéder par voie sommaire ou par voie de mise en accusation. Dans le dernier cas, les conséquences sont beaucoup plus graves.

Lorsque la Couronne procède par voie sommaire dans un cas de conduite avec facultés affaiblies, c’est la seule infraction mixte définie dans le code qui est exemptée d’une révocation automatique. L’article 42 du projet de loi C-46 préserve cette exemption et ne semble pas modifier la loi à cet égard. Toutefois, les projets de loi C-73 et C-226 étaient différents, puisqu’ils contenaient des modifications importantes à la Loi sur le casier judiciaire qui auraient eu pour effet d’abroger l’exclusion actuelle, qui se trouve à l’article 7.

Pourrais-je savoir ce que vous en pensez?

La sénatrice Boniface : Il faudrait que j’examine la question, honorable sénateur, et que je vous réponde plus tard. Compte tenu du reste de la position, il me semble que cette question devrait idéalement être retenue.

Vous avez soulevé une question que je n’ai pas étudiée, mais je vais le faire et vous revenir là-dessus.

Le sénateur McIntyre : Je remarque que le comité de la Chambre a apporté 16 amendements et j’ai été agréablement surprise de voir qu’il avait ajouté au projet de loi les peines minimales obligatoires actuelles pour la conduite avec facultés affaiblies causant la mort ou des lésions corporelles. En étudiant ce projet de loi, pourriez-vous nous faire savoir s’il ne faudrait pas modifier la Loi sur le casier judiciaire pour abroger l’article sur l’exclusion actuellement en vigueur?

La sénatrice Boniface : Comme je l’ai indiqué, je me ferai un plaisir d’étudier la question et de vous revenir là-dessus lorsque j’aurai toute l’information, si cela convient.

Son Honneur le Président : Sénatrice Boniface, d’autres sénateurs souhaitent poser des questions, mais votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous cinq minutes de plus?

La sénatrice Boniface : Oui, bien sûr.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

L’honorable Serge Joyal : La sénatrice accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Boniface : Certainement.

Le sénateur Joyal : Je vous ai écoutée très attentivement et je vous félicite d’avoir si bien présenté le projet de loi. Il y a toutefois un point qui me préoccupe. Comme vous le savez, une disposition du Code criminel exige qu’un critère soit satisfait pour qu’un agent de police demande à une personne de donner un échantillon d’haleine. En effet, l’agent doit avoir un doute raisonnable que la personne est en état d’ébriété. Or, ce critère n’existe plus dans le projet de loi.

Comment pouvons-nous avoir l’assurance qu’il n’y aura pas de profilage racial, notamment envers les Autochtones? Comment préviendrons-nous le profilage racial? Est-ce que des représentants des peuples autochtones ont été consultés sur la modification proposée dans le projet de loi?

La sénatrice Boniface : En réponse à la première question concernant le dépistage obligatoire, je tiens à dire clairement que le professeur Solomon s’est prononcé sur sa constitutionnalité. Le professeur Peter Hogg a lui aussi écrit un article sur la question, et ses conclusions vont dans le même sens que celles du professeur Solomon.

Selon moi, lorsque l’on procède au dépistage obligatoire d’alcool, le système s’applique à tous indistinctement. Normalement, les contrôles routiers sont effectués par plusieurs agents qui vont d’un véhicule à un autre. C’est très simple à mes yeux.

Ma province, l’Ontario, a annoncé récemment l’adoption d’une politique-cadre dictant aux agents la façon de procéder. Je suis d’avis que cela contribuera à éviter de telles choses. En fait, dans le cadre du code de conduite de la police et de son mandat, on permet aux agents de demander l’échantillon — sans explorer la question davantage ou même à ce point et sans mener une enquête. Cela rend les choses beaucoup plus équitables dans le cas des contrôles routiers.

J’ignore dans quelle mesure les Autochtones ont été consultés, mais je serai heureuse de vous en informer lorsque j’aurai obtenu cette information.

[Français]

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Ma question sera assez simple. Cet après-midi, j’ai donné une entrevue en ce qui a trait au projet de loi que vous alliez déposer ici, au Sénat. J’ai donc relu le projet de loi pour la deuxième ou troisième fois, et j’ai été étonné de constater qu’on légalisera la possession de marijuana pour les 18 ans et plus et qu’on décriminalisera la possession de moins de cinq grammes pour les jeunes âgés de 12 à 17 ans... Excusez-moi.

[Traduction]

Son Honneur le Président : Sénatrice Boniface, vouliez-vous répondre?

La sénatrice Boniface : Je n’ai pas participé à cette discussion. Je pense qu’il y a méprise concernant le projet de loi à l’étude.

L’honorable Pamela Wallin : J’aimerais avoir votre avis sur trois aspects en particulier, mais j’aimerais surtout m’assurer que le comité se penchera là-dessus.

Premièrement, je m’interroge sur l’efficacité du dépistage selon la période pendant laquelle la drogue demeure dans l’organisme. Il y a certainement eu dès le début des inquiétudes quant au risque que les dispositifs de dépistage, qui sont relativement nouveaux, détectent de la drogue qui se trouve dans l’organisme depuis 24 heures ou qui a été consommée pendant une période où la personne n’a pas pris le volant. À quel point êtes-vous convaincue par les données scientifiques?

Deuxièmement, il y a la question nébuleuse de la présomption de culpabilité qui semble être associée à ce processus, car on peut imposer une amende pour une infraction sans qu’il soit nécessaire de soupçonner l’infraction visée, et le contrôle est obligatoire. Il y a donc une présomption de culpabilité que je trouve fort troublante.

Troisièmement, il y a l’application de la loi. Comme je l’ai déjà souligné auparavant dans cette enceinte, je viens d’une région rurale du pays où il y a déjà à peine suffisamment de policiers pour s’occuper des infractions criminelles actuelles. Dans ma province, les services de police recrutent des agents de conservation pour les aider à appliquer la loi. Maintenant, on s’apprête à imposer des contrôles obligatoires. Puis, il y a un processus secondaire : les prises de sang dans les régions rurales. Je ne sais pas comment cela va fonctionner. Serons-nous réellement en mesure d’atteindre l’objectif visé? Voilà mes trois questions.

(1720)

La sénatrice Boniface : Je remercie l’honorable sénatrice de ses questions.

La première concerne le processus. Je pense que le Comité sur les drogues au volant s’est penché très attentivement sur cette question pour déterminer la bonne façon de procéder afin que personne ne se fasse accuser à tort.

Comme je l’ai dit, il a examiné ce que faisaient d’autres pays, comme le Royaume-Uni, où la marijuana est illégale. La limite permise là-bas est de 2 nanogrammes et, ailleurs, elle s’élève à 5 nanogrammes.

Je pense que nous avons mené des consultations très vastes pour tirer des leçons des pays qui ont une longueur d’avance sur nous et de ceux qui se sont attaqués au problème même s’ils n’ont pas légalisé le cannabis. Voilà ma réponse à la première question de la sénatrice.

Son Honneur le Président : Sénatrice Boniface, votre temps de parole est de nouveau écoulé. Voulez-vous réclamer du temps supplémentaire pour répondre à la dernière question?

La sénatrice Boniface : Uniquement pour répondre à la dernière question.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

La sénatrice Boniface : La deuxième question de la sénatrice porte sur la présomption de culpabilité. Cette présomption existe actuellement. S’il y a des motifs raisonnables de soupçonner la présence de drogue dans l’organisme du conducteur, ce dernier doit fournir immédiatement un échantillon. S’il refuse de le faire, des accusations peuvent être portées contre lui.

Le code de la route prévoit que la personne au volant ne doit pas dépasser la limite légale. Cette personne a l’obligation, si on l’arrête, de fournir un échantillon. Cela ne lui prendra que quelques secondes, puis elle pourra poursuivre sa route. Je pense que cette mesure sera vraiment fort utile.

Sur la troisième question, c’est-à-dire l’application de la loi, vous soulevez de bons arguments. Je pense que les solutions seront mises en œuvre aux échelons local et provincial. Comme vous devez vous en douter, je discute régulièrement avec mes anciens collègues afin de voir comment ils s’y prendront pour être en mesure d’appliquer la loi.

La conduite avec capacités affaiblies constitue un problème sérieux pour les Canadiens, et c’est là un enjeu important. Le problème est sérieux au Canada. Je le répète, les policiers qui sont sur les routes ont un vrai problème sur les bras lorsque, au moment où ils essaient de faire leur travail, des gens conduisent avec les capacités affaiblies.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

[Français]

La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés

La Loi sur le mariage civil

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Jaffer, appuyée par l’honorable sénatrice McPhedran, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-210, Loi modifiant la Loi modifiant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, la Loi sur le mariage civil, le Code criminel et d’autres lois en conséquence.

L’honorable Marie-Françoise Mégie : Honorables sénateurs, l’honorable sénatrice Omidvar me permet de prendre la parole, bien que le débat soit ajourné à son nom.

Je prends aujourd’hui la parole au sujet du projet de loi S-210. À titre de législateurs, lorsque nous donnons un titre abrégé à un texte législatif, nous devons porter une attention particulière à son impact et à ses conséquences possibles, tout en considérant l’objet de la loi.

Le projet de loi S-210 ne contient qu’un seul article. Il a pour but d’abroger le premier article de la Loi modifiant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, la Loi sur le mariage civil, le Code criminel et d’autres lois en conséquence. L’article concerné se rapporte au titre abrégé et se libelle ainsi : « Loi sur la tolérance zéro face aux pratiques culturelles barbares ».

Chers collègues, je vous demande de réfléchir attentivement à la question suivante : compte tenu de la mosaïque culturelle du Canada, quels liens nos concitoyens feront-ils lorsqu’ils prendront connaissance de cette juxtaposition de termes? Sans reprendre tous les arguments des sénatrices Jaffer et Ataullahjan à ce sujet, force nous est de constater que les mots « pratiques culturelles barbares », placés dans ce contexte, font directement allusion aux nouveaux arrivants et aux immigrants de longue date.

Au Canada, nous faisons quotidiennement la promotion de valeurs citoyennes telles que le « vivre-ensemble ». Par conséquent, nous convenons tous que les meurtres au nom de l’honneur, la mutilation des organes génitaux et les mariages forcés sont des crimes absolument ignobles. Ces actes hautement répréhensibles peuvent être perpétrés à l’encontre d’une personne issue de n’importe quelle origine ethnoculturelle. Malheureusement, la violence, la haine et la misogynie n’ont ni frontière ni barrière.

En tant que citoyens d’une terre d’accueil ouverte au multiculturalisme, nous ne pouvons continuer de faire cet amalgame tout à fait aberrant entre les mots « immigration », « protection des réfugiés » et « pratiques culturelles barbares ». Il est de notre responsabilité de faire en sorte que les victimes de ces actes odieux, que j’ai nommés précédemment, puissent dénoncer les pratiques qu’elles subissent sans craindre que leur culture ne soit jugée. Non seulement cela est contraire à l’objectif salutaire de la Loi modifiant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, la Loi sur le mariage civil, le Code criminel et d’autres lois en conséquence, mais cela contribue à diviser les Canadiens en séparant certaines communautés des autres.

Dans une optique de législation moderne, nous devons aligner le style de rédaction du titre abrégé sur le rôle qu’un texte de loi devra jouer dans notre société. Il est de première importance de traduire en forme et en esprit les orientations fédérales de manière à assurer la mise en œuvre pratique de chaque projet de loi. Une terminologie, une phraséologie et une expression logique cohérentes assurent la justesse des textes législatifs proposés à l’ensemble des Canadiens. Ces exigences de rédaction doivent être traitées selon les mesures envisagées, afin d’apporter une solution appropriée aux enjeux complexes que nous devons affronter.

Ainsi, à titre de législateurs, en communiquant adéquatement nos intentions, nous réitérerons avec force nos valeurs d’égalité, d’inclusion et de liberté. Pour ce faire, honorables sénateurs, appuyons le projet de loi S-210, qui vise simplement à abroger le titre abrégé du texte de loi que j’ai cité, sans toucher d’aucune façon à son essence.

Je vous remercie.

[Traduction]

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, êtes-vous d’accord pour que l’article demeure ajourné au nom de la sénatrice Omidvar?

Des voix : D’accord.

(Le débat est ajourné.)

Le Mois du patrimoine latino-américain

Troisième lecture—Ajournement du débat

L’honorable Tobias C. Enverga, Jr. propose que le projet de loi S-218, Loi instituant le Mois du patrimoine latino-américain, soit lu pour la troisième fois.

— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’étape de la troisième lecture de mon projet de loi sénatorial d’intérêt public, le projet de loi S-218, Loi instituant le Mois du patrimoine latino-américain, et j’exhorte les sénateurs à l’appuyer alors que nous en sommes à la dernière étape de son étude au Sénat.

Comme j’ai immigré au Canada, je fais partie des nombreux sénateurs qui ont eu la chance d’être accueillis dans notre pays pour contribuer à leur société d’accueil. Peu de pays dans le monde sont aussi ouverts que le Canada et acceptent autant d’immigrants qui choisissent de se construire une nouvelle vie sur une autre terre. La politique canadienne de multiculturalisme est une grande réussite qui consiste à accepter et valoriser les diverses langues et origines culturelles qui sont représentées au pays.

Comme mes collègues le savent, plusieurs mois et plusieurs journées ont déjà été désignés au Canada pour célébrer des patrimoines et des cultures au cours de l’année. En février, nous célébrons évidemment le Mois de l’histoire des Noirs. Proclamé en 1995 par la Chambre des communes et beaucoup plus tard, en 2008, par le Sénat, il est pour tous les Canadiens l’occasion de célébrer, de commémorer et de rappeler les réalisations des Canadiens de race noire.

(1730)

Au Canada, nous célébrons aussi en mai le Mois du patrimoine asiatique, maintenant que le Sénat a adopté une motion pour que le gouvernement le proclame en tant que tel. À cette occasion, les Canadiens d’origine autre qu’asiatique se familiarisent avec les divers patrimoines culturels du continent asiatique, souvent dans les domaines de la cuisine et du divertissement.

En plus de nous exposer à la culture et aux traditions d’autres pays, ces mois constituent un aspect très important de multiculturalisme. Ils sont l’occasion d’explorer sa propre culture et sa propre histoire, et de renforcer son sentiment d’identité. Ils peuvent en outre permettre à des immigrants de mieux comprendre leur propre patrimoine et de s’en enorgueillir. Voilà pourquoi notre pays est unique au monde : nous accueillons et nous célébrons la diversité.

Un Mois du patrimoine latino-américain poursuivra cet exercice d’édification de la nation. Il permettra aux Canadiens de toutes origines latino-américaines de se rassembler pour célébrer la culture et l’histoire qu’ils ont en commun et, surtout, il sera pour tous l’occasion de découvrir et de célébrer ce patrimoine dont se réclament de plus en plus de Canadiens.

Honorables sénateurs, je crois fermement que cette initiative devrait faire l’objet d’un projet de loi plutôt que d’une motion, comme cela a été le cas pour le Mois de l’histoire des Noirs et le Mois du patrimoine asiatique. Le Mois de l’histoire des Noirs a été célébré pour la première fois en 1996 par le gouvernement du Canada, à la suite d’une motion proposée par l’honorable Jean Augustine et adoptée à l’unanimité à la Chambre des communes en 1995. Ce n’est qu’en 2008 que le Sénat a entériné la même motion, présentée par notre ancien collègue, le sénateur Donald Oliver. Il s’est donc écoulé 13 ans avant que les trois composantes du Parlement ne conviennent de la mesure. Le Mois du patrimoine asiatique prend sa source dans la motion de la sénatrice Vivienne Poy, adoptée par le Sénat, puis proclamée séparément par le gouvernement en 2002.

En instituant le Mois du patrimoine latino-américain au moyen d’une loi, les trois parties constituantes du Parlement — la reine, le Sénat et la Chambre des communes — s’unissent pour appuyer cette initiative et honorer comme il convient les contributions des gens venus d’Amérique latine à notre économie, notre culture et notre société.

Les honorables sénateurs se rappelleront peut-être que, au cours de la dernière session, j’ai présenté le projet de loi S-228, Loi instituant le Mois du patrimoine hispanique, qui devait correspondre à la mesure adoptée par l’Assemblée législative de l’Ontario et à la déclaration de la Ville de Toronto. Le 5 mai 2015, l’Ontario a en effet adopté le projet de loi 28, Loi proclamant le mois d’octobre Mois du patrimoine hispanique. La Ville de Toronto avait pour sa part adopté une déclaration semblable en février 2014. Dans sa déclaration, la ville demandait officiellement au gouvernement du Canada de proclamer le mois d’octobre Mois national du patrimoine hispanique.

Honorables sénateurs, après avoir mené quelques consultations auprès du public et après avoir réfléchi au libellé le plus inclusif et le plus neutre possible, j’ai décidé de substituer « latino-américain » à « hispanique » pour désigner une communauté géographique incluant non seulement les communautés lusophone et francophone, mais aussi les peuples autochtones de la région. De plus, comme l’a dit quelqu’un, « cela permet d’inclure n’importe quelle identité par voie d’auto-identification tout en célébrant une terre et des histoires qui nous relient tous ».

Voilà un autre exemple de l’importance de continuer d'en apprendre davantage au sujet de nos diverses origines. Avec un Mois du patrimoine latino-américain, les questions d’auto-identification dans le contexte multiculturel canadien renforceront notre compréhension des facteurs complexes en cause. La complexité de ce que signifie le fait d’être latino-américain pourrait ne pas être évidente pour la plupart des Canadiens. Honorables sénateurs, c’est dans cet esprit que je propose cette mesure législative.

La communauté latino-américaine canadienne est vaste, dynamique et connaît une croissance rapide. Selon le recensement de 2016, à la question de l’origine ethnique des Canadiens, 788 510 Canadiens ont dit être d’origine latino-américaine. C’est 155 885 Canadiens de plus par rapport au recensement de 2011, alors que le nombre était de 632 265 Canadiens. Ce nombre continuera d’augmenter, puisque la communauté latino-américaine grandit rapidement, et celle-ci continue d’avoir une incidence positive sur notre société et notre pays.

Honorables sénateurs, ceux qui conservent un fort sens d’appartenance à leurs propres origines et qui partagent celles-ci avec leurs voisins contribuent à enrichir la mosaïque multiculturelle qu’est devenue le Canada. Un Mois national du patrimoine latino-américain constituerait un moyen de renforcer les efforts déployés par la communauté latino-américaine du Canada pour renseigner la population sur ses contributions et ses réalisations au Canada.

Honorables sénateurs, les immigrants latino-américains hautement qualifiés, comme notre collègue, la sénatrice Galvez, qui viennent maintenant au Canada dans l’intention d’y rester témoignent d’une nouvelle tendance. Jusqu’à il y a quelques décennies, beaucoup d’immigrants latino-américains fuyaient les troubles politiques et la persécution qui régnaient dans leur pays. Ces immigrants ont un sens très développé de la participation civique et du service public pour le mieux-être de tous. Leurs voix ont contribué à faire comprendre et connaître aux Canadiens ce qui les avait amenés à fuir. Ils sont venus au Canada pour vivre dans un pays où les droits et les libertés qui leur étaient refusés sont bien établis.

Honorables sénateurs, j’ai eu l’occasion récemment de témoigner devant le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Les membres du comité se sont montrés très accueillants et ont compris ce que signifierait pour de nombreux citoyens canadiens l’établissement d’un Mois du patrimoine latino-américain. Notre collègue, la sénatrice Rosa Galvez, a témoigné avec moi. Je tiens à la remercier et à lui exprimer ma profonde gratitude pour son soutien indéfectible à l’égard du projet de loi. La présence de la sénatrice Galvez, qui est elle-même membre de la communauté latino-américaine du Canada, a donné du poids au projet de loi. Elle a su exprimer l’enthousiasme de la communauté latino-américaine, qui est prête à appuyer cette initiative et à souligner ce mois de façon à ce que tous les Canadiens en profitent.

Chers collègues, je persiste à dire que, en faisant du mois d’octobre le Mois du patrimoine latino-américain, nous profitons de l’occasion pour contribuer à notre histoire collective — une histoire toute canadienne de tolérance et d’inclusion. J’espère que cet important projet de loi sera adopté rapidement par le Sénat, afin que nous fassions un pas de plus vers la célébration officielle du patrimoine latino-américain dans notre grand pays.

(1740)

Merci de votre attention. Muchas gracias.

L’honorable Rosa Galvez : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi S-218, Loi instituant le Mois du patrimoine latino-américain.

Le mois dernier, comme l’a dit le sénateur Enverga, j’ai comparu devant le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie pour parler de ce projet de loi. Les Canadiens d’origine latino-américaine, comme moi, jouent un rôle important dans la relation du Canada avec les pays démocratiques des Amériques. Le Canada a conclu avec des pays et des groupes de pays de l’Amérique latine de nombreux accords multilatéraux politiques et économiques qui contribuent à créer des alliances politiques, économiques et commerciales. Le fait de reconnaître le patrimoine culturel que nous partageons au Canada en instituant le Mois du patrimoine latino-américain nous permettra de renforcer les relations entre le Canada et les pays d’Amérique latine tout en désignant officiellement une période pendant laquelle nous pourrons célébrer les contributions culturelles, sociales et économiques des Canadiens et résidents permanents d’origine latino-américaine.

Dans une déclaration écrite, le président du Conseil canadien pour les Amériques, M. Kenneth Frankel, a affirmé que son organisme appuyait la désignation du Mois du patrimoine latino-américain au Canada. Dans sa lettre, il décrit les avantages qui en découleraient :

Premièrement, cela enverrait aux Canadiens, y compris aux Canadiens d’origine latino-américaine, le message important que le Canada, notre pays, reconnaît les contributions clés et continues des Canadiens d’origine latino-américaine au Canada.

Deuxièmement, cela enverrait aux Canadiens, aux Latino-Américains et au reste du monde le message que le Canada accorde une grande importance à cette relation et à notre engagement commun envers des valeurs démocratiques libérales fondamentales et des objectifs sociétaux inclusifs.

Troisièmement, cela enverrait au monde entier le message que, dans une ère où les discours et les manifestations anti-immigrés foisonnent, le Canada clame haut et fort qu’il a profité et continuera grandement de profiter du multiculturalisme.

Comme je l’ai tout récemment dit dans ma déclaration au Sénat, lors de mon dernier voyage au Pérou, j’ai participé à une réunion organisée par le Président du Congrès. J’ai représenté la présidence de notre Sénat. Les présidents et les vice-présidents des Congrès de 12 pays d’Amérique latine se sont rassemblés pour condamner fermement les actes du président du Venezuela. Cette condamnation a montré que les pays d’Amérique latine peuvent faire front commun. J’ai réitéré l’engagement du Canada envers le respect des valeurs démocratiques dans les Amériques et demandé que des négociations soient tenues pour rétablir l’ordre démocratique au Venezuela en signant une déclaration qui réaffirme notre confiance à l’égard des valeurs démocratiques.

Les Amériques se partagent des plaques tectoniques, une chaîne de montagnes comme les Andes et des fleuves mystiques comme l’Amazone. Nous avons également dans notre histoire des événements communs, aussi lointains que récents, et des liens culturels et économiques unissent le Canada aux pays d’Amérique latine. Ils sont d’importants alliés pour le Canada, tant individuellement que collectivement.

Peu importe comment nous examinons ce projet de loi, que ce soit sous l’angle économique, politique ou social ou du point de vue de ceux qui sont nés au Canada ou des immigrants latino-américains au Canada, leurs enfants et leur famille, il n’y a aucune raison de ne pas l’appuyer.

J’aimerais vous donner un exemple fondé sur ma propre expérience. Comme vous le savez, je suis née à Lima, au Pérou, et j’ai grandi dans une ville typiquement latino-américaine : surpeuplée et très achalandée. Il pourrait s’agir de Santiago, de Mexico, de Bogota ou de Rio de Janeiro. Nous parlons une langue latine, nous avons la même religion et nous nous ressemblons tous.

Lorsque je travaillais à l’Université McGill, mon nom apparaissait sur le tableau dans l’entrée, et mon bureau était considéré comme le bureau d’orientation des étudiants latino-américains. Tous les Latino-Américains se sont arrêtés à mon bureau en quête de conseils. Mes compatriotes latino-canadiens aiment faire preuve de solidarité entre eux. Nous voulons nous entraider. Nous tentons de remonter le moral à nos concitoyens. Notre verre est toujours à moitié plein.

Le mode de vie latino est épicurien. Il permet de jouir du moment présent au moyen de l’amitié et du partage de la musique, de la cuisine et des expériences de vie. Combien d’amis canadiens avons-nous convaincus de découvrir les Andes, la jungle amazonienne et les sites archéologiques mayas, aztèques et incas? Combien de Canadiens ont forgé des amitiés permanentes avec des gens de pays de l’Amérique latine et d’origine latino-américaine? Des milliers.

Un mois pour célébrer le patrimoine latino-américain est une formule gagnante pour rassembler toutes les cultures.

Comme vous le savez, j’aime bien les chiffres. J’estime qu’ils illustrent très bien les faits. Une statistique peut aider à voir comment la communauté latino-américaine est perçue et s’intègre au Canada. Les Canadiens d’origine latino-américaine s’intègrent en général plutôt bien. Selon l’étude sur la diversité ethnique, 82 p. 100 des citoyens d’origine latino-américaine ont un fort sentiment d’appartenance au Canada. Comme moi, ils choisissent de rester ici. Dix-sept pour cent des adultes latino-américains au Canada détiennent un diplôme d’études universitaires, ce qui est supérieur à la moyenne de 15 p. 100; 64 p. 100 des adultes latino-américains, comparativement à 62 p. 100 de la population générale. Ces statistiques montrent que les Latino-américains ont un taux d’intégration élevé dans l’économie et la société canadiennes.

De même, une part considérable des étudiants inscrits aux programmes d’études supérieures en sciences et en génie des universités canadiennes sont latino-américains. D’ailleurs, au cours de ma carrière professionnelle en tant que professeure et ingénieure, j’ai encouragé de nombreux professeurs canadiens à enseigner dans des universités latino-américaines, et j’ai convaincu bon nombre d’étudiants de l’Amérique latine de venir étudier au Canada. Cet échange de savoir est précieux dans une société éduquée. Par ailleurs, certains des immigrants qui auraient pu choisir de retourner dans leur pays ne l’ont pas fait. Ils sont restés au Canada.

Les personnes d’origine latino-américaine qui aiment le Canada et y restent le font non seulement pour les occasions d’emploi, mais, et j’insiste sur ce point, en raison de l’ouverture, des valeurs, de la gentillesse, de la résilience et de la nature travaillante des Canadiens.

À l’instar des vagues d’immigrants venus d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud depuis un demi-siècle, ces immigrants apportent au Canada un riche patrimoine culturel, non seulement dans les arts, l’artisanat, les textiles, la musique, l’agriculture et les produits alimentaires, mais également dans leurs perspectives et dans leurs relations avec les peuples autochtones. L’occasion de célébrer ce patrimoine culturel avec les Canadiens d’origine latino-américaine ou d’autres origines est un bienfait pour l’ensemble des Canadiens.

[Français]

Honorables sénateurs, nous devons également tenir compte du fait que, au Canada, nous retrouvons la culture latine d’héritage français. Les communautés francophones du Québec, de l’Acadie, du Manitoba et de l’Ontario bénéficient des échanges, de l’esprit de solidarité et de la culture commune avec les communautés qui proviennent de l’Amérique latine.

Je salue, remercie et appuie le sénateur Enverga pour l’initiative qu’il a prise de parrainer ce projet de loi.

[Traduction]

Le Mois du patrimoine latino-américain fournira aux Canadiens une occasion annuelle de célébrer le patrimoine et le legs culturels des Latino-Américains au Canada, de s’informer à ce sujet et de prendre part à l’œuvre perpétuelle d’édification de la nation.

[Français]

Chers collègues, je vous remercie à l’avance et vous encourage à appuyer le projet de loi S-218. Merci beaucoup.

(Sur la motion du sénateur Mercer, au nom de la sénatrice Jaffer, le débat est ajourné.)

[Traduction]

(1750)

Projet de loi relative au cadre sur les soins palliatifs au Canada

Troisième lecture—Ajournement du débat

L’honorable Nicole Eaton propose que le projet de loi C-277, Loi visant l’élaboration d’un cadre sur les soins palliatifs au Canada, soit lu pour la troisième fois.

— Honorables sénateurs, j’aimerais donner aujourd’hui mon appui au projet de loi C-277, Loi visant l’élaboration d’un cadre sur les soins palliatifs au Canada.

Je serai brève, mais je tiens tout de même à revenir sur certains des points dont il a été question pendant l’étude du projet de loi par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

Présenté par la députée de Sarnia—Lambton, Marilyn Gladu, le projet de loi C-277 est tout simple, mais il pourrait avoir un profond impact sur la société canadienne. Il obligerait le ministre de la Santé à élaborer, en consultation avec ses homologues des provinces et des territoires et les fournisseurs de soins palliatifs, un cadre visant à améliorer l’accès aux soins palliatifs pour les Canadiens.

Ce cadre définirait ce qui constitue des soins palliatifs, il établirait la formation que les fournisseurs de soins devraient suivre et les études qu’ils devraient avoir, il favoriserait la recherche et la collecte de données sur les soins palliatifs, il recenserait les moyens permettant de faciliter l’égal accès des Canadiens aux soins palliatifs, il prendrait en considération les stratégies, les pratiques exemplaires et les cadres existants et il examinerait l’opportunité de rétablir le Secrétariat des soins palliatifs et des soins de fin de vie du ministère de la Santé.

Il exigerait en outre du ministre qu’il entame des consultations dans les six mois suivant la date d’entrée en vigueur de la loi et qu’il présente au Parlement un rapport faisant état du cadre sur les soins palliatifs dans l’année suivant l’entrée en vigueur de la loi.

Dans les cinq ans suivant le dépôt de ce rapport au Parlement, le ministre de la Santé devrait rédiger un rapport sur l’état des soins palliatifs au Canada. Essentiellement, le projet de loi définit les priorités auxquelles donner suite et le moment où cela doit se faire.

Les témoins entendus par le Comité des affaires sociales ont été sans équivoque : ces priorités sont les bonnes, et il faut agir sans tarder. Comme Mme Gladu l’a dit au comité, l’argent est là, puisque le budget de 2017 consacre 11 milliards de dollars aux soins à domicile, aux soins palliatifs et aux traitements de santé mentale. Le calendrier établi dans le projet de loi sert de garantie afin que les annonces de financement ne demeurent pas sans suite.

Les personnes qui sont venues témoigner devant le comité, un vaste éventail de spécialistes et de parties prenantes, étaient toutes en faveur du projet de loi. Certains témoins — et certains sénateurs aussi — auraient préféré que le projet de loi C-277 soit libellé dans des termes plus clairs, ce qui est à l’origine de trois observations formulées dans le rapport du comité.

D’abord, les membres du comité estiment que les consultations qui se tiendraient aux termes du paragraphe 2(1) du projet de loi devraient comprendre des intervenants qui représentent les intérêts des patients. Dans ses observations, le comité invite la ministre de la Santé à autoriser les patients individuels et les groupes qui représentent leurs intérêts à participer à l’élaboration du cadre sur les soins palliatifs. Je suis d’avis que le libellé du projet de loi peut le permettre et je pense que cela se fera.

Ensuite, le comité est préoccupé par le manque d’accès aux soins palliatifs dans certaines régions et exhorte le gouvernement fédéral à accorder des fonds supplémentaires pour les régions rurales et éloignées et les collectivités autochtones.

Enfin, le comité engage le gouvernement fédéral à rétablir le Secrétariat des soins palliatifs et des soins de fin de vie de Santé Canada.

J’approuve ces objectifs et je pense qu’il convient de les traiter sous forme d’observations plutôt que d’en faire des amendements au projet de loi.

Tout projet de loi portant affectation de deniers publics doit être accompagné d’une recommandation royale, qui ne peut être obtenue que par un ministre. Il y a donc de bonnes raisons qui expliquent pourquoi le projet de loi C-277 n’est pas plus explicite sur ces questions.

Mme Gladu a dû faire certains compromis pour obtenir l’appui du gouvernement. Nous ne serions pas en train d’étudier ce projet de loi aujourd’hui si elle ne l’avait pas fait. Si le projet de loi C-277 a obtenu un appui unanime à l’autre endroit, c’est grâce à sa capacité de manier adroitement la procédure parlementaire. Je la remercie et je la félicite de son excellent travail.

Je tiens aussi à remercier les intervenants et les experts qui ont participé à la conception du projet de loi, qui l’ont appuyé à l’étape de l’étude en comité et qui s’occuperont d’une bonne partie des travaux nécessaires pour élaborer et mettre en œuvre le cadre. Dans sa forme actuelle, le projet de loi fournit l’impulsion nécessaire pour recueillir les données, cerner les lacunes dans le système, améliorer les efforts de sensibilisation et veiller à ce que certaines régions ou certains groupes, comme les Premières Nations, ne soient pas laissés pour compte.

Il n’est pas nécessaire que le projet se transforme en une lourde entreprise bureaucratique. Il s’agit de mettre en commun les connaissances et l’expertise qui existent déjà dans les collectivités et les organismes un peu partout au Canada.

Honorables sénateurs, les tribunaux nous ont dit que le refus d’offrir de l’aide médicale à mourir à une personne qui souhaite mettre fin à ses jours constitue une violation de ses droits garantis par la Charte. Ce choix doit lui être offert. Pourtant, les Canadiens ne jouissent pas d’un droit semblable en matière de soins palliatifs.

Comme le Dr Henderson, président de la Société canadienne des médecins de soins palliatifs, l’a dit devant le comité : « Lorsqu’il n’y a pas d’autre choix, l’aide médicale à mourir n’est pas un choix. »

Les gens ne devraient pas être obligés de choisir l’aide médicale à mourir parce qu’ils n’ont pas accès à des soins palliatifs de grande qualité. C’est pourtant le cas pour les deux tiers des Canadiens. Si nous n’agissons pas dès maintenant, le problème ne fera que s’aggraver.

Comme l’a fait remarquer le Dr Henderson, en 2011, 14 p. 100 des Canadiens étaient âgés de 65 ans ou plus. D’ici 2025, 20 p. 100 des Canadiens se trouveront dans cette catégorie d’âge, et cette proportion passera à 25 p. 100 d’ici 2061. Nous sommes aux prises avec une bombe à retardement sur le plan démographique, et les notions économiques les plus élémentaires exigent que nous agissions le plus rapidement possible pour que soient offerts des soins palliatifs accessibles et de grande qualité d’un bout à l’autre du pays, soins qui permettront à des gens de passer les derniers mois ou les derniers jours de leur vie chez eux ou dans un foyer à un coût de 200 $ ou 300 $ par jour, plutôt que dans une unité hospitalière de soins actifs, où le coût peut atteindre jusqu’à 1 000 $ par jour.

De toute évidence, ce n’est pas qu’une question de coût. C’est aussi une question de dignité. Comme Mme Gladu l’a dit en comité :

[...] lorsqu’on leur offre des soins palliatifs de bonne qualité, 95 p. 100 des gens choisissent de vivre le plus longtemps qu’ils peuvent [...]

L’adoption du projet de loi contribuera à permettre aux gens de choisir de vivre le plus longtemps qu’ils peuvent. Je demande donc au Sénat de voter en faveur du projet de loi C-277.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, comme il est près de 18 heures et qu’il nous reste encore de nombreux articles inscrits au Feuilleton à examiner, puis-je maintenant demander le consentement du Sénat pour faire abstraction de l’heure à 18 heures, afin de ne pas devoir interrompre le discours d’un autre sénateur? Vous plaît-il, honorables sénateurs, de faire abstraction de l’heure?

Des voix : D’accord.

L’honorable Judith Seidman : Honorables sénateurs, je prends la parole pour appuyer le projet de loi C-277, Loi visant l’élaboration d’un cadre sur les soins palliatifs au Canada. Plus précisément, je tiens à souligner l’urgence d’adopter le projet de loi et l’importance de le mettre en œuvre de façon rapide et efficace.

Chaque année, des milliers de Canadiens souffrent inutilement parce qu’ils n’ont pas accès à des soins palliatifs. Selon une étude menée par la Société canadienne du cancer en 2016, le système comporte des failles, il n’existe aucune définition commune des soins palliatifs et il y a un manque de renseignements concernant les services offerts dans chaque région du Canada.

Au moment de la publication du rapport, Gabriel Miller, de la Société canadienne du cancer, a confirmé ce que nous savons depuis longtemps :

C’est un secret honteux du système de santé canadien : depuis de nombreuses années, il y a d’importantes lacunes dans les soins que nous prodiguons aux Canadiens les plus malades, surtout quand la fin de leur vie approche [...]

Honorables sénateurs, la situation actuelle est inacceptable dans un pays comme le Canada, où on se targue de rendre les soins de santé accessibles à tout le monde. Nous laissons tout simplement tomber les plus vulnérables au moment où ils ont le plus besoin de notre aide.

(1800)

Ce n’est pas la première fois que les parlementaires sont placés devant des propositions visant à améliorer l’accès aux soins palliatifs pour les Canadiens. En 2011, le Comité parlementaire sur les soins palliatifs et les soins de compassion a publié un rapport intitulé On ne les oublie pas : Les soins aux Canadiens vulnérables. En 2014, la motion d’initiative parlementaire M-456 demandait l’établissement d’une stratégie pancanadienne de soins palliatifs et de fin de vie.

Comme d’innombrables témoins experts nous l’ont déclaré, le moment est venu d’agir. Heureusement, on ne part pas de zéro. On a recueilli un large éventail de renseignements et de ressources pour orienter l’établissement d’un cadre national pour les soins palliatifs. Je tiens à souligner l’excellent travail accompli par l’initiative Aller de l’avant, dirigée par la Coalition pour des soins de fin de vie de qualité du Canada, qui est gérée par l’Association canadienne de soins palliatifs et financée par l’ancien gouvernement conservateur.

L’initiative Aller de l’avant a abouti à la création d’une feuille de route exhaustive pour l’intégration de l’approche palliative des soins. Le rapport, publié en 2015, offre des ressources et des outils pratiques pour appuyer les gouvernements, les décideurs, les planificateurs régionaux et les organismes et les fournisseurs de soins de santé. Ce document répond clairement à des questions qui ont été soulevées au comité et dans cette enceinte au sujet de cette mesure législative, et j’encourage tous les sénateurs à le lire.

Dès 2015, j’ai eu le grand privilège de siéger au Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir, en compagnie de collègues du Sénat et de l’autre endroit. Tous ceux qui ont siégé à ce comité ont immédiatement compris que, si le Canada ne disposait pas d’un régime de soins palliatifs accessible et universel, il serait extrêmement difficile de légiférer en matière d’aide médicale à mourir. En effet, tous les témoins qui ont abordé la question ont convenu que le Canada doit en faire davantage pour améliorer l’accès aux soins palliatifs.

Le rapport final du comité mixte contenait des recommandations importantes concernant les soins palliatifs qui sont en accord direct avec le cadre prévu dans le projet de loi C­277. Dans le rapport, nous avons demandé à Santé Canada de rétablir le Secrétariat des soins palliatifs et des soins de fin de vie. Nous lui demandions aussi de travailler avec les provinces, les territoires et la société civile pour développer un modèle souple et intégré de soins palliatifs, en mettant en œuvre une stratégie pancanadienne en matière de soins palliatifs et de soins de fin de vie assortie d’un financement réservé. Nous avons également souligné le besoin d’organiser une campagne de sensibilisation du public sur la question.

Depuis, nous avons pris connaissance des chiffres effarants : seulement 30 p. 100 des Canadiens ont accès à des soins palliatifs de haute qualité lorsqu’ils en ont besoin. Évidemment, ce problème est particulièrement aigu dans les régions rurales et éloignées. Cependant, il y a encore énormément de choses que nous ignorons au sujet des soins palliatifs. Voilà pourquoi l’objectif du cadre, qui est de promouvoir la recherche et la collecte de données, est crucial.

Une recherche scientifique rigoureuse est essentielle afin d’inspirer les cliniciens et les décideurs à prendre des décisions éclairées fondées sur des données probantes. Cependant, la recherche sur les soins palliatifs n’a jamais eu d’ardents défenseurs sur la place publique. Par conséquent, en raison de la petite quantité de données, le milieu de la recherche en santé est limité quant à sa capacité de mesurer et de rendre compte des services et des pratiques en matière de soins palliatifs dans l’ensemble du secteur de la santé. Notre compréhension limitée confirme qu’il nous faut de meilleures données afin d’élaborer des façons de mesurer plus efficacement la qualité des soins palliatifs et de fin de vie du Canada et l’accès à ceux-ci en temps voulu.

Le plus récent rapport du Partenariat canadien contre le cancer, publié en septembre 2017, détermine trois grands obstacles et écarts qu’il faut éliminer pour changer la situation. Premièrement, il faut mieux comprendre les particularités des soins palliatifs et de fin de vie offerts aux patients dans l’ensemble des services de santé, y compris dans les hôpitaux de soins actifs, les clinique externe, les résidences, les centres de soins et les établissements de soins de longue durée.

Deuxièmement, il est primordial que l’on en apprenne davantage sur la concordance entre, d’une part, les préférences des patients et les objectifs des soins qu’ils reçoivent et, d’autre part, les soins qu’on leur prodigue réellement. À ce jour, aucune donnée nationale n’est recueillie de façon systématique pour recenser les besoins des personnes et leur choix du lieu de décès.

Enfin, les renseignements sur les variations d’un endroit à l’autre en matière d’accès aux soins palliatifs communautaires permettront de trouver des solutions pour traiter les disparités régionales en matière de services.

L’engagement du cadre à l’égard de la recherche et de la collecte de données permettra aussi d’améliorer l’accès aux soins basés sur des données probantes, la capacité d’évaluer les interventions, et la qualité de la formation pour les travailleurs de la santé.

Le Dr Bernard Lapointe, directeur des soins palliatifs à l’Université McGill et chef des services de soins palliatifs à l’Hôpital général juif, a dit ceci au sujet de l’importance de la formation :

La mort n’est pas une option, nous y sommes tous confrontés un jour; le soutien et la formation à cet égard ne devraient pas être facultatifs. Chaque fournisseur de soins devrait posséder les connaissances de base en matière de soins palliatifs.

L’importance accordée par le projet de loi C-277 à la formation en soins palliatifs et aux besoins en formation des fournisseurs de soins et des autres aidants naturels vise à trouver des solutions à cette lacune en matière de connaissances. Au comité, nous avons entendu que la plupart des médecins et des infirmières ne sont pas formés pour prodiguer des soins palliatifs. En moyenne, les étudiants en médecine et en soins infirmiers reçoivent aussi peu que 20 heures de formation sur les soins palliatifs et les soins de fin de vie.

Le rapport Aller de l’avant observe que, bien que ce genre d’évolution nécessite des changements à la formation des fournisseurs de soins de santé, elle a également besoin de défenseurs dans tous les milieux de prestations des soins et dans toutes les professions.

La bonne nouvelle est que les outils sont prêts. En tirant profit des initiatives de formation existantes, comme le programme Former les futurs médecins dans les soins palliatifs et de fin de vie, le programme Les essentiels de l’approche palliative, ainsi que les compétences essentielles en soins palliatifs normalisées à l’échelle nationale pour les infirmières et les travailleuses sociales et établies par les professionnels et les formateurs dans ces domaines, nous pouvons adapter ces programmes pour nous concentrer sur une approche intégrée des soins palliatifs.

Avant de conclure mes observations, je rappelle aux sénateurs l’examen et les rapports prévus aux articles 3 et 4 du projet de loi. Dans l’année suivant l’adoption de cette mesure législative, le ministre de la Santé doit préparer un rapport énonçant le cadre sur les soins palliatifs. Dans les cinq années suivantes, le ministre doit préparer un rapport sur l’état des soins palliatifs au Canada et le faire déposer devant chaque Chambre du Parlement.

Je ne saurais trop insister sur l’importance de tenir une consultation tout au long de l’élaboration du cadre, surtout avec les partenaires communautaires. Compte tenu du volume de soins palliatifs dispensés à l’extérieur des hôpitaux et des établissements de soins de longue durée, il est d’une importance capitale que les représentants communautaires locaux aient leur mot à dire. C’est particulièrement important quand on se rappelle que la majeure partie des fonds pour les maisons de soins palliatifs sont recueillis par des organismes communautaires sous forme de dons de la population. C’est pour cela que les représentants du secteur communautaire doivent être traités comme des partenaires estimés et au même niveau que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux.

Honorables sénateurs, le système de santé du Canada a été créé il y a près de 50 ans, lorsque la population dépassait à peine 20 millions d’habitants et que les Canadiens avaient une espérance de vie de 70 ans. Aujourd’hui, nous avons une population qui dépasse largement les 30 millions, et les Canadiens vivent en moyenne une bonne décennie de plus. Le vieillissement rapide de la population pose l’un des problèmes de politique publique les plus pressants. Une stratégie complète qui répond aux besoins chroniques et complexes de la population vieillissante doit prévoir l’accès à des soins palliatifs de qualité. Le projet de loi C-277 contribuerait à ce que les Canadiens puissent recevoir les soins de fin de vie dont ils ont besoin, dans la tranquillité et le confort qu’ils méritent.

(Sur la motion de la sénatrice Gagné, au nom de la sénatrice Petitclerc, le débat est ajourné.)

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Ringuette, appuyée par l’honorable sénatrice Bovey, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-237, Loi modifiant le Code criminel (taux d’intérêt criminel).

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Honorables sénateurs, j’aimerais que le débat soit ajourné au nom du sénateur Maltais.

(Sur la motion du sénateur Boisvenu, au nom du sénateur Maltais, le débat est ajourné.)

(1810)

Modernisation du Sénat

Septième rapport du comité spécial—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Massicotte, appuyée par l’honorable sénateur Moore, tendant à l’adoption du septième rapport (intérimaire), tel que modifié, du Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat, intitulé La modernisation du Sénat : Aller de l’avant (Intérêt régional), présenté au Sénat le 18 octobre 2016.

L’honorable David M. Wells : Je propose l’ajournement du débat, honorables sénateurs.

(Sur la motion du sénateur Wells, le débat est ajourné.)

Dixième rapport du comité spécial—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Joyal, C.P., appuyée par l’honorable sénatrice Cordy, tendant à l’adoption du dixième rapport (intérimaire), tel que modifié, du Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat, intitulé La modernisation du Sénat : Aller de l’avant (Nature), présenté au Sénat le 26 octobre 2016.

L’honorable Frances Lankin : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du dixième rapport du Comité spécial du Sénat sur la modernisation du Sénat, tel qu’il a été modifié par le Sénat le 28 mars 2017. Je ne m’attends pas à ce que mon intervention de ce soir soit longue et je comprends que tous les groupes sont prêts à passer au vote. Cela dit, j’aimerais faire quelques observations.

Essentiellement, la motion vise à créer un énoncé de mission ou d’intention pour le Sénat. Elle s’inspire d’une motion élaborée initialement lors des séances de travail menées par les sénateurs Massicotte et Greene, qui ont eu lieu avant mon arrivée au Sénat. Beaucoup de gens y ont participé et ont offert une multitude de points de vue. On peut s’imaginer à quel point il est difficile de rédiger un énoncé qui fait l’affaire de tous et qui saisit l’essence de notre noble institution.

On propose les mots qui ont été présentés, et la motion indique que l’énoncé de mission, l’énoncé d’intention ou de la nature du Sénat qu’élabore le Comité du Règlement doit s’inspirer des affirmations suivantes. Je les cite pour qu’elles paraissent au compte rendu :

(i) poser un « second regard attentif » indépendant sur les projets de loi, en tenant tout particulièrement compte des intérêts nationaux du Canada, des peuples autochtones, des régions, des minorités et des segments sous-représentés de la population;

(ii) étudier les politiques, rédiger des rapports et mener des enquêtes sur des enjeux publics qui touchent les Canadiens;

(iii) comprendre, communiquer et représenter les opinions et les inquiétudes de divers groupes, d’un point de vue propre aux sénateurs.

Je crois que nous pouvons tous convenir que cette enceinte n’est probablement pas le bon endroit où tenir une réunion en vue de modifier le libellé. C’est plutôt le Comité du Règlement qui devrait se pencher là-dessus.

La semaine dernière, lorsque le sénateur Tannas a pris la parole à ce sujet, je lui ai demandé si les discussions qui ont mené à l’élaboration de cette déclaration en trois points tenaient compte du rôle particulier du Sénat, notamment en ce qui concerne la conformité à la Constitution. Au tout début, cela faisait partie des principales responsabilités du Sénat; il devait se pencher sur des questions constitutionnelles comme la répartition des pouvoirs entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, et on portait une attention particulière au champ de compétence du Sénat.

Ensuite, j’ai demandé au sénateur si on avait tenu compte de l’importance de la conformité à la Charte et du rôle particulier que le Sénat doit jouer à cet égard. La décision de la Cour suprême concernant le Sénat et les procédures selon lesquelles on procède ou non à des nominations représentait pour la Cour suprême une occasion de se prononcer sur l’objectif, la mission et les responsabilités du Sénat. Ces aspects concernant la conformité à la Constitution ou à la Charte faisaient partie des questions ayant fait l’objet d’un renvoi. Par conséquent, il y a probablement lieu de se demander s’il faut ou non en tenir compte dans la définition qui nous occupe.

Il est important de parler de la signification de ces termes et de parvenir à une entente commune à cet égard. J’ai eu des entretiens intéressants avec la sénatrice Bellemare, par exemple, qui a parlé du rôle du Sénat comme Chambre indépendante de second examen objectif. Il y a eu beaucoup de discussions sur l’indépendance de cette institution et ce qu’elle signifie. Il y a des sénateurs qui lancent des accusations contre d’autres personnes et qui les décrivent en des termes peu flatteurs. Je crois que cela dévalorise cette honorable enceinte. Cela dit, je pense que nous cherchons tous à comprendre l’importance qu’accorde chaque sénateur à son indépendance et, comme la sénatrice Bellemare en parle souvent, à la signification de l’indépendance du Sénat en tant qu’institution.

Par le passé, des gouvernements d’allégeances différentes se sont activement ingérés dans les affaires du Sénat. Il y avait des preuves évidentes de directives provenant du cabinet du premier ministre, d’ingérence et de sanctions infligées aux personnes qui n’obéissaient pas. Je pense que nous pouvons tous convenir que ce n’est pas ce que nous nous attendons à voir au sein d’une institution indépendante.

La sénatrice Bellemare parle aussi de l’égalité de tous les sénateurs et de la façon dont nous devrons aborder la question de la modernisation à l’avenir. Le Sénat comporte de plus en plus de sénateurs indépendants et de moins en moins de sénateurs appartenant à un parti politique. Qu’est-ce que cela veut dire pour l’égalité des sénateurs?

Ces concepts, dont on a commencé à parler à divers endroits, ne sont probablement pas clairement exprimés dans l’énoncé de mission. Je ne sais pas s’ils devraient l’être; peut-être que oui, peut-être que non. C’est une autre question sur laquelle j’espère que le Comité du Règlement se penchera et qu’il apprendra à mieux comprendre alors que nous traversons cette période d’évolution. Ce que nous envisageons pour l’avenir devrait être reconnaissable dans l’énoncé que nous adopterons aujourd’hui.

Sur ce, Votre Honneur, je remercie les sénateurs qui ont participé aux premiers efforts de modernisation. Je remercie plus particulièrement les sénateurs Greene et Massicotte de leur leadership, ainsi que d’autres sénateurs qui, comme le sénateur Tannas, ont participé à ces efforts avec assiduité tant dans le cadre de l’étude au Comité sur la modernisation que des débats du Sénat. J’ai hâte de participer à la discussion lorsque la question sera renvoyée au Comité du Règlement.

L’honorable David M. Wells : J’aimerais poser une question.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénatrice Lankin, accepteriez-vous de répondre à une question?

La sénatrice Lankin : Oui.

Le sénateur Wells : Merci de vos observations sur l’énoncé de mission. En songeant au Sénat, qui existe et semble bien fonctionner depuis 150 ans, je me dis que son énoncé de mission se trouve déjà dans ses obligations aux termes de la Constitution. Je suis heureux que vous en ayez parlé, parce que vous avez de l’expérience parlementaire.

Je crains l’idée d’amener le Sénat à se comporter comme une entreprise. Le Sénat peut débattre en toute liberté depuis 150 ans. Il s’est bien acquitté de son mandat. Nous sommes là pour examiner et proposer des mesures législatives. Nous sommes là pour étudier des questions importantes pour le Canada. Le Sénat devrait-il faire autre chose qui n’est pas compris dans ses obligations aux termes de la Constitution?

La sénatrice Lankin : J’ignore si je peux répondre en détail à cette question. Je vais certainement me pencher là-dessus lorsque je participerai aux délibérations.

Je ne souscris pas à votre prémisse de départ, selon laquelle le Sénat a toujours débattu librement. Selon moi, il y a eu des cas évidents et confirmés de cabinets du premier ministre, de toutes les allégeances, qui se sont ingérés dans le travail du Sénat, d’une façon très directe, en exerçant un contrôle et en imposant des sanctions. Je ne crois pas que ce soit représentatif de la majorité des expériences vécues par les sénateurs, mais il y a eu des cas. Je pense que nous devons réaffirmer notre engagement envers un Sénat qui ne permet pas que de telles choses se produisent.

(1820)

Le sénateur Wells : L’honorable sénatrice accepterait-elle de répondre à une autre question?

La sénatrice Lankin : Certainement.

Le sénateur Wells : Ma question porte précisément sur vos observations. Je ne cherche pas à faire un examen fastidieux, ce n’est pas du tout mon objectif.

En ce qui concerne l’ingérence du cabinet du premier ministre et, plus précisément, les sanctions imposées, vous savez évidemment que des sénateurs qui ne sont pas sous la direction du cabinet ont demandé des sanctions à l’intention d’autres sénateurs. Incluez-vous ce type de sanctions ou parlez-vous uniquement du cabinet du premier ministre?

La sénatrice Lankin : Je suis désolée. Je n’ai pas bien compris la question.

Le sénateur Wells : Je sais que certains sénateurs qui n’étaient pas sous la direction du cabinet du premier ministre, des deux côtés de la Chambre, ont réclamé des sanctions à l’intention de membres de notre caucus. Vous avez parlé du cabinet en particulier. Évidemment, dans le cadre d’un débat libre, les gens peuvent dire ce qu’ils veulent, mais vous avez mentionné précisément le cabinet du premier ministre et les sénateurs sous la houlette de celui-ci. Il y a eu des sénateurs indépendants ou des sénateurs de toutes les allégeances qui ont réclamé de telles sanctions. Je me demandais pourquoi vous aviez parlé uniquement du cabinet du premier ministre.

La sénatrice Lankin : J’ai parlé du cabinet du premier ministre parce que je suis particulièrement préoccupée par les liens que certains peuvent avoir avec une structure politique qui peut parfois influer sur les travaux du Sénat. J’espère que nous pourrons poursuivre les conversations sur ce sujet au Comité sur la modernisation.

Je pense que les sénateurs, surtout ceux de votre caucus, ont clairement exprimé leurs inquiétudes sur le rôle de l’opposition. J’ai toujours été ouverte à ce genre de discussion. Comme vous le savez sans doute, j’ai proposé au Comité du Règlement que l’on aille de l’avant seulement avec les parties des autres dispositions qui ne touchent pas directement à cet enjeu. Il est vrai qu’une discussion délicate bien plus vaste doit avoir lieu.

Je ne crois pas avoir demandé que l’on impose de sanctions. Au contraire, il m’est déjà arrivé, même si j’ai déjà été choquée par certains commentaires de mes honorables collègues, de défendre le droit à la liberté d’expression, bien que certains propos tenus m’apparaissaient de mauvais goût.

Je sais, cependant, que votre ancienne chef intérimaire avait infligé des sanctions. J’en ai parlé dans la question de privilège. Selon ses propos qui ont été cités dans le journal, elle aurait dit au sujet de l’un des membres de votre caucus qu’elle et le chef de l’opposition conservatrice au Sénat avaient décidé ensemble de l’exclure d’une série de comités. J’ai beau avoir suscité des cris de protestation quand je l’ai dit, mais cela a eu lieu; elle a effectivement joué un rôle dans tout cela.

Je crois que nous devons tenter de trouver l’équilibre quant à l’engagement et à la participation des gens de l’autre endroit. J’accepte évidemment qu’il s’agisse d’une question qui doit être gérée avec délicatesse et qu’il faille en parler au fur et à mesure que nous avançons. Il ne s’agit pas ici d’assigner le blâme à qui que ce soit. Toutefois, prétendre que des événements de la sorte n’ont pas eu lieu sous différents partis politiques par le passé n’aide pas plus la situation. Il n’est pas approprié que le cabinet du premier ministre, quelle que soit son allégeance politique, ait ce genre de contrôle sur une institution indépendante.

L’honorable Leo Housakos : J’aurais une question à poser à la sénatrice Lankin.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Accepteriez-vous de répondre à une autre question, madame la sénatrice Lankin?

La sénatrice Lankin : Non, merci.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, le débat est ajourné.)

Le Sénat

Motion tendant à encourager le gouvernement à prévoir dans le budget la création du Conseil canadien de veille sur les infrastructures et de promotion des meilleures pratiques—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Bellemare, appuyée par l’honorable sénateur Enverga,

Que le Sénat — dans le but d’assurer la transparence dans l’octroi des deniers publics et de promouvoir l’efficacité des projets d’infrastructures dans le contexte plus large de la diversification de l’économie et des ajustements vers une économie plus verte, tout en évitant une intervention indue dans la répartition des pouvoirs entre le fédéral et les provinces — encourage le gouvernement à prévoir dans le budget la création d’un Conseil canadien de veille sur les infrastructures et de promotion des meilleures pratiques, composé d’experts dans les projets d’infrastructures en provenance des provinces et des territoires, et ayant comme principales missions :

1. de colliger les informations sur les différents projets d’infrastructures financés par le fédéral;

2. d’étudier les coûts et les bénéfices liés aux différents projets d’infrastructures financés par le fédéral;

3. d’identifier les meilleures pratiques d’acquisition au sens large et de partage de risques;

4. de faire la promotion de ces meilleures pratiques auprès des gouvernements;

5. de promouvoir le développement des compétences des gestionnaires de projets;

Qu’un message soit transmis à la Chambre des communes pour l’informer de ce qui précède.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Je voudrais ajourner le débat sur cette motion, avec le consentement du Sénat, au nom du sénateur Plett, pour le reste du temps de parole dont il dispose, si possible.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables collègues, le consentement du Sénat est-il nécessaire si l’on veut ajourner le débat au nom du sénateur Plett pour le temps de parole qu’il lui reste?

La sénatrice Martin : C’est la raison pour laquelle je demande le consentement, madame la sénatrice.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Je ne pense pas que le consentement soit nécessaire. Je crois que vous devez reprendre à zéro le compte des jours.

La sénatrice Martin : Il a remis le compte des jours à zéro, mais, comme cet article en est au 14e jour et que le sénateur est en voyage avec le comité, je demande le consentement du Sénat pour ajourner le débat au nom du sénateur pour le reste de son temps de parole.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Le débat est ajourné.)

Les universités régionales

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénatrice Tardif, attirant l’attention du Sénat sur les universités régionales et leur importance pour le Canada.

L’honorable Daniel Christmas : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui afin de joindre ma voix à celle de la sénatrice Tardif et de la sénatrice Gagné et d’exprimer mon enthousiasme et mon soutien à l’égard des petites et moyennes universités au Canada, tout particulièrement l’Université du Cap-Breton, qui est située à proximité de ma communauté, Membertou, à Sydney, en Nouvelle-Écosse.

Je sais que, pour certains, le fait que j’intervienne en tant que Mi’kmaq et que je fasse valoir l’importance des établissements d’enseignement postsecondaire peut sembler curieux. Je reconnais que seulement 9,8 p. 100 des Autochtones au Canada sont titulaires d’un diplôme universitaire, alors que ce taux est de 28 p. 100 pour les non-Autochtones. Je suis toutefois ravi de vous faire part aujourd’hui de la façon dont la nation mi’kmaq, en collaboration avec l’Université du Cap-Breton, a modifié cette statistique.

L’Université du Cap-Breton est devenue une source d’espoir et de perspectives pour la population du Cap-Breton. Elle a réussi à prouver qu’il est possible de réaliser des changements positifs en travaillant en collaboration. C’est l’histoire émouvante, qui s’est préparée pendant près de 40 ans ou plus, du partenariat entre la nation mi’kmaq et l’Université du Cap-Breton.

La mission de l’Université du Cap-Breton, c’est de fournir une direction et de recourir aux partenariats pour aider les apprenants et leur collectivité à répondre à leurs besoins sur les plans éducatif, culturel et économique. L’Université du Cap-Breton s’efforce de devenir la meilleure université au Canada, d’être comprise et respectée pour son caractère unique, pour son objectif, pour son milieu d’apprentissage créatif, pour les capacités de ses apprenants, ainsi que pour la qualité de ses modèles d’apprentissage, de formation et de découverte.

C’est une institution où les étudiants passent en premier, qui offre un environnement d’enseignement à échelle humaine, qui adopte une vision et des valeurs humanistes et qui valorise la créativité et l’innovation pour le bien commun. De toutes les universités de la Nouvelle-Écosse, c’est l’Université du Cap-Breton qui investit le plus dans les services aux étudiants. C’est aussi celle dont le nombre moyen d’étudiants par classe est le plus petit pour les dernières années des programmes.

L’université se classe parmi les premières au Canada au chapitre de la satisfaction des étudiants. En 2013, le magazine Maclean’s l’a même consacrée championne de la satisfaction des étudiants de dernière année avec la note « excellent ».

Il est vrai que l’Université du Cap-Breton a reçu bien des éloges, mais c’est surtout de son partenariat et de sa collaboration avec la nation mi’kmaq que j’ai hâte de vous parler ce soir.

(1830)

Cette histoire nous invite à voir grand, à nous écouter mutuellement et à prendre conscience de la valeur de la présence autochtone dans les universités.

Comparons le passé au présent. En 1986, il n’y avait pas un seul diplômé de l’Université du Cap-Breton issu des Premières Nations. Aujourd’hui, un tiers des près de 3 000 étudiants des cycles supérieurs s’identifient d’abord comme des Mi’kmaq.

L’expression « présence autochtone » dont je viens de parler est importante. Elle suppose bien plus que la simple inscription d’étudiants autochtones à des études postsecondaires.

Une présence autochtone suppose que la faculté compte des professeurs autochtones, que les cours visent la diffusion du savoir autochtone et que les structures de gouvernance de l’institution — conseil des gouverneurs ou sénat — s’enrichissent de l’apport des membres de la communauté autochtone.

L’accent sur le savoir autochtone touchant notamment la langue, la culture, l’histoire et la science de la nation que forment les Mi’kmaq est au cœur de l’idée de présence autochtone. Cet accent accordé à une seule nation était tout à fait unique au moment de son introduction il y a plus de 25 ans et on le considère encore comme tel dans les nombreux programmes d’études autochtones suivis aujourd’hui dans toutes les universités du Canada.

Actuellement, le programme d’études mi’kmaq de l’Université du Cap-Breton offre 25 cours différents — on est loin du cours unique offert il y a un quart de siècle. Les études ont commencé — comme je l’ai mentionné — par un cours de langue pour s’étendre ensuite à l’histoire, aux traités, à la culture et à la science. Cela n’empêche pas que, pour en arriver là, la tâche a été colossale.

Tout au long des années 1980 et 1990, les éducateurs et les leaders de la communauté mi’kmaq n’ont eu de cesse que la présence de la nation dans les programmes de l’université soit palpable, reconnue et comprise et qu’elle puisse s’incarner dans le programme d’études mi’kmaq qui est le nôtre aujourd’hui. Il ne faut rien de moins pour changer la culture universitaire ou d’entreprise. Beaucoup de gens ont rendu cela possible.

Parmi eux, on compte sœur Dorothy Moore qui vient de la collectivité de Membertou, dont je suis également issu. Sœur Dorothy est une aînée, une mentore, une enseignante et une intermédiaire qui était déterminée à accompagner les neuf étudiants mi’kmaq dans leur lutte, en 1985. Elle est devenue celle qui inspirait confiance à ces étudiants, calmait leurs peurs et leur transmettait un sentiment d’estime de soi et d’accomplissement. Cette influence a porté ses fruits sous forme de réussite dans leurs études et continue de se faire ressentir dans leur vie, encore aujourd’hui.

Sœur Dorothy souligne que « l’Université du Cap-Breton s’est épanouie et a connu un succès réel ». Elle poursuit : « Cette université vit de belles choses grâce aux Mi’kmaq. J’ai toujours travaillé pour réveiller le système, réveiller le monde, en disant que les Mi’kmaq sont ici, qu’il faut en tenir compte. »

Cheryl Bartlett est professeure émérite en biologie à l’Université du Cap-Breton. Même si elle n’est pas Mi’kmaq, elle comprend très bien le point de vue de cette nation. La professeure Bartlett a été une pionnière de la notion qu’elle appelle le « double regard ». Le double regard nous encourage à voir, avec un œil, les forces des connaissances et du savoir autochtones tout en apprenant à voir, avec l’autre œil, les forces des connaissances et du savoir occidentaux, et à utiliser les deux yeux en même temps au profit de tous.

À l’aide de ce modèle, elle a élaboré le programme académique de science intégrative au milieu et à la fin des années 1990. La prémisse du programme était que des « discussions mutuellement respectueuses au sujet de la nature peuvent avoir lieu entre les points de vue des Autochtones et de la science occidentale, ce qui démontre qu’il existe un fil conducteur entre la connaissance de chacun, ainsi que des différences qui doivent être respectées. » Son objectif — qui a été atteint — était de créer une nouvelle approche pour inciter les étudiants autochtones à poursuivre des études postsecondaires en sciences.

Stephanie Inglis, une autre championne infatigable rattachée à l'Université du Cap-Breton, est professeure d’études mi’kmaq au Collège Unam’ki. Mme Inglis énumère un certain nombre de raisons pour lesquelles le programme des études mi’kmaq connaît du succès :

L’université a commencé à prêter attention aux communautés, à ce qu’elles pourraient faire de plus pour promouvoir l’éducation et aux mesures qu’elles pourraient prendre pour enseigner la langue dans les réserves.

Certaines des premières personnes à avoir suivi le cours sont maintenant des chefs de file de l’enseignement de la langue mi’kmaq. Il est très important d’entretenir un lien avec la communauté.

Il est aussi important d’être près de chez soi. Comme cinq communautés mi’kmaq se trouvent à une distance raisonnable de l’université, les étudiants peuvent rester dans leur famille au lieu d’être logés dans une résidence.

Mme Inglis a dit clairement ce que sont les clés du succès.

Les études mi’kmaq sont une discipline en soi; il s’agit de la culture réelle des étudiants. Par conséquent, ils ont l’occasion de poursuivre des études sur eux-mêmes.

Un autre lien extrêmement important est celui qui existe avec les directeurs de l’éducation des communautés mi’kmaq et les chefs — ils s’intéressent vivement à ce qui arrive à leurs étudiants.

Cela signifie que les services de soutien et de tutorat offerts aux étudiants sont intégrés au programme, de même que les outils de résolution lorsque survient une situation posant problème.

En résumé, le programme est conçu pour connaître du succès, ce qui continuera d’être le cas uniquement si on continue de se conformer au concept d’une nation. On rappelle continuellement aux administrateurs de ne pas donner au programme une portée plus générale. Il ne faut pas oublier de tisser des liens personnels. Il faut entretenir des liens propres aux Premières Nations au sein des universités pour que le programme puisse continuer de connaître du succès. En dernière analyse, il faut que le programme continue de connaître du succès parce que, hélas, la langue mi’kmaq est en train de disparaître. Il ne reste plus que 8 000 locuteurs. Le mi’kmaq est la dernière langue en son genre au monde.

Toutes les autres langues des Algonquins de l’Est ont disparu, sauf le malécite. Donc, comme l’a affirmé Mme Inglis : « Nous allons mettre nos énergies pour faire en sorte que notre propre peuple apprenne notre langue. Il ne s’agit pas simplement de dire que, à l’université, nous enseignons une langue autochtone. »

Chers collègues, c’est effectivement beaucoup plus que cela. Il faut comprendre en quoi consiste la culture. Il faut entrer dans les détails, ne pas simplement se limiter à un tableau général. C’est avoir une véritable place, être écouté au sein de l’institution et être plus humaniste et holistique, ce qui est plutôt contraire aux monocultures eurocentriques normatives. C’est ce qu’on enseigne dans le programme d’études mi’kmaq à l’Université du Cap-Breton. Grâce à ce programme, on a créé une tradition de succès qui touche toutes les générations.

Les Mi’kmaq ont un taux d’obtention de diplôme de 80 p. 100 — et on ne parle pas seulement des études postsecondaires à l’Université du Cap-Breton. Ce chiffre s’applique aussi au secondaire. Le secret de cette réussite, ce sont plus de 500 diplômés universitaires dans divers domaines qui ont fait des études de deuxième et de troisième cycles et qui sont ensuite rentrés chez eux, dans leur communauté. Après un quart de siècle, ce sont aujourd’hui les enfants et les petits-enfants de ces anciens étudiants qui ont à leur tour un taux d’obtention de diplôme de 80 p. 100. Ces chiffres montrent bien la valeur du partenariat entre l’Université du Cap-Breton, la Mi’kmaw Kina’matnewey, qui est notre autorité scolaire, et la nation mi’kmaq en général.

Les mots suivants de la poète, essayiste et féministe Adrienne Rich sont peut-être ceux qui résument le mieux l’esprit de ce que la nation mi’kmaq et l’Université du Cap-Breton ont bâti ensemble :

Lorsqu’une personne en position d’autorité, telle qu’un enseignant, décrit le monde et que vous n’en faites pas partie, il y a un instant de déséquilibre psychique, comme si vous regardiez dans un miroir sans vous y voir. Vous savez pourtant que vous et d’autres personnes comme vous existez, et que ce n’est qu’une illusion. Il faut une grande force d’âme, pas seulement une force individuelle, mais aussi une compréhension collective, pour résister à ce vide, à cet état de non-être, dans lequel vous êtes lancé […] et pour vous lever et exiger d’être vu et entendu.

Honorables sénateurs, la nation mi’kmaq se tient debout fièrement à l’Université du Cap-Breton. On la voit et on l’entend en grande partie grâce aux efforts des personnes que j’ai nommées et de bien d’autres membres de la nation mi’kmaq.

Enfin, je rappelle aux sénateurs que l’appel à l’action no 16 du rapport de la Commission de vérité et réconciliation demande aux établissements d’enseignement postsecondaire de créer des programmes et des diplômes collégiaux et universitaires en langues autochtones.

Alors que le gouvernement et le milieu universitaire s’engagent à y donner suite, ils pourraient peut-être apprendre une chose ou deux de ce qu’ont fait précisément à cet égard la nation mi’kmaq et l’Université du Cap-Breton.

Honorables sénateurs, je suis certain que vous comprenez que ce qu’a accompli l’Université du Cap-Breton n’a rien d’un hasard. Or, sa survie à long terme est loin d’être garantie.

(1840)

Des changements apportés à la formule de financement du gouvernement pour les universités de la Nouvelle-Écosse ont entraîné une baisse de 6 millions de dollars dans le financement de l’Université du Cap-Breton, ce qui équivaut à une réduction d’environ 19 p. 100. Il s’agit d’une plus forte baisse que celles subies dans les autres régions de la province. Pourtant, au cours des dernières années, l’aide financière totale pour les universités a augmenté de 107 millions de dollars. La Nouvelle-Écosse ferait bien de remédier à cette situation nettement inacceptable.

Pour terminer, lorsque je pense au partenariat en place depuis de nombreuses années entre l’Université du Cap-Breton et la nation mi’kmaq, je me rappelle les paroles du poète irlandais William Butler Yeats, qui a écrit : « Éduquer ce n’est pas remplir un vase, c’est allumer un feu. » Puisse le feu symbolique allumé par l’Université du Cap-Breton et la nation mi’kmaq continuer de brûler à jamais.

Wela’lioq. Merci.

(Sur la motion de la sénatrice Cordy, le débat est ajourné.)

Le Sénat

Adoption de la motion sur la composition des comités

L’honorable Joseph A. Day (leader des libéraux au Sénat), conformément au préavis donné le 2 novembre 2017, propose :

Que, nonobstant toute disposition du Règlement ou pratique habituelle, et sauf pour ce qui est du Comité permanent sur l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs, à la fin de la journée le 19 novembre 2017 :

1.1.les sénateurs membres du Comité de sélection, du Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat et des comités sénatoriaux permanents cessent d’être membres de ces comités;

1.2.il est entendu que le Comité de sélection et les comités sénatoriaux permanents soient composés du nombre de membres prévu aux articles 12-1, 12-3(1) et 12-3(2)a), b), c), d) et e) du Règlement;

1.3.il est entendu que le Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat soit composé de 15 membres, comme le prévoit l’ordre du 11 décembre 2015 qui a établi le comité;

1.4.le leader de l’opposition (ou son délégué), le leader des sénateurs indépendants libéraux (ou son délégué) et le facilitateur du Groupe des sénateurs indépendants (ou son délégué) désignent, au moyen d’un avis remis à la greffière du Sénat, qui le fait consigner aux Journaux du Sénat, les nouveaux membres du Comité de sélection, du Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat et des comités sénatoriaux permanents provenant de leur parti ou groupe respectif selon les proportions suivantes :

a)pour les comités comptant neuf membres, outre les membres d’office :

(i)quatre sénateurs conservateurs,

(ii)un sénateur indépendant libéral,

(iii)quatre sénateurs du Groupe des sénateurs indépendants;

b)pour les comités comptant 12 membres, outre les membres d’office :

(i)cinq sénateurs conservateurs,

(ii)deux sénateurs indépendants libéraux,

(iii)cinq sénateurs du Groupe des sénateurs indépendants;

c)pour les comités comptant 15 membres, outre les membres d’office :

(i)six sénateurs conservateurs,

(ii)trois sénateurs indépendants libéraux,

(iii)six sénateurs du Groupe des sénateurs indépendants;

Que, pour le reste de la présente session, les comités suivants aient le pouvoir d’élire deux vice-présidents :

2.1.le Comité de sélection;

2.2.le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration;

2.3.le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement;

2.4.le Comité sénatorial permanent des finances nationales;

2.5.le Comité sénatorial permanent des transports et des communications;

2.6.le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles;

2.7.le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie;

2.8.le Comité sénatorial permanent des droits de la personne;

2.9.le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense;

2.10.le Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat;

Que, dans le cas où un comité élit deux vice-présidents :

3.1.la mention du vice-président à l’article 12-18(2)b)(ii) du Règlement vaille mention des deux vice-présidents agissant concurremment;

3.2.la mention du vice-président à l’article 12-23(6) du Règlement vaille mention de l’un ou l’autre des vice-présidents;

3.3.la mention du vice-président d’un comité dans une politique ou des lignes directrices adoptées par le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration vaille mention des deux vice-présidents agissant concurremment, jusqu’à ce que le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration en décide autrement;

Que, pour le reste de la présente session, en ce qui concerne les comités couverts par les dispositions de l’article 12-3(3) du Règlement et sous réserve des autres dispositions du Règlement relatives aux membres d’office :

4.1.en plus des membres d’office prévus à l’article 12-3(3) du Règlement et du point 4.2 du présent ordre, le leader ou le facilitateur de tout parti reconnu ou groupe parlementaire reconnu ou, en leur absence, le sénateur qu’ils ont désigné comme leur leader adjoint ou facilitateur adjoint, soient membres d’office;

4.2.la coordonnatrice législative du représentant du gouvernement ou l’agent de liaison du gouvernement soit membre d’office en l’absence du représentant du gouvernement;

Qu’il soit entendu que le présent ordre n’ait pas d’incidence sur les processus prévus au Règlement qui permettent de modifier la composition des comités, après la nomination de nouveaux membres d’un comité conformément au présent ordre.

— Honorables sénateurs, je propose la motion inscrite à mon nom appuyé, avec le consentement du Sénat, par les sénateurs Smith, Woo et Harder.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Le sénateur Day : Je vous remercie, chers collègues. Dans le Feuilleton, vous verrez une motion assez longue. Celle-ci a trait l’entente à laquelle sont parvenus les trois grands groupes : les sénateurs conservateurs, le Groupe des sénateurs indépendants et les sénateurs indépendants libéraux.

En relisant la motion en fin de semaine, j’ai vu qu’il y avait une partie qui ne correspondait pas exactement à l’entente. C’est un petit détail, et je fais appel à votre indulgence pour modifier le préavis de motion, honorables sénateurs.

Honorables sénateurs, conformément à l’article 5-10(1) du Règlement, je demande le consentement du Sénat pour que la motion soit modifiée comme suit :

Que, nonobstant les dispositions de l’article 12-2(5) du Règlement, pour le reste de la présente session, le Comité de sélection soit un comité permanent;

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs, pour modifier la motion?

Des voix : D’accord.

Le sénateur Day : Merci, chers collègues. Je vais maintenant faire mes commentaires afin que soient notés au compte rendu les événements des deux ou plutôt trois dernières semaines. Je parle des rencontres tenues jusqu’à tard dans la nuit avec les personnes que j’ai nommées et qui appuient cette motion.

Comme nous le savons tous, des discussions ont lieu depuis un bon moment concernant l’ordre sessionnel en vigueur depuis près de deux ans. Il venait à échéance à la fin d’octobre. Nous avons travaillé fort pour tenter d’en arriver à un nouvel ordre sessionnel ou à une version modifiée qui refléterait davantage les changements survenus au Sénat depuis le dernier ordre sessionnel. Nous en sommes finalement arrivés à une entente. Nous avons pris quelques jours de retard, alors il y a eu une interruption. Nous avons une entente écrite, signée par tous ceux qui ont participé aux négociations et il y a un préavis de motion qui reflète l’entente obtenue.

Nous avons commencé à planifier notre action au sujet de l’ordre sessionnel le 7 décembre 2016 et nous avons devant nous le résultat de tout le travail que nous avons accompli.

Je veux remercier les sénateurs Smith, Woo et Harder d’appuyer cette motion, parce que cela envoie le signal que les sénateurs sont unis et qu’ils reconnaissent l’importance d’un Sénat fonctionnel. Je crois que cela montre également que nous pouvons tous collaborer afin que le Sénat puisse remplir son rôle constitutionnel d’institution indépendante et importante au sein du Parlement du Canada.

J’aimerais commencer mon discours en vous expliquant l’évolution de tout le dossier entourant la composition des comités. Je crois qu’il est important que cela soit consigné au compte rendu. Nous ne souviendrons plus de toutes les choses qui se sont passées au Sénat dans un an, alors je crois qu’il est important que cette mise en contexte fasse partie à jamais des Débats du Sénat.

En juin 2016, les conservateurs et les libéraux indépendants ont convenu de céder l’une de leurs places au sein de chaque comité du Sénat afin que les nouveaux sénateurs nommés par le premier ministre Trudeau aient l’occasion de siéger aux comités.

Le 7 décembre 2016, alors que le nombre de nouveaux sénateurs était encore plus grand, le sénateur Carignan, appuyé par la sénatrice McCoy, le sénateur Harder et moi, a proposé avec succès une motion tendant à ajouter trois membres à chaque comité. De cette façon, les nouveaux sénateurs pouvaient rapidement intégrer les comités sans que des sénateurs plus expérimentés aient besoin de se retirer en plein milieu de leurs examens législatifs et de leurs études diverses.

Il a également été décidé à l’unanimité que les présidents et les vice-présidents ne changeraient pas pour toute la durée de l’ordre sessionnel en vigueur, et ce, pour les mêmes raisons que je viens d’invoquer. En général, chacune des trois nouvelles places dans les comités était attribuée aux membres du Groupe des sénateurs indépendants. Cette augmentation de la taille des comités était seulement valide pour une période temporaire. Cette période a pris fin il y a quelques jours, le 31 octobre. Si le Parlement avait été prorogé, cette période aurait pris fin encore plus tôt, mais il n’y a pas eu de prorogation.

Lorsque l’ordre sessionnel temporaire a pris fin le 31 octobre, nous étions confrontés au problème de choisir quels trois sénateurs seraient retirés de chaque comité pour que les comités reviennent à leur taille originale. Si nous avions tout simplement opté pour rétablir la composition des comités telle qu’elle était immédiatement avant l’adoption de l’ordre sessionnel de décembre, cela aurait fait en sorte que trois membres du Groupe de sénateurs indépendants auraient été retirés de chaque comité du Sénat, une solution qui n’était pas équitable.

Il a été suggéré que chaque groupe retire un de ses membres de chaque comité, pour que les proportions au sein des comités reflètent la répartition relative des sièges au Sénat. À l’heure actuelle, 94 sénateurs servent au Sénat, lequel compte 105 sièges. Ces 94 sénateurs sont répartis comme suit : 39 font partie du Groupe des sénateurs indépendants et représentent 41 p. 100 des sénateurs en poste; il y a 35 sénateurs conservateurs, ce qui correspond à 37 p. 100 des sénateurs en poste, 15 libéraux indépendants, soit 16 p. 100 des sénateurs en poste, et 5 sénateurs non affiliés, dont font partie le Président et le groupe du sénateur Harder.

(1850)

Cette suggestion mènerait aux résultats suivants. Dans les quatre comités comptant neuf membres, soit les Comités de la défense, des droits de la personne, des langues officielles et de sélection, il y aurait quatre sénateurs du Groupe des sénateurs indépendants. Voilà qui reflète autant que possible leur représentation parmi les sénateurs en poste, qui est de 41 p. 100, car leur proportion au sein de ces quatre comités équivaudrait à 44 p. 100.

Les conservateurs, qui ont 37 p. 100 des sièges occupés au Sénat, auraient quatre sénateurs au sein des comités comptant neuf membres, pour une proportion de 44 p. 100.

Les indépendants libéraux, qui représentent 16 p. 100 des sénateurs en poste, occuperaient 11 p. 100 des sièges au sein de ces quatre comités.

Nous n’avons pas pu reproduire mieux que cela la répartition du Sénat au sein des comités de neuf membres.

Passons maintenant aux 10 comités comptant 12 membres, qui seraient formés de 5 sénateurs du Groupe des sénateurs indépendants, de 5 sénateurs conservateurs et de 2 sénateurs indépendants libéraux. Le pourcentage des sénateurs du Groupe des sénateurs indépendants au sein du comité serait de 42 p. 100, comparativement à 41,5 p. 100 au Sénat, ce qui est assez proche. Pour les conservateurs, ce serait 42 p. 100 au comité comparativement à 37 p. 100 au Sénat, et, pour les indépendants libéraux, ce serait 12 p. 100 comparativement à 16 p. 100 au Sénat.

Je souligne que, pour tous les comités de 9 et de 12 membres, les indépendants libéraux seraient nettement sous-représentés alors que les conservateurs et les sénateurs du Groupe des sénateurs indépendants seraient légèrement surreprésentés par rapport à leur répartition actuelle au Sénat.

Les trois comités de 15 membres seraient formés de 6 sénateurs du Groupe des sénateurs indépendants, de 6 sénateurs conservateurs et de 3 sénateurs indépendants libéraux. Dans ce cas-ci, les indépendants libéraux se trouveraient à être surreprésentés, à 20 p. 100. Les conservateurs et les sénateurs du Groupe des sénateurs indépendants représenteraient respectivement 40 p. 100 de l’effectif de ces comités.

Comme vous pouvez le constater, il ne s’agit pas d’une science exacte, mais d’un très bon effort de la part des dirigeants de chaque groupe du Sénat pour en arriver à une distribution équitable des sièges au sein des comités. C’est ce dont nous avons convenu et c’est ce qui est proposé dans la motion.

La motion précise le nombre de places dans chaque comité qui sera accordé à chacun des groupes et caucus parlementaires selon que le comité en question compte 9, 12 ou 15 membres. Pour ce qui est du renouvellement des comités, la motion prévoit que tous les sénateurs qui font actuellement partie des comités cesseront d’en être membres, après quoi les comités seront renouvelés selon les chiffres que je viens de vous donner.

Comment ce processus se déroulera-t-il? Cela se trouve aussi dans la motion. À la fin de la journée le dimanche 19 novembre, qui marquera la fin de la relâche, tous les sénateurs cesseront d’être membres des comités dont ils font partie. Ils seront immédiatement remplacés par d’autres sénateurs, selon les chiffres que je viens d’expliquer. Les noms des sénateurs choisis par les caucus et les groupes parlementaires pour faire partie de tel ou tel comité seront fournis aux greffiers concernés avant cette date. Le greffier de chaque comité recevra ainsi le nom des sénateurs indépendants, conservateurs et libéraux indépendants qui en seront membres. De cette façon, les greffiers sauront tout de suite qui fera partie du comité dont ils ont la charge. C’est ce qui se produira si vous adoptez cette motion, ce que j’espère que vous ferez. C’est ainsi que les choses vont se passer.

Les noms des sénateurs qui feront partie de chaque comité devront être transmis au greffier concerné avant le dimanche 19 novembre, c’est-à-dire à la fin de la semaine de relâche. Ce serait donc bien si tout était réglé dès cette semaine. De cette façon, les greffiers pourront profiter du fait que nous sommes dans nos circonscriptions pour voir aux préparatifs et, lorsque nous reviendrons, le 20 novembre, les comités pourront s’organiser et déterminer qui en seront les président et vice-président.

L’année prochaine, en septembre 2018, la composition de tous les comités sera examinée pour faire sorte que les proportions des groupes ne changeront pas à la suite de nouvelles nominations ou de départs à la retraite.

Selon moi, la motion établit un équilibre juste et équitable entre tous les groupes et tous les caucus au sein de tous les comités au cours de la prochaine année. Cela permettrait aux comités de fonctionner normalement puisqu’ils retrouveront leur taille originale, comme le prévoit le Règlement du Sénat. Je crois qu’il s’agit d’une solution raisonnable à un problème qui aurait pu entraîner de graves conséquences dans les semaines à venir.

Je devrais également expliquer que, en raison de l’arrivée de multiples groupes et caucus au Sénat, cette motion propose également que la pratique de longue date de la Chambre des communes qui consiste à nommer deux vice-présidents des comités soit adoptée au Sénat également. Comme c’est le cas pour les comités de la Chambre des communes, si les comités du Sénat ont deux vice-présidents égaux, cela ferait en sorte qu’il y ait un équilibre au sein du comité directeur, et offrirait particulièrement aux nouveaux sénateurs l’occasion d’acquérir de l’expérience en ce qui concerne la direction et les responsabilités des comités. La nomination de deux vice-présidents égaux au sein des comités, lesquels travailleraient avec le président au comité directeur, nous aiderait à gérer la transition que nous vivons actuellement.

Cette pratique d’avoir deux vice-présidents égaux au sein des comités à la Chambre des communes s’est révélée efficace pour répondre aux besoins légitimes des différents groupes et pour rendre les comités plus efficients. Honnêtement, même si j’aurais préféré que tous les comités du Sénat aient deux vice-présidents égaux comme c’est le cas à la Chambre des communes, pour l’instant nous n’avons pu nous entendre que sur ceux qui sont nommés dans la motion. Il y a 10 ou 11 comités mentionnés dans la motion, donc nous sommes d’accord pour ceux-là. Nous allons observer attentivement comment cela se passe et possiblement trouver une façon d’intégrer cette nouvelle mesure dans le Règlement en temps voulu si nous estimons qu’elle a été un succès.

Je reconnais que des négociations peuvent être considérées comme étant réussies non pas lorsque chacun a obtenu tout ce qu’il voulait, mais bien lorsque tous s’entendent pour dire que des progrès ont été faits. En l’occurrence, j’estime que cette proposition concernant les vice-présidents représente un réel progrès.

Enfin, je fais remarquer que ma motion ne dit mot sur les présidents de comités. S’il en est ainsi, c’est parce que l’article 12-13 du Règlement dit que, dès que les circonstances le permettent, le comité est convoqué en séance d’organisation afin d’élire son président. C’est exactement ce qui se produira si la motion est adoptée. Des réunions auront lieu et les comités éliront leurs présidents et coprésidents.

Il va sans dire que les dirigeants des caucus et des groupes parlementaires ont déjà eu des discussions sur les présidents de comités. De telles discussions se sont toujours tenues, elles n’ont rien de nouveau, mais elles se déroulaient traditionnellement à l’ouverture d’une session parlementaire. Si cette fois-ci elles ont lieu au beau milieu de la session, c’est à cause des circonstances particulières dans lesquelles nous nous trouvons. Comme par le passé, cependant, nous avons su nous accorder sur la question des présidents de comités.

(1900)

Il s’agit d’une entente entre les leaders concernant le groupe ou caucus d’où serait issu le président de chacun des comités. Il revient maintenant à chaque groupe ou caucus de décider lequel de ses membres qui fait partie du comité sera nommé président, et les postes de vice-présidents seront occupés par des membres des autres groupes ou caucus. Dix comités auront deux vice-présidents.

Ce processus d’élection est conforme au Règlement et à l’entente qui a été conclue par les différents leaders. Cette façon de faire a fonctionné par le passé, et je suis convaincu qu’elle fonctionnera encore. Nous suivrons le processus qui a été convenu.

Même si les comités ont toujours été maîtres d’élire qui ils voulaient parmi leurs membres, ces élections découlaient toujours de recommandations faites aux membres des comités par leur équipe respective. L’objectif de ces recommandations était d’assurer un équilibre global entre les sexes, les langues parlées et les régions représentées au sein des comités.

Cet objectif, cet équilibre global, est plus difficile à atteindre si chaque comité prend ses décisions en vase clos. Voilà pourquoi cette pratique a été instaurée. Elle a bien fonctionné par le passé, chers collègues, et je suis d’avis que l’entente à laquelle nous sommes arrivés au sujet des présidents des comités est juste et équitable.

Si les sénateurs ont des questions à propos de qui devrait présider tel ou tel comité, ils devraient s’adresser aux leaders de leur group ou caucus, car nous avons convenu que ce serait la façon de procéder.

Chers collègues, je tiens à remercier tous ceux qui ont travaillé inlassablement pour arriver à cette entente. Il s’agit d’un ordre sessionnel. Ce n’est pas une modification du Règlement, mais c’est plutôt un cadre que nous suivrons jusqu’à ce qu’un ajustement soit fait en août ou en septembre de l’an prochain, puis nous continuerons ainsi jusqu’à la fin de la présente législature.

Chers collègues, je vous demande d’appuyer cette motion et de bien comprendre comment nous en sommes arrivés à cette entente.

L’honorable Claudette Tardif : Mon honorable collègue accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Day : Avec plaisir. Je vous remercie.

La sénatrice Tardif : Merci de vos explications concernant l’évolution de la composition des comités et la façon dont les trois leaders ont travaillé ensemble pour parvenir à cette entente. Ma question porte sur la motion elle-même, qui fait mention de 10 comités qui auront deux vice-présidents jusqu’à la fin de la présente session. Les sept autres comités n’auront qu’un seul vice-président. Ce sont les comités suivants : peuples autochtones; agriculture et forêts; banques et commerce; énergie, environnement et ressources naturelles; affaires étrangères et commerce international; langues officielles; pêches et océans.

Pour quelle raison certains comités auront-ils un deuxième vice-président, mais pas les autres? Certains comités auront donc un deuxième vice-président, qui aura droit à un remboursement, mais pour d’autres comités, le troisième membre du comité directeur n’aura pas droit à un remboursement. Trouvez-vous que c’est une façon juste et équitable de procéder?

Le sénateur Day : Non. Cela dit, comme c’est souvent le cas lorsqu’on en vient à une entente, il fallait faire un compromis. Il y a eu de nombreuses propositions différentes. Au début des négociations, mon point de vue était que tous les comités devraient avoir deux vice-présidents égaux, comme les comités de la Chambre des communes. Certaines personnes autour de la table ne voulaient pas de vice-présidents du tout. Nous avons trouvé un compromis.

Je n’essaierai pas de vous convaincre que c’est une décision qui repose sur une logique à toute épreuve. Beaucoup de facteurs ont été pris en considération, et j’inclus là-dedans qui occuperait quel poste et quel groupe ou caucus présiderait quel comité.

Plusieurs ententes spéciales ont été conclues pour accommoder certaines personnes ou certains objectifs. Le résultat est que nous allons mettre cette idée de vice-présidents à l’essai. J’espère que cela fonctionnera comme à la Chambre des communes et que nous allons étendre cette règle à tous les comités.

En attendant, c’est l’entente que nous avons réussi à conclure, et je conviens que c’est parfaitement injuste pour les comités qui n’ont qu’un seul vice-président. Le troisième membre du comité directeur n’aura pas droit à un remboursement, mais pour les comités qui auront deux vice-présidents, les deux auront droit à un remboursement. C’est injuste, mais c’est le résultat du compromis auquel nous en sommes arrivés.

L’honorable Larry W. Smith (leader de l’opposition) : J’aimerais ajouter quelque chose à ce que vient d’expliquer le sénateur Day. Je n’entrerai pas trop dans les détails, mais je tiens à le féliciter ainsi que ses représentants, les sénateurs Mercer et Downe. Je remercie également le sénateur Woo et la sénatrice Saint-Germain, de même que notre groupe, composé des sénateurs Plett et Wells et de moi.

Ce n’était pas une question facile à régler, parce qu’on parle ici de deux partis qui ont toujours fait les choses d’une certaine façon tout au long de notre histoire. Et maintenant, un nouveau groupe s’est ajouté. Nous voulons témoigner tout le respect possible au nouveau groupe, et nous sommes conscients du fait que celui-ci sera le plus nombreux à l’avenir et qu’il mérite d’être respecté et de jouer un rôle important dans le fonctionnement des comités.

C’est ce principe qui a guidé nos efforts. Les négociations n’ont pas été faciles. Par contre, l’aspect le plus intéressant est que nous avons appris à mieux nous connaître et à prendre conscience de la flexibilité dont a fait preuve chacun des trois groupes pour en arriver à cette entente.

Je remercie les groupes, des libéraux indépendants au Groupe des sénateurs indépendants et, bien entendu, les sénateurs de notre caucus. En fin de compte, il faut reconnaître que, dans des négociations, on n’obtient jamais tout ce qu’on veut. Quand on a des attentes réalistes, on obtient habituellement des résultats réalistes.

Nous avons une entente selon laquelle la composition des comités, leurs membres, sera maintenue jusqu’au mois de septembre prochain, puis les postes de président et de vice-président seront occupés jusqu’à la fin de la législature. Cela donnera aux gens le temps de s’établir et nous donnera la possibilité de voir comment les postes de vice-présidents qui agissent concurremment fonctionnent.

Comprenez que nous partons de zéro en ce qui concerne les vice-présidents qui agissent concurremment. Ce poste a évolué au fil du temps à mesure qu’on a pris conscience des avantages qu’il y avait à ce que cette formule fonctionne. C’est un ballon d’essai, en quelque sorte, mais cela montre qu’on y croit suffisamment pour modifier substantiellement sa façon de penser.

(1910)

Je remercie tous ceux qui ont participé aux discussions. Au bout du compte, nous travaillons tous pour le Canada. Je vous remercie sincèrement de votre participation.

L’honorable Yuen Pau Woo : Je joins ma voix à celle du sénateur Smith pour féliciter le sénateur Day pour cette motion et pour ses explications claires, pointues et exhaustives.

J’aimerais exprimer brièvement mon appui et celui du Groupe des sénateurs indépendants à l’égard de la motion. Comme le sénateur Day l’a mentionné et comme le sénateur Smith l’a souligné, la motion est le reflet d’une entente conclue au bout de nombreuses heures de discussions et de plusieurs longues nuits de négociations. Le représentant du gouvernement au Sénat, Peter Harder, a également donné son soutien moral à cette entente, et je tiens à souligner le rôle qu’il a joué pendant les négociations. Je pense que le fait que les leaders et les coordonnateurs des quatre groupes se sont entendus et que trois d’entre nous appuyons la motion du sénateur Day montre à quel point l’entente qui a été négociée jouit d’un appui collectif, même si nous avons tous l’impression que nous n’avons pas eu tout ce que nous voulions.

Cette entente, honorables sénateurs, marque selon moi un nouveau tournant dans la modernisation du Sénat. Elle consacre le principe de la proportionnalité dans la répartition des ressources et des responsabilités au Sénat et elle confirme la place des groupes parlementaires qui ne constituent pas des caucus politiques à titre de véritables acteurs au Sénat du XXIe siècle.

Je remercie le sénateur Day et le sénateur Smith de même que leur équipe de négociation respective du respect et de la collégialité dont ils ont fait preuve à l’égard de la sénatrice Saint-Germain et de moi, nous qui sommes des nouveaux venus dans cette enceinte. Je crois que nous avons tous été motivés d’abord et avant tout par la volonté de ne pas perturber les travaux du Sénat. Cette motion est le résultat de nos efforts, et j’ai hâte qu’elle soit mise aux voix et que nous l’adoptions à l’unanimité.

[Français]

L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Chers collègues, je souhaite à mon tour m’exprimer au sujet de la motion du sénateur Day concernant la composition des membres au sein des différents comités pour le reste de la session en cours.

Je suis très heureuse que les représentants des partis reconnus et des groupes parlementaires, tels qu’ils sont définis à l’annexe 1 du Règlement, en soient venus à une entente à ce sujet.

Comme vous le savez, tous les sénateurs aiment travailler au sein des comités, parce qu’ils peuvent y faire un travail personnel et s’y impliquer, et que des projets menés en collaboration par les différents groupes se réalisent.

Je tiens cependant à souligner certaines conséquences de cette motion que l’on ne peut passer sous silence. Soyez rassurés, je ne proposerai aucune modification à cette motion et je ne m’y opposerai pas, car il s’agit d’un ordre sessionnel qui est le fruit d’une entente entre les partis et les groupes reconnus.

Ainsi, je tiens à souligner que cette motion soulève des questions quant à un principe de base que l’on cherche à respecter dans le mode de fonctionnement du Sénat, soit celui de l’égalité entre les sénateurs. En effet, cette entente est muette quant au traitement des sénateurs non affiliés, actuels et futurs, qui ne peuvent siéger comme membres réguliers d’un comité sans devoir être affiliés à l’un des trois groupes. Je comprends que cette motion est le résultat de négociations qui ont privilégié le principe de proportionnalité par rapport à celui de l’égalité entre les sénateurs.

À ce chapitre, comme vous le savez tous, le nouvel article 12-1 du Règlement du Sénat prévoit que les sénateurs non affiliés seront traités comme un groupe à part entière au sein du Comité de sélection. Il reconnaît donc le droit par ricochet aux sénateurs non affiliés d’être membres réguliers d’un comité. Or, la motion n’en fait pas mention.

Je désire que la motion que nous allons adopter ne crée pas de précédent pour l’avenir et que, dans un avenir rapproché, tous les sénateurs soient traités de manière équitable, comme le prévoit le nouvel article 12-1 du Règlement du Sénat, car il est certainement dans l’esprit de la modernisation du Sénat que de traiter également tous les sénateurs.

[Traduction]

Après tout, un sénateur est un sénateur.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : L’honorable sénateur Day, avec l’appui des honorables sénateurs Smith, Woo et Harder, propose que, nonobstant toute disposition du Règlement... Puis-je me dispenser de lire la motion?

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion modifiée est adoptée.)

(À 19 h 16, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)

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