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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 42e Législature
Volume 150, Numéro 258

Le jeudi 6 décembre 2018
L’honorable George J. Furey, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 6 décembre 2018

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

L’École Polytechnique de Montréal

Commémoration de la tragédie—Minute de silence

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant que nous commencions, je vous invite à vous lever et à observer une minute de silence à la mémoire des victimes de la tragédie survenue le 6 décembre 1989 à l’École Polytechnique de Montréal.

(Les honorables sénateurs observent une minute de silence.)

Son Honneur le Président : Merci, chers collègues.


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

L’École Polytechnique de Montréal

La commémoration de la tragédie

L’honorable Rosa Galvez : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour commémorer la tragédie qui a eu lieu le 6 décembre 1989, à l’École Polytechnique de Montréal.

Il y a 29 ans, un homme s’est présenté à l’École Polytechnique dans le seul but de tuer des femmes, qu’il blâmait pour le rejet de sa demande d’inscription au programme. Ce jour-là, la vie de 14 femmes a été interrompue injustement beaucoup trop tôt, des femmes qui aspiraient à devenir ingénieures.

Le massacre de Polytechnique, en 1989, a mis en lumière la nécessité de faire tomber les barrières à l’égalité des sexes dans le monde du génie.

Chaque année, nous reconnaissons le 6 décembre comme étant la Journée internationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes. Chaque année, nous nous souvenons de la douleur que portent les femmes simplement pour être nées femmes. Toutefois, et surtout, chaque année, nous devons continuer d’agir activement afin d’évincer de nos sociétés la violence faite aux femmes et aux enfants.

Des liens se dessinent entre les auteurs de massacres qui utilisent des armes à feu. Ce sont souvent des hommes qui souffrent de troubles sociaux ou de maladies mentales, et qui ont malheureusement accès à des armes à feu. C’était le cas à l’École Polytechnique, en 1989; c’était également le cas à la mosquée de Québec, en 2017.

Aux États-Unis, il y a eu, en 2018 seulement, plus de 20 tueries dans des écoles qui ont été commises à l’aide d’armes à feu. Un certain fatalisme s’est emparé des Américains, qui considèrent de plus en plus ces décès comme normaux. Au Canada, nous devons faire différemment. À la suite de chacun de ces massacres, la collectivité se rassemble et se promet d’agir pour prévenir ces tragédies mortelles, et puis, comme si de rien n’était, nous continuons notre vie quotidienne en oubliant souvent l’urgence d’agir.

Afin de rendre honneur aux 14 femmes tuées en 1989 et à toutes les victimes de violence par arme à feu, il faut interdire l’accès aux armes à feu à ceux qui ont un historique de maladie mentale, de comportements violents et de criminalité. Il faut aussi bien encadrer la classification des armes à feu et les règles sur les armes à feu à autorisation restreinte. La présence d’armes à feu à autorisation restreinte est en hausse au Canada. Qu’attendons-nous pour nous attaquer à ce problème? Le projet de loi C-71 est une réponse à notre portée au problème d’augmentation des incidents mortels qui impliquent des armes à feu.

Honorables sénateurs, n’attendons pas que 14 autres femmes rejoignent les victimes de l’École Polytechnique dans l’historique des vies innocentes qui ont été perdues aux mains de tueurs armés.

Nous nous souviendrons d’elles.

Je vous remercie.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

Visiteur à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de l’honorable Jackson Lafferty, Président de l’Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

(1340)

Son Altesse l’Aga Khan

Félicitations à l’occasion de son quatre-vingt-deuxième anniversaire de naissance

L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, le jeudi 13 décembre, plus de 15 millions de musulmans ismaéliens vivant dans 25 pays du monde célébreront le 82e anniversaire de Son Altesse Karim Aga Khan.

Née en 1936 à Genève, en Suisse, Son Altesse a succédé à son grand-père à titre de 49e chef spirituel des musulmans ismaéliens à l’âge de 20 ans seulement.

Pendant plus de six décennies, Son Altesse l’Aga Khan a travaillé sans relâche pour créer un monde meilleur pour tous. Son Altesse s’efforce depuis 60 ans d’assurer l’éducation des filles et l’égalité des sexes, et continue de travailler fort pour garantir le bien-être des filles et des femmes.

On m’a demandé récemment comment j’ai été inspirée par Son Altesse sur les plans personnel et professionnel. Je me suis rapidement rendu compte que je dois toutes mes convictions et toutes mes réalisations aux leçons et aux sacrifices de Son Altesse l’Aga Khan.

Honorables sénateurs, j’ai été nommée au Sénat du Canada en 2001 par le premier ministre de l’époque, le très honorable Jean Chrétien. Lorsque j’ai été nommée, je suis devenue la première personne née en Afrique à siéger au Sénat, la première personne de confession musulmane et aussi la première d’origine sud-asiatique. Il s’agit de beaucoup de premières. Je crois sincèrement que tout cela aurait été impossible, n’eût été de l’importance accordée par Son Altesse le prince Karim Aga Khan, et par son grand-père avant lui, à l’éducation des filles.

L’Aga Khan a investi dans plus de 200 écoles primaires et secondaires au Pakistan, en Inde, au Bangladesh, au Kenya, au Kirghizistan, en Ouganda, en Tanzanie et au Tadjikistan. J’ai personnellement reçu une éducation de premier ordre à Kampala, en Ouganda, dans la prématernelle et les écoles primaires et secondaires de l’Aga Khan.

Honorables sénateurs, nous avons tous énormément de chance. Nous vivons à l’époque du mouvement #MoiAussi et des manifestations pour les droits des femmes. Aujourd’hui, le renforcement du pouvoir des femmes est un sujet sur lequel les politiciens font campagne et les vedettes de la musique pop écrivent des chansons. On oublie que, s’il est tout à fait normal pour les femmes de s’instruire de nos jours, il en était tout autrement il y a 62 ans.

À l’occasion de son 82e anniversaire, j’aimerais remercier Son Altesse l’Aga Khan des énormes sacrifices qu’il a faits pendant sa vie pour les musulmans ismaéliens et pour des gens du monde entier, surtout pour les plus vulnérables de la planète.

Je veux dire à Son Altesse que je n’aurais pas l’honneur et le privilège de prendre la parole dans cette enceinte si ce n’était du fait qu’il croyait en l’éducation des femmes et qu’il y a investi.

Honorables sénateurs, je vous invite à vous joindre à moi pour souhaiter un bon anniversaire à un de nos citoyens honoraires, Son Altesse l’Aga Khan.

Sur une note personnelle, mesdames et messieurs les sénateurs, comme vous le savez, je mène actuellement un combat et je sais que celui-ci serait beaucoup plus ardu si vous n’étiez pas tous là pour m’épauler. Je ne saurais trop vous remercier, Votre Honneur et chers collègues, de vos nombreux appels, des nombreuses notes que vous m’avez envoyées et de l’amour que vous me transmettez aujourd’hui dans cette enceinte. Tout ce que je peux dire, humblement, c’est merci de votre amour, de votre soutien et de votre amitié. Cela m’aidera dans ma lutte. Merci beaucoup.

Des voix : Bravo!

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de l’ambassadeur Maeng-ho Shin et d’une délégation formée de vétérans, de militaires et de dirigeants communautaires de la Corée et du Canada. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Martin.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Les héros méconnus du Canada et de la Corée

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. » Jean, chapitre 15, verset 13.

Ce sont la version révisée de la Bible du roi Jacques et le dictionnaire anglais-coréen que possédait le Dr Gale qui ont permis à mon père de garder espoir et de croire fermement en ses rêves, même lorsque, jeune homme, il a été opprimé pendant le régime colonial et qu’il s’est senti inférieur à cause de son origine ethnique.

Honorables sénateurs, l’année 2018 marque le 130e anniversaire de naissance du premier des héros canadiens méconnus à avoir foulé le sol coréen. Le 1er mars 2019 marquera le 100e anniversaire du mouvement d’indépendance du peuple coréen. Ce jour fatidique, des Coréens sont descendus dans la rue, et des milliers de manifestants pacifiques ont été tués.

Le Dr Francis Schofield est un Canadien qui a risqué sa vie pour documenter, à l’aide de photos et d’écrits, ce qui s’est passé ce jour-là, ainsi que pendant les semaines qui ont suivi. Il est le seul ressortissant étranger qui a été enterré au cimetière national de Corée, et ce, en tant que 34e patriote de ce pays.

Honorables sénateurs, l’année 2018 marque aussi le 65e anniversaire de l’armistice de la guerre de Corée et la cinquième Journée des anciens combattants de la guerre de Corée, dont la proclamation a reçu l’appui unanime du Sénat et de l’autre endroit en 2013. Les parlementaires ont pris cette décision, car, après six décennies, il était plus que temps de rendre hommage aux héros canadiens méconnus de la guerre de Corée, et de souligner leur service et leur sacrifice incommensurables. Grâce à leur amour pour la Corée et son peuple, on peut espérer que la paix arrive enfin dans la péninsule coréenne et que les rêves de mon père deviennent réalité.

La Corée d’aujourd’hui et les excellentes relations bilatérales que nous entretenons avec elle depuis maintenant 55 ans témoignent des services rendus et des sacrifices consentis par les Canadiens en Corée. Ces derniers ont donné leur vie pour de parfaits étrangers, comme mes parents et leurs contemporains — dont certains sont au Sénat aujourd’hui —, et leurs descendants, comme moi et d’autres ici présents. Ils ont droit à toute notre reconnaissance, car nous leur devons notre vie et la Corée d’aujourd’hui.

Depuis la mise en place historique de l’Accord de libre-échange Canada-Corée, le 1er janvier 2015, les exportations canadiennes en Corée ont augmenté de plus de 35 p. 100, pour atteindre 5,3 milliards de dollars en 2017.

Sous le leadership très habile de l’ambassadeur Maeng-ho Shin, de même qu’avec l’aide de la communauté canado-coréenne du Canada et de ses représentants, l’année 2019 et l’avenir sont, effectivement, plus prometteurs.

Honorables sénateurs, je vous invite à vous joindre à moi pour reconnaître les héros méconnus de la guerre de Corée et les héros méconnus de la communauté coréenne d’un bout à l’autre du Canada. Merci. Gumsahumneeda.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de représentants du conseil scolaire régional de district de Waterloo, ainsi que d’une représentante de l’International Women’s Forum. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Deacon (Ontario).

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune d’un groupe d’invités de l’honorable sénateur Boisvenu.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

L’École Polytechnique de Montréal

La commémoration de la tragédie

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Honorables sénateurs, aujourd’hui, le drapeau du Canada est en berne sur la Colline du Parlement pour souligner un jour important dans le cœur de toutes les victimes, la Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes.

Le 6 décembre sera toujours une journée très émouvante pour tous les proches des personnes disparues ou assassinées, en particulier les femmes. Ce jour fait résonner beaucoup de peine, de souffrance et de larmes. Pour moi, c’est un jour à la fois amer et plein d’espoir; amer, parce qu’il y a tant de travail à faire encore. Aujourd’hui, ces familles qui m’accompagnent, dont un proche a été assassiné, sont sorties du silence et ont repris le pouvoir sur leur vie. Elles ont repris le pouvoir sur les criminels. En commémorant la mort des victimes de 1989 de l’École Polytechnique de Montréal, nous nous souvenons de toutes les femmes qui ont été assassinées parce qu’elles étaient des femmes.

Au Québec, chaque année, nous vivons une « Polytechnique ». Chaque année, 15 femmes se font assassiner par leur ex-conjoint ou leur conjoint, mais peu attirent l’attention, comme dans le cas des événements de Polytechnique.

Ce jour en est aussi un d’espoir. C’est l’occasion pour les femmes et les filles de sortir de l’ombre, de prendre la parole et de demander des changements. Depuis ma nomination au Sénat, j’ai eu la chance d’étudier plusieurs projets de loi qui visaient à renforcer les droits des victimes. Je songe notamment à la Charte canadienne des droits des victimes, que l’Association des familles des personnes assassinées et disparues, dont les membres sont ici aujourd’hui, réclamait depuis plusieurs années. Je suis à même de vous dire que cela a été un long et difficile combat. Comme je l’ai dit souvent, les victimes ne subissent pas seulement de la violence; elles doivent endurer les longs délais du système de justice et, dans certains cas, un manque de sensibilisation de la part de la magistrature. Nos lois ne sont pas adaptées aux victimes. Elles sont adaptées aux criminels.

(1350)

En cette Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes, je vous invite, toutes et tous, à réfléchir. Écoutons-nous suffisamment les victimes? Leur accordons-nous suffisamment de crédibilité lorsqu’elles expriment leur désir de faire modifier certaines de nos lois? Les invitons-nous assez régulièrement à venir témoigner devant nos comités? Prenons-nous sérieusement en considération leurs besoins lors de l’étude de nos projets de loi?

À toutes les jeunes filles et à toutes les femmes, je dis aujourd’hui merci. Merci de porter le flambeau de l’espoir et du courage. Merci de le porter aujourd’hui, demain et pour toujours.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de l’honorable Paul Davis, ancien premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador. Il est l’invité de l’honorable sénateur Ravalia.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de M. John Ajaka, président du Conseil législatif de Nouvelle-Galles du Sud, et de M. Mark Webb, administrateur général du Parlement de Nouvelle-Galles du Sud.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

La commémoration du centenaire de l’armistice de la Première Guerre mondiale

L’honorable Gwen Boniface : Honorables sénateurs, le mois dernier, j’ai eu le grand plaisir de me rendre à Mons, en Belgique, pour assister, en compagnie d’une délégation d’anciens combattants, aux cérémonies marquant le centenaire de l’offensive des 100 jours du Canada et la fin de la Première Guerre mondiale.

La délégation canadienne, dirigée par l’honorable Seamus O’Regan, était composée d’anciens combattants, de jeunes et de parlementaires. Nous avions l’immense privilège de compter parmi nous George Barkhouse, le neveu du simple soldat George Price, qui fut le dernier soldat canadien à mourir pendant la Première Guerre mondiale, deux minutes avant que la paix soit déclarée. Les efforts des Canadiens et des Terre-Neuviens au cours des 100 derniers jours de la guerre ont contribué à ramener la paix dans le monde, mais ce fut à un coût énorme. La ville belge de Mons avait été occupée pendant 50 mois avant d’être libérée par les soldats canadiens.

Ces Canadiens auraient été extrêmement fiers de recevoir un accueil aussi chaleureux que celui qui a été réservé à la délégation. Je songe notamment à la visite d’une école, à l’occasion de laquelle des élèves ont chanté l’Ô Canada et ont laissé s’envoler des ballons rouges et blancs, et à l’inauguration d’un monument à la mémoire du simple soldat George Price.

J’ai eu l’insigne privilège de visiter le monument de Vimy. C’était la première fois que je m’y rendais, mais sûrement pas la dernière. La cérémonie à la chandelle qui s’y est déroulée se voulait un hommage spécial aux héros canadiens tombés au combat, et incluait une cérémonie autochtone à caractère spirituel et une danse, de même qu’une projection animée de quelque 66 000 coquelicots et feuilles d’érable à la mémoire des Canadiens et des Terre-Neuviens qui ont perdu la vie pendant la Première Guerre mondiale.

Le dernier jour du voyage, la délégation canadienne a été invitée à la Parade de la libération, qui s’est tenue sur la Grand-Place de Mons. Pour l’occasion, le beffroi de Mons était illuminé de rouge et de blanc, et les balcons étaient ornés de drapeaux canadiens.

Honorables sénateurs, ce fut un moment touchant pour les Canadiens présents. Cette commémoration m’a également fait vivre une expérience très personnelle. Mon arrière-grand-père, Edwin Grimm, s’est battu dans les rangs de l’armée britannique non loin de Mons. À l’exception de quelques soldats, son bataillon au complet a été décimé. Il a immigré au Canada après la guerre, mais il était facile de voir que la guerre n’a jamais cessé de le hanter. Ce n’est qu’au courant des dernières décennies que nous avons réellement pris conscience des graves séquelles que la guerre qui devait mettre fin à toutes les guerres a laissées aux soldats.

Le Canada a perdu 66 000 soldats durant la Première Guerre mondiale, mais lui et ses alliés en ont perdu bien d’autres en raison de ce qu’on appelle aujourd’hui le trouble de stress post-traumatique. En assistant à cette commémoration solennelle dans une ville aussi magnifique qu’accueillante, je me suis rappelée de ceux que nous avons perdus et de ceux qui sont revenus à la maison, eux aussi perdus.

N’oublions jamais.

Des voix : Bravo!

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Caroline Stevens, de Pat Moors et de Carol Rydzkowski. Elles sont les invitées de l’honorable sénateur Marwah.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


[Français]

AFFAIRES COURANTES

Projet de loi sur la modernisation des élections

Projet de loi modificatif—Présentation du vingt-neuvième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

L’honorable Serge Joyal, président du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant :

Le jeudi 6 décembre 2018

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l’honneur de présenter son

VINGT-NEUVIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-76, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et d’autres lois et apportant des modifications corrélatives à d’autres textes législatifs, a, conformément à l’ordre de renvoi du mercredi 7 novembre 2018, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport avec la modification suivante :

1.Article 223, page 119 : Remplacer la ligne 14 par ce qui suit :

« de publicité, de publicité électorale ou de sondage électoral. ».

Votre comité a aussi fait certaines observations qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,

SERGE JOYAL

(Le texte des observations figure à l’annexe des Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 4172.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Joyal, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

Le Budget des dépenses de 2018-2019

Le Budget principal des dépenses—Dépôt du trente-sixième rapport du Comité des finances nationales

L’honorable Percy Mockler : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le trente-sixième rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales intitulé Deuxième rapport intérimaire sur le Budget principal des dépenses 2018-2019. Je propose que l’étude du rapport soit inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.

(Sur la motion du sénateur Mockler, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

Projet de loi de 2018 sur la convention fiscale Canada-Madagascar

Présentation du vingt-deuxième rapport du Comité des affaires étrangères et du commerce international

L’honorable A. Raynell Andreychuk, présidente du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, présente le rapport suivant :

Le jeudi 6 décembre 2018

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international a l’honneur de présenter son

VINGT-DEUXIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi S-6, Loi mettant en œuvre la Convention entre le Canada et la République de Madagascar en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu, a, conformément à l’ordre de renvoi du mardi 20 novembre 2018, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement, mais avec des observations qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

La présidente,

A. RAYNELL ANDREYCHUK

(Le texte des observations figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 4161.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Harder, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

L’ajournement

Préavis de motion

L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au lundi 10 décembre 2018, à 18 heures;

Que les comités sénatoriaux devant se réunir ce jour-là soient autorisés à le faire afin d’étudier des affaires du gouvernement, même si le Sénat siège, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard;

Que, nonobstant les articles 9-6,9-10(2) et 9-10(4) du Règlement, si un vote est reporté à ce jour-là, la sonnerie d’appel pour le vote retentisse au début de l’ordre du jour, pour 15 minutes, le vote ayant lieu par la suite;

Que l’application de l’article 3-3(1) du Règlement soit suspendue ce jour-là;

Que le Sénat s’ajourne à la fin des Affaires du gouvernement ce jour-là.

(1400)

Projet de loi de crédits no 3 pour 2018-2019

Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu’il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-90, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l’administration publique fédérale pendant l’exercice se terminant le 31 mars 2019, accompagné d’un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-6(1)f) du Règlement, je propose que la deuxième lecture du projet de loi soit inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Sur la motion de la sénatrice Bellemare, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

L’Association parlementaire Canada-Europe

La session annuelle de l’Assemblée parlementaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, tenue du 7 au 11 juillet 2018—Dépôt du rapport

L’honorable Percy E. Downe : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation canadienne de l’Assemblée parlementaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (AP OSCE) concernant sa participation à la 27e session annuelle de l’AP OSCE, tenue à Berlin, en Allemagne, du 7 au 11 juillet 2018.

Finances nationales

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L’honorable Percy Mockler : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5a) du Règlement, je propose :

Que, pour les fins de son étude du projet de loi C-86, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en œuvre d’autres mesures, le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à se réunir, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)


[Français]

PÉRIODE DES QUESTIONS

Le Secrétariat du Conseil du Trésor

La prévention du harcèlement fondé sur le sexe en milieu de travail

L’honorable Renée Dupuis : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Le 6 décembre 2018, qui est la Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes, s’inscrit dans le cadre des 16 jours d’activisme contre la violence fondée sur le sexe, qui se déroulent du 25 novembre au 10 décembre.

Lors de sa 73e session, tenue le 19 novembre dernier, la Troisième Commission de l’ONU a adopté un projet de résolution pour l’Assemblée générale qui porte sur l’intensification de l’action menée pour prévenir et éliminer toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, y compris le harcèlement sexuel.

L’article 8 de ce projet de résolution indique, entre autres, ce qui suit, et je cite :

Exhorte les États à prendre des mesures efficaces pour prévenir et éliminer le harcèlement sexuel à l’égard des femmes et des filles, et à s’attaquer aux causes structurelles et profondes et aux facteurs de risque, notamment à :

a) Concevoir et mettre en œuvre des politiques nationales propres à transformer les comportements sociaux discriminatoires [...] ;

[...]

e) Élaborer, adopter, renforcer et appliquer une législation et des politiques qui traitent de la question du harcèlement sexuel de façon globale [...];

f) Intensifier les efforts déployés pour élaborer des politiques inclusives [... ] pour lutter contre les causes structurelles et profondes du harcèlement sexuel [...]

Monsieur le représentant du gouvernement au Sénat, pouvez-vous nous dire quelles sont les actions concrètes prises par les divers ministères fédéraux afin de s’attaquer aux causes structurelles de la violence faite aux femmes, y compris le harcèlement sexuel, et d’intensifier les efforts déployés jusqu’ici par l’adoption de politiques et de législations visant à éliminer ce type de violences?

[Traduction]

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénatrice de sa question. Elle me donne l’occasion de parler aux sénateurs des mesures prises non seulement par le gouvernement, mais aussi par le Parlement. Je pourrais mentionner, par exemple, le travail accompli par le Parlement du Canada dans le domaine du harcèlement en milieu de travail, l’une des formes que prend la violence qui cible souvent les femmes.

Je tiens aussi à souligner que le gouvernement s’est engagé à soumettre à une analyse comparative entre les sexes les projets de loi qui sont envisagés, débattus et mis aux voix dans les deux Chambres du Parlement, et qu’il concrétise son engagement. Cette perspective permet de mettre en lumière les enjeux structurels mentionnés dans la question de la sénatrice.

Il convient aussi de rappeler les effets pratiques et communicationnels de l’analyse comparative entre les sexes dans le contexte de l’aide au développement international. Dans ce domaine, le gouvernement a lancé et soutenu plusieurs projets internationaux qui visent fondamentalement à régler des situations trop fréquentes dans lesquelles les femmes et les filles sont les principales victimes d’une violence concertée menée par des protagonistes étatiques et non étatiques.

C’est un sujet dont nous avons déjà discuté à plusieurs reprises dans cette Chambre, où nous avons notamment parlé des Rohingyas et d’autres groupes. La ministre du Développement international a pris des engagements à ce chapitre au nom du Canada.

Je mentionnerai aussi le programme législatif de la ministre de la Justice, qui comporte plusieurs modifications au Code criminel visant à régler des problèmes structurels dans le code qui briment encore les femmes.

Je suis sûr que je pourrais en énumérer d’autres, mais je vais me contenter de souligner ces mesures et de profiter de l’occasion pour saluer le travail que font les sénateurs, plus particulièrement ceux qui se passionnent pour cet enjeu et qui encouragent les gouvernements à toujours aller plus loin.

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je m’excuse auprès du sénateur Smith, mais, au début de la période des questions, les greffiers au Bureau n’avaient pas reçu la liste des sénateurs qui souhaitent poser des questions. Comme tous les sénateurs le savent, la tradition dans cette assemblée veut que nous donnions la parole au leader de l’opposition en premier lieu pour les questions. Je présente donc mes excuses au sénateur Smith.

Projet de loi sur le moratoire relatif aux pétroliers

Les consultations menées auprès de la nation Nisga’a

L’honorable Larry W. Smith (leader de l’opposition) : Merci, Votre Honneur. Nous fournissons l’information de manière assidue, mais nous comprenons que, parfois, il peut arriver certaines choses.

Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat et concerne le projet de loi C-48, Loi sur le moratoire relatif aux pétroliers. Je pense qu’il s’agit d’une question importante, car, hier, j’ai été heureux de rencontrer des représentants de la nation Nisga’a de la côte nord de la Colombie-Britannique, soit Eva Clayton, présidente du gouvernement Nisga’a Lisims, et quatre autres personnes.

Les représentants de la nation Nisga’a ont indiqué sans ambiguïté qu’ils n’appuient pas — je le répète, ils n’appuient pas — le projet de loi C-48 dans sa forme actuelle. Ils ont notamment déploré le manque de consultations, l’absence d’une évaluation environnementale complète et les répercussions négatives sur leur développement économique futur. Ils croient également que, en imposant un moratoire relatif aux pétroliers, le gouvernement passe outre aux principes qui sous-tendent les traités et au droit à l’autodétermination, droit que le gouvernement prétend appuyer.

(1410)

Ce n’est pas dans un esprit belliqueux que je pose la question. J’ai été étonné par ces commentaires après avoir entendu le discours de l’honorable sénateur l’autre jour.

Comment le gouvernement réagit-il à la position de la nation Nisga’a sur le projet de loi C-48?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question, qui est bonne et légitime.

Je rappelle que le gouvernement a tenu de vastes consultations avec des groupes, collectivités et intervenants autochtones. Il a entendu leur point de vue par rapport au moratoire sur la circulation des pétroliers.

Je suis en mesure d’affirmer que, depuis janvier 2016, le gouvernement a tenu plus de 75 séances de discussions pour parler de l’amélioration de la sécurité maritime et officialiser le moratoire. Le gouvernement s’engage à poursuivre sa collaboration avec les groupes autochtones.

Je reconnais que la nation Nisga’a, qui n’est pas établie sur la côte comme telle, a une position différente de celle des communautés autochtones de la côte dont j’ai parlé dans mon discours et dont nous avons accueilli des représentants ici, au Sénat, l’autre jour.

Le sénateur Smith : Merci. Ils ont autorité sur l’une des plus grandes régions, qui comprend notamment la forêt pluviale de Great Bear. Le problème, c’est que les représentants de la nation Nisga’a nous ont dit, hier, qu’ils ne comprennent pas pourquoi leur région est visée par un moratoire relatif aux pétroliers, puisqu’il n’y a aucun moratoire de ce genre ailleurs dans le monde, tandis que les communautés autochtones établies plus au sud, sur la côte, et dans d’autres régions du pays, ne sont pas soumises à une telle mesure. Cette nation juge donc que cette proposition est discriminatoire et arbitraire, et qu’elle va complètement à l’opposé des garanties que vous avez données aux honorables sénateurs lors du discours que vous avez donné, mardi, à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi.

La nation Nisga’a craint de voir ses perspectives économiques s’effondrer si le projet de loi C-48 n’est pas amendé.

Pourquoi le gouvernement impose-t-il des exigences arbitraires? Il semble vouloir créer une division entre la côte sud et la côte nord de la Colombie-Britannique, de manière à préserver les débouchés économiques du Sud au détriment du Nord. C’est l’impression qu’ont ces gens.

Le sénateur Harder : Je remercie encore une fois le sénateur de sa question, car elle me permet de répéter ce que j’ai dit l’autre jour : la ligne tracée en 1985 n’a rien d’arbitraire. Au contraire, elle tient compte de la science des courants marins, de la proximité des équipes d’intervention et de la nature fragile de l’environnement dans la partie nord-est de la côte.

Comme je l’ai dit l’autre jour et comme je l’ai répété plusieurs fois depuis, le moratoire volontaire a été observé par de nombreux gouvernements et il a servi de point de départ à l’accord entre le premier ministre Mulroney et le président Reagan. De nombreux gouvernements ont choisi de le respecter.

Le gouvernement du Canada est d’avis qu’il doit être officialisé parce que d’aucuns réclament aujourd’hui qu’on revienne sur cette pratique de longue date, qui a pourtant fait ses preuves.

Pour ce qui est du développement économique, on m’a vanté — et les sénateurs qui étaient présents à cette rencontre l’ont entendu aussi — les mesures énergiques que prennent les Autochtones de la côte dans de nombreux domaines, comme la pêche, l’écotourisme et même la coupe de bois, là où c’est possible. Nous devons reconnaître la nature fragile de ce secteur marin, et c’est pour cette raison que le Sénat en débat.

Je sais que je pourrai compter sur la participation de l’honorable sénateur à ce débat.

L’honorable Nicole Eaton : Honorables sénateurs, ma question porte également sur la rencontre que nous avons eue avec des représentants de la nation Nisga’a. Ils sont d’avis que le projet de loi C-48, s’il est adopté, contreviendra directement à leurs droits constitutionnels ancestraux.

Sénateur Harder, dans le document que vous avez publié en avril dernier sur le rôle du Sénat, vous avez fait valoir que, dans le cadre de notre pouvoir de second examen objectif, nous avons le devoir d’être encore plus vigilants pour relever toute violation possible des droits constitutionnels par des dispositions contenues dans tout projet de loi provenant de l’autre endroit.

Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous exhortez vos collègues à adopter ce projet de loi alors que la nation Nisga’a pense qu’il représente une menace à ses droits constitutionnels ancestraux?

Le sénateur Harder : Je remercie l’honorable sénatrice de sa question et de son examen approfondi d’un document important.

En ce qui concerne la question posée, le gouvernement estime que le projet de loi ne viole pas les droits constitutionnels, qu’il est tout à fait conforme à ses obligations et qu’il est appuyé par les groupes autochtones locaux. Nous devrons bien sûr débattre de ces questions, y réfléchir et les examiner.

Mon objectif est de veiller à ce que toutes les voix soient entendues afin que nous puissions porter un jugement éclairé après un tel examen.

L’immigration, les réfugiés et la citoyenneté

Le pacte mondial pour les migrations

L’honorable Peter M. Boehm : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

Honorables sénateurs, la semaine prochaine, le Canada, qui sera représenté par le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, signera le pacte mondial pour les migrations, le premier accord de ce genre à fournir un cadre complet pour nous aider à relever l’un des plus grands défis de notre époque. Comme le précise le pacte, « […] aucun pays ne peut seul relever les défis que pose ce phénomène mondial ni saisir les occasions qu’il offre ».

À l’article 7 du pacte, on précise clairement que ce document n’est pas juridiquement contraignant. Puis, à l’article 15, on affirme qu’il « réaffirme le droit souverain des États de définir leurs politiques migratoires nationales et leur droit de gérer les migrations relevant de leur compétence, dans le respect du droit international ».

Maintenant que le Canada s’apprête à signer ce pacte la semaine prochaine au Maroc, est-ce que cela modifiera soudainement la politique d’immigration canadienne et la façon dont nous déterminons qui peut entrer dans notre pays?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. La réponse est, catégoriquement et évidemment, non. Le pacte mondial pour les migrations rassemble pour la toute première fois de nombreux pays et organismes importants qui prennent ainsi un engagements sur les graves problèmes de migration auxquels nous faisons face à l’échelle internationale. Il respecte pleinement la souveraineté des pays et appuie entièrement le genre de programmes que le Canada a adoptés pour gérer la détermination du statut de réfugié, la surveillance du choix des réfugiés et la migration régulière au moyen du système d’immigration.

Il incombe à tous les sénateurs d’en apprendre plus sur l’importance de cette mesure et sur ce qu’elle fait et ne fait pas.

J’ai été heureux ce matin, par exemple, quand un grand groupe représentatif de la société civile a envoyé un communiqué à tous les sénateurs. Je ne le lirai pas ici, mais c’est un groupe diversifié composé de Vision mondiale Canada, d’Oxfam, d’Aide à l’enfance, du Conseil canadien pour la coopération internationale et d’un certain nombre d’autres organismes qui appuient les mesures qui sont prises.

Bien que ce ne soit pas à moi de décider, je propose que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie entreprenne une étude de ce document, comme il n’est pas long, et qu’il invite des Canadiens à comparaître, peut-être même Chris Alexander, pour nous éclairer.

Les finances

La taxe sur le carbone pour les agriculteurs

L’honorable David Tkachuk : Ma question concerne la taxe sur le carbone du premier ministre, ainsi que le secteur agricole.

Le gouvernement a accordé des exemptions aux agriculteurs, certes, mais ces derniers craignent toujours que leurs coûts de production augmentent en raison de la taxe sur le carbone. Il y aura, par exemple, une hausse du coût des engrais et du transport.

La Saskatchewan Stock Growers Association affirme que la taxe sur le carbone fera grimper les coûts de transport du bœuf canadien à destination des marchés mondiaux et nuira ainsi à la capacité concurrentielle du Canada. De plus, l’organisation manitobaine Keystone Agriculture Producers souligne que le gouvernement fédéral n’accorde pas d’exemption pour les combustibles de chauffage d’installations pour le bétail ni pour les combustibles des séchoirs à grains.

Monsieur le sénateur Harder, pourquoi le gouvernement libéral accorde-t-il une exemption quasi totale de la taxe du carbone aux plus grands émetteurs industriels, mais pas aux agriculteurs?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie le sénateur de sa question.

Il ne fait aucun doute que le plan de tarification de la pollution du gouvernement du Canada est absolument nécessaire pour atteindre les objectifs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre qu’il s’est fixés. L’honorable sénateur saura que le programme en place respecte le pouvoir des provinces de décider de contribuer au cadre de travail ou non. Les recettes perçues dans un territoire ou une province qui choisit de ne pas prendre part au programme seront retournées à ce territoire ou à cette province. Cette mesure importante s’inscrit dans le projet de loi à l’étude au Sénat.

(1420)

L’honorable sénateur saura également que le gouvernement prend des mesures pour aider les exploitations agricoles et les autres petites entreprises à composer avec la tarification du carbone, car il s’agit d’une initiative importante qui, comme je l’ai dit, est au cœur des efforts du Canada en vue de réduire ses émissions de gaz à effet de serre.

Le sénateur Tkachuk : Nous devons émettre beaucoup de pollution dans cet endroit. Je ne comprends pas comment on peut appeler le CO2 de la pollution.

L’association des producteurs agricoles de la Saskatchewan a récemment annoncé qu’elle avait demandé le statut d’intervenant dans le renvoi à la Cour d’appel de la Saskatchewan sur la taxe sur le carbone. Hier, le gouvernement fédéral a fait valoir que la cour ne devrait pas accorder le statut d’intervenant à ce groupe, soutenant du même coup l’octroi d’un tel statut à des groupes financés à l’étranger tels que la Fondation David Suzuki et Environmental Defence.

Pourquoi le gouvernement estime-t-il que la cour ne doit pas entendre ce que les agriculteurs ont à dire à propos de la taxe sur le carbone, qui nuira à leur capacité de gagner leur vie?

Le sénateur Harder : Je crois que nous devrions tous convenir qu’il appartient aux instances judiciaires, et non au Sénat, de trancher ces questions.

Les institutions démocratiques

Les modifications à la Loi sur le Parlement du Canada

L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Elle concerne les déclarations répétées du gouvernement du Canada sur différentes tribunes quant à son intention de modifier la Loi sur le Parlement du Canada. Il y a quelques semaines à peine, le leader du Groupe des sénateurs indépendants, le sénateur Woo, qui représente le caucus des sénateurs nommés par le gouvernement, m’a envoyé une lettre, en ma qualité de président du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement, au sujet de l’importance et de la nécessité d’une refonte de la Loi sur le Parlement du Canada, ainsi que des différents changements qui s’imposent, selon lui. Je soupçonne qu’il a agi sous l’impulsion de l’intention affichée du gouvernement de modifier la Loi sur le Parlement du Canada.

Le leader du gouvernement peut-il nous assurer que le gouvernement ne modifiera pas la Loi sur le Parlement du Canada au moyen d’un projet de loi omnibus qu’il renverrait au Sénat du Canada?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Non.

Le sénateur Housakos : Monsieur le leader du gouvernement, est-ce « non », vous ne pouvez nous donner l’assurance que vous ne modifierez pas la Loi sur le Parlement du Canada au moyen d’un projet de loi omnibus, ou « non », vous ne modifierez pas la Loi sur le Parlement du Canada? Soyez plus précis.

Le sénateur Harder : Quelle est la question?

Le sénateur Housakos : La voici : le gouvernement du Canada va-t-il réviser la Loi sur le Parlement du Canada et la présenter dans une loi omnibus au Sénat du Canada?

Le sénateur Harder : C’est une question tout à fait hypothétique. Je ne peux pas, bien entendu, dire ce que le gouvernement va peut-être faire en ce qui concerne une mesure législative dont nous ne sommes pas encore saisis.

Son Honneur le Président : Sénateur Housakos, si vous avez une autre question complémentaire à poser, vous devrez attendre la prochaine série de questions, si nous avons le temps.

L’emploi, le développement de la main-d’œuvre et le travail

L’attestation exigée pour les emplois d’été

L’honorable Pamela Wallin : Honorables sénateurs, vous ne serez pas surpris d’apprendre que ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. J’aimerais vous poser une question à propos du programme Emplois d’été Canada et des critères discriminatoires d’admissibilité en ce qui a trait à ce programme. Selon ce que nous croyons comprendre, ces critères ont changé.

Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet? Selon les médias, les critères d’admissibilité ont fait l’objet de nouveaux changements, de manière à exclure tous les projets et emplois d’été visant à limiter l’accès des femmes à des services en matière de santé sexuelle et génésique et ainsi de suite.

Nous sommes censés obtenir plus de détails aujourd’hui. Pouvez-vous déposer ces documents au Sénat? Les demandes commencent un peu plus tard ce mois-ci, je crois. Pouvez-vous nous éclairer à ce sujet dès maintenant?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénatrice de poser cette question. Je me ferai un plaisir de déposer le document lorsqu’il sera disponible. Je m’y engage.

La sénatrice a sans doute entendu, dans des reportages diffusés par les médias, que le gouvernement a réévalué l’expérience de l’année dernière. Il a tiré une leçon des réactions à ce processus et il a entendu, de la part de certains, que l’attestation portait à confusion.

Le gouvernement entend, bien entendu, protéger la Charte des droits et libertés, et il prend des mesures en ce sens. Vous verrez l’attestation qui sera déposée pour simplifier le processus tout en assurant cette protection.

J’ajoute que le gouvernement a décidé de permettre les demandes de participation au programme Emplois d’été Canada pour tous les jeunes, et pas seulement pour ceux qui sont aux études.

Le Secrétariat du Conseil du Trésor

La prévention du harcèlement fondé sur le sexe en milieu de travail

L’honorable Marilou McPhedran : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Pour donner suite à la question de la sénatrice Dupuis, je suis ravie de constater que vous avez donné l’exemple de l’application de l’analyse comparative entre les sexes plus à toutes les mesures législatives pour montrer ce que le gouvernement accomplit. C’est tout à fait louable. Toutefois, il se trouve aussi que l’analyse comparative entre les sexes plus est gardée secrète.

Compte tenu des antécédents du Sénat quant à l’application de l’analyse comparative entre les sexes plus ainsi que d’un certain nombre d’amendements et de mesures législatives qui en ont découlé, pouvons-nous nous attendre à une plus grande transparence de la part du gouvernement relativement à l’analyse comparative entre les sexes plus que l’on applique aux mesures législatives?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Oui, bien sûr. En fait, lorsque le ministre des Finances était ici, il a expliqué que les conséquences dans différents domaines de l’analyse comparative entre les sexes étaient incluses dans les documents budgétaires qu’il a présentés.

Le point que vous soulevez est important. Le gouvernement tente de faire preuve d’une transparence accrue, de disposer de cette analyse pour des mesures législatives précises ou des interventions qu’il a faites tout en préservant adéquatement l’intégrité des documents du Cabinet et des conseils qu’on lui donne.

Voilà pourquoi, par exemple, dans sa déclaration sur le développement international, la ministre a parlé abondamment de l’incidence de l’analyse comparative entre les sexes plus sur le cadre stratégique du développement international, mais ce n’était pas le document dont le Cabinet était saisi. Ce qui est en jeu, c’est l’équilibre que l’on doit atteindre entre fournir les documents et préserver l’intégrité du système de détermination du Cabinet.

L’immigration, les réfugiés et la citoyenneté

Le pacte mondial pour les migrations

L’honorable Linda Frum : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

En réponse à la question du sénateur Boehm, vous avez dit que, en ce qui a trait au pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières les sénateurs gagneraient à bien s’informer sur les éléments qui se trouvent dans ce pacte et ceux qui ne s’y trouvent pas.

Voici un élément présent dans le pacte. Le paragraphe 33c) indique que les signataires du pacte devront :

Promouvoir une information indépendante, objective et de qualité, y compris sur Internet, notamment en sensibilisant les professionnels des médias aux questions de migration et à la terminologie afférente [...]

Les signataires ont également convenu de cesser d’allouer des fonds publics aux médias qui adoptent certaines positions par rapport à l’immigration.

Nous savons que le gouvernement Trudeau envisage d’accorder des fonds à certains médias, et qu’il examine à l’heure actuelle la manière de procéder. Sénateur Harder, les médias canadiens qui souhaitent recevoir des fonds du gouvernement fédéral seront-ils obligés de confirmer que leur ligne éditoriale en matière d’immigration reflète les positions de l’ONU et celles du gouvernement Trudeau?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vais devoir prendre cette question en délibéré, car, très honnêtement, je n’en ai aucune idée.

Cependant, je tiens à remettre l’article 33 du pacte dans son contexte. Nous convenons tous, j’en suis sûr, que, dans le contexte de la migration mondiale — et des mouvements migratoires qui s’effectuent relativement près de chez nous —, les faits sont très souvent déformés dans les médias — sans que je les qualifie de « fausses nouvelles » — et que, à certains endroits, l’enjeu de la migration déclenche des élans de nationalisme et un sentiment d’hostilité à l’égard de l’immigration. En effet, nous constatons que tout cela participe à la persécution des minorités dans différentes régions du monde.

La sénatrice Frum : Comme nous le savons, ce pacte sera signé la semaine prochaine. Le gouvernement prévoit-il sensibiliser et informer les médias au sujet des questions d’immigration?

(1430)

Le sénateur Harder : Le pacte sera signé. Comme le Canada est un chef de file dans le domaine de la migration et de l’immigration, le gouvernement a déjà mis en place un vaste éventail de mesures en conformité avec ce pacte. Le gouvernement du Canada continuera de trouver des manières de mettre en œuvre les dispositions de celui-ci.

En ce qui concerne l’article 33, le gouvernement travaille sans cesse avec les médias pour que ces derniers comprennent mieux les questions liées à la migration, à l’immigration et à la détermination du statut de réfugié, non seulement au Canada, mais dans le monde entier. Je songe, par exemple, au travail qui a été réalisé dans le dossier des Rohingyas.

[Français]

Les affaires étrangères et le commerce international

L’Accord Canada—États-Unis—Mexique

L’honorable Claude Carignan : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Selon l’article 19.17 du nouvel Accord de libre-échange Canada—États-Unis—Mexique, que le premier ministre Justin Trudeau a récemment signé, il est prévu que des entreprises comme Facebook et Google ne pourront plus être tenues responsables du contenu diffamatoire qu’elles publient si elles ne l’ont pas préparé elles-mêmes.

Le gouvernement vient donc discrètement de changer les règles du droit canadien en matière de libelle et il encourage ainsi la propagation de fausses nouvelles.

Sénateur Harder, comment justifiez-vous ce nouveau cadeau que le gouvernement offre aux géants du Web?

[Traduction]

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de la question. Il n’est pas sans savoir que l’accord qui vient d’être signé fera l’objet d’un examen approfondi et d’une surveillance législative.

Comme l’a fait le premier ministre Mulroney dans son merveilleux hommage à George H.W. Bush hier, je voudrais souligner le travail des négociateurs des trois parties, qui a mené à la modernisation et à l’amélioration de l’accord.

[Français]

Le sénateur Carignan : Ces félicitations n’étaient certainement pas destinées au gouvernement Trudeau. Pouvez-vous nous dire si, avant d’être négociée, cette clause a fait l’objet de consultations préalables, notamment auprès d’organismes comme le Barreau du Québec, l’Association du Barreau canadien et d’autres associations en ce qui concerne l’exclusion de la responsabilité civile des géants du Web?

[Traduction]

Le sénateur Harder : Je signale au sénateur que, tout au long de cette longue période de négociations, le gouvernement du Canada, plus particulièrement la ministre Freeland et les négociateurs, ont entretenu des rapports étroits et presque constants avec divers groupes d’intervenants.

Pour ce qui est des dispositions auxquelles l’honorable sénateur fait allusion, je vais m’informer de la nature exacte de ces engagements.

Les institutions démocratiques

Les modifications à la Loi sur le Parlement du Canada

L’honorable Leo Housakos : Monsieur le leader du gouvernement, j’aimerais parler encore une fois de la Loi sur le Parlement du Canada. Si on suppose que le gouvernement fera vraiment ce qu’il dit et qu’il cherchera à modifier la Loi sur le Parlement du Canada, pouvons-nous avoir l’assurance qu’il consultera les représentants du gouvernement et de l’opposition au Sénat avant de soumettre un projet de loi à notre assemblée? Va-t-il également consulter les intervenants de la fédération canadienne, y compris les dirigeants des provinces et des territoires?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : C’est encore la même question. Le gouvernement n’a rien dit au sujet d’éventuelles modifications à la Loi sur le Parlement du Canada. Si le gouvernement prend un tel engagement, ces modifications seront soumises au processus législatif habituel.

Pour ce qui est des préoccupations qu’il soulève, l’honorable sénateur devrait savoir, comme tous les sénateurs, que l’on a déjà débattu de certains aspects de la Loi sur le Parlement du Canada, tant au Sénat qu’en comité et dans d’autres tribunes. D’ailleurs, sénateur, je vous ai écrit à ce sujet il y a deux ans. Bien entendu, certaines questions font l’objet d’un débat, mais aucune décision n’a été prise.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, la période des questions est terminée.


[Français]

ORDRE DU JOUR

La Loi sur les licences d’exportation et d’importation
Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Troisième lecture

L’honorable Raymonde Saint-Germain propose que le projet de loi C-47, Loi modifiant la Loi sur les licences d’exportation et d’importation et le Code criminel (modifications permettant l’adhésion au Traité sur le commerce des armes et autres modifications), soit lu pour la troisième fois.

L’honorable Lucie Moncion : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui afin d’appuyer l’adoption, à l’étape de la troisième lecture, du projet de loi C-47, la Loi modifiant la Loi sur les licences d’exportation et d’importation et le Code criminel (modifications permettant l’adhésion au Traité sur le commerce des armes et autres modifications).

J’aimerais souligner l’importance de l’adhésion du Canada au Traité sur le commerce des armes, et, surtout, l’importance pour le Canada de se rallier à ses partenaires internationaux en s’intégrant à un régime qui compte déjà 97 États parties.

Dans ce discours, je présenterai les points saillants du projet de loi C-47, je défendrai les Canadiens qui aspirent à ce que leur pays s’engage dans une économie éthiquement responsable et, finalement, j’expliquerai les éléments qui ont retardé l’adhésion du Canada au traité en décortiquant la ligne du temps qui nous amène à voter à l’étape de la troisième lecture sur ce projet de loi aujourd’hui, le 6 décembre 2018.

Le Traité sur le commerce des armes est la réponse de la communauté internationale à la prise de conscience que le manque d’encadrement du commerce international des armes est en partie responsable des atteintes au droit international humanitaire et à la prolifération des armes. Des organisations comme le Comité international de la Croix-Rouge, Amnistie internationale et la coalition Control Arms ont fait état du rôle que jouent certains États exportateurs d’armes dans des conflits auxquels ils ne participent pas directement. La communauté internationale ainsi que le Canada se sont ralliés pour tenter de régler cette problématique et ont adopté le traité le 3 avril 2013.

La première tentative concrète de ratification du traité par le Canada a été faite le 13 avril 2017, lors du dépôt du projet de loi C-47 à la Chambre des communes. Celui-ci propose une réglementation de l’exportation des armes qui soit plus restrictive et conforme aux exigences du traité. Ce projet de loi permettra au Canada de contribuer, en concertation avec ses partenaires de la communauté internationale, à réduire la longévité et l’intensité des conflits dans le monde, à prévenir et à empêcher les abus en matière de droits de la personne, à réduire le nombre de victimes sur la scène internationale et à favoriser la stabilité régionale et le développement socioéconomique.

Trois études, soit celle du Comité international de la Croix-Rouge, intitulée Arms Availability and the Situation of Civilians in Armed Conflict, de 1999, celle d’Aministie internationale, intitulée Killer Facts: The Impact of the Irresponsible Arms Trade on Lives, Rights and Livelihoods, de 2010, et une autre préparée par Aministie internationale, Control Arms et Oxfam, intitulée Shattered lives: the case for tough international arms control, établissent le lien causal entre toutes ces problématiques et le transfert non réglementé et irresponsable d’armes.

[Traduction]

Comme la sénatrice Saint-Germain l’a expliqué à l’étape de la deuxième lecture, le Canada doit respecter deux dispositions du traité pour assurer la conformité de son régime législatif. Premièrement, l’article 7 du traité fait la liste des critères selon lesquels les demandes d’exportation d’armes sont évaluées. Ces critères traitent des droits de la personne, de la violence fondée sur le sexe, de la paix et de la sécurité. Deuxièmement, l’article 10 du traité exige que chaque État Partie prenne des mesures pour réglementer les activités de courtage entre deux pays étrangers.

Pour ce qui est de l’évaluation du risque, le projet de loi C-47 établit une norme claire et rigoureuse pour évaluer le risque que l’exportation d’armes contribue à la violation de droits de la personne et de lois humanitaires internationales, et éviter que des armes exportées ne se retrouvent entre de mauvaises mains.

[Français]

En ce qui a trait au courtage, le projet de loi C-47 contient des dispositions qui permettront d’assurer la même rigueur qui s’applique à l’exportation des armes à feu lorsque le Canada organise le transfert d’armes entre un deuxième et un troisième pays. Ainsi, les autorités canadiennes seront en mesure d’assurer une surveillance des entités qui servent d’intermédiaires entre les vendeurs d’armes et ceux qui les utilisent.

Ces engagements pris par le Canada sur la scène internationale par l’entremise du projet de loi C-47 contribueront à l’efficacité d’une stratégie concertée de lutte contre la prolifération des armes et contre les violations des droits de la personne partout dans le monde.

(1440)

[Traduction]

Amnistie internationale estime que les transferts d’armes classiques représentent chaque année, dans le monde, 100 milliards de dollars américains. Cependant, quel est le coût réel de ce commerce? À l’échelle mondiale, plus de 500 000 morts sont causées par la violence armée chaque année, sans compter les dommages collatéraux subis par les pays où des conflits surviennent. Le projet de loi C-47 porte sur ce dilemme éthique et économique inhérent au commerce des armes à feu.

L’objet fondamental du projet de loi C-47 est au cœur des valeurs auxquelles aspirent les Canadiens. Le Canada peut et doit choisir de façon responsable ses partenaires commerciaux, surtout en ce qui a trait à l’exportation d’armes à feu, de matériel militaire et d’articles à double usage destinés à des fins de destruction massive.

[Français]

La signature de contrats d’exportation d’armes avec des pays qui violent les droits de la personne crée des dilemmes déchirants pour les Canadiens et le gouvernement du Canada. Je songe notamment aux répercussions qu’aurait l’annulation du contrat de 13 à 15 milliards de dollars que l’ancien gouvernement a signé avec l’Arabie saoudite. On estime que l’annulation du contrat entraînerait la perte de 2 000 à 3 000 emplois chez General Dynamics à London, en Ontario, et coûterait des milliards de dollars aux contribuables.

D’un autre côté, qu’en est-il de la situation des droits de la personne en Arabie saoudite? Nous n’avons qu’à penser à l’affaire Jamal Khashoggi, qui ne représente que la pointe de l’iceberg. Le directeur adjoint du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnistie internationale, Said Boumedouha, a dit ceci, et je cite :

En réalité, la situation des droits de la personne en Arabie saoudite est catastrophique et quiconque se risque à souligner des failles dans le système est qualifié de criminel et jeté en prison.

L’adoption du projet de loi C-47 vise à prévenir ces situations malheureuses en évitant de soumettre le Canada à un dilemme économique.

[Traduction]

Je voudrais maintenant parler de l’échéancier du traité, du projet de loi C-47 et de la décision du Canada de ne pas signer et ratifier ce traité. Il convient de noter que le Canada sera l’un des derniers pays à signer un traité que 130 pays ont déjà signé et que 97 pays ont déjà ratifié. Le Canada est également le seul allié de l’OTAN et le seul partenaire du G7 à ne pas l’avoir signé ni ratifié.

[Français]

Que s’est-il donc passé entre le 3 avril 2013, moment de l’adoption du traité, et le 13 avril 2017, moment du dépôt du projet de loi C-47 à la Chambre des communes?

L’Assemblée générale des Nations Unies adopte le traité par un vote de 154 contre 3 et 22 abstentions le 3 avril 2013. Le 3 juin 2013, le traité est ouvert à la signature et 67 pays le signent à cette date. Le 23 septembre 2013, les États-Unis signent le traité, étant le 91e État à le signer.

Entre 2013 et 2014, bien que certains parlementaires tentent de faire la lumière sur la raison pour laquelle le Canada n’a pas encore signé le traité, les représentants du gouvernement au Sénat soutiennent que des consultations doivent prendre place avant que le Canada ne puisse le signer. Plusieurs facteurs indiquent que ce retard ou ce refus de signer sont injustifiés et déraisonnables.

Pourquoi tenir des consultations à cette étape du processus? En vertu du droit canadien, la signature du traité par le représentant du Canada ne suffit pas à entraîner ni son entrée en vigueur ni sa mise en œuvre. La signature d’un traité est un accord de principe que le pays signataire donne au traité.

Comme le disait l’honorable sénateur Dallaire dans cette Chambre le 5 juin 2013, et je cite :

Je trouve très difficile de comprendre que, après des années de négociations, après tout l’exercice du registre des armes d’épaule et après avoir obtenu l’importante concession que nous avons demandée, on nous dise maintenant que le gouvernement ne peut pas prendre une décision avant d’avoir consulté les Canadiens.

[Traduction]

En fait, depuis le tout début des discussions, le Canada a appuyé les principes fondateurs du traité et a participé activement aux négociations. Il a même proposé un amendement pour garantir que le traité ne s’appliquerait pas à l’utilisation domestique des armes, pour protéger leur utilisation aux fins de loisir et de chasse.

[Français]

L’importante modification proposée par le Canada avait été acceptée en mars 2013 et veillait justement au respect des intérêts des Canadiens qui craignaient que leurs droits soient compromis par le traité. L’honorable Roméo Dallaire a dit ce qui suit le même jour, et je cite :

Il est vraiment curieux que nous n’ayons pas signé ce traité. Considérez les pays qui l’ont fait. Il y en a 67 qui ont signé ce jour-là. L’Australie, avec sa cambrousse et tous les gens qui utilisent des armes, a signé. La Belgique, un grand producteur d’armes, a signé. L’Allemagne, la France, l’Italie, le Japon, même le Mexique — et nous savons quelles tragédies les armes ont causées dans ce pays — ont tous signé. Comment expliquer que ces gens, en étudiant la teneur du traité, ont été suffisamment convaincus pour signer ce document que nous avions fait modifier à notre convenance, mais que nous ayons nous-mêmes dit non au moment de le signer?

À l’époque, tout laissait présager que le Canada allait signer le traité, mais pour des raisons politiques, ce dossier a été mis sur la glace. Avec le changement de gouvernement et des priorités différentes, nous nous retrouvons aujourd’hui à l’étape de la troisième lecture au Sénat du projet de loi C-47 qui, je le rappelle, permettra au Canada de reprendre sa place sur l’échiquier mondial en matière de droit humanitaire.

[Traduction]

Quel est le rôle du Sénat, quant à l’adhésion aux traités internationaux?

Comme l’a dit la Cour suprême du Canada dans son Renvoi relatif à la réforme du Sénat, le Sénat est un « organisme législatif complémentaire responsable de porter un second regard attentif aux projets de loi ». Le Sénat a étudié en profondeur le projet de loi C-47 afin d’assurer un équilibre entre les intérêts représentés dans ce débat.

[Français]

Il est clair que, pour mettre fin à la prolifération des armes légères et des armes de petit calibre ainsi qu’à leur détournement des voies légitimes vers des marchés illicites, la participation du Canada à une action internationale concertée est nécessaire. Il est aussi juste d’affirmer que, depuis le début, le Canada a activement pris part à cette action, mais que, au moment de boucler la boucle, il s’est abstenu de mettre en œuvre les dispositions du traité dans sa législation nationale.

Chers collègues, l’adhésion à ce traité a suffisamment tardé. Nous pouvons, aujourd’hui même, voter en faveur du projet de loi C-47 qui modifiera la Loi sur les licences d’exportation et d’importation et le Code criminel et qui permettra l’adhésion du Canada au Traité sur le commerce des armes.

Je vous remercie de votre attention.

[Traduction]

La sénatrice Saint-Germain : Honorables sénateurs, c’est un plaisir pour moi de prendre la parole à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-47, qui modifie la Loi sur les licences d’exportation et d’importation afin que le Canada puisse adhérer au Traité sur le commerce des armes.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je tiens à remercier les témoins et les membres du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, et plus particulièrement sa présidente, la sénatrice Raynell Andreychuk, qui a tout fait pour que nous puissions entendre le plus grand nombre de témoins possibles et pour que tous les points de vue puissent être exprimés dans le respect et la considération.

Je remercie aussi la ministre des Affaires étrangères et ses collaborateurs, dont l’expertise, le professionnalisme et la disponibilité étaient exemplaires.

Le comité a entendu des points de vue extrêmement variés au sujet du projet de loi. Même si les sujets abordés par les témoins et les arguments qu’ils ont soulevés allaient d’un bout à l’autre du spectre, un thème est ressorti plus nettement des discussions, à savoir qu’il est grand temps que le Canada adhère au Traité sur le commerce des armes.

Il a fallu des dizaines d’années avant que ce traité voie le jour, et s’il existe, c’est parce que la communauté internationale est consciente que nous avons collectivement la responsabilité de contribuer à la paix dans le monde en nous attaquant au commerce illégal des armes classiques.

Le Canada a le devoir de faire concrètement sa part. Parmi tous les membres du G7 et de l’OTAN, le Canada est le seul à n’avoir pas même signé ce traité. Le projet de loi C-47 nous permettra de remédier à la situation.

Le Canada a toujours tendu la main aux autres pays pour faire régner la paix et la sécurité dans le monde, et j’en suis fière. En assujettissant le commerce mondial des armes à une norme internationale, le traité nous rapproche concrètement de cet objectif.

Comme nous l’avons entendu dire au comité, le commerce illégal des armes classiques est source d’énormément de violence. Le fait qu’on puisse aisément se procurer ce type d’armes alimente les conflits et leurs effets dévastateurs sur la vie des gens. Le Traité sur le commerce des armes cherche à résoudre ce problème en créant une nouvelle norme internationale pour le contrôle des exportations d’armes. Il est important que le Canada contribue à l’élaboration et à l’établissement de cette norme.

(1450)

Comme Christyn Cianfarani, présidente et directrice générale de l’Association canadienne des industries de défense et de sécurité, l’a dit :

« […] l’adhésion au Traité sur le commerce des armes relèvera la barre à l’échelle internationale pour les autres pays qui n’ont pas adopté des normes aussi élevées que le Canada. »

Bien sûr, le projet de loi C-47 change aussi la façon dont le Canada contrôle les exportations d’armes sur son territoire. En fait, il renforce notre système.

Comme l’a indiqué la ministre des Affaires étrangères quand elle a comparu devant le comité, le gouvernement s’est engagé à appliquer une norme plus élevée à l’égard des exportations d’armes à feu canadiennes. C’est pourquoi le comité de la Chambre des communes a amendé le projet de loi C-47 afin de le durcir.

Des témoins nous ont dit que ces amendements étaient utiles parce qu’ils renforcent réellement le projet de loi C-47 et qu’ils amélioreraient la manière dont le Canada exporte ses armes.

Ils nous ont valu des éloges de la part d’organisations de la société civile, y compris Project Ploughshares, l’Institut Rideau et Amnistie internationale. Ces amendements ont également été accueillis favorablement par l’industrie parce qu’ils apportent des précisions concernant la détermination du risque et l’absence d’effet du projet de loi sur l’usage des armes à feu au pays.

J’aimerais aborder un autre enjeu crucial qui a été soulevé lors des travaux du comité, à savoir que le projet de loi C-47 ne change rien au système actuel d’exportations vers les États-Unis, qui n’exige aucune licence pour la majorité des exportations.

Certains témoins ont affirmé que ce système irait à l’encontre du Traité sur le commerce des armes, tandis que d’autres ont soutenu que, au contraire, cela n’aurait aucune incidence sur le respect du traité par le Canada. En effet, au cours des débats dans l’autre endroit, des députés ont fait remarquer que certains signataires du traité, notamment les pays du Benelux, en Europe, octroient toujours des licences de portée générale.

Les témoins ont aussi parlé du fait que le Canada ne recueille pas assez de données sur les exportations vers les États-Unis. Lorsqu’elle s’est adressée au comité, la ministre Freeland a clairement indiqué que le gouvernement est conscient de la situation et qu’il y porte attention. Le gouvernement du Canada ne nie pas que la transparence est un élément indispensable du Traité sur le commerce des armes.

Toutefois, d’autres témoins, surtout ceux qui représentent l’industrie canadienne de la défense, ont aussi indiqué clairement que tout changement à ce système nuirait grandement au rôle joué par le Canada dans l’industrie de défense nord-américaine intégrée et entraînerait des pertes massives d’emplois de grande qualité.

John Saabas, président chez Pratt & Whitney Canada, a expliqué ceci :

Il est essentiel pour garantir notre succès que la circulation continue de se faire librement à la frontière entre le Canada et les États-Unis. Nous dépendons de la fluidité des déplacements des produits et des données entre ces deux pays.

On pourrait difficilement surestimer les répercussions néfastes qu’entraînerait l’imposition d’une licence pour les exportations aux États-Unis...

Comme l’a expliqué M. Saabas, les pièces et les composantes franchissent la frontière canado-américaine à plusieurs reprises, dans les deux directions. Si un changement venait nuire à la fluidité de ce mouvement, la position concurrentielle des entreprises canadiennes dans ce marché fortement compétitif s’en trouverait grandement affaiblie.

M. Saabas a ajouté que si le Canada exigeait des licences, les États-Unis risqueraient d’en faire autant et d’exiger des licences pour les exportations américaines destinées au Canada.

Comme l’a dit Mme Cianfarani, de l’Association des industries canadiennes de défense et de sécurité :

Si on exige des licences d’exportation pour le matériel de défense canadien acheté par le gouvernement des États-Unis, on risque de faire perdre à l’industrie canadienne de la défense au moins un milliard de dollars par année.

[Français]

Un autre témoin, M. James Fergusson, directeur adjoint du Centre d’études sur la sécurité et la défense du Département d’études politiques de l’Université du Manitoba, a expliqué que l’industrie canadienne de la défense dépend en grande partie d’un accès relativement libre au marché américain.

La procédure en place a vu le jour au fil des décennies durant lesquelles le Canada et les États-Unis ont développé une relation collaborative, étroite et exclusive, en matière de défense. Nous sommes notamment partenaires au sein de l’OTAN et du Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord, mieux connu sous l’acronyme NORAD, et nous dépendons fondamentalement l’un de l’autre dans le cadre de notre partenariat de sécurité.

Comme la ministre des Affaires étrangères l’a clairement indiqué devant notre Comité des affaires étrangères, la relation spéciale que le Canada et les États-Unis entretiennent est unique au monde et est même reconnue dans nos lois nationales respectives. Nous ne devons pas compromettre cette relation essentielle par la prise de mesures qui ne contribueraient pas de manière significative aux objectifs du Traité sur le commerce des armes qui, ne l’oublions pas, vise à lutter contre le commerce illicite des armes et à favoriser le commerce responsable des armes.

Honorables sénatrices et sénateurs, pour conclure, nous sommes saisis d’un projet de loi solide qui permettra au Canada de contribuer à l’effort international de lutte contre le commerce illicite des armes. Il s’agit d’un projet de loi qui a été renforcé par les amendements qui y ont été apportés dans le cadre de l’étude article par article à l’autre endroit. Le projet de loi C-47 établit un juste équilibre entre l’engagement du gouvernement à l’égard d’une norme plus élevée en matière d’exportation d’armes et la prise en compte de la situation intérieure particulière du Canada et de son plus proche allié.

Chers collègues, j’espère que vous vous joindrez à moi pour affirmer que tout effort déployé afin de favoriser la création d’un monde meilleur, plus prospère et moins violent s’avère digne et important. C’est pourquoi nous devrions adopter sans plus tarder le projet de loi C-47, et ce, dans sa forme actuelle. Il est grand temps que le Canada devienne un État partie au Traité sur le commerce des armes, afin de contribuer ainsi au renforcement d’un régime qui vise d’abord et avant tout à réduire la souffrance humaine et à favoriser la paix, la sécurité et la stabilité internationales. Je vous remercie.

[Traduction]

L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, je prends la parole une dernière fois à propos du projet de loi C-47, Loi modifiant la Loi sur les licences d’exportation et d’importation et le Code criminel (modifications permettant l’adhésion au Traité sur le commerce des armes et autres modifications).

Le comité a étudié ce projet de loi de manière très approfondie au cours des dernières semaines et il a entendu de nombreux témoins de tous les camps.

Je suppose que la plupart des personnes qui appuient cette mesure législative le font pour les meilleures raisons qui soient, comme l’a souligné la sénatrice Saint-Germain.

Je pense que la ministre des Affaires étrangères appuie probablement elle aussi ce projet de loi pour ce qu’elle estime être les meilleures raisons qui soient.

Toutefois, après avoir entendu de nombreux témoins très compétents sur la question, j’en viens à me demander ce que, concrètement, cette mesure législative va permettre d’accomplir.

Elle aurait pour but d’empêcher l’acheminement d’armes vers les zones de conflit. Or, l’article 7 du Traité sur le commerce des armes montre bien qu’il appartiendra à chaque État partie au traité de veiller lui-même à l’application du traité et de surveiller son niveau de conformité.

Mon collègue, le sénateur MacDonald, a posé une question au professeur James Fergusson au comité. Le professeur Fergusson est un spécialiste de la question du transfert international d’armes et de la relation canado-américaine en matière de défense armée.

Le sénateur MacDonald a demandé quelle incidence concrète ce traité est susceptible d’avoir sur l’acheminement d’armes illicites vers les zones de conflit compte tenu du fait qu’il revient aux États de déterminer eux-mêmes s’ils se conforment ou non au traité.

Voici ce qu’a répondu le professeur Fergusson :

La réponse? Il n’y en aura pas. [...] C’est aussi simple que cela.

Cette réponse devrait tous nous inciter à la réflexion.

Chers collègues, il y a quelques semaines, lorsque la ministre a comparu devant le comité, elle a souligné avec une certaine fierté que le Liban avait ratifié le Traité sur le commerce des armes, ce qui a mené le groupe terroriste Hezbollah, qui est représenté au Parlement libanais, à quitter l’assemblée.

La ministre estime qu’il s’agit là d’une victoire.

Cependant, y a-t-il quelqu’un qui croit sérieusement que le trafic d’armes entre le Liban et la Syrie — par exemple, puisque le Hezbollah est maintenant actif des deux côtés de la frontière — sera le moindrement touché par la ratification du traité par le Parlement libanais?

Je comprends les nobles motifs des nombreux partisans de l’accord, mais il ne faut pas ignorer naïvement les répercussions réelles et quotidiennes du traité. Lorsque nous faisons preuve de naïveté, nous finissons par prendre des mesures superficielles et croire que nous avons vraiment résolu un problème.

Par ailleurs, je crois que nous limiterons les effets du Traité sur le commerce des armes. Je suis également préoccupé par les répercussions possibles du projet de loi sur les entreprises de défense et de sécurité au Canada.

La ministre Freeland a déclaré devant le comité sénatorial qu’elle est déterminée à relever la barre en matière d’exportation de matériel canadien de défense et de sécurité.

Selon des témoignages entendus par le comité, son ministère a déjà commencé à ralentir le processus d’approbation des licences d’exportation de matériel de défense et de sécurité du Canada.

(1500)

Peut-être qu’un examen plus approfondi et plus minutieux est justifié, compte tenu du climat international actuel. Néanmoins, il est inquiétant que des témoins comparaissant devant le comité laissent entendre que le ralentissement du processus d’approbation se produit peut-être pour les mauvaises raisons.

Le comité n’a entendu aucune preuve de la complicité des entreprises canadiennes dans le trafic d’armes. Zéro. Pas la moindre bribe de témoignage à cet effet. Les témoins ne s’entendent peut-être pas sur les pays auxquels le Canada doit vendre du matériel de défense et de sécurité, mais rien de ce que nous avons entendu ne laisse croire que des entreprises canadiennes sont complices dans le trafic international d’armes. Par conséquent, j’estime que ce serait une grave erreur de compliquer inutilement les exigences réglementaires et relatives aux permis imposées aux entreprises canadiennes simplement pour donner l’impression que le gouvernement fait quelque chose.

Mme Christyn Cianfarani est présidente et chef de la direction de l’Association des industries canadiennes de défense et de sécurité. Lorsqu’elle a comparu devant le comité, elle a dit ceci :

Nous avons déjà remarqué un changement dans le processus d’approbation des permis d’exportation. Le nombre de demandes de permis pour biens et services militaires qui ne sont pas traitées à l’intérieur du délai de 40 jours conformément à la propre norme de service du gouvernement est passé de 65 en 2016 à 228 en 2017. Si ce nombre continue d’augmenter encore plusieurs années, cela risque d’avoir une incidence négative durable sur l’industrie canadienne ainsi que sur le Canada en tant que pays avec qui faire des affaires.

Elle a souligné que 90 p. 100 des entreprises canadiennes œuvrant dans le domaine de la sécurité et de la défense sont des petites et moyennes entreprises. Elles n’ont pas les ressources et la latitude nécessaires pour supporter qu’on les encombre avec de nouveaux règlements inutiles.

J’observe une tendance. Comme le gouvernement l’a fait avec l’exploitation des ressources et l’imposition des petites entreprises, il tente maintenant d’imposer un nouveau fardeau réglementaire au secteur de la sécurité et de la défense en grande partie pour des raisons d’apparence. Je crains que ce soit les entreprises canadiennes qui fassent les frais du désir du gouvernement de présenter une image vertueuse à l’échelle internationale.

Pour terminer, je citerai encore une fois le professeur James Fergusson, qui a dit très simplement que le projet de loi C-47 est « une solution à la recherche de problèmes ». Il a dit que le problème en ce qui concerne le trafic d’armes à l’international n’a rien à voir avec les exportations des secteurs de la défense et de la sécurité du Canada. Le Canada vend essentiellement de l’équipement militaire et de l’équipement de sécurité, ou des pièces qui en font partie, à ses propres alliés ou à d’autres pays, au cas par cas, et ces ventes font en général l’objet d’un important débat public. Or, malgré le fait que le Canada a toujours eu une approche responsable, le gouvernement a néanmoins décidé de faire de cette question une de ses priorités législatives. J’espère simplement qu’il ne va pas alourdir le fardeau et les coûts pour les entreprises canadiennes dans ce domaine comme il l’a fait dans d’autres secteurs. Chers collègues, c’est pour cela que je m’oppose à ce projet de loi.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Des voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté, avec dissidence.)

Projet de loi de 2017 sur la sécurité nationale

Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Gold, appuyée par l’honorable sénatrice Moncion, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-59, Loi concernant des questions de sécurité nationale.

L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-59, Loi concernant des questions de sécurité nationale.

Avant de commencer, j’aimerais remercier le sénateur Gold de son discours informatif en qualité de parrain du projet de loi. Il a résumé les changements que le projet de loi C-59 apportera au système de sécurité nationale. Je suis convaincue que les objectifs de la mesure législative, comme le sénateur Gold l’a souligné, sont importants.

Lorsque le projet de loi C-51, la Loi antiterroriste, a été adopté en 2015, beaucoup de gens ont dénoncé le fait qu’il perturbait l’équilibre entre notre sécurité et la protection de nos droits. Au lieu d’assurer notre sécurité, une grande partie de la Loi antiterroriste a plutôt suscité la peur chez de nombreux Canadiens, qui se sont mis à craindre les organismes de sécurité nationale qui devraient nous protéger. En effet, la loi accordait à ces organismes le pouvoir de brimer nos droits fondamentaux tout en ayant très peu de comptes à rendre.

La peur était encore plus grande chez les communautés minoritaires. Après l’adoption du projet de loi C-51, j’ai reçu d’innombrables appels et courriels de la part de Canadiens qui craignaient que le SCRS ne les qualifie injustement d’extrémistes et qu’il les cible. Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi.

Compte tenu des pouvoirs de perturbation du SCRS et des mandats autorisant la violation de la Charte, sans oublier l’absence de mécanismes de reddition de comptes applicables à ces nouveaux pouvoirs, beaucoup de gens ont pensé que le SCRS pouvait désormais agir presque en toute impunité. Il faut faire quelque chose, et le projet de loi C-59 montre que le gouvernement tente de corriger la situation.

Honorables sénateurs, en étudiant ce projet de loi, nous devons nous demander si son libellé correspond à son esprit et à ses objectifs. En qualité de sénateurs à la Chambre de second examen objectif, c’est là une des plus importantes questions que nous pouvons poser.

Si un projet de loi présente des lacunes qui nuisent à son objectif ou qu’il comporte des dispositions qui vont à l’encontre de son esprit, nous, les sénateurs, avons le pouvoir de le réaligner sur l’objectif qu’il vise.

Si je prends la parole aujourd’hui, c’est parce que je ne crois pas que le projet de loi C-59 remplisse complètement son objectif de remédier au tort causé par la Loi antiterroriste. Dans sa forme actuelle, le projet comporte de graves lacunes qui fragilisent nos droits.

Même si j’aimerais parler de chaque lacune que j’ai relevée dans le projet de loi C-59, je ne pourrai pas le faire durant les 15 minutes dont je dispose aujourd’hui. Le projet de loi compte 160 pages, et je suis certaine que vous serez nombreux à parler des points que vous trouvez problématiques dans ce texte. Je vais plutôt consacrer mon temps de parole à deux éléments du projet de loi C-59 qui me semblent particulièrement problématiques.

Le premier concerne les mandats autorisant la violation de la Charte, qui font partie du pouvoir de perturbation du SCRS. En termes simples, la Loi antiterroriste oblige le SCRS à faire une demande de mandat s’il envisage de recourir à des mesures de perturbation qui sont contraires à la Charte des droits et libertés. Il est inquiétant que ce genre de mandats existent, d’autant plus qu’on les accorde au SCRS dans le cadre de procédures tenues à huis clos. Cela signifie qu’un agent du SCRS peut se voir accorder le pouvoir d’enfreindre nos droits sans que nous en soyons jamais informés. En fait, aucun avocat spécial ne serait présent durant les délibérations pour plaider en faveur de la protection de nos droits. Nous avons été plusieurs à réclamer qu’on limite le recours aux mandats autorisant la violation de la Charte dans le projet de loi C-59, mais le SCRS et le gouvernement ont tous deux maintenu qu’ils étaient nécessaires pour préserver la sécurité nationale.

Il y a un autre problème majeur dans le projet de loi C-59 : les définitions des termes « information accessible au public » et « ensemble de données accessible au public ». Il s’agit d’information et de données que le Centre de la sécurité des communications et le Service canadien du renseignement de sécurité seront en mesure de recueillir et de conserver. À première vue, les dispositions paraissent anodines, mais ce qui est considéré comme « accessible au public » a de quoi étonner.

Par exemple, tous renseignements piratés qui sont publiés en ligne sont considérés comme étant accessibles au public. Si vous avez un compte sur un site web et que ce dernier est piraté, tous les renseignements fournis en ligne deviennent du domaine public et peuvent être recueillis et conservés. Autrement dit, les renseignements sur les opérations bancaires en direct et ceux fournis lors d’achats en ligne avec une carte de crédit ou dans des courriels pourraient être visés. Tous les renseignements susceptibles d’être achetés ou de faire l’objet d’un abonnement entrent aussi dans cette catégorie. Autrement dit, cette définition pourrait facilement s’appliquer à d’énormes quantités de renseignements que les entreprises comme Facebook vendent, comme les images faciales, les publications, les photos, les vidéos, les liens entre les personnes et les données de localisation.

Pire encore, les plateformes web comme Facebook permettent souvent à diverses applications de recueillir de l’information sur les utilisateurs et leurs amis. Contrairement à Facebook, peu de mesures de protection empêchent ces applications de vendre ces renseignements sans qu’il y ait des conséquences. Dès qu’ils sont vendus, ces renseignements deviennent accessibles au public.

Enfin, si des renseignements sont publiés à un moment ou un autre, ils peuvent être conservés. Cela signifie que si vous publiez accidentellement quelque chose, même si vous l’effacez rapidement après, le Centre de la sécurité des communications et le Service canadien du renseignement de sécurité peuvent l’avoir enregistré.

Cette définition trop large me préoccupe et je suis loin d’être la seule personne à réagir de cette façon. Lorsque le projet de loi C-59 a été renvoyé au comité de l’autre endroit, le commissaire à la protection de la vie privée a écrit une lettre dans laquelle cette question figure au deuxième rang de ses préoccupations concernant les normes juridiques créées par le projet de loi. En fait, le commissaire Therrien a même émis deux recommandations dont j’aimerais vous faire part aujourd’hui, pour que le comité en tienne compte lorsqu’il se penchera sur le projet de loi.

(1510)

Premièrement, le commissaire Therrien a recommandé que les mesures liées à la collecte d’information accessible au public soient limitées à ce qui est raisonnable et adapté aux circonstances et tiennent compte des répercussions possibles sur la vie privée des Canadiens. Deuxièmement, il a recommandé de modifier la définition du terme « information accessible au public » afin de préciser qu’il s’agit d’information obtenue légalement. Aucune de ces modifications n’a été adoptée à l’autre endroit. La Chambre des communes a plutôt modifié la définition du terme « accessible au public » pour empêcher le Centre de la sécurité des télécommunications de collecter de l’information à l’égard de laquelle les Canadiens ont « une attente raisonnable en matière de protection de la vie privée ». À première vue, ce changement peut sembler positif, mais il comporte deux immenses échappatoires.

Tout d’abord, ce que nous estimons être « une attente raisonnable en matière de protection de la vie privée » est tout aussi flou que la définition du terme « accessible au public ». En fait, les Canadiens renoncent presque constamment à leurs attentes raisonnables en matière de protection de la vie privée, sans s’en rendre compte. Quand on accepte de donner de l’information à des sites comme Facebook en cochant une boîte dans la longue fenêtre des conditions que presque personne ne lit, on renonce à ses attentes raisonnables en matière de protection de la vie privée. Si on envoie quelque chose en ayant recours à un service de messagerie, on renonce à ses attentes raisonnables en matière de protection de la vie privée. Si on envoie un courriel en utilisant un compte professionnel, on renonce à ses attentes raisonnables en matière de protection de la vie privée.

Bref, une « attente raisonnable en matière de protection de la vie privée » est loin de représenter une protection pour les Canadiens. Pire encore, ce changement ne fait rien pour modifier la définition qui s’applique au SCRS, qui pourra continuer de recueillir des ensembles de données accessibles au public, puisque la modification ne touchera que le Centre de la sécurité des télécommunications. En fait, c’est même encore plus inquiétant, puisque, en vertu de son mandat, le SCRS peut cibler des Canadiens, contrairement au CST.

Malgré ces modifications, « l’information et les ensembles de données accessibles au public » continueront de représenter un problème très important.

Compte tenu de la façon dont les mandats autorisant la violation de la Charte sont gérés et du nouveau pouvoir permettant d’avoir accès à « l’information et aux ensembles de données accessibles au public », je perçois une tendance inquiétante dans le projet de loi C-59. Ce projet de loi devrait résoudre les problèmes cernés dans la Loi antiterroriste et protéger les droits des Canadiens, mais il reste encore de grandes lacunes qui pourraient ouvrir la porte à la violation des droits des Canadiens.

Cela me ramène à la question que j’ai posée au début de mon discours : le texte du projet de loi C-59 correspond-il à ses objectifs? À l’heure actuelle, je pense que la réponse à cette question est non. Je ne crois pas que l’élimination des lacunes qui menacent les droits des Canadiens garantis par la Charte faisait partie des objectifs du gouvernement lorsqu’il a rédigé le projet de loi C-59. Le premier ministre Trudeau a déclaré que l’objectif est « [...] [d’annuler] les dispositions problématiques du projet de loi C-51 et [de présenter] de nouvelles mesures législatives qui ramèneront l’équilibre entre notre sécurité collective et nos droits et libertés ». Cependant, il n’est pas nécessaire que la réponse à cette question continue d’être non.

Honorables sénateurs, c’est pour cette raison que je vous implore d’étudier ces dispositions problématiques du projet de loi C-59 lorsqu’il sera renvoyé au comité.

Honorables sénateurs, à mon arrivée au Sénat, en 2001, j’ai été assermentée la semaine qui a suivi le 11 septembre. À l’époque, nous avions été appelés à étudier le projet de loi antiterroriste. Je peux vous dire que, en tant que première sénatrice musulmane, ce n’était pas une expérience plaisante d’arriver ici et d’avoir à étudier un projet de loi antiterroriste alors que tant de gens pointaient du doigt la communauté musulmane.

Chaque fois que je vais à la mosquée, des gens viennent me voir pour me demander : « Qu’est-ce que je dois faire? Les agents du SCRS viennent chez moi. Je ne suis pas un extrémiste. » Je leur dis toujours de répondre aux questions et que tout ira bien. Cependant, le climat de peur que cela crée dans la communauté est malsain. Je rappelle aux sénateurs que nous sommes ici pour protéger la Charte des droits et libertés pour tous les Canadiens — je dis bien « tous » les Canadiens. C’est notre priorité en tant que sénateurs.

Nous sommes également ici pour défendre les droits des minorités. Je peux vous dire une chose, les projets de loi antiterroriste instillent la peur du SCRS aux gens qui font partie des minorités. Ils sont nombreux à me dire qu’ils ne se sentent plus en sécurité dans notre merveilleux pays. Notre travail de sénateurs consiste à assurer le respect de la Charte des droits et libertés.

Honorables sénateurs, dans l’étude du projet de loi C-59, je vous demande humblement de garder en tête l’objectif de veiller à ce que tous les membres de ma communauté se sentent en sécurité. Merci beaucoup.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur l’évaluation d’impact
Projet de loi sur la Régie canadienne de l’énergie
La Loi sur la protection de la navigation

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Mitchell, appuyée par l’honorable sénateur Pratte, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-69, Loi édictant la Loi sur l’évaluation d’impact et la Loi sur la Régie canadienne de l’énergie, modifiant la Loi sur la protection de la navigation et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois.

L’honorable Dennis Glen Patterson : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour parler du projet de loi C-69, Loi édictant la Loi sur l’évaluation d’impact et la Loi sur la Régie canadienne de l’énergie, modifiant la Loi sur la protection de la navigation et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois.

Honorables sénateurs, plusieurs aspects de cette énorme mesure législative me préoccupent. Toutefois, dans le cadre de cette intervention, je me limiterai à trois éléments : le retrait des critères liés au droit de participation, le manque de précision au sujet du processus décisionnel et l’inclusion éloquente des peuples autochtones dans le processus d’évaluation.

Lorsque le sénateur Pratte en a parlé, il a dit que les critères seraient éliminés pour permettre « à tous les Canadiens intéressés de participer au processus d’évaluation d’un projet. » Il a cité le rapport du Comité d’expert publié en 2017 sur l’examen du processus d’évaluation environnementale, où on peut lire ce qui suit :

L’exclusion d’individus ou de groupes d’un processus d’évaluation mine tout sentiment de justice et d’équité.

Cependant, l’honorable sénateur et moi interprétons différemment la recommandation clé de cette section. À mon avis, le problème principal est que bien des répondants avaient l’impression que leurs contributions au processus n’avaient aucune incidence et qu’elles ne transparaissaient pas dans la décision finale. En effet, le rapport indique que, pour toute évaluation :

[...] un plan de participation conçu de façon collaborative avec l’apport du public devrait énoncer clairement les objectifs de la participation publique et préciser le rôle du public, notamment comment les commentaires seront consignés, comment on y répondra et comment ils seront intégrés à la prise de décision. Lorsque le rôle du public est établi et entendu tôt dans le processus, les malentendus et les mécontentements peuvent être évités par la suite.

On n’arrivera pas à l’objectif visé en éliminant les critères en deux temps qui existent actuellement. Selon moi, ces critères permettent que l’opinion des personnes directement touchées par le projet soit prépondérante. Ils permettent aussi la participation d’experts et d’autres personnes compétentes détenant des renseignements pertinents à propos du projet proposé.

Dans le discours qu’elle a prononcé à l’autre endroit au sujet du projet de loi à l’étude, la députée de Lakeland a parlé, à titre d’exemple, de l’évaluation du projet concernant l’inversion de la canalisation 9B et l’accroissement de la capacité de la canalisation 9 d’Enbridge. Voici, à l’intention des sénateurs, un extrait de son discours :

Sur 177 demandes de participation, l’Office national de l’énergie a accordé des droits de pleine participation dans 158 cas et a exigé que 11 demandeurs présentent des observations écrites. L’Office a rejeté uniquement huit demandes. Un seul demandeur débouté a fait appel et les tribunaux ont examiné sa demande ainsi que la décision de l’Office. La demande était fondée sur le second critère de participation, soit d’être en mesure de faire une contribution axée sur une expertise pertinente.

Dans la décision du tribunal, on indique notamment ceci :

[Elle] a expliqué qu’elle avait précisé en détail son intérêt dans l’affaire [...] lequel intérêt reposait sur sa foi. À son avis, un déversement d’un pipeline, même loin de chez elle, est « une insulte à son sens du sacré ».

Chers collègues, il s’agissait d’un recours adéquat au critère qui vise à ne conserver que les informations pertinentes à la discussion. Dans la pratique, ce sont les mêmes principes qui sont appliqués au Nunavut. Les communautés touchées directement par des projets sont consultées. Les audiences publiques sont organisées dans la communauté et l’organisme de réglementation et les promoteurs du projet lancent une campagne active de sensibilisation et de mobilisation.

(1520)

On permet les commentaires de témoins externes. Cependant, les gens de l’extérieur de la communauté qui aimeraient participer aux audiences publiques doivent demander le statut d’intervenant.

Je m’oppose à l’idée d’enlever ce pouvoir discrétionnaire à l’organisme de réglementation.

Le manque de précision au sujet du processus décisionnel est un autre enjeu qui, à mon avis, nécessite d’autres discussions et un examen attentif. Selon le paragraphe 22(1), l’examen d’un projet doit prendre en compte pas moins de 23 éléments. Le libellé ne laisse aucun doute sur le caractère obligatoire de cette disposition. Les éléments à prendre en compte incluent les connaissances des collectivités, les observations reçues du public, l’intersection du sexe et du genre avec d’autres facteurs identitaires et les connaissances autochtones.

Je me demande comment tous ces éléments seront soupesés. Est-ce que l’opinion d’une personne en Ontario qui s’oppose pour des raisons éthiques à un projet en Colombie-Britannique aura le même poids que celle d’un membre des Premières Nations vivant dans la région immédiate? Ce n’est clair ni pour moi ni pour les intervenants que j’ai eu la chance de rencontrer. En cas de substitution d’un autre processus à l’évaluation d’impact, c’est-à-dire si une autre instance réalise l’évaluation, qu’il s’agisse d’une agence d’évaluation provinciale ou autochtone, ces éléments seraient-ils soupesés de la même façon? Si la substitution est accordée, la pondération de ces éléments est-elle laissée à la discrétion de l’agence ou de la formation menant l’évaluation?

Honorables sénateurs, j’estime qu’il est dangereux de ne pas répondre à ces questions. Cependant, peu importe l’instance qui effectue l’évaluation et les personnes qui peuvent participer, c’est le ministre fédéral qui détient le pouvoir ultime. Dans sa forme actuelle, le projet de loi accorde au ministre le pouvoir de décider de réaliser ou non un projet avant même qu’une évaluation soit menée. En raison de l’absence de critères fixes dans le projet de loi, le ministre peut déterminer que les risques sont trop grands sans avoir à justifier sa décision.

Chers collègues, la réconciliation est l’un des principaux thèmes de cette mesure législative. Le préambule du projet de loi sur l’évaluation d’impact indique clairement que celui-ci est censé réaffirmer l’engagement du Canada à respecter les droits des peuples autochtones, tels qu’ils sont définis à l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, à s’efforcer de travailler en partenariat avec les Premières Nations du Canada et à « mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ».

Je crois toutefois que le projet de loi C-69 crée de fortes attentes, mais ne réussit pas à établir un processus qui est réellement axé sur la collaboration. S’agit-il vraiment d’un partenariat si le ministre détient de tels pouvoirs exécutifs?

Dans le mémoire qu’elle a présenté au comité de la Chambre qui étudiait le projet de loi, l’Assemblée des Premières Nations a dit ceci au sujet de ses préoccupations :

Le fait est que, même si le projet de loi exige des processus d’évaluation environnementale, le gouverneur en conseil aura toujours le pouvoir de porter atteinte aux droits inhérents et issus de traités protégés par la Constitution pour autant qu’il fournisse des motifs justifiant sa décision.

Encore une fois, je pense qu’on peut s’inspirer de la cogestion qui se fait dans le Nord. Même si le système n’est pas parfait, la cogestion au Nunavut repose sur des lignes directrices claires pour déterminer si un projet peut ou non aller de l’avant.

Première étape : le projet concorde-t-il avec les plans d’aménagement du territoire en vigueur? Dans l’affirmative, le projet est renvoyé à la Commission du Nunavut chargée de l’examen des répercussions. Il y a ensuite des consultations ouvertes et transparentes avec les membres de la collectivité, des experts et d’autres intéressés. Les aînés peuvent présenter leur point de vue de vive voix et on tient compte du savoir traditionnel. La commission prend en considération les répercussions socioéconomiques en plus des répercussions environnementales possibles et, après une série d’audiences publiques, présente ses conclusions au ministre responsable. Le ministre peut alors les accepter, les rejeter ou demander à la commission de réexaminer le dossier. Les deux dernières options doivent être justifiées en fonction d’un ensemble de critères précis prévus dans la Loi sur l’aménagement du territoire et l’évaluation des projets au Nunavut.

Voilà, honorables sénateurs, à quoi ressemble un système fondé sur la concertation. C’est le genre de système que bien des Premières Nations du pays aimeraient avoir.

À chaque étape, les Inuits participent activement à la conduite de l’évaluation. Ils n’occupent pas un siège symbolique dans un comité d’évaluation ou un conseil consultatif, comme il est proposé dans ce projet de loi. Ils président ces assemblées, les dirigent. Il y a des échéanciers précis et des lignes directrices tout aussi claires pour les promoteurs et les décideurs, ce qui réduit considérablement la possibilité de décisions politiques arbitraires. Je crois que nous pouvons tous convenir qu’il est souhaitable qu’il y ait un certain degré de certitude dans l’économie d’aujourd’hui.

Ce sur quoi nous ne nous entendons pas, c’est comment la créer. Je pense que cela passe par une définition claire des règles.

Une façon de le faire qui a été suggérée par Jack Mintz, chercheur émérite du recteur à la faculté de politique publique de l’Université de Calgary, consiste à remanier le projet de loi C-69 en prenant pour modèle les meilleures pratiques d’autres pays, comme l’Australie, qui sépare les approbations de projets précis des enjeux sociaux et politiques.

Chers collègues, il s’agit là d’un projet de loi vaste et complexe qui soulève chez moi de nombreuses questions auxquelles, je l’espère, le comité tentera sérieusement de répondre lors de ses délibérations. Sans réponse à ces questions, je ne peux pas appuyer ce projet de loi.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Les travaux du Sénat

L’honorable Jim Munson : Honorables sénateurs, puis-je demander à la sénatrice Martin quand elle prendra la parole à propos du projet de loi S-244 à l’étape de la troisième lecture? J’espère vraiment que ce sera avant Noël. Il y a beaucoup de gens qui attendent, dans ce pays.

(1530)

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Oui, sénateur Munson. Nous avons parlé de cet article lors de la réunion préparatoire. J’ai dit à certains sénateurs, je crois, que j’interviendrai mardi, très probablement. Ce sera la prochaine occasion d’aborder ce point inscrit à l’ordre du jour sous la rubrique « Autres affaires ».

Le sénateur Munson : Merci.

La Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Omidvar, appuyée par l’honorable sénateur Gold, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-344, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (retombées locales).

L’honorable Ratna Omidvar : Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui au sujet du projet de loi C-344. Je remercie le parrain de cette mesure, le député Ramesh Sangha, de Brampton-Centre, et également Ahmed Hussen, qui a présenté cette mesure à la Chambre avant d’être nommé ministre.

Je suis particulièrement ravie de piloter ce projet de loi au Sénat, pour les trois raisons que voici.

Premièrement, il s’agit d’un projet de loi court. J’estime que c’est une mesure modeste, mais qui aurait une grande portée. Mon intervention sera modeste et brève, mais j’ose espérer qu’elle aura, elle aussi, une grande portée. Le projet de loi ne compte que quatre articles dont l’objet consiste à faire en sorte que les marchés fédéraux entraînent des retombées locales positives.

Deuxièmement, cette mesure se fonde sur des principes de partage des richesses, de façon que, lorsque le gouvernement fédéral décide d’investir dans des projets d’infrastructure, il laisse un héritage dont les collectivités bénéficient, qu’elles soient situées à proximité du nouveau Centre de conférences du gouvernement, d’un édifice gouvernemental ou d’un projet de rénovation.

Troisièmement, il s’agit d’un début très modeste mais qui présente un potentiel considérable de rétablissement d’une certaine égalité et de retombées positives en cascade d’un bout à l’autre du Canada sur l’emploi, les entreprises, les employeurs et les travailleurs.

Qu’entend-on par retombées locales? En général, ce sont les retombées économiques et sociales dont bénéficie une collectivité et qui se prolongent au-delà de la durée de vie d’un projet de construction proprement dit. Dans la plupart des cas, les retombées sont liées à un projet d’infrastructure. Par conséquent, les collectivités visées en bénéficient non seulement pendant les travaux et les activités qui y sont liées, mais aussi longtemps après.

Les travaux de construction génèrent des retombées, puisqu’il y a des possibilités d’embauche, d’apprentissage d’un métier, de formation et de démarrage d’une petite entreprise. Ces travaux offrent des débouchés à des gens qui ont du potentiel, mais qui ont souvent manqué de possibilités d’emploi. Je pense plus particulièrement aux jeunes qui auraient de bonnes chances d’entrer sur le marché du travail et de toucher un bon salaire dans un domaine prometteur.

Je songe aux petites entreprises qui pourraient partir du bon pied grâce à un projet de construction, puis continuer de prendre leur essor longtemps après. Je pense aussi aux nouvelles relations que les entreprises pourront bâtir et qui permettront, plus tard, de créer des conditions propices au recrutement, en particulier dans les collectivités où les entreprises ont eu de la difficulté à s’implanter jusqu’à présent.

Honorables sénateurs, le projet de loi vise à apporter des modifications au processus d’attribution des marchés fédéraux. Il ne s’appliquerait qu’aux projets fédéraux de construction et de réparation qui sont attribués par Services publics et Approvisionnement Canada.

Premièrement, le projet de loi C-344 vise à ce que les retombées locales soient prises en compte par le ministre. Il permet au ministre de demander aux soumissionnaires de lui fournir des renseignements sur les retombées locales que ses travaux généreraient si on lui octroyait le marché. Ces retombées pourraient comprendre notamment l’embauche locale, les achats locaux, l’aménagement d’un terrain de jeu communautaire ou la plantation d’arbres.

Deuxièmement, ce projet confère également au ministre le pouvoir d’exiger auprès des parties contractantes une évaluation des retombées locales générées à la toute fin du projet. Essentiellement, cela permet au ministre de voir si les objectifs ont été atteints. Ce mécanisme de suivi constituera un outil d’évaluation très utile pour orienter la progression des travaux.

Troisièmement, le projet de loi C-344 garantira la transparence. Le ministre déposera devant le Parlement un rapport sur les retombées locales générées par les travaux de construction, d’entretien ou de réparation.

Finalement, le projet de loi C-344 définit les retombées locales comme suit :

[...] des retombées sociales, économiques et environnementales générées à l’échelle locale par des travaux de construction, d’entretien ou de réparation, notamment la création d’emplois et les possibilités de formation, l’amélioration de l’espace public et toutes autres retombées précisées par la population locale.

Même s’il est bref, ce projet de loi établit un cadre permettant d’inscrire la question des retombées locales dans le processus d’approvisionnement du gouvernement fédéral. Je considère qu’il s’agit d’une bonne première étape, quoique modeste.

Tim Coldwell, président de Chandos Construction, à Edmonton, a dit ceci :

« Dans la société à but lucratif que je dirige, nous croyons que les entreprises sont capables d’avoir une influence bienfaisante et qu’elles en ont le devoir. Chandos appuie le projet de loi C-344 et se réjouit de la transparence dans le dossier des retombées locales générées par les projets publics menés au Canada. »

Le projet de loi n’oblige pas les provinces à inclure des ententes sur les retombées locales dans leurs projets d’infrastructures. Il n’a aucune incidence sur les mesures du ministère de l’Infrastructure ni de la nouvelle Banque de l’infrastructure. Il n’établit aucun quota ni aucune cible. Il ne dicte aucunement le type de main-d’œuvre qu’il faut employer, syndiqué ou non.

Si le projet de loi est adopté, sur mes instances, le gouvernement s’est déjà engagé à collaborer avec l’industrie pendant la période d’élaboration de la réglementation. Il établira un conseil consultatif au niveau de sous-ministre pour faire en sorte que tous acceptent le processus et pour que le processus d’appel d’offres soit ouvert, transparent et équitable.

Permettez-moi maintenant de brosser un tableau un peu plus complet de la situation. Je me souviens que, lorsque j’étais enfant, je faisais de la peinture à numéros. Je crois que je dois appliquer ce concept ici. Les idées et les discours entourant les retombées locales ne sont pas nouveaux pour moi. J’en ai pris connaissance il y a une dizaine d’années, dans ma carrière précédente au sein d’une fondation privée vouée à réduire la pauvreté. Nous étions intrigués par les exemples de politiques relatives aux retombées locales à l’étranger et nous nous demandions si leur application au Canada aurait du potentiel. Nous avons effectué des recherches informelles à leur égard et avons examiné comment elles étaient mises en œuvre et appliquées. Puis, après avoir examiné les données probantes, nous avons fait valoir leur utilisation et leur application à Toronto, en Ontario. Maintenant, je me retrouve ici, faisant valoir l’idée pour le Canada tout entier.

Je vais vous donner quelques exemples de la vie concrète qui montrent l’utilité d’une entente provinciale sur les retombées locales, ou ce que j’appelle une entente évoluée sur les retombées locales. À Toronto, l’aménagement du train léger sur rail Eglinton Crosstown fait l’objet d’un investissement massif dans les infrastructures de 8,4 milliards de dollars. Le projet est le fruit d’un partenariat entre la province de l’Ontario, la ville, des groupes communautaires et, bien entendu, le consortium d’entreprises de construction responsables de sa réalisation.

Les projets de cette envergure ne sont pas une nouveauté au Canada. Ce qui est nouveau, par contre, et quelque peu unique, c’est qu’une certaine proportion des heures de travail des gens de métier pour la réalisation du projet doivent être accomplies par des apprentis et des compagnons qui vivent le long du corridor de transport en commun et qui ont du mal à se trouver une place sur le marché du travail.

Je pense surtout au corridor York-Weston, à Toronto, dans un quartier principalement ouvrier. Au début du projet, il était entendu que les retombées locales ne pouvaient provenir d’un seul acteur. Tous devaient travailler de concert : le consortium d’entrepreneurs en construction, le secteur privé, les membres de la localité et les travailleurs syndiqués et non syndiqués, les gouvernements provinciaux ainsi que les pouvoirs publics locaux. Tous doivent collaborer pour mener à bien ce projet d’infrastructure massif. Elles doivent construire un métro pour décongestionner le réseau routier, mais elles doivent aussi s’assurer de donner au projet une valeur qui est plus que simplement matérielle.

(1540)

Le consortium d’entreprises du domaine de la construction, formé d’EllisDon, de SNC-Lavalin, d’Aecon et d’ACS–Dragados, a affirmé ceci au sujet de sa participation au projet après cinq ans :

Nous tenons à maintenir notre engagement dans la collectivité. Nous disposons d’un plan solide pour la construction d’infrastructures, ainsi que des gens pour le réaliser [...]

[...] Notre objectif est d’offrir une stabilité d’emploi aux apprentis et aux compagnons qui participent à ce projet, alors que ces catégories d’employés ont historiquement été désavantagées et traitées inéquitablement. Notre priorité est le développement de la main-d’œuvre torontoise et la croissance des gens qui travaillent pour nous.

Ainsi, non seulement Toronto bénéficiera du système de train léger, mais la collectivité locale en tirera aussi des avantages. Cela changera la vie des utilisateurs déjà accablés du transport en commun et du train léger à Toronto, ainsi que celle des gens de métier qui auront regagné le marché du travail.

Prenons maintenant un exemple plus à l’ouest. Le projet de la route de l’île de Vancouver, construite dans les années 1990, comprenait une entente concernant une plus grande représentativité de différents groupes pour la construction. Un rapport d’évaluation est arrivé à la conclusion suivante :

La réussite fut impressionnante. En 1994, les employés des groupes ciblés — les peuples autochtones, les femmes, les personnes handicapées et les minorités visibles — ne comptaient que pour 8 p. 100 des heures de travail du projet et, en 1998, ce pourcentage dépassait légèrement les 22 p. 100 [...]

De plus, étant donné que le projet embauchait des gens du coin, des économies ont été réalisées. Les travailleurs provenaient du marché local plutôt que d’être recrutés à l’extérieur de Vancouver, voire à l’étranger.

Des municipalités ont également conclu des ententes sur les retombées locales. Pendant la construction du village olympique à Vancouver, on a dépensé 42 millions de dollars dans les entreprises locales, et 120 travailleurs de la région ont été embauchés pour occuper divers emplois dans le domaine de la construction.

À Los Angeles, là où le concept est le mieux établi, les ententes sur les retombées locales existent depuis 20 ans. Leur utilisation a permis d’embaucher plus de 8 000 travailleurs régionaux défavorisés.

Une autre façon d’examiner les retombées est d’évaluer le réinvestissement dans l’économie locale. Au pays de Galles, on a étudié 35 projets d’une valeur de 465 millions de livres. Il a été déterminé que 85 p. 100 de la valeur avait été réinvestie dans les petites entreprises locales. Chaque livre dépensée représentait environ 1,8 livre de retombées pour la collectivité.

Honorables sénateurs, au-delà de la situation à court terme, les retombées locales pourront également aider le pays à s’attaquer à certains problèmes très pressants dans l’avenir.

D’abord, nous savons que l’économie canadienne a grandement profité de la mondialisation et du libre-échange. L’ouverture des marchés et le libre-échange ont mené à la création de millions d’emplois partout au pays, et j’espère qu’ils seront préservés et même plus nombreux selon le nouvel Accord États-Unis—Mexique—Canada. Je crois que la grande majorité des Canadiens appuient le libre-échange.

Nous savons également que le libre-échange et la mondialisation créent des gagnants et des perdants. Les gens de tous les horizons politiques s’entendent pour dire que le libre-échange ne profite pas équitablement à tout le monde. Les retombées qui en découlent ne sont pas partagées équitablement dans les collectivités, qui ne peuvent donc pas en profiter de façon équitable.

Il suffit de penser qu’il y a, d’un côté, la croissance du secteur de la technologie et des services numériques et, de l’autre, l’affaiblissement du secteur manufacturier. Il y a donc deux groupes de gens. Il y a ceux qui profitent de l’économie et ceux qui se heurtent à d’énormes obstacles. Cet écart croissant entre ceux qui profitent de débouchés et ceux qui n’en ont pas est une réalité indéniable, comme l’a dit Daniele Zanotti, de Centraide.

Peut-être est-il temps que le mondialisme laisse un peu de place au localisme. Les gouvernements, les entreprises et les collectivités pourraient profiter d’une injection stratégique de localisme dans l’économie. Cela peut être en partie réalisé grâce à des retombées locales. Il n’y a jamais — je le dis encore — qu’un seul chemin qui permette d’arriver à nos fins. Nous devons aménager plusieurs chemins.

Une deuxième raison très importante et très concrète pour laquelle il faut privilégier les retombées locales, c’est la nécessité de répondre aux besoins futurs du marché du travail, en particulier dans l’industrie de la construction. Même aujourd’hui, des pénuries se font sentir, et l’industrie doit souvent avoir recours à des travailleurs étrangers temporaires pour répondre à la demande. Tous ceux d’entre vous qui ont une idée des formalités administratives qu’il faut remplir pour se conformer aux normes afin de pouvoir recourir à des travailleurs étrangers temporaires connaissent les prouesses que les employeurs doivent accomplir. C’est pourquoi il est préférable, et de loin, de puiser dans le bassin de talents locaux.

Par ailleurs, on s’attend à ce que la pénurie s’aggrave. Selon ConstruForce Canada, plus de 250 000 travailleurs de la construction devraient prendre leur retraite d’ici 10 petites années. Ce chiffre représente presque le quart des effectifs dans l’ensemble des disciplines : les opérateurs d’équipement lourd, les électriciens, les maçons, les tôliers et les soudeurs. Il y aura de graves pénuries dans tous ces secteurs. La crise est imminente, et il faut trouver des solutions.

Pour répondre aux besoins croissants en main-d’œuvre, il est possible de conclure des ententes sur les retombées locales dès aujourd’hui pour attirer des membres de groupes démographiques nouveaux ou sous-représentés au sein des métiers spécialisés. L’industrie est au courant de cette réalité. Bill Ferreira, directeur général de ConstruForce Canada, a déclaré ceci :

En raison de la concurrence accrue pour un bassin décroissant de nouveaux venus, il sera nécessaire [...] d’attirer un grand nombre de nouveaux Canadiens, de femmes et d’Autochtones au sein de la main-d’œuvre en construction du Canada.

Aujourd’hui, à la réunion du Comité des affaires sociales, Robert Blakely, des Syndicats des métiers de la construction du Canada, nous a dit que, pour combler la pénurie de main-d’œuvre de 250 000 travailleurs, le secteur des métiers devra recruter 500 000 personnes, car un apprenti sur deux ne termine pas son programme.

Les femmes ne représentent que 4 p. 100 de la main-d’œuvre dans le secteur de la construction. Je crois qu’elles pourraient y être beaucoup plus nombreuses. L’industrie de la construction n’a pas ménagé ses efforts pour miser activement sur de nouvelles sources de main-d’œuvre et il convient de l’en féliciter. J’ai rencontré des représentants de l’industrie et ils m’ont présenté une excellente proposition qui encouragerait l’embauche de femmes diplômées en science, en technologie, en ingénierie et en mathématiques. J’appuie cette proposition. Cependant, comme je l’ai dit, il n’y a pas qu’un chemin qui mène à Rome, il y en a plusieurs. Les ententes sur les retombées locales constituent l’un des nombreux outils disponibles qui nous aideront à éliminer l’écart entre la demande et l’offre.

Les Chambres de commerce de Montréal, de Vancouver et de Toronto ont toutes déclaré que les ententes sur les retombées locales sont un bon modèle économique pour bâtir des économies locales et s’attaquer aux pénuries de main-d’œuvre imminentes. La chambre de commerce de la région de Toronto a tenu les propos suivants :

Les gouvernements, les entreprises, les syndicats, les organismes sans but lucratif et d’autres organisations peuvent favoriser la prospérité sociale et économique de leurs collectivités en élargissant l’utilisation d’ententes sur les retombées locales [comme approche d’approvisionnement à vocation sociale].

Honorables sénateurs, les ententes sur les retombées locales maximisent le potentiel des entreprises et des collectivités. Elles permettent de multiplier par deux, trois ou quatre les fonds privés et publics qui ont déjà été attribués. Elles permettent aussi l’embauche et la formation de gens de talent de la communauté qui ont de la difficulté à intégrer le marché du travail, et que le marché du travail a du mal à joindre, comme les anciens combattants, les nouveaux arrivants, les jeunes, les femmes ou les Autochtones.

Elles appuient les entreprises locales, en particulier lorsqu’il s’agit d’offrir des possibilités et des investissements à des fournisseurs locaux, y compris des entreprises à caractère social ainsi que des petites et moyennes entreprises.

Pour les entreprises de construction, les ententes sur les retombées locales permettent d’accélérer les processus d’approbation et de réduire le fardeau administratif, car elles créent et maintiennent des alliances dans la collectivité avant même le début des travaux. Les préoccupations sont dissipées au début des démarches, ce qui prévient les retards ainsi que, j’imagine, les poursuites judiciaires coûteuses. Bien entendu, ces ententes aident également les compagnies à être perçues comme des tenantes de l’engagement communautaire.

Par ailleurs, mettre une telle chose en place n’entraînera pas de dépenses excessives de la part du gouvernement.

(1550)

La Ville de Toronto, dont le programme très bien rodé d’approvisionnement à vocation sociale — ce sont des milliards de dollars — n’a embauché qu’une seule personne en plus pour diriger sa stratégie en matière d’approvisionnement à vocation sociale. Les évaluations des retombées locales sont, en gros, équivalentes à la pratique et à l’exercice de gestion du changement pour les gouvernements et les entreprises observés lors de l’introduction des pratiques en matière de santé et de sécurité dans les années 1980.

À court terme, les évaluations des retombées locales représentent un moyen novateur et rentable pour retirer de nombreux avantages des dépenses publiques sans que les frais d’approvisionnement n’augmentent. À long terme, elles peuvent faire beaucoup pour atténuer les problèmes grandissants qu’entraînent la mondialisation et les chaînes mondiales d’approvisionnement et faire en sorte que les besoins du marché du travail soient comblés par des travailleurs ici, au Canada.

Merci, chers collègues.

Des voix : Bravo.

L’honorable David M. Wells : Sénatrice Omidvar, accepteriez-vous de répondre à une autre question?

La sénatrice Omidvar : Volontiers.

Le sénateur Wells : Merci beaucoup pour votre discours, sénatrice Omidvar.

J’aimerais que vous précisiez quelque chose. Je crois que je vous ai entendu le dire, mais j’aimerais en être sûr.

Cette mesure concerne seulement les projets d’infrastructure du gouvernement fédéral, et pas les projets fédéraux-provinciaux ou les fonds fédéraux accordés aux provinces qui... D’accord. Merci.

Accepteriez-vous de répondre à deux autres questions? Elles sont très brèves.

La sénatrice Omidvar : Sénateur, le langage corporel est, je crois...

Son Honneur le Président : Excusez-moi, sénatrice Omidvar.

Aviez-vous fini de poser votre question?

Le sénateur Wells : J’ai une autre question.

La sénatrice Omidvar : Je veux répondre à la première question...

Le sénateur Wells : Oh, je suis désolé.

La sénatrice Omidvar : ... parce que je crois que je devrais le faire, au lieu de ne pas y répondre. Je devrais dire non, pour le compte rendu.

Le sénateur Wells : J’ai une autre question, sénatrice Omidvar.

La sénatrice Omidvar : Bien sûr.

Le sénateur Wells : L’exigence relative aux retombées locales sera-t-elle une condition pour l’obtention d’un financement, ou simplement une partie du processus de demande et de production de rapports?

La sénatrice Omidvar : Merci, Votre Honneur. Je suis très impatiente de répondre à toutes les questions du sénateur Wells et des autres sénateurs.

Cela fera partie du processus de demande. Ce ne sera pas une condition pour l’obtention d’un financement.

Le sénateur Wells : Accepteriez-vous de répondre à une autre question, sénatrice Omidvar?

La sénatrice Omidvar : Bien sûr.

Le sénateur Wells : Merci. Il me semble que cela ne fait qu’alourdir le fardeau administratif. Si ce n’est pas une condition de la demande, c’est simplement pour fins de rapport. Ne pourrait-on pas simplement inclure l’exigence de produire une évaluation ou un énoncé en matière de retombées locales dans les conditions d’obtention de financement ou d’investissement en infrastructure, plutôt que dans un projet de loi? Nous sommes saisis d’un projet de loi visant à ajouter un élément à une demande de financement. Cela ne pourrait-il pas simplement être une condition de la demande?

La sénatrice Omidvar : Je vais aborder d’abord la question de l’alourdissement du fardeau administratif, que je pense que vous avez soulevée.

En réalité, je crois que les ententes sur les retombées locales réduiront les tracasseries administratives parce que la localité appuiera dès le départ le projet. En fait, imaginez les tracasseries qu’éviteront les entreprises parce qu’elles auront accès à des bassins de main-d’œuvre auxquelles elles n’avaient pas accès auparavant. Je pense que ce sera extrêmement avantageux pour elles.

Vous avez ensuite demandé pourquoi nous avons besoin d’une mesure législative. Nous en avons besoin d’une parce que cela encourage le gouvernement et les entreprises à penser différemment, à sortir des sentiers battus. Je vous remercie, sénateur Mercer. Je crois que nous avons tous tendance à être figés dans nos idées, et que la gestion du changement nous permet d’innover.

Je crois que nous avons besoin d’une mesure législative parce que cela pourrait bien nous emmener dans une nouvelle direction. Comme je l’ai dit, il y aura des rapports annuels, et ces rapports, ces mesures de suivi, aideront le gouvernement à comprendre si une telle initiative vaut la peine d’être poursuivie à long terme et, dans l’affirmative, de quelle manière.

L’honorable Donna Dasko : La sénatrice accepterait-elle de répondre à une autre question?

La sénatrice Omidvar : Oui.

La sénatrice Dasko : Vos exemples concernant Toronto m’ont beaucoup plu, sénatrice.

Dans votre discours, vous avez mentionné que, si le projet de loi est adopté, le ministre établira un comité de représentants de l’industrie au niveau de sous-ministre. Pouvez-vous nous dire quels seront son mandat, ses objectifs et son fonctionnement? Le comité se penchera-t-il sur un projet en particulier? Est-ce plutôt un comité général qui étudiera l’ensemble des règlements? Quel est son but? Merci.

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie de votre question, sénatrice Dasko.

Le comité consultatif est extrêmement important. J’ai beaucoup insisté auprès du gouvernement et, comme je l’ai dit, il a donné son accord.

Les ententes sur les retombées locales s’appliquent dans certains contextes et dans certaines situations. Il y a différents facteurs à prendre en compte : l’étendue, l’envergure, la progression et l’échéancier des projets. Je crois que le ministre et le gouvernement devront discuter de ces questions avec les intervenants de l’industrie afin d’établir dans quels cas ils peuvent demander — et je parle bien d’une demande — un énoncé des retombées locales pour déterminer ce qui serait dans l’intérêt des collectivités. Les ententes sur les retombées locales ne conviennent pas à tous les projets d’approvisionnement fédéraux. J’espère que j’ai répondu à votre question.

L’honorable Mary Coyle : La sénatrice Omidvar accepterait-elle de répondre à une autre question?

La sénatrice Omidvar : Oui.

La sénatrice Coyle : Je vous remercie de votre discours fort intéressant, que j’ai écouté avec plaisir. Plus tôt cette semaine, pendant une rencontre du Caucus anti-pauvreté multipartite, nous avons parlé de la situation financière des nouveaux arrivants au Canada. Quelqu’un a mentionné que le Sénat serait bientôt saisi de cette mesure législative. Je suis donc ravie qu’elle soit maintenant au Sénat.

Vous avez mentionné que d’autres endroits des États-Unis et du Canada avaient de l’expérience dans le domaine et qu’il existait beaucoup de renseignements à ce sujet. J’espère que la mesure proposée tient compte des pratiques exemplaires qui découlent de cette expérience.

J’ai une question très précise à propos du sens du mot « collectivité », que vous utilisez parfois avec « locale ». Ces termes ont retenu mon attention, puisque, comme je l’ai appris pendant les travaux du Comité sur l’Arctique — il s’agit d’une situation différente et d’entreprises privées qui ont des ententes sur les répercussions et les avantages avec des peuples et des collectivités du Nord —, il arrive que ces ententes sur les répercussions ne procurent pas de retombées positives à la population locale. Les ententes sur les retombées locales ne comportent pas d’exigences relatives à la contiguïté. Je me demande comment le terme « collectivité » est interprété dans ce contexte?

La sénatrice Omidvar : Merci, sénatrice Coyle, c’est une question très intéressante. Elle devrait peut-être être posée à des témoins qui pourraient offrir une réponse plus claire que je ne le peux.

Je crois comprendre que lorsque cela n’est pas précisé, on parle de la population locale, mais je comprends ce que vous voulez dire. Peut-être que, dans certains cas, des populations autres que la population locale pourraient être liées au projet. J’ai du mal à penser à un exemple, car je pense au train léger sur rail et il s’agit de la population locale dans ce cas, mais c’est peut-être possible. Si le projet de loi est renvoyé au comité, comme je le souhaite, j’espère qu’on répondra à cette question.

L’honorable Frances Lankin : Pour ne pas prendre trop de temps, je vais regrouper mes deux questions en une seule, sénatrice. Il faut dire que, comme c’est souvent le cas avec les bons orateurs, vous avez répondu à bon nombre de mes questions dans votre discours.

Il m’en reste deux. J’ai rencontré dernièrement les représentants de l’Association canadienne de la construction, et ils m’ont dit être nettement favorables aux ententes sur les retombées locales.

J’aimerais d’abord parler de Los Angeles et de vos 20 années d’expérience. Vous avez dit au début qu’il s’agit d’une mesure modeste, mais qui aura une grande portée. Pourriez-vous nous donner des exemples de retombées que vous avez pu observer à Los Angeles, notamment sur le long terme?

J’aimerais ensuite revenir sur la question de la sénatrice Coyle au sujet des retombées locales. Vous avez parlé de mondialisation et de localisation. Certains ici présents se demandent si nous ne sommes pas en train de nuire au commerce interprovincial. Selon vous, le recours aux entreprises locales risque-t-il d’avoir des conséquences que nous ferions mieux de connaître? Remarquez, si vous croyez que le comité est mieux placé pour répondre à cette question, je n’ai rien contre.

La sénatrice Omidvar : Commençons par Los Angeles. Mes souvenirs sont un peu vagues, mais je crois me souvenir du profil démographique des 8 000 travailleurs, environ.

(1600)

À l’époque, il n’y en avait pas 8 000, mais environ 5 000. Il s’agissait en majorité de femmes, et, compte tenu de la démographie de Los Angeles, ces travailleuses étaient surtout d’origine hispanique.

Elles ont trouvé un emploi dans l’industrie locale de l’hôtellerie et de la restauration ainsi que du tourisme, et l’association hollywoodienne de production — j’ai oublié son nom — était à la table de négociations. C’était dans son intérêt de veiller à ce que l’industrie de l’hôtellerie et de la restauration de Los Angeles soit inclusive quant à la main-d’œuvre. Fait intéressant, il s’agissait en fait d’une demande subtile de la part de grands noms d’Hollywood qui disaient : « Quand on séjourne dans un hôtel, on veut que les personnes qui y travaillent représentent la collectivité et reçoivent un salaire convenable. »

Voilà certains des points très positifs. Je vous prie de vous rappeler que c’est arrivé en aval, après que l’on ait déployé des efforts en amont. Nous ne pouvons pas imaginer de tels résultats actuellement, parce que nous n’en sommes littéralement qu’au stade des balbutiements.

La deuxième question était de nature interprovinciale. Ce serait une question à poser au comité.

L’honorable Tony Dean : Sénatrice Omidvar, accepteriez-vous de répondre à une autre question?

La sénatrice Omidvar : Oui

Le sénateur Dean : Je vous remercie de parrainer ce projet de loi. Comme vous l’avez dit, le gouvernement consacre des milliards de dollars par année à l’infrastructure, et ces dépenses entraînent peu de retombées et de progrès sociaux.

Ceux qui proposent cette idée — et d’autres idées qui supposent de générer des retombées sociales avec les dépenses privées et publiques — me disent qu’ils avaient commencé à en discuter avec des fonctionnaires sous le gouvernement précédent. Je comprends que leurs idées ont été accueillies favorablement par certains et que c’est là que tout a commencé.

C’est donc une discussion qui fait son chemin lentement d’un gouvernement à l’autre. Nous pouvons remercier les fonctionnaires de faire en sorte qu’il en soit ainsi.

Vous avez mentionné les pénuries de main-d’œuvre dans le secteur de la construction. Je crois que les entreprises de construction reconnaissent que la participation de travailleurs d’autres groupes que les groupes habituels — comme les anciens combattants, les nouveaux arrivants, les Autochtones et les femmes — sera nécessaire pour remédier à ces pénuries, qui sont bien connues et qui iront en s’accentuant.

Pourriez-vous nous donner davantage d’information sur la façon dont les retombées locales contribueraient à combler les lacunes que pourraient avoir ces personnes?

La sénatrice Omidvar : Oui. Merci de votre question, sénateur.

Je crois que vous en savez davantage sur l’élaboration et la mise en œuvre des ententes sur les retombées locales, puisque vous avez été chef de la fonction publique de l’Ontario, et que l’Ontario a plus d’expérience que n’importe quelle autre région à ce que chapitre.

Lorsqu’on cherche à promouvoir l’embauche et la formation, les ententes sur les retombées locales font souvent appel à un consortium de construction. J’aimerais citer l’exemple du consortium de construction de Toronto, qui regroupe notamment des intervenants comme SNC-Lavalin et AECON.

Ces intervenants ont travaillé avec des groupes communautaires comme l’association des résidants du corridor Jane-Finch. Cette association a consulté la collectivité du corridor Jane-Finch pour savoir qui était intéressé et prêt à suivre une formation.

Il incombe à la collectivité de faire ces efforts, d’élaborer des mécanismes et des critères et d’en faire part au consortium en vue de déterminer qui peut suivre une formation et se faire embaucher. Voilà comment on procède.

Cependant, les retombées vont au-delà de l’embauche et de la formation d’une personne. Ce consortium de la construction peut soudainement créer des liens avec la communauté noire, qui compte bien des gens sous-employés, et j’irais jusqu’à dire qu’elle compte de nombreux jeunes frustrés, car cette communauté n’a pas les mêmes perspectives d’emploi que les autres. C’est un excellent exemple.

Je vous remercie de votre question, sénateur.

(Sur la motion du sénateur Wells, le débat est ajourné.)

Le Sénat

Motion tendant à demander au gouverneur en conseil de nommer le greffier du Sénat conformément à la recommandation du Sénat—Motion d’amendement—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Housakos, appuyée par l’honorable sénatrice Martin,

Que, dans le souci de promouvoir l’autonomie et l’indépendance du Sénat, le Sénat demande au gouverneur en conseil de nommer le greffier du Sénat et greffier des Parlements conformément à la recommandation expresse du Sénat.

Et sur la motion d’amendement de l’honorable sénatrice Saint-Germain, appuyée par l’honorable sénateur Housakos,

Que la motion ne soit pas maintenant adoptée, mais qu’elle soit modifiée par l’adjonction, immédiatement avant le point final, de ce qui suit :

« ;

Que le Sénat donne instruction au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration d’étudier et de recommander au Sénat, au plus tard le quinzième jour de séance après l’adoption de cette motion, un processus par lequel le Sénat pourrait soumettre au gouverneur en conseil sa recommandation sur la nomination d’une personne ou d’une liste de personnes ayant les qualités et les compétences requises pour le poste de greffier du Sénat et greffier des Parlements ».

L’honorable Joseph A. Day (leader des libéraux au Sénat) : Honorables sénateurs, cette motion a été présentée par l’honorable sénateur Housakos, avec l’appui de l’honorable sénatrice Martin. Dans le souci de promouvoir l’autonomie et l’indépendance du Sénat, le Sénat demande au gouverneur en conseil de nommer le greffier du Sénat et greffier des Parlements conformément à la recommandation expresse du Sénat.

L’amendement de la sénatrice Saint-Germain, de son côté, précise le processus à l’issue duquel le Sénat ferait cette recommandation. J’appuie la motion et l’amendement.

Je vous explique brièvement pourquoi. Techniquement, je parle de l’amendement de la sénatrice Saint-Germain, car c’est de celui-là que le Sénat est saisi.

Signalons tout d’abord que c’est le gouverneur en conseil qui nomme le greffier du Sénat et greffier des Parlements. Voici ce que dit l’alinéa 130b) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique :

Le gouverneur en conseil peut nommer les personnes suivantes et fixer leur traitement : [...] le greffier du Sénat [...]

Absolument rien dans la loi ne précise qu’il doive consulter qui que ce soit. Le gouverneur en conseil peut agir unilatéralement et de son propre chef.

Or, comme l’a fait remarquer le sénateur Housakos, le gouvernement a beaucoup insisté sur l’autonomie et l’indépendance du Sénat. Dans les circonstances, il serait logique que le Sénat ait son mot à dire sur le choix de son plus haut responsable, puisqu’il est autonome et indépendant.

Le sénateur Housakos propose que le gouverneur en conseil, autrement dit, le Cabinet ou le gouvernement, nomme le greffier du Sénat :

[...] conformément à la recommandation expresse du Sénat.

Ce que le sénateur Housakos propose à titre de processus officiel correspond à ce qui s’est produit à l’occasion par le passé de manière informelle. C’est une question qui intéresse le Sénat depuis fort longtemps.

(1610)

Peut-être que la meilleure façon de nous plonger dans le dossier est de lire, pour qu’elles figurent dans les annales du Sénat, quelques-unes des lettres échangées depuis quelque temps à ce sujet, car cela aide à comprendre ce que pensent certains sénateurs.

Dans ses observations, le sénateur Housakos a parlé de cette même correspondance. Puisque le choix du greffier du Sénat concerne tous les sénateurs, nous devons tous être au courant des détails de ce qui se passe et des idées qui ont été échangées.

L’été dernier, nous avons appris, par l’entremise du Président, que le gouvernement avait l’intention d’établir un processus de sélection pour le nouveau greffier du Sénat. En réaction à cette nouvelle, le 27 juillet 2017, les sénateurs Smith, McCoy et moi avons envoyé au Président ainsi qu’au sénateur Harder une lettre exprimant notre point de vue. Je vous en cite les grandes lignes pour que vous compreniez ce qui est proposé :

Nous remercions [...] le Président de nous avoir avisés qu’il planifie lancer un concours en vue de recruter et d’embaucher un nouveau greffier du Sénat. [...] Les sénateurs eux-mêmes doivent jouer un rôle de premier plan dans ce processus [...].

[...] Par conséquent, nous proposons que le comité de sélection soit formé du Président, d’un sénateur représentant le gouvernement de même que d’un sénateur représentant chacun des caucus politiques et chacun des groupes parlementaires au Sénat.

C’est le comité de sélection que nous proposions. Nous avions souligné que, en 1994 — c’est une partie de l’histoire :

La nomination de M. Paul Bélisle au poste de greffier du Sénat avait été recommandée au premier ministre par la leader du gouvernement, la sénatrice Joyce Fairbairn, avec l’appui entier du leader de l’opposition, le sénateur Lynch-Staunton. Plus récemment, lorsque Charles Robert a été nommé greffier du Sénat par le premier ministre, c’était sur la recommandation du Président de l’époque, le sénateur Nolin, appuyé par le leader du gouvernement, le sénateur Carignan, et par le leader de l’opposition, le sénateur Cowan.

C’est, chers collègues, l’histoire dont je parlais plus tôt.

Comme l’expliquait la lettre en question, il y avait au moins ces deux précédents, où les leaders au Sénat avaient fait une recommandation au premier ministre quant au choix du nouveau greffier et ces recommandations avaient été acceptées et respectées, d’abord par le premier ministre Jean Chrétien, puis par le premier ministre Stephen Harper. C’était bien avant que le gouvernement déclare qu’il voulait un Sénat vraiment indépendant qui agirait de manière indépendante.

Le 7 septembre 2017, le Président a répondu à notre lettre de juillet. Je ne lirai pas tout le contenu de la lettre, mais le Président convenait que « [...] le gouvernement doit avoir recours à un cadre ouvert et concurrentiel pour la nomination, cadre comprenant des consultations avec les leaders ». Il a également souligné à juste titre que, puisqu’il est question d’une nomination du gouverneur en conseil, il s’agit « d’une politique gouvernementale qui est hors du contrôle du bureau du Président du Sénat ».

Le lendemain, le 8 septembre 2017, le sénateur Harder a répondu à notre lettre du 27 juillet, qui venait de nous trois. Voici les faits saillants de sa lettre du 8 septembre :

Comme vous le savez, conformément à la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, la nomination du greffier incombe ultimement au gouverneur en conseil [...]

Il traite ensuite de la politique, comme le Président l’a fait, en indiquant que les nominations faites par le gouverneur en conseil sont encadrées par des politiques gouvernementales. Comme le gouvernement est ultimement tenu responsable des nominations du gouverneur en conseil, il suit de très près le processus de nomination. Il s’agit d’un processus rigoureux, compétitif, transparent et fondé sur le mérite. Nous sommes tous d’accord là-dessus.

La lettre se poursuit ainsi :

Par ailleurs, bien que la loi ne l’exige pas, je m’attends à ce que le prochain processus de sélection [du nouveau greffier] comporte une étape de consultation avec les leaders au Sénat.

Voilà où en sont les choses. Inutile de dire que le sénateur Smith, la sénatrice McCoy et moi avons été pour le moins déçus de cette réponse.

Même s’il avait été question de nous consulter, la possibilité que des sénateurs fassent partie du comité de sélection n’a pas été mentionnée. Dans bien des cas, le comité de sélection est mis sur pied et il recommande une ou plusieurs personnes. La liste est ensuite transmise au premier ministre. Alors qu’elle est déjà en route, on nous demande : « En passant, avez-vous des objections par rapport à l’un ou l’autre de ces candidats? » Cela ne constitue pas une participation au processus de sélection. Voilà la raison de notre déception.

Le 22 septembre, nous avons tous les trois écrit au sénateur Harder. C’est une lettre assez longue, mais elle renferme une bonne partie des points que nous avions déjà soulevés. Nous avons souligné que la nomination de Paul Bélisle à la fonction de greffier et la nomination de Charles Robert avaient été recommandées au premier ministre par les leaders au Sénat et que la lettre qu’il nous avait adressée ne renfermait aucun engagement à voir à ce que des sénateurs fassent partie du comité de sélection.

Nous avons également souligné dans notre lettre que le conseiller sénatorial en éthique a été, lui, nommé conformément à une approche de nomination par décret moderne. Aux termes de l’article 20.1 de la Loi sur le Parlement du Canada, la nomination du conseiller sénatorial en éthique nécessite d’abord la « consultation du chef de chacun des partis reconnus au Sénat ».

Cependant, en plus de cette obligation de consultation prévue dans la loi, il y a l’assurance qui avait été donnée par le sénateur Jack Austin, qui était leader du gouvernement en 2004, que le nom de tout candidat proposé au poste de conseiller sénatorial en éthique émanerait du Sénat. Le sénateur Austin a dit ceci :

[...] je prends l’engagement suivant au nom du gouvernement : avant de communiquer au Sénat le nom d’une personne proposée comme conseiller sénatorial en éthique, le leader du gouvernement au Sénat sera autorisé à consulter de façon officieuse les chefs de chacun des partis reconnus au Sénat et d’autres sénateurs et à présenter au gouverneur en conseil les noms des personnes qui, de l’avis du leader du gouvernement au Sénat, ont la faveur des chefs de tous les partis reconnus, ainsi que le soutien de la majorité des sénateurs du parti ministériel et de l’opposition.

(1620)

C’est ce que le sénateur Austin, leader du gouvernement au Sénat de l’époque, a déclaré dans cette enceinte, reconnaissant ainsi l’importance de la participation des sénateurs au processus de sélection du greffier.

Il convient de noter que ce processus, qui prévoit que c’est le Sénat qui propose le nom des candidats, est essentiellement celui que l’on a utilisé pour les nominations par le gouverneur en conseil de Paul Bélisle, puis de Charles Robert comme greffier du Sénat, ainsi que greffier intérimaire.

Nous avons aussi souligné dans notre lettre que cet engagement ministériel — car il s’agissait bien d’un engagement ministériel, puisque le sénateur Austin était aussi ministre — n’est toutefois pas juridiquement contraignant pour les prochains gouvernements. Nous avons reconnu cette réalité. Le sénateur l’avait aussi reconnu et il a déclaré ceci :

Le gouvernement actuel croit que cet engagement a le mérite d’être une solution adéquate et efficace qui peut être mise en application pour régler le problème. Voilà pourquoi nous pensons que les futurs gouvernements jugeront opportun de l’appliquer. Le gouvernement actuel espère qu’avec le temps, cela deviendra l’usage.

Dans notre lettre destinée au sénateur Harder, nous avons écrit ceci : « Nous croyons que, quand le sénateur Austin a parlé au nom du gouvernement libéral du premier ministre Paul Martin et qu’il a pris cet engagement, il a mis en place une formule réfléchie et pratique pour s’occuper des nominations par le gouverneur en conseil qui touchent principalement le Sénat. »

Il s’agit d’un aspect important des nominations par le gouverneur en conseil qui touchent principalement le Sénat. C’est de cela qu’il est question ici. On ne devrait pas se fier à une formule — et c’est la déclaration portant sur une politique relative aux nominations par le gouverneur en conseil qui figurait dans les lettres que j’ai lues plus tôt. On ne devrait pas se fier à une formule qui est toujours la même, car le Sénat ne devrait pas s’attendre à faire partie d’un comité de sélection pour une nomination effectuée par le gouverneur en conseil qui ne touche pas le Sénat. C’est cet élément que je souhaite souligner.

Dans notre lettre, nous poursuivons comme suit : « Nous aimerions savoir si le nouveau gouvernement libéral estime qu’il convient de suivre cette approche [...] », que le sénateur Austin a décrite, ou s’il l’a abandonnée. Nous souhaitions le savoir, car, si le gouvernement continuait de suivre le même processus pour toutes les nominations, cela allait poser problème.

La politique du gouvernement sur les nominations par le gouverneur en conseil précise ce qui suit :

Le choix des membres du comité repose sur [...] les personnes qui connaissent les besoins de l’organisation.

C’est cette politique qui oriente les nominations au sein du comité de sélection.

Nous avons conclu notre lettre du 22 septembre 2017 comme suit : « Il va sans dire que, si le gouvernement insiste pour traiter le Sénat comme une “organisation” aux fins des nominations par le gouverneur en conseil, il serait difficile de comprendre pourquoi il souhaite donner l’impression que, selon lui, les parlementaires qui servent au Sénat ne sont pas vraiment “les personnes qui connaissent le mieux les besoins de l’organisation”. »

Je le fais remarquer aux honorables sénateurs, car, l’année dernière, quand le comité de sélection a été créé par le gouvernement pour trouver un nouveau conseiller sénatorial en éthique, il était composé d’une personne du cabinet du premier ministre, une du bureau du Conseil privé, une du bureau du leader du gouvernement au Sénat et une de l’Administration du Sénat. C’est tout. Voilà le comité de sélection que le gouvernement a créé après avoir mis en place sa nouvelle politique en matière de nominations par le gouverneur en conseil. Aucun sénateur n’y a participé.

Je tenais à ce que vous le sachiez. Je suppose que l’idée était que ces quatre personnes, qui ne sont pas des parlementaires, auraient du recul par rapport aux besoins de l’organisation. Je trouve cela décevant que le gouvernement croie que des fonctionnaires et du personnel politique sont tous plus qualifiés que les sénateurs eux-mêmes pour défendre les besoins du Sénat.

Honorables sénateurs, je vous exhorte à appuyer la motion du sénateur Housakos et la motion d’amendement de la sénatrice Saint-Germain.

Si le gouvernement souhaite vraiment que le Sénat soit plus indépendant, il doit respecter les précédents établis par le passé — Paul Bélisle et Charles Robert. Il devrait respecter ces précédents et la formule adoptée à l’instigation de l’ancien ministre et leader du gouvernement au Sénat, le sénateur Jack Austin, qui a reconnu cette indépendance. Nous ne devons pas revenir en arrière sur cette question, chers collègues.

(Sur la motion de la sénatrice Bellemare, le débat est ajourné.)

[Français]

Motion tendant à réaffirmer l’importance des deux langues officielles comme fondement de notre fédération compte tenu des coupes faites par le gouvernement de l’Ontario aux services en français—Motion d’amendement—Report du vote

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Miville-Dechêne, appuyée par l’honorable sénateur Klyne,

Que le Sénat, compte tenu des décisions prises par le gouvernement de l’Ontario en ce qui a trait au Commissariat aux services en français et à l’Université de l’Ontario français :

1.réaffirme l’importance des deux langues officielles comme fondement de notre fédération;

2.rappelle au gouvernement du Canada sa responsabilité de défendre et de promouvoir les droits linguistiques, tels qu’exprimés dans la Charte canadienne des droits et libertés et la Loi sur les langues officielles;

3.exhorte le gouvernement du Canada à prendre toutes les mesures nécessaires, conformément à ses compétences, pour assurer l’épanouissement et le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire.

Et sur la motion d’amendement de l’honorable sénateur Housakos, appuyée par l’honorable sénateur Mockler,

Que la motion ne soit pas maintenant adoptée, mais qu’elle soit modifiée par substitution du point 1 par ce qui suit :

« 1.réaffirme l’importance de la dualité linguistique, français et anglais, que nous ont léguée nos deux peuples fondateurs comme pierre angulaire de notre fédération et élément essentiel de notre identité canadienne; ».

L’honorable Marc Gold : Honorables sénateurs et sénatrices, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer la motion no 410 qu’a présentée initialement la sénatrice Miville-Dechêne, et pour m’opposer à l’amendement proposé par le sénateur Housakos.

J’appuie la motion initiale, parce que je crois fermement que le traitement équitable des francophones hors Québec est une question d’importance nationale et une obligation constitutionnelle. En tant que membre de la minorité anglophone du Québec, je comprends combien il est essentiel que nous ayons accès à l’éducation et aux services sociaux dans notre langue maternelle et que nous gardions le contrôle des institutions qui sont au cœur de l’avenir de notre communauté. Si c’est important pour les anglophones du Québec, ce l’est encore plus pour les francophones hors Québec.

J’appuie également la motion initiale, parce qu’elle nous a réunis au Sénat. C’est du moins ce que j’ai cru. C’est pourquoi je ne peux soutenir l’amendement proposé par le sénateur Housakos. Cet amendement vise à remplacer la référence aux deux langues officielles du Canada par une référence, et je cite : « à l’importance de la dualité linguistique, français et anglais, que nous ont léguée nos deux peuples fondateurs ».

Je ne sais pas ce qui a motivé le sénateur Housakos à proposer cet amendement, après que tant de sénateurs, y compris plusieurs de ses collègues du caucus conservateur, se sont exprimés avec passion pour appuyer la motion initiale. Je ne sais pas non plus pourquoi le texte de son amendement n’a pas été partagé avec la sénatrice Miville-Dechêne ni avec aucun des membres du Groupe des sénateurs indépendants, avant qu’il ne le présente en Chambre jeudi dernier. Ce que je sais, c’est que cela nous a tous surpris.

Quoi qu’il en soit, je voudrais me concentrer sur les termes de son amendement et expliquer pourquoi je ne peux pas l’appuyer.

Les mots comptent. Comme le sénateur Pratte l’a déclaré dans ses remarques en cette enceinte, on a soigneusement pesé chaque mot de la motion initiale afin de parvenir à un consensus dans cette Chambre, et le texte a été partagé avec les membres de chaque groupe parlementaire dans le but de dégager ce consensus, parmi nous tous, indépendamment de notre idéologie politique et de notre héritage ethnique, religieux ou linguistique.

(1630)

Si les discours sur la motion sont un guide, il semble évident que ces efforts ont réussi à nous unir sur cette question fondamentale d’importance nationale.

[Traduction]

La motion a eu de nombreuses versions provisoires. Dans sa version finale, elle se fonde sur le fait que le français et l’anglais sont les deux langues officielles du Canada. En réaffirmant ce fait juridique incontestable, elle fait le lien entre nous et notre rôle de sénateur, appelé au Sénat pour défendre la Constitution et faire respecter les droits des minorités.

Le sénateur Housakos croit que son amendement améliore la motion. Ce n’est pas le cas. Ce qu’il fait, c’est transformer une motion qui réaffirme un fait juridique incontestable au sujet des deux langues officielles du Canada en une motion qui fait valoir un fait historique selon lequel le Canada a été créé par « nos deux peuples fondateurs ».

Honorables sénateurs, nous sommes des parlementaires, pas des historiens. Si nous voulons jouer les historiens, il faut au moins faire les choses correctement.

Comme le sénateur Housakos, on m’a enseigné l’histoire canadienne dans les écoles publiques du Québec. Comme il l’a si bien dit, on nous a tous enseigné que le Canada est le produit de deux peuples fondateurs, les Français et les Anglais. Certes, les livres d’histoire des écoles primaires ne faisaient pas complètement abstraction de la présence des peuples autochtones dans l’histoire du Canada, mais ces derniers étaient des personnages secondaires dans les histoires qu’on nous a enseignées : des commerçants dans le meilleur des cas, sinon des sauvages, jouant leur petit rôle dans les aventures héroïques des coureurs des bois comme Radisson et des Groseilliers.

Toutefois, depuis ces années-là, ma compréhension de l’histoire du Canada a évolué et changé. Je lis maintenant ces livres d’histoire pour enfants avec des yeux d’adulte. Je comprends maintenant beaucoup mieux, quoique toujours en partie seulement, à quel point les nombreuses nations qui habitaient cette terre depuis bien avant l’arrivée des Européens étaient riches et diversifiées. J’en apprends encore beaucoup sur l’organisation politique des peuples autochtones du Canada et je découvre à quel point leurs traditions et leurs pratiques juridiques étaient développées et je me permettrais d’ajouter, à quel point elles font véritablement partie intégrante du droit canadien en vertu de notre Constitution.

Le fait est que notre pays n’a pas été créé par deux peuples fondateurs. Notre pays existait avant l’arrivée des Français et des Anglais, et ce sont les interactions de ceux-ci avec les Premières Nations qui occupaient déjà le territoire qui a façonné notre pays. Voilà la véritable histoire du Canada. L’amendement proposé par le sénateur Housakos dénature cette histoire et nous ramène à une époque où nous étions aveugles ou indifférents aux faits réels de l’histoire du Canada.

C’est notre vraie histoire, mais la reconnaître n’enlève rien au fait qu’il est important de protéger et de promouvoir les droits des minorités francophones et anglophones au Canada. Au contraire. Mieux nous appréhenderons la complexité de notre histoire et les difficultés que nous vivons tous pour que l’identité canadienne à laquelle nous aspirons n’exclue personne et respecte toutes nos différences, plus nous serons conscients du rôle fondamental que les Canadiens d’expression française ont joué et continuent de jouer dans l’évolution et le développement de notre pays.

La motion d’origine présentée par la sénatrice Miville-Dechêne a été libellée de manière à nous unir tous, au Sénat, et à nous unir tous en tant que Canadiens. L’amendement proposé par le sénateur Housakos nous divise. Pourquoi?

Honorables sénateurs, je voterai contre cet amendement et je vous presse d’en faire autant.

Des voix : Bravo.

Son Honneur le Président : Avez-vous une question, sénateur Housakos?

L’honorable Leo Housakos : Le sénateur Gold accepterait-il de répondre à une question ou deux?

Le sénateur Gold : Bien sûr.

Le sénateur Housakos : Sénateur Gold, vous affirmez dans votre discours que la motion d’origine présentée par la sénatrice Miville-Dechêne, qui a été rédigée de manière à unir le Sénat, a été transmise aux membres de l’opposition et ainsi de suite.

Selon l’information que je tiens de notre leader, la motion nous a été présentée 15 minutes après qu’elle a été déposée au Sénat et non avant. Pouvez-vous le conformer?

Le sénateur Gold : Merci pour votre question, sénateur Housakos. J’ai dit qu’elle avait été transmise aux membres de tous les groupes, et je le maintiens. Je ne suis pas au courant des autres points que vous avez soulevés.

Le sénateur Housakos : Si vous n’êtes pas au courant des autres points que j’ai soulevés, vous ne devriez pas laisser entendre que mon approche sortait en quelque sorte de l’ordinaire. Tout ce que j’ai fait, c’est de suivre le processus du Sénat, c’est-à-dire présenter un amendement, ce que tous les sénateurs ont le droit de faire à tout moment. Vous avez disposé de suffisamment de temps pour examiner cet amendement : plusieurs jours, près d’une semaine.

Je reviens encore une fois à votre prémisse selon laquelle votre amendement a été distribué plus à l’avance que le mien. Pouvez-vous m’expliquer quand il a été distribué avant d’être déposé?

Le sénateur Gold : Merci de votre question. Je vais répéter ma réponse pour qu’elle soit encore plus claire.

J’ai affirmé que la motion d’origine présentée par la sénatrice Miville-Dechêne a été transmise aux membres de tous les groupes parlementaires en vue de tenter de parvenir à un consensus. Je n’ai pas dit que vous aviez raison ou tort de suivre, comme vous l’affirmez, la procédure habituelle. J’ai simplement dit que votre amendement nous avait surpris.

Je tiens à ajouter, pour la gouverne des gens dans cette enceinte qui suivent peut-être cette discussion, que, une fois qu’il est devenu clair plus tôt cette journée-là que vous alliez proposer un amendement, nous vous avons demandé à de nombreuses reprises d’en communiquer le texte. Or, vous avez refusé de le faire, comme votre privilège vous le permet. Je maintiens ce que j’ai dit dans ma déclaration et dans les réponses que je vous ai données.

Le sénateur Housakos : J’ai une autre question pour vous, sénateur Gold. Elle porte sur l’histoire du Canada. Dans l’amendement que j’ai proposé, jamais, au grand jamais, je n’ai essayé de minimiser l’importance des peuples fondateurs, ni le fait qu’il s’agit des Premières Nations, ni le fait qu’ils étaient les premières personnes à habiter ce pays.

J’ai simplement affirmé et renforcé, dans l’amendement, que, en tant que Canadiens, nous savons tous que le pays, la fédération du Canada, la Constitution et l’Acte de l’Amérique Nord britannique découlent de l’entente conclue entre les deux peuples fondateurs aux Conférences de Québec et de Charlottetown. Si nos institutions, nos parlements, nos deux langues fondatrices sont ce qu’ils sont dans cette Confédération, c’est grâce au fait historique que le Canada, en tant que pays, a été fondé par des gens d’origine britannique et française.

Ne reconnaissez-vous pas que l’entité qu’est le Canada a été fondée par ces deux peuples fondateurs?

Le sénateur Gold : Sénateur Housakos, l’amendement que vous avez proposé d’apporter à la motion y ajoutait un élément qu’on a soigneusement choisi d’éviter, après un examen très attentif, dans le but que tous les sénateurs puissent arriver à un consensus.

Vous êtes peut-être las de me voir mettre mon chapeau de constitutionnaliste, comme je le fais trop souvent, mais il faut rappeler que, d’un point de vue technique, le Canada a été créé par une loi du Parlement britannique. Je le précise sans chercher à nier l’importance des Anglais et des Français qui, à l’époque, dominaient les structures politiques du Canada d’avant la Confédération.

Comme je l’ai mentionné, l’amendement que vous proposez est inexact sur le plan historique. Il ne respecte pas non plus l’esprit de la motion initiale, qui visait à nous unir, et nous nous retrouvons à débattre encore d’une chose qui aurait dû être réglée il y a une semaine.

[Français]

L’honorable Raymonde Gagné : Honorables collègues, je tiens à expliquer pourquoi je voterai contre l’amendement du sénateur Housakos.

Tout d’abord, je remarque que je prends la parole aujourd’hui au sujet d’un amendement, deux semaines après avoir appuyé la motion originale de la sénatrice Miville-Dechêne. Cette motion, à laquelle plusieurs sénatrices et sénateurs ont contribué, visait à obtenir un appui unanime dans cette Chambre et aussi à transmettre un message à tous ceux et celles qui étaient sous le choc et qui n’arrivaient pas à comprendre cette atteinte à leurs droits linguistiques. Je croyais sincèrement que, avec une motion aussi attentivement rédigée, nous aurions pu, honorables collègues, nous exprimer clairement et promptement dans le contexte que nous connaissons tous.

(1640)

Honorables collègues, la richesse de cette Chambre est sa diversité, ses nombreuses voix qui représentent toutes, à leur manière, ce grand pays. L’appui unanime pour n’importe quels motion, loi ou amendement n’est donc jamais acquis d’avance, et doit être mérité.

Ainsi, il faut savoir, honorables collègues, que cette motion avait été rédigée, travaillée et retravaillée par la sénatrice Miville-Dechêne et d’autres pour présenter un message simultanément fort et inclusif. On a dû la retravailler, tantôt pour assurer que les pouvoirs provinciaux sont respectés, tantôt pour tenir compte de la terminologie juridique, tantôt pour prendre en considération les intérêts et sensibilités des communautés francophones et anglophones et des peuples autochtones. Bref, elle devait mériter l’appui unanime souhaité.

D’ailleurs, les appuis sentis et exprimés dans cette Chambre, non seulement par des sénateurs indépendants, mais aussi par les représentants du gouvernement et par mes collègues libéraux et conservateurs, nous permettaient de croire qu’on pouvait dire « mission accomplie ». Les discours qui se sont succédé démontraient cet esprit d’unité, cet attachement à des valeurs que nous partageons tous, et ce désir de les exprimer sans équivoque et sans détour. Bref, nous avions une motion qui pouvait et doit toujours obtenir un appui unanime des membres de cette Chambre.

Dans l’amendement proposé par l’honorable sénateur Housakos, je ne trouve aucun élément particulièrement nouveau. Avec respect, c’est une reformulation de certains termes, sans valeur ajoutée particulière. Je remarque aussi que, contrairement à la motion originale, qui a reçu un appui unanime de la part des 21 sénateurs qui se sont exprimés à son sujet, l’amendement que nous avons devant nous propose un vocabulaire moins inclusif et qui donne l’impression — indépendamment de son intention — d’exclure les peuples autochtones de la genèse de notre pays.

Je ne puis, donc, appuyer un amendement qui n’obtient pas un appui unanime de cette Chambre, et compromettre ainsi la motion originale. Je vous le rappelle, la motion originale, dans sa formulation actuelle, n’a eu que des appuis de tous les côtés de cette Chambre et de partout au Canada. Je suis persuadée que, sans cet amendement, elle pourra obtenir l’appui unanime des membres de cette Chambre, et nous permettre à tous de réitérer l’importance des deux langues officielles comme fondement de notre fédération, et notre soutien inébranlable au plein exercice des droits linguistiques partout au pays.

Merci.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

Le sénateur Housakos : La sénatrice Gagné accepterait-elle de répondre à une question?

[Français]

La sénatrice Gagné : Oui.

[Traduction]

Le sénateur Housakos : Les sénateurs d’en face ne cessent de parler d’un esprit de collaboration. Ils laissent entendre que ma proposition d’amendement surgit de nulle part, alors que la motion de la sénatrice Miville-Dechêne serait le résultat d’un effort de collaboration.

Encore une fois, la sénatrice d’en face sait-elle que, le matin du jour où la motion de la sénatrice Miville-Dechêne a été présentée, soit quatre heures auparavant, nos leaders ont communiqué avec le bureau du sénateur Woo en vue de faire une déclaration conjointe et de tenir un débat dans un esprit de collaboration, et que cette demande a été rejetée?

[Français]

La sénatrice Gagné : Je regrette que mon collègue, le sénateur Housakos, ait lu des choses dans mon discours que je n’ai pas dites. J’ai parlé de contenu, je n’ai pas parlé de processus.

Le sénateur Housakos : Vous avez fait allusion au fait que, d’une façon ou d’une autre, mon amendement était offensant pour les peuples autochtones. Qu’est-ce que les peuples autochtones ont à voir avec un débat sur les langues officielles du Canada? Qu’est-ce que les peuples autochtones, leur culture et leur contribution à notre pays ont à voir avec le bilinguisme au Canada?

La sénatrice Gagné : Dans le contexte de l’amendement, ce que je sais, c’est que les termes utilisés sont beaucoup moins inclusifs, puisqu’on y parle de « l’importance de la dualité linguistique, français et anglais, que nous ont léguée nos deux peuples fondateurs comme pierre angulaire de notre fédération et élément essentiel de notre identité canadienne [...] ». Ce n’est pas un discours inclusif, et je crois que la motion, telle qu’elle est présentée, l’est.

Le sénateur Housakos : Sénatrice, n’êtes-vous pas d’accord pour dire que les deux langues officielles du Canada sont issues des deux peuples fondateurs de ce pays? Oui ou non?

La sénatrice Gagné : Nous avons deux langues officielles ici au Canada, c’est explicitement indiqué dans la Charte canadienne des droits et libertés et dans la Constitution. Dans ce contexte, vous dites que ce sont « nos deux peuples fondateurs comme pierre angulaire de notre fédération », et c’est ce qui pose problème.

[Traduction]

L’honorable André Pratte : Votre Honneur, j’invoque le Règlement.

À quelques reprises, le sénateur a laissé entendre que la motion de la sénatrice Miville-Dechêne n’a pas été présentée aux conservateurs. En ce qui me concerne, je peux dire que j’ai envoyé un courriel au sénateur Smith mercredi, au début de la matinée, que j’ai discuté avec le sénateur Smith aux alentours de midi, ce jour-là, et que, à la demande du bureau du sénateur Smith, le texte a été envoyé mercredi après-midi, à 13 h 20.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je dirais que cette affirmation constitue davantage une précision qu’un rappel au Règlement.

L’honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs, il est intéressant que nous tenions ce débat dans la ville où est située la plus grande université bilingue de langue anglaise et française au monde. Fondé par les oblats, l’établissement a été renommé collège en 1861, je crois, puis est devenu l’Université d’Ottawa en 1866, à l’époque où John A. Macdonald faisait partie du gouvernement du Canada-Uni.

Je ne suis ni francophone ni anglophone. Comme vous le savez, je suis d’origine ukrainienne et je viens des Prairies, où, par le passé, on nous a accusés injustement d’être anti-français.

À l’origine de cette croyance, je présume, il y a les sondages menés dans les années 1960 et 1970 par des firmes de recherche de l’est du pays, qui ont montré le très faible appui pour le fait français dans l’Ouest. Évidemment, les répondants étaient des gens qui n’avaient jamais eu besoin de parler français. Dans ces sondages, on ne leur a pas demandé s’ils étaient favorables à l’idée de voir leurs enfants parler français. Si on avait posé cette question, et certains l’ont fait, on aurait constaté une approbation généralisée.

Il existe une école primaire francophone à Saskatoon depuis les années 1960. Toutefois, beaucoup d’immigrants n’apprenaient que l’anglais. Mes parents insistaient pour que je le parle sans accent ukrainien, parce qu’ils voulaient que je m’intègre à ce nouveau pays où nous avions le privilège de vivre.

Mon épouse et moi avons cependant décidé d’envoyer nos deux enfants, nés en 1973 et en 1976, dans des écoles françaises dès la maternelle. Nous étions fermement conservateurs, tout comme notre province à l’époque, et la dualité du pays était importante à nos yeux. Nous n’étions pas les seuls. Il y avait beaucoup de gens en faveur de l’éducation bilingue et des écoles françaises en Saskatchewan, qui comptait un grand nombre de ces écoles.

Nous avons habité différentes villes pendant les années où nos enfants fréquentaient l’école primaire : Kelowna pendant un an, Ottawa pendant un an et Regina pendant quatre ans. Nos enfants ont toujours poursuivi leur apprentissage linguistique.

Notre fille avait sept ans l’année où nous avons vécu à Ottawa. Quand nous allions à Montréal, elle nous servait d’interprète, et cela lui donnait l’occasion de pratiquer le français. Nous n’avons, bien sûr, habité à Ottawa que pendant une courte période. Nous n’avons jamais compris comment on pouvait se résoudre à passer le week-end à Ottawa au lieu d’aller à Montréal. Étant donné que nous venons des Prairies, la route nous semblait courte. Nous avons passé beaucoup de temps là-bas. Ma fille commandait pour nous dans les restaurants et elle nous aidait à communiquer lorsque nous ne pouvions pas trouver d’interlocuteurs anglophones.

(1650)

Mon fils a fréquenté des écoles bilingues jusqu’à la 10e année, et ma fille a décroché son diplôme universitaire avec une majeure en français et en anglais. Ensuite, elle a déménagé à Vancouver, où sa maîtrise du français s’est détériorée. C’est toujours le cas lorsqu’on n’a pratiquement plus d’occasions de parler une langue. Elle tient encore à la troisième culture qu’elle a adoptée. Elle vit maintenant aux États-Unis, ce qui ajoute une quatrième culture à son bagage.

Brian Mulroney m’a nommé au Sénat. Il a fait partie des plus ardents défenseurs des francophones parmi les premiers ministres du Canada. Je me souviens quand il a défendu au Manitoba la nature historique du Québec à un moment où il y avait un véritable enjeu linguistique, contrairement à la crise montée de toutes pièces dont nous parlons en ce moment.

Cela aurait été courageux si Trudeau avait défendu le droit de l’Ontario de prendre ses propres décisions financières. Non, l’université francophone ne sera pas construite. Il y a trois autres universités anglophones qui ne le seront pas non plus. L’ancienne première ministre Wynne n’aurait pas dû promettre de construire des universités, alors qu’elle savait qu’il n’y avait pas assez d’argent pour le faire. Les libéraux de l’Ontario ont eu 15 ans pour bâtir une université francophone. Ils ne l’ont pas fait. Je peux vous garantir que, si elle était au pouvoir et qu’elle avait eu à prendre cette décision — elle aurait été obligée de la prendre —, cette motion n’existerait pas.

C’est une question d’économie. Vous ne pouvez pas le savoir, parce qu’on peut toujours compter sur certains politiciens pour faire en sorte que ces questions divisent le pays. C’est un jeu dangereux, car profiter ainsi de cet enjeu pourrait rendre encore plus difficile la lutte contre les préjugés réels et les attaques réelles visant la langue française — s’il devait y en avoir.

J’appuie l’amendement et la motion. Je le fais sans la moindre intention malveillante envers le premier ministre de l’Ontario et la tâche gargantuesque qui l’attend pour remettre sur les rails une province qui a été le moteur économique du Canada à une époque. Ce sont les personnes qui sèment la division pour faire avancer leurs intérêts plutôt que de faire avancer la paix qui font preuve de malveillance. Ce n’est pas en nous empressant d’accuser les conservateurs de ne pas comprendre les réalités de notre pays que nous allons faire progresser les droits linguistiques d’autres régions du Canada.

En terminant, je tiens à rappeler aux sénateurs ce que Brian Mulroney a déclaré au cours de la véritable crise linguistique qui est survenue au Manitoba. À cette époque, le père du premier ministre actuel avait aussi tenté d’exploiter cette crise à des fins politiques.

Avant de citer les paroles de M. Mulroney, permettez-moi de remercier le Toronto Star d’avoir reproduit des extraits du discours qu’il a prononcé en 1983. Cet article, rédigé par le sénateur Pratte, est évidemment de nature partisane et dénigre le grand Parti conservateur, car c’est la marque de commerce du Toronto Star. Voici ce qu’a alors déclaré le premier ministre Mulroney :

Nous sommes tous le reflet de notre environnement. Le jugement que nous appliquons aux problèmes qui se posent à nous a été formé par la réalité que nous avons vécue.

Au Canada, particulièrement dans le domaine linguistique, ce jugement varie considérablement selon les personnes et les régions, à cause de la vision différente que nous avons de notre histoire. Nous devons chercher à comprendre ces différences et à les envisager non pas comme des obstacles, mais comme des éléments susceptibles de nous guider dans l’élaboration de politiques raisonnables et réalistes contribuant à rendre les programmes de ce genre plus attrayants aux yeux de tous les Canadiens. […]

Le problème auquel nous nous attaquons aujourd’hui est également une question de simple justice. Il n’y a aucune solution facile et sans douleur. Il n’y a aucun blâme à attribuer. Il n’y a aucune mauvaise intention à combattre. Il se trouve tout simplement que les droits des minorités sont inviolables. Nous avons l’obligation absolue d’assurer en tout temps à nos minorités, linguistiques et autres, la justice à laquelle elles ont droit.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Pratte : Le sénateur accepte-t-il de répondre à une question?

Merci. J’aimerais que le sénateur explique pourquoi il estime, si je comprends bien, que la motion initiale sèmerait la division. Au moins quatre sénateurs du caucus conservateur ont louangé la motion — notamment le sénateur Maltais, précisément parce que la motion est non partisane.

Le sénateur Tkachuk : J’appuie la motion. J’appuie l’amendement et j’appuie la motion.

Le sénateur Pratte : Vous reconnaissez votre erreur et vous appuyez la motion initiale, même si elle n’est pas modifiée par l’amendement proposé par le sénateur Housakos?

Le sénateur Tkachuk : Je vais y réfléchir.

L’honorable Murray Sinclair : Honorables collègues, je prends la parole au sujet de l’amendement proposé par le sénateur Housakos, qui demande au Sénat de réaffirmer l’importance de la dualité linguistique, le français et l’anglais, que nous ont léguée « nos deux peuples fondateurs comme pierre angulaire de notre fédération » et élément essentiel de notre identité canadienne.

Au Sénat, nous reconnaissons tous sans doute que le Canada a deux langues officielles, qui sont actuellement enchâssées dans l’article 16 de la Charte. Je rappelle à tous les sénateurs que, lorsque la Confédération a été établie en 1867, notre dualité linguistique n’était pas inscrite dans la Charte. Le premier document constitutionnel dans lequel elle a été enchâssée est la Loi sur le Manitoba de 1870.

En tant qu’institution, le Sénat a le devoir de représenter et de protéger les droits et les intérêts de la société et des groupes minoritaires et vulnérables, y compris les communautés de langue officielle en situation minoritaire. J’appuie le besoin de prendre des mesures pour préserver ces langues, car la langue et la culture sont essentielles à l’identité personnelle.

C’est l’un des thèmes les plus présents dans le travail de la Commission de vérité et réconciliation du Canada. Une des principales conclusions de la commission était que les pensionnats constituaient un outil systématiquement utilisé par le gouvernement pour essayer de détruire les cultures et les langues autochtones et pour assimiler les peuples autochtones de force, au besoin, afin d’effacer leur existence en tant que peuples distincts.

En fait, à divers moments de son histoire, le Canada a essayé de faire la même chose aux Canadiens français jusqu’à ce que leur langue soit consacrée dans la Constitution.

La langue et la culture sont deux éléments clés de l’identité personnelle. L’identité personnelle est un élément clé de l’estime de soi. Le bien-être spirituel et mental dépend de l’estime de soi. L’identité donne aussi le sentiment d’être apprécié et estimé. Si vos voisins attaquent votre langue et votre culture ou qu’ils considèrent que celles-ci ne sont pas dignes de respect, vous leur rendez la pareille et la tension entre vous est inévitable.

Tout le monde veut se sentir estimé et avoir le sentiment qu’il fait partie de quelque chose qui compte. C’est par l’éducation que notre société et nos membres sont reconnus.

La Commission de vérité et de réconciliation était si sûre du rapport entre la langue, la culture et l’identité que cinq des appels à l’action pour en assurer le soutien et la préservation se trouvent dans le rapport final.

Pour cette raison, je ne peux pas appuyer cet amendement, tel qu’il est présenté. Il est insuffisant du fait qu’il ne reconnaît que deux peuples fondateurs. Techniquement, d’un point de vue constitutionnel, la Confédération constituait un accord entre quatre provinces. Cet amendement perpétue l’amnésie historique et les récits à saveur colonialiste disant que le Canada n’a été fondé que par deux groupes. Il ne reconnaît pas que la conclusion de traités entre les peuples autochtones et la Couronne a donné lieu à un processus qui a validé le statut d’État-nation de notre pays aux yeux de la communauté internationale.

Je l’ai mentionné dans mon allocution précédente sur le projet de loi C-262. Les traités datant d’avant la Confédération, les traités numérotés, les traités modernes et le Traité de Niagara, qui mentionne la Proclamation royale de 1763, sont des accords entre nations reconnus à l’échelle nationale et internationale. Ils définissent et forgent aussi l’identité du Canada.

Le Canada s’est engagé à renouveler la relation entre les peuples autochtones et tous les Canadiens. Le premier ministre Trudeau a demandé au ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, par exemple, de modifier le serment de citoyenneté pour qu’il reflète les appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation.

(1700)

L’appel à l’action no 93 réclame que l’histoire du Canada reflète davantage la diversité des peuples autochtones du Canada, y compris au moyen d’information sur les traités et sur l’histoire des Autochtones, dont celle des pensionnats.

Les provinces sont justement en train de mettre leurs programmes d’histoire à jour afin qu’ils soient plus inclusifs et qu’il reflètent mieux l’histoire du Canada, y compris ses chapitres les plus sombres. Personnellement, cet amendement me donne l’impression que le Parlement devrait peut-être faire de même.

En tant que sénateur autochtone, je dois profiter de chaque occasion pour parler des moyens de faire progresser les relations avec les peuples autochtones et la reconnaissance de leurs droits. Cet amendement nous aura au moins permis de parler des peuples fondateurs du Canada de manière inclusive.

La Commission de vérité et réconciliation recommandait au Canada de renoncer à la doctrine de la découverte, celle-là même qui a permis aux explorateurs européens de s’approprier les terres des Autochtones. Elle demandait aussi au Canada d’élaborer une proclamation royale et un pacte de réconciliation. C’est cette proclamation qui répudierait les concepts utilisés pour justifier la souveraineté des peuples européens sur les territoires et les peuples autochtones, notamment la doctrine de la découverte et le principe de terra nullius.

Le temps sera bientôt venu où nous devrons reconnaître officiellement que le Canada compte trois peuples fondateurs : les Autochtones, les Français et les Britanniques. Or, cet amendement n’en mentionne que deux. Je ne peux donc pas l’appuyer, et je vous demande de ne pas l’appuyer non plus, pour les motifs que je viens d’exposer.

Le sénateur Housakos : Le sénateur Sinclair accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Sinclair : Avec plaisir, sénateur.

Le sénateur Housakos : J’ai écouté attentivement vos observations. Vous avez soulevé de nombreux points au sujet de l’histoire du Canada. Je tiens à souligner, honorables sénateurs, que je ne suis ni de souche britannique ni de souche française. Je suis fils d’immigrants venus au Canada, et ma langue maternelle n’est ni le français ni l’anglais. En fait, ce sont mes deuxième et troisième langues. Compte tenu du caractère bilingue du pays, de ses deux langues officielles, de son histoire et de la façon dont il a été fondé par les pères fondateurs — je ne parle pas de la fondation du territoire, mais bien de la fondation de la Confédération, de la Constitution, des institutions — ne convenez-vous pas, sénateur, que les ancêtres du pays sont les Britanniques et les Français? N’est-ce pas une source de fierté que le Parlement doit souligner et défendre à chaque occasion?

Le sénateur Sinclair : Merci beaucoup de cette question, sénateur.

Je ferai remarquer que, pendant les négociations concernant la Loi sur le Manitoba de 1870, qui était une proclamation britannique et qui a fait intégrer le Manitoba à la Confédération, on a beaucoup débattu la question d’inclure la langue française dans la Constitution du Manitoba. Le premier ministre de l’époque, sir John A. Macdonald, n’appuyait pas cette disposition.

Au fil de notre histoire, on a évité de révéler à bon nombre de Canadiens ce qu’il en était au juste de cette question.

Je veux que vous sachiez que j’appuie l’idée de reconnaître la dualité du français et de l’anglais comme pierre angulaire de la Confédération. J’ai souligné que ce terme figure dans la motion d’origine et que j’étais prêt à l’appuyer. Cependant, je ne suis pas prêt à reconnaître que ce pays a été créé par seulement deux nations. On n’aurait pas permis aux colons qui sont arrivés ici de rester s’ils n’avaient pas d’abord reconnu le statut des peuples autochtones qui étaient déjà ici, comme c’était le cas lorsque les Européens sont arrivés ici pendant les années 1940.

[Français]

Son Honneur le Président : Je m’excuse, sénateur Maltais, vous avez déjà parlé au sujet de l’amendement, et vous ne pouvez pas prendre la parole une deuxième fois.

[Traduction]

Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : Non.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : À mon avis, les non l’emportent.

Et deux honorables sénateurs s’étant levés :

Le sénateur Plett : Si vous voulez reporter le vote, je demanderais au sénateur Mitchell s’il a une motion à présenter.

Son Honneur le Président : Le sénateur Plett invoque l’article 9-10 du Règlement pour reporter le vote jusqu’à la prochaine séance. Avez-vous quelque chose à ajouter, sénateur Mitchell?

Le sénateur Mitchell : Je reporte de nouveau le vote à la séance qui suit la prochaine séance.

Son Honneur le Président : Conformément à l’article 9-10(4) du Règlement, le sénateur Mitchell reporte le vote à la séance qui suit la prochaine séance, ce qui signifie que le vote aura lieu lundi soir, une fois que la sonnerie aura retenti pendant 15 minutes.

Adoption de la motion modifiée tendant à demander au gouverneur en conseil de nommer le greffier du Sénat conformément à la recommandation du Sénat

Consentement ayant été accordé de revenir aux autres affaires, motions, article no 328 :

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Housakos, appuyée par l’honorable sénatrice Martin,

Que, dans le souci de promouvoir l’autonomie et l’indépendance du Sénat, le Sénat demande au gouverneur en conseil de nommer le greffier du Sénat et greffier des Parlements conformément à la recommandation expresse du Sénat.

Et sur la motion d’amendement de l’honorable sénatrice Saint-Germain, appuyée par l’honorable sénateur Housakos,

Que la motion ne soit pas maintenant adoptée, mais qu’elle soit modifiée par l’adjonction, immédiatement avant le point final, de ce qui suit :

« ;

Que le Sénat donne instruction au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration d’étudier et de recommander au Sénat, au plus tard le quinzième jour de séance après l’adoption de cette motion, un processus par lequel le Sénat pourrait soumettre au gouverneur en conseil sa recommandation sur la nomination d’une personne ou d’une liste de personnes ayant les qualités et les compétences requises pour le poste de greffier du Sénat et greffier des Parlements ».

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je serai bref. Je souhaite tout d’abord vous présenter mes excuses. Il m’était impossible d’être ici cet après-midi lorsque le Sénat a commencé à débattre de cette motion. Comme elle porte sur un sujet qui m’intéresse vivement, j’avais demandé à la sénatrice Bellemare de proposer l’ajournement. Je ne savais pas, alors, que les partis s’étaient entendus pour demander le vote, et je ne souhaite vraiment pas que mon ajournement contrecarre cette entente.

Je dirai simplement, brièvement, que je souhaitais parler de certains aspects de la motion et de l’amendement, soulever certains problèmes concernant le processus de nomination par le gouverneur en conseil et le fait qu’il faut respecter la prérogative du premier ministre au sujet de ces nominations, et souligner qu’il faut éviter de procéder d’une manière qui risquerait de miner le processus de nomination et de créer des problèmes à son sujet.

Je me contenterai de dire, pour le moment, que je n’ai aucune objection à ce que la motion soit mise aux voix aujourd’hui. Je ferai des observations plus substantielles si elle est adoptée et que le Sénat en est saisi de nouveau.

Je demande le vote.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : D’accord.

(La motion d’amendement de l’honorable sénatrice Saint-Germain est adoptée.)

Son Honneur le Président : Passons à la motion principale. Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Le sénateur Harder : Avec dissidence.

(La motion modifiée est adoptée avec dissidence.)

Banques et commerce

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur la situation actuelle du régime financier canadien et international

L’honorable Carolyn Stewart Olsen, conformément au préavis donné le 28 novembre 2018, propose :

Que, nonobstant l’ordre du Sénat adopté le 27 janvier 2016, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce concernant son étude sur la situation actuelle du régime financier canadien et international soit reportée du 31 décembre 2018 au 30 septembre 2019.

— Honorables sénateurs, je propose l’adoption de la motion inscrite au nom du sénateur Black.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

(1710)

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur les avantages et les défis éventuels inhérents au système bancaire ouvert pour les consommateurs canadiens de services financiers

L’honorable Carolyn Stewart Olsen, conformément au préavis donné le 28 novembre 2018, propose :

Que, nonobstant l’ordre du Sénat adopté le 27 septembre 2018, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce concernant son étude sur les avantages et les défis éventuels inhérents au système bancaire ouvert pour les consommateurs canadiens de services financiers, en mettant l’accent sur le rôle réglementaire du gouvernement fédéral, soit reportée du 22 février 2019 au 30 septembre 2019.

— Honorables sénateurs, je propose l’adoption de la motion inscrite au nom du sénateur Black.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur les questions relatives à la gestion du risque systémique dans le système financier, au pays et dans le monde

L’honorable Carolyn Stewart Olsen, conformément au préavis donné le 28 novembre 2018, propose :

Que, nonobstant l’ordre du Sénat adopté le 17 octobre 2017, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce concernant son étude sur les questions relatives à la gestion du risque systémique dans le système financier, au pays et dans le monde, soit reportée du 28 décembre 2018 au 30 septembre 2019.

— Honorables sénateurs, je propose l’adoption de la motion inscrite au nom du sénateur Black.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Sécurité nationale et défense

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final relativement à son étude sur les politiques, les pratiques, les circonstances et les capacités du Canada en matière de sécurité nationale et de défense

L’honorable Gwen Boniface, conformément au préavis donné le 5 décembre 2018, propose :

Que, nonobstant les ordres du Sénat adopté le mardi 26 janvier 2016, et le jeudi 14 décembre 2017, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense concernant son étude sur les politiques, les pratiques, les circonstances et les capacités du Canada en matière de sécurité nationale et de la défense soit reportée du 31 décembre 2018 au 31 octobre 2019.

— Honorables sénateurs, je propose l’adoption de la motion inscrite à mon nom.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur les questions concernant les anciens combattants

L’honorable Gwen Boniface, conformément au préavis donné le 5 décembre 2018, propose :

Que, nonobstant les ordres du Sénat adopté le jeudi 28 janvier 2016, et le jeudi 14 décembre 2017, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense concernant son étude sur les services et les prestations dispensés aux membres des Forces canadiennes; aux anciens combattants; aux membres et anciens membres de la Gendarmerie Royale du Canada et à leurs familles, soit reportée du 31 décembre 2018 au 31 octobre 2019.

— Honorables sénateurs, je propose l’adoption de la motion inscrite à mon nom.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

(À 17 h 11, le Sénat s’ajourne jusqu’à 9 heures demain.)

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