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Débats du Sénat (Hansard)

2e Session, 43e Législature
Volume 152, Numéro 15

Le mercredi 2 décembre 2020
L’honorable George J. Furey, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 2 décembre 2020

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.


[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, en vertu de l’article 4-3(1) du Règlement, la leader du Groupe progressiste du Sénat a demandé que la période accordée aux déclarations des sénateurs soit prolongée aujourd’hui afin que nous puissions rendre hommage à l’honorable Lillian Eva Dyck, qui a pris sa retraite le 23 août 2020.

Je rappelle aux sénateurs que, en vertu du Règlement, leur intervention ne peut dépasser trois minutes et qu’aucun sénateur ne peut parler plus d’une fois.

Hommages

L’honorable Lillian Eva Dyck

L’honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, ce fut un plaisir et un privilège de côtoyer la sénatrice Dyck tout au long de son passage au Sénat. Elle m’a appris tellement de choses au fil des ans, que ce soit par ses paroles ou par ses actions.

Lillian est une femme brillante et travaillante qui ne recule devant rien, comme on l’a vu lors de l’étude du projet de loi S-3, qui éliminait de la Loi sur les Indiens les iniquités fondées sur le sexe en matière d’inscription, ou le jour où elle s’est adressée au Sénat pour dénoncer le harcèlement à son endroit dont plusieurs membres du Comité des peuples autochtones s’étaient rendus coupables le 11 juin 2019. Elle était outrée de voir qu’à cause du privilège parlementaire, rien ne pouvait être fait. Il fallait du courage pour faire ce qu’elle a fait, honorables sénateurs.

La sénatrice Dyck a été nommée en 2005 par le premier ministre Martin. À ses yeux, il l’avait choisie parce qu’elle était autochtone et qu’elle détenait un doctorat, mais elle craignait que le choix du premier ministre ne s’arrête sur quelqu’un d’autre qu’une Autochtone si elle refusait la nomination qu’il lui proposait, alors elle a dit oui.

La semaine dernière, j’ai parlé à la sénatrice Dyck et je lui ai dit : « Lillian, vous avez fait des choses extraordinaires au Sénat et vous avez changé la vie d’un grand nombre de vos concitoyens. Parmi toutes vos réalisations, y en a-t-il une que vous aimeriez que les gens se rappellent plus que les autres? »

Elle a répondu que ce sont les petits gestes qui comptent le plus, ceux qui ont une grande importance, mais dont peu de gens se souviennent.

Ainsi, je vais vous parler de certains des « petits gestes » que la sénatrice Dyck a posés. Honorables sénateurs, le 4 octobre est le jour de vigile de Sœurs par l’esprit. C’est une journée pour rendre hommage aux femmes et aux filles autochtones qui ont été assassinées ou portées disparues. Le 4 octobre 2017, à la demande de la sénatrice Dyck, le Président Furey a accepté de garder une minute de silence au début des délibérations du Sénat. À ce moment-là, le Sénat a enfin reconnu ce qui est vraiment arrivé à tant de femmes autochtones et à leur famille. Trois ans plus tard, alors que la sénatrice Dyck me racontait cette histoire, elle avait clairement de l’émotion dans la voix parce qu’il s’agissait vraiment d’un moment historique. Par conséquent, Votre Honneur, je vous remercie également.

La sénatrice Dyck s’est également souvenue de l’un de nos tout premiers caucus ouverts, qui portait sur les femmes et les filles autochtones assassinées ou portées disparues. À la fin de la réunion, la sénatrice Dyck nous a fait chanter la chanson Strong Women Song, qui est chantée en l’honneur des femmes autochtones et dans le but de donner de la force aux femmes. Elle a admis que c’était la dernière fois qu’elle a chanté en public.

Lillian a été la première présidente du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones à organiser une cérémonie de purification au comité pour les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Elle a également été la première sénatrice et présidente à demander à de jeunes Autochtones de témoigner devant le comité. Par la suite, le Service des communications du Sénat a invité de jeunes Autochtones à passer une journée sur la Colline pour en apprendre davantage sur le gouvernement et, plus particulièrement, sur le Sénat.

Lillian est convaincue qu’il est important de mobiliser les jeunes Autochtones et d’obtenir leur avis. Après tout, c’est de leur avenir qu’il s’agit. C’est pourquoi elle s’engage depuis 2016 dans l’initiative Vision autochtone au Sénat. Nous savons que les jeunes Autochtones représentent le groupe démographique qui connaît la croissance la plus rapide au Canada.

Honorables sénateurs, Lillian Dyck est une femme incroyable, et je dois dire que ce qu’elle appelle ses « petites choses » est en fait extrêmement important. Elle continue de lutter pour mettre fin au racisme systémique contre les Autochtones, en particulier celui dont les femmes sont victimes. Je vais maintenant m’adresser à la sénatrice Dyck. Chère amie, vous avez laissé votre marque. Vous nous manquerez. Merci.

Des voix : Bravo!

L’honorable Patti LaBoucane-Benson : Honorables sénateurs, bonjour. C’est un insigne honneur pour moi de rendre hommage à la sénatrice Lillian Eva Dyck au nom du bureau du représentant du gouvernement au Sénat.

Les réalisations de la sénatrice Dyck sont nombreuses. Neurochimiste et universitaire accomplie, elle a mis sa formation scientifique rigoureuse et fondée sur des données probantes au profit du processus d’examen des mesures législatives. Comme femme d’ascendance nehiyaw, c’est-à-dire crie, et chinoise qui a grandi dans les Prairies et qui a dû lutter presque partout pour avoir sa place, la sénatrice Dyck a mis à profit sa ténacité, sa détermination et son intelligence dans son travail pour défendre les droits des femmes autochtones au Sénat. Elle était prête à collaborer avec tous les membres de cette Chambre et de l’autre endroit afin d’atteindre ses objectifs.

Beaucoup d’entre nous lui sont reconnaissants de ses travaux au Sénat sur le projet de loi S-3, de son appui inlassable à l’égard de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées et de son travail pour dénoncer le racisme systémique et pousser les personnes en position d’autorité à prendre des mesures contre ces pratiques.

La sénatrice Dyck a été la présidente du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, et certains d’entre nous l’appelaient leur okimawiskwew. C’est une expression nehiyaw qui veut dire « femme chef ». Au cours du mandat de la sénatrice Dyck en tant que présidente, le comité a terminé la première étape d’une étude importante sur les Premières Nations, les Métis et les Inuits au Canada.

Lillian contrôlait rigoureusement son équipe et coopérait avec les membres de tous les groupes lors de l’examen attentif et de la modification de la Loi sur les langues autochtones et de la Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis, entre autres. En cas de litiges, la sénatrice Dyck présidait les réunions avec grâce et diplomatie.

Honorables sénateurs, comme nous sommes nombreux à vouloir rendre hommage à la sénatrice Dyck, je serai brève. J’aimerais quand même raconter une histoire.

Lillian a gracieusement accepté d’être ma marraine au Sénat, en 2018. Elle s’est montrée à la fois gentille et accueillante, mais aussi très claire. Lors de notre première rencontre, elle a en effet déclaré : « Je suis heureuse que vous soyez là. Il y a beaucoup de travail à faire, et je n’en ai plus pour longtemps ici ». C’était la première d’une longue série de conversations que j’ai eues avec Lillian sur le rôle d’un sénateur et sur la manière dont nous pouvions améliorer la vie des populations autochtones.

Ce printemps, nos conversations ont porté sur la COVID-19 et les difficultés uniques auxquelles les populations autochtones sont confrontées. En apprenant qu’un groupe de communautés des Premières Nations en Saskatchewan avaient désespérément besoin d’aide, se sentant impuissantes face à la pandémie, Lillian a pris contact avec leurs chefs, pris acte de leurs préoccupations puis, dans la foulée, a informé le gouvernement des difficultés auxquelles ces communautés étaient en proie. Elle a ensuite assuré un suivi pour vérifier que ces communautés demandaient bien les fonds visant à soutenir la réponse de santé publique dans les communautés autochtones. Ce n’est là qu’un des nombreux exemples de l’engagement de Lillian et de sa volonté d’utiliser sa position de sénatrice pour faire tomber les barrières et résoudre les problèmes auxquels les gens sont confrontés.

(1410)

Néanmoins, aussi résolue et déterminée qu’elle ait été dans son travail au Sénat, Lillian était aussi connue pour aimer s’asseoir tranquillement près de la statue d’Oscar Peterson au piano, après une séance au Sénat, pour écouter de la musique; profiter de la cueillette des petits fruits à Saskatoon sous le chaud soleil de la Saskatchewan et passer de nombreuses heures dans les parcs près de chez elle à observer les oiseaux.

Kinanâskomitin, Lillian, vous avez été une excellente okimaiskwew pour moi et de nombreux sénateurs. Vous avez bien mérité une retraite heureuse et reposante, et plein d’oiseaux à observer. Vous nous manquerez. Hiy hiy.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, le 24 août, la sénatrice Lillian Eva Dyck a pris sa retraite après 15 ans de service au Sénat, où elle a représenté, avec beaucoup de dévouement et de passion, les habitants de sa province bien-aimée, la Saskatchewan. Elle a été nommée à la Chambre haute sur la recommandation du très honorable Paul Martin en tant que première sénatrice issue d’une Première Nation. Elle est membre de la Première Nation Cree Gordon, et elle a également été la première sénatrice d’origine chinoise née au Canada.

Je souhaite rendre hommage à la sénatrice Dyck, une femme d’influence accomplie. J’en profite pour saluer sa force et l’excellent travail qu’elle a accompli sur les enjeux auxquels elle croyait. Aujourd’hui, je tiens à la féliciter pour ce travail acharné. Elle s’est battue avec force et ténacité, en particulier pour des causes qui lui étaient chères. Sans l’ombre d’un doute, elle a été une voix puissante et influente dans cette enceinte pour les communautés autochtones. Il ne faut jamais critiquer ceux qui se battent avec acharnement pour des causes auxquelles ils croient, ou contre des phénomènes qu’ils jugent nuisibles.

Ces éloges surprennent peut-être certains d’entre vous, mais je considère sincèrement la sénatrice Dyck comme étant une amie. Certes, nous avions des différences d’opinions et nous sommes rarement retrouvés dans le même camp dans un débat. Au fil des ans, il y a eu des frictions entre nous sur plus d’un point. Cela n’enlève rien au fait que je garde un très bon souvenir de certains de ces échanges.

Peu de sénateurs travaillent aussi assidûment et aussi inlassablement qu’elle le faisait, en particulier à titre de porte-parole de l’opposition à l’égard de projets de loi du gouvernement lorsque les conservateurs étaient au pouvoir ou à titre de partisane d’un projet de loi qu’elle estimait justifié. Je pense notamment à tout ce qui a trait à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones ou au nombre disproportionné d’Autochtones dans les prisons.

Honorables sénateurs, j’aimerais vous raconter un souvenir d’enfance, mais d’abord, je dois admettre que je n’ai pas toujours été un ange à l’école. Je le sais, c’est difficile à croire. En fait, j’ai souvent eu des démêlés avec mes enseignants. Une enseignante, en particulier, remuait fréquemment son index de droite à gauche à mon endroit en signe de désapprobation. En vérité, cette enseignante était également ma tante.

Honorables sénateurs, la même image me vient à l’esprit quand je pense à la sénatrice Dyck. Combien de fois avons-nous remué notre index l’un vers l’autre en signe de désapprobation, chacun de notre côté de l’allée? Toutefois, elle le faisait toujours avec un grand sourire. Même si la sénatrice Dyck et moi étions rarement sur la même longueur d’ondes, je la respectais. Elle était une valeureuse adversaire et elle me manquera.

Au nom de l’opposition au Sénat, je souhaite à la sénatrice Lillian Dyck une heureuse retraite. Sénatrice Dyck, j’espère que vous me regardez, car une fois de plus, je remue mon doigt à votre intention, sachant que vous faites probablement de même à mon intention. Merci, mesdames et messieurs les sénateurs.

L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, c’est pour moi un immense honneur de prendre la parole au nom du Groupe des sénateurs indépendants afin de rendre hommage à la sénatrice Lillian Dyck. La sénatrice a été une pionnière dans tout ce qu’elle a entrepris. Véritable leader, elle a tracé la voie pour que d’autres après elle connaissent la réussite. Jeune fille, la sénatrice Dyck a appris l’histoire déplorable des pensionnats autochtones par les récits de sa propre mère.

Ces connaissances et expériences intimes ont animé les efforts infatigables de la sénatrice Dyck pour défendre la cause des Premières Nations, des Inuits, des Métis et des peuples autochtones non inscrits du Canada, à leurs côtés ou en leur nom. De plus, comme sa famille a connu des difficultés parce qu’elle était en partie chinoise, elle comprend la réalité vécue par deux groupes vulnérables.

Cette première femme autochtone à être nommée sénatrice a été la force motrice derrière le projet de loi S-3, qui visait à faire en sorte que les femmes autochtones ne verraient pas leur statut révoqué simplement pour avoir marié un non-Autochtone. Avant sa nomination, la sénatrice Dyck a aussi été l’une des premières femmes autochtones à entreprendre des études universitaires dans le domaine de la neuroscience et à obtenir un doctorat en psychiatrie biologique.

Sénatrice Lillian, vous m’avez beaucoup appris. Nous avons beaucoup ri ensemble et vous allez sincèrement me manquer. J’ai perdu une collègue chère, mais vous serez toujours une mentore et une amie.

Honorables sénateurs, je vais partager avec vous l’une des leçons que m’a apprises la sénatrice Dyck. Cette femme extrêmement courageuse a toujours défendu, parfois seule, les droits des plus vulnérables, en particulier ceux des peuples autochtones. La leçon la plus importante que m’a enseignée la sénatrice Dyck est de ne jamais craindre de prendre fermement position pour ses valeurs et ses convictions.

Vous conviendrez sans doute, honorables sénateurs, que son leadership ferme et indéfectible a fait de notre pays une nation plus forte. Merci.

L’honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, c’est un honneur pour moi de rendre hommage à la carrière de notre ancienne collègue Lillian Dyck. Sa bien-aimée province de la Saskatchewan et la Première Nation crie de Gordon ont eu la gentillesse de nous la prêter pendant 15 ans et quel plaisir ce fut de l’avoir avec nous.

Première femme autochtone et première Canadienne d’origine chinoise à avoir été nommée sénatrice, la sénatrice Dyck a été une pionnière dans tout ce qu’elle a entrepris. Avant son arrivée au Sénat, elle a été neuroscientifique et, dès son arrivée, elle a su faire sa marque, en particulier par ses efforts pour protéger et défendre les femmes et les filles autochtones. Si, au départ, elle ne s’est pas jointe à l’ancien caucus libéral, elle a fini par comprendre et elle nous a rejoints. Elle avait toujours de bons conseils à nous donner, elle a toujours été une collègue d’exception et elle est une bonne amie.

J’ai tellement appris de votre parcours et de votre culture et je suis reconnaissant d’avoir pu travailler avec vous pendant tellement d’années. Félicitations, Lillian, pour votre carrière exceptionnelle, autant au Sénat qu’à l’extérieur de celui-ci. Nous nous ennuierons de vous et nous sommes impatients de voir quelle sera votre prochaine aventure. Bonne retraite.

L’honorable Dennis Glen Patterson : Honorables sénateurs, je prends la parole pour rendre hommage avec émotion à la sénatrice Lillian Dyck, qui a pris sa retraite du Sénat sans faire de bruit l’été dernier. J’ai eu le privilège d’être membre du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones en sa compagnie depuis ma nomination en 2009. En tant que sénateur conservateur, je ne partageais pas toujours les idées de la sénatrice Dyck, mais nous nous efforcions de défendre les intérêts des peuples autochtones et de ne pas laisser la partisanerie perturber nos travaux, même si ce n’était pas toujours possible. J’ai la ferme conviction que, grâce au leadership et à l’engagement de la sénatrice Dyck au fil des ans, notre comité a réussi à obtenir de grandes avancées pour redresser des injustices et régler des conflits complexes de longue date.

(1420)

La sénatrice Dyck a mené de nombreuses campagnes victorieuses, mais l’une d’entre elles m’a tout particulièrement marquée : Lillian et moi avions travaillé de concert — elle à la présidence, moi comme porte-parole de l’opposition — pour garantir l’adoption d’un amendement au projet de loi S-3, qui visait à modifier les règles d’inscription au registre des Indiens afin d’éliminer complètement la discrimination fondée sur le sexe et la date limite de 1951. Vous vous souvenez de notre cri de ralliement? « L’application universelle de l’alinéa 6(1)a). » Je sais que ce fut pour la sénatrice Dyck un triomphe sur les plans personnel et professionnel, et je salue les efforts inlassables qu’elle a déployés pour y arriver.

Lillian a en outre mis sur pied l’événement annuel « Vision autochtone au Sénat », qui est axé sur les jeunes Autochtones et qui a donné lieu à la toute première cérémonie de purification au Sénat. Nous avons célébré en adoptant plusieurs traités modernes et en exécutant une danse du tambour dans le foyer du Sénat pour fêter l’Accord définitif sur l’autonomie gouvernementale de Délįnę.

Je garde de bons souvenirs de nos trajets épiques vers des endroits éloignés lorsque nous étudions le logement dans les réserves puis dans l’Inuit Nunangat. Je me souviens avoir amerri à bord d’un Twin Otter sur flotteurs dans la communauté éloignée d’Ahousaht; des décollages et atterrissages courts dans les communautés éloignées anishinabes dans le Nord de l’Ontario; des heures en vol à bord d’un autre Twin Otter de Kuujjuaq, au Nunavik, jusqu’à Nain, au Labrador, et du brouillard nous ayant forcé à effectuer un demi-tour complet à l’approche finale. Sans oublier la fois que nous avons pu embarquer dans le dernier avion à décoller en plein blizzard à Iqaluit juste avant qu’une tempête hivernale force la fermeture de l’aéroport pendant des jours.

Seules des personnes, voire quelques sénateurs septuagénaires, qui n’ont pas froid aux yeux pouvaient faire ce périple, mais Lillian avait à cœur d’accomplir ce travail essentiel avec toute la crédibilité et l’efficacité qu’on lui connaît.

Merci pour vos années de service, Lillian.

L’honorable Patricia Bovey : Honorables sénateurs, un des avantages d’avoir été nommée au Sénat du Canada est d’avoir eu la chance de travailler avec l’honorable Dre Lillian Dyck, notamment comme collègue au sein du Groupe progressiste du Sénat dans les dernières années. Quelle femme visionnaire et ardente défenseur des principes et de l’humanité!

En tant que sénatrice originaire des Prairies, je n’ai jamais douté de l’excellence de son parcours d’enseignante et de sénatrice, mais j’ai trouvé vraiment inspirante la manière dont elle a ardemment défendu ses principes et a porté la voix des Prairies, des Premières Nations et des Canadiens de toutes les diversités.

Je n’oublierai jamais la première réunion de comité à laquelle j’ai assisté quand je suis arrivée au Sénat. Il s’agissait du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, présidé à cette époque par la sénatrice Dyck, au moment de l’étude du projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi sur les Indiens. Sénatrice, je vous sais gré de votre accueil chaleureux et je n’oublierai jamais la façon remarquable dont vous avez assumé la présidence du comité. Je vous remercie.

Je passe rarement la fin de semaine à Ottawa, mais je me réjouis de l’avoir fait pendant une fin de semaine précise. Vous savez sûrement laquelle, Lillian. C’était il y a plusieurs années, alors que le Centre national des arts célébrait les arts et la culture autochtones et présentait une excellente interprétation de la pièce de théâtre Café Daughter, qui parle de votre vie. C’était un événement marquant. J’ai trouvé vraiment émouvant de découvrir les obstacles que vous avez dû surmonter à titre de Canadienne issue des communautés autochtone et chinoise, obstacles auxquels se sont ajoutés les bouleversements soudains que vous avez vécus, jeune, à la mort de votre mère, et la discrimination que vous avez ensuite subie à l’école.

Votre détermination à étudier a retenu notre attention à tous. Peu de gens réussissent à obtenir un poste de professeur titulaire à la faculté de psychiatrie de l’Université de la Saskatchewan avec une spécialité en neuropsychiatrie. Votre étude de la maladie d’Alzheimer est vraiment importante. Je vous en remercie à titre personnel.

Le leadership dont vous faites preuve et l’exemple que vous donnez aux jeunes sont admirables. Je sais que vous vous êtes particulièrement adressée aux jeunes Autochtones, mais sachez que votre message est aussi percutant pour les autres jeunes. Votre façon de faire contribue grandement à la réconciliation et à la réconciliACTION. Je vous en remercie.

Lillian, je ne vais pas répéter les louanges sincères qu’ont faites d’autres collègues au sujet de vos nombreuses réalisations, mais je vous souhaite tout le succès possible dans vos prochaines démarches au service des Canadiens, et je sais que vous réussirez. Je profite également de l’occasion pour vous remercier de votre contribution en tant que sénatrice dans cette Chambre de second examen objectif. Merci.

L’honorable Kim Pate : Honorables sénateurs, je joins ma voix à celles de mes collègues pour exprimer ma reconnaissance à la sénatrice Dyck pour ce qu’elle est et tout ce qu’elle a apporté à cette auguste institution. Je tiens également à la remercier de m’avoir parrainée et de m’avoir accueillie si chaleureusement et d’avoir été un mentor fantastique, non seulement pour moi, mais aussi pour tant d’autres collègues dans cette enceinte et dans la communauté.

J’ai eu le privilège de connaître la sénatrice Dyck et de travailler avec elle avant ma nomination au Sénat en raison du rôle de chef de file qu’elle a joué en Saskatchewan à l’égard des questions relatives à la violence contre les femmes et les filles autochtones.

J’ai eu le privilège de connaître Lillian, son gentil géant de fils et son chien fidèle lorsque je fréquentais l’Université de la Saskatchewan. Depuis, j’ai eu le grand plaisir de faire des présentations et d’assister à des conférences ou des réunions avec elle, de collaborer dans des dossiers relatifs à l’égalité des femmes et des Autochtones, de marcher le long de la rivière dans le « Paris des Prairies » ou de me joindre à elle pour assister à Café Daughter, l’incroyable pièce de théâtre que la sénatrice Bovey vient de mentionner, basée sur sa vie hors du commun.

Et quelle vie! Avant sa nomination, la sénatrice, titulaire d’un doctorat, était professeure de neurochimie et chercheuse à l’Université de la Saskatchewan. Membre de la Première Nation Gordon, en Saskatchewan, cette pionnière qui a ouvert de nombreuses portes est une source d’espoir pour les peuples autochtones et les autres femmes racialisées. Elle est la première femme des Premières Nations et la première Sino-Canadienne à avoir été nommée sénatrice au Canada, sans parler du fait qu’elle a été aussi la première et, à ma connaissance, la seule, sénatrice néo‑démocrate.

Quand notre collègue a été nommée au Sénat du Canada en 2005, elle s’était donné quatre priorités : réduire la violence faite aux femmes autochtones; améliorer l’éducation postsecondaire; lutter contre la discrimination envers les Canadiens d’origine chinoise; favoriser la participation des femmes dans le domaine des sciences. Elle refusait de garder le silence et, à de nombreuses reprises, elle nous a incités courageusement à nous lancer dans des débats, des études, des interpellations et des modifications législatives difficiles et essentiels.

Merci, sénatrice Cordy, d’avoir mentionné que Lillian avait chanté la chanson des femmes fortes, une chanson qui avait été écrite et chantée en hommage aux femmes autochtones qui sont mortes à la prison des femmes de Kingston. Beaucoup de gens ont appris et bénéficié de la passion et de la persévérance de Lillian, un grand privilège.

Merci, kinanâskomitin, pour tout ce que vous avez donné de vous-même au service des autres. Bien d’autres personnes encore seront heureuses d’avoir le privilège de bénéficier de vos conseils et de votre amitié alors que vous écrivez les prochains chapitres de votre vie. Merci, meegwetch.

L’honorable Marty Klyne : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage à une parlementaire distinguée, une sénatrice dont le travail et l’approche adoptée pour s’acquitter de ses responsabilités et ses devoirs de sénatrice sont tenus en haute estime. Je parle de ma compatriote saskatchewanaise qui est notre collègue et qui est aussi une amie chère à beaucoup de gens au Parlement, l’honorable Lillian Dyck.

Lillian Eva Quan Dyck est née à North Battleford, à Saskatchewan, en 1945. Ayant atteint l’âge de la retraite obligatoire de 75 ans au Sénat, la sénatrice Dyck a pris sa retraite l’été dernier le jour de son anniversaire, le lundi 24 août 2020, ce qui a mis fin à un mandat de 15 ans au Sénat du Canada pendant lequel elle a représenté fidèlement la Saskatchewan et a défendu les intérêts des Canadiens sans voix au Sénat.

Lillian Dyck est une source d’inspiration et une pionnière. Oui, elle a été la première femme autochtone et la première Canadienne d’origine chinoise à être nommée au Sénat, mais ce n’est pas seulement pour cette raison qu’on la qualifie de pionnière. C’est plutôt son excellente éthique de travail qui l’a menée au Sénat.

Elle a passé sa jeunesse dans des petites villes de l’Alberta et de la Saskatchewan, où sa famille gérait un café chinois. Mme Dyck a quitté le restaurant familial pour poursuivre une carrière universitaire.

C’est là que commence sa vie de pionnière.

Après avoir obtenu un doctorat en biopsychiatrie à l’Université de la Saskatchewan, Mme Dyck a travaillé dans cette même université en tant que chercheuse et est devenue professeure titulaire de neuropsychiatrie et doyenne associée du College of Graduate Studies & Research.

En 2005, alors qu’elle travaillait à l’Université de la Saskatchewan, Lillian Dyck a reçu l’appel lui annonçant qu’elle serait nommée sénatrice par le premier ministre de l’époque, Paul Martin.

N’ayant pu établir le caucus néo-démocrate au Sénat, elle a siégé comme sénatrice indépendante jusqu’à ce qu’elle se joigne au caucus libéral, en 2009, et elle a quitté cette Chambre en tant que membre du Groupe progressiste du Sénat.

Signe de sa volonté de promouvoir la justice pour les femmes autochtones, la sénatrice Dyck a présenté au Sénat le projet de loi S-215, qui visait à modifier le Code criminel pour que, lors de la détermination de la peine à l’égard de certains actes de violence, le fait que l’acte ait été commis contre une femme autochtone soit considéré comme une circonstance aggravante. Bien que le projet de loi ait été rejeté, la sénatrice Dyck a réussi à faire amender le projet de loi C-5 pour qu’il produise le même résultat que le projet de loi S-215.

Ses réalisations au Sénat sont nombreuses. Ardente militante pour les familles des femmes et filles autochtones assassinées ou portées disparues, elle a réclamé la tenue d’une enquête sur cette atrocité. La commission chargée de l’enquête nationale a publié son rapport en juin 2019.

(1430)

Parmi ses travaux hautement reconnus et estimés, mentionnons le projet de loi S-3 du Sénat lors de la 42e législature, qui a éliminé une iniquité fondée sur le sexe dans la Loi sur les Indiens, une iniquité qui privait de leur statut, et donc de leurs droits issus de traités, les femmes des Premières Nations ayant épousé un homme non membre d’une Première Nation, de même que leurs enfants.

En août 2019, les dernières dispositions du projet de loi sont entrées en vigueur, corrigeant un tort historique et rétablissant les droits et l’identité des femmes des Premières Nations en tant que femmes ayant le statut d’Indien conformément à la Loi sur les Indiens.

Honorables sénateurs, on dit qu’une des aspirations fondatrices de la création du Sénat était d’avoir un organe parlementaire composé de personnes qui sont les meilleures parmi nous, afin de garantir que les voix des minorités soient entendues par le gouvernement dans l’étude et l’examen des projets de loi.

La sénatrice Lillian Dyck est l’une de ces personnes et elle a servi le Canada avec dévouement pendant 15 ans. Consciencieuse dans son évaluation, humble dans son comportement, la sénatrice Dyck a fait preuve d’un leadership discret et audacieux, digne des parlementaires modèles, en démontrant de l’objectivité sans succomber à l’ingérence politique.

Les Autochtones de la Saskatchewan et tous les Canadiens ont été bien servis par la sénatrice Dyck au Sénat du Canada. Nous lui devons toute notre gratitude, même si elle ne nous le demanderait jamais.

La force de caractère de la sénatrice Dyck est illustrée dans une anecdote de mon épouse, Charlene, qui, il y a environ un an, prenait l’avion de Regina à Ottawa en passant par Saskatoon. Elle m’a raconté que, lorsque l’avion s’est arrêté à Saskatoon pour prendre d’autres passagers, une dame est montée à bord et elle ressemblait à quelqu’un de la royauté. Mon épouse s’est dit que la dame était peut-être une sénatrice. J’ai acquiescé en disant : « Ce devait être la sénatrice Lillian Dyck. »

Merci, sénatrice Dyck. Votre travail et votre approche concernant les travaux du Sénat sont éloquents. Je vous souhaite une bonne continuation, de profiter de votre retraite et de passer du temps à la maison avec votre famille et vos amis. Je vous remercie.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le temps consacré aux hommages est écoulé.

[Français]

Le Campus Saint-Jean

L’honorable Paula Simons : Le Campus Saint-Jean a toujours fait partie intégrante de l’Alberta et de la communauté franco-albertaine depuis sa fondation à Edmonton par des missionnaires oblats. Il est le seul établissement à offrir une éducation universitaire en langue française à l’ouest de Winnipeg. L’institution a formé des générations de Franco-Albertains, de même que des générations d’anglophones qui voulaient devenir véritablement bilingues. Son campus est situé au cœur des quartiers francophones historiques d’Edmonton et permet aux étudiants de vivre une immersion complète dans la langue et la culture françaises.

Le Campus Saint-Jean est aussi l’alma mater de notre chère collègue la sénatrice Chantal Petitclerc. Aujourd’hui, le Campus Saint-Jean a besoin de 20 millions de dollars pour rénover ses édifices. L’université propose donc de vendre le terrain du campus et de réinvestir cet argent dans l’éducation en français sur le terrain du campus principal.

Toutefois, si cette vente se concrétisait, ce serait un coup dur pour le dynamique quartier francophone d’Edmonton et pour la cause de la francophonie au pays. Le financement du gouvernement fédéral pour soutenir le Campus Saint-Jean est le même depuis 2003. Cependant, depuis 2003, la proportion d’Albertains qui disent avoir le français comme première langue a augmenté à 31 %. Aujourd’hui, l’Alberta se trouve au troisième rang au Canada, après le Québec et l’Ontario, pour ce qui est de l’importance de sa population francophone.

Nous avons besoin de trouver une façon de sauver cette institution unique et extraordinaire. J’aimerais que l’Université de l’Alberta, le gouvernement de l’Alberta, le gouvernement fédéral et les communautés franco-albertaines travaillent ensemble, comme une équipe, pour trouver une solution. J’espère aussi que nous pourrons continuer de parler au Sénat des questions fort importantes qui se posent au sujet de l’avenir des institutions francophones d’enseignement postsecondaire hors Québec qui protègent les droits des francophones partout au Canada. Merci, hiy hiy.

[Traduction]

La Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage

L’honorable Bev Busson : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’occasion de la Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage créée par les Nations unies. Lorsqu’ils entendent le mot « esclavage », la plupart des Canadiens pensent à l’esclavage qui a marqué l’histoire : la répugnante traite des personnes et, plus particulièrement, le trafic de plus de 12 millions d’Africains du XVIe siècle au XIXe siècle. Ces gens ont été arrachés à leur famille et à leur foyer pour être vendus en Europe et dans le Nouveau Monde comme de simples marchandises. Les séquelles de ce crime contre l’humanité se font toujours sentir aujourd’hui, et nous devons reconnaître les souffrances qui en découlent. Malheureusement, l’esclavage de ce genre perdure encore dans certaines régions du monde.

Le concept d’« esclavage moderne » nous rappelle toutefois que le même déni des droits fondamentaux, de la liberté et de l’autonomie des personnes existe toujours, et ce, même au Canada. La Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage est axée sur l’éradication de la traite des personnes, de l’exploitation sexuelle, du travail inacceptable des enfants, des mariages forcés, de l’enrôlement forcé d’enfants soldats et de toute autre exploitation de personnes vulnérables, de force ou sous la menace de la violence.

Son Honneur le Président : Nous éprouvons des problèmes techniques. Avec la permission du Sénat, je propose que nous poursuivions et que, si on parvient à régler les problèmes techniques éprouvés par la sénatrice Busson, nous la laissions terminer sa déclaration. Sinon, peut-être qu’elle pourra la reprendre un autre jour. Que tous ceux qui s’opposent à cette suggestion veulent bien dire non. Nous poursuivons. Merci.


AFFAIRES COURANTES

Transports et communications

Dépôt du rapport visé à l’article 12-26(2) du Règlement

L’honorable Michael L. MacDonald : Honorables sénateurs, conformément à l’article 12-26(2) du Règlement du Sénat, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le premier rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, qui porte sur les dépenses engagées par le comité au cours de la première session de la quarante-deuxième législature.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 211.)

Agriculture et forêts

Dépôt du rapport visé à l’article 12-26(2) du Règlement

L’honorable Diane F. Griffin : Honorables sénateurs, conformément à l’article 12-26(2) du Règlement du Sénat, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le premier rapport du Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts, qui porte sur les dépenses engagées par le comité au cours de la première session de la quarante-deuxième législature.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 212.)

L’ajournement

Préavis de motion

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au lundi 7 décembre 2020, à 18 heures.

(1440)

La Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

Projet de loi modificatif—Première lecture

L’honorable Diane F. Griffin dépose le projet de loi S-220, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (utilisation du bois).

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Griffin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la séance d’après-demain.)

[Français]

L’Association parlementaire Canada-Europe

La première partie de la session ordinaire de 2020 de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, tenue du 27 au 31 janvier 2020—Dépôt du rapport

L’honorable Claude Carignan : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Association parlementaire Canada-Europe concernant la première partie de la session ordinaire de 2020 de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, tenue à Strasbourg, en France, du 27 au 31 janvier 2020.

La réunion du Comité permanent des parlementaires de la région arctique, tenue les 12 et 13 février 2020—Dépôt du rapport

L’honorable Claude Carignan : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Association parlementaire Canada-Europe concernant la réunion du Comité permanent des parlementaires de la région arctique, tenue à Strasbourg, en France, les 12 et 13 février 2020.

[Traduction]

L’Association parlementaire du Commonwealth

La réunion du Comité de coordination du Comité exécutif (EXCO), tenue du 27 au 29 février 2020—Dépôt du rapport

L’honorable Yuen Pau Woo : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Association parlementaire du Commonwealth concernant la réunion du Comité de coordination du Comité exécutif (EXCO), tenue à Londres, au Royaume-Uni, du 27 au 29 février 2020.

La visite bilatérale dans les Caraïbes, du 18 au 24 janvier 2020—Dépôt du rapport

L’honorable Yuen Pau Woo : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Association parlementaire du Commonwealth concernant la visite bilatérale dans les Caraïbes, à Port d’Espagne, à Trinité-et-Tobago, et à Bridgetown, à la Barbade, du 18 au 24 janvier 2020.

La réunion du Comité de coordination du Comité exécutif (EXCO), tenue les 18 et 19 janvier 2020—Dépôt du rapport

L’honorable Yuen Pau Woo : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Association parlementaire du Commonwealth concernant la réunion du Comité de coordination du Comité exécutif (EXCO), tenue à Londres, au Royaume-Uni, les 18 et 19 janvier 2020.

Le colloque de Westminster sur l’efficacité des Parlements, tenu du 25 au 29 novembre 2019—Dépôt du rapport

L’honorable Yuen Pau Woo : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Association parlementaire du Commonwealth concernant le colloque de Westminster de 2019 sur l’efficacité des Parlements, tenu à Londres, au Royaume-Uni, du 25 au 29 novembre 2019.

La Conférence parlementaire du Commonwealth, tenue du 22 au 29 septembre 2019—Dépôt du rapport

L’honorable Yuen Pau Woo : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Association parlementaire du Commonwealth concernant la 64e Conférence parlementaire du Commonwealth, tenue à Kampala, en Ouganda, du 22 au 29 septembre 2019.

Droits de la personne

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier les questions ayant trait aux obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne

L’honorable Salma Ataullahjan : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit autorisé à étudier et à surveiller l’évolution de diverses questions ayant trait aux droits de la personne et, entre autres choses, à examiner les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne;

Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 30 septembre 2023.


PÉRIODE DES QUESTIONS

La sécurité publique

Le programme de rachat d’armes à feu

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Monsieur le leader, la Fédération de la police nationale a récemment publié un appel à l’action concernant la violence liée aux armes à feu et la sécurité publique au Canada. Le rapport de la Fédération conclut notamment que le récent décret interdisant diverses armes à feu et le programme de rachat proposé par le gouvernement fédéral ciblant les propriétaires légitimes d’armes à feu ne tiennent pas compte des dangers qui menacent la sécurité publique et qui nécessitent une attention urgente. En fait, selon l’appel à l’action, ces mesures :

[…] détourne[nt] du personnel, des ressources et du financement extrêmement importants de la lutte contre l’utilisation criminelle d’armes à feu illégales, menace plus immédiate et croissante.

Monsieur le leader, quelle est la réponse du gouvernement à ce rapport de la Fédération de la police nationale? De plus, pouvez-vous nous dire quel est le coût estimatif actuel du programme proposé par le gouvernement pour racheter des armes autrefois légales, mais dont il interdit maintenant la possession?

Son Honneur le Président : Sénateur Gold, avant que vous répondiez, je viens d’être informé qu’il y a beaucoup de bruits parasites qui perturbent les appels Zoom et que les gens ont de la difficulté à entendre. Je voudrais donc que nous suspendions la séance pendant deux minutes pour permettre le redémarrage du système. Est-ce que vous êtes tous d’accord, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(La séance du Sénat est suspendue.)

(Le Sénat reprend sa séance.)

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question. Le gouvernement collabore étroitement avec les chefs et les services de police de l’ensemble du pays pour veiller à ce que les Canadiens soient protégés grâce au travail assidu et au dévouement de ces vaillants professionnels, dont il prend très au sérieux les observations, les points de vue, voire les critiques.

(1450)

Le gouvernement demeure résolu à accroître la protection des Canadiens et est fier des mesures législatives qu’il a prises pour ce faire.

En ce qui concerne les armes d’assaut de type militaire, elles sont conçues pour tuer le plus grand nombre de personnes possible. Le gouvernement s’est engagé à lancer un programme de rachat d’armes à feu, et on me dit qu’il a l’intention de le mettre en œuvre dès que possible. Il considère actuellement toute une série d’options et il collabore avec les provinces et les territoires. Le gouvernement se réjouit à la perspective d’unir ses efforts à ceux des parlementaires afin d’adopter une loi digne des propriétaires d’armes à feu respectueux des lois.

Le sénateur Plett : Je suppose que la petite pause vous a fait oublier ma question. Je pense vous avoir demandé ce qu’il en coûterait pour mettre en œuvre le programme de rachat d’armes du gouvernement. Voilà la question que je vous pose. J’aimerais aussi poser une question complémentaire.

Monsieur le leader, le gouvernement peut-il garantir aux propriétaires d’armes à feu qu’ils recevront une juste valeur marchande pour leurs armes à feu et qu’ils ne seront pas pénalisés par l’interdiction imposée par le gouvernement?

Le sénateur Gold : Honorables sénateurs, le gouvernement que je représente a mis en œuvre une série de mesures pour assurer la sécurité des Canadiens. Nous, les sénateurs, avons adopté des projets de loi établissant de telles mesures. Merci de m’avoir rappelé l’autre partie de votre question. Je suis désolé, mais je ne connais pas le coût du programme. Lorsque cette information sera disponible, je la communiquerai au Sénat.

Les finances

Le Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, ma question s’adresse aussi au leader du gouvernement et elle porte sur la promesse du gouvernement d’élargir la portée des prêts du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes. Le 9 octobre dernier, le gouvernement a annoncé que les petites entreprises pourraient obtenir un prêt additionnel de 20 000 $, dont la moitié serait non remboursable si le prêt est remboursé d’ici la fin de 2022. L’annonce a été faite le même jour que des changements ont été apportés au programme pour le loyer commercial et que la subvention salariale a été prolongée, deux mesures contenues dans le projet de loi C-9.

Même si le gouvernement avait promis à ce moment-là qu’il annoncerait dans les jours suivants une date de lancement et la marche à suivre pour faire une demande, ce n’est que dans l’énoncé économique de lundi que les petites entreprises ont appris qu’elles pourraient demander le prêt additionnel à partir d’une date encore inconnue en décembre.

Monsieur le leader, même si le prêt additionnel au titre du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes a été annoncé avec les deux autres programmes, pouvez-vous nous dire pourquoi il a été exclu du projet de loi C-9? Pourquoi y a-t-il eu tant de retards pour mettre enfin en œuvre le programme? Le gouvernement a dit qu’il serait mis en œuvre en décembre, mais avez-vous une date précise à donner aux propriétaires de petite entreprise pour leur assurer qu’il sera bel et bien mis en œuvre? Vous vous rappellerez que le ministre Morneau a publié un gazouillis le jour précédant l’entrée en vigueur d’un autre programme pour indiquer qu’il y avait des retards. Par conséquent, pouvez-vous nous donner une date afin de nous assurer que le programme de prêts additionnels sera mis en œuvre?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénatrice pour sa question. Je comprends l’importance de ces programmes pour les petites entreprises du Canada. J’ai moi aussi été propriétaire d’une petite entreprise dans une vie antérieure. Beaucoup d’amis à moi ont bénéficié de ce soutien et se réjouissent à l’idée de pouvoir continuer à en bénéficier.

Je ne peux pas vous donner une date précise, car je ne le sais pas. Le Sénat a fini par s’habituer à ce que les programmes soient mis en œuvre assez rapidement. La vérité est que, comme le savent les parlementaires expérimentés, les bons programmes prennent normalement, en dehors des périodes de crise, plus de temps être mis en œuvre. Je suis certain que le gouvernement travaille avec diligence pour aider les petites entreprises dont l’économie dépend.

La sénatrice Martin : Je vous remercie. Je sais qu’il importe d’être très minutieux, mais nous sommes obligés d’attendre tandis que les retards s’accumulent. De plus, même avec le temps additionnel que prend le gouvernement, des erreurs sont commises. Toutes ces petites entreprises méritent notre soutien. Je voudrais également savoir pourquoi les propriétaires de nouvelles entreprises qui ne répondent pas aux critères d’admissibilité pour les mesures d’aide fédérales n’ont toujours pas accès aux subventions salariales ou à l’aide au loyer commercial, même si nombre d’entre elles sont actuellement soumises à des mesures de confinement dont elles ne sont aucunement responsables.

Monsieur leader, pourquoi ces nouvelles petites entreprises ne méritent-elles pas d’être soutenues selon l’énoncé économique qui a été présenté par la ministre?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question. Nous sommes de plus en plus conscients qu’il est toujours possible d’améliorer la façon de mettre en place le genre de mesures de soutien que le gouvernement offre avec l’appui de tous les partis de l’autre endroit et du Sénat. Il faut tirer de telles leçons pour combler toutes les lacunes qui sont décelées. En effet, le gouvernement est toujours déterminé, comme il en a concrètement fait la preuve, à entendre les observations des intervenants et des entreprises. Il suffit de penser aux ajustements qui ont été apportés aux programmes ayant fait l’objet de débats au Sénat. Ils continueront de répondre aux préoccupations légitimes des Canadiens et des entreprises d’ici.

La pandémie de COVID-19—Le financement pour les travailleurs de première ligne

L’honorable Paula Simons : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. En mai dernier, vous vous rappellerez que le gouvernement fédéral a annoncé un plan de 4 milliards de dollars pour bonifier le salaire des travailleurs essentiels de première ligne qui font un travail difficile et dangereux en raison de la pandémie. L’enveloppe du fédéral s’élevait à 3 milliards de dollars, et les provinces devaient fournir 1 milliard de dollars.

Aujourd’hui, l’Ontario, à qui on a promis 1,1 milliard de dollars dans le cadre de ce plan, a reçu tout l’argent prévu. La Colombie-Britannique, à qui on a promis 401 millions de dollars, a reçu 93 % du montant prévu, ce qui représente 371 millions de dollars. Le Manitoba, à qui on a promis 117 millions de dollars, a reçu 77 % de l’argent prévu, c’est-à-dire 90 millions de dollars, jusqu’à maintenant.

En fait, toutes les provinces et tous les territoires ont reçu la grande partie des fonds promis, à l’exception de l’Alberta. On a promis aux Albertains environ 348 millions de dollars et ils n’ont reçu que 12 millions de dollars jusqu’à maintenant. On n’en est donc qu’à 3,45 %. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi les travailleurs de première ligne de l’Alberta n’ont pas reçu leur prime? Quelles mesures le gouvernement fédéral prend-il pour faire en sorte que les travailleurs essentiels de l’Alberta reçoivent véritablement leur juste part?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de cette question, sénatrice. Il est troublant d’apprendre que les Albertains qui accomplissent un travail aussi important tout en s’exposant à des risques, eux et leur famille, n’ont toujours pas reçu le soutien qui est fourni par le gouvernement fédéral et qui devrait leur parvenir directement, par le truchement du gouvernement provincial.

Je n’ai pas la réponse à votre question. Je ne me livrerai même pas à des conjectures à propos des négociations et des discussions qui font nécessairement partie des transferts fiscaux et des arrangements de la sorte. Assurément, je vais me renseigner et revenir avec une réponse.

La sénatrice Simons : Étant donné les difficultés qu’ont les Albertains à obtenir le soutien offert par le gouvernement fédéral dans le contexte de la pandémie, j’aimerais que le sénateur Gold nous dise si le gouvernement qu’il représente est prêt à envisager un autre modèle qui permettrait aux Albertains de recevoir le même genre de soutien que les Canadiens sont heureux de recevoir ailleurs au pays.

Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question, Sénatrice, mais, à ma connaissance, les programmes ne diffèrent pas selon les provinces : le soutien fourni par le gouvernement fédéral est offert à tous les Canadiens. Quant au soutien offert par les provinces et les territoires à leurs résidants respectifs, il est équilibré et équitable dans l’ensemble de notre grand pays.

Je ne peux que répéter que s’il existe des différences ou des disparités qui ne dépendent pas de la situation locale, de la population, des demandes faites par les provinces ou d’autres choses du genre, je les examinerai avec plaisir.

La justice

La Loi canadienne sur la santé

L’honorable Kim Pate : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Jean Truchon a demandé l’aide médicale à mourir, qui lui a été accordée par une cour québécoise, quand il a été institutionnalisé parce qu’il ne pouvait plus recevoir à domicile des soins et un soutien adéquats. Alors qu’il souhaitait avoir de l’indépendance et une belle qualité de vie, il était confronté à la possibilité de passer le reste de sa vie dans un établissement où, comme la crise de la COVID-19 nous l’a rappelé, trop de gens se retrouvent abandonnés, négligés, laissés dans une situation indigne à cause du manque de ressources et de soutien.

Comme les experts en droit constitutionnel nous le rappellent, l’arrêt Fraser de la Cour suprême du Canada a précisé que le droit à une réelle égalité, prévu par la Charte, exige une analyse contextuelle des choix. Pour autant, le caractère volontaire d’un choix ne peut être invoqué pour soustraire une mesure législative comme le projet de loi C-7 à une contestation constitutionnelle si les options découlent d’une inégalité systémique.

Des gens demandent de mourir à cause de souffrances qui ne sont pas inévitables, mais qui découlent plutôt de l’incapacité des politiques à financer, soutenir et garantir de manière égale la dignité et un accès adéquat à des ressources telles que les soins de longue durée, les soins palliatifs, les soins à domicile, les soins de santé mentale, le logement et un soutien au revenu.

(1500)

Le gouvernement s’engagera-t-il à : premièrement, demander la prolongation de la suspension de la déclaration d’invalidité établie dans la décision Truchon; deuxièmement, renvoyer cette question à la Cour suprême du Canada pour poursuivre l’étude du projet de loi C-7 à la lumière des conclusions de la décision Fraser, en consultant pleinement les groupes de personnes ayant un handicap afin de monter un dossier factuel destiné aux tribunaux; troisièmement, pour veiller à ce que le projet de loi C-7 ne crée pas le droit à la mort avant de créer le droit à la vie, modifier la Loi canadienne sur la santé pour y inclure des normes nationales garantissant l’accès équitable à de tels services?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Sénatrice Pate, je vous remercie de votre question et de vos observations. Vous soulevez d’importants enjeux à propos du dossier dont est saisi le comité. C’est très préoccupant, en effet.

Je répondrai à vos questions expressément et directement, mais j’aimerais d’abord commencer par dire que les questions que vous soulevez sont le vrai sujet des débats dans cette enceinte, tant du point de vue du gouvernement que du parti dont je suis le fier représentant. C’est ce qui justifie notre présence, la raison pour laquelle chacun d’entre nous avons été convoqués. Nous devons faire de notre mieux pour exercer notre esprit critique au moment d’examiner les projets de loi et les importants enjeux d’intérêt public dont nous sommes saisis. Je suis impatient de débattre du projet de loi une fois qu’il nous sera renvoyé par la Chambre des communes, où il fait toujours l’objet de débats en ce moment même. Le gouvernement se réjouit de la contribution qu’apportera le Sénat à ce dossier, ce qui permettra d’améliorer le projet de loi et de garantir qu’il servira l’intérêt de tous les Canadiens.

Je reviens plus précisément à vos questions. S’agissant de la demande de prolongation, la décision revient, comme vous le savez, au ministre de la Justice en sa qualité de procureur général. Comme je l’ai dit, cette question relève de sa compétence. Le gouvernement n’a pas l’intention de renvoyer la question à la Cour suprême du Canada. Le gouvernement estime que le projet de loi C-7 — la réponse, comme vous le soulignez avec justesse, à la décision Truchon — est l’aboutissement d’amples consultations avec les parties prenantes, dont des représentants des personnes handicapées, entre autres.

Le gouvernement juge qu’en plus d’être judicieux, raisonnable et équitable, ce projet de loi est constitutionnel. Je me réjouis d’en débattre avec mes collègues sénateurs le moment venu.

Si je peux ajouter quelque chose à propos de votre troisième question, c’est justement parce que nous n’avons pas encore reçu et débattu ce projet de loi, et examiné les modifications que les sénateurs pourraient souhaiter apporter pour l’améliorer que je ne peux pas m’engager et que le gouvernement ne s’engage pas à modifier la Loi canadienne sur la santé dans le sens que vous suggérez. Nous sommes ici au Sénat pour débattre et améliorer les projets de loi. Le gouvernement du Canada attend avec impatience ce débat et les modifications que chaque sénateur pourrait suggérer afin d’améliorer le projet de loi. Il examinera sérieusement tout amendement susceptible d’améliorer ce projet de loi.

Ne pas procéder serait abdiquer notre responsabilité constitutionnelle sur une question dont nous ne sommes même pas encore saisis. De plus, si nous n’allons pas de l’avant avec le projet de loi C-7, nous condamnerons les Canadiens, non seulement au Québec, mais ailleurs, à continuer à souffrir et à être privés de leurs droits constitutionnels parce que les sénateurs ne s’acquittent pas de l’obligation constitutionnelle qui est la leur d’étudier le projet de loi et d’essayer de l’améliorer le plus possible.

L’agriculture et l’agroalimentaire

Le Programme de paiements anticipés

L’honorable Robert Black : Honorables sénateurs, j’aimerais poser une question au représentant du gouvernement au Sénat. Sénateur Gold, comme vous le savez sans doute, le Programme de paiements anticipés du gouvernement fédéral est un programme de garantie d’emprunt qui permet aux producteurs agricoles d’avoir facilement accès à des avances de fonds assorties de faibles taux d’intérêt. Honorables sénateurs, des programmes comme celui-ci sont essentiels, non seulement pour passer au travers de la pandémie de COVID-19, mais aussi pour que les producteurs agricoles bénéficient de la souplesse de mise en marché nécessaire pour vendre leurs produits selon les conditions du marché plutôt que de le faire parce qu’ils ont besoin de rentrées d’argent pour satisfaire à leurs besoins immédiats, y compris s’acquitter de leurs responsabilités financières.

À l’heure actuelle, le gouvernement du Canada assume les intérêts de la première tranche de 100 000 $ des fonds versés aux producteurs agricoles dans le cadre du Programme de paiements anticipés. Dernièrement, je me suis entretenu avec des représentants de la Canadian Cattlemen’s Association, et ils ont soulevé que cette limite restreint les possibilités accessibles aux producteurs agricoles pour commercialiser efficacement leurs produits.

Donc, ma question au sénateur Gold, est la suivante : le gouvernement fédéral envisage-t-il d’accroître la portion sans intérêt de ce programme pour la faire passer de 100 000 $ à 500 000 $? Avec cette hausse, les producteurs agricoles, notamment les industries de la production bovine, porcine et avicole, auraient davantage de liquidités et de flexibilité pour commercialiser leurs produits au meilleur moment et au meilleur prix. Merci.

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Sénateur, je vous remercie pour votre question. Vous avez bien décrit le programme — avoir facilement accès à des avances de fonds assorties de faibles taux d’intérêt. Comme le sénateur le sait, le gouvernement a effectivement fait passer la limite d’emprunt de 400 000 $ à 1 million de dollars en 2019 pour aider les producteurs agricoles à gérer leurs liquidités. Au début de septembre cette année, le total des versements accordés dans le cadre du Programme de paiements anticipés s’élevait à plus de 1,8 milliard de dollars pour l’année 2020, ce qui représente une augmentation de 100 millions de dollars par rapport à l’an dernier.

Pour répondre à votre question, je ne suis au courant d’aucune augmentation prévue de la limite.

La santé

Le vaccin contre la COVID-19

L’honorable Judith G. Seidman : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Plus tôt aujourd’hui, la Medicines and Healthcare products Regulatory Agency du Royaume-Uni a approuvé le vaccin de Pfizer contre la COVID-19. Le développement et l’homologation de ce vaccin est une réalisation remarquable, et j’adresse mes sincères félicitations à toutes les personnes qui y ont participé.

La semaine prochaine, la population du Royaume-Uni commencera à être vaccinée, et les premiers à recevoir le vaccin seront les travailleurs de la santé ainsi que les résidants et le personnel des établissements de soins de longue durée.

Sénateur Gold, quand le gouvernement du Canada prévoit-il que les travailleurs de la santé de notre pays ainsi que les résidants et le personnel des établissements de soins de longue durée commenceront à recevoir les vaccins approuvés contre la COVID-19?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. La vaccination est un enjeu important pour les Canadiens et, il va sans dire, un enjeu sur lequel notre gouvernement se penche quotidiennement. Comme la ministre l’a annoncé dans les médias hier, le gouvernement travaille depuis longtemps sur des plans visant à obtenir des sources de vaccins adéquates et à élaborer des plans de distribution appropriés avec les provinces et les territoires, afin que les Canadiens puissent bénéficier de ces vaccins dans les meilleurs délais.

Je ne répéterai pas ce que j’ai dit plus tôt dans cette enceinte concernant le fait que le gouvernement a conclu des accords avec sept entreprises pour l’obtention de vaccins, dont beaucoup s’avèrent très prometteurs. Je ne répéterai pas non plus que le Canada est confronté à un défi, puisqu’il a perdu sa capacité de production au fil des ans et doit donc compter sur des vaccins produits ailleurs dans le monde. Il n’en reste pas moins que le gouvernement du Canada a élaboré un plan de distribution qu’il continue de peaufiner, et il collabore avec les producteurs de vaccins.

La prochaine étape consiste à obtenir l’homologation de Santé Canada pour s’assurer que les vaccins répondent aux normes canadiennes. Le ministre a déclaré hier — je crois que c’était à l’émission Power & Politics, mais je suis certain qu’il l’a aussi dit sur d’autres plateformes — que la prochaine étape, immédiatement après l’homologation, c’est que les vaccins arrivent selon les ententes contractuelles conclues. Le gouvernement négocie activement avec les fabricants pour assurer aux Canadiens un accès aux vaccins aussi rapide que possible.

La sénatrice Seidman : Vous avez parlé de la distribution. Il y a un mois, le Comité consultatif national de l’immunisation du Canada a publié des directives préliminaires concernant les groupes de personnes qui devraient avoir priorité pour obtenir le vaccin.

Hier, Global News a rapporté qu’en apprenant que le Canada obtiendrait moins de doses que prévu dans les premières livraisons, le comité consultatif a estimé qu’il n’avait pas d’autre choix que de recommander un système préférentiel, dans lequel les résidants des établissements de soins de longue durée, des établissements pour personnes en perte d’autonomie, des maisons de retraite et des hôpitaux pour malades chroniques ainsi que les personnes qui prennent soin d’eux auraient priorité pour recevoir les premiers vaccins.

Monsieur le leader, le premier ministre et les premiers ministres provinciaux se sont entretenus au cours des derniers jours sur la nécessité de garantir une certaine uniformité partout au Canada en ce qui a trait aux populations qui recevront les premiers vaccins contre la COVID-19. Quand les Canadiens connaîtront-ils l’ordre de priorité pour la distribution?

Le sénateur Gold : Encore une fois, je vous remercie de votre question. La responsabilité du gouvernement, responsabilité dont il s’acquitte, est d’obtenir des vaccins et de les faire venir au Canada une fois l’homologation de Santé Canada obtenue.

(1510)

C’est aussi la responsabilité du gouvernement fédéral de collaborer avec les provinces et les territoires afin que les vaccins soient distribués adéquatement et équitablement à mesure qu’ils arriveront au Canada. À cette fin, le gouvernement s’est assuré la participation des forces armées et a prévu du matériel logistique afin que les vaccins qui sont maintenant en production soient transportés de manière sécuritaire.

Au bout du compte, toutefois, il est de la responsabilité et du devoir des provinces et des territoires de décider dans quel ordre leurs habitants seront vaccinés. Le gouvernement du Canada continuera de collaborer avec eux afin d’assurer l’échange efficace des renseignements et le respect des champs de compétence.

Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes

La Société Radio-Canada

L’honorable Leo Housakos : Ma question s’adresse au représentant et leader du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, au cours des cinq dernières années, le gouvernement Trudeau a porté le financement de CBC/Radio-Canada à des sommets inégalés. Pourtant, selon un article paru aujourd’hui dans le Blacklock’s Reporter, les revenus publicitaires de la CBC n’ont jamais été aussi bas, tout comme ses cotes d’écoute d’ailleurs.

Vous conviendrez certainement, sénateur Gold, que la CBC produit des émissions que les contribuables canadiens ne regardent pas et dont ils ne veulent pas. Pourtant, le gouvernement Trudeau injecte des milliards de dollars du Trésor public dans cette société. Dans un esprit de transparence, ma question est très simple. Cela fait très longtemps que la Loi sur la radiodiffusion et les activités du réseau anglophone de CBC/Radio-Canada n’ont pas fait l’objet d’un examen parlementaire. Est-ce que vous et le gouvernement conviendrez qu’il est grand temps et essentiel, dans un esprit de transparence, d’entreprendre une enquête et un examen parlementaires des activités de la CBC, et même de la Loi sur la radiodiffusion? Sinon, pourquoi?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Le gouvernement du Canada prend au sérieux la responsabilité qu’il a envers les citoyens d’offrir et de soutenir un système de radiodiffusion national. C’est pourquoi CBC/Radio-Canada conserve l’appui des Canadiens.

Lorsqu’il y a des compressions à CBC/Radio-Canada, on entend des critiques dans cette enceinte. C’est un peu comme dans Boucles d’or et les Trois Ours : un petit peu trop chaud ou un petit peu trop froid.

À l’instar de tous les gouvernements, le gouvernement du Canada doit affronter le défi d’un paysage médiatique changeant et d’un environnement différent pour les diffuseurs traditionnels.

J’écouterai vos suggestions avec plaisir, je les soumettrai au gouvernement, et je vous en donnerai des nouvelles.

Le sénateur Housakos : Sénateur Gold, je crois que nous conviendrons tous que le rôle du gouvernement consiste à combler des lacunes, et pas à utiliser l’argent des contribuables pour financer des projets artificiels de création d’emplois que les contribuables et le public canadiens ne veulent visiblement pas, quand on regarde les cotes d’écoute et les revenus publicitaires.

Sénateur Gold, au début de la pandémie, CBC/Radio-Canada a suspendu temporairement ses bulletins de nouvelles locales, en raison d’un manque de ressources. La Société a mis fin à la programmation locale au milieu de la dernière période quinquennale, alors qu’elle avait obtenu un financement record. Cela ne respecte pas l’esprit de son mandat et de sa licence de radiodiffusion. Après que des plaintes ont été déposées à propos de ces réductions dans la programmation locale, le CRTC n’a rien dit et n’a pris que très peu de mesures, faisant preuve lui-même de négligence, puisqu’il n’a donné que l’équivalent d’une petite tape sur les doigts de CBC/Radio-Canada.

Sénateur Gold, convenez-vous qu’un examen parlementaire est attendu depuis longtemps, aussi bien pour la Loi sur la radiodiffusion que pour le rôle de CBC/Radio-Canada? Pourquoi le gouvernement ne s’y met-il pas?

Le sénateur Gold : Comme le sénateur le sait déjà, je suis féru d’études parlementaires. J’en ai moi-même proposé une au Sénat, et il y en a d’autres dans les cartons. Les discussions se poursuivent avec les dirigeants des autres groupes.

Merci encore une fois de votre question, sénateur. Je ne peux pas vous donner de réponse précise, ni même, sans vouloir vous manquer de respect, dire que je suis d’accord avec vous. Je vais cependant me renseigner et je vous reviendrai avec plaisir avec une réponse.

[Français]

La justice

La législation en matière de traite des personnes

L’honorable Julie Miville-Dechêne : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Aujourd’hui, nous soulignons la Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage.

L’esclavage moderne, comme vous le savez, inclut la traite à des fins sexuelles. Comme le premier ministre ne nous a pas répondu au printemps, nous sommes 20 députés et sénateurs à avoir écrit une nouvelle lettre au ministre Lametti afin de lui demander pourquoi les dispositions du Code criminel ne sont pas appliquées dans le cas des sites pornographiques, comme Pornhub, où on peut retrouver, malheureusement, des vidéos de pornographie juvénile et d’actes sexuels commis sans consentement. Ces abus ont retenu l’attention du monde entier. Que fait le gouvernement canadien, compte tenu du fait que le siège social de ce site, MindGeek, est situé à Montréal?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question et de votre engagement envers cet important enjeu. Le gouvernement, dont je suis le représentant, est déterminé à lutter contre toute forme d’exploitation sexuelle des personnes vulnérables et des enfants, car il est impératif qu’ils soient protégés contre tous les abus. Comme vous le savez, le Code criminel et les lois fédérales existantes prévoient des mesures liées à la déclaration et à la conservation obligatoires des données sur les infractions potentielles de pornographie juvénile. Le gouvernement s’engage à faire en sorte que notre système de justice pénale respecte les victimes et oblige les délinquants à rendre des comptes.

La sénatrice Miville-Dechêne : Je vous remercie de cet engagement de nature générale, sénateur Gold. Cependant, on ne lance pas de poursuites contre ces sites pornographiques. Nos lois sont-elles adéquates? Faut-il mettre à jour ces lois pour veiller à ce que la vie des jeunes et des femmes ne soit pas ainsi brisée? De plus, pourquoi la pornographie amateur en ligne bénéficie-t-elle d’une impunité alors qu’en France on a ouvert une enquête en matière de traite d’êtres humains visant un site pornographique? Ici, cela ne se produit pas.

Le sénateur Gold : Merci encore une fois de votre question. Selon le gouvernement, nos lois sont adéquates à cet égard, mais il faut souligner que la question des poursuites est la responsabilité des procureurs partout au Canada. Il y a une différence entre le contenu de nos textes législatifs et la décision que peut prendre un procureur de poursuivre quelqu’un pour une infraction à la loi.


[Traduction]

DÉCLARATION D’UN SÉNATEUR

La Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage

Consentement ayant été accordé de revenir aux déclarations de sénateurs :

L’honorable Bev Busson : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’occasion de la Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage. Lorsqu’ils entendent le mot « esclavage », la plupart des Canadiens pensent à l’esclavage qui a marqué l’histoire : la répugnante traite des personnes et, plus particulièrement, le trafic de plus de 12 millions d’Africains, du XVIe au XIXe siècle. Ces gens ont été arrachés à leur famille et à leur foyer pour être vendus en Europe et dans le Nouveau Monde comme de simples marchandises. Les séquelles de ce crime contre l’humanité se font toujours sentir aujourd’hui, et nous devons reconnaître les souffrances qui en découlent.

Malheureusement, l’esclavage de ce genre perdure encore dans certaines régions du monde. Le concept d’esclavage moderne nous rappelle toutefois que le même déni des droits fondamentaux, de la liberté et de l’autonomie des personnes existe toujours, et ce, même au Canada. La Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage est axée sur l’éradication de la traite des personnes, de l’exploitation sexuelle, du travail inacceptable des enfants, des mariages forcés et de l’exploitation des personnes vulnérables, de force ou sous la menace de la violence.

Notre collègue la sénatrice Julie Miville-Dechêne a abordé de front d’importants pans de l’esclavage moderne dans le projet de loi S-216.

[Français]

Elle s’est exprimée avec éloquence sur le sujet dans cette Chambre, et je salue son initiative.

(1520)

[Traduction]

La traite et l’exploitation sexuelle visent principalement les femmes et les enfants, qui comptent pour plus de 90 % des victimes de cette pratique barbare. Selon les estimations des Nations unies, 4,8 millions de personnes sont soumises à l’exploitation sexuelle. C’est un chiffre stupéfiant, et bon nombre des victimes sont canadiennes. Ce lucratif marché est contrôlé par des organisations du crime organisé, dont les Hells Angels. J’ai personnellement été témoin de cette horrible réalité clandestine qui touche notre pays et qui fait de nombreuses victimes, y compris de jeunes filles vulnérables.

C’est une tragédie humaine alimentée par la pauvreté, le sexisme, le racisme, les inégalités salariales, le manque de sensibilisation et la peur. Les forces de police du pays, en partenariat avec le Centre national de coordination contre la traite de personnes de la GRC, s’efforcent de protéger les victimes et de trouver et poursuivre les exploiteurs à l’échelle nationale et internationale. Les préjudices causés sont troublants et difficiles à voir, mais il est aussi extrêmement difficile de poursuivre les auteurs de ces actes criminels en raison de l’immense vulnérabilité des personnes affectées.

J’exhorte le Sénat à saisir toutes les occasions et à prendre tous les moyens à sa disposition pour soutenir la Stratégie nationale de lutte contre la traite des personnes. Je félicite les membres des services de police du pays qui travaillent avec ardeur pour combattre cette forme de criminalité. C’est un travail épuisant et éprouvant sur le plan émotionnel.

Merci. Meegwetch.


ORDRE DU JOUR

La Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Coyle, appuyée par l’honorable sénatrice Ringuette, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques.

L’honorable Salma Ataullahjan : Honorables collègues, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques.

Dans ce projet de loi, le gouvernement propose de modifier la loi pour ajouter quatre catégories à la liste de produits chimiques réglementés interdits par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques. Le projet de loi ajouterait les Novitchoks, des agents neurotoxiques, à la liste des produits chimiques interdits.

Quand la marraine du projet de loi, la sénatrice Coyle, a parlé de ce dernier, elle a signalé que les modifications proposées s’aligneront sur celles apportées l’année dernière à la Convention sur les armes chimiques.

Les modifications proposées à la convention se fondaient sur une initiative conjointe du Canada, des Pays-Bas et des États-Unis visant à interdire cette nouvelle catégorie de produits chimiques réglementés.

La sénatrice Coyle a souligné que le Canada et ses alliés américains et néerlandais ont pris cette initiative principalement en réaction à l’utilisation de cette catégorie de produits chimiques dans une attaque perpétrée contre plusieurs personnes à Salisbury, au Royaume-Uni.

Des agents russes ont été impliqués dans cette attaque. Par ailleurs, les produits chimiques qui auraient été utilisés sont produits par la Fédération de Russie.

Je ne crois pas que quiconque dans cette enceinte — ou d’ailleurs au Parlement du Canada — s’opposerait à la mesure législative dont nous sommes saisis.

Lors de son intervention, la sénatrice Coyle a décrit de façon assez détaillée l’historique de la Convention sur les armes chimiques et, de manière plus générale, la répugnance que la majorité des pays éprouvent à l’égard de l’utilisation de ces armes.

On a débattu, au fil des ans, de la portée de la convention et des armes chimiques qui devraient y être incluses. Toutefois, on n’a jamais remis en question l’importance globale de la convention. En effet, 193 États déclarent y adhérer, notamment la Chine et la Russie.

En 2017, l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques a elle-même confirmé que la Russie avait détruit 39 967 tonnes métriques d’armes chimiques.

Évidemment, les agents chimiques Novitchok ne faisaient pas partie des armes chimiques détruites par la Russie, car ils n’étaient pas encore visés par la convention. Ainsi, je crois que nous pouvons tous convenir que les dispositions prévues dans cette mesure législative doivent être adoptées.

Je pense toutefois que nous devons être réalistes quant aux résultats que nous pouvons attendre de cette mesure législative. Peut-être que, grâce à ce réalisme, nous pourrons ensuite passer à des actions plus concrètes, parce que le projet de loi ne réglera pas le problème à lui seul.

Selon le gouvernement, le projet de loi dont nous sommes saisis montre ceci :

[...] que le Canada adopte une position ferme pour un monde plus sûr en contrôlant les produits chimiques dangereux en vertu de la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques.

Encore une fois, je suis d’accord pour dire que le projet de loi témoigne d’un sentiment profond. Toutefois, cette mesure à elle seule ne suffira probablement pas à prévenir une autre attaque de la sorte.

Comme la sénatrice Coyle l’a souligné dans le discours qu’elle a prononcé récemment, une figure de proue de l’opposition russe aurait été victime d’une attaque très similaire à celle qui a eu lieu en 2018 au Royaume-Uni.

Cela laisse présager que le respect de ces dispositions est peu probable du côté des États qui décideront tout simplement de ne pas en tenir compte. En outre, une interdiction au Canada serait en soi complètement symbolique.

Les produits chimiques dont il est question dans le projet de loi ne sont évidemment pas produits au Canada. Dans son discours, la sénatrice Coyle a mentionné que la mesure prévue dans le projet de loi « [...] n’impose aucune nouvelle charge au Canada, aux citoyens canadiens ou à l’industrie canadienne ».

Autrement dit, les mesures ne coûteront rien au Canada. C’est peut-être une bonne nouvelle, mais cela signifie également que nous ne devons pas fonder trop d’espoirs quant à ce qu’elles permettront d’accomplir.

Les armes chimiques de cette catégorie sont produites en Russie et, pour l’heure, la Russie n’a aucunement l’intention de changer ses pratiques. D’ailleurs, même si la Russie avait d’abord accepté à contrecœur les modifications à la convention, elle n’y adhère plus.

Je ne vois pas comment l’interdiction proposée pourrait empêcher la Russie ou d’autres pays d’agir comme bon leur semble. Dans l’ensemble, ce qui me préoccupe quant à ce projet de loi est la façon dont le gouvernement prévoit faire l’application des objectifs plus larges du projet de loi.

J’espère que le comité sénatorial qui devra étudier le projet de loi sera en mesure d’obtenir des précisions du gouvernement à ce sujet. On peut bien se donner une image vertueuse au moyen de la législation canadienne si on veut, mais j’ose espérer que l’ensemble des sénateurs veulent des solutions concrètes qui pourraient réellement empêcher de futures attaques.

Par conséquent, ce sur quoi j’aimerais surtout que les ministres et les fonctionnaires nous renseignent, ce sont les mesures pratiques que le Canada prendra pour prévenir des attaques similaires. Par exemple, quelles sont les consultations prévues à ce sujet au cours des prochaines années auprès de nos alliés? Comment prévoyons-nous convaincre d’autres pays, notamment la Russie, qu’il faut contrôler ces agents chimiques? Jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour imposer des sanctions aux pays qui contreviennent à ces dispositions? Sommes-nous disposés à sacrifier d’autres intérêts pour atteindre les objectifs du projet de loi à l’étude aujourd’hui?

Il est plutôt facile de déclarer que le Canada adopte une position ferme pour un monde plus sûr, comme le prétend le gouvernement. Il est beaucoup plus difficile de mettre en place un plan d’action pour faire en sorte que cela se concrétise.

Ainsi, j’appuie le principe du projet de loi. Toutefois, des questions demeurent et j’espère que l’étude du comité et, subséquemment, de l’autre endroit permettra d’y répondre. Merci.

[Français]

L’honorable Marilou McPhedran : Bonjour, tansi. En tant que sénatrice du Manitoba, je reconnais que je vis sur les territoires du Traité no 1, les territoires traditionnels des peuples anishnabeg, des Cris, des Oji-Cris, des Dakotas et des Dénés et de la patrie de la nation métisse. De plus, parce que nous avons le privilège d’être aujourd’hui au Sénat du Canada à Ottawa, sur la Colline du Parlement, je reconnais que nous sommes réunis ici sur les territoires non cédés de la nation algonquine anishnabeg.

[Traduction]

Honorables collègues, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer le projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques. D’abord, je remercie la sénatrice Coyle de son leadership à l’égard de ce projet de loi ainsi que du leadership dont elle fait preuve depuis longtemps en matière de consolidation de la paix sur des tribunes dont la portée varie de locale à mondiale.

Comme vient de si bien le décrire la sénatrice Ataullahjan, porte-parole de l’opposition pour ce projet de loi, les modifications qui y sont proposées sont simples, mais cruciales, car elles mettent à jour la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques en supprimant l’ancienne liste des produits chimiques prohibés pour permettre au Canada de suivre plutôt la liste à jour maintenue par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, ou OIAC, désignée à l’article VIII de la convention internationale sur les armes chimiques à titre d’instance chargée de l’application de la convention. Nous pouvons être fiers que le Canada ait été l’un des premiers pays à signer et à ratifier la Convention sur les armes chimiques, qui vise à les éradiquer et à empêcher leur réapparition dans les conflits.

(1530)

Les armes de destruction massive sont nucléaires, biologiques ou chimiques. Elles jouent un rôle néfaste et causent d’immenses souffrances et des destructions massives. Elles anéantissent des environnements sociaux et physiques, ce qui ruine des vies, des collectivités et des pays. Les armes chimiques sont composées de liquides et de gaz qui étouffent leurs victimes, empoisonnent leur sang, provoquent des cloques sur leur peau ou perturbent leur système nerveux.

Après les guerres mondiales du XXe siècle, les États-nations ont uni leurs efforts pour interdire ces armes insidieuses, mais ce n’est qu’en 1997 que la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction, communément appelée la Convention sur les armes chimiques, est entrée en vigueur avec pour mission de créer un monde sans armes chimiques; un monde dans lequel la chimie serait au service de la paix, du progrès et de la prospérité de l’humanité tout entière. Cependant, nous savons que le développement économique et technologique s’accompagne de découvertes qui peuvent être bien plus dangereuses qu’utiles pour le monde.

L’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques publie, sur son site Web, une liste de produits chimiques toxiques qu’elle garde à jour pour tenir compte des développements et prévenir des événements regrettables. Sa liste avancée peut servir de base à notre Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques et faire en sorte que le Canada se conforme au droit international actuel et que les Canadiens continuent de profiter des bienfaits de la chimie sans que des retards législatifs ne mettent des vies en péril.

Chers collègues, nous pouvons, grâce au projet de loi S-2, modifier la loi actuelle afin d’éviter tout malentendu concernant la possibilité d’obtenir, d’utiliser et d’entreposer certains produits chimiques toxiques. Comme on nous l’a rappelé de façon plus détaillée, des agents neurotoxiques ont été utilisés, il y a deux ans à peine, dans des attentats attribués à la Russie. Une version moins puissante du produit utilisé dans l’attentat mené en Angleterre a été utilisée contre Alexei Navalny, une tête d’affiche de l’opposition en Russie. Selon les explications du professeur Gary Stephens, expert en pharmacologie à l’Université de Reading, l’une des principales raisons qui expliquent la fabrication de ces agents, c’est que les éléments dont ils sont formés ne figurent pas dans la liste des substances interdites.

N’oublions pas que cette liste des armes chimiques interdites est la seule chose qui empêche des pays d’employer comme arme le chlore gazeux, un agent asphyxiant, ou le gaz moutarde, un agent vésicant. Cependant, la vérité, c’est que les seules choses qui nous protègent tous sont une liste d’armes chimiques interdites et notre engagement collectif à ne pas causer d’énormes souffrances. C’est pourquoi, honorables collègues, il est d’une importance capitale que nous apportions les modifications proposées dans le projet de loi S-2 afin que la liste des armes chimiques interdites maintenue et mise à jour par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques l’emporte en cas d’incompatibilité. Ce faisant, nous renouvellerons notre engagement pour le désarmement chimique, et j’espère que nous pourrons ainsi prévenir ne serait-ce que la plus petite erreur concernant les produits chimiques dangereux en territoire canadien.

En adoptant le projet de loi S-2, nous renforcerons nos mesures contre les armes chimiques. Aujourd’hui, j’aimerais profiter de cette occasion pour nous amener à porter notre regard au-delà des menaces que posent les armes chimiques. Je vous exhorte à suivre l’autre étape tout à fait logique qui consiste à lutter contre la prolifération des armes nucléaires en les interdisant, de la même façon que nous sommes prêts à imposer une interdiction avec ce projet de loi et cette liste des armes chimiques interdites.

La tour de la Paix, qui se trouve de l’autre côté de la rue, est l’un des joyaux du Parlement. Elle est dédiée à tous les Canadiens tués en temps de guerre et consacrée à la cause de la paix pour laquelle certains de nos concitoyens sont morts ou ont souffert. Cette tour est un symbole des principes et des hautes aspirations des Canadiens. En tolérant la prolifération des armes chimiques ou nucléaires, nous tournons en dérision ces aspirations. Les armes nucléaires sont tout simplement les armes les plus dangereuses sur la planète. Elles peuvent tuer des millions de personnes et détruire tout ce dont les humains ont besoin pour vivre.

Nous savons que l’année 2020, qui se termine bientôt, a été une année unique en son genre. Paradoxalement, elle s’est aussi caractérisée par des événements marquants, comme le 75e anniversaire de la fondation de l’ONU, la structure décisionnelle mondiale qui a engendré ces traités. Toutefois, c’est aussi le 75e anniversaire d’un événement dont on souhaite moins se souvenir, peut-être à cause de notre honte collective inconsciente. En effet, il y a 75 ans, les premières bombes atomiques ont été larguées sur les habitants d’Hiroshima et de Nagasaki, ce qui a précipité la fin officielle de la Seconde Guerre mondiale.

Ce triste anniversaire n’est pas seulement une occasion de se souvenir d’une tragédie passée, mais aussi de réfléchir à la menace omniprésente que nous n’avons pas tenté réellement de neutraliser. La vérité, c’est que les campagnes de peur, les décisions malavisées et les erreurs de chefs d’État irresponsables ou déséquilibrés peuvent tous nous mener à la destruction nucléaire. Le désarmement est le meilleur moyen de se protéger contre cette menace terrible pour l’humanité entière.

Peu importe les difficultés qui se présenteront, un massacre nucléaire ne sera jamais considéré comme héroïque ou juste. Le fait de rester les bras croisés devant la prolifération des armes nucléaires indique un manque de leadership — une attitude irresponsable par rapport à la race humaine. Ce n’est pas représentatif de ce que sont les Canadiens.

Le Canada a parfois été une force progressiste dans le dossier de la non-prolifération des armes nucléaires. Je parle en particulier des années où l’ancien premier ministre Pierre Trudeau a parcouru le monde pour négocier avec des chefs d’État, y compris au sein de l’OTAN, afin qu’ils adoptent une approche différente en ce qui concerne les armes nucléaires, une approche qui rejette la notion selon laquelle elles sont inévitables.

Nous avons été absents. Le Canada n’était littéralement pas présent là où le nouveau Traité sur l’interdiction des armes nucléaires des Nations unies a été rédigé, puisque cela a eu lieu au siège des Nations unies à l’été 2017. Certains soutiennent que nous disposons déjà du Traité international sur la non-prolifération des armes nucléaires et se demandent pourquoi le nouveau Traité sur l’interdiction des armes nucléaires est nécessaire. Remarquez la différence dans les titres. Le traité actuel parle de « non‑prolifération » alors que le nouveau traité parle d’« interdiction », ce qui représente le changement logique à opérer pour arriver à un monde sans armes nucléaires.

En terminant, chers collègues, nous savons tous que la guerre est en soi une monstruosité et que les armes chimiques et nucléaires la rendent encore plus épouvantable et destructrice. En acceptant les armes chimiques et nucléaires, on accepte l’anéantissement inéluctable de la vie sur Terre. Les armes de destruction massive, qu’elles soient chimiques ou nucléaires, sont toujours injustifiables. En s’enfermant dans le mutisme et en ne s’engageant pas, comment le Canada peut-il être à la hauteur de sa réputation internationale de défenseur des droits de la personne qui militerait pour le contrôle des armements et qui possèderait une expertise en la matière?

Honorables sénateurs, joignez-vous à moi pour appuyer le projet de loi S-2 et pour exhorter le Canada à signer et à ratifier le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. Ce projet de loi et ce traité sont intimement liés et visent la protection de l’humanité et de notre mère la Terre.

Merci, meegwetch.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Coyle, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international.)

(À 15 h 40, conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 27 octobre 2020, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)

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