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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 91

Le mardi 13 décembre 2022
L’honorable George J. Furey, Président


LE SÉNAT

Le mardi 13 décembre 2022

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, il y a eu des consultations, et il a été convenu de permettre la présence d’un photographe dans la salle du Sénat pour photographier la présentation des nouvelles sénatrices aujourd’hui.

Êtes-vous d’accord, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

[Français]

Nouvelles sénatrices

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur d’informer le Sénat que le greffier du Sénat a reçu du registraire général du Canada des certificats établissant que les personnes suivantes ont été appelées au Sénat :

Sharon Burey

Rebecca Louise Patterson

Présentation

Son Honneur le Président informe le Sénat que des sénatrices attendent à la porte pour être présentées.

Les honorables sénatrices suivantes sont présentées, puis remettent les brefs de Sa Majesté les appelant au Sénat. Les sénatrices, en présence du greffier du Sénat, prêtent le serment prescrit et prennent leur siège.

L’honorable Sharon Burey, de Windsor, en Ontario, présentée par l’honorable Marc Gold, c.p., et l’honorable Rosemary Moodie.

(1410)

L’honorable Rebecca L. Patterson, d’Ottawa, en Ontario, présentée par l’honorable Marc Gold, c.p., et l’honorable Bev Busson.

Son Honneur le Président informe le Sénat que chacune des honorables sénatrices susmentionnées a fait et signé la déclaration des qualifications exigées prescrite par la Loi constitutionnelle de 1867, en présence du greffier du Sénat, commissaire chargé de recevoir et d’attester cette déclaration.

[Traduction]

Félicitations à l’occasion de leur nomination

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, au nom de mes collègues du bureau du représentant du gouvernement, je tiens à accueillir notre nouvelle collègue à la Chambre rouge, la sénatrice Sharon Burey.

La sénatrice Burey a été pédiatre dans la région de Windsor pendant plus de 20 ans. Elle a aussi fourni des soins aux plus petits patients du Nord de l’Ontario. Sa liste de réalisations est longue. Elle a étudié à l’Université Western Ontario, où elle a obtenu un baccalauréat ès sciences en biologie, elle a obtenu son diplôme de médecine de l’Université Dalhousie et elle a effectué sa résidence en pédiatrie à l’Hôpital IWK, à Halifax. Elle a été présidente de la Pediatricians Alliance of Ontario. Elle est membre du comité des politiques de santé de l’Association médicale de l’Ontario, ou AMO, et elle a été déléguée de la pédiatrie au conseil de l’AMO ainsi que membre du comité de sensibilisation des femmes médecins de l’AMO. Elle est aussi professeure auxiliaire de pédiatrie à l’Université Western.

[Français]

Lorsque la sénatrice Burey a été nommée, le Windsor Star a publié un article déclarant fièrement qu’une Windsorienne avait été nommée au Sénat du Canada pour la première fois en 40 ans. Plus remarquable encore, elle est la première femme et la première personne de couleur de Windsor à occuper un tel poste.

Sénatrice Burey, votre ville natale est extrêmement fière de vous.

[Traduction]

L’impressionnante expérience professionnelle et personnelle de la sénatrice Burey, son travail dans le domaine des soins de santé, ses opinions sur les questions liées à la diversité et à l’inclusion et son enthousiasme à ce sujet sont les bienvenus au Sénat.

Sénatrice Burey, j’espère que vous avez hâte de passer du temps au Sénat, car nous avons certainement hâte de bénéficier de vos commentaires et de votre sagesse tandis que nous délibérons, examinons et étudions les questions qui touchent le plus les Canadiens.

Des voix : Bravo!

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, au nom de l’opposition et du caucus conservateur du Sénat, je suis heureuse de prendre la parole pour souhaiter la bienvenue à nos nouvelles collègues, l’honorable Sharon Burey et l’honorable Rebecca Louise Patterson.

Tout d’abord, je vous souhaite toutes les deux la bienvenue et je vous remercie des services que vous avez rendus au public dans le cadre de vos professions respectives.

Sénatrice Burey, en tant que pédiatre ayant plus de 30 ans d’expérience en Ontario, vous avez consacré une grande partie de votre vie professionnelle à aider et à servir les autres. Vous avez également consacré votre carrière « à l’égalité et à la justice pour les personnes vivant dans la pauvreté, les minorités visibles et d’autres communautés marginalisées ».

Selon le Windsor Star, votre nomination a été largement célébrée par les habitants de Windsor, car vous êtes la première sénatrice de Windsor depuis 40 ans. En tant que sénatrice, vous allez sans aucun doute donner une voix aux gens de Windsor et à vos concitoyens à l’extérieur de votre région et poursuivre vos activités militantes de diverses manières.

Sénatrice Patterson, je vous remercie de votre service dans les Forces armées canadiennes. Vous avez joué divers rôles de premier plan dans l’armée, dont les suivants :

[...] championne de la Défense pour les femmes et la première personne ayant une formation d’infirmière militaire à diriger au grade d’officier général.

Sénatrice Patterson, je me réjouis du fait que vous représenterez les membres des Forces armées canadiennes dans cette vénérable enceinte, et je suis sûre qu’ils s’en réjouissent eux aussi. Je crois que votre expertise et vos expériences antérieures vous rendent particulièrement bien placée pour défendre avec fougue les intérêts de nos courageux héros militaires, qui méritent les plus grands honneurs et la meilleure représentation.

Sénatrices Burey et Patterson, je suis vraiment heureuse de vous souhaiter la plus cordiale bienvenue au Sénat du Canada.

(1420)

Comme je l’ai déjà dit, les Canadiens se tournent de plus en plus vers le Sénat pour qu’il exerce un second examen objectif et qu’il fasse preuve de diligence raisonnable, mais aussi pour qu’il leur donne de l’espoir — l’espoir que leurs voix soient entendues, que leurs préoccupations deviennent les nôtres et qu’ensemble, les sénateurs tracent le meilleur chemin pour tous, et ce, dans l’ensemble de notre magnifique pays. À titre de parlementaires, nous devons nous efforcer de représenter tous les Canadiens ici, à Ottawa. Nous devons nous battre pour eux. Compte tenu de vos antécédents et de vos expériences, sénatrices Burey et Patterson, je crois que c’est exactement ce que vous êtes prédisposées à faire.

Mes collègues et moi avons hâte de travailler de concert avec vous deux. Au nom de l’opposition et du caucus conservateur, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue au Sénat du Canada.

Le sénateur Gold : Honorables sénateurs, je prends à nouveau la parole aujourd’hui au nom du bureau du représentant du gouvernement au Sénat, cette fois pour accueillir la sénatrice Rebecca Patterson parmi nous.

La sénatrice Patterson nous rejoint après une brillante carrière dans les Forces armées canadiennes. Titulaire d’un diplôme en soins infirmiers du Niagara College Canada et d’un baccalauréat en sciences infirmières — avec très grande distinction — de l’Université d’Ottawa, elle est la première avec une formation d’infirmière militaire à diriger au grade d’officier général en tant que contre-amirale. Dirigeante des Forces armées canadiennes et championne de la défense pour les femmes, elle a occupé, juste avant de se joindre à nous, le poste de directrice générale du changement de culture au titre de cheffe, Conduite professionnelle et culture, où elle a coordonné l’approche politique de l’ensemble de la Défense pour soutenir le Plan d’action national du Canada consacré aux femmes, à la paix et à la sécurité.

[Français]

Elle a également œuvré à l’international, participant à des déploiements militaires dans le golfe Persique, en Somalie et en Afghanistan.

[Traduction]

La sénatrice Patterson a été nommée sur la liste des 12 femmes de vision de Global News Edmonton, elle a reçu le Prix du premier ministre de l’Ontario pour l’excellence en sciences de la santé pour les diplômés des collèges de l’Ontario, a été reconnue pour sa capacité à éliminer les obstacles dans le magazine Esprit de Corps et a reçu le prix des anciens élèves émérites du Niagara College.

[Français]

Ce dont elle est le plus fière, c’est d’être la fondatrice et la directrice de Soldats dans la rue, un organisme bénévole qui met en relation d’anciens combattants sans abri et d’autres qui risquent de le devenir avec des fournisseurs de services qui peuvent les aider.

[Traduction]

Nous avons beaucoup de chance d’accueillir dans les rangs du Sénat une personne dont l’expérience de vie contribuera à nous éclairer sur les questions d’actualité qui sont d’une grande importance dans le cadre de nos études et de nos délibérations.

Soyez la bienvenue, sénatrice Patterson.

Des voix : Bravo!

[Français]

L’honorable Raymonde Saint-Germain : Honorables sénateurs, c’est aussi pour moi un plaisir de souhaiter la bienvenue aujourd’hui à deux nouvelles collègues : l’honorable sénatrice Sharon Burey et l’honorable sénatrice Rebecca Patterson.

[Traduction]

Honorable sénatrice Sharon Burey, aujourd’hui, au Sénat, vous ouvrez officiellement un nouveau chapitre de votre vie. Alors que ce chapitre commence, je souhaite exprimer combien tous les membres du Groupe des sénateurs indépendants sont impatients de travailler avec vous.

Chers collègues, la sénatrice Burey a fait preuve d’un leadership extraordinaire et a gagné beaucoup de respect dans le domaine de la santé des enfants. Son travail en tant que défenseure de la santé a été salué par de nombreuses mentions d’honneur. Elle a reçu le prix d’excellence de la section de l’Ontario et le prix de réalisation spéciale de l’American Academy of Pediatrics, ainsi que le prix d’excellence en soins de santé du North American Black Historical Museum and Cultural Centre. En tant que coprésidente du comité des questions médicales, elle a également été reconnue pour son service exceptionnel au Conseil pour la prévention des mauvais traitements infligés aux enfants dans le comté de Windsor-Essex. Malgré toutes ces expériences et ces récompenses, la sénatrice Burey a démontré qu’elle cherchait continuellement à se perfectionner sur le plan professionnel. Elle a récemment obtenu un programme en leadership commercial pour les médecins à l’Université York.

Sénatrice Burey, même si vous avez été nommée il y a 23 jours, vous vous êtes consacrée à l’amélioration du bien-être des Canadiens dès votre plus jeune âge, lorsque vous avez décidé de poursuivre vos études de médecine et que vous êtes devenue une pédiatre renommée, engagée et chevronnée.

À l’une des conférences de l’Association médicale de l’Ontario au sujet des répercussions de la COVID-19 sur la santé mentale, qui a eu lieu en août 2021 et que vous avez présidée, vous avez déclaré que les enfants et les adolescents représentent environ 20 % de la population, mais 100 % de notre avenir. Alors que nous devons relever le défi de laisser aux générations futures un monde où la vie vaut la peine d’être vécue, vos états de service me donnent bon espoir que nous pourrons faire un bien meilleur travail grâce à la contribution et au leadership de collègues comme vous.

Chers collègues, nous avons le privilège d’avoir parmi nous la première femme de couleur élue au poste de présidente de la Pediatricians Alliance of Ontario. Sénatrice Burey, ce n’est un secret pour personne que vous savez comment briser le plafond en verre. Aujourd’hui, nous sommes heureux de compter parmi nous une autre sénatrice qui inspirera les générations à venir à rêver grand.

Nous vous souhaitons beaucoup de succès.

Des voix : Bravo!

[Français]

La sénatrice Saint-Germain : Respect : c’est ce que m’inspire la carrière de notre nouvelle collègue la sénatrice Rebecca Patterson. Sa carrière a culminé lors de son ascension à la haute fonction de contre-amirale des Forces armées canadiennes — une fonction qui, vous en conviendrez, repose sur l’excellence.

[Traduction]

Votre carrière militaire, sénatrice Patterson, est tout simplement remarquable. Je ne vais pas énumérer la longue liste de postes importants que vous avez occupés dans les forces armées, mais je note que vous avez consacré votre vie à servir et à protéger autrui, et nous vous en sommes très reconnaissants.

Infirmière praticienne de formation, vous avez gravi les échelons au sein des forces armées grâce à votre talent, à votre travail assidu et à votre leadership naturel. Vous avez été envoyée dans des zones clés à des moments cruciaux pour le Canada. En 1991, vous avez servi dans un hôpital de campagne canadien en Arabie saoudite pendant le conflit du golfe Persique. Vous avez aussi appuyé les efforts du Régiment aéroporté du Canada en Somalie, en 1993. Plus récemment, vous avez aidé l’armée nationale afghane et la police nationale afghane à remettre sur pied leur système d’enseignement et de formation médical. Voilà une impressionnante liste de réalisations, c’est le moins qu’on puisse dire.

Pour vos états de service exceptionnels, vous avez été intronisée officier de l’Ordre du mérite militaire et reçu la Médaille du service méritoire du gouverneur général, parmi bien d’autres. Votre solide expérience militaire garantit une valeur ajoutée ainsi qu’un point de vue unique sur le travail que nous faisons au Sénat. Cela sera fort utile lorsque nous nous attaquerons aux problèmes de l’heure et que nous élaborerons des politiques publiques.

Juste avant votre nomination, vous occupiez le poste de directrice générale du changement de culture au titre de cheffe, Conduite professionnelle et culture. Dans le cadre de ces fonctions, vous avez dirigé et soutenu les efforts visant à transformer la culture des Forces armées canadiennes afin de réaliser des progrès pour créer un environnement de travail exempt de harcèlement sexuel et d’autres comportements néfastes surtout envers les femmes et les personnes vulnérables. Les Forces armées canadiennes vous ont fait confiance — avec raison — pour exercer ce rôle crucial pour leur crédibilité. Je me réjouis qu’à partir de maintenant, une personne digne de confiance comme vous soit associée au Sénat du Canada dans l’esprit des Canadiens.

Comme vous le savez peut-être, le Sénat du Canada déploie lui aussi des efforts pour instaurer une culture d’excellence. Nous savons que vous nous aiderez à demeurer sur la bonne voie. Sénatrice Patterson, en mon nom et au nom de chaque membre du Groupe des sénateurs indépendants, je vous félicite pour votre mérite et je vous souhaite beaucoup de succès durant votre mandat au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

L’honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, au nom du Groupe progressiste du Sénat, je suis enchantée de joindre ma voix à celles des autres leaders dans des circonstances très positives et qui semblent être un phénomène courant. Aujourd’hui, nous accueillons deux autres collègues qui prennent place dans cette enceinte. J’aimerais leur exprimer les mêmes vœux de chaleureuse bienvenue que j’ai offerts aux sénateurs qui ont été nommés précédemment.

(1430)

Avec votre arrivée, sénatrice Burey, le Sénat gagne une personne qui défend l’égalité et la justice en mettant particulièrement l’accent sur les communautés marginalisées. J’ose penser que cette transition se fera en douceur, même si vous serez entourée par moins d’enfants ici, au Sénat.

Comme on l’a souligné, vous avez été la première femme de couleur à occuper le poste de présidente de la Pediatricians Alliance of Ontario. C’est la première fois en plus de 40 ans que le Sénat compte un sénateur représentant votre ville, Windsor, et vous êtes la première femme — et la première personne de couleur — à le faire. Comme on le sait, le fait de se reconnaître dans les personnes qui occupent certains postes peut faire une réelle différence. Je sais que ce sera positif pour beaucoup de gens — particulièrement des enfants — de vous voir prendre votre place ici, au Sénat.

Comme je viens de la Nouvelle-Écosse, j’ai découvert avec plaisir que vous êtes diplômée de l’Université Dalhousie et que vous avez travaillé au IWK Health Centre.

Sénatrice Patterson, avec votre arrivée, nous gagnons une championne des droits des femmes — une championne des droits des femmes à la Défense, pour être plus précise. Comme nous l’avons entendu, vous avez été la première personne ayant une formation d’infirmière militaire à avoir occupé des postes de direction en ayant un grade d’officier général. Vous avez occupé plus d’un poste, mais vous avez toujours été toujours au service des autres. L’une de vos plus récentes contributions — venir en aide aux personnes âgées dans les établissements de soins de longue durée pendant la pandémie — est particulièrement louable.

Devant un comité de l’autre endroit, vous avez déclaré : « Si nous réussissons à établir une culture fondée sur le sentiment d’appartenance, la dignité et la justice, nous en ressortirons tous plus unis. » Vous parliez, bien sûr, des Forces armées canadiennes et du travail que vous y avez accompli, mais je pense que c’est une déclaration pertinente pour de nombreuses institutions, y compris cette Chambre. Nous travaillons mieux lorsque nous travaillons dans de bonnes conditions, et je suis heureuse d’accueillir de nouveaux visages pour nous aider dans cette tâche ici, au Sénat.

En passant, mon beau-frère, Dennis Hearn, qui a travaillé avec vous dans les forces armées, a dit que j’allais adorer travailler avec vous parce que nos personnalités se ressemblent. Si vous me voyez vous dévisager ou vous écouter intensément, c’est parce que je cherche à cerner votre personnalité.

Mesdames les sénatrices, dans vos carrières respectives vous avez fait face à des défis immenses et vous vous y êtes attaquées de manière admirable. Je suis persuadée que vous vous montrerez de nouveau à la hauteur de la situation en abordant ce nouveau chapitre de vos vies.

Au nom du Groupe progressiste du Sénat, je suis ravie de vous souhaiter officiellement la bienvenue au Sénat du Canada. Nous avons hâte de travailler avec vous deux, sénatrice Burey et sénatrice Patterson.

L’honorable Scott Tannas : Nous accueillons aujourd’hui dans cette enceinte deux nouvelles sénatrices : la sénatrice Burey et la sénatrice Patterson.

La sénatrice Burey a un parcours inspirant. En effet, cette pédiatre et professeure est une véritable cheffe de file en matière de santé et de bien-être des enfants. Elle se porte par ailleurs à la défense des personnes vivant dans la pauvreté et des communautés marginalisées. Nous pourrons assurément tirer profit de son point de vue unique lorsqu’elle prendra part à nos délibérations, que ce soit dans cette enceinte ou aux comités.

Sénatrice, l’un de vos prédécesseurs de Windsor, Paul Martin père, est bien connu comme étant l’un des principaux architectes du système de santé canadien. Sans vouloir mettre la pression sur vous, je dirais qu’en tant que professionnelle de la santé, vos recommandations pour améliorer notre système de santé viendront à point nommé.

J’ai entendu l’histoire particulièrement touchante d’une diplômée de la Faculté de médecine de l’Université Dalhousie. Lorsqu’elle avait 6 ans, sa mère l’a amenée à votre cabinet, et elle a alors vu une médecin qui lui ressemblait, c’est-à-dire une femme d’ascendance africaine. Elle dit que c’est à ce moment-là qu’elle a su qu’elle voulait devenir médecin. Elle a dit : « Quand je vous ai vue ce jour-là, cela m’a fait voir des possibilités qui s’offraient à moi et que je n’avais pas imaginées auparavant. »

Maintenant, en tant que sénatrice, vous pourrez continuer d’inspirer des jeunes et de leur faire voir des possibilités qu’ils n’avaient pas crues envisageables.

Nous accueillons aussi la sénatrice Patterson, de l’Ontario. Voici le sénateur Patterson, du Nunavut. Vos noms seront toujours suivis de ces précisions entre parenthèses.

La contre-amirale Patterson compte parmi les officiers généraux chevronnés et hautement décorés des Forces armées canadiennes et elle est la 222e personne ayant une expérience militaire qui est appelée au Sénat. Nous vous souhaitons maintenant la bienvenue dans nos rangs.

Infirmière autorisée de formation, elle a occupé de nombreux postes de direction, où elle a fait la promotion de la santé mentale et soutenu des militaires ayant des préjudices psychologiques. Elle est la directrice fondatrice de Soldats dans la rue, une organisation qui aide les anciens combattants sans abri.

Sénatrice Patterson, pour ce qui est de votre bilan parlementaire, vous avez déjà témoigné devant des comités parlementaires, et je suppose que votre nouveau rôle deviendra très vite une seconde nature pour vous. J’espère que vous prendrez plus de plaisir à poser les questions qu’à y répondre.

Sénatrices Burey et Patterson, au nom du Groupe des sénateurs canadiens, je vous souhaite la bienvenue au Sénat. Nous avons hâte de travailler avec vous.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune des enfants de la sénatrice Burey, John Burey, Tecla Burey Vernon et Marie-Louise Burey, ainsi que de son frère, Omar C.C. Burey. Ils sont accompagnés d’autres membres de sa famille et d’amis.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de l’époux de la sénatrice R. Patterson, le lieutenant-colonel Shane Patterson; de ses enfants, Olivia Patterson et le caporal William Patterson; de sa sœur, Rosemary MacDonald; du chef d’état-major de la Défense, le général Wayne Eyre. Ils sont accompagnés de membres de la famille et d’amis.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Stephanie MacInnis-Langley

Félicitations à l’occasion de sa retraite

L’honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au nom de notre collègue, la sénatrice Wanda Thomas Bernard.

J’interviens pour rendre hommage à l’ancienne directrice générale du Conseil consultatif sur la condition féminine de la Nouvelle-Écosse, Stephanie MacInnis-Langley. Elle est surtout reconnue pour son ardeur à défendre les femmes dans le milieu des organismes qui luttent contre la violence fondée sur le sexe et le secteur sans but lucratif. Son engagement inébranlable envers la justice sociale, les droits des femmes et la présence des femmes en politique a contribué à l’application de changements systémiques en Nouvelle-Écosse.

J’ai rencontré Stephanie au début des années 1990, alors que j’animais un atelier sur la déconstruction du privilège blanc. À l’époque, elle avait une longueur d’avance pour ce qui était de l’adoption d’une perspective intersectionnelle. Le travail de sensibilisation réalisé par Stephanie est complexe et multidimensionnel.

En plus de promouvoir la justice pour les femmes victimes de violence, elle a favorisé le changement dans la sphère politique. Elle était consciente des difficultés propres aux femmes se portant candidates à une charge publique et des avantages pour la société d’une présence accrue de femmes dans ce milieu. Sa vision du changement a mené à la création de la Campaign School for Women, et à l’accent qui y est mis sur la diversité. Cette formation a aidé beaucoup de femmes à se lancer en politique, que ce soit au niveau municipal, provincial ou fédéral, et certaines de ces femmes ont réussi à se faire élire.

(1440)

Le succès de la Campaign School for Women a inspiré le bureau des Affaires afro-néo-écossaises, qui s’est servi de ce modèle pour mettre sur pied une école de campagne pour les Néo-Écossais d’origine africaine. J’attribue le succès du programme au travail axé sur un principe fondamental : nommer les barrières et éliminer les barrières.

Stephanie a tant fait pour protéger les femmes et défendre leur intérêt. Ce dont bien des gens ne sont pas conscients en ce qui concerne la défense des droits des femmes, c’est que l’effet positif se fait ressentir dans toute la société. Ce qui est bon pour les femmes et bon pour tout le monde.

Stephanie, j’ai toujours admiré votre volonté d’aller à contre‑courant et d’être le fer de lance du changement que vous souhaitez voir en Nouvelle-Écosse. Profitez de votre retraite bien méritée, quoique je soupçonne que cette retraite n’est que la fin d’un chapitre et le début du prochain.

Honorables sénateurs, veuillez vous joindre à moi pour saluer et remercier Stephanie MacInnis—Langley. Merci.

Des voix : Bravo!

Les chiens de Terre-Neuve et les labradors

L’honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, comme je le disais, une femme très brillante m’a déjà dit que nous sommes le produit de notre environnement. Je crois sincèrement que cela vaut aussi pour les chiens de Terre-Neuve et les labradors. Comme ils viennent de Terre-Neuve, ils ont appris très tôt à sauter à l’eau et à nager sans avoir peur des défis que la journée pourrait leur réserver. Ils sont reconnus partout sur la planète pour leur loyauté, leur gentillesse et leur désir d’aider les autres chaque fois que ceux-ci ont besoin d’aide. Ce sont d’excellents ambassadeurs de notre province.

Merci.

Tibb’s Eve

L’honorable Fabian Manning : C’est le moment du chapitre 70 de « Notre histoire ».

De nombreuses traditions de Noël sont uniques à Terre-Neuve-et-Labrador, comme le « mummering » et le fait de laisser au père Noël un verre de sirop Purity plutôt qu’un verre de lait. Une autre de ces traditions est Tibb’s Eve.

Si le terme comme tel est plutôt ancien, selon Phil Hiscock, du département de folklore de l’Université Memorial, la célébration de Tibb’s Eve un jour précis de l’année — l’avant-veille de Noël — est propre à Terre-Neuve-et-Labrador. M. Hiscock explique que, aux environs de la Seconde Guerre mondiale, les gens de la côte sud de Terre-Neuve ont commencé à associer l’expression « Tibb’s Eve » au 23 décembre, première journée où il serait acceptable de prendre quelques verres à l’occasion de Noël. Dans bien des villages isolés de la province, cette journée est devenue l’occasion pour les hommes de se rendre visite pour lever leur verre.

Comme la veille de Noël fait partie de l’avent et qu’on respectait cette période presque autant que celle du carême, M. Hiscock souligne que, avant la Seconde Guerre mondiale, la plupart des chrétiens traditionnels n’auraient jamais osé prendre une gorgée d’alcool avant le jour de Noël. Tibb’s Eve est devenue une occasion joviale de prolonger les Fêtes, un peu à la façon des travailleurs du XIXe siècle qui prolongeaient leur fin de semaine en étant absents du travail le lundi saint.

Tibb’s Eve, ou la veille de Tibb, porte différents noms, selon l’endroit d’où l’on vient. Certains l’appellent Tipp’s Eve ou Tipsy’s Eve. Comme M. Hiscock l’a déclaré, « pour quelqu’un qui pense que c’est un jour pour être pompette, alors le nom de Tipsy Eve est tout indiqué ».

Il a déclaré :

[...] tout cela est le fruit de l’humour dont les gens font preuve depuis des siècles. Il n’y a donc aucune raison de ne pas lui trouver des adaptations humoristiques aujourd’hui.

Il y a plusieurs siècles, en Angleterre, « tib » était un terme argotique employé pour désigner une femme aux mœurs légères. Les historiens pensent que c’est peut-être la raison pour laquelle il n’existe pas de « jour de la Saint-Tibb », comme il existe le jour de la Saint-Patrick ou de la Sainte-Brigitte. Dans les années 1600, de nombreuses pièces de théâtre anglaises mettaient en scène des rôles portant le nom de « Tibb ».

À Terre-Neuve, à Tibb’s Eve, on consomme une boisson très populaire appelée « slush ». Il s’agit d’un mélange de vodka, de sirop Purity, de club soda ou de vin mousseux accompagné d’un soupçon de jus de lime fraîchement pressée, servi dans un grand verre de glace pilée. Les ingrédients varient d’un endroit à l’autre dans la province, mais servir de la slush est toujours une excellente façon de souligner le début de la période des Fêtes.

Cela explique pourquoi Tibb’s Eve a été associée au 23 décembre le long de la côte sud de Terre-Neuve, mais l’expression elle-même détient la clé de son lien avec Noël. M. Hiscock a aussi dit que « Tibb’s Eve » est devenue une façon vieillie de dire « jamais », signifiant un jour qui n’existe pas. Après tout, il n’existait pas. Tibb’s Eve est un moment hors du temps, à l’instar de plusieurs autres expressions saugrenues comme « quand les poules auront des dents » ou « la semaine des quatre jeudis », pour n’en nommer que quelques-unes.

Ainsi, chers collègues, pendant la période des Fêtes, lorsqu’on me demande « Viendra-t-il un jour où vous quitterez Terre-Neuve pour vous installer ailleurs? », je répondrai toujours : « À Tibb’s Eve. »

Joyeux Noël.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de la conjointe du sénateur Cotter, la professeure Elaine Gibson, ainsi que de Klara Doelle, Diane Pinet et Sudhir Nagpal.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Le décès de Meinhard Doelle

L’honorable Brent Cotter : Honorables sénateurs, pendant les années 1980, j’ai été président du comité d’admission de la Faculté de droit de l’Université Dalhousie. Il y avait une forte concurrence pour être admis. On comptait 10 candidats pour chaque place. Or, Kim Pate, telle qu’elle était alors, y a été admise. George Furey, tel qu’il était alors, a également été admis.

Nous commettons tous des erreurs, et j’en assume l’entière responsabilité.

Cependant, l’admission d’un jeune Canadien de première génération, Meinhard Doelle, n’a certainement pas été une erreur. Il était originaire de Dortmund, en Allemagne, et il a fait son entrée à la Faculté de droit en 1986. Il y a obtenu un diplôme en droit, puis une maîtrise et un doctorat en droit. Il est devenu un membre influent de la Faculté de droit de l’Université Dalhousie.

Le professeur Doelle est décédé tragiquement lors d’une collision qui est survenue en septembre dernier entre une voiture et une bicyclette dans une région rurale de la Nouvelle-Écosse. Il avait 58 ans.

Le professeur Doelle était spécialisé dans le droit de l’environnement. Il était un professeur apprécié, un juriste exceptionnel et un conseiller très sollicité par les pouvoirs municipaux, provinciaux et nationaux, notamment dans le cadre du projet de Muskrat Falls. Il agissait à titre de conseiller auprès d’organisations internationales et de mentor auprès de collègues du monde entier. Il donnait des conseils réfléchis, posés, équilibrés et judicieux à tous ceux qui sollicitaient son avis, et ils étaient nombreux à le faire. Dans sa collectivité, les hommages de politiciens, actuels et anciens, de toutes les allégeances politiques, ainsi que d’amis et de collègues du monde entier ont afflué.

Cependant, le plus important au sujet de Meinhard, c’est sans doute qu’il était un être formidable, un mari aimant pour son épouse Wendy Jardine, et un merveilleux père pour ses trois filles, Klara, Alida et Nikola.

La famille Doelle entretient également un lien spécial avec le Sénat du Canada puisque Alida, une des filles de Meinhard, a travaillé pour l’ancien sénateur Day et travaille actuellement pour le sénateur Dalphond. Elle est également une bonne amie de Chasse Helbin et de Luis Medina.

Voici le message qu’Alida m’a fait parvenir au sujet de son père :

Une des choses que ses collègues ne savent peut-être pas, c’est qu’il était un père formidable. Il était toujours là pour nous soutenir. Il faisait en sorte que mes sœurs et moi nous sentions spéciales [...] C’était vraiment mon meilleur ami.

Meinhard était également merveilleux dans sa façon de mettre ses valeurs en pratique. Comme il était déterminé à améliorer le monde, il se déplaçait presque partout en bicyclette, prenait surtout des douches froides, réfléchissait dans le noir — certains d’entre vous pensent peut-être que c’est ce que je fais moi aussi — et il aimait le calme de la campagne néo-écossaise.

Chaque fois que je suis allé à la Faculté de droit au cours des 20 dernières années, sa porte était toujours ouverte. Peu importe ce que j’interrompais, il me donnait le sentiment de pouvoir m’accorder tout le temps du monde.

La famille de Meinhard, le milieu du droit environnemental, l’Université Dalhousie et le monde déplorent ce décès tragique et prématuré. Personnellement, j’aurai la nostalgie de fort agréables conversations avec un merveilleux être humain.

Merci.

La Conférence des Parties

L’honorable Mary Coyle : Honorables sénateurs, « l’audace a toujours sa place dans l’âme des Canadiens ». Ce sont les mots du 18e premier ministre du Canada, Brian Mulroney, dans son discours d’acceptation du prix de 2019 pour le leadership environnemental remis par l’organisme Pollution Probe.

Cet éminent diplômé de l’Université St. Francis Xavier, à Antigonish, a également cité les mots gravés dans la tour de la Paix, tirés du Livre des Proverbes : « Un peuple sans idéal est voué à mourir [...] »

En 1992, au Sommet de la Terre de Rio de Janeiro, sous la direction du premier ministre Mulroney, le Canada, notre pays, a fait preuve d’audace et de vision en devenant le premier pays industrialisé à signer la Convention des Nations unies sur la diversité biologique et en incitant les États-Unis à appuyer la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.

Chers collègues, alors que le Canada accueille près de 200 pays à la COP 15 sur la biodiversité à Montréal, ce qui a été décrit comme l’un des événements les plus importants pour la vie sur Terre, il est temps, à nouveau — 30 ans plus tard —, que le Canada fasse preuve d’audace et de vision en déclarant ses engagements et en collaborant avec ses partenaires internationaux afin de les inciter à faire preuve d’ambition dans l’élaboration d’un plan visant à mettre un terme au déclin des écosystèmes, de la faune et de la flore sauvages et du rôle vital qu’ils jouent afin de favoriser l’adoption de solutions fondées sur la nature pour lutter contre les changements climatiques.

Chers collègues, le Canada abrite environ 80 000 espèces, et les données indiquent que 20 % d’entre elles seraient, à différents degrés, menacées. À l’échelle mondiale, plus de 1 million d’espèces sont menacées d’extinction. En outre, la majeure partie du PIB mondial dépend de la nature.

(1450)

Chers collègues, vous entendrez d’importants appels à atteindre 30 % d’ici 2030 — préserver au moins 30 % des terres et des océans de la planète d’ici 2030 —, à respecter le leadership autochtone en matière de conservation, les droits et le savoir des Autochtones, à protéger les espèces en péril et à restaurer les écosystèmes endommagés, à faire une gestion durable des industries fondées sur l’exploitation des ressources, à mieux tenir compte de la biodiversité dans la prise de décisions, à mettre en place de meilleurs mécanismes de responsabilisation et, évidemment, à affecter les ressources requises.

Honorables collègues, je vous invite tous à porter attention aux événements qui se déroulent à Montréal et à écouter ce que M. Mulroney a dit dans la conclusion du discours dont j’ai parlé plus tôt :

Aussi difficile que puisse être le processus [...] on ne peut pas refiler ce travail à ceux qui viendront plus tard. Les enjeux sont trop importants et les risques pour notre planète et l’espèce humaine, trop graves. Nous sommes tous du même côté; nous voulons tous laisser un monde meilleur et un environnement plus sain aux générations futures.

Wela’lioq. Merci.

[Français]

Le Jour du souvenir acadien

L’honorable René Cormier : Honorables sénateurs, la présence de ma nièce Diane Pinet et de son époux Sudhir Nagpal dans cette enceinte aujourd’hui, grâce au sénateur Cotter — merci, sénateur Cotter —, revêt un caractère symbolique très important pour moi, pour ma famille et pour tant de mes compatriotes acadiens.

Le grand-père de Diane, Médard Léger, et mon père, Livin Cormier, étaient de fervents militants acadiens et saisissaient toutes les occasions de rappeler à notre mémoire la tragédie de la Déportation et son impact toujours présent dans nos vies.

Survenu au XVIIIe siècle, le Grand Dérangement est un épisode exceptionnellement tragique de notre histoire collective qui est toujours ancré dans nos cœurs et nos esprits. Plus de 10 000 Acadiennes et Acadiens ont été déportés durant le Grand Dérangement, entre 1755 et 1763.

Nous commémorons aujourd’hui, en ce Jour du souvenir acadien, les innombrables victimes du Grand Dérangement et particulièrement celles qui ont péri à bord du Violet, du Ruby et du Duke William en décembre 1758. Arrachés de leurs terres contre leur gré et entassés à bord de navires britanniques, plus de 750 femmes, hommes et enfants sont morts noyés ou de maladies dans les eaux glaciales de l’océan Atlantique ces jours-là.

Ces événements sombres restent vivants dans notre mémoire collective, mais sont aussi une occasion de se projeter avec détermination vers l’avenir, car le peuple acadien ne vit pas dans le passé, mais bien dans la modernité. Il est toujours vivant par l’entremise de sa culture, de sa langue française, de ses institutions fortes et de ses citoyennes et citoyens engagés.

Or, chers collègues, qu’en est-il de la reconnaissance politique du peuple acadien sur la scène fédérale? Ce peuple qui a débarqué sur les côtes atlantiques il y a plus de quatre siècles ne trouve aucun ancrage explicite dans nos textes constitutionnels et législatifs hormis une reconnaissance du 15 août comme Fête nationale de l’Acadie, du 28 juillet comme Journée de commémoration du Grand Dérangement et de ce jour tragique du 13 décembre. Étonnamment, le peuple acadien possède moins de leviers de pouvoir que des municipalités comme ma ville natale de Caraquet.

Chers collègues, alors que la population acadienne du Nouveau‑Brunswick vit actuellement des défis majeurs quant à la modernisation de la Loi sur les langues officielles de cette province en raison de décisions politiques, alors qu’ici, à Ottawa, la modernisation de la Loi sur les langues officielles se fait attendre depuis trop longtemps, n’est-il pas temps que ce peuple francophone canadien soit enfin pleinement reconnu dans nos institutions démocratiques et qu’il soit doté d’instruments législatifs et politiques lui permettant de s’épanouir décemment?

La question reste entière et mérite que nous y travaillions. C’est ce que je m’engage à faire dans cette Chambre, avec votre appui, chers collègues, en ce 13e jour de décembre 2022.

Je profite de cette prise de parole pour vous souhaiter à tous et à toutes une période des Fêtes réjouissante et reposante. Je nous encourage à poursuivre notre travail pour améliorer le sort des plus démunis de notre pays et je nous invite à être de plus en plus solidaires afin d’assurer aux prochaines générations un avenir en santé et en sécurité, sur une planète saine et toujours habitable.

Je vous remercie.

Le décès de l’honorable Jim Carr, c.p., O.M.

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, c’est avec émotion que je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage à l’honorable Jim Carr, député de Winnipeg-Centre-Sud, qui est décédé chez lui hier. Selon une déclaration publiée par son bureau, il était entouré de sa famille et de ses proches.

Jim Carr a commencé sa carrière comme musicien. Il a été hautboïste et administrateur de l’Orchestre symphonique de Winnipeg. Il a ensuite travaillé dans le domaine du journalisme comme éditorialiste et chroniqueur pour le Winnipeg Free Press et pour CBC Radio.

[Traduction]

Il faisait partie d’une fière lignée de chefs de file juifs de Winnipeg qui remonte à ses grands-parents, qui ont immigré de l’Ukraine au début des années 1900. Il était membre fondateur de l’organisme Arab-Jewish Dialogue, dont le siège est situé à Winnipeg.

Jim Carr s’est lancé en politique en 1988 et a alors été élu pour représenter Fort Rouge à l’Assemblée législative du Manitoba. Il a été élu pour la première fois au fédéral en 2015, puis de nouveau en 2019 et en 2021. Il a occupé les fonctions de ministre des Ressources naturelles, ministre de la Diversification du commerce international et représentant spécial du gouvernement pour les Prairies.

À sa dernière présence à Ottawa — à l’autre endroit —, le 7 décembre, son projet de loi d’initiative parlementaire, le projet de loi C-235, Loi sur le développement d’une économie verte dans les Prairies, a franchi l’étape de la troisième lecture. Il a alors eu droit à une ovation de la part de ses collègues, même de la part de ceux qui s’étaient exprimés contre le projet de loi.

Dans une entrevue que M. Carr a accordée le même jour en lien avec son projet de loi, il a déclaré :

Je suis un gars des Prairies. J’adore les Prairies [...] Comme je l’ai expliqué à mes collègues du Bloc québécois, nous avons le même sentiment d’identité et d’appartenance à un lieu géographique et à un groupe démographique.

En parlant de son dernier discours, qui a précédé la mise aux voix du projet de loi C-235 à l’étape de la troisième lecture, M. Carr a dit :

Je suis reconnaissant d’avoir la chance de continuer de contribuer à mon pays. Comme je l’ai dit dans mon discours hier : « J’aime ce pays, chacune de ses parcelles, en anglais, en français, en langues autochtones — j’aimerais parler davantage de ces langues [...] »

Jim Carr a bien servi son pays — chacune de ses parcelles — par sa passion et par son amour.

[Français]

Pour ma part, ce que je retiens de Jim Carr, depuis que je le connais — et cela remonte à plusieurs années —, est sa chaleur humaine, son intelligence, sa perspicacité et son désir profond de faire une différence dans sa communauté, sa ville, sa province et son pays. Le sourire avec lequel il m’accueillait toujours faisait le mien.

[Traduction]

Je présente mes condoléances à son épouse, Colleen, à sa famille, à ses amis et à ses collègues en ces jours funestes.

[Français]

Repose en paix, cher Jim.

[Traduction]

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, nous avons tous été très attristés d’apprendre hier le décès de l’honorable James Carr, député de Winnipeg-Centre-Sud.

Les sénateurs se joignent à moi pour exprimer leurs condoléances à sa famille, ses amis et ses collègues. Je vous demande maintenant de vous lever et d’observer avec moi une minute de silence pour notre collègue parlementaire décédé.

(Les honorables sénateurs observent une minute de silence.)


AFFAIRES COURANTES

L’ombudsman des contribuables

Dépôt du rapport annuel de 2021-2022

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le Rapport annuel de 2021-2022 de l’ombudsman des contribuables, intitulé Le service compte : Laissez parler les chiffres.

La défense nationale

Dépôt du Rapport au Parlement sur les changements culturels en réponse aux recommandations de l’ancienne juge de la Cour suprême Arbour

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le Rapport de la ministre de la Défense nationale au Parlement sur les changements culturels en réponse aux recommandations de l’ancienne juge de la Cour suprême Arbour.

(1500)

La Loi sur les juges

Projet de loi modificatif—Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu’il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-9, Loi modifiant la Loi sur les juges, accompagné d’un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons‑nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Gold, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la séance d’après-demain.)

Peuples autochtones

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier les effets de la fraude d’identité sur la marginalisation accrue des peuples autochtones

L’honorable Mary Jane McCallum : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones soit autorisé à étudier, afin d’en faire rapport, la fausse représentation de l’ascendance autochtone, les normes d’auto-identification inadéquates et les effets profonds que cette fraude d’identité a sur la marginalisation accrue des peuples autochtones, en particulier les femmes autochtones;

Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 31 décembre 2023.


PÉRIODE DES QUESTIONS

L’immigration, les réfugiés et la citoyenneté

Les retards dans le traitement des demandes

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Sénateur Gold, au cours des derniers mois, mes collègues conservateurs et moi vous avons interrogé à maintes reprises sur les graves problèmes qui persistent à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.

Chers collègues, juste au moment où on croit que la situation ne peut pas empirer, les libéraux nous détrompent. En effet, encore une fois, les libéraux sont tombés bien bas.

Chaque jour, des gens voient leur vie perturbée à cause de l’incertitude provoquée par les problèmes incessants au sein d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.

Hier, sénateur Gold, nous avons appris, grâce à CBC/Radio‑Canada, que le ministère de l’Immigration a confié des demandes à des agents d’immigration inactifs, dont les codes ne fonctionnaient plus dans ses systèmes. On ne parle pas de quelques dizaines de dossiers, mais de 59 456 dossiers en suspens qui ont été confiés à 779 anciens employés ou ordinateurs inactifs. C’est du jamais vu, sénateur Gold.

Les Canadiens ont besoin de plus que des paroles rassurantes de la part du gouvernement. Ils ont besoin de leadership. Ils en ont besoin maintenant, et plus que jamais. C’est devenu une question de confiance, sénateur Gold.

Le gouvernement est-il conscient de l’ampleur de la tâche qu’il doit accomplir?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : La réponse à votre question est oui, mais permettez-moi d’élaborer. Le gouvernement est déterminé à assurer un traitement efficient et efficace des demandes pour soutenir l’intégration des nouveaux arrivants au Canada.

On m’a informé que les demandeurs peuvent avoir l’assurance que les 60 000 demandes qui étaient en attente sont actuellement en cours de traitement. Je comprends que les codes, sur lesquels portait votre question, servent à différencier les diverses étapes des demandes et de leur examen. Ces codes servent à la gestion de l’inventaire, et les demandeurs peuvent toujours s’attendre à ce qu’on communique avec eux lorsqu’une décision aura été prise.

Le sénateur Plett : Comme je l’ai dit, des demandes sont affectées à des ordinateurs dormants correspondant à des employés qui n’ont pas travaillé pour Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada depuis des années.

Votre gouvernement ne fournit pas certains services gouvernementaux de base. Certains dossiers passent entre les mailles du filet. À l’heure actuelle, 60 000 personnes et leur famille sont dans l’incertitude à cause de ce cafouillage. Les arriérés se sont aggravés plutôt que de se résorber, à tel point que les gens doivent obtenir une ordonnance judiciaire pour que le ministère de l’Immigration traite leur demande.

Hier, le ministre Sean Fraser a déclaré que ce qui a été rapporté — écoutez bien ceci — s’inscrit dans le processus ordinaire et la stratégie de triage des demandes. C’est renversant!

Si l’on en croit ces commentaires, la situation serait normale et acceptable. Est-ce votre point de vue, sénateur Gold? Ce qui se passe est-il normal et acceptable?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de la question. Il est très regrettable que des retards compromettent le système et que les demandeurs qui souhaitent venir au Canada pour participer à la vie du pays et l’enrichir ne puissent pas le faire. Tout délai est inacceptable et regrettable.

Cependant, comme l’a dit le ministre et comme je l’ai dit dans la réponse que je vous ai donnée, sénateur Plett, on gère ces demandes en fonction de l’état d’avancement du processus de traitement. Les demandeurs seront avisés lorsque des décisions seront prises.

[Français]

La justice

La traite de personnes—Les peines consécutives

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Sénateur Gold, à Montréal, le week-end dernier, un proxénète condamné par le passé pour avoir exploité sexuellement une jeune femme de 18 ans de 2007 à 2014 a été de nouveau arrêté pour les mêmes crimes commis sur deux victimes, d’octobre à décembre.

Son dossier montre qu’il a été coupable d’une grande violence envers ses victimes, ce qui leur a causé des lésions corporelles importantes. Le projet de loi C-452, qui a reçu la sanction royale le 18 juin 2015, avait pour but de combattre la traite de personnes et prévoyait d’importantes sentences consécutives pour un accusé reconnu coupable simultanément de traite de personnes et d’exploitation sexuelle. Cette mesure du projet de loi C-452 a été refusée par votre gouvernement, ce qui conduit régulièrement à des affaires comme celle que je viens de vous mentionner, où des proxénètes font vivre un enfer à leurs victimes et s’en sortent souvent avec des peines mineures.

Sénateur Gold, pourquoi cette mesure, qui aurait dû passer par décret après l’adoption du projet de loi C-75, n’est-elle toujours pas en vigueur au Canada?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question. Il faudra que je fasse des recherches auprès du gouvernement pour répondre à votre question précise. Je reviendrai avec une réponse.

Le sénateur Boisvenu : Je vous rappelle que si les peines consécutives avaient été mises en place en 2015, lorsque le projet de loi C-452 a été adopté à l’étape de la troisième lecture par le Parlement, cela aurait évité des affaires judiciaires comme celle-ci. Le gouvernement libéral a délibérément refusé de mettre en vigueur cette loi, car il considérait la peine consécutive comme « cruelle et inusitée ».

Qu’est-ce qui est disproportionné, cruel et inusité : l’enfer que ces proxénètes font vivre à leurs victimes ou l’obligation d’imposer des sentences consécutives à ces criminels?

Le sénateur Gold : Merci de votre question. Je ne veux pas minimiser le dommage fait aux victimes. L’opposition de ces deux choix ne constitue pas nécessairement la seule réponse à votre importante question. La question de la proportionnalité, je dirais même de la constitutionnalité des sentences consécutives est un enjeu important dans notre société, mais aussi dans notre système juridique.

(1510)

Le gouvernement est d’avis qu’il est important que toutes les sentences soient proportionnelles et constitutionnelles au moment où les juges se prononcent à ce sujet. Le gouvernement continuera de travailler à faire en sorte que notre système de justice soit juste et respecte aussi la Constitution.

[Traduction]

La crise en Afghanistan

L’honorable Ratna Omidvar : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat, le sénateur Gold.

Sénateur Gold, permettez-moi de commencer par les bonnes nouvelles avant de passer à ma question. Hier, le Globe and Mail nous a appris que le ministre Sajjan et le gouvernement présenteront des modifications au Code criminel afin que les organismes d’aide internationale présents en Afghanistan ne fassent pas l’objet d’accusations criminelles aux termes de ce texte de loi. Cependant, même si je suis soulagée que le gouvernement soit à l’écoute de toutes les personnes qui ont soulevé ce problème, je m’inquiète du fait qu’il faudra probablement quelques mois, à tout le moins, avant que cette modification reçoive la sanction royale. Nous en sommes bien conscients au Sénat. Nous pourrions devoir attendre jusqu’en avril ou en mai.

Sénateur Gold, c’est maintenant l’hiver en Afghanistan. Les gens gèlent, ils ont faim et ils sont malades en ce moment même. C’est maintenant qu’ils ont besoin de notre aide. Ils ne peuvent pas attendre que la procédure établie au Canada suive son cours avant de recevoir l’aide d’urgence qui sauvera leur vie. Par conséquent, le procureur général prendra-t-il une mesure provisoire pour garantir que des poursuites ne seront pas intentées contre les organismes canadiens d’aide internationale qui, de bonne foi, fournissent de l’aide humanitaire, et ce, jusqu’à ce que la modification reçoive la sanction royale?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question, et je vous remercie, ainsi que d’autres collègues, de souligner l’importance de ce dossier et les difficultés auxquelles notre pays doit faire face lorsqu’il s’agit d’apporter le soutien nécessaire par l’entremise des travailleurs humanitaires en Afghanistan.

Je ne suis pas en mesure de répondre à votre question sur les mesures précises que le procureur général pourrait ou voudrait prendre ou non. Comme vous l’avez indiqué, à juste titre, il est de notoriété publique que le gouvernement est saisi de ce dossier et qu’il y consacre bien des efforts. Il est vrai que le processus législatif prend du temps et que le Code criminel peut manquer de précision. Je vais certainement m’informer auprès du gouvernement et tenter d’obtenir une réponse. Même si c’est pendant l’ajournement, je vais tenter de vous répondre personnellement le plus tôt possible.

La sénatrice Omidvar : Merci, sénateur Gold. La prochaine fois que j’entendrai dire que le gouvernement est saisi de ce dossier, j’ai l’impression que je serai saisie d’une certaine émotion.

Je crois comprendre que le procureur général a le pouvoir de mettre en place une mesure de protection provisoire. Auriez-vous l’obligeance de lui transmettre cette proposition de toute urgence et de lui demander d’envisager une telle mesure? Merci.

Le sénateur Gold : Eh bien, la réponse est oui, bien sûr. C’est ce que je me suis engagé à faire dans ma réponse à votre question.

[Français]

Le contenu préjudiciable en ligne

L’honorable René Cormier : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, selon un récent rapport de l’organisme HabiloMédias, près d’un jeune Canadien sur deux serait exposé à du contenu raciste ou sexiste en ligne sur une base hebdomadaire, et les jeunes s’identifiant comme membres des communautés 2ELGBTQI+ seraient plus souvent susceptibles d’être témoins de contenu préjudiciable en ligne.

Sachant que, dans son plan d’action 2ELGBTQI+, le gouvernement du Canada s’est engagé à déposer un projet de loi pour lutter contre les formes graves de contenu préjudiciable en ligne, j’aimerais savoir comment les jeunes membres des communautés 2ELGBTQI+ sont consultés dans l’élaboration de ce projet de loi. De plus, quand ce projet de loi verra-t-il le jour?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question. Le gouvernement sait que la stigmatisation et la discrimination qui continuent d’alimenter l’homophobie, la biphobie et la transphobie doivent être éliminées. Le gouvernement sait que la haine en ligne est de la vraie haine et que la violence en ligne est de la vraie violence. Le gouvernement s’est engagé à présenter un projet de loi pour lutter contre le contenu en ligne préjudiciable. On m’avise que le gouvernement a nommé un groupe d’experts pour l’aider dans son travail.

Le gouvernement a l’intention de présenter ce projet de loi en temps opportun, comme l’indique la lettre de mandat du ministre Rodriguez. Au cours des derniers mois, le ministre Rodriguez et des membres du caucus ont tenu 13 tables rondes partout au pays où ils ont entendu les expériences vécues et les préoccupations de membres de la communauté 2ELGBTQI+. Le ministre a aussi tenu une table ronde virtuelle sur les violences et les préjudices fondés sur le sexe. Ce que le gouvernement a entendu, c’est que le statu quo n’est plus acceptable et que les plateformes et les médias sociaux doivent être tenus responsables des contenus qu’ils hébergent. Le gouvernement continue son travail et persiste dans son engagement de présenter un projet de loi sur la sécurité en ligne qui protégerait les communautés, les groupes voués à l’équité, les enfants et les Canadiens.

La Chambre des communes

Le Caucus canadien de la Fierté

L’honorable René Cormier : Sénateur Gold, je vous remercie de cette réponse. La semaine dernière, des parlementaires des deux Chambres se sont unis pour former le tout premier caucus non partisan 2ELGBTI+ au Canada, le Caucus canadien de la Fierté. Les principaux objectifs de ce caucus sont d’assurer un dialogue avec les organismes de la société civile, d’œuvrer de façon non partisane à la sensibilisation des parlementaires canadiens aux questions 2ELGBTQI+ et d’agir comme interlocuteur en diplomatie parlementaire en matière de droits 2ELGBTQI+.

À titre de coprésident du Caucus canadien de la Fierté, j’aimerais savoir ceci : comment le gouvernement canadien accueille-t-il la création de ce caucus et comment entend-il collaborer avec celui‑ci?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question. Le gouvernement apprécie le travail des organisations LGBTQ2+ et s’engage à continuer de travailler aux côtés de la communauté et de ceux qui la soutiennent, afin de créer un Canada où toutes les personnes LGBTQ2+ peuvent vivre une vie authentique. On m’assure que le gouvernement accueille toute collaboration visant à faire progresser l’égalité pour la communauté LGBTQ2+.

L’emploi et le développement social

La réforme de l’assurance-emploi

L’honorable Diane Bellemare : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement et concerne l’assurance-emploi. Je vous ai déjà posé la question il y a quelque temps, mais on sait que le gouvernement nous a annoncé qu’il y aurait une proposition de réforme à l’été 2022. Nous sommes maintenant le 12 décembre et il n’y a toujours pas de proposition de réforme.

Avez-vous une idée du moment où nous aurons une proposition de réforme de l’assurance-emploi, une proposition de fond? Quel processus le gouvernement choisira-t-il pour rassembler ses idées et sonder encore une fois la population sur des propositions précises?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question sur cette réforme, qui est importante. C’est une chose que le gouvernement s’est engagé à faire. Malheureusement, je n’ai pas l’information que vous m’avez demandée; je ne connais ni le calendrier ni les étapes, mais je ferai des recherches pour tenter d’obtenir une réponse.

La sénatrice Bellemare : J’ai une question complémentaire. Comme vous le savez, sénateur Gold, j’ai présenté le projet de loi S-244, qui a obtenu l’appui des grandes associations patronales et syndicales pour ce qui est d’ajouter un conseil consultatif à la Commission de l’assurance-emploi du Canada.

J’ai déposé le projet de loi et j’ai fait des démarches. Pensez-vous que le gouvernement présentera ce projet de loi dans le contexte de sa réforme?

Le sénateur Gold : Merci de votre question. Je vais l’ajouter à mes recherches pour tenter d’obtenir une réponse.

[Traduction]

L’agriculture et l’agroalimentaire

L’Agence canadienne d’inspection des aliments—L’importation des aliments

L’honorable Robert Black : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Comme vous le savez peut-être, un certificat d’exportation immédiate a été approuvé par l’Agence canadienne d’inspection des aliments, l’ACIA, le 1er décembre, ce qui permettra aux produits de poulet de certains producteurs ukrainiens d’être importés au Canada sans droits de douane ni contingents en vertu du décret de remise pour les marchandises d’Ukraine.

J’aimerais profiter de cette occasion pour souligner la rapidité avec laquelle l’ACIA a approuvé ce certificat, malgré le fait que le Comité de l’agriculture et de l’agroalimentaire de l’autre endroit était encore en train d’examiner la question. Bien que je comprenne qu’il soit parfois nécessaire d’agir lestement dans des situations instables, il est difficile d’imaginer que l’ACIA a eu suffisamment de temps pour examiner les témoignages, notamment les remarques des représentants du Congrès ukrainien canadien, qui ont souligné la destruction des infrastructures civiles visées par les missiles russes.

(1520)

Honorables collègues, les États-Unis, qui ont mené leur propre vérification du système ukrainien d’inspection de la volaille et de la viande en même temps que les inspecteurs de l’ACIA, en 2018-2019, ont décidé de reporter leur décision concernant le permis d’exportation de l’Ukraine jusqu’à la fin de la guerre, lorsqu’il sera possible de réexaminer l’état de l’infrastructure ukrainienne de contrôle de la salubrité des aliments.

Sénateur Gold, sachant qu’un de nos plus grands alliés reporte sa décision jusqu’à ce qu’il puisse réexaminer les infrastructures en Ukraine, pouvez-vous confirmer que le gouvernement canadien est certain que l’inspection fondée sur les infrastructures essentielles qui étaient en place en 2019 est toujours valide aujourd’hui?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question. On m’informe qu’au cours des dernières années, il y a eu plusieurs discussions techniques entre l’ACIA et des agents ukrainiens. Afin d’atténuer les préoccupations exprimées par l’industrie, l’ACIA a demandé des garanties supplémentaires concernant les contrôles de la salubrité des aliments et de la santé animale en Ukraine — et les agents ukrainiens ont donné l’assurance que leurs normes et leurs contrôles sont toujours au même niveau qu’au moment de la vérification et qu’ils peuvent inspecter et certifier les exportations conformément aux conditions du certificat. L’ACIA n’a terminé la rédaction du certificat d’exportation qu’après avoir obtenu de réelles garanties de l’Ukraine. Le certificat comprend des conditions rigoureuses en matière de sécurité alimentaire et de santé animale.

L’ACIA se fonde sur un système d’inspection des importations rigoureux pour vérifier que les produits importés respectent la réglementation fédérale canadienne. Les 10 premières expéditions de nouvelles importations de tout produit de viande provenant d’un établissement nouvellement approuvé font l’objet d’une inspection complète. Ce processus s’appliquerait également aux importations en provenance d’Ukraine, et seules les expéditions conformes seraient remises à l’importateur.

On m’assure que l’ACIA a l’intention de soumettre les produits de volaille importés d’Ukraine au même examen rigoureux que les produits de volaille provenant du Canada ou d’autres pays. On m’informe qu’à ce jour, l’ACIA n’a reçu aucun renseignement ni aucune preuve pointant vers le non-respect des garanties fournies par l’Ukraine et que l’Ukraine a continué d’exporter des produits de volaille vers d’autres pays, comme les pays membres de l’Union européenne.

Chers collègues, tous les aliments vendus au Canada, qu’ils viennent d’ici ou de l’étranger, doivent être conformes à la réglementation fédérale canadienne. Lorsqu’on détecte une non‑conformité, l’ACIA prend immédiatement des mesures, peu importe le pays d’origine. Ces mesures peuvent aller de l’imposition de corrections mineures à l’étiquetage à l’annulation des licences d’importation en passant par la rétention de produits, le refus d’entrée des importations, la suspension d’établissements étrangers ou les rappels de produits.

Le sénateur Black : Dans un rapport sur les répercussions de la guerre publié le 20 juillet 2022, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture a noté qu’en Ukraine :

[...] les éleveurs de bétail n’ont pas accès, tant physiquement qu’économiquement, aux fournitures pour les soins des animaux, y compris les médicaments vétérinaires, les aliments pour animaux et les additifs alimentaires.

C’est préoccupant, car cela pourrait avoir une incidence sur les produits à base de poulet qui entrent au Canada.

Sénateur Gold, pouvez-vous nous faire part des informations que l’Ukraine a transmises à l’Agence canadienne d’inspection des aliments depuis juillet 2022 afin de prouver que les protocoles, les politiques et les infrastructures essentielles sont toujours en place?

Le sénateur Gold : Comme je viens de répondre à votre question, sénateur Black, je peux vous dire qu’on m’a assuré que toutes les mesures ont été prises et continuent d’être prises afin de protéger la santé et la sécurité des Canadiens lorsqu’il s’agit de produits importés en provenance de n’importe quel pays, y compris l’Ukraine. Je crois que les Canadiens peuvent être fiers de nos normes, qui visent à protéger l’intégrité de notre approvisionnement alimentaire, tout comme ils peuvent être fiers des efforts que le Canada a entrepris pour aider l’Ukraine pendant cette guerre injustifiée menée par la Russie à son endroit.

[Français]

Le patrimoine canadien

Les recommandations du commissaire aux langues officielles

L’honorable Claude Carignan : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Monsieur le leader, on a appris au cours des dernières heures, à la suite de la publication d’un rapport du commissaire aux langues officielles, que près de la moitié des recommandations que le commissaire aux langues officielles a faites en réponse aux lacunes qui ont été identifiées dans ses rapports et ses enquêtes ont été ignorées par les institutions fédérales.

Le commissaire a énuméré dans l’ordre les organisations, institutions, départements et ministères, du moins performant au plus performant. On constate qu’Air Canada se trouve au septième rang.

Qui est le cancre? Quel est le ministère qui fait le moins bien pour ce qui est de respecter les recommandations du commissaire aux langues officielles?

Monsieur le leader, le Bureau du Conseil privé, le ministère du premier ministre du Canada, est le cancre; c’est le ministère qui n’a suivi aucune des recommandations du commissaire aux langues officielles.

Monsieur le leader, j’imagine que vous connaissez l’expression « grand parleur, petit faiseur ». Croyez-vous qu’elle s’applique bien au premier ministre du Canada?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : La réponse à votre question est non.

Cela ne signifie pas que les recommandations du commissaire ne sont pas importantes ou que le gouvernement et les ministères identifiés dans le rapport ne peuvent pas faire mieux, mais la réponse est non.

Le sénateur Carignan : Monsieur le leader, après le discours en anglais du président-directeur général d’Air Canada, la ministre des Langues officielles, Ginette Petitpas Taylor, a dit ce qui suit, et je cite :

J’ai pris acte de ses excuses, mais elles doivent être suivies d’actions concrètes afin de démontrer qu’il prend ses obligations au sérieux [...]. C’est une question de respect.

Donc, étant donné que le premier ministre et le Bureau du Conseil privé n’ont pas pris d’actions concrètes après les recommandations du commissaire aux langues officielles, cela veut‑il dire qu’ils ne prennent pas leurs obligations au sérieux et qu’ils manquent de respect envers la Loi sur les langues officielles et envers les francophones de ce pays?

Le sénateur Gold : Non, je ne suis pas de cet avis. Cependant, je vais m’engager à connaître les prochaines étapes du processus. J’espère obtenir une réponse sur les progrès qui seront faits au sein du gouvernement à cet égard et j’en informerai le Sénat dès que je la recevrai.

[Traduction]

Les affaires étrangères

L’ambassade en Arménie

L’honorable Leo Housakos : Monsieur le leader du gouvernement, j’ai souvent pris la parole au fil des ans pour vous demander, à vous et à votre prédécesseur, quels étaient les engagements électoraux de la ministre Mélanie Joly lors de plusieurs élections, et ce, même par écrit. Elle a pris un engagement écrit et a promis à maintes reprises à la communauté arménienne du Canada d’ouvrir une ambassade en Arménie. En septembre, malgré le fait que votre prédécesseur, le sénateur Harder, m’ait déjà dit qu’un gouvernement ne se fonde pas sur des promesses électorales pour déterminer dans quels pays ouvrir une ambassade, nous avons vu le premier ministre Trudeau annoncer en grande pompe et avec beaucoup d’enthousiasme à la communauté qu’il allait ouvrir une ambassade en Arménie. Pourtant, il y a deux semaines à peine, le ministère a annoncé au milieu de la nuit et avec beaucoup moins de pompe et d’enthousiasme qu’il n’y aurait pas d’ambassadeur ni d’ambassade, mais un consul. Il y a une grande différence.

Monsieur le leader du gouvernement, pouvez-vous nous expliquer pourquoi le premier ministre Trudeau continue de revenir sur les promesses faites à la communauté arménienne du Canada?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Sénateur, je vous remercie pour votre question. Je vais certainement m’informer sur le changement de statut de la présence canadienne en Arménie. Je serai heureux de vous informer quand j’aurai obtenu la réponse pertinente.

Le sénateur Housakos : Je vous remercie, monsieur le leader du gouvernement. J’aimerais rappeler au Sénat qu’au mois de septembre, le premier ministre avait fait son annonce le Jour de l’indépendance de l’Arménie, alors que le Canada marquait le 30e anniversaire de ses relations diplomatiques avec ce pays. Encore une fois, le premier ministre avait parlé avec grandiloquence de l’importance de renforcer les liens personnels, les liens diplomatiques, les liens économiques, et ainsi de suite, entre les deux pays. Toutefois, ce n’est pas la première fois que, quand cela compte, le premier ministre dit une chose et en fait une autre.

Nous constatons une tendance avec le gouvernement Trudeau : tout porte à croire que sa priorité est de faire des annonces en grande pompe et de faire le tour de piste du vainqueur plutôt que de passer à l’action et d’obtenir des résultats. Ma question est très simple : le gouvernement peut-il s’engager à arrêter de donner un spectacle et à honorer sa promesse électorale d’ouvrir une ambassade?

Le sénateur Gold : Sénateur, je vais m’en tenir à ma réponse, car je ne partage pas votre opinion, je la réfute en fait, à propos de l’interprétation que vous faites des actions et des motivations du gouvernement. Comme je l’ai mentionné, je vais m’informer sur le statut de la présence diplomatique du Canada en Arménie. Dès que j’aurai une réponse, je la transmettrai au Sénat.

(1530)

La défense nationale

Les navires de patrouille dans l’Arctique

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Sénateur Gold, la semaine dernière, nous avons appris que le nouveau navire de patrouille dans l’Arctique du Canada, le NCSM Harry DeWolf sera hors service jusqu’en avril 2023 en raison de problèmes mécaniques continus. De plus, un deuxième navire de patrouille extracôtier dans l’Arctique, le NCSM Max Bernays, a été accepté en septembre du chantier naval Irving même si un des systèmes de manœuvre du vaisseau présente un problème connu. Les réparations du Max Bernays seront couvertes par une garantie d’Irving. Cependant, celles du Harry DeWolf seront effectuées aux frais des contribuables.

Monsieur le leader, combien les contribuables devront-ils payer pour régler la facture de ces réparations?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question, à laquelle ne n’ai pas la réponse. Je devrai me renseigner. Je suis certain que tous les Canadiens veulent être convaincus que tous nos actifs, c’est-à-dire les navires et d’autres équipements qui servent à protéger notre souveraineté et la vie des gens et des collectivités dans le Nord, fonctionnent comme il faut. Je vais me renseigner sur le coût des réparations et je vous ferai part de ce que j’aurai appris.

La sénatrice Martin : Je vous remercie.

En plus du fardeau que cela représentera pour les contribuables, la situation soulève un enjeu beaucoup plus fondamental, celui du manque de préparation militaire du Canada, particulièrement dans l’Arctique. Alors que nos alliés comptent sur nous pour défendre le Nord contre des États voyous comme la Russie et la Chine, l’incompétence totale dont fait preuve le gouvernement Trudeau en matière d’approvisionnement militaire nous place, nous et nos alliés, dans une position vulnérable.

Sénateur Gold, les conservateurs ont souvent posé cette question, mais je la pose une fois de plus : quand le gouvernement Trudeau commencera-t-il enfin à prendre au sérieux la défense de l’Arctique?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de poser cette question, mais j’y ai souvent répondu. J’ai dressé la liste des investissements records que le gouvernement actuel a consacrés au renforcement de notre capacité dans le Nord, qu’il s’agisse d’avions de chasse, d’hélicoptères ou d’aéronefs de recherche et sauvetage à voilure fixe. Si ma mémoire est bonne, j’ai aussi fourni au Sénat — il y a quelques mois, je crois — un survol historique de l’augmentation des dépenses consacrées à la défense par le gouvernement actuel comparativement aux gouvernements précédents.


[Français]

ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur la Journée nationale de la jupe à rubans

Message des Communes

Son Honneur le Président annonce qu’il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi S-219, Loi concernant la Journée nationale de la jupe à rubans, accompagné d’un message informant le Sénat qu’elle a adopté ce projet de loi sans amendement.

Les travaux du Sénat

La période des questions avec un ministre

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’ordre adopté le 7 décembre 2021, je souhaite aviser le Sénat que la période des questions avec l’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles, aura lieu le mercredi 14 décembre 2022, à 14 h 20.

[Traduction]

La réorganisation des ordres émanant du gouvernement

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’article 4-13(3) du Règlement, j’informe le Sénat que, lorsque nous passerons aux affaires du gouvernement, le Sénat abordera les travaux dans l’ordre suivant : l’étude de la motion no 74, suivie de tous les autres articles dans l’ordre où ils figurent au Feuilleton.

Le Sénat

Motion concernant les séances des 13, 14 et 15 décembre 2022 et tendant à autoriser les comités à siéger en même temps que le Sénat—Débat

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 8 décembre 2022, propose :

Que, le mardi 13 décembre 2022, le mercredi 14 décembre 2022 et le jeudi 15 décembre 2022, une fois l’ordre du jour appelé, le Sénat ne traite que des affaires du gouvernement et des projets de loi d’intérêt public des Communes;

Que, nonobstant l’ordre du 21 septembre 2022, la séance du mercredi 14 décembre 2022 continue au-delà de 16 heures, s’il y a lieu, et soit levée à minuit, à moins d’être ajournée plus tôt par voie de motion;

Que le mercredi 14 décembre 2022, les comités du Sénat soient autorisés à se réunir pour l’étude des affaires du gouvernement, ainsi que le comité auquel le projet de loi C-235, Loi concernant le développement d’une économie verte dans les Prairies, aurait pu être renvoyé, si cela est arrivé, même si le Sénat siège à ce moment-là, l’application de l’article 12-18(1) du Règlement étant suspendue à cet égard.

 — Je cède la parole à l’honorable sénateur Gold.

Adoption de la motion d’amendement

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je propose que la motion soit modifiée par adjonction, avant le dernier paragraphe, du nouveau paragraphe suivant.

Par conséquent, honorables sénateurs, je propose l’amendement suivant :

Que la motion ne soit pas maintenant adoptée, mais qu’elle soit modifiée par adjonction, avant le dernier paragraphe, du nouveau paragraphe suivant :

« Que le comité auquel le projet de loi C-235, Loi concernant le développement d’une économie verte dans les Prairies, aurait pu être renvoyé, si cela est arrivé, soit autorisé à se réunir aujourd’hui, même si le Sénat siège à ce moment-là, l’application de l’article 12-18(1) du Règlement étant suspendue à cet égard; ».

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : D’accord.

(La motion d’amendement de l’honorable sénateur Gold est adoptée.)

Adoption de la motion modifiée concernant les séances des 13, 14 et 15 décembre 2022 et tendant à autoriser les comités à siéger en même temps que le Sénat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion, telle que modifiée, de l’honorable sénatrice Gagné, appuyée par l’honorable sénateur Gold, c.p.,

Que, le mardi 13 décembre 2022, le mercredi 14 décembre 2022 et le jeudi 15 décembre 2022, une fois l’ordre du jour appelé, le Sénat ne traite que des affaires du gouvernement et des projets de loi d’intérêt public des Communes;

Que, nonobstant l’ordre du 21 septembre 2022, la séance du mercredi 14 décembre 2022 continue au-delà de 16 heures, s’il y a lieu, et soit levée à minuit, à moins d’être ajournée plus tôt par voie de motion;

Que le comité auquel le projet de loi C-235, Loi concernant le développement d’une économie verte dans les Prairies, aurait pu être renvoyé, si cela est arrivé, soit autorisé à se réunir aujourd’hui, même si le Sénat siège à ce moment-là, l’application de l’article 12-18(1) du Règlement étant suspendue à cet égard;

Que le mercredi 14 décembre 2022, les comités du Sénat soient autorisés à se réunir pour l’étude des affaires du gouvernement, ainsi que le comité auquel le projet de loi C-235, Loi concernant le développement d’une économie verte dans les Prairies, aurait pu être renvoyé, si cela est arrivé, même si le Sénat siège à ce moment-là, l’application de l’article 12-18(1) du Règlement étant suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion modifiée est adoptée.)

Projet de loi sur le développement d’une économie verte dans les Prairies

Deuxième lecture

Consentement ayant été accordé de passer aux autres affaires, projets de loi d’intérêt public des Communes, rapports de comités, article no 3 :

L’honorable Brent Cotter propose que le projet de loi C-235, Loi concernant le développement d’une économie verte dans les Prairies, soit lu pour la deuxième fois.

 — Je prends la parole au sujet du projet de loi C-235. C’est avec des sentiments partagés que je le fais. Comme nous avons pu l’entendre dans l’intervention de la sénatrice Gagné plus tôt aujourd’hui, nous allons étudier ce projet de loi dont je suis le parrain. C’est un projet de loi qui, à la Chambre des communes, a été présenté par l’honorable Jim Carr, décédé hier après un combat héroïque contre le cancer.

Je ne connaissais pas bien M. Carr, mais je l’admirais beaucoup, comme bon nombre de sénateurs et de députés. En effet, M. Carr a continué son travail de parlementaire jusqu’au dernier jour de sa vie. J’espère que ce projet de loi sera à la fois un hommage à sa mémoire et une contribution significative à une économie durable dans les provinces des Prairies.

Dans le Globe and Mail, on pouvait lire la notice nécrologique de M. Carr, dont la dernière phrase est une citation de ce dernier : « Comment ne pas faire preuve d’humilité devant la grandeur de ce magnifique pays? »

J’ai laissé tomber à peu près tout ce que j’avais préparé, parce que, après le décès de M. Carr, je trouvais que ce n’était pas vraiment approprié. Je trouvais que mon discours sonnait trop bureaucratique. D’ailleurs, j’ai passé une bonne partie de la nuit à essayer de trouver ce que j’allais dire aujourd’hui. Il est tout à fait remarquable que, à 3 heures du matin, vous puissiez avoir l’impression d’avoir en tête un magnifique discours et que, en y repensant à 7 h 30, dans la lumière crue du jour, vous vous disiez que vous avez peut-être perdu la raison.

En tout cas, je vais prononcer mon discours et je ferai de mon mieux pour qu’il soit pertinent, senti et, je l’espère, inspirant. Souhaitez-moi bonne chance.

Je ne parlerai que brièvement du projet de loi C-235 en tant que tel. Le projet de loi est simple. Il s’agit d’un projet de loi-cadre qui a deux objectifs. Premièrement, il exige qu’un groupe de ministres fédéraux, il y en a environ six, élabore, sous la direction du ministre responsable du développement économique dans les provinces des Prairies, un cadre de coopération avec les leaders provinciaux, territoriaux et autochtones et avec le secteur privé, ainsi qu’avec les organisations qui représentent les employeurs et les employés, en vue d’une meilleure coordination de la mise en œuvre des programmes fédéraux qui contribueront à bâtir une économie verte et durable dans les Prairies.

La deuxième partie du projet de loi exige l’organisation d’une vaste série de consultations auprès de ces groupes pour que le plan soit mieux coordonné et pour qu’il réponde mieux aux besoins des gens des Prairies. C’est aux fruits qu’on jugera l’arbre, bien sûr, en ce qui a trait aux consultations et aux négociations, mais j’espère qu’à la lumière de ce processus — en présumant que le projet de loi était adopté —, les programmes fédéraux répondront mieux aux besoins des collectivités des Prairies.

Je voudrais dire encore quelques mots au sujet de l’économie des Prairies et de l’identité des habitants de cette région. Je vais radoter un peu dans ces observations, mais je vais les encadrer de deux récits qui me semblent être appropriés à la fois pour représenter les Prairies et, je l’espère, célébrer l’amour de Jim Carr pour les Prairies, ainsi que son propre engagement.

(1540)

Il y a des années, alors que j’étais un jeune avocat, en me rendant à la cour en véhicule, j’écoutais un segment de Morningside, avec Peter Gzowski. Fait intéressant, le thème ce matin-là était la beauté subtile des Prairies. Je crois qu’il est juste de dire que la beauté dans les Prairies est subtile.

Un premier ministre de la Saskatchewan avait l’habitude de dire fréquemment aux gens de la Colombie-Britannique : « Vous n’avez même pas amorcé votre projet d’enlèvement des montagnes. En Saskatchewan, nous l’avons terminé. » C’était un genre de mécanisme de défense, si l’on peut dire.

M. Gzowski accueillait trois intervenants à son émission : un artiste de Winnipeg, un poète d’Edmonton et une auteure de la Saskatchewan; je crois qu’il s’agissait de Sharon Butala. Les intervenants ont donné leur point de vue sur ce qui est assurément subtil dans la beauté des Prairies, et je comprenais tout à fait ce qu’ils voulaient dire. Contrairement à ses habitudes, M. Gzowski est intervenu dans l’émission de radio pour décrire sa première expérience, sa découverte des Prairies. Il a alors commencé à raconter l’histoire d’un voyage en train à travers l’Est de la Saskatchewan par un jour de tempête de janvier.

Il ne l’a pas dit à la radio, mais en fait, il se rendait de Toronto à Moose Jaw, en Saskatchewan, pour occuper le poste de rédacteur en chef du journal Moose Jaw Times Herald. Il a raconté avoir voyagé dans le train ce jour-là, dans le compartiment voyageurs. Il y avait un autre gars avec lui, et tous les deux regardaient par la fenêtre du train, contemplant le paysage morne, nuageux, balayé par le vent, enneigé, d’un froid glacial. Au bout d’une heure de voyage en silence, il a demandé à son compagnon : « Alors, qu’en pensez‑vous? »

Il me faut être prudent en lisant cette réponse, chers collègues.

La personne a répondu : « C’est la plus grande étendue de rien du tout que j’aie jamais vue. »

J’ai esquissé un sourire en écoutant cette histoire, mais j’ai décidé d’écrire à M. Gzowski pour lui raconter une expérience bien différente que j’avais vécue. C’est la seule lettre que j’ai écrite dans ce contexte au cours de ma vie. J’avais 17 ans et je prenais le train à Windsor, en Ontario, pour retourner à Saskatoon afin de commencer mes études universitaires. J’avais travaillé sur une chaîne de montage de voitures pendant l’été afin de gagner de l’argent pour l’université. J’étais seul, pas très dégourdi, peu sûr de moi et solitaire.

Le deuxième jour du trajet, je me suis réveillé et j’ai regardé à l’extérieur. Nous nous trouvions dans le Sud-Est du Manitoba en ce petit matin. Si j’avais bien regardé, j’aurais peut-être aperçu le jeune sénateur Harder ou le jeune sénateur Plett. Je ne les ai pas vus, mais j’ai vu des milles et des milles de céréales ambrées, qui ondoyaient sous la brise d’été, des tiges dorées dans la lumière du petit matin. Encore aujourd’hui, ce souvenir m’émeut. J’ai pensé : « Je suis chez moi. » En fait, je me suis mis à pleurer. Habituellement, je ne raconte pas ce détail aux gens. Apparemment, M. Gzowski a lu ma lettre à l’émission Morningside. Même si je ne l’ai jamais entendue, j’y ai vu une sorte de validation de mon amour pour les Prairies et de mes espoirs pour l’avenir de la région.

Sous la superficialité de l’histoire de M. Gzowski et sous la couche de glace et de neige, il y a une magnifique région du Canada aux nombreuses possibilités et au grand potentiel. Beaucoup a été accompli par le dur labeur des gens qui ont défriché ces terres et de ceux qui les ont suivis, mais il reste beaucoup de possibilités et un énorme potentiel à découvrir.

Or, il faut souligner que ces possibilités et ce potentiel ont été rendus possibles en grande partie parce qu’ils ont été enlevés aux peuples autochtones. Que ce soit sur le plan du déni de la culture, de la religion, de l’expulsion des territoires vers des réserves de la grosseur d’un timbre postal — souvent hors des terres les plus productives de la Saskatchewan —, ou de la discrimination pure et simple, il y a beaucoup de travail à faire pour restaurer ce monde de possibilités qui a été enlevé aux Autochtones depuis si longtemps.

Ce projet de loi vise précisément ce but, en partie. Il existe des feuilles de route pour accomplir ce travail, comme vous le savez. J’espère que le succès sera au rendez-vous. S’il reste du temps, je reviendrai sur ce point.

J’aimerais prendre quelques minutes pour parler de l’économie de la Saskatchewan. Je sais que cette initiative concerne les Prairies, mais je reconnais qu’il y a certains éléments qui me sont complètement inconnus. Je vais par conséquent m’en tenir à la Saskatchewan.

L’économie de la Saskatchewan et ses liens avec la durabilité offrent un potentiel presque illimité. Le Nord regorge de matériaux, y compris des matériaux critiques qui seront nécessaires pour les véhicules zéro émission et tant d’autres filières énergétiques. On y trouve les plus vastes réserves d’uranium au monde, ainsi que les plus importantes réserves de potasse connues au monde. Il y a 40 ans, une personne occupant un poste au sein de la haute direction d’une entreprise productrice de potasse m’a dit que la Saskatchewan possédait suffisamment de réserves de potasse pour répondre à la demande mondiale des 2 000 prochaines années. Maintenant, il y en a peut-être uniquement assez pour les 1 960 prochaines années, mais il reste quand même beaucoup de potasse.

Cependant, le reste de mon intervention sur l’économie saskatchewanaise portera principalement sur l’agriculture. Je pense qu’il est assez crucial de discuter de cet enjeu pour diverses raisons. Je vais en nommer une. Il y a quelques semaines, le sénateur Black, qui préside le Comité de l’agriculture, nous a emmenés au Musée de l’agriculture du Canada ici, à Ottawa. Nous avons appris beaucoup de choses. Nous avons notamment appris — et je crois que je le savais intuitivement — que la vaste majorité des terres arables du Canada, c’est-à-dire les terres pouvant être utilisées pour l’agriculture, se trouvent dans les Prairies. En fait, si ma mémoire est bonne, 47 % des terres arables du Canada sont en Saskatchewan. C’est plutôt remarquable.

Permettez-moi de dire tout de suite un fait assez méconnu : les agriculteurs sont de formidables intendants des terres. De toute évidence, il est dans leur intérêt d’agir ainsi puisque leur gagne-pain et celui de leurs enfants qui pourraient reprendre leur entreprise agricole dépendent de la viabilité et de la productivité des terres dans l’avenir. Je tiens donc à déboulonner immédiatement le mythe selon lequel les agriculteurs, ou les Saskatchewanais en général, ne s’intéressent pas à la gérance de l’environnement. En fait, même si je ne connais pas les résultats des derniers sondages, je sais que lorsqu’on a fait des sondages pour connaître le niveau d’engagement des Canadiens à l’égard de l’environnement, les gens de la Saskatchewan sont arrivés en première place, année après année.

Je me permets de vous raconter une petite histoire — une anecdote, en fait — qui illustre à mes yeux l’engagement des Saskatchewanais en matière de gérance de l’environnement.

Mon ancien beau-père était agriculteur dans l’ouest de la Saskatchewan. Il était un agriculteur et un homme d’affaires prospère. Il était attentif au monde qui l’entourait. Dans ses jeunes années, il avait été amateur de chasse, il n’avait donc rien contre les personnes qui chassaient pendant la saison de chasse. Cependant, chaque automne, à la fin de la saison de la chasse aux oies, généralement en novembre, il partait avec son camion et un petit bateau à moteur à la recherche de petits lacs, d’étangs et d’étangs artificiels pour sauver des outardes qui avaient été prises pour cible par des chasseurs, mais qui n’avaient été que blessées. Si ces outardes étaient abandonnées à leur sort, incapables de voler et peut-être de se rétablir, elles mourraient de froid — une mort lente et horrible — à mesure que la glace de ces étangs se refermait sur elles.

Laissez-moi vous dire qu’il n’est pas facile de sauver une outarde. Aussi intelligentes soient-elles, elles ne peuvent pas faire la différence entre quelqu’un qui essaie de les sauver et quelqu’un qui veut les apprêter pour le dîner et elles sont très fortes. Cependant, il persévérait chaque automne. Une année, il a sauvé 24 outardes et les a soignées afin qu’elles puissent être relâchées dans la nature. J’ai trouvé qu’il s’agissait d’un bel engagement inédit à l’égard de la nature.

Maintenant, j’ai autre chose à dire sur l’agriculture et sur l’évolution de l’agriculture en Saskatchewan. En effet, il s’est produit une révolution des pratiques agricoles dans les Prairies. L’utilisation des terres est maintenant régie par la science et la technologie. Guidés par des chercheurs universitaires, les agriculteurs utilisent maintenant leurs terres de façon beaucoup plus extensive que dans les générations passées, réalisant deux ou trois choses remarquables en même temps. Premièrement, les terres sont plus productives et génèrent davantage de revenus pour les agriculteurs. D’ailleurs, on me dit que grâce aux résultats de recherches menées à l’Université de la Saskatchewan, qui ont permis une intensification de l’utilisation et un assainissement des terres agricoles, les revenus des agriculteurs de la Saskatchewan ont augmenté de 1 milliard de dollars par année. Cela a pu être réalisé grâce à des pratiques écologiquement durables, créant ainsi un environnement viable.

Les agriculteurs ne travaillent plus ou presque plus le sol. Ils utilisent des cultures de couverture et la rotation des cultures. Ils rétablissent la santé du sol grâce à ces pratiques, qui permettent aussi de capter du carbone. Au Comité de l’agriculture, nous avons entendu des témoignages selon lesquels, parmi toutes les terres agricoles au pays, celles des Prairies ont apporté une contribution spectaculaire au captage du carbone au cours des 20 dernières années, et il est possible d’aller encore plus loin.

Chacun de ces changements a sans doute constitué un défi pour les agriculteurs et pour l’économie rurale de ma province, mais ils offrent aussi de nombreux débouchés. Lorsqu’il est devenu évident que, guidés par la science, les agriculteurs étaient en mesure d’élargir le répertoire des cultures, des entrepreneurs avisés et engagés se sont manifestés.

(1550)

Voici un exemple. Un jeune conseiller en politique commerciale du gouvernement de la Saskatchewan, qui travaillait pour moi, a su voir le potentiel d’une expansion spectaculaire de la production des légumineuses et de leur commercialisation au Moyen-Orient. Murad Al-Katib, un jeune homme d’origine turque vivant dans la petite ville de Davidson, en Saskatchewan, a créé une entreprise dans ce but. En collaboration avec des scientifiques, des agriculteurs et des acteurs de la chaîne d’approvisionnement, il a mis sur pied une entreprise de calibre mondial visant à faciliter la transformation des légumineuses et leur commercialisation dans des régions du monde où elles font partie intégrante de l’alimentation.

Il s’agit d’une formidable histoire d’opportunité parmi tant d’autres. Du point de vue de l’agriculture, on s’y est pris de manière à favoriser l’utilisation durable des terres agricoles pour les générations futures.

Lorsque j’entends des gens faire peu de cas de l’engagement des agriculteurs face au changement climatique ou de leur souci de l’environnement, je pense à deux choses. Premièrement, c’est faux. Deuxièmement, il ne s’agit pas vraiment d’une communication ou d’une critique généralisée visant un destinataire inconnu. En Saskatchewan, nous sommes si proches de la communauté agricole que cela semble une insulte pour chacun d’entre nous, individuellement.

J’admets qu’il reste du travail à faire — et il sera fait —, mais un engagement constructif entre Ottawa, les provinces, les organismes et d’autres intervenants permettra d’apporter des changements positifs et considérables. Le projet de loi de M. Carr y contribuera, même si ce n’est que modestement.

Permettez-moi aussi de parler d’un autre aspect de la Saskatchewan qui, à mon avis, est pertinent à l’agriculture. La production pétrolière et gazière va diminuer avec le temps, mais il est juste de dire qu’elle ne disparaîtra pas. Même le ministre des Ressources naturelles a dit que peu importe les progrès que nous réaliserons au chapitre de l’énergie et des transports, nous aurons toujours besoin de sous-produits du pétrole afin de produire des biens dont notre société a besoin.

La production agricole nous offre donc une occasion merveilleuse. Premièrement, elle représente une source de revenus à l’échelle internationale. Elle est bonne pour notre économie en ce moment et le sera encore plus dans le futur, tant sur le plan de la production durable que de la possibilité de valeur ajoutée à ce que nous cultivons et exportons en ce moment. Elle est bonne pour la valeur de notre dollar et nous aide à maintenir les coûts bas. Espérons que lorsque nous devrons importer des produits, nous n’aurons pas à payer 15 $ pour un ananas.

Deuxièmement, un des grands défis mondiaux dans l’avenir sera la sécurité alimentaire. Notre secteur agricole a la remarquable capacité d’assurer la sécurité alimentaire. Nous ferons une très bonne action en ce monde en produisant de façon durable les aliments qu’il faut pour nourrir la planète. Mon ami M. Al-Katib en est un parfait exemple.

Enfin, j’aimerais faire quelques observations sur les relations fédérales-provinciales et la Constitution. Je sais que certains considèrent, à juste titre, que c’est d’une importance capitale, mais j’aimerais au moins indiquer brièvement le contexte dans lequel s’inscrivent les efforts de consultation auprès de la Saskatchewan. Premièrement, comme vous le savez tous, ce n’est qu’en 1905 que la Saskatchewan est devenue une province. De plus, ce n’est que dans les années 1930 qu’elle est devenue propriétaire des ressources minières de son sous-sol, au sens où on l’entend habituellement, conformément aux ententes sur le transfert des ressources naturelles. D’ailleurs, c’est à ce moment-là que la Saskatchewan et l’Alberta ont enfin pu s’établir pour la première fois en tant que provinces en bonne et due forme.

Vous vous rappellerez que, par la suite, au début des années 1980, un conflit a éclaté en Alberta à cause du Programme énergétique national. Par ailleurs, vous avez peut-être entendu parler des difficultés que la Saskatchewan a éprouvées dans les années 1970 en ce qui concerne l’exploitation et la gestion des ressources naturelles. J’aimerais parler plus particulièrement de ce problème, de la façon dont il a été géré en Saskatchewan, et plus généralement de la façon dont les relations fédérales-provinciales se sont déroulées dans les 40 ou 50 dernières années.

Dans les années 1970, la Saskatchewan a cherché à réglementer le rythme auquel la potasse, le pétrole et le gaz étaient extraits et vendus sur les marchés internationaux. Elle souhaitait plus précisément ralentir la production pour que la potasse, le pétrole et le gaz se vendent plus cher, ce qui procurerait des redevances plus élevées à la province. En agissant ainsi, la province s’ingérait, il faut le reconnaître, dans le modèle d’affaires et le plan d’affaires des entreprises.

Il est cependant utile d’examiner aussi le point de vue que voici : le pétrole, le gaz et la potasse qui étaient extraits appartenaient aux citoyens de la Saskatchewan. On pouvait donc imaginer qu’il était justifié, dans l’intérêt public, de tenter de faire le nécessaire pour que ces ressources procurent une « rente équitable », comme le diraient, je crois, les économistes, sénatrice Marshall.

Pendant ce que j’appellerais cette période de crise, les entreprises ont fait valoir que le régime de conservation ne constituait pas une tâche provinciale acceptable en vertu de la Constitution. Cette position avait l’appui d’Ottawa. La Province de la Saskatchewan a dû se défendre devant les tribunaux, et elle a perdu. La Saskatchewan a donc dû rembourser environ 1,5 milliard de dollars aux entreprises en raison des pertes qu’elles avaient subies. C’était une somme énorme pour une province comme la Saskatchewan, surtout à l’époque, et le budget de la province devrait l’absorber. Je ne sais pas quel était le budget de la province à l’époque, mais j’imagine qu’il se situait autour de 3 ou 4 milliards de dollars. La somme exigée était énorme.

Qu’a fait le premier ministre de la Saskatchewan? Il s’est plaint publiquement, bien sûr, et a acheté quelques entreprises de potasse. Mais sur le plan constitutionnel, M. Blakeney et M. Lougheed, qui avait lui-même des problèmes avec Ottawa, sont allés à Ottawa et ont élaboré un nouveau régime qui tenait compte des intérêts provinciaux. Ce qu’ils n’ont pas fait, c’est adopter une loi énonçant les intérêts provinciaux. Ils se sont plutôt mis au travail pour résoudre le problème.

Depuis des décennies, c’est la façon de faire de la Saskatchewan.

Laissez-moi vous présenter deux autres aspects de la même approche, qui ne sont pas tout à fait directement liés aux relations fédérales-provinciales en matière de gestion des ressources, mais qui sont tout de même très importants. Ce que j’essaie d’expliquer, c’est que la Saskatchewan a toujours été et continue d’être un bon partenaire dans cette fédération.

En 1980, les négociations entre premiers ministres concernant la façon dont la Constitution serait rapatriée au Canada et la façon dont elle serait modifiée étaient dans l’impasse. Ottawa et certaines provinces avaient adopté une position, c’est-à-dire accorder le pouvoir unilatéral à Ottawa, et un certain nombre d’autres provinces avaient adopté des positions différentes. L’affaire s’est rendue devant la Cour suprême, par renvoi constitutionnel.

La Saskatchewan a élaboré une nouvelle position, à savoir qu’il peut y avoir une loi qui autorise le rapatriement unilatéral, mais que les conventions constitutionnelles, qui ne sont pas des lois, mais presque, exigent un processus axé sur une plus grande participation. La Cour suprême du Canada a adopté cette position précise. Sa décision a débloqué l’impasse et a produit une Constitution canadienne moderne au Canada. Tous les gens qui sont profondément liés à l’histoire du droit constitutionnel au Canada reconnaissent que la Saskatchewan a trouvé la solution au problème.

Un deuxième exemple est un événement qui s’est produit en 1995. Vous vous souviendrez que le référendum sur la sécession du Québec a échoué de peu cette année-là. Je pense qu’il est juste de dire que, pendant un bon moment, Ottawa n’avait pas de plan clair. Les premiers ministres provinciaux de l’époque, menés par les premiers ministres Romanow et McKenna, ont mis au point un plan provincial pour tendre un rameau d’olivier au Québec afin d’encourager les Québécois à demeurer au sein de la fédération.

Lors d’une réunion des premiers ministres provinciaux, convoquée à Calgary, on a publié une déclaration unanime — à l’exception du premier ministre M. Bouchard, qui avait un point de vue différent —, appelée déclaration de Calgary, pour tendre ce rameau d’olivier. Les premiers ministres Klein et Harris faisaient partie des signataires. De plus, et ce n’était pas très connu à l’époque, le premier ministre Romanow avait réuni un groupe de conseillers pour l’aider à réfléchir à sa façon de faire et à celle de la province afin de favoriser le dialogue sur l’unité nationale. Il avait réuni Michel Bélanger, John McCallum, alors économiste en chef de la Banque Royale du Canada, l’ancien premier ministre Blakeney et, en particulier, l’ancien premier ministre Lougheed. J’ai assisté à ces réunions et je pense que M. Lougheed a donné d’excellents conseils à M. Romanow.

Par la suite, le gouvernement du Canada a adopté la Loi de clarification, qui établissait les règles à suivre dans l’éventualité d’un référendum sur la sécession. Le projet de loi prévoyait l’exigence d’une question claire et d’une majorité claire répondant « oui » à cette question. Le projet de loi n’indiquait toutefois pas quelles seraient les conséquences d’un tel résultat. Cette question a également été renvoyée devant la Cour suprême du Canada.

Seules quelques provinces sont intervenues; la Saskatchewan en faisait partie.

(1600)

Le premier ministre de l’époque m’a alors demandé de réunir les plus grands constitutionnalistes de la Saskatchewan pour participer à la rédaction de l’intervention la plus constructive possible. Permettez-moi de vous dire que la Saskatchewan comptait de grands constitutionnalistes à cette époque. J’ai une liste, mais je ne la lirai pas. Cela gênerait les personnes concernées.

Quand on y pense, la véritable question est la suivante : est-ce qu’un vote pour l’indépendance ne veut rien dire, comme ce serait probablement le cas aux États-Unis, ou est-ce qu’il entraîne la sécession d’une région ou d’une province du Canada? Voilà un choix difficile. Selon certains, cela menait à la sécession. Selon d’autres, cela ne voulait rien dire.

Ce fut une affaire importante. La juge en chef McLachlin de la Cour suprême du Canada m’a dit que c’était, de loin, l’affaire la plus importante au sujet de laquelle elle avait dû se prononcer au cours de sa carrière.

Selon la position présentée par la Saskatchewan, si le « oui » l’emportait par une majorité substantielle à la suite d’un vote sur une question claire, cela déclencherait des négociations de bonne foi sur la sécession et, le cas échéant, sur les conditions de cette sécession. C’est la position qui fut adoptée par la Cour suprême du Canada dans un jugement long, mais éloquent.

Ce que je veux dire, c’est que, depuis des décennies, la Saskatchewan fournit plus que sa part d’efforts en matière de relations fédérales-provinciales constructives, et il n’y a aucune raison de croire que cela va cesser.

Néanmoins, il y a de nos jours une profonde tension au sein de la fédération à propos des questions relatives aux champs de compétence du fédéral et des provinces. Certains seraient portés à croire que ce projet de loi alimente la tension, mais c’est tout le contraire selon moi. Cette mesure législative incite les provinces, le gouvernement fédéral et un vaste groupe d’entités ayant des intérêts dans l’économie des Prairies à unir leurs forces. De façon modeste, ce projet de loi offre la possibilité aux pouvoirs fédéraux et provinciaux de bâtir des relations constructives.

Réjouissez-vous, car j’ai presque terminé mes observations. J’aimerais vous raconter une histoire. Je le fais probablement trop souvent. C’est l’histoire d’un voyageur étranger qui arrive à l’aéroport de New York. Dans la section des bagages, il aperçoit un téléphone doré. Il demande aux gens autour de lui : « À quoi sert ce téléphone doré? » Quelqu’un lui répond : « C’est une ligne directe pour parler à Dieu. » Il dit : « Combien cela coûte-t-il? » Et on lui répond : « C’est 500 $ la minute. »

Il continue son périple jusqu’à Toronto. Mes excuses aux gens de Toronto. Dans la section des bagages de l’aéroport, il aperçoit un autre téléphone doré. Il demande : « À quoi sert ce téléphone doré? » Quelqu’un lui répond : « C’est une ligne directe pour parler à Dieu. » Il dit : « Combien pour un appel? » Et on lui répond : « C’est 100 $ la minute. » Il s’exclame : « Oh, c’est intéressant. »

Il poursuit son voyage jusqu’à Saskatoon. Dans la zone de réception des bagages, il aperçoit un autre téléphone en or. Il demande alors : « Qu’est-ce que c’est? » On lui répond : « C’est une ligne directe pour parler à Dieu. » Il demande : « C’est combien? » On lui répond : « C’est 25 ¢. » Il déclare : « Je ne comprends pas, ailleurs c’était 500 $ et 100 $. » On lui répond : « Eh bien, c’est parce qu’ici, c’est un appel local. »

C’est ce que je ressens au sujet de la Saskatchewan. J’espère que vous ressentez la même chose pour votre région. Vous pourriez demander que l’on installe des téléphones en or dans la zone de réception des bagages de l’aéroport de votre ville. En ce qui me concerne — peut-être que j’exagère un peu —, la Saskatchewan, c’est le paradis. J’espère que vous ressentez la même chose pour l’endroit où vous habitez.

Ce que je veux dire, c’est qu’en travaillant ensemble, à l’aide principalement de socs, et parfois d’épées lorsqu’il est nécessaire de se battre, nous pouvons bâtir une économie et un pays formidables et durables. C’est un peu ce que vise le projet de loi de M. Carr. Je considère un peu ce projet de loi comme une lettre d’amour de sa part aux Prairies.

J’espère que vous appuierez le projet de loi C-235 et que vous contribuerez à faire en sorte que ces téléphones en or permettent de faire des appels locaux d’un peu partout. Merci.

L’honorable Mary Jane McCallum : Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Cotter : Oui.

La sénatrice McCallum : Sénateur Cotter, un grand nombre de problèmes demeurent pour les titulaires de droits dans ce projet de loi. Dans quelle mesure la situation des titulaires de droits dans les provinces des Prairies sera-t-elle prise en compte de façon significative, quand on sait que l’Alberta et la Saskatchewan, suivies de près par le Manitoba, présentent des mesures législatives qui font fi de ces titulaires de droits? Dans quelle mesure pensez‑vous que ce projet de loi vise à régler ce problème?

Le sénateur Cotter : Comme vous le constaterez dans le projet de loi, sénatrice McCallum, il y a une obligation de consultation et de dialogue avec les dirigeants autochtones des Prairies. C’est un mandat imposé au ministre qui coordonne ce travail et, je présume, aux autres ministres qui auront un rôle à jouer ici.

Je pourrais peut-être répondre à cette question en donnant un exemple de ce que je pense être une occasion perdue dans le passé, mais qui pourrait en être une à saisir à l’avenir.

Lorsque l’on pense aux possibilités économiques — permettez‑moi de m’attarder d’abord sur ce point —, les possibilités offertes aux Autochtones, mais surtout aux Premières Nations, ont été fortement circonscrites par les traités, les terres visées par des traités et les réserves. Je pense que vous et moi sommes sur la même longueur d’onde à ce sujet. En fait, si vous regardez les cartes — la Saskatchewan illustrant peut-être le pire des cas — beaucoup de Premières Nations ne sont pas seulement placées dans de petites réserves de la taille d’un timbre-poste, mais elles sont également en marge de l’économie productive de la province, du moins à l’époque où l’agriculture semblait être la priorité. Les peuples et les communautés autochtones n’ont donc jamais eu la chance de prospérer.

Là où ces conversations ont été les plus riches, c’est par rapport aux territoires traditionnels. Je ne parle pas des réserves de la taille d’un timbre-poste, mais des zones où les Premières Nations avaient tendance à vivre traditionnellement, qui couvraient souvent de vastes étendues.

L’un des moyens de tenter de bâtir une économie est de créer des occasions pour les Autochtones et les collectivités d’exploiter ces ressources. Ce n’est pas facile pour un gouvernement provincial, car habituellement, ces ressources — que les gouvernements provinciaux considèrent conventionnellement comme leur appartenant ou appartenant à l’ensemble de la collectivité — sont une source de revenu qui permet à la province d’offrir ses programmes. Ce qu’il faut, c’est un partenariat avec la province et le gouvernement du Canada, car, dans la Constitution, les Indiens et les terres réservées aux Indiens relèvent d’Ottawa. Il est possible pour le gouvernement du Canada de soutenir ces projets, parfois avec une aide au chapitre des capitaux, mais également pour le partage des contraintes ou des coûts de renonciation avec les provinces.

Ottawa n’a pas toujours été ouverte à cela. J’ignore où cela mènera. J’espère que des idées créatives pour exploiter ce potentiel qui avait été retiré se concrétiseront. Des gens beaucoup plus intelligents que moi trouvent ces idées. Cela dit, je crois qu’il existe un potentiel énorme. Il suffit de faire preuve de bonne volonté.

Les provinces sont vulnérables à certains égards. Parfois, lorsque les revenus du pétrole et d’autres ressources sont très élevés, la situation paraît idéale, mais les provinces risquent de devoir renoncer à une grande partie de leur assiette fiscale. Voilà pourquoi les partenariats avec le gouvernement du Canada sont avantageux, car ce dernier a une obligation fiduciaire dans ce domaine et a été le mécanisme utilisé pour retirer cette possibilité. Ainsi, je crois que le Canada a le devoir d’intervenir.

J’espère que ma réponse a été, à tout le moins, partiellement utile.

La sénatrice McCallum : J’aimerais revenir sur votre déclaration concernant la Convention sur le transfert des ressources naturelles qui a été conclue unilatéralement, sans la participation des Premières Nations. Il s’agit maintenant d’une conversation et d’un sujet de préoccupation énormes pour les Premières Nations, et elles vont soulever cette question. La doctrine de la découverte et son rôle dans la Constitution y sont sous-jacents.

Y aurait-il moyen d’envoyer cette partie du projet de loi au Comité des peuples autochtones pour qu’il l’étudie? C’est énorme, et je pense que nous devons régler cela avant d’aller plus loin.

Le sénateur Cotter : Très brièvement, je pense que le point que vous soulevez est un sujet de préoccupation légitime, mais la Convention sur le transfert des ressources naturelles est un événement récent dans les Prairies, en Alberta et en Saskatchewan, qui soulève en fait la même question dans tout le pays. En effet, qui sont les propriétaires des ressources souterraines, non seulement en Alberta et en Saskatchewan, mais partout au pays? Selon moi, si la question devait être étudiée, elle devrait l’être à l’échelle nationale et, en tout respect, je ne crois pas que le projet de loi à l’étude soit le bon véhicule pour ce faire.

(1610)

L’honorable Dennis Glen Patterson : Puis-je poser une question au sénateur Cotter?

Le sénateur Cotter : Oui, bien sûr.

Le sénateur D. Patterson : Sénateur Cotter, je remarque que vous avez parlé d’espoir dans vos observations au sujet du projet de loi et du fait que ce dernier serait le legs du parrain du projet de loi, le regretté Jim Carr, que nous respections tous et qui est malheureusement décédé avant que le Sénat puisse adopter le projet de loi, mais il était encore en vie lorsqu’il a été adopté à l’étape de la troisième lecture à la Chambre des communes.

À ce sujet, concernant l’établissement de ce que vous avez qualifié de legs du regretté député des Prairies, je voudrais vous poser une question. Avez-vous accepté de parrainer le projet de loi peu de temps après qu’il ait été renvoyé au Sénat dans l’intention, comme je l’ai entendu dire à maintes reprises, de le faire adopter rapidement par le comité, incluant les témoignages et l’étude article par article, puis de la faire adopter à l’étape de la troisième lecture cette semaine, trois jours avant la date prévue de la relâche de Noël?

Le sénateur Cotter : Merci, sénateur Patterson. Vous le savez, ce n’est pas moi qui coordonne la façon dont les choses se déroulent au Sénat.

En ce qui concerne le projet de loi, je crois que de très bonnes discussions auront lieu si nous le renvoyons rapidement au comité. L’important au sujet de ce projet de loi n’est pas ce qui se passe aujourd’hui ou ce qui se passera demain ou jeudi. L’important, c’est ce que fera le gouvernement du Canada, si le projet de loi est adopté, dans les 12 mois à venir pour créer des conditions permettant l’avènement d’une économie durable dans les Prairies. C’est à ce moment que, à mon avis, les discussions seront les plus fructueuses, alors c’est pourquoi il est plutôt important d’y arriver rapidement.

Le sénateur D. Patterson : Sénateur Cotter, je vous remercie de votre réponse. En tant que sénateur de la Saskatchewan, vous avez exprimé avec éloquence votre appui au projet de loi. Pouvez-vous expliquer pourquoi les représentants de la Saskatchewan et du Manitoba ont exprimé leur opposition à ce projet de loi lors de leur comparution devant le comité de la Chambre des communes?

Le sénateur Cotter : Je vous remercie de votre question. Je suis incapable de lire dans les pensées. Je dirai cependant que si j’ai essayé de parler un peu du rôle constitutionnel constructif que les provinces ont joué — et, même si elle est loin d’être la seule, la Saskatchewan a joué un rôle important —, c’est, en partie, parce que ce projet de loi a généré des tensions, car certains craignent qu’il s’agisse d’un piège pour les provinces. Je ne crois pas que ce soit le cas. Je pense que, récemment, il y a eu une réticence des diverses parties à engager un dialogue constructif afin de bâtir ensemble un pays meilleur. C’est certes ce que j’observe de la part de certaines des provinces des Prairies, y compris ma propre province.

Il n’y a aucun mécanisme qui permettrait à ce projet de loi de priver les provinces de leurs droits. En fait, il s’agit d’un principe du droit canadien. J’espère que les provinces hésitent à appuyer le projet de loi à cause du climat de tension qui règne et à cause de propos qui ont été tenus, et non parce que les provinces n’ont rien à y gagner. Je pense que c’est ce que démontreront les premières discussions à ce sujet.

Je comprends pourquoi il y a des tensions. Ma province est réticente à appuyer cette mesure législative à cause de sa relation avec le gouvernement du Canada. Je pense que cela est corroboré par certains des témoignages. Toutefois, si nous travaillons ensemble, des occasions fort intéressantes s’offriront à nous. Certains des domaines visés par le projet de loi — l’agriculture, par exemple — sont de compétence partagée. Il semblerait donc logique pour les provinces et le fédéral d’entamer un dialogue pour faire avancer les choses.

L’honorable Pamela Wallin : Sénateur Cotter, je vous remercie de vos commentaires. Vous avez parlé du fait que vous voulez établir une économie durable dans les Prairies. Je crois que nous avons une économie durable dans les Prairies si nous lui permettons de se développer et de tenir compte des besoins locaux.

Pas plus tard que cet été, alors que nous parlions de certaines des préoccupations et de la résistance à ce projet de loi, nous avons entendu le gouvernement fédéral parler de réduire de 30 % l’utilisation des engrais. Le fait est que les agriculteurs sont les meilleurs intendants de la terre. Il est dans leur intérêt de veiller à ce que la terre soit préservée et utilisée judicieusement.

Vous avez parlé du secteur des engrais et de l’industrie de la potasse. Lorsque nous entendons de tels commentaires de la part du gouvernement fédéral, cela nous porte à nous demander si le gouvernement défend les intérêts des provinces des Prairies.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénatrice Wallin, y avait-il une question dans votre intervention?

La sénatrice Wallin : Je viens de la poser.

Le sénateur Cotter : Je pense avoir relevé une question dans cette intervention, sénatrice Wallin. Merci.

Vous avez choisi un très bon exemple. Mon avis sur la question de la réduction des engrais est qu’Ottawa n’en savait pas assez lorsqu’il a présenté cette proposition. Le dialogue permettrait d’améliorer la situation. Des programmes fédéraux sont en élaboration et seront mis en œuvre. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour nous assurer que ces programmes sont adaptés aux besoins réels des agriculteurs, des petites entreprises et de l’industrie des ressources et qu’ils peuvent être déployés.

J’ai peur que personne ne veuille parler à Ottawa, qu’Ottawa fasse quelque chose et qu’ensuite les gens qui ne voulaient pas parler disent : « Vous avez fait la mauvaise chose. » Sans vouloir manquer de respect à qui que ce soit, ce n’est pas la meilleure façon de bâtir un pays. Il faut plutôt qu’Ottawa mène des consultations et que les personnes consultées expriment véritablement leurs points de vue afin que les programmes puissent être construits et adaptés en fonction du meilleur ensemble d’objectifs possible.

Le sénateur D. Patterson : Sénateur Cotter, je pense que vous avez compris que je suis préoccupé par le processus et que je souhaite que cet important projet de loi reçoive l’attention qu’il mérite.

Comme vous le savez, l’Alberta était au milieu d’une course à la chefferie lorsque le projet de loi a été étudié en comité à l’autre endroit, de sorte que le comité n’a pas entendu l’une des trois provinces des Prairies. Je suis sûr que vous suivrez le cheminement du projet de loi et que vous participerez peut-être aux travaux du comité, en tant que parrain. Si une question importante est soulevée au comité, en tant que parrain, êtes-vous prêt à envisager des amendements à ce projet de loi?

Le sénateur Cotter : Je n’ai pas de réponse définitive à cette question. On m’a dit que, en raison du décès de M. Carr, amender le projet de loi créerait de véritables problèmes lors du renvoi à l’autre endroit. Comme vous le savez, quand il s’agit des règles du Sénat et de l’autre endroit, j’ai un handicap de 30 environ. Imaginons que vous me posiez la question suivante : « Sénateur Cotter, êtes-vous ouvert à un amendement qui mettrait en péril le projet de loi? » Je serais très réticent à cet égard.

Ce que je veux dire, c’est que si le projet de loi a des lacunes et que quelqu’un a une idée brillante pour l’améliorer, je suis disposé à l’entendre. Je ne suis pas prêt à prendre un engagement en tant que parrain. Une telle décision ne relèverait pas seulement de moi, comme vous pouvez le comprendre; le comité décidera.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Je souligne en passant que, en raison du décès de Jim Carr, le projet de loi mourra au Feuilleton s’il est amendé. Nous allons donc soit l’adopter, soit le rejeter.

Honorables sénateurs, je prends brièvement la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-235. C’est probablement l’un des discours les plus difficiles que j’ai prononcés au Sénat. Ce n’est pas en raison du sujet, mais parce que je dois prendre la position contraire, du moins en partie, à celle du parrain du projet de loi. En toute honnêteté, je le fais un peu à contrecœur.

Jim Carr était un ami et un collègue. Il venait du Manitoba. Je le connaissais depuis de nombreuses années.

(1620)

Ce projet de loi a été présenté par le regretté Jim Carr en février de cette année et il vient tout juste de terminer son parcours à l’autre endroit. Il me pose quelques difficultés qu’il me faut aborder aujourd’hui.

Avant de poursuivre, chers collègues, je veux profiter de l’occasion pour offrir mes plus sincères condoléances à l’épouse de Jim, Colleen, à sa famille et à ses proches. C’est un moment difficile pour eux. Je sais que je parle au nom de tous les sénateurs lorsque je dis que nos cœurs et nos prières les accompagnent pendant cette période. Je prie pour qu’ils trouvent du réconfort dans les bras de Dieu pendant cette période de deuil.

Jim et moi voyagions ensemble entre Winnipeg et Ottawa, pas toutes les semaines, surtout au cours de la dernière année ou des deux dernières années, lorsque la santé de Jim se détériorait. Il n’était pas sur tous les vols, mais nous avons souvent voyagé ensemble. Nous avions de nombreuses occasions de discuter durant ces vols. J’ai toujours affectionné ces moments et ils me manqueront. Il y a deux semaines à peine, j’étais à bord d’un vol de Winnipeg à Ottawa avec Jim, et nous avons eu une bonne conversation.

Il y a quatre semaines, Jim et moi avons déjeuné ensemble à l’édifice de l’Ouest. C’est Jim qui m’a invité. Le projet de loi C-35 était l’une des choses dont il voulait discuter. Il ne m’a pas demandé d’appuyer cette mesure législative. Il m’a demandé si je pouvais aider à la faire passer à l’étape de l’étude en comité et à la troisième lecture. Il ne m’a pas demandé de voter pour le projet de loi. Il ne m’a pas demandé d’éviter de souligner les lacunes telles que je les voyais. Je lui ai promis de le faire et c’est ce que j’ai l’intention de faire aujourd’hui.

Je me souviendrai toujours de cette rencontre et j’en garderai précieusement le souvenir. Nous avons discuté de plusieurs sujets privés et personnels, y compris de la santé défaillante de Jim. Nous avons aussi parlé des vacances qu’il avait l’intention de prendre avec sa famille pendant les Fêtes. C’est pourquoi la triste nouvelle d’hier a été un choc pour moi. On m’a demandé de ne pas dire que j’allais au Mexique parce que cela a été le sujet de certaines discussions il y a quelques années. Jim devait justement se rendre au Mexique. Nous avons parlé de notre amour commun pour ce pays.

Comme je l’ai dit, je ne me suis pas engagé à appuyer ce projet de loi. Je me suis plutôt engagé à ne pas y faire obstacle et j’ai l’intention de respecter la promesse que j’ai faite à notre collègue. J’ai fait remarquer à Jim que la personne choisie pour parrainer un projet de loi au Sénat avait souvent beaucoup d’influence. Je lui ai demandé qui parrainerait le projet de loi. Il m’a dit que ce serait le sénateur Cotter. Je lui ai dit, sincèrement, qu’il avait fait un choix éclairé.

Honorables collègues, la semaine dernière, avant que nous apprenions le décès de Jim, les leaders du Sénat se sont entendus pour donner priorité à l’étude de ce projet de loi. Je le mentionne, car cela répond, du moins en partie, à quelques questions posées jusqu’ici. C’était une décision appropriée alors, et elle l’est toujours aujourd’hui.

J’ai fait la connaissance de Jim Carr à l’époque où il travaillait en politique provinciale, bien avant qu’il soit élu député fédéral. Nous étions des adversaires politiques, certes, mais je le considérais comme un ami. Je ferais mal mon travail si je ne signalais pas les points faibles que je perçois dans ce projet de loi comme dans tout autre projet de loi. Jim a fait la même chose pendant toute sa vie et il en attendrait autant de chacun de nous. Il s’attendrait à ce que ce projet de loi soit étudié comme il se doit et puisse profiter du second examen objectif qui est caractéristique du Sénat.

Comme le sénateur Cotter l’a indiqué, le projet de loi C-235 vise à amener le gouvernement fédéral à élaborer un cadre de coopération et de mobilisation locales aux fins de la mise en œuvre de programmes fédéraux dans divers secteurs en vue de développer une économie verte dans les provinces des Prairies. Le geste est noble, mais je dirais que cette initiative est inutile et qu’elle n’est pas la bienvenue.

Les trois provinces des Prairies déploient déjà des efforts considérables pour développer une économie verte. Comme c’est souvent le cas, le gouvernement fédéral arrive encore trop tard. Ce n’est pas seulement une observation et une crainte de ma part. C’est aussi ce qui ressort des témoignages entendus au Comité permanent de l’industrie et de la technologie de la Chambre des communes.

Cliff Cullen, ministre du Développement économique, de l’Investissement et du Commerce du Manitoba, a dit ceci au comité :

Le Manitoba n’appuie pas le projet de loi C-235 et considère qu’il s’agit d’une mesure législative inutile qui n’a pas fait l’objet de suffisamment de consultations avec les provinces.

Encore une fois, notons qu’on parle de consultations insuffisantes. Le ministre ajoute ceci :

Le projet de loi n’a pas été présenté en temps opportun et il ne reconnaît pas les progrès réalisés par des provinces, des entrepreneurs et des entreprises en ce qui concerne l’économie verte.

Le Manitoba craint que le projet de loi C-235, s’il est adopté, ne crée une bureaucratie inutile et une approche descendante qui retarderaient la progression de l’économie verte, retarderaient les décisions sur la recherche et le développement et freineraient l’innovation qui est en cours.

L’honorable Bronwyn Eyre, ministre de la Justice et procureure générale de la Saskatchewan, a aussi témoigné. Je la cite :

Ce projet de loi imposerait aux ministres fédéraux l’obligation « d’élaborer un cadre [...] aux fins de la mise en œuvre de programmes fédéraux », ce qui nous semble, en Saskatchewan, un libellé assez descendant et assez définitif, et un exemple de ce que nous appelons ici un « fédéralisme affirmé ».

Cela renvoie vraiment à une autre tendance plus profonde de ce gouvernement, que nous observons encore et encore, qui consiste à s’immiscer dans les articles 92 et 92A et dans la compétence exclusive des provinces sur la propriété, les droits civils et les ressources naturelles.

Quand on lui a demandé si, à son avis, le projet de loi était nécessaire, elle a répondu très clairement ceci :

Je ne pense pas que le projet de loi soit nécessaire. Je pense que nous prenons déjà des mesures concrètes au Canada, dans l’Ouest canadien et en Saskatchewan en matière d’émissions, et j’en ai cité quelques-unes. Les émissions de notre secteur de la potasse sont de 50 % inférieures à celles de toute autre administration au monde. Nous avons des normes environnementales rigoureuses. Nous avons des normes rigoureuses en matière de droits de la personne. Nous avons des normes du travail rigoureuses.

Ces préoccupations ont été partagées par Mme Cathy Heron, présidente d’Alberta Municipalities, quand elle a déclaré ce qui suit :

Il est question dans cette section de la création d’une économie verte dans les provinces des Prairies du Canada. Cela laisse entendre qu’à l’heure actuelle, les provinces des Prairies n’ont pas d’économie verte. [...] Nous sommes déjà bien engagés sur cette voie [...]

En plus de trouver que le projet de loi ne reconnaissait pas les progrès déjà réalisés dans le développement d’une économie verte dans les Prairies, d’autres intervenants ont noté qu’il pourrait en fait nuire à ces efforts. Mme Justine Ness, présidente et chef des opérations de Safety First, une entreprise qui travaille en étroite collaboration avec le secteur de l’énergie, a déclaré ceci :

Je crains que le projet de loi C-235, dans sa forme actuelle, ne nuise encore plus à l’industrie des ressources du Canada et ne prive le monde des valeurs énergétiques dont il a désespérément besoin.

Le projet de loi C-235 semble être une mesure fédérale typique qui va trop loin en essayant de s’imposer sur les trois provinces de l’Ouest.

(1630)

Mme Catherine Brownlee, présidente de l’Alberta Enterprise Group a déclaré la chose suivante :

[...] les entreprises albertaines sont à la fine pointe de l’innovation technologique, de la réduction des émissions et de l’innovation verte. Étant donné que l’Alberta est déjà un chef de file dans ce domaine, cela nous amène à nous demander, en tant que chefs d’entreprise, quel serait l’impact positif d’un autre cadre basé à Ottawa, comme le propose ce projet de loi.

Honorables sénateurs, c’est une plainte courante de la part des provinces. Le gouvernement fédéral a l’habitude de s’immiscer dans les affaires provinciales sans consultation, et ce projet de loi ne fera qu’aggraver la situation.

Lorsque le député Michael Kram de la Saskatchewan a demandé au député Carr s’il avait consulté le premier ministre d’une province ou les ministres provinciaux de la Saskatchewan, le député Carr a admis que non, il ne l’avait pas fait.

Le député Brian Masse a également posé une question dans ce sens :

Hormis la Saskatchewan, avez-vous le soutien d’une province, l’appui explicite d’un premier ministre ou de ministres provinciaux?

La réponse était non. Est-ce qu’il y avait un appui des Premières Nations? Non. Il a demandé s’il y avait des pétitionnaires qui réclamaient ce genre de cadre. La réponse est non.

Au comité, on a demandé à Ray Orb, président de la Saskatchewan Association of Rural Municipalities :

Avez-vous consulté le gouvernement fédéral avant que ce projet de loi ne soit présenté au Comité et à la Chambre des communes?

Il a répondu : « Non [...] nous n’avons eu aucun contact avec M. Carr [...] il ne nous a pas consultés au sujet de ce projet de loi. »

Honorables sénateurs, il semblerait que le plan consiste à adopter le projet de loi qui exige la mise en place d’un cadre et, par la suite, il y aura des consultations, plus tard au cours de la conception du cadre. Cependant, je ferais remarquer deux choses. Premièrement, le projet de loi ne prévoit que 12 mois pour mettre le cadre en place. Ce délai est loin d’être suffisant pour mener des consultations adéquates, surtout lorsqu’on tient compte du fait que les consultations doivent inclure :

[...] les représentants des gouvernements provinciaux responsables des transports, de l’environnement et de l’emploi, des représentants des municipalités, des corps dirigeants autochtones, le secteur privé et les représentants des employeurs et des employés de ce secteur.

De plus, le ministre responsable du développement économique des provinces des Prairies doit collaborer avec six autres ministres, notamment le ministre de l’Environnement, le ministre des Transports, le ministre de l’Industrie, le ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, le ministre des Finances et le ministre des Ressources naturelles. Le défi est de taille. Il est impossible que 12 mois soient suffisants pour permettre ces consultations.

Deuxièmement, promettre de consulter sur le contenu d’un cadre alors qu’il n’existe aucun accord sur l’existence même de ce cadre, c’est mettre la charrue avant les bœufs. Ce n’est pas la façon de développer des initiatives de politique publique de grande envergure, ce que ce cadre produirait s’il était couronné de succès. Chers collègues, c’est le rôle du Sénat de défendre les droits des régions. Je peux vous dire sans équivoque que les régions qui seront directement touchées par le projet de loi ne veulent pas de ce projet de loi et ne l’appuient pas.

L’intention du projet de loi est noble, mais celui-ci est redondant parce que l’écologisation des économies des provinces va déjà bon train, et il va trop loin parce qu’il n’a pas l’assentiment de toutes les provinces sur lesquelles il aura une incidence. Cependant, comme je l’ai dit plus tôt, même si j’ai souligné les nombreuses lacunes du projet de loi, je ne m’opposerai pas à ce qu’il soit renvoyé au comité. En fait, j’appuierai son renvoi au comité, car c’est là que le Sénat fait son meilleur travail. Est-ce que j’aimerais que nous ayons plus de temps? Sans contredit.

C’est le devoir et le rôle du comité et du Sénat d’examiner le projet de loi selon ses mérites. Je suis donc d’accord pour qu’il soit étudié à l’étape de la deuxième lecture et j’ai hâte de participer personnellement à son étude en comité. J’espère que vous êtes du même avis. Merci, honorables sénateurs.

Le sénateur D. Patterson : Sénateur Plett, quand j’ai posé la question qui suit au sénateur Cotter, il a mentionné que cela dépassait ses connaissances, ou peut-être ses compétences. Vous faites vous-même partie des leaders du Sénat et vous nous avez dit que ceux-ci avaient accepté de donner priorité à l’étude de ce projet de loi. Nous le renverrons sans doute au comité aujourd’hui, et j’appuierai ce renvoi.

L’entente concernant la priorité accordée à ce projet de loi prévoit-elle que toutes les étapes — le renvoi au comité, l’étude en comité et la troisième lecture — seront accomplies à toute vitesse, en trois jours seulement, et que tout sera réglé cette semaine avant le congé des Fêtes?

Le sénateur Plett : Je vais devoir répondre à cette question de plusieurs façons différentes, sénateur Patterson. En effet, nous étions d’accord pour accorder la priorité à ce projet de loi ainsi qu’à d’autres projets de loi de la Chambre des communes, comme le mentionne la motion. Nous examinerions tous les projets de loi d’intérêt public des Communes, nous les classerions par ordre de priorité et nous en renverrions trois au comité.

Il n’a pas été prévu que nous nous précipitions. J’espère donc que nous ne nous précipiterons pas. J’espère que nous aurons des réunions de comité approfondies. Cependant, le nombre de jours dont nous disposons est limité. Je suis persuadé que la présidence et le comité directeur du comité auquel ce projet de loi sera renvoyé se mettront très rapidement au travail et feront en sorte que nous ayons deux, trois ou, au besoin, quatre réunions au cours des deux prochains jours pour étudier ce projet de loi. Cela peut sembler un peu irréaliste, mais, sénateur Patterson, d’après ce que j’ai compris, nous avions convenu qu’il y aurait un vote à l’étape de la troisième lecture avant le congé de Noël.

Le sénateur D. Patterson : Sénateur Plett, je vous remercie d’avoir précisé que, en ce qui a trait à cet important projet de loi, qui, comme vous l’avez indiqué, soulève d’importantes questions, on prévoit faire adopter ces mesures à la hâte, si je peux m’exprimer ainsi, en seulement trois jours, en incluant aujourd’hui. Dans votre discours, vous avez dit que vous auriez souhaité avoir plus de temps. Or, nous aurons plus de temps, sénateur Plett, si le comité prend le temps d’entendre des témoins, y compris des témoins de l’Alberta, qui n’ont pas pu participer aux audiences à l’autre endroit. Pourquoi devrions-nous nous presser à toutes les étapes de l’étude de ce projet de loi, y compris à l’étape du comité, et ce, dès cette semaine, avant la pause pour la période des Fêtes?

Le sénateur Plett : Les comités sont maîtres de leurs propres travaux. Je participerai à l’étude au comité; j’y présenterai mon opinion, comme le feront d’autres. Si le comité devait demander plus de temps pour quelque raison que ce soit, il faudrait évidemment y réfléchir. C’est exactement ce que nous avons fait avec le projet de loi C-11, sénateur Patterson. Le processus ne s’est pas déroulé exactement comme le gouvernement l’aurait espéré. Il ne fait aucun doute que j’ai plus de sympathie dans ce cas-ci pour des raisons personnelles.

Nous nous trouvons dans une situation difficile, sénateur Patterson. Je l’ai dit sans ambages au début de mon discours : j’ai donné ma parole à un collègue mourant que je ne ferais pas obstacle à la progression de cette mesure législative. Je ne lui ai pas promis que j’appuierais le projet de loi, mais que je n’y ferais pas obstacle.

À mon avis, nous avons eu des discussions ouvertes et justes à nos rencontres des représentants des différents groupes. J’ai parfois dit qu’il s’agissait de rencontres à huis clos. Je ne l’ai jamais complètement accepté. Je dois donc faire un peu attention à ce que je dirai. Je suis sûr que vous en avez parlé avec le leader de votre caucus. Il a participé à ces rencontres, tout comme moi, la sénatrice Cordy, la sénatrice Saint-Germain et le sénateur Gold. Les chefs du personnel étaient aussi présents. Il y avait beaucoup de monde. Il y a donc beaucoup de gens qui pourront me corriger si ce que je dis est faux. Je croyais que nous nous étions tous entendus pour faire exactement ce que nous faisons maintenant.

(1640)

On pourrait parler de précipitation. Ce ne serait certes pas la première fois qu’un comité n’a pas autant de temps qu’il le voudrait pour se réunir, mais nous verrons ce qui va se passer. Je crois fermement, sénateur Patterson, que les provinces sont également maîtresses de leurs affaires. Franchement, si les trois provinces des Prairies unissent leurs efforts pour s’opposer au projet de loi, je ne m’attends pas à ce que ce dernier aboutisse.

Sauf le respect que je dois à mes collègues, je pense que si quelqu’un imposait des mesures à l’Ontario ou au Québec, la situation serait gérée un peu différemment que lorsqu’on impose quelque chose aux provinces de l’Ouest.

Cela étant dit, le député Carr était un fier d’être Manitobain, et ce projet de loi vient du Manitoba. Il n’a pas été présenté par le gouvernement fédéral, même s’il a mis son poids derrière lui en fin de compte. C’est un projet de loi venant du Manitoba.

[Français]

L’honorable Lucie Moncion : Est-ce que le sénateur Plett accepterait de répondre à une question?

Le sénateur Plett : Oui.

La sénatrice Moncion : Je vais vous la poser en français, si vous le permettez. Le projet de loi a été présenté à la Chambre des communes le 7 février 2022. On vient de le recevoir et on a deux jours pour l’étudier. Au cours de la dernière semaine, on a limité énormément les travaux des différents comités. Pourriez-vous nous dire pourquoi? À la lumière des commentaires que vous avez faits dans votre critique du projet de loi, qui sont très pertinents, malgré le fait qu’il y ait une entente entre les leaders, pourquoi le Sénat ne pourrait-il pas prendre le temps nécessaire pour bien étudier ce projet de loi?

[Traduction]

Le sénateur Plett : Je dirai ceci : les décisions ont, bien sûr, été prises alors que M. Carr était toujours en vie. Nous savions à quel point il était malade. Jim Carr tenait mordicus à voir ce projet de loi adopté avant son décès. Cela ne s’est pas produit.

Le premier ministre a usé de son poids pour en accélérer l’étude. C’est l’une des raisons. Je crois que l’appui du gouvernement n’est pas passé inaperçu puisqu’il a modifié l’ordre des affaires dont devait traiter le Sénat et retardé l’étude des affaires du gouvernement pour faire passer ce projet de loi en priorité. Je n’accuse personne, mais je crois que nous sommes tous des adultes capables de lire entre les lignes et de déduire ce qui s’est produit.

Pour ce qui est de la précipitation entourant l’adoption du projet de loi, je peux vous dire, sénatrice Moncion, que j’ai l’intention de voter contre le projet de loi, ou peut-être de permettre son adoption avec dissidence. D’après la compréhension que j’ai du projet de loi, je n’ai pas l’intention de l’appuyer. Je prévois poser des questions au comité. Je crois que quatre heures suffiraient au comité pour étudier le projet de loi — il y a les témoignages donnés à l’autre endroit que nous pouvons aussi étudier. Ce ne serait pas la première fois qu’un comité du Sénat étudie des mesures législatives très importantes en quatre ou six heures. Il ne s’agit pas d’un projet de loi volumineux. Ce n’est pas comme le projet de loi C-11. Il s’agit d’un projet de loi assez simple, si on veut, et je ne suis pas certain qu’il serait utile de tenir deux réunions de deux heures à son sujet pour arriver à quatre heures. Une fois le projet de loi renvoyé au comité, j’imagine que nous serons en mesure d’établir la marche à suivre.

[Français]

L’honorable Renée Dupuis : Est-ce que le sénateur Plett accepterait de répondre à une autre question?

Le sénateur Plett : Oui.

La sénatrice Dupuis : Sénateur Plett, je voudrais vérifier la compréhension que vous avez du projet de loi. Si je comprends bien le texte de loi, on confie à un ministre fédéral le soin d’élaborer, avec d’autres ministres fédéraux, un cadre, et je cite le paragraphe 3(1) du projet de loi :

[...] visant à coordonner la coopération et la mobilisation locales aux fins de la mise en œuvre de programmes fédéraux dans divers secteurs en vue de développer une économie verte dans les provinces des Prairies.

Selon vous, est-ce que le projet de loi vise uniquement la coordination et la coopération pour la mise en œuvre de programmes fédéraux? On ne parle pas d’obtenir l’accord des provinces, mais d’un travail confié à un ministre fédéral, en collaboration avec d’autres ministres fédéraux, pour que ces ministres élaborent un cadre permettant de « coordonner la coopération et la mobilisation locales aux fins de la mise en œuvre de programmes fédéraux ». Est-ce que cela correspond à votre compréhension du projet de loi C-235?

[Traduction]

Le sénateur Plett : Non, sénatrice Dupuis, je pense que vous avez assez bien compris le projet de loi. Il est clairement question que le gouvernement fédéral participe à l’élaboration d’un plan vert pour les Prairies.

Les provinces des Prairies affirment que c’est déjà ce qu’elles font et qu’elles le font beaucoup mieux que le pourrait le gouvernement fédéral. Le Québec affirme souvent qu’il est plus à même de gérer ses programmes que le gouvernement fédéral ne peut le faire.

À mon avis, c’est de cela qu’il est question. Il ne s’agit pas de savoir si c’est un objectif louable, car c’est probablement le cas. Les provinces affirment qu’elles ont déjà commencé à mettre en œuvre leurs plans et qu’elles n’ont pas besoin de l’ingérence d’un organe du gouvernement fédéral. Elles affirment qu’elles sont en mesure de se gouverner dans ce domaine, et que c’est ce qu’elles souhaitent. Elles ne veulent pas que le gouvernement fédéral vienne se mêler de leurs affaires. Elles ne veulent pas de cette emprise paternaliste du gouvernement fédéral.

En fait, il n’est pas question ici d’une divergence d’opinions sur ce qui devrait être fait dans les provinces des Prairies. Il s’agit plutôt d’une divergence d’opinions dans le sens où, en tant que Manitobain, je ne tiens pas à ce que le gouvernement fédéral — par le biais de quelque organe que ce soit —, vienne nous dire quoi faire dans un domaine que les Manitobains sont, à mon avis, mieux à même de gérer eux-mêmes.

L’honorable Patricia Bovey : Sénateur Plett, en tant que Manitobaine, puis-je poser à mon compatriote une question semblable à celle de la sénatrice Dupuis?

Je crois que nous essayons d’établir une économie verte dans le but ultime d’assurer l’avenir de la planète. Oui, ce projet de loi vise à consulter ma région, l’Ouest canadien, et à donner au ministre responsable de Développement économique Canada pour les Prairies un mandat et un cadre pour consulter les Premières Nations, les Métis et les municipalités des provinces, ainsi que les entreprises et la société civile — et non pour leur dire quoi faire — pour apporter les changements dont nous avons besoin afin d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050. Si c’est le cas et si nos provinces ont une longueur d’avance sur les autres, n’avons-nous pas la responsabilité de partager cette information afin de mettre en place un cadre national?

Il se trouve que je crois qu’il s’agit d’un objectif louable pour l’avenir de l’Ouest. J’aimerais savoir si vous êtes d’accord avec moi pour dire que cet objectif est louable et que la consultation et l’élaboration d’un cadre ne signifient pas nécessairement que le gouvernement fédéral dira aux régions ce qu’elles doivent faire. Peut-être est-ce plutôt les régions qui informeront le gouvernement fédéral de ce qu’elles doivent faire.

Le sénateur Plett : Eh bien, sans conteste, j’aimerais dire au gouvernement ce qu’il doit faire — il ne m’écoute tout simplement pas.

Sénatrice Bovey, vous pourriez bien avoir raison. Je ne pense pas qu’il s’agisse d’un programme national lorsque vous choisissez trois provinces et que vous intitulez le projet de loi « Loi concernant le développement d’une économie verte dans les Prairies ». Une loi concernant le développement d’une économie verte au Canada s’inscrirait dans un programme national. Alors pourquoi ne le faisons-nous pas? Ce serait alors un projet fédéral.

Ils demandent de dialoguer avec les Manitobains, les Saskatchewanais et les Albertains pour les aider à développer une économie verte alors que l’exploitation du gaz par l’Alberta, par exemple, et l’exploitation de la potasse par la Saskatchewan sont les plus vertes du monde. Ce n’est pas une réalisation du gouvernement fédéral. C’en est une de la province de la Saskatchewan.

(1650)

La sénatrice Bovey : Je ne suis pas du tout contre ce que vous avez dit. La Saskatchewan et l’Alberta ont fait de grands pas dans ces aspects du travail. Toutefois, nous sommes une nation formée de régions, et chaque région va approcher l’énergie verte d’un point de vue différent en fonction de ce qu’elle fait, de sa situation géographique, de son climat, etc.

Je ne comprends pas pourquoi le projet de loi présenté par l’honorable Jim Carr ne permet pas une telle discussion. À mon avis, notre région forme une partie très importante de notre nation. Si nous faisons certaines choses mieux que dans d’autres régions du pays en raison de notre situation géographique, alors tant mieux. Peut-être que nous pourrions tous pousser les choses un peu plus loin. Lorsque nos enfants et nos petits-enfants — n’est-ce pas? — construisent un édifice avec des briques LEGO, ils doivent avoir toutes les pièces pour terminer cet édifice. À mon avis, ce projet de loi est une des pièces de cet édifice.

Le sénateur Plett : Je vous remercie, sénatrice Bovey. Je ne m’oppose pas à ce que le gouvernement fédéral demande à la Saskatchewan, au Manitoba et à l’Alberta ce qu’il peut faire pour les aider. Ce n’est toutefois pas ce qu’il fait. Il n’a pas besoin d’un projet de loi pour leur offrir de l’aide et des conseils. Il peut simplement les offrir.

Les premiers ministres provinciaux supplient depuis un certain temps le premier ministre d’assister à une rencontre des premiers ministres consacrée à la santé. Malgré leurs supplications, il n’a toujours pas accepté. Si le premier ministre souhaite appuyer ce projet de loi, pourquoi ne va-t-il pas au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta pour rencontrer les trois premiers ministres et leur demander ce qu’il peut faire pour les aider, au lieu de dire « Voici ce que je vais faire. » Voilà où est la différence, sénatrice Bovey.

Dans le cas dont nous discutons, il s’agit du député Carr. Je le dis respectueusement, car il avait tout à fait le droit de présenter un projet de loi d’initiative parlementaire. Je trouve problématique que le premier ministre appuie cette mesure, mais ce n’est pas la première fois qu’un premier ministre appuie des projets de loi d’initiative parlementaire et ce ne sera probablement pas la dernière. Il y a un problème quand on a l’impression que le gouvernement fédéral tente de nous dire quoi faire, alors que nous le savons bien mieux que lui.

La sénatrice McCallum : Le sénateur accepterait-il de répondre à une autre question?

Le sénateur Plett : Certainement.

La sénatrice McCallum : Les Premières Nations sont aussi maîtres de leurs propres travaux. Comment va-t-on informer les dirigeants des Premières Nations et ceux qui défendent les intérêts des Premières Nations afin qu’ils puissent être présents, et comment le comité veillera-t-il à pouvoir entendre l’avis des peuples autochtones?

Le sénateur Plett : Je vous remercie de la question, sénatrice McCallum. Quel que soit le comité auquel ce projet de loi sera renvoyé, qu’il s’agisse du Comité de l’agriculture et des forêts ou du Comité de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles, je ne fais pas partie du comité directeur, et ce sera à lui de déterminer quels témoins seront entendus.

Sénatrice McCallum, je pense que vous pourrez reconnaître que, dans les derniers mois, j’ai appelé le gouvernement fédéral à mieux consulter les communautés autochtones à l’égard de certains projets de loi, notamment en ce qui a trait au projet de loi C-11. Je vais donc continuer de le faire. Pour ce qui est de savoir comment le comité traitera de cette question, je suis désolé, mais je ne peux pas fournir de réponse avant que le projet de loi soit renvoyé à un comité et que nous voyions sa liste de témoins, car je n’ai vu aucune information à ce sujet.

Le sénateur D. Patterson : Sénateur Plett, merci d’avoir exprimé votre appui à l’égard du principe selon lequel les comités sénatoriaux sont maîtres de leur propre destinée, un principe que j’appuie sans réserve, car il s’agit d’un élément distinctif des travaux du Sénat.

Vous avez mentionné que le premier ministre avait usé de son poids pour accélérer l’adoption du projet de loi. J’aimerais vous demander, vu la séparation des pouvoirs entre les pouvoirs judiciaire, exécutif et législatif — un principe fondamental de notre système de style Westminster —, croyez-vous qu’il soit approprié que le délai de la troisième lecture d’un projet de loi, y compris celui-ci, soit déterminé par des membres du pouvoir exécutif, des ministres ou même le premier ministre?

Le sénateur Plett : Je répondrai deux choses. Premièrement, l’autre endroit utilise fréquemment l’attribution de temps, donc manifestement, cela se fait. Cela se produit constamment. Cela se fait depuis 150 ans, sénateur Patterson.

Nous n’avons pas eu recours à l’attribution de temps; nous avons eu des négociations. Cela s’est fait non pas par le pouvoir exécutif, mais par cinq leaders élus par leur caucus respectif. Ils ont convenu des délais. Selon moi, la décision était unanime.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Cotter, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts.)

Projet de loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2022

Deuxième lecture—Débat

L’honorable Tony Loffreda propose que le projet de loi C-32, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 3 novembre 2022 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022, soit lu pour la deuxième fois.

 — Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi C-32, Loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2022. C’est un honneur pour moi de parrainer cette importante mesure législative qui prévoit des mesures annoncées dans l’énoncé économique de l’automne présenté le 3 novembre, ainsi que d’autres mesures déjà annoncées dans le budget de 2022.

[Français]

Avant d’aborder certaines des mesures importantes du projet de loi, j’aimerais commencer par faire quelques remerciements.

Tout d’abord, je tiens à remercier le sénateur Gold et la ministre Freeland de la confiance qu’ils m’ont accordée en me permettant d’agir à titre de parrain de ce projet de loi au Sénat. Je les remercie également de tout le soutien qu’ils m’ont apporté, ainsi qu’à mon bureau.

Deuxièmement, je dis un grand merci à nos collègues qui siègent au Comité sénatorial permanent des finances nationales, présidé avec brio par la « sensation de Saint-Léonard », le sénateur Mockler. Nous avons commencé notre étude préalable du projet de loi C-32 le 22 novembre, et, depuis, nous avons tenu huit réunions et reçu plus d’une cinquantaine de témoins et une dizaine de soumissions écrites. Nous avons siégé pendant près de 15 heures.

Troisièmement, je remercie le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones de son évaluation de la section 3 de la partie 4 du projet de loi C-32, dont je parlerai brièvement aujourd’hui. J’ai l’intention d’accorder une plus grande place à cette section lors de mon discours à l’étape de la troisième lecture.

[Traduction]

Comme tous les sénateurs le savent, le projet de loi C-32 comporte 172 pages, 4 parties et 29 mesures distinctes. Je vais les parcourir toutes aujourd’hui. Je plaisante, bien entendu.

Les 21 premières mesures se trouvent dans la partie 1 et elles apportent des modifications à la Loi de l’impôt sur le revenu. Le projet de loi contient de nombreuses bonnes mesures qui aideront les familles et les Canadiens à surmonter l’augmentation du coût de la vie. Les autres mesures sont surtout de nature technique ou corrélative.

Pour le bien et la santé de tous, je ne vais pas aborder chaque mesure du projet de loi. Après tout, je ne dispose que de 45 minutes. C’est dans ces moments-là que j’aimerais être le leader de l’opposition pour disposer d’un temps de parole illimité.

Je vais plutôt concentrer mes observations sur ce que je considère comme des mesures clés du projet de loi C-32, qui ont le plus grand potentiel pour aider les Canadiens à surmonter la tempête inflationniste que nous traversons actuellement, surtout au moment où nous apprenons à vivre avec la COVID-19.

(1700)

Je terminerai mon intervention en vous livrant quelques réflexions sur l’économie et l’inflation en général.

Le rêve de l’accession à la propriété devient de plus en plus inabordable pour un trop grand nombre de jeunes familles et de Canadiens de la classe moyenne. C’est pourquoi le projet de loi C-32 contient une série de mesures visant à favoriser l’accession à la propriété. Ces mesures comprennent la règle contre la revente précipitée, le nouveau compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété, le crédit d’impôt pour l’achat d’une première habitation et le crédit d’impôt pour la rénovation d’habitations multigénérationnelles.

La nouvelle règle contre la revente précipitée permettra de faire en sorte que les bénéfices tirés de la vente de maisons soient imposés comme un revenu d’entreprise si le vendeur a détenu la propriété pendant moins de 12 mois. Des exceptions s’appliqueront aux personnes qui vendent leur maison en raison de certaines circonstances de la vie, comme un décès, une invalidité, un divorce ou un nouvel emploi, par exemple. Ainsi, les investisseurs qui transforment des maisons dans le seul but de réaliser un profit paieront leur juste part, ce qui contribuera à réduire le prix des logements pour les Canadiens qui veulent acheter une propriété pour y vivre. Le gouvernement s’attend à ce que cette mesure touche environ 3 300 contribuables par an et augmente ses recettes fiscales d’environ 15 millions de dollars par an.

Au moyen du nouveau compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première maison, le gouvernement veut aider les Canadiens qui peinent à amasser la mise de fonds nécessaire et les inciter à épargner pour l’achat d’une maison en donnant aux éventuels premiers acheteurs la possibilité de verser jusqu’à 8 000 $ par année dans ce compte libre d’impôt, jusqu’à un maximum de 40 000 $. Le gouvernement travaille avec l’Agence du revenu du Canada et avec les institutions financières à développer les systèmes nécessaires à l’administration de ce nouveau compte. Peu importe quand ce programme sera prêt en 2023, les Canadiens pourront déjà verser le montant annuel maximal de 8 000 $.

Dans le budget de 2022, le gouvernement propose également de doubler le crédit d’impôt pour l’achat d’une première habitation, le faisant passer de 5 000 $ à 10 000 $. La mesure j) dans le projet de loi C-32 a pour objet de mettre en œuvre cette promesse, qui devrait coûter au gouvernement environ 775 millions de dollars sur six ans et qui profitera à environ 200 000 personnes par année.

En réponse à une question du sénateur Boehm au sujet de ce crédit d’impôt, les fonctionnaires nous ont dit que le crédit était à taux uniforme, plutôt qu’un crédit ajusté en fonction des différences régionales, parce qu’il sera ainsi plus facile pour l’Agence du revenu du Canada de l’administrer. Au bout du compte, il s’agissait d’une décision stratégique du gouvernement.

La mesure l), le crédit d’impôt pour l’achat d’une première habitation, a également été annoncée pour la première fois dans le budget de 2022. Elle vise à instaurer un crédit d’impôt remboursable pour les dépenses admissibles engagées afin de créer un logement secondaire pour permettre à une personne admissible, soit un aîné ou un adulte handicapé, de vivre avec un proche admissible. La valeur du crédit s’élèverait à 15 % du montant le moins élevé entre les dépenses admissibles et 50 000 $, jusqu’à concurrence de 7 500 $. Ce crédit d’impôt s’applique à un logement secondaire ou à un logement autonome avec une entrée privée.

En ce qui concerne les rénovations et les transformations des logements, les particuliers ont accès au crédit d’impôt pour l’accessibilité domiciliaire.

Bien que cela ne touche pas directement à l’abordabilité du logement, je m’en voudrais de ne pas parler de la décision du gouvernement d’aider les étudiants en incluant dans le projet de loi C-32 une mesure qui élimine de façon permanente les intérêts courus sur les prêts aux étudiants et les prêts canadiens aux apprentis.

À partir de 2023-2024, environ 1,2 million d’emprunteurs par an tireront profit de cette mesure. Parmi les bénéficiaires des prêts aux étudiants en 2020-2021, environ 61 % étaient des femmes, 6 % étaient des étudiants autochtones et 5 % avaient une invalidité permanente. Grâce à cette mesure, l’emprunteur moyen économisera environ 410 $ par année en intérêts. Il s’agit d’un investissement de 2,7 milliards de dollars sur les cinq prochaines années et de 556,3 millions de dollars par année par la suite.

[Français]

Je tiens à préciser que le gouvernement a tenu compte également du fait que le Québec, tout comme les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut, gère ses propres programmes de prêts. Cela dit, le gouvernement a prévu d’allouer les fonds nécessaires à ces trois juridictions pour que cette mesure puisse être offerte à leurs nouveaux diplômés.

Je mentionne cette mesure qui s’adresse aux étudiants dans le cadre de mes commentaires sur l’abordabilité du logement, parce que je pense qu’elle peut également aider les nouveaux diplômés ou les personnes de métier, lorsqu’ils entrent sur le marché du travail, à mettre un peu plus d’argent de côté pour l’achat de leur future maison en profitant du nouveau compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété.

Toutes ces mesures qui apparaissent dans le projet de loi ne régleront pas la crise du logement au Canada, mais elles devraient contribuer à favoriser l’accession à la propriété. Comme l’a dit également l’Association canadienne de l’immeuble, nous devons avant tout nous concentrer sur l’augmentation de l’offre de logements et sur l’innovation en matière de logement.

[Traduction]

Comme je l’ai mentionné plus tôt, le projet de loi C-32 comprend 21 mesures qui apportent des modifications à la Loi de l’impôt sur le revenu. Quatre d’entre elles sont directement liées à l’abordabilité du logement.

Maintenant, j’aimerais que nous portions notre attention sur cinq autres mesures qui modifieront la Loi de l’impôt sur le revenu.

Premièrement, au moyen de la mesure d), le gouvernement introduit un nouveau crédit d’impôt pour l’exploration de minéraux critiques de 30 % applicable à certains minéraux afin de soutenir la transition verte et les technologies propres. Ces minéraux servent à la production de batteries et d’aimants permanents qui, dans les deux cas, sont utilisés dans les véhicules zéro émission. Le coût prévu de cette mesure est d’environ 360 millions de dollars au cours des six prochaines années.

Le Canada peut et doit jouer un rôle majeur dans la chaîne d’approvisionnement mondiale de ces minéraux critiques. Cette idée a été réaffirmée la semaine dernière lorsque le gouvernement a publié la Stratégie canadienne sur les minéraux critiques, qu’il a reconnu que « des régimes de réglementation prévisibles et efficaces sont une condition préalable à la compétitivité économique du Canada » et qu’il a déclaré qu’il « s’efforce de simplifier les évaluations des projets et les permis ». Il s’agit d’une autre bonne nouvelle pour l’industrie minière, que je salue certainement.

On nous a dit en comité que Ressources naturelles Canada avait contribué à dresser la liste des 15 minéraux admissibles au crédit d’impôt. Au comité, la sénatrice Duncan a exprimé son soutien à cette mesure.

En réponse à sa question sur les conséquences imprévues de cette mesure et les préjugés régionaux, on nous a rappelé qu’il ne s’agit pas d’une mesure de développement régional. En ma qualité d’ancien banquier, je ne surprendrai personne en affirmant que les mesures e) et f) ont suscité de multiples commentaires de la part de mes anciens collègues du secteur bancaire.

La première mesure, le dividende pour la relance au Canada, propose un impôt ponctuel de 15 % pour les banques et les compagnies d’assurance-vie. La taxe est payable sur la moyenne des revenus imposables pour les exercices 2020 et 2021. Une exemption de 1 milliard de dollars est prévue et serait divisée entre les membres d’un groupe donné. Les banques et les compagnies d’assurance ont jusqu’à cinq ans pour payer cet impôt, à compter de 2022. Pour justifier cette mesure, le gouvernement a expliqué que les principales institutions financières du Canada ont engrangé des profits considérables depuis le début de la pandémie et qu’elles se sont relevées plus rapidement que les autres secteurs de notre économie — ce qui est en partie attribuable à l’aide versée aux citoyens et aux entreprises par le gouvernement fédéral, atténuant ainsi les risques pour leurs bilans.

Le gouvernement a aussi créé un impôt permanent additionnel de 1,5 % sur les revenus imposables des banques et des compagnies d’assurance-vie qui dépassent 100 millions de dollars. Cette mesure a été initialement présentée dans le budget de 2022.

Quand les représentants de l’Association des banquiers canadiens ont témoigné devant notre comité le 6 décembre, ils ont affirmé qu’un « système fiscal efficace est un système neutre » et que celui‑ci doit :

[…] stimuler la croissance et l’innovation en laissant les investisseurs, les épargnants et les employés faire leurs propres choix selon les possibilités qui leur permettent d’obtenir le meilleur rendement pour leur capital, leur travail ou leur savoir plutôt que selon des considérations fiscales.

Même si je respecte l’opinion de l’Association des banquiers canadiens et que je suis d’accord en principe, je crois aussi que nos banques, le fondement de notre économie, ont été rentables pendant la pandémie et qu’elles peuvent se permettre de contribuer de façon plus large à la reprise, à la condition, bien entendu, que cette nouvelle taxe sur les banques ne soit pas refilée à la clientèle. Aux dires du gouvernement, ensemble, ces deux mesures devraient permettre de recueillir environ 6,3 milliards de dollars au cours des six prochaines années.

Troisièmement, le gouvernement propose d’exiger que certaines fiducies fournissent chaque année des renseignements additionnels à l’Agence du revenu du Canada. Cette mesure a été annoncée pour la première fois dans le budget de 2018.

Depuis, le gouvernement a mené de vastes consultations et propose maintenant cette modification, qui vise à aider l’Agence du revenu du Canada à obtenir suffisamment d’information pour déterminer la dette fiscale des contribuables et contrer efficacement l’évitement fiscal abusif ainsi que l’évasion fiscale, le blanchiment d’argent et d’autres activités criminelles.

Cette mesure a soulevé des préoccupations concernant le secret professionnel de l’avocat de la part de l’Association du Barreau canadien et de la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada, et ce malgré l’énoncé concernant la Charte émis par le ministre de la Justice. Lorsque la ministre Freeland a comparu devant notre comité, la semaine dernière, je lui ai demandé de nous rassurer concernant le fait que cette mesure est constitutionnelle et qu’aucun amendement ne sera nécessaire pour répondre à ces préoccupations. Elle a répondu être « persuadée » que la mesure est constitutionnelle. Elle a aussi dit :

Nous croyons que nous sommes parvenus au bon équilibre. Nous avons confiance dans le fait que cette mesure n’exige pas la divulgation de renseignements protégés par le secret professionnel de l’avocat.

Je serai heureux de répondre à des questions à ce sujet plus tard, mais je tiens à mentionner que je vais en parler plus en détail dans mon discours à l’étape de la troisième lecture, jeudi, à condition que le projet de loi soit adopté demain matin par le Comité permanent des finances nationales.

La quatrième mesure liée à l’impôt sur le revenu dont je veux parler concerne le changement apporté au taux d’imposition préférentiel pour les petites entreprises, offert dans le cadre de la déduction accordée aux petites entreprises. Le budget de 2022 propose d’éliminer plus progressivement l’accès à la déduction pour petites entreprises, l’accès devant être entièrement éliminé lorsque le capital imposable combiné utilisé au Canada d’une société privée sous contrôle canadien et de ses sociétés associées atteint 50 millions de dollars plutôt que le seuil actuel de 15 millions de dollars. Le coût de cette mesure pour les recettes publiques devrait être de 835 millions de dollars de 2022-2023 à 2027-2028. Elle permettrait aux entreprises de disposer de plus de capitaux pour innover, accroître la productivité, embaucher plus de personnel ou augmenter les salaires.

(1710)

Cette mesure a été accueillie favorablement par la Chambre de commerce du Canada et la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante qui ont comparu devant le comité le 29 novembre. Dan Kelly, le président et chef de direction de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante a déclaré au comité que « Deux petites entreprises canadiennes sur trois ont toujours des dettes supplémentaires liées à la COVID, des dettes qu’elles n’avaient pas avant la pandémie [...] » Cela représente 110 000 $ en moyenne. Nous avons également appris que 17 % des petites entreprises risquent de fermer définitivement leurs portes en raison des dommages qu’elles ont subis au cours des deux dernières années. Heureusement et avec un peu de chance, quelque 8 000 entreprises devraient bénéficier du taux d’imposition préférentiel, et ce nombre devrait augmenter avec le temps. L’Institut C.D. Howe soutient également cette mesure et estime qu’elle favorisera la croissance des entreprises.

La cinquième et dernière mesure que je souhaite aborder est l’augmentation du contingent des versements pour les organismes de bienfaisance, qui passera de 3,5 % à 5 % pour les actifs d’investissements excédant 1 million de dollars. En fonction des données disponibles, environ 4 000 organismes de bienfaisance ont rapporté détenir des biens de plus de 1 million de dollars qui ne sont pas utilisés pour des activités de bienfaisance. Je me réjouis certes de ce changement. Les sénateurs se souviendront peut-être que, le printemps dernier, j’ai soulevé cette question ici, auprès du sénateur Gold, et que j’ai réclamé une telle augmentation. On s’attend à ce que ce nouveau taux augmente les dépenses dans le cadre des programmes de bienfaisance et permette de mieux assurer le versement ponctuel des fonds assortis d’une aide fiscale à des fins caritatives, tout en permettant la croissance raisonnable des actifs.

M. Bruce MacDonald, président et chef de la direction d’Imagine Canada, a dit ceci à notre comité.

Augmenter le contingent des versements pourrait permettre de verser plus de fonds aux collectivités mal desservies et aux collectivités sous-financées qui, jusqu’ici, ont reçu bien moins de fonds de la part des fondations philanthropiques.

Il nous a aussi rappelé que les actifs totaux des fondations avaient « […] triplé de 2008 à 2019, passant de 39,5 à 116 milliards de dollars canadiens. » Il a ajouté ceci :

Même les estimations les plus prudentes montrent qu’approximativement 200 millions de dollars en nouvelles dépenses seront versés quand le contingent des versements passera à 5 %.

Au comité, quand j’ai demandé aux fonctionnaires pourquoi on n’augmentait pas encore plus ce contingent, on m’a répondu ce qui suit :

[…] faire passer le contingent à 7 ou à 10 % augmente les dépenses à court terme, mais pourrait nuire à la capacité des fondations de financer des programmes de bienfaisance à long terme.

On nous a aussi rappelé que les fondations recevaient des intérêts et des revenus de placement à la hauteur d’environ 5 % annuellement, et que ce nombre atteint 7 % lorsque le total des gains réalisés sur les investissements est inclus.

Même si j’avais souhaité une augmentation plus grande initialement, je pense que 5 % est une hausse satisfaisante en fonction des explications fournies au comité. C’est aussi le taux des États-Unis. Il sera important de surveiller les retombées de cette mesure sur le secteur. Je ne doute pas que la sénatrice Omidvar, qui est une ardente défenseure du secteur des organismes de bienfaisance, comme nous le savons tous, salue ce changement. De plus, il ne pourrait mieux tomber étant donné que les Canadiens comptent de plus en plus sur les organismes de bienfaisance pour répondre à leurs besoins de base comme se nourrir, se vêtir et se loger. Un sondage Ipsos du mois dernier a montré que 22 % des Canadiens prévoient avoir recours à des services caritatifs, soit une hausse de 8 % par rapport à un sondage semblable de janvier.

Ce n’était qu’un aperçu de cinq des mesures contenues dans la partie 1 du projet de loi qui modifierait la Loi de l’impôt sur le revenu. À mon avis, elles faisaient partie des modifications les plus importantes du projet de loi. Je vais mentionner rapidement les autres mesures dans cette partie, y compris l’élimination progressive des actions accréditives pour les activités pétrolières, gazières et du charbon, différentes mesures contre l’évitement fiscal, les coupons d’intérêts détachés et le soutien aux investissements des entreprises dans les thermopompes à air.

Je suis favorable aux modifications à la Loi de l’impôt sur le revenu qui sont proposées dans le projet de loi C-32, mais je tiens aussi à préciser que le régime fiscal du Canada est devenu de plus en plus complexe et tortueux. La plus récente version de la loi fait 3 356 pages. Comme le Comité des finances nationales l’a indiqué en juin dernier, les modifications très techniques rendent l’ensemble de la Loi de l’impôt sur le revenu encore plus complexe, de telle sorte qu’il est extrêmement difficile pour les Canadiens, y compris les fiscalistes, de comprendre comment ces changements les affecteront. Cela vaut aussi pour les changements proposés dans le projet de loi C-32.

Comme nous l’avons dit à ce moment-là, nous sommes préoccupés par l’absence d’examen approfondi à l’égard de l’ensemble des dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu. J’aimerais vous fournir des exemples, honorables collègues. En novembre 2017, la Loi de l’impôt sur le revenu faisait 3 129 pages. Seulement cinq ans plus tard, ce nombre a augmenté de plus de 200 pages. La première loi relative à l’impôt sur le revenu, soit la Loi de l’impôt de guerre sur le revenu, promulguée en 1917, ne contenait que 11 pages et devait être une loi temporaire. La Loi de l’impôt sur le revenu telle que nous la connaissons aujourd’hui a été promulguée par le Parlement en 1944 et fait toujours partie de nos vies depuis ce temps. Elle comptait alors 88 pages, mais, 75 ans plus tard, elle faisait plus de 3 000 pages; certains pourraient dire que c’était le bon vieux temps.

[Français]

De nombreuses mesures du projet de loi C-32 visent à stimuler l’économie et à y injecter des capitaux, alors que nous nous remettons de la pandémie, que nous nous dirigeons vers une économie à plus faibles émissions de carbone et que nous sommes en concurrence pour attirer des investissements indispensables.

L’une des pièces maîtresses du projet de loi est le futur Fonds de croissance du Canada, qui figure à la section 1 de la partie 4. La prospérité économique du Canada repose traditionnellement sur les ressources naturelles. Une transformation importante de la base industrielle est nécessaire pour que le pays atteigne ses objectifs climatiques et pour assurer aux Canadiens une prospérité à long terme.

Annoncé dans le budget de 2022, le Fonds de croissance du Canada attirera des investissements substantiels du secteur privé dans des entreprises et des projets canadiens pour aider à transformer l’économie canadienne et pour profiter des occasions offertes par la carboneutralité. Ceci contribuera à réduire les émissions de gaz à effet de serre du Canada et à créer de bons emplois ici, au pays.

[Traduction]

Cette mesure du projet de loi C-32 autorise la ministre des Finances à acquérir, jusqu’à concurrence de 2 milliards de dollars, des actions sans droit de vote d’une nouvelle société d’État constituée en société pour administrer le Fonds de croissance du Canada, et à demander à ce que les sommes nécessaires pour l’acquisition soient prélevées sur le Trésor. Ce montant servira à la capitalisation initiale du Fonds de croissance du Canada pour lui permettre de faire les investissements initiaux et d’assumer les coûts de démarrage.

On a beaucoup parlé de cette mesure, et le fonds suscite une certaine incertitude et un certain malaise, et c’est pourquoi j’aimerais prendre quelques instants pour donner un peu plus de contexte. Le fonds est censé être un nouveau fonds d’investissement indépendant appartenant au gouvernement, et il n’a pas encore été constitué en société. Les 2 milliards de dollars initiaux prévus par le projet de loi C-32 seront affectés au fonds et aideront à le constituer en filiale à part entière de la Corporation de développement des investissements du Canada. Nous nous attendons à ce que cela se concrétise le plus rapidement possible et que le fonds commence à faire et à attirer des investissements sous peu.

Des fonctionnaires qui ont comparu devant notre comité ont expliqué que le Fonds de croissance du Canada avait été annoncé en réponse à la loi américaine sur la réduction de l’inflation, afin d’aider le Canada à être compétitif sur le plan international en matière d’immobilisations. La ministre Freeland a également insisté sur ce point lorsqu’elle a comparu devant le comité, ce qui explique pourquoi le gouvernement cherche à obtenir ces fonds pour commencer à investir le plus rapidement possible.

Le gouvernement a l’intention de présenter un projet de loi en 2023 pour établir la structure permanente du Fonds de croissance du Canada. J’invite les sénateurs et le public à consulter le document d’information technique sur le Fonds de croissance du Canada que le gouvernement a publié le mois dernier. Il s’agit d’un document d’information technique très détaillé qui répondra à bon nombre de vos questions. Il présente les détails de la gouvernance du fonds, y compris sa mise en œuvre, son mandat, ses opérations, ses instruments financiers, ses approches d’investissement, ses mesures de rendement et ses cadres de transparence et de responsabilité.

Lorsque le fonds a été annoncé pour la première fois au printemps dernier, il était doté d’un investissement de 15 milliards de dollars, de sorte que les parlementaires doivent également s’attendre à des demandes de financement supplémentaires au moyen de crédits futurs. En d’autres termes, les parlementaires doivent s’attendre à examiner et à voter un projet de loi qui établira la structure de gouvernance permanente du fonds et qui nécessitera un financement supplémentaire.

Lorsque la ministre Freeland a comparu devant nous la semaine dernière, je lui ai demandé de fournir au comité des renseignements supplémentaires concernant le Fonds de croissance du Canada. Comme je lui ai expliqué ce jour-là, certains sénateurs ne se sentent pas à l’aise d’approuver la somme initiale de 2 milliards de dollars, alors que la structure de gouvernance et les exigences opérationnelles n’ont pas encore été établies. Elle nous a rappelé l’importance d’avoir différentes politiques dans notre boîte à outils pour accélérer la transition verte et stimuler l’économie. Elle a expliqué que le fonds est censé atténuer les risques associés aux investissements du secteur privé dans de nouvelles technologies, projet par projet, afin de créer des emplois pour l’avenir et réduire les émissions des gaz à effet de serre.

[Français]

La ministre Freeland nous a aussi expliqué, en répondant à une question du sénateur Gignac, que le gouvernement a vite compris trois choses plus tôt cette année. Elle a affirmé ceci :

[...] premièrement, la transition verte est essentielle et urgente pour le Canada; deuxièmement, la transition verte coûtera très cher et nous avons besoin de fonds supplémentaires; et troisièmement, les fonds du gouvernement ne seront pas suffisants. Le gouvernement devra créer des conditions qui vont attirer du capital privé. C’est ce que nous avons compris au printemps et c’est pour cette raison que nous avons créé ce fonds.

(1720)

Je suis d’accord avec la ministre. Je crois que le Fonds de croissance du Canada est une mesure importante et opportune, et je suis persuadé qu’il réussira à attirer les investissements nécessaires pour nous aider à atteindre nos objectifs en matière de transition verte.

Par exemple, notre comité a reçu comme témoins des intervenants de chambres de commerce, de petites entreprises, des représentants du secteur de l’hydrogène et des piles à combustible, du secteur ouvrier et de l’industrie du stockage d’énergie, et tous ont accueilli favorablement la création du fonds. D’ailleurs, la représentante de l’Association canadienne de l’hydrogène et des piles à combustible a imploré le gouvernement de ne pas retarder la mise en œuvre du Fonds de croissance du Canada et d’éviter les erreurs commises avec la Banque de l’infrastructure du Canada qui, selon certains, avait pris du temps à décoller.

Il faut investir maintenant.

[Traduction]

Je comprends que certains sénateurs hésitent à approuver une telle mesure alors qu’aucune structure permanente n’est en place. Je crois toutefois, comme la ministre et de nombreux intervenants, que le Canada ne peut pas se permettre de laisser des investissements de capitaux aller plutôt chez ses voisins du Sud. Nous devons être concurrentiels et créer un environnement qui favorise la croissance, la productivité et la création de nouvelles technologies novatrices. Le temps presse.

Je me tourne maintenant vers la sénatrice Marshall. Je n’ai aucun doute qu’elle aura une ou deux, ou même trois choses à dire à propos du Fonds de croissance du Canada. Je me contenterai toutefois de dire, en terminant, que je m’engage à surveiller la mise en œuvre et les activités du Fonds de croissance du Canada à ses débuts. Je sais que beaucoup de gens, y compris la sénatrice Marshall, exerceront des pressions sur le gouvernement pour que la structure organisationnelle soit établie dès que possible et que les valeurs et les objectifs décrits dans le document d’information technique soient respectés. J’ai bien entendu les préoccupations soulevées pendant les travaux du comité et dans les médias, et je m’engage à suivre l’avancement de cette initiative cruciale.

Le Fonds de croissance du Canada vise à attirer des investissements étrangers pour rendre notre économie plus verte. Toutefois, il fait aussi partie de l’ADN du Canada d’aider les nations étrangères, et c’est pourquoi le gouvernement propose d’apporter des modifications à la Loi sur les accords de Bretton Woods et des accords connexes. Pour ceux qui ne connaîtraient pas cette loi, elle donne au ministre des Finances le pouvoir de fournir une aide financière à un État étranger si le gouverneur en conseil est d’avis qu’il est dans l’intérêt national de le faire.

À l’heure actuelle, le montant maximal que le Canada peut accorder à un État donné est de 2,5 milliards de dollars américains et de 5 milliards de dollars américains pour l’ensemble des États étrangers. Depuis le début de l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie, le Canada a déjà versé 2 milliards de dollars canadiens en aide financière directe à l’Ukraine et il s’est engagé à verser 500 millions de dollars canadiens supplémentaires par l’émission d’une obligation de souveraineté de l’Ukraine.

Deux changements simples sont proposés dans le projet de loi C-32. Premièrement, les montants maximaux n’ont jamais été augmentés depuis la création de la loi en 1998. Le gouvernement propose de porter les montants à 7 milliards de dollars et à 14 milliards de dollars, ce qui tient plus ou moins compte de 25 années d’inflation. La deuxième modification change la devise dans la loi, qui passe du dollar américain au dollar canadien. Je tiens à préciser qu’aucun fonds n’est attribué avec cette mesure. Le gouvernement demande simplement de lever le plafond du soutien que le Canada peut offrir.

La dernière partie du projet de loi dont je veux parler est la section 3 de la partie 4, qui porte sur la Loi sur la gestion des terres des premières nations adoptée en 1999, qui ratifiait l’accord-cadre conclu en 1996 concernant la gestion des terres par les Premières Nations hors du cadre de la Loi sur les Indiens.

La mesure législative proposée dans le projet de loi C-32 éliminera les doublons dans la loi et amènera plus de clarté pour les partenaires impliqués. Il s’agit d’une initiative pilotée par les Premières Nations et développée conjointement visant le remplacement de la Loi sur la gestion des terres des premières nations par une loi plus concise. Elle poursuivrait la ratification de l’accord-cadre de nation à nation et soutiendrait ce dernier en tant qu’autorité centrale à partir de laquelle les Premières Nations pourront passer à un autre régime que celui de l’application des 44 articles de la Loi sur les Indiens portant sur les terres.

Il convient de souligner que, lors d’une réunion spéciale des Premières Nations signataires de l’accord-cadre, une résolution au sujet du projet de loi — celui dont le Sénat est saisi — a été présentée et a reçu l’appui unanime des Premières Nations signataires.

Le Comité sénatorial des peuples autochtones a étudié cette partie du projet de loi et a présenté son rapport au Sénat le 5 décembre.

On a déjà beaucoup parlé de cette partie du projet de loi la semaine dernière. Les sénateurs Patterson, McCallum et Francis, qui sont tous membres du comité, nous ont fait part de leurs préoccupations relatives au mémoire présenté par les Manitoba Keewatinowi Okimakanak et à leurs demandes d’amendements concernant les forces de l’ordre sur leur territoire.

Je m’étendrai peu sur le sujet aujourd’hui. Je traiterai plus amplement de la question plus tard cette semaine, à l’étape de la troisième lecture. Cela dit, si je puis, j’aimerais simplement mentionner certaines des observations dont nous ont fait part le Conseil consultatif des terres et le Centre de ressources sur la gestion des terres des Premières Nations.

Dans une lettre datée du 9 décembre, le chef Robert Louie, président du Conseil consultatif des terres, confirme que le conseil « appuie généralement la position des MKO et ses efforts relativement à l’application des lois des Premières Nations », mais ne peut appuyer un amendement au projet de loi pour les raisons suivantes :

Nous n’avons pas l’approbation de tous les signataires d’ententes-cadres pour apporter la moindre modification au libellé de la loi sur l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres de premières nations […] Une modification de la loi créerait une incohérence avec l’accord-cadre auquel renvoie la loi. Autrement dit, à l’heure actuelle, rien dans l’accord-cadre ne traite de la législation relative à la GRC ou aux poursuites pénales.

Le chef Louie ajoute que le Conseil consultatif des terres espère continuer d’appuyer les MKO et de collaborer avec eux et :

[...] propose de poursuivre leurs démarches conjointes auprès des provinces et du gouvernement fédéral relativement à l’application de la loi et s’engage à continuer de s’aligner sur la position des Premières Nations signataires en ce qui a trait à tout changement approprié à l’accord-cadre.

Le chef Louie écrit, et j’approuve ce qui suit :

[...] consentir à des modifications à l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres de premières nations avant de demander l’approbation des Premières Nations va à l’encontre du principe de respect mutuel et de la relation de nation à nation que nous nous sommes efforcés de bâtir et d’entretenir depuis la signature de l’accord-cadre en 1996.

J’en aurai plus à dire à ce sujet à l’étape de la troisième lecture.

Il serait contraire à mes habitudes de parler d’un projet de loi de nature économique sans faire quelques observations de mon cru sur l’état actuel de notre économie.

L’énoncé économique de l’automne a été l’occasion pour le gouvernement de présenter aux Canadiens une mise à jour en milieu d’exercice sur la croissance économique du pays et l’état de ses finances. L’énoncé comprenait également les prévisions du gouvernement en matière de revenus et de dépenses de programmes ainsi que des prévisions économiques à long terme.

Comme la plupart des pays, le Canada a réagi rapidement à la pandémie. Le gouvernement a fourni aux personnes, aux familles et aux entreprises le soutien financier nécessaire pour joindre les deux bouts. Malgré des dépenses extraordinaires, le Canada sort de la pandémie dans une position relativement bonne.

J’ai passé la majeure partie de ma vie à travailler avec les chiffres et je peux vous assurer que vous pouvez leur faire dire ce que vous voulez. Tout est une question de point de vue, de comparaison et de façon de présenter les choses. En tant que sénateur indépendant, je crois sincèrement que l’économie canadienne se porte mieux que celle de la plupart des pays. Certes, je conviens que nous ne sommes pas encore sortis de l’auberge et que nous avons du pain sur la planche, mais j’ai bon espoir que nous sommes sur la bonne voie.

Comme nous le savons tous, la taille de l’économie canadienne est maintenant de 103 % par rapport à ce qu’elle était avant la pandémie. Cette année, jusqu’à présent, la croissance économique du Canada est la plus forte parmi les pays du G7 et le ratio de la dette nette au PIB est le plus bas. Le taux de chômage est de 5,1 %, et l’inflation diminue lentement après avoir atteint un sommet en juin, grâce, en partie, à la baisse des prix de l’essence et à la politique monétaire de la Banque du Canada.

La semaine dernière, la banque a augmenté le taux d’intérêt de 50 points de base supplémentaires, à 4,25 % — la septième hausse de taux de l’année — afin de faire baisser l’inflation et de la ramener à son taux cible. Comme la banque l’a déclaré le jour de l’annonce,

« [...] le Conseil de direction évaluera s’il est nécessaire de relever encore le taux directeur pour ramener l’offre et la demande en équilibre et l’inflation à la cible. »

La banque est déterminée à tenir son « engagement à atteindre la cible d’inflation de 2 % et à rétablir la stabilité des prix pour les Canadiens. »

Bien sûr, l’inflation est un problème majeur au Canada, mais ce n’est pas la seule mesure que nous devrions utiliser pour évaluer notre situation économique et la santé de notre économie. Par exemple, parmi nos homologues du G7, seuls la France et le Japon ont un taux d’inflation inférieur à celui du Canada. La reprise de l’emploi au Canada a également surpassé celle de la plupart des pays pairs du G7 et dépassé les attentes.

À mon humble avis, l’énoncé économique de l’automne est prudent, ciblé et pas trop coûteux. Oui, il y a des postes budgétaires importants qui nécessitent de grosses sommes d’argent dans le projet de loi C-32. Cependant, dans l’ensemble, on s’attend à ce que le projet de loi génère des recettes et n’augmente pas les déficits. À mon avis, ce sont là de bonnes nouvelles.

J’ai demandé au cabinet de la ministre Freeland de nous fournir une ventilation des coûts de toutes les mesures contenues dans le projet de loi C-32. J’ai été heureux de voir que, entre 2022-2023 et 2027-2028, le gouvernement prévoit des recettes nettes de plus de 4 milliards de dollars dans le cadre du projet de loi C-32. Ces recettes sont attribuables, en grande partie, au dividende pour la relance du Canada et à l’impôt supplémentaire pour les banques et les assureurs-vie.

Certains ont soutenu que les mesures prévues dans ce projet de loi, ainsi que celles contenues dans les deux projets de loi sur l’allégement du coût de la vie, augmenteront encore plus l’inflation et continueront d’exercer une pression financière sur notre économie et sur le portefeuille des Canadiens. Avec tout le respect que je leur dois, je ne suis pas de cet avis, et d’autres Canadiens éminents partagent mon opinion.

(1730)

Yves Giroux, le directeur parlementaire du budget, a examiné l’effet inflationniste de l’annonce de la ministre Freeland en septembre et il a constaté qu’elle aura une incidence minimale sur l’inflation. Il pense que le taux d’inflation pourrait augmenter de 0,01 %. Il s’agit de l’opinion du directeur parlementaire du budget.

Le 1er décembre, Kevin Page, le prédécesseur de M. Giroux et le tout premier directeur parlementaire du budget du Parlement, a comparu devant le Comité des banques, et nous l’avons interrogé sur l’inflation. C’était bon de le voir. En réponse à une excellente question du sénateur Gignac, M. Page a brièvement parlé de l’énoncé économique de l’automne et a soutenu que l’énoncé contient une quantité modeste de mesures, mais qu’il ne les considérait pas comme inflationnistes. Comme il l’a dit — et je partage son avis : « Même si nous avons de l’inflation, nous devons quand même réorienter l’économie canadienne pour réduire nos émissions. »

Le gouvernement a été clair dans son énoncé économique de l’automne :

Nous offrons des mesures d’allègement de l’inflation ciblée, parce que c’est la chose à faire.

Mais nous ne pouvons plus soutenir chaque Canadien comme nous l’avons fait avec les mesures d’urgence au plus fort de la pandémie.

Une telle démarche forcerait la Banque du Canada à augmenter les taux d’intérêt encore plus. La vie deviendrait plus chère pour tout le monde, pendant plus longtemps.

Alors, pendant que la banque centrale lutte contre l’inflation, nous ne compliquerons pas son travail.

Je suis d’accord avec cette déclaration, mais je reconnais que les Canadiens à faible et moyen revenu et certaines des personnes les plus marginalisées dans nos collectivités ont besoin de l’aide du gouvernement.

De plus, j’ai été heureux de lire dans les journaux que la ministre Freeland a déclaré récemment à ses collègues du Cabinet que s’ils voulaient obtenir de l’argent pour de nouveaux programmes dans le prochain budget fédéral, ils devaient fournir au moins 25 % des nouveaux coûts de fonctionnement demandés en argent provenant de leurs propres ministères, par exemple, en songeant à réduire les dépenses ou à supprimer certains programmes.

J’accueille très favorablement cette initiative. Si l’on s’attend à ce que les Canadiens vivent selon leurs moyens, les Canadiens devraient pouvoir s’attendre à ce que le gouvernement en fasse de même.

Comme l’a dit la ministre Freeland au Sénat en octobre, les Canadiens réduisent les dépenses, et le gouvernement doit aussi le faire.

Honorables sénateurs, je suis heureux d’annoncer que j’en suis à la partie de mon discours qui s’intitule, en caractères gras, « Conclusion ».

Une voix : Combien de pages?

Le sénateur Loffreda : Deux pages et demie. C’est un projet de loi important.

Chers collègues, aucun projet de loi n’est jamais parfait, surtout les projets de loi volumineux qui sont axés sur l’économie et qui abordent un certain nombre de questions. J’ai essayé d’aborder les questions les plus importantes et ferai de même à l’étape de la troisième lecture. En tant que sénateur indépendant, je suis fier de parrainer ce projet de loi parce que je pense que de nombreuses mesures comprises dans le projet de loi C-32 contribueront à relever les défis de l’abordabilité, à augmenter les revenus, à aider les Canadiens à accéder à la propriété, à mettre en œuvre des mesures pour lutter contre l’évitement fiscal et l’évasion fiscale, à faire croître notre communauté de petites et moyennes entreprises, à augmenter la productivité et à créer des emplois, ainsi qu’à attirer d’importants investissements étrangers afin de faire croître notre économie verte.

Dans 12 jours, de nombreux Canadiens célébreront Noël. Ils se réuniront en famille et entre amis pour célébrer la période la plus festive de l’année. Ils parleront de la dernière année et envisageront l’avenir avec espoir et inspiration.

Nous savons que de nombreux Canadiens peinent à joindre les deux bouts et ont connu deux années difficiles. Les banques alimentaires et les organismes de bienfaisance ont de la difficulté à répondre à la demande. Mais je suis sûr que la plupart conviendront que le Canada est mieux ressorti de la pandémie que prévu et dans une meilleure position que les autres pays du G7.

Nous avons d’innombrables raisons d’être optimistes. Comme l’a dit la ministre Freeland : « [N]ous avons une maison bien construite, avec un toit solide. Et nous avons survécu à des hivers bien plus rigoureux auparavant. »

Chers collègues, s’ils regardent loin devant eux, les Canadiens peuvent voir une lueur d’espoir à l’horizon. J’ai confiance que nous allons traverser le ralentissement économique qui arrive et ce que je prévois être une légère récession. Nous savons tous qu’après l’hiver vient le printemps et que les fleurs écloront en un rien de temps. Merci.

L’honorable Leo Housakos : Sénateur Loffreda, acceptez-vous de répondre à quelques questions?

Le sénateur Loffreda : Je suis toujours heureux de répondre à vos questions, sénateur Housakos.

Le sénateur Housakos : Sénateur Loffreda, merci d’avoir exprimé si éloquemment et de manière si indépendante le point de vue du gouvernement. De manière tout aussi indépendante, bien entendu, je vais poser quelques questions au nom des contribuables de ce pays, en commençant par le fait que, très récemment, la vérificatrice générale a publié un rapport dans lequel elle remettait en question la somme de 27,4 milliards de dollars que vous avez accordée au gouvernement pour des dépenses liées à la COVID. Nous avons bien entendu participé à l’autorisation rapide d’une bonne partie de ces dépenses liées à la COVID. Toutefois, il est maintenant clair que la vérificatrice générale remet en question la transparence d’une bonne partie de ces dépenses.

Dans ce projet de loi, quels mécanismes et quelles mesures le gouvernement a-t-il pris pour veiller à ce que bon nombre des programmes dont vous venez de parler et une grande partie des nouvelles dépenses à venir soient assujettis à de meilleurs freins et contrepoids que, de toute évidence, les derniers budgets que nous avons approuvés?

Le sénateur Loffreda : Je vous remercie de votre question, sénateur Housakos. Elle est très pertinente, car, dans mon ancienne vie, j’étais vérificateur — il y a plus de 20 ans. J’ai commencé en 1984. Combien d’années cela fait-il? J’ai perdu le compte. C’est 38 ans, n’est-ce pas? Donc, c’était il y a plus de 20 ans.

Toutefois, ce qui compte le plus à mon avis, ce sont les nombreuses mesures sur l’évitement fiscal. Un grand nombre de mesures sont là pour montrer que la responsabilité fiscale est primordiale. Je pense que le gouvernement en fait la preuve.

Vous avez raison : la vérificatrice générale a déclaré qu’une grande part des sommes versées pour lutter contre la COVID doit être récupérée. Nous devons récupérer ces fonds, alors nous devons mettre en place des mesures adéquates pour déterminer comment récupérer cet argent.

Toutefois, ce projet de loi — le projet de loi C-32 — est fondamentalement l’énoncé économique de l’automne. Il va de l’avant. Il contient des mesures pour contrer l’évitement fiscal, et il met à jour la Loi de l’impôt sur le revenu afin de chercher des moyens de combattre l’évitement fiscal. J’appuie entièrement ces mesures dans le projet de loi. J’espère que, à l’avenir, nous aurons d’autres mesures productives pour éviter les dépenses inutiles comme celles relatives à la COVID.

Le sénateur Housakos : Le sénateur accepterait-il de répondre à une autre question?

Le sénateur Loffreda : Oui.

Le sénateur Housakos : Sénateur, quand vous avez parlé des mesures budgétaires, vous avez évidemment parlé du Fonds de croissance du Canada. Or, je peux vous dire que, dans les dernières années, tout ce que nous avons vu croître au Canada, ce sont d’abord les déficits, que le gouvernement accumule année après année. Nous avons vu la dette croître. La dette du pays a maintenant atteint un niveau sans précédent, et c’est évidemment en grande partie à cause des mesures budgétaires que le gouvernement a fait adopter les unes après les autres.

Évidemment, étant vous-même un ancien vérificateur et un banquier, vous devez être très préoccupé par le fait que, dans les dernières années, les dépenses liées au service de la dette ont augmenté considérablement par rapport aux années précédentes. Les taux d’intérêt continuent d’augmenter, en grande partie à cause des politiques inflationnistes, et en ce qui a trait à ce projet de loi, vous parlez de stimulants. Vous parlez d’injecter des fonds, donc de mesures qui se trouvent à alourdir le fardeau fiscal. Vous avez parlé d’un programme qui consiste en un impôt visant les banques et les compagnies d’assurance, et le gouvernement tente de faire passer cela pour une façon d’imposer les riches, mais en réalité, on fera porter ce fardeau aux consommateurs canadiens, notamment en augmentant les primes d’assurance et les frais bancaires.

Craignez-vous qu’on n’en fasse pas suffisamment pour réduire les dépenses, contrôler la dette et le déficit, et limiter les intérêts que nous devons payer sur la dette nationale, étant donné que les taux d’intérêt augmentent?

Le sénateur Loffreda : Sénateur Housakos, il y a toujours une certaine inquiétude. Si je regarde les derniers états financiers — j’adore les chiffres, comme vous le savez — la dette du pays était de 1,134 billion de dollars en date du 31 mars 2022. Le ratio dette-PIB était de 45,5 %, une baisse par rapport au ratio de 47,5 % enregistré l’année précédente. Selon le Fonds monétaire international, ou FMI, si on regarde la dette nette de l’ensemble des administrations publiques du Canada — ce qui comprend les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, les administrations locales, ainsi que l’actif net du Régime de pensions du Canada et du Régime de rentes du Québec — le ratio entre cette dette nette et le PIB était de 33,2 % en 2021. Il s’agit du ratio le plus bas parmi les pays du G7, lesquels, selon le FMI, ont probablement inscrit une dette nette moyenne correspondant à 101,2 % de leur PIB pour la même année.

Les taux d’intérêt augmentent, de toute évidence. Le projet de loi à l’étude procurera des revenus nets, comme je l’ai dit. Pour en revenir au Fonds de croissance du Canada, puisqu’il s’agit du point le plus pertinent ici, des membres du comité étaient préoccupés ou inquiets de savoir que la structure permanente n’était pas en place. Les 2 milliards de dollars sont destinés à l’achat d’actions sans droit de vote. Mon expérience auprès de nombreuses entreprises de technologie m’a toutefois appris que le plus grand défi que pose une acquisition, c’est son intégration.

Pour revenir au Fonds de croissance du Canada, je demanderai toujours aux entreprises de technologie pourquoi elles veulent fusionner ou pourquoi faut-il acquérir l’entreprise? Pourquoi ne faisons-nous pas table rase, en partant de zéro? Parce que la technologie évolue si rapidement que le contenu devient vite obsolète; les idées deviennent vite dépassées. Il est donc important de faire table rase, d’aller de l’avant, de proposer de nouvelles idées créatives et de mettre en place le PDG et le conseil d’administration adéquats.

(1740)

Le Fonds de croissance du Canada, dans cette situation, représente la bonne décision. Il nous permet d’aller de l’avant. Le document d’information technique l’explique bien.

Je suis convaincu que les 2 milliards de dollars constituent un bon investissement. Il s’agit de ne pas perdre de terrain par rapport à notre principal partenaire commercial, les États-Unis, et de nombreux pays dans le monde. J’ai ici la liste de tous les pays qui ont investi dans ce domaine dans le monde. Nous n’investissons qu’une partie de ce qu’ils ont investi. Si nous observons ce qui se passe ailleurs, l’Union européenne a investi 26,2 milliards d’euros, les Pays-Bas ont investi 13 milliards d’euros, la France a investi 7 milliards d’euros et l’Australie a investi 10 milliards de dollars.

Je pense donc que les 2 milliards de dollars du Fonds de croissance du Canada pour financer son démarrage, pour repartir de zéro avec la technologie, sont importants parce que l’infrastructure est obsolète. Parfois, il est important de repartir de zéro, de faire table rase du passé. Les résultats sont bien meilleurs.

Comme je l’ai dit, j’ai l’état financier avec moi. Je pourrais passer 10 minutes à le parcourir. Or l’important, c’est que nous sommes dans une meilleure position financière que les autres pays du G7. Nous nous classons en tête de liste pour ce qui est de nombreux aspects de plusieurs mesures et paramètres. L’inflation n’est pas le seul indicateur pour mesurer la prospérité économique. Il y en a d’autres, comme la croissance et la création d’emplois. Il y a un million d’emplois vacants au Canada, et un million de personnes ne travaillent pas au Canada. Il est important d’apporter des solutions dans cette enceinte et d’envisager des solutions.

Je suis à l’aise avec le projet de loi. Merci de votre question.

L’honorable Elizabeth Marshall : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du projet de loi C-32, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 3 novembre 2022 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022.

Le projet de loi C-32 comprend quatre parties. La partie 1 propose 21 modifications à la Loi de l’impôt sur le revenu. La partie 2 propose des modifications à la Loi sur la taxe d’accise et à la Loi d’exécution du budget de cette année. La partie 3 propose des modifications à la Loi sur la taxe sur les logements sous-utilisés, qui a été promulguée en juin dernier dans le cadre du projet de loi C-8. J’ai d’ailleurs parlé du projet de loi C-8 à l’étape de la deuxième lecture et de nouveau à l’étape de la troisième lecture. La partie 4 du projet de loi propose un certain nombre d’autres mesures, notamment une loi intitulée Loi sur l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres de premières nations. Le sénateur Francis a parlé de cette partie du projet de loi la semaine dernière. La partie 4 comprend également des dispositions sur l’élimination des intérêts sur les prêts d’études fédéraux et sur les prêts aux apprentis.

Les modifications proposées à la Loi de l’impôt sur le revenu dans la partie 1 de ce projet de loi auront des répercussions majeures sur les recettes fiscales. Certaines modifications augmenteront les recettes fiscales du gouvernement, tandis que d’autres les réduiront. Les fonctionnaires du ministère des Finances nous ont dit que l’effet net de ces modifications augmentera les recettes fiscales de 4,2 milliards de dollars sur six ans.

Les recettes de l’État, et notamment les recettes fiscales, ont beaucoup augmenté au cours des trois dernières années. Les recettes totales ont augmenté de 33 % sur une période de trois ans, passant de 334 milliards de dollars en 2019-2020 à des recettes estimées pour cette année à 445 milliards de dollars, soit de 10,4 % par année en moyenne.

J’ai exclu les deux années de la pandémie de COVID de mes calculs. J’ai comparé les données financières de 2019-2020, la dernière année avant l’arrivée de la COVID, à celles de l’exercice financier en cours.

Les recettes tirées de l’impôt sur le revenu des particuliers ont augmenté de 24 % au cours de la période de trois ans, passant de 168 milliards de dollars en 2019-2020 à 209 milliards de dollars, selon les estimations, pour l’exercice en cours. Autrement dit, on parle d’une hausse moyenne de 7,5 % par année.

Les recettes provenant de l’impôt des sociétés ont augmenté de 82 % au cours de la période de trois ans, passant de 50 milliards de dollars en 2019-2020 à 91 milliards de dollars pour le présent exercice. C’est donc une hausse moyenne de 22 % par année au cours des trois années.

En résumé, les recettes provenant de l’impôt des sociétés représentent la hausse la plus marquée dans les recettes de l’État des trois dernières années.

Dans le projet de loi, le gouvernement propose des hausses d’impôts pour les sociétés, y compris le dividende pour la relance au Canada, l’augmentation du taux d’imposition pour les banques et les assureurs-vie et l’impôt sur le rachat d’actions.

Le dividende pour la relance au Canada est un impôt ponctuel de 15 % pour les banques et les assureurs-vie. Il est fondé sur le revenu imposable de 2020 et 2021. Il sera appliqué à l’exercice fiscal 2022, et la somme sera payée en versements égaux sur cinq ans. En ce moment, on nous dit que c’est un impôt ponctuel.

Le gouvernement estime que cet impôt augmentera les recettes provenant de l’impôt des sociétés de 800 millions de dollars par année, à compter de l’exercice en cours et pour les quatre exercices suivants, pour atteindre un total de 4 milliards de dollars sur cinq ans.

L’augmentation de 1,5 % du revenu imposable d’entreprise des groupes de banques et d’assureurs-vie s’applique aux années d’imposition se terminant après le 7 avril 2022. Le gouvernement estime que cette hausse d’impôt augmentera les recettes provenant de l’impôt des sociétés de 290 millions de dollars pour l’exercice financier en cours et de plus de 430 millions de dollars pour chacune des années subséquentes. Les recettes fiscales totales pour la période de cinq ans sont estimées à 2 milliards de dollars.

Je m’attends à ce que l’impôt supplémentaire que devront payer les groupes de banques et d’assureurs-vie au titre du dividende pour la relance au Canada et de la hausse du taux d’imposition de leur revenu soit refilé aux consommateurs, alourdissant encore davantage le fardeau des Canadiens en faisant grimper les frais, alors que les Canadiens sont déjà aux prises avec un taux d’inflation élevé et une hausse des taux d’intérêt.

Dans les faits, on fait payer plus d’impôts aux banques, mais elles refilent la facture aux consommateurs, si bien que le gouvernement empoche en réalité des recettes supplémentaires aux frais des consommateurs.

Le projet de loi C-32 instaure également un taux d’imposition de 2 % sur la valeur nette de tout type de rachat d’actions de sociétés publiques au Canada. Le gouvernement a indiqué que les détails concernant ce nouvel impôt seront annoncés dans le budget de 2023 et entreront en vigueur le 1er janvier 2024. Même si nous ne connaissons pas encore les détails, le gouvernement estime que cet impôt sur le rachat d’actions augmentera de 2 milliards de dollars sur cinq ans les recettes provenant de l’impôt des sociétés et, comme le déclare le gouvernement dans son énoncé économique de l’automne, « [...] les inciter[a] à réinvestir leurs bénéfices dans les travailleurs et au Canada ». Il est ironique que le gouvernement pense pouvoir inciter les sociétés à investir au pays en augmentant leurs impôts.

Dans une entrevue accordée au Hill Times, M. Alex Gray, de la Chambre de commerce du Canada, affirmait que la taxe aurait peu d’effet sur la façon dont les grandes sociétés investissent leurs profits. Elle envoie plutôt un message décourageant aux entreprises canadiennes. M. John McKenzie, chef de la direction du Groupe TMX, le plus important opérateur boursier au Canada, a tenu des propos similaires. M. Don Drummond, ancien sous-ministre délégué de la ministre des Finances, a également affirmé au Hill Times qu’il ne croyait pas en cette taxe. Il a ajouté qu’il ne comprenait pas pourquoi les gouvernements voulaient se mettre le nez dans les affaires des entreprises.

Je ne vois pas comment augmenter le fardeau fiscal des entreprises les incitera à investir au Canada. Je crois que ce sera plutôt l’inverse.

Honorables sénateurs, les dépenses du gouvernement ont beaucoup augmenté au cours des dernières années. Dans les quatre années de 2016 à 2020, la dernière année avant la pandémie, les dépenses du gouvernement ont augmenté de 5 %, 6,6 %, 5,6 % et 7,4 %, respectivement. Faisons la comparaison avec les dépenses de cette année. Les dépenses en 2020, la dernière année avant la pandémie, étaient de 363 milliards de dollars. Jusqu’à maintenant, pour l’exercice en cours, le gouvernement prévoit dépenser 472 milliards de dollars, d’après ce qu’indiquent l’énoncé économique de l’automne et le Budget supplémentaire des dépenses (B), et nous ne sommes pas encore à la fin de l’exercice.

Autrement dit, les dépenses gouvernementales sont passées de 363 milliards de dollars en 2019-2020 à 472 milliards de dollars cette année. Cela représente une hausse de 30 % sur une période de trois ans et équivaut à une hausse annuelle moyenne de 9 %. Les dépenses de cette année n’incluent pas encore d’importantes dépenses, comme une hausse du Transfert canadien en matière de santé et une augmentation du budget du ministère de la Défense nationale.

Le Transfert canadien en matière de santé est le plus grand transfert fédéral aux provinces et aux territoires. Il contribue à payer les coûts liés aux soins de santé. Ce transfert est estimé à 47 milliards de dollars cette année, et il passera à 58 milliards de dollars en 2027-2028.

Toutefois, nous savons tous que notre système de santé est en crise, et que les premiers ministres des provinces et des territoires réclament beaucoup plus : 28 milliards de dollars de plus. Cela dépasse considérablement ce qui est prévu dans les plans de dépenses du gouvernement.

(1750)

Le gouvernement s’engage également à accorder des fonds supplémentaires au ministère de la Défense nationale pour l’acquisition d’aéronefs, de navires et de sous-marins, pour l’OTAN, et pour moderniser le NORAD.

Le gouvernement prévoit également d’accroître les effectifs de la fonction publique, qui compte actuellement près de 400 000 fonctionnaires, comme l’indique un rapport récent du directeur parlementaire du budget. Bien que nous ne savons pas quel sera l’effet de l’inflation sur la rémunération et les avantages sociaux des fonctionnaires, on s’attend à ce qu’il soit considérable.

Si le gouvernement prévoit une réduction des déficits au cours des quatre prochaines années et un excédent budgétaire la cinquième année, soit en 2027-2028, je ne pense pas que cela puisse se produire compte tenu des habitudes de dépenses du gouvernement et de la récession prévue pour l’année prochaine. En fait, l’énoncé économique de l’automne indique que les recettes fiscales de cette année dépasseront de 37 milliards de dollars ce qui était prévu dans le cadre du budget du mois d’avril. Plutôt que d’utiliser ces 37 milliards de dollars pour éponger le déficit, le gouvernement a en fait consacré 21 milliards de dollars à des dépenses supplémentaires et au service de la dette, ce qui ne laisse que 16 milliards de dollars à consacrer à la réduction du déficit.

Honorables sénateurs, bien que l’augmentation de l’impôt sur les sociétés et les particuliers puisse être envisagée par le gouvernement comme une source de revenus pour financer des dépenses croissantes, augmenter les impôts peut avoir un effet négatif sur l’économie. En effet, les particuliers et les sociétés sont mobiles et peuvent se déplacer vers des pays plus favorables.

Comme ses dépenses sont supérieures à ses recettes, le gouvernement s’endette de plus en plus pour combler le manque à gagner. Lors de mes discours précédents au Sénat, j’ai souligné que les frais de service de la dette du gouvernement augmentaient. Étant donné que les estimations sont révisées après la publication de chaque document financier, il est facile de constater que les frais d’intérêt sont sur une trajectoire nettement ascendante. Malgré les avertissements selon lesquels une dette supplémentaire risque d’augmenter considérablement les frais de service de la dette, la ministre des Finances nous a assuré à maintes reprises que le gouvernement pouvait facilement absorber le coût de la dette supplémentaire et que les intérêts sur cette dette resteraient faibles.

Dans son discours du budget de 2021, la ministre des Finances nous a dit que, dans le contexte actuel où les taux d’intérêt sont faibles, non seulement nous pouvons nous permettre ces investissements, mais il serait peu judicieux de notre part de ne pas faire ces investissements. Elle a ajouté que le gouvernement avait émis un niveau sans précédent d’obligations à long terme à de faibles taux d’intérêt en vue de veiller à ce que la dette du Canada soit viable et ne soit pas un fardeau pour les générations futures.

Le problème avec son plan est que ce gouvernement ne rembourse pas sa dette. Il remplace simplement la dette arrivant à échéance par une nouvelle dette, qui ne peut être financée qu’à des taux d’intérêt plus élevés. Contrairement à ce qu’elle dit, cela nuit aux générations futures, car nous ne remboursons pas cette dette. Au contraire, elle sera transférée aux générations futures, qui devront payer les frais d’intérêt, et rembourser la dette.

Avec l’augmentation des taux d’intérêt, nous pouvons maintenant constater les répercussions de cette dette sur les dépenses gouvernementales. En novembre 2020, il y a tout juste deux ans, le gouvernement nous a dit que le coût du service de la dette serait de 22 milliards de dollars cette année. Dans l’énoncé économique de cet automne, il est passé de 22 à 35 milliards de dollars, soit une augmentation de 60 %. Le coût du service de la dette constitue désormais l’une des dépenses principales du gouvernement.

Comme je l’ai déjà indiqué, les recettes de l’État ne suffisent pas à payer toutes les dépenses publiques, et le manque à gagner est donc emprunté. Par conséquent, il est important de surveiller les emprunts du gouvernement, car la loi fixe un plafond pour son endettement.

Il y a deux ans, le gouvernement a modifié la Loi autorisant certains emprunts pour faire passer le plafond de la dette imparti par la loi de 1,168 billion de dollars à 1,831 billion de dollars à partir du 31 mars 2024. Il s’agirait d’une augmentation de 56 % sur une période de trois ans. Cela rend difficile la tâche des parlementaires qui consiste à faire le suivi de la dette actuelle à un moment donné parce que cette information n’est pas facilement accessible. Elle est seulement divulguée dans les Comptes publics du Canada. Pour obtenir un montant plus à jour, il faut le calculer en utilisant les Comptes publics du Canada, les rapports mensuels de La revue financière et les rapports financiers des sociétés d’État.

En date du 31 mars 2015, la dette du gouvernement était de 918 milliards de dollars. Les plus récents Comptes publics du Canada, publiés le 31 mars 2022, indiquent que la dette est maintenant de 1,5 billion de dollars. Depuis mars, le gouvernement semble avoir emprunté — et il s’agit là de mon estimation en fonction des rapports de La revue financière — 10 milliards de dollars de plus. Ainsi, la dette du gouvernement s’approche maintenant de 1,6 billion de dollars, ce qui représente une augmentation de 640 milliards de dollars depuis mars 2015.

L’augmentation du coût du service de la dette n’est pas attribuable uniquement à l’augmentation des taux d’intérêt; elle est aussi attribuable à une augmentation considérable des emprunts du gouvernement.

Dans ses documents budgétaires annuels et ses énoncés économiques de l’automne, le gouvernement fait le point sur ses stratégies d’emprunt, mais présente moins de renseignements sur ce qui s’est réellement passé avec la dette. Jusqu’à présent, nous avons reçu deux stratégies de gestion de la dette pour cette année, qui nous indiquent ce qui se passera à l’avenir. Mais à ce jour, nous n’avons reçu aucun rapport de gestion de la dette nous indiquant ce qui s’est exactement passé l’année dernière. L’article 49 de la Loi sur la gestion des finances publiques exige que le gouvernement dépose son rapport annuel sur son programme de gestion de la dette dans les 30 premiers jours de séance suivant le dépôt des Comptes publics du Canada.

Les Comptes publics du Canada ayant été déposés le 27 octobre, le rapport sur la gestion de la dette devrait être déposé avant la date limite prévue par la loi, soit le 15 décembre, c’est-à-dire ce jeudi.

Nous sommes maintenant le 13 décembre, deux jours avant l’échéance prévue par la loi, et nous attendons toujours. Je comprends maintenant que la Chambre des communes pourrait en fait s’ajourner demain, reportant ainsi à l’année prochaine le dépôt du rapport sur la gestion de la dette de l’année dernière. Le gouvernement n’est pas un partisan enthousiaste de l’ouverture, de la transparence et de la reddition de comptes.

Des 21 modifications apportées à la Loi de l’impôt sur le revenu, 5 concernent le logement. Je vais parler de trois de ces modifications.

La partie 1 du projet de loi propose d’instaurer un compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété, de doubler le crédit d’impôt pour l’achat d’une première habitation et d’instaurer un crédit d’impôt pour la rénovation d’habitations multigénérationnelles.

Le compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété donnera la possibilité aux éventuels acheteurs d’une propriété d’épargner jusqu’à 40 000 $, 8 000 $ annuellement, libre d’impôts, en vue d’acheter une maison. Le régime d’accession à la propriété permet aux acheteurs de maison de retirer jusqu’à 35 000 $ de leur REER, pour l’achat d’une maison. Cependant, tout retrait dans le REER doit être remboursé d’ici 15 ans.

Le directeur parlementaire du budget estime que le compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété coûtera 731 millions de dollars en 2023-2024 et 2,5 milliards de dollars au total au cours des trois prochaines années. Bien que ces mesures semblent apporter une aide non négligeable, il n’est pas réaliste de penser que les jeunes Canadiens seront en mesure d’épargner 40 000 $ dans le compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété ou d’utiliser l’argent dans leur REER s’il faut l’y remettre par la suite.

Le prix des propriétés a considérablement augmenté au cours des dernières années, et les taux d’intérêt sont à la hausse. Alors que le coût moyen des propriétés a connu une baisse au cours de la dernière année, les taux d’intérêt continuent d’augmenter et il est impossible de savoir s’ils vont baisser ou quand cela se produira.

Le projet de loi C-32 nous propose aussi de doubler le crédit d’impôt pour l’achat d’une première habitation, le faisant passer de 5 000 $ à 10 000 $ pour les propriétés achetées à partir du 1er janvier de cette année. Ce crédit d’impôt est non remboursable. Le directeur parlementaire du budget estime que le crédit d’impôt pour l’achat d’une première habitation coûtera 115 millions de dollars cette année et 470 millions de dollars au cours des quatre prochaines années.

La troisième mesure en matière de logement prévoit, à compter du 1er janvier 2023, un crédit d’impôt remboursable pour la rénovation d’habitations multigénérationnelles, grâce auquel les familles qui souhaitent construire un logement secondaire pour une personne âgée ou un adulte en situation de handicap pourraient obtenir jusqu’à 7 500 $. Je crois que le gouvernement veut qu’on commence à s’entasser.

Honorables sénateurs, le secteur de l’habitation est devenu le talon d’Achille de l’économie canadienne, comme l’affirment le surintendant des institutions financières, la présidente de la SCHL, le Fonds monétaire international, le gouverneur de la Banque du Canada et de nombreux groupes de réflexion et économistes.

Les taux d’intérêt ont beaucoup augmenté, ce qui a entraîné une hausse des versements hypothécaires des propriétaires de maison. Dans bien des cas, les soldes impayés des hypothèques dépassent maintenant le montant d’origine de ces hypothèques, ou les maisons valent maintenant moins que l’hypothèque à laquelle elles sont rattachées. Par ailleurs, les dettes non liées à une hypothèque augmentent à mesure que les Canadiens s’endettent davantage pour payer leurs aliments, leur carburant et d’autres biens essentiels. Ils utilisent leurs cartes de crédit pour faire l’épicerie.

Même si les modifications proposées à la Loi de l’impôt sur le revenu à l’intention des futurs propriétaires pourront en aider certains, il faut plutôt une solution plus globale à la crise du logement. Une simple aide financière à quelques propriétaires de maison ne réglera pas le problème du logement.

La partie 4 du projet de loi C-32 permet au ministre des Finances de disposer de 2 milliards de dollars pour acheter des actions d’une société anonyme et inexistante. Le projet de loi ne prévoit...

Son Honneur le Président : Sénatrice Marshall, je vous prie de m’excuser, mais je dois vous interrompre. Comme il est 18 heures, conformément à l’article 3-3(1) du Règlement, je dois quitter le fauteuil jusqu’à 20 heures à moins qu’il soit entendu que nous ne tiendrons pas compte de l’heure. Vous plaît-il de faire abstraction de l’heure?

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : J’ai entendu un « non ». Je suis désolé, sénatrice Marshall. Vous disposerez donc du reste de votre temps de parole lorsque nous reprendrons les travaux à 20 heures. La séance est suspendue jusqu’à 20 heures.

(La séance du Sénat est suspendue.)

[Français]

(Le Sénat reprend sa séance.)

(2000)

Projet de loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’identification des criminels et apportant des modifications connexes à d’autres lois (réponse à la COVID-19 et autres mesures)

Message des Communes

Son Honneur le Président annonce qu’il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi S-4, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’identification des criminels et apportant des modifications connexes à d’autres lois (réponse à la COVID-19 et autres mesures), accompagné d’un message informant le Sénat qu’elle a adopté ce projet de loi sans amendement.

[Traduction]

Projet de loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2022

Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Loffreda, appuyée par l’honorable sénatrice LaBoucane-Benson, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-32, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 3 novembre 2022 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022.

L’honorable Elizabeth Marshall : Honorables sénateurs, la partie 4 du projet de loi C-32 fournira au ministre des Finances 2 milliards de dollars pour l’achat d’actions d’une société qui n’est pas nommée et n’existe pas. Le projet de loi ne fournit aucun renseignement à son sujet, sinon que ce sera :

[...] une filiale à cent pour cent de la Corporation de développement des investissements du Canada chargée d’administrer le Fonds de croissance du Canada.

Le projet de loi n’explique pas la signification du terme « administrer ». La société n’a pas encore été créée et il n’y a pas de renseignements à son sujet. Le projet de loi ne fournit aucun renseignement quant à la composition du conseil d’administration et ne précise même pas s’il y en aura un. Il n’y a aucun renseignement sur le mandat et la fonction de la société, ni sur sa structure de gouvernance; on ne sait pas de qui elle relèvera ni comment elle rendra des comptes aux Canadiens et aux parlementaires.

Il n’y a aucun renseignement concernant la gestion financière et le contrôle financier de plus de 2 milliards de dollars. Comme la société n’existe pas, qu’est-ce que la ministre a l’intention de faire de ces 2 milliards? Conservera-t-elle l’argent jusqu’à la création de la société ou l’investira-t-elle et dans ce cas, où?

Une autre disposition tout aussi préoccupante du projet de loi autorise le ministre à prélever sur le Trésor « [...] tout autre montant supérieur précisé dans une loi de crédits ». Aucun montant maximal n’est indiqué.

Honorables sénateurs, les dispositions législatives du projet de loi C-32 qui se rapportent aux dépenses d’au moins 2 milliards de dollars font seulement 18 lignes et ne fournissent pas de détails sur ces dépenses ni d’information sur la filiale visée.

Dans l’énoncé économique de l’automne, le gouvernement indique que les revenus qu’il désigne comme les « autres revenus projetés » ont été révisés à la baisse et que c’est « principalement attribuable à l’impact de la hausse des taux d’intérêt sur les revenus de la Banque du Canada ». Dans ses états financiers du troisième trimestre, la Banque du Canada a enregistré une perte — une première en 87 ans d’histoire — qui s’élève à 522 millions de dollars.

Ces pertes ne sont pas couvertes par une entente d’indemnisation, contrairement aux pertes liées à l’achat d’obligations d’État, qui sont couvertes par une entente d’indemnisation conclue avec le gouvernement et qui seront assumées par le gouvernement fédéral. Avec la hausse des taux d’intérêt, les intérêts sur les dépôts bancaires augmentent. Cependant, le taux d’intérêt perçu sur les obligations du gouvernement du Canada que la banque a achetées pendant la pandémie est beaucoup plus faible. La perte enregistrée par la Banque du Canada est attribuable à cet écart entre les intérêts perçus à faible taux et les frais d’intérêt assumés à un taux plus élevé.

Il y a donc lieu de se demander comment la banque et le gouvernement traiteront ces pertes. Je m’attendais à ce que l’énoncé économique de l’automne indique comment ces pertes seraient traitées. Le gouvernement remboursera-t-il la banque pour ces pertes? Les pertes seront-elles plutôt accumulées dans le bilan de la banque? Puisqu’on s’attend à ce que ces pertes se poursuivent dans l’avenir, les parlementaires et les Canadiens devraient être informés du sort réservé à ces éléments.

Honorables sénateurs, la présentation tardive des comptes publics continue de poser problème. Cette année, les comptes publics ont été déposés le 27 octobre, ce qui est un peu mieux que l’an dernier, où ils l’avaient été le 14 décembre, mais néanmoins plus tard que le 30 septembre, soit six mois après la fin de l’exercice financier.

Si les comptes publics ont été déposés cette année le 27 octobre, le rapport de la vérificatrice générale était en fait daté du 12 septembre, après quoi il a fallu 45 jours au gouvernement pour le déposer au Parlement. En moyenne, au cours de la dernière décennie, les comptes publics ont été déposés plus de deux mois après la conclusion de l’audit du vérificateur général. Autrement dit, il semble que le gouvernement retarde le dépôt des comptes publics.

Lors d’une récente réunion du Comité sénatorial des finances, la vérificatrice générale Karen Hogan nous a assuré que son bureau terminerait l’audit des comptes publics à temps pour permettre un dépôt avant le 30 septembre. Elle a ajouté que, habituellement, elle approuve les comptes publics au début de septembre et qu’elle serait prête à devancer cela de quelques semaines, au besoin, pour respecter tous les délais de publication.

Les normes avancées sur les rapports financiers du Fonds monétaire international recommandent que les gouvernements publient leurs états financiers annuels dans les six mois suivant la fin de l’exercice financier. Les parlementaires et les Canadiens ont besoin d’accéder à cette information dans les plus brefs délais afin que les renseignements fournis soient à jour et non dépassés.

Honorables sénateurs, l’Allocation canadienne pour les travailleurs est un crédit d’impôt remboursable visant à aider les Canadiens qui travaillent, mais gagnent un petit salaire. Dans l’énoncé économique de l’automne, on a annoncé une modification de la politique gouvernementale concernant cette allocation. Les personnes seules recevront 1 395 $ si leur revenu net modifié est de 22 944 $ ou moins. Pour les gens dont les revenus se situent entre ce montant et 32 244 $, le montant de l’allocation est réduit. Les familles, quant à elles, obtiendront 2 403 $ si leur revenu net modifié est de 26 177 $ ou moins. Les familles dont les revenus se situent entre ce montant et 42 197 $ verront pour leur part le montant de leur allocation être réduit.

Sur les 52 milliards de dollars en nouvelles dépenses que prévoit l’énoncé économique de l’automne, 4 milliards de dollars sont liés aux changements apportés à l’Allocation canadienne pour les travailleurs. À compter de l’année prochaine, tous les travailleurs qui sont admissibles à cette allocation selon leurs revenus de l’année précédente recevront des paiements anticipés tous les trois mois au lieu d’un paiement forfaitaire après avoir présenté leur déclaration de revenus.

Cependant, la révision de l’allocation a également entraîné un changement. Sous l’ancien régime, le paiement était versé seulement après que le travailleur eut soumis sa déclaration de revenus. Si le travailleur avait opté pour un paiement anticipé partiel, tout trop-payé déterminé après la soumission de la déclaration de revenus devait alors être remboursé à l’État. En revanche, sous le nouveau régime de paiements anticipés trimestriels, qui sont versés avant la soumission de la déclaration de revenus, tout trop-payé établi d’après la déclaration de revenus soumise n’aura pas à être remboursé. Le coût considérable de ce changement — 4 milliards de dollars — découle en grande partie de la décision du gouvernement de ne pas récupérer ces trop-payés lorsque les travailleurs ne sont plus admissibles à ces prestations ou qu’ils ont droit à des montants inférieurs.

Cependant, le nouveau régime introduit des injustices dans le régime fiscal et dans le programme lui-même. Par exemple, on se retrouvera avec des situations où, même si deux travailleurs reçoivent le même salaire au cours d’une année donnée, seul l’un d’eux recevra l’Allocation canadienne pour les travailleurs parce qu’il y était admissible l’année précédente. En effet, si un travailleur était admissible à l’allocation l’année précédente, mais que son revenu est plus élevé cette année et dépasse le plafond de l’allocation, il recevra quand même l’Allocation canadienne pour les travailleurs et il n’aura pas à rembourser le trop-perçu. Comparons cette situation à celle d’un collègue qui reçoit le même salaire pour la même année, mais qui était inadmissible à l’allocation l’année précédente : ce travailleur ne recevra aucune Allocation canadienne pour les travailleurs. Le fait de ne pas exiger le remboursement d’une prestation qui a été versée à des particuliers non admissibles déroge au régime fédéral d’imposition actuel.

Le directeur parlementaire du budget nous a dit que le coût substantiel de cette mesure est en grande partie attribuable à la décision stratégique du gouvernement de ne pas recouvrer les paiements anticipés lorsque les revenus des bénéficiaires augmentent et que ces derniers ne sont plus admissibles aux prestations, ou qu’ils y sont à un niveau inférieur. Il a ajouté que le fait de ne pas exiger le remboursement des prestations fédérales aux particuliers non admissibles déroge passablement au régime fédéral d’imposition et de transferts actuel.

Honorables sénateurs, deux des modifications proposées dans la partie 1 du projet de loi C-32 concernent l’Agence du revenu du Canada. L’alinéa 1q) du projet de loi renforce les règles relatives à l’évitement des dettes fiscales lorsqu’un contribuable transfère des actifs à une personne ayant un lien de dépendance pour une contrepartie insuffisante.

(2010)

La deuxième modification fait suite à une décision du tribunal, qui a remis en question la mesure dans laquelle les fonctionnaires de l’Agence du revenu du Canada peuvent obliger les gens à fournir toute l’aide raisonnable et à répondre à toutes les questions pertinentes à l’application ou l’exécution de la Loi de l’impôt sur le revenu.

La modification vise à renforcer la Loi de l’impôt sur le revenu et d’autres lois afin de s’assurer que l’Agence du revenu du Canada a le pouvoir d’obliger une personne à répondre à des questions de vive voix ou par écrit. Malheureusement, les fonctionnaires de l’Agence du revenu du Canada qui ont comparu devant le Comité des finances nationales n’ont pas été en mesure d’expliquer si ces modifications répondent aux préoccupations soulevées dans leur rapport sur l’écart fiscal fédéral global récemment publié, intitulé Rapport sur l’écart fiscal fédéral global : Estimations et principales constatations concernant l’inobservation pour les années d’imposition 2014 à 2018, et si les modifications aideront l’Agence du revenu du Canada à percevoir les impôts qui font partie de ce soi-disant écart fiscal.

Dans le rapport sur l’écart fiscal fédéral global récemment publié, l’Agence du revenu du Canada estime que l’écart fiscal se situe entre 35 et 40 milliards de dollars. L’écart fiscal est une mesure de la perte potentielle de recettes fiscales résultant de l’inobservation fiscale. Bien qu’elle reconnaisse l’existence de l’écart fiscal et qu’elle fournit une estimation, l’Agence du revenu du Canada ne fait pas de progrès pour recouvrer les sommes dues. On a plutôt l’impression qu’elle se concentre sur les contribuables qui respectent déjà les règles fiscales. Le recouvrement d’une partie seulement de l’écart fiscal de 40 milliards de dollars réduirait considérablement le déficit du gouvernement. Par conséquent, des efforts supplémentaires devraient être déployés pour recouvrer ces sommes.

L’énoncé économique de l’automne contient une liste des nouvelles initiatives en plus de celles mises en œuvre depuis le budget de 2022. Ensemble, ces initiatives totalisent 52 milliards de dollars sur six ans, soit jusqu’à la fin de mars 2028. Toutefois, sur ces 52 milliards de dollars, 14 milliards de dollars sont liés à des initiatives au sujet desquelles il n’y a aucune information. Lorsqu’il est venu témoigner à notre Comité des finances nationales, le directeur parlementaire du budget a déclaré que cette somme inexpliquée de 14 milliards de dollars n’est pas un cas isolé, qu’il s’agit du plus gros montant non détaillé depuis 2016 et que la précision du montant laisse supposer que le gouvernement sait exactement à quoi il va servir. Toutefois, lorsque le gouvernement annoncera des initiatives liées à ces 14 milliards de dollars, il ne parlera pas des 14 milliards dont il est question ici. Les parlementaires seront incapables d’associer ces 14 milliards à quoi que ce soit. Nous ne saurons pas si ces 14 milliards de dollars vont être utilisés ou s’ils serviront simplement une fois de plus de coussin de sécurité ou en cas d’urgence.

Ce n’est pas inhabituel de la part du gouvernement actuel. Il pare aux situations imprévues et, en établissant le nouveau plafond de la dette, il y a deux ans, il a inclus un coussin de sécurité de 5 % en prévision de nouveaux emprunts ainsi qu’un double du coussin prévu cinq ans plus tôt au moment de l’établissement du précédent plafond de la dette. Le gouvernement aime se donner une bonne marge de manœuvre lorsqu’il s’agit de dépenser et d’emprunter, et la transparence n’est pas sa priorité.

Dans le budget d’avril 2022, le gouvernement a annoncé deux examens des dépenses qui mettraient l’accent sur l’ensemble des dépenses du gouvernement. Premièrement, on procéderait à un examen de la politique stratégique pour évaluer l’efficacité du programme, trouver des économies et réaffecter les ressources pour adapter les programmes et les activités du gouvernement à la nouvelle réalité de l’après-pandémie. On estime que l’examen de la politique stratégique devrait permettre d’économiser 6 milliards de dollars sur trois ans, à compter de 2024-2025.

Dans un second examen des dépenses, le gouvernement a déclaré qu’il examinerait les plans de dépenses annoncés précédemment dans la perspective de réduire le rythme et l’envergure des dépenses qui n’ont pas encore eu lieu — c’est la formulation utilisée — jusqu’à un maximum de 3 milliards de dollars au cours des quatre prochaines années, ou 750 millions de dollars par année à partir de 2023-2024. Je souligne que le gouvernement s’est engagé à se concentrer sur les dépenses qui n’ont pas encore eu lieu et que ce sont ces dépenses futures qu’il vise à réduire. Dans son énoncé économique de l’automne, le gouvernement a annoncé qu’il avait déjà atteint les cibles d’économies de 3 milliards de dollars et plus parce que la participation aux mesures d’aide relatives à la COVID-19 de l’exercice précédent — c’est-à-dire 2021-2022 — dépassait la cible de 3 milliards de dollars.

Honorables sénateurs, dans le budget de 2022, le gouvernement a pris l’engagement de diminuer les dépenses dans les années à venir, et non pas de revenir à une période antérieure pour se servir des programmes terminés afin de s’attribuer le mérite d’avoir fait des économies qui, en réalité, avaient été réalisés avant qu’il ait pris son engagement. Manifestement, le gouvernement n’est pas à la hauteur de la tâche de gérer ses dépenses. Le gouvernement peut sûrement faire mieux que cela. Les Canadiens méritent mieux.

Avant de terminer, je soulève de nouveau la question de la réforme fiscale dont on a tellement besoin. La dernière révision majeure du régime fiscal canadien remonte à 1967. Bien des choses ont changé depuis lors : notre façon de vivre et de travailler a changé, les Canadiens vivent plus longtemps, les technologies sont en constante évolution et la proportion des femmes sur le marché du travail a augmenté considérablement. Le régime fiscal est devenu un ensemble disparate de nouveaux règlements, d’amendements, de mesures incitatives, et cetera. Il compte maintenant plus de 3 000 pages. Soit dit en passant, la première loi de l’impôt sur le revenu, adoptée en 1917 comptait... je pensais qu’elle comptait 10 pages, mais le sénateur Loffreda a dit 11, alors ce n’est pas un grand écart. La Loi de l’impôt sur le revenu du Canada est devenue inefficace et compliquée pour les Canadiens et les entreprises, ainsi que les professionnels, comme les comptables et les avocats. Peut-être n’aurions-nous plus besoin d’autant de comptables et d’avocats si le régime fiscal était réformé.

Il est même devenu difficile pour le gouvernement, particulièrement pour l’Agence du revenu du Canada, d’appliquer cette loi, comme le montre un audit mené en 2017 par le Bureau du vérificateur général : quand les vérificateurs ont posé à l’Agence du revenu du Canada des questions sur l’impôt, ils ont reçu des réponses erronées dans presque 30 % des cas. Beaucoup d’organisations professionnelles et de Canadiens sont en faveur d’un examen approfondi du régime fiscal. C’est notamment le cas de Comptables professionnels agréés Canada, du Business Council of British Columbia, de la Chambre de commerce du Canada, et de comités du Sénat et de la Chambre des communes.

J’encourage une fois de plus mes collègues à appuyer un examen approfondi du régime fiscal canadien. C’est ainsi que je conclus mes observations au sujet du projet de loi C-32. Merci.

L’honorable Denise Batters : Sénatrice Marshall, je reviens sur cette société inexistante. Si j’ai bien compris, non seulement la société inexistante que le gouvernement crée avec le projet de loi C-32 recevra-t-elle 2 milliards de dollars en vertu de ce projet de loi, mais elle pourrait aussi recevoir une somme supplémentaire non précisée. Si c’est bien le cas, la somme supplémentaire est-elle assujettie à un plafond maximal?

La sénatrice Marshall : Je vous remercie. Votre interprétation du projet de loi est exacte. Il permet un versement précis de 2 milliards de dollars, prévu par la mesure législative elle-même. Une disposition permet aussi au ministre de demander des fonds provenant du Trésor, et aucune limite n’est prévue à cet effet. Nous n’avons aucune idée des sommes qui seront affectées à ce fonds après sa création.

La sénatrice Batters : J’ai aussi été assez choquée par la réponse que vous avez reçue de la ministre des Finances lorsque vous l’avez interrogée au sujet de cette société non existante la semaine dernière, lors d’une réunion du Comité sénatorial des finances. Comme le rapporte Blacklock’s, vous lui avez demandé :

[...] 2 milliards de dollars sans aucune explication dans le projet de loi sur la manière dont ces 2 milliards vont être contrôlés. La société n’est même pas créée. Dans quoi allez‑vous acheter des actions? Il n’y a pas encore de société.

La ministre Freeland a répondu que la transition verte est essentielle. Selon Blacklock’s, la ministre des Finances n’a pas expliqué pourquoi la mesure n’est pas détaillée dans un projet de loi distinct.

Sénatrice Marshall, je me souviens des premiers jours de la pandémie de COVID. Le gouvernement Trudeau a utilisé l’un de ses premiers textes de loi pour créer ce que j’ai appelé à l’époque une « énorme société d’État », c’est-à-dire la capacité d’acheter d’énormes sociétés pour les utiliser à des fins gouvernementales. À ce moment-là, ils étaient capables de créer une société. Pourquoi n’ont-ils pas fait la même chose dans ce cas-ci?

La sénatrice Marshall : Je n’en ai aucune idée, sénatrice Batters. Je pense que vous parlez de la filiale responsable du crédit d’urgence pour les grands employeurs. Cette filiale a été créée. D’ailleurs, il en a été question au Comité des finances, et le ministère des Finances nous a fourni toute l’information. Ce n’est probablement pas un bon exemple, et le sénateur Loffreda en a parlé, mais on peut aussi faire une comparaison avec la filiale responsable de la Banque de l’infrastructure du Canada, qui n’a pas été un grand succès, mais on a quand même créé une filiale distincte. Les mesures législatives relatives à cette filiale ont été incluses dans un projet de loi d’exécution du budget, et nous avons pu nous pencher là-dessus et demander des détails précis.

Dans ce cas-ci, il n’y a tout simplement aucun détail. Il n’y a aucune information. On parle seulement d’un montant d’au moins 2 milliards de dollars. On ne parle pas seulement de 2 milliards de dollars, mais d’au moins 2 milliards de dollars. Nous ne savons pas du tout comment on exercera un contrôle financier à cet égard. Nous ne savons rien à ce sujet.

Je sais que des gens consultent le document d’information et disent que celui-ci contient beaucoup d’information. On y trouve certains renseignements, mais on aurait dû inclure tout cela et plus encore dans le projet de loi. C’est donc une lacune importante.

(2020)

L’honorable Tony Loffreda : La sénatrice Marshall accepterait‑elle de répondre à une question? Je vous remercie de votre discours, toujours aussi perspicace.

Ne convenez-vous pas que la première étape commune à toute société et à tout investissement consiste en l’acquisition d’actions, et que c’est exactement ce qui se passe ici? Nous sommes en train d’acquérir pour 2 milliards de dollars d’actions dans une société d’État, une société affiliée qui appartient entièrement à la Corporation de développement des investissements du Canada à l’heure actuelle. Après l’acquisition des actions, nous nommerons un PDG et un conseil d’administration et mettrons la structure en place. Il y a un document d’information technique qui fournit le détail des objectifs et des valeurs.

Comme je l’ai mentionné dans mon discours, d’après mon expérience — j’ai parlé de 20 ans de vérification et je crois avoir toujours 40 ans, mais j’en ai plutôt 60, et 1984, c’était il y a longtemps —, le principal défi des fusions et des acquisitions consiste à intégrer l’acquisition et à obtenir les valeurs. Est-ce qu’ils ont nos valeurs? Nos valeurs seront différentes.

C’est une nouvelle société d’État. Nous acquérons les actions. Nous partons de zéro, comme je l’ai dit dans mon discours, et nous pouvons dorénavant bâtir de là, trouver le bon PDG et le bon conseil d’administration. N’êtes-vous pas d’accord avec cela? Ne convenez-vous pas que la première étape commune est l’acquisition d’actions? Comment faire autrement?

La sénatrice Marshall : Non, je ne suis pas d’accord avec vous, sénateur Loffreda. La première étape aurait dû être d’établir la société d’État au moyen d’une loi, laquelle aurait dû être incluse dans le projet de loi. Toute l’information dont vous parlez, les questions touchant le conseil et autres, est incluse dans le document d’information — le gouvernement devrait l’avoir eue. En fait, ce devrait être dans le projet de loi.

La société n’existe pas — vous dites qu’il faut acheter des actions de la société, mais elle n’existe pas. Des actions de quoi la ministre achète-t-elle exactement? Quels mécanismes de contrôle s’appliquent aux 2 milliards de dollars? Sans oublier qu’il n’est pas seulement question de 2 milliards de dollars. Il s’agit de 2 milliards de dollars et d’autres montants supplémentaires afin qu’elle puisse réquisitionner de l’argent supplémentaire. Il n’y a aucune information sur la société. Il n’y a rien à ce sujet.

En tant que parlementaires, nous devrions être très préoccupés qu’une partie d’un projet de loi prévoie 2 milliards de dollars pour acheter des actions d’une société qui n’existe pas. Qui plus est, nous ne savons rien de la société. Tout ce dont nous disposons, ce sont quelques pages qualifiées de documents d’information. Si ces renseignements sont à ce point important, ils doivent être dans le projet de loi pour que nous en débattions.

Non, je ne suis pas d’accord avec vous. Je dirais que c’est une dépense de plus de 2 milliards de dollars sans mécanisme de contrôle.

Le sénateur Loffreda : Ne croyez-vous pas qu’une chose aussi importante que le Fonds de croissance du Canada — je suis convaincu que, comme moi, vous avez lu trois fois le document d’information technique, donc je ne remets pas cela en question, et soit dit en passant, vous avez fait du bon travail dans votre discours —, mais ne convenez-vous pas que la bonne façon de procéder consiste à démarrer une nouvelle société d’État, et non, comme je l’ai mentionné dans mon discours, de l’intégrer, comme on l’a fait avec la Banque de l’infrastructure, à une société existante dont les valeurs et les objectifs sont totalement différents de ceux du Fonds de croissance du Canada, dont les objectifs sont clairs?

On le constate dans le document d’information technique et l’énoncé économique de l’automne : les objectifs sont clairs. L’intention du gouvernement par rapport à ce fonds de croissance est évidente, tous comme les objectifs et là où l’argent sera investi. Ces 2 milliards de dollars serviront à acheter des actions; viendra ensuite la nomination du chef de la direction et du conseil d’administration, suivie des investissements.

N’êtes-vous pas d’accord pour dire que le meilleur moyen de procéder est de partir à neuf en ce qui a trait aux technologies, d’autant plus que le matériel et les technologies deviennent très rapidement désuets?

Ne convenez-vous pas qu’il vaut mieux partir à neuf? Acheter des actions est la première étape courante pour créer une société. Vous ne croyez pas?

La sénatrice Marshall : Je ne peux pas être d’accord avec vous, sénateur Loffreda, parce que la société en question n’a pas été créée. Elle n’existe pas. Le projet de loi nous dit de donner 2 milliards de dollars à la ministre pour qu’elle puisse acquérir des actions dans une filiale d’une société donnée. Je demande donc quel est le nom de cette société pour que je puisse me renseigner à son sujet, et quelqu’un me répond de ne pas m’inquiéter parce que cette société n’a pas encore été créée. On ne trouve rien à ce sujet dans la mesure législative. Vous affirmez qu’il y a un document d’information. Écoutez, je veux voir cette information dans la mesure législative. C’est là la bonne façon de procéder.

Des voix : Bravo!

[Français]

L’honorable Renée Dupuis : La sénatrice Marshall accepterait‑elle de répondre à une question?

[Traduction]

La sénatrice Marshall : Oui, bien sûr.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Merci. Je vous écoute toujours attentivement et j’ai de bonnes raisons de le faire. On porte souvent attention à la fin d’un discours, surtout s’il est long. Ce qui m’a frappée à la fin de votre discours, c’est que vous nous avez invités à travailler à la réforme du système de taxation. Vous avez fait état du fait que le système actuel date de 1967. Il y a donc eu une succession de gouvernements au pouvoir depuis ce temps.

À votre avis, quelle devrait être la priorité pour entreprendre cette révision en profondeur de notre système de taxation?

[Traduction]

La sénatrice Marshall : Je pense que la priorité devrait être accordée à l’ensemble du système. Je laisse au gouvernement le soin de décider de la manière dont il s’y prendra, mais il doit mettre en place une sorte de groupe de travail composé d’un bon échantillon de représentants du monde des affaires et du secteur caritatif. Il faut un bon échantillon de personnes. Je pense que ce sera une grosse entreprise.

Depuis que je suis membre du Comité des finances nationales, j’ai soulevé la question. Le sénateur Loffreda et le sénateur Duncan l’ont soulevée. Or, malgré toutes les personnes et organisations qui disent au gouvernement : « S’il vous plaît, réformez notre système d’imposition », il semble que le gouvernement ne se soit pas du tout efforcé de le faire.

Je vais vous donner un exemple. J’ai parlé de l’imposition des sociétés. Quelqu’un doit se pencher sur la façon dont les sociétés sont imposées, sur cette histoire de rachat d’actions. Ce qui se passe, c’est que le gouvernement introduit toutes ces nouvelles mesures, qu’il s’agisse d’augmenter les recettes ou de dépenser les recettes, et vous avez un gros méli-mélo de 3 000 pages. Le gouvernement doit mettre en place un groupe de travail pour examiner l’ensemble du système fiscal. Je ne pense pas qu’il puisse le faire petit à petit. Je pense qu’il faut procéder à un examen complet. Certaines administrations l’ont fait au cours des dernières années.

Je me souviens des changements apportés au régime fiscal en 1967, ce qui révèle mon âge. Le gouvernement doit vraiment agir. La législation fiscale est très compliquée. Je suis comptable de formation et même moi je m’y perds.

[Français]

Son Honneur le Président : Je suis désolé, sénatrice Dupuis, mais le temps de parole de la sénatrice Marshall est écoulé. Voulez‑vous poser une autre question?

La sénatrice Dupuis : Toujours, oui.

[Traduction]

Son Honneur le Président : Sénatrice Marshall, demandez-vous cinq minutes de plus pour répondre aux questions?

La sénatrice Marshall : Oui.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Merci de votre réponse, sénatrice Marshall. Je comprends très bien l’idée de créer un groupe assez vaste avec une représentation élargie pour revoir l’ensemble du système. Vous avez parlé d’une initiative gouvernementale. Pensez‑vous que le Sénat, d’une manière ou d’une autre, aurait un rôle à jouer? Par exemple, le Comité sénatorial permanent des finances nationales pourrait-il entreprendre ce genre de réflexion?

[Traduction]

La sénatrice Marshall : Un certain nombre de membres du Comité sénatorial des finances ont fait la promotion de cette idée et nous l’avons inclus dans le rapport du Comité des finances. J’aimerais que plus de sénateurs en parlent. Si nous le faisions, peut-être que le gouvernement serait incité à faire quelque chose ou, du moins, à y réfléchir.

L’honorable Percy E. Downe : Sénatrice Marshall, dans votre discours, vous avez parlé d’évasion fiscale et du travail de l’Agence du revenu du Canada. J’aimerais avoir votre avis au sujet des Panama Papers, révélés en avril 2016, et du fait que 894 Canadiens avaient des comptes dans ce pays. Nous le savons, il n’est pas illégal d’avoir des comptes bancaires à l’étranger, mais, d’après ce que nous savons, l’Agence du revenu du Canada est arrivée à un total de plus de 9 millions de dollars en impôts impayés pour 840 de ces Canadiens. C’était en 2016.

Des pays de partout sur la planète dont les citoyens avaient des comptes à Panama ont réussi à récupérer 1,2 milliard de dollars liés à l’affaire des Panama Papers. L’Australie a récupéré 92 millions de dollars, l’Allemagne, 183 millions de dollars et même l’Islande a réussi à récupérer 25 millions de dollars. Le Canada n’a pas encore récupéré un seul cent, et aucune accusation n’a été portée. Que proposez-vous que nous fassions à propos de l’Agence du revenu du Canada?

(2030)

La sénatrice Marshall : Je pense que l’Agence du revenu du Canada devrait commencer à faire son travail. Elle dispose en effet de très bons moyens. On lui a même accordé des ressources spécialement pour combler l’écart fiscal. Elle le mesure, mais ne fait rien pour y remédier. L’Agence du revenu du Canada doit assumer ses responsabilités et commencer à faire le travail pour lequel elle est payée.

Le sénateur Downe : Je pense que le fait de savoir que les comptes de 106 Canadiens se trouvaient dans une banque du Liechtenstein il y a plus de 10 ans mine la confiance des Canadiens dans le système fiscal. Encore une fois, des sommes étaient dues et aucune accusation n’a été portée.

Deux ans plus tard, on a découvert les comptes de plus de 1 700 Canadiens dans une banque suisse. Encore une fois, au Canada, il n’y a eu aucune accusation ni aucune condamnation, contrairement à ce qui a été fait dans d’autres pays où des accusations ont été portées afin de recouvrer des fonds.

Pensez-vous qu’il y a deux poids, deux mesures au Canada? Vous y avez brièvement fait allusion dans votre intervention. Les Canadiens reçoivent un feuillet T4 et paient leurs impôts. L’Agence du revenu du Canada fait un excellent travail en matière de lutte contre l’évasion fiscale au pays. Cependant, pour ceux qui peuvent engager des avocats et des comptables, les chances d’être poursuivis sont nulles, voire inexistantes. Êtes-vous d’accord avec cette affirmation?

La sénatrice Marshall : Oui, je suis d’accord. J’ai déjà soulevé la question plusieurs fois au Comité des finances, notamment lorsque l’Agence du revenu du Canada est venue y comparaître.

À une occasion, nous parlions de l’écart fiscal et du fait que l’agence ne s’en prend pas aux gens qui doivent de l’argent. Je me souviens de l’exemple d’un étudiant qui avait déclaré des frais de déplacement parce qu’il avait déménagé à Calgary après avoir obtenu son diplôme d’études universitaires. L’étudiant m’a raconté que l’Agence du revenu du Canada le talonnait pour qu’il paie environ 200 $ d’impôts.

J’ai dit aux représentants de l’agence que cela laisse aux contribuables l’impression qu’elle s’en prend aux cibles faciles. C’est ce que j’ai dit. Elle s’en prend aux cibles faciles et laisse les gros fraudeurs s’en tirer impunément.

L’autre chose qui se produit, c’est que tout le monde soupçonne les sociétés et les personnes à revenu élevé de frauder le fisc. Or, beaucoup d’entre elles paient tout l’impôt qu’elles doivent au gouvernement. Pourtant, nous avons un écart fiscal de 35 milliards à 40 milliards de dollars. Comment se fait-il que les gros fraudeurs s’en tirent impunément? Pourquoi ne paient-ils pas leur juste part?

C’est ce que la ministre des Finances répète constamment : chacun doit payer sa juste part. Qu’en est-il des particuliers et des sociétés qui contribuent à l’écart fiscal? Ils ne paient pas leur juste part. Il est temps que l’Agence du revenu du Canada et le gouvernement commencent à percevoir l’impôt qui leur est dû.

Nous devrions avoir un bilan plus sain.

Son Honneur le Président : Sénatrice Marshall, votre temps de parole est écoulé. Je sais que le sénateur Loffreda a une autre question. Demandez-vous plus de temps pour répondre à sa question?

Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : Le consentement n’est pas accordé.

L’honorable Ratna Omidvar : Je prends moi aussi la parole au sujet du projet de loi C-32, Loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2022. Je parlerai d’un tout petit paragraphe du projet de loi. Vous l’aurez deviné, il est question d’organismes de bienfaisance. Je vous demande de faire preuve de bienveillance à mon égard, alors que j’accapare votre temps en cette heure tardive, mais c’est pour de bonnes raisons, chers collègues.

Pendant et après la pandémie, lorsque des Canadiens étaient dans le besoin, ce sont les nombreux organismes de bienfaisance du Canada qui ont pris la relève pour offrir des services essentiels. Ce n’était pas facile. Ce secteur n’a pas les ressources nécessaires pour effectuer facilement un changement de cap, mais il l’a fait. Il a donc réussi à offrir des services dont la population avait vraiment besoin, notamment les jeunes en détresse, les femmes dans les refuges et les personnes démunies qui n’avaient pas de quoi se nourrir.

Maintenant que nous sommes dans l’après-pandémie, ces organismes s’adaptent aux nouvelles demandes et à la nouvelle réalité. D’un côté, les demandes de services augmentent et, de l’autre, la quantité de dons diminue. Ce sont, une fois de plus, les organismes de bienfaisance qui essuient le coup. Ils seront soulagés et ils appuieront cette mesure dans le projet de loi qui a pour objectif de faire passer le contingent des versements des fondations de 3,5 % à 5 %. Comme l’a souligné le sénateur Loffreda, cette mesure générera près de 400 millions de dollars, voire plus, pour les organismes de bienfaisance partout au Canada.

Comme l’a précisé le gouvernement, les organismes de bienfaisance doivent dépenser chaque année un montant minimum calculé selon la valeur de leur investissement. Si une personne crée une fondation avec un investissement annuel de 10 millions de dollars pour lequel elle reçoit un crédit d’impôt pour don de charité, il est attendu qu’un montant de base provenant de ce crédit d’impôt doit être investi chaque année dans les activités de bienfaisance qui correspondent au mandat de la fondation. C’est ce qu’on appelle le contingent des versements, ou CV. Les organismes de bienfaisance utilisent l’acronyme CV et je vais donc aussi parler de CV. Ce dernier fait en sorte que les organismes de bienfaisance investissent dans nos collectivités au lieu d’accumuler les retours dans des comptes d’investissement.

En 1976, le gouvernement a fixé le CV à 5 %. Par la suite, il a baissé ce pourcentage à 4,5 %, et il est demeuré inchangé pendant 20 ans — c’est-à-dire jusqu’en 2004, où il a été réduit à 3,5 %. Cette politique était justifiée par une meilleure représentation des taux réels de retour à long terme que l’on connaissait à l’époque. Si vous vous souvenez, il y a eu une crise économique durant cette période. Toutefois, non seulement les marchés se sont stabilisés depuis cette crise, mais ils ont aussi généré des retours de 10 % ou plus. Or, le CV n’a pas été ajusté, et il est toujours fixé à 3,5 %.

À la suite des consultations menées auprès du secteur en 2021, le projet de loi C-32 propose d’instaurer un nouveau contingent des versements graduel pour les organismes de bienfaisance. Pour les actifs d’investissement supérieurs à 1 million de dollars, le taux du CV passera de 3,5 % à 5 %. Ce nouveau taux plus élevé augmentera le soutien au secteur des organismes de bienfaisance tout en étant fixé à un niveau qui est viable et qui assure une disponibilité continue du financement à long terme.

Chers collègues, je soutiens cette mesure pour des raisons évidentes. Elle apporte davantage de fonds privés aux organismes de bienfaisance. Elle nous met sur un pied d’égalité avec des États semblables, comme les États-Unis. Il s’agit d’un changement modeste de 3,5 % à 5 %. Certains défenseurs ont fait pression pour que le CV soit de 10 %, ce qui aurait permis d’attribuer plus d’argent aux organismes de bienfaisance. Je pense qu’un passage à 10 % aurait été trop grand et qu’il aurait sérieusement déstabilisé le secteur. Je suis tout à fait favorable à une approche prudente.

Qui sera touché? Il existe environ 5 800 fondations privées au Canada, dont l’actif s’élève à quelque 80 milliards de dollars. Il y a aussi des organismes de bienfaisance, comme le YMCA, qui ont des fonds de dotation et des fiducies. Au total, comme l’a mentionné le sénateur Loffreda, leurs actifs s’élèvent à 116 milliards de dollars.

Selon les estimations, le nouveau seuil proposé de 5 % pour le CV entraînera des déboursés supplémentaires de 300 à 500 millions de dollars par année à compter de 2023. Honorables sénateurs, ce n’est pas de la menue monnaie. Étant donné les besoins actuels, comme la réconciliation, la justice raciale et l’équité, pour n’en nommer que quelques-uns, une augmentation du contingent des versements représente une ambition politique raisonnable.

Comme toujours, dans le secteur des fondations également, il y a des chefs de file et des retardataires. Certaines fondations déboursent déjà plus de 3,5 %, alors que d’autres n’atteignent pas le seuil. Pour ne citer qu’un exemple de leadership, chers collègues, la semaine dernière, la Fondation de Winnipeg a reçu 500 millions de dollars d’une personne, Miriam Bergen — le don le plus important jamais fait par un particulier dans l’histoire du Canada. La Fondation Ivey — une fondation de renom au Canada — a annoncé la semaine dernière qu’elle ne se contenterait pas de respecter le contingent de versements, mais qu’elle dépenserait la totalité de son capital de 100 millions de dollars au cours des cinq prochaines années. Ils vont tout dépenser.

(2040)

Ceci, chers collègues, ne donne qu’un aperçu de la générosité des Canadiens. Cependant, il existe de nombreux fonds de dotation, fiducies et fondations qui font moins que le strict minimum. Il existe de nombreuses fondations dites « familiales » qui font moins que ce que l’on pourrait attendre d’elles, étant donné les avantages fiscaux importants dont elles bénéficient lors de leur constitution.

Les fondations sont, soit dit en passant, un secteur en plein essor, dont le taux de croissance est plus élevé que celui des autres organismes de bienfaisance. C’est, bien sûr, une bonne chose. D’une part, cela signifie que les gens sont généreux et que la richesse augmente à un rythme suffisamment rapide pour que des particuliers créent de telles entités. D’autre part, cela signifie que davantage d’argent est injecté dans la collectivité pour répondre à divers besoins considérés comme relevant de la charité par la loi.

Cette modification au contingent des versements arrive à point nommé. Comme vous vous en souviendrez, en juin de l’année dernière, nous avons adopté le projet de loi C-19, qui a créé une troisième façon pour les organismes de bienfaisance de travailler avec d’autres types d’organismes sans être coincés par les critères de « propres activités » et de « direction et contrôle ». Cette mesure a fourni une approche raisonnable et responsable pour se débarrasser d’une forme de racisme systémique profondément ancrée dans la Loi de l’impôt sur le revenu, qui faisait en sorte que toute propriété intellectuelle découlant d’une entente appartenait à l’organisme de bienfaisance et non au partenaire. Je ne reviendrai pas sur les arguments présentés. Vous avez approuvé la mesure législative à l’unanimité et, heureusement, elle est devenue loi.

Chers collègues, il s’agit là d’importants changements. Il y aura maintenant des partenariats solides et efficaces. La hausse du taux de contingent des versements entraînera une augmentation du montant absolu consacré à des causes. De plus, ces nouveaux changements permettront une répartition plus équitable des fonds de charité, qui rejoindront les communautés autochtones, noires et de couleur ainsi que les secteurs de développement local de l’hémisphère Sud.

Je devrais vous dire que, même si j’appuie la proposition, il y a eu quelques observations initiales de la part des fondations dont j’aimerais vous faire part.

D’abord, nous savons que les marchés vivent des bouleversements économiques depuis un an, et les fondations s’inquiètent du rendement de leurs placements dans ce contexte.

Deuxièmement, certaines fondations ont des règlements qui exigent qu’elles conservent à perpétuité leurs fonds d’établissement. Ces œuvres de bienfaisance et ces fondations se trouvent dans la situation peu enviable où elles doivent faire des investissements risqués afin de respecter le relèvement du contingent des versements.

Cependant, je suis d’avis que tout ce qui monte finit par redescendre, et tout ce qui descend doit forcément remonter — du moins, c’est ce que je me dis chaque fois que je regarde les retours sur mes propres investissements.

De plus, si une fondation ou une œuvre de bienfaisance se trouve en situation de grande difficulté, elle peut demander à l’Agence du revenu du Canada une considération particulière et s’entendre avec elle pour verser moins de 5 %. Le nouveau projet de loi prévoit que l’Agence du revenu du Canada serait tenue, en vertu de la loi, de publier tous les arrangements de ce genre aux fins de transparence. Il s’agit d’un nouveau et heureux changement.

Chers collègues, si le principe du projet de loi est d’encourager plus de dons de bienfaisance à la collectivité, il rate une occasion importante parce que la modification ne couvre pas l’instrument de dons de charité qui connaît la croissance la plus rapide au Canada, soit les fonds de bienfaisance.

Les fonds orientés par les donateurs permettent à un groupe ou à un particulier de donner de l’argent à une fondation de bienfaisance ou à une fondation d’entreprise, qui s’occupe de la totalité de l’administration, de la gouvernance et de l’établissement de rapports, moyennant une contrepartie, en général un pourcentage de l’actif total. Le donateur reçoit un reçu à des fins fiscales pour la somme totale au moment de la création du fonds, mais il n’est pas nécessaire de débourser des fonds chaque année. La somme investie dans le fonds peut croître et être investie par l’institution, sans être dépensée sur des causes importantes.

Puisqu’il est plus simple d’établir un fond orienté par les donateurs qu’une fondation privée, bon nombre de philanthropes choisissent cette nouvelle solution plus simple. Elle exige moins de gouvernance et de gestion, et elle cause moins de maux de tête, ce qui est positif. Le problème vient du déboursement.

L’entité de portefeuille, qui est habituellement une fondation communautaire ou une fondation d’entreprise, détient probablement de nombreux sous-fonds. Si, en tout, elle débourse 5 % de tous ces fonds, c’est très bien. Toutefois, il n’est pas obligatoire de respecter les seuils établis de 3,5 ou de 5 % pour tous les fonds.

C’est peut-être la prochaine mesure que le gouvernement pourrait envisager — je ne suis pas en train de proposer un amendement, chers collègues —, étant donné que la valeur actuelle des fonds orientés par les donateurs au Canada est de 4,5 milliards de dollars.

De plus, un nombre croissant de fondations éclairées souhaitent vivre pleinement leur mission de bienfaisance. Elles ne se contentent pas de verser seulement 5 % de leur actif total. Elles investissent leurs éléments d’actif non pas dans le marché financier, mais dans ce qu’on appellerait des programmes — axés sur les changements climatiques, le logement et la réconciliation — et rien ne leur permet d’inclure une démarche progressiste de ce genre dans le contingent des versements.

En conclusion, chers collègues, j’accueille très favorablement le projet de loi à l’étude et j’encourage le gouvernement à considérer comment la Loi de l’impôt sur le revenu pourrait être modifiée à l’avenir afin de créer un régime plus équitable pour les contribuables et les organismes de bienfaisance. Merci.

L’honorable Mary Jane McCallum : Honorables sénateurs, je suis obligée d’intervenir encore aujourd’hui pour parler du projet de loi C-32, Loi de mise en œuvre de l’énoncé économique de l’automne de 2022, et plus particulièrement de la section 3 de la partie 4, c’est-à-dire la Loi sur l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres de Premières Nations. Je me concentrerai aujourd’hui sur la façon dont le processus d’étude préalable a commis une injustice envers les Premières Nations.

J’ai constaté qu’avec les études préalables, nous, les sénateurs, n’étudions pas les dossiers aussi minutieusement que nous le devrions, et nous ne sommes donc pas en mesure de faire un second examen objectif digne de ce nom. Malgré cela, comme l’ont dit d’autres sénateurs, les études préalables sont devenues un élément normalisé de la procédure, ce qui crée des problèmes.

En tant que sénatrice issue des Premières Nations, je suis préoccupée par la façon dont cette précipitation a porté atteinte à mon privilège. Le rapport provisoire du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement intitulé Une question de privilège : document de travail sur le privilège parlementaire au Canada au XXIe siècle indique que :

Le discours sur le privilège parlementaire, à la fin du XXe siècle et maintenant au XXIe siècle, est axé sur l’application du privilège dans un système juridique fondé sur des droits, illustré au Canada par la Charte canadienne des droits et libertés, et dans un contexte où la population attend une plus grande transparence et une reddition de comptes plus rigoureuse à l’égard des décisions des parlementaires

Le rapport cite la Cour suprême du Canada dans l’affaire Canada (Chambre des communes) c. Vaid  :

Dans le contexte canadien, le privilège parlementaire est la somme des privilèges, immunités et pouvoirs dont jouissent le Sénat, la Chambre des communes et les assemblées législatives provinciales ainsi que les membres de chaque Chambre individuellement, sans lesquels ils ne pourraient s’acquitter de leurs fonctions.

Chers collègues, mon travail et mes fonctions portent sur les peuples autochtones du Canada, notamment les membres des communautés, les dirigeants et des groupes d’intérêt particulier. Mon rôle consiste notamment à leur permettre de se faire entendre, sachant qu’ils n’ont presque pas été entendus par le passé dans l’enceinte du Sénat ou lors des travaux des comités sénatoriaux. Il est extrêmement difficile d’accomplir cela avec des études préalables.

(2050)

Compte tenu de l’urgence qui a été créée artificiellement autour du projet de loi C-32 et qui a donné lieu à de multiples études préalables, je n’ai pas été en mesure de m’assurer que les groupes intéressés que je représente aient l’occasion de se faire entendre sur des questions pertinentes d’une importance capitale. Cela est dû à l’incapacité de faire traduire rapidement leurs documents en français et à l’incapacité de présenter des propositions d’amendement parce que le Bureau du légiste et du conseiller parlementaire est surchargé. Ce problème, dont le bureau du légiste n’est aucunement responsable puisqu’il fournit un service crucial, a déjà eu une incidence sur mon travail au Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles.

Ce qui est très préoccupant dans de tels cas, c’est que ce problème m’a déjà empêché de démontrer de mon mieux à mes collègues, qui sont chargés de prendre des décisions ayant une incidence directe sur la vie et le bien-être des membres des Premières Nations, les effets cumulatifs de l’extraction des ressources sur la vie des Autochtones et les efforts de réconciliation.

Je suis curieuse de voir comment la traduction française sera gérée avec ces nouvelles études en comité. Pourquoi des amendements sont-ils permis dans certains projets de loi, mais pas dans d’autres? Il s’agit d’un traitement inégal.

Honorables sénateurs, dans ce cas précis, en ce qui concerne le projet de loi C-32, le grand chef Garrison Settee, de l’organisme Manitoba Keewatinowi Okimakanak, ou MKO, n’a entendu parler de ce projet de loi que très tard dans le processus. Il a aussitôt présenté un mémoire au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones et au Comité sénatorial permanent des finances nationales.

Le 1er décembre 2022, l’organisme MKO a aussi demandé à être invité à témoigner devant le Comité des peuples autochtones et le Comité de l’énergie au sujet de la section 3 de la partie 4 du projet de loi C-32. Jusqu’à présent, aucun de ces comités n’a joint l’organisme MKO pour lui faire part d’une décision à la suite de sa demande de comparution. Mais surtout, on n’a toujours pas indiqué à l’organisme si son mémoire a été pris en considération.

Honorables collègues, l’organisme MKO a demandé à ce qu’on prenne des mesures judicieuses et rigoureuses pour faire respecter les droits des Premières Nations et donner suite aux mesures législatives relatives aux Premières Nations qui ont été promulguées en vertu de la Loi sur la gestion des terres des premières nations ainsi qu’aux règlements qui ont été pris en vertu de la Loi sur les Indiens. L’organisme MKO fait valoir que le Parlement a établi ces régimes législatifs en plus de reconnaître le droit inhérent à l’autonomie gouvernementale en vue de créer le troisième ordre de gouvernement nécessaire pour établir la relation de nation à nation mise de l’avant par le gouvernement fédéral.

Cependant, dans les communautés des Premières Nations, ces régimes législatifs sont inopérants en raison des politiques et de l’inaction du gouvernement du Canada et de la GRC. Selon le grand chef Settee, cela donne lieu à des « régimes en suspens » avec des lois et règlements qui sont inapplicables dans les communautés des Premières Nations.

Quels sont les résultats de ces régimes en suspens? Le grand chef Settee, des MKO, a voulu partager avec tous les honorables sénateurs ces renseignements essentiels sur les diverses expériences de Premières Nations membres des MKO dans leur lutte visant à mettre en œuvre les pouvoirs législatifs obtenus grâce au projet de loi C-49 en 1999 et au projet de loi C-428 en 2015. Pourquoi ces incertitudes persistent-elles malgré des lois qui étaient censées les corriger?

Ces expériences ont eu des effets sur toutes les communautés qui ont été obligées de se démener pour protéger le mieux possible leurs membres. Il s’agit notamment de confinements, de distanciation sociale, d’un nombre maximum de patients par habitation, par entreprise ou par installation, d’intrusion par des personnes non autorisées pendant les interdictions de déplacements qui visaient les non-résidents et de la vérification de l’état de santé des personnes arrivant dans la communauté, qui sont toutes des mesures de protection accordées aux autres Canadiens.

Honorables sénateurs, j’ai déjà parlé du fait que le chef, le conseil, les policiers et le coordonnateur des mesures contre la pandémie de la nation crie de Misipawistik ont été abandonnés par la GRC, qui avait refusé d’appliquer la loi sur les mesures d’urgence liées à la COVID-19 qui avait été adoptée en vertu du code foncier de cette nation en pleine éclosion majeure de COVID-19 dans la communauté.

Le Service des poursuites pénales du Canada a déclaré officiellement qu’il n’a pas le mandat d’entamer des poursuites en vertu des lois du code foncier d’une Première Nation et de la Loi sur la gestion des terres des Premières Nations.

La Loi sur la gestion des terres des Premières Nations a été adoptée pour reconnaître le droit inhérent à l’autonomie gouvernementale et les relations de nation à nation en donnant la possibilité de remplacer certaines dispositions de la Loi sur les Indiens. Qu’en est-il de la reconnaissance de l’autonomie gouvernementale lorsque les lois adoptées par les Premières Nations en vertu d’un code foncier afin de protéger la santé et la vie de leurs membres au cours d’une pandémie mondiale ne sont pas reconnues, respectées, appliquées et qu’elles ne font l’objet d’aucune poursuite? Les demandes d’aide en cas de situation d’urgence doivent être traitées rapidement. Ces demandes ne peuvent attendre la bénédiction du procureur général, qu’il peut falloir attendre des mois.

Chers collègues, je suis d’accord avec les déclarations du sénateur Patterson selon lesquelles notre étude préalable du projet de loi C-32 n’a servi qu’à précipiter l’adoption de cette mesure législative. Je comprends le point de vue du sénateur, selon lequel :

[P]our les organisations autochtones ou communautaires qui ont déjà des ressources limitées[,] [n]ous devons donner un préavis aussi long que possible aux témoins potentiels. Nous devons ralentir et nous assurer que nous examinons correctement les projets de loi, en prenant le temps d’entendre le plus grand nombre possible de personnes et de points de vue différents.

Par ailleurs, je suis d’accord avec les affirmations du sénateur Francis selon lesquelles :

[I]l nous incombe de veiller à ce que les voix des individus et des groupes historiquement marginalisés, sous-représentés et opprimés soient entendues et prises en compte.

Je partage également le point de vue du sénateur Francis, selon lequel :

J’espère également que les membres du Comité des finances nationales auront l’occasion d’entendre directement l’organisation Manitoba Keewatinowi Okimakanak et peut-être d’autres personnes au sujet de la proposition de loi sur l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres des premières nations.

Comme l’a demandé le sénateur Loffreda au Comité des finances nationales, j’attends moi aussi avec impatience les commentaires de la vice-première ministre et ministre des Finances sur les préoccupations relatives au projet de loi C-32 soulevées par l’organisation Manitoba Keewatinowi Okimakanak, auxquelles la vice-première ministre et ministre des Finances avaient répondu en disant : « J’en prends bonne note. »

Honorables sénateurs, les deux modifications relevées et soumises par l’organisation Manitoba Keewatinowi Okimakanak font référence à deux autres lois du Parlement qui ne sont pas incluses dans le projet de loi C-32, mais qui ont des répercussions directes sur la capacité d’application par les Premières Nations des lois adoptées en vertu d’un code foncier. Ces deux lois qui ont des répercussions sur l’application des lois des Premières Nations adoptées en vertu d’un code foncier et les poursuites intentées en vertu de ces lois sont la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C. (1985), ch. R-10, et la Loi sur le directeur des poursuites pénales, L.C. 2006, ch. 9, art. 121.

Selon moi, le fait qu’on n’ait pas modifié ces deux lois lorsque cet accord-cadre a été adopté en 1999 constitue une grave omission. Les problèmes liés à l’application de la loi et aux poursuites étaient connus en 1999 lorsque le projet de loi C-45 a été adopté pour la première fois, mais on a pensé qu’ils faisaient partie d’une discussion continue et à plus long terme, qui n’a jamais eu lieu. La pandémie de COVID-19 a mis en lumière de façon frappante les effets de l’absence d’application de la loi et de poursuites judiciaires.

Honorables sénateurs, je parle parfois des failles que créent les projets de loi que nous adoptons, et nous en avons ici un exemple. Parce que nous traitons ce projet de loi à toute vitesse, une fois de plus, il nous est impossible d’examiner en profondeur les conséquences qu’il aura sur les Premières Nations touchées. Cette hâte nous empêche aussi de trouver les meilleures façons de représenter les personnes envers lesquelles nous avons des responsabilités. Comment pouvons-nous faire œuvre de réconciliation dans de telles conditions?

Il est très difficile de trouver des solutions qui aideront les Premières Nations à composer avec les injustices créées par des mesures prises isolément. Nous devons nous rendre à l’évidence et reconnaître que les études préalables ne font que contribuer au muselage des Premières Nations. Il faut faire mieux et exiger mieux. Kinanâskomitin. Merci.

(2100)

[Français]

L’honorable Diane Bellemare : Honorables sénateurs, aujourd’hui, je veux ajouter ma voix au débat sur le projet de loi C-32.

J’ai été un peu surprise par le débat que nous avons eu sur le Fonds de croissance; surprise, oui, mais pas tout à fait, dans le fond. Je veux partager avec vous également certaines craintes quant au Fonds de croissance du Canada, mais je voudrais plutôt le situer dans son contexte.

Tout d’abord, quand j’ai étudié le projet de loi C-32, j’ai trouvé qu’il contenait un ensemble de très bonnes mesures et qu’il était très important qu’elles soient adoptées. Je cite en exemple les mesures qui s’adressent aux étudiants et celles qui concernent l’accession à la propriété.

Je me suis intéressée davantage, quand j’ai regardé le projet de loi, au Fonds de croissance du Canada parce que je m’étais penchée sur l’Inflation Reduction Act of 2022, qui a été déposée aux États-Unis à l’automne dernier. Celle-ci prévoit un ensemble de mesures qui visent notamment à réduire l’impact de l’inflation sur les Américains, mais aussi des mesures permettant de stimuler les investissements américains, pour favoriser la transition verte et augmenter la productivité tout en générant une croissance qui mènera à une réduction du déficit. C’est tout un ensemble de défis que l’Inflation Reduction Act cherche à relever.

En même temps, quand on regarde cette loi, il y a près de 400 milliards de dollars qui sont versés aux entreprises sous forme de crédits d’impôt et de prêts. J’ai vu davantage de crédits d’impôt que de prêts, mais le ministère des Finances y a vu plus de prêts que de crédits d’impôt, cela dépend de l’interprétation dont ont fait de la loi américaine.

Bref, dans l’Inflation Reduction Act, on trouve un ensemble de mesures visant à stimuler l’investissement des entreprises dans le contexte de la transition vers une économie plus verte. Il s’agit de près de 400 milliards de dollars, sans compter les effets de levier que ces mesures cherchent à réaliser.

Je comprends que le gouvernement du Canada, à la suite du dépôt de cette loi américaine, se soit senti interpellé et que, dans le projet de loi dont nous sommes saisis, il y ait une mesure qui s’appelle le Fonds de croissance du Canada. Quand la ministre est venue témoigner au comité — je n’y étais pas, mais j’ai lu les témoignages —, il était évident qu’elle plaidait l’urgence d’agir pour créer un fonds qui atteindra jusqu’à 15 milliards de dollars et qui avait été annoncé. Elle l’a inséré dans ce projet de loi pour amorcer tout de suite des investissements possibles aux entreprises.

Il est vrai que cela soulève beaucoup de questions, parce que le projet de loi est relativement succinct, qu’il prévoit une somme de 2 milliards de dollars pour l’acquisition d’actions par le gouvernement et que celui-ci s’en remettra à la Corporation de développement des investissements du Canada pour entreprendre éventuellement des investissements et pour assurer la transition.

Évidemment, beaucoup de sénateurs ont posé des questions au sein du comité. La sénatrice Marshall a posé des questions très intéressantes, ainsi que le sénateur Gignac, le sénateur Loffreda, la sénatrice Galvez, la sénatrice Moncion et le sénateur Cardozo, qui ont tous été interpellés par ce fonds et par le peu d’information dont nous disposions, nous ne pouvons pas le nier.

Cela dit, on en apprend un peu plus quand on regarde le document technique lié au Fonds de croissance du Canada et les objectifs visés par le gouvernement dans cette mesure.

Je vais vous en lire des extraits. Vous verrez, mon but n’est pas tant de défendre cette mesure que d’essayer de suggérer au gouvernement des éléments à prévoir dans la prochaine mouture du projet de loi, où il y aura plus de renseignements sur l’institution qui sera créée. Je pense qu’il s’agit ici d’une bonne occasion pour dire au gouvernement de prévoir ces éléments dans la prochaine mouture. C’est pour cette raison que je vous lis les objectifs du fonds :

Étant donné que la prospérité économique du Canada repose traditionnellement sur les ressources naturelles et d’autres industries à forte intensité d’émissions, il faudra une transformation importante de la base industrielle pour que le pays atteigne ses objectifs climatiques et assure une prospérité à long terme pour les Canadiennes et les Canadiens. Le Canada doit créer les technologies, les infrastructures et les entreprises nécessaires pour réduire sa dépendance au carbone; il n’y arrivera pas sans faire croître rapidement et sans maintenir ensuite l’investissement privé dans des activités et des secteurs qui renforcent la position du Canada en tant que chef de file de l’économie à faibles émissions de carbone.

Le texte se poursuit ainsi :

Le FCC, conçu pour atténuer les risques qui limitent actuellement l’investissement de capital privé, permettra de débloquer les capitaux nationaux et étrangers dont le Canada a besoin.

Ce sont là les objectifs que le fonds vise à atteindre, donc la transition, et ce, à une échelle assez grande.

On apprend également dans tout le débat qu’il y a une urgence en la demeure. Dans les journaux également, on constate qu’il y a des entreprises qui avaient commencé à faire des investissements, des investissements risqués, et qui peuvent décider d’aller investir aux États-Unis sans subir trop de pénalités. Le fonds permet donc un peu — c’est comme cela que je l’interprète — de défendre la stratégie canadienne et de dire aux entreprises : « On va vous aider également dans les technologies et les secteurs qui sont plus à risques. »

L’argument n’est pas convaincant comme tel, mais le document technique nous permet aussi de voir l’ampleur et la complexité de la problématique. Dans le document technique, on apprend notamment quels sont les risques que ce fonds essaie d’atténuer pour les entreprises. Ce ne sont pas de petits risques, ce sont de gros risques.

D’abord, il y a les risques liés à la demande, compte tenu de l’incertitude entourant la valeur marchande finale; les risques liés aux politiques, en raison de l’incertitude entourant la réglementation en matière de lutte contre les changements climatiques — comme le prix du carbone ou les normes relatives aux carburants propres —; les risques réglementaires, qui sont importants et qui concernent ce que les provinces peuvent faire en ce qui a trait à l’évaluation des projets et à l’octroi de permis pour les projets de construction; les risques d’exécution qui découlent de la création de produits commercialisés et d’entreprises de pointe.

Tout cela est un jargon pour dire que nos entreprises font face à des risques majeurs. En ce sens, le gouvernement tentera, grâce à ce fonds, de trouver des instruments financiers qui lui permettront en même temps de recevoir des rendements sur investissement et d’atténuer les risques de toutes sortes à l’échelle des entreprises.

C’est ce que le gouvernement veut faire avec ce projet, mais pour l’instant, dans le texte de loi, il n’y a pas grand-chose qui décrit la mesure, sinon les renseignements que contient le document technique.

À mon avis, le gouvernement aurait dû présenter des résultats à atteindre dans le projet de loi. Il aurait été assez simple de proposer des résultats concrets en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ces résultats visés, ainsi que les éléments et les critères qui les définissent, apparaissent aussi dans le document technique à la dernière page. Il y en a plusieurs et je ne vous les lirai pas tous, mais on aurait pu indiquer dans le document que l’objectif principal est de réduire rapidement et sensiblement les émissions de GES et de contribuer à atteindre les cibles climatiques du Canada.

(2110)

Il faudrait aussi inclure dans le projet de loi des paramètres de rendement possible, par exemple la réduction des émissions annuelles de gaz à effet de serre grâce aux investissements du fonds dans des projets liés à l’amélioration de la technologie et aux investissements du fonds dans les entreprises.

Cela dit, je pense qu’on doit donner la chance au coureur et attendre le prochain projet de loi du gouvernement. Il faut dire au gouvernement que l’on souhaite voir trois choses dans son projet de loi : des objectifs de résultats, des cibles visant à atteindre des résultats concrets et une gouvernance beaucoup plus large que celle qui a été prévue et décrite au comité.

Au comité, le ministère a mentionné qu’il avait prévu une gouvernance assurée par des experts, des financiers qui seront capables d’adopter les meilleurs instruments pour réduire les risques d’investissement pour les entreprises. Malheureusement, je ne suis pas certaine que ce soit suffisant.

D’ailleurs, des témoins ont présenté des idées fort intéressantes sur la gouvernance du fonds. Je songe à M. Gil McGowan, qui est président de la Fédération du travail de l’Alberta. C’est un syndicaliste qui est venu présenter les éléments d’un rapport que la Fédération du travail de l’Alberta a produit, qui s’intitule Skate to Where the Puck is Going, ce qui signifie patiner où va la rondelle en français. Dans son rapport, la Fédération du travail de l’Alberta a prévu pour l’Alberta des éléments de transition et une stratégie industrielle. M. McGowan a affirmé au comité qu’il manque une vision au Fonds de croissance du Canada, et que le gouvernement devrait en avoir une. Il a proposé, ce qui est fort intéressant, une gestion bicamérale du Fonds de croissance du Canada. Je vais vous lire un extrait de ce qu’il a dit, parce que c’est plus clair si je le lis en anglais :

[Traduction]

J’ai transmis le rapport à la greffière, alors je vous encourage à examiner les sept voies que nous avons retenues. Il y a un élément du Fonds de croissance que je tiens à soulever, et j’en ai fait mention dans mon allocution d’ouverture. C’est une question de gouvernance. Au lieu de se contenter de créer une organisation sans lien de dépendance qui serait dirigée par des directeurs des placements, nous suggérons d’établir une structure bicamérale où il y aurait un conseil des intervenants au sommet, chargé de déterminer les orientations, et un conseil d’exploitation, chargé de gérer les investissements.

En Alberta, les principaux régimes de pension ont une structure bicamérale semblable. J’ai occupé les fonctions de président de ce qu’on appelle un conseil de parrainage, chargé d’établir les politiques générales. Il y avait aussi un conseil d’exploitation distinct.

[Français]

On suggère donc au gouvernement, dans sa prochaine version du projet de loi qui devrait arriver bientôt, une structure de gouvernance de cette nature, pour s’assurer que les projets qui seront choisis assureront une transition plus macroéconomique, et non pas la réalisation de petits projets spécialisés.

Par ailleurs, tout ceci m’a inspiré un autre commentaire en comparant la situation à l’expérience du Québec. En effet, il y a eu au Québec un Fonds vert; il y avait une loi, qui a depuis été modifiée, il y avait une structure un peu bicamérale et il y avait des objectifs de résultats. Toutefois, il faut du temps avant d’avoir de la clarté dans tout cela, parce que la question est relativement complexe. À mon avis, il manque quelque chose au Canada pour être capable de faire cette transition si nécessaire : nous avons des fonds et nous savons ce que nous devons faire, mais il n’y a pas de concertation entre les principaux acteurs économiques. Chaque gouvernement veut faire les choses conformément à ce que le gouvernement en place décide.

À mon avis, la problématique macroéconomique exigerait de créer non pas juste un fonds, mais un conseil canadien de la prospérité. Il faudrait institutionnaliser un conseil auquel siégeraient les provinces, le gouvernement fédéral ainsi que les représentants de l’économie, soit les entreprises et la main-d’œuvre.

Le défi est colossal. Si l’on créait un tel conseil, on pourrait lui donner la vision nécessaire pour dépenser les fonds que nous avons partout. Il y a des fonds au Québec; nous allons en recevoir. C’est ce que je souhaite que le gouvernement fasse : établir des objectifs de résultats, assurer une gouvernance bicamérale et créer un conseil de la prospérité.

Merci beaucoup.

[Traduction]

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : L’honorable sénateur Loffreda, avec l’appui de l’honorable sénatrice Laboucane-Benson, propose que le projet de loi soit lu pour la deuxième fois. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : Je vois deux sénateurs se lever.

Et deux honorables sénateurs s’étant levés :

Son Honneur le Président : Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie? Le vote aura lieu à 21 h 31. Convoquez les sénateurs.

(2130)

La motion, mise aux voix, est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois :

POUR
Les honorables sénateurs

Audette Gagné
Bellemare Gerba
Black Gignac
Boniface Gold
Bovey Harder
Busson LaBoucane-Benson
Clement Loffreda
Cordy Marwah
Cormier Miville-Dechêne
Coyle Moncion
Dalphond Petitclerc
Dasko Ringuette
Dawson Saint-Germain
Deacon (Nouvelle-Écosse) Smith
Deacon (Ontario) Sorensen
Dean Tannas
Downe Woo
Dupuis Yussuff—37
Francis

CONTRE
Les honorables sénateurs

Ataullahjan McCallum
Batters Oh
Housakos Patterson (Nunavut)
MacDonald Plett
Manning Seidman
Marshall Wells—13
Martin

ABSTENTION
L’honorable sénatrice

Wallin—1

Renvoi au comité

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Loffreda, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des finances nationales.)

[Français]

Projet de loi de crédits no 4 pour 2022-2023

Deuxième lecture

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) propose que le projet de loi C-36, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l’administration publique fédérale pendant l’exercice se terminant le 31 mars 2023, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je suis heureuse de prendre la parole aujourd’hui pour présenter le projet de loi de crédits pour le Budget supplémentaire des dépenses (B) de 2022-2023.

Le gouvernement demande au Parlement d’approuver les dépenses votées prévues qui sont détaillées dans le Budget supplémentaire des dépenses (B) par le biais du projet de loi de crédits qui nous est présenté aujourd’hui.

Comme le savent les honorables sénateurs, l’approbation par le Parlement du budget fédéral présenté sous l’égide de la ministre des Finances n’autorise pas le gouvernement à dépenser des fonds.

Ce sont plutôt les projets de loi de crédits qui sont les mécanismes par lesquels les paiements sur le Trésor sont autorisés pour livrer les programmes et services gouvernementaux.

Ainsi, il incombe à ceux et celles d’entre nous qui siègent au Parlement d’autoriser les dépenses du gouvernement par l’entremise du budget des dépenses et des projets de loi de crédits connexes, comme celui dont nous sommes saisis aujourd’hui.

Il est à noter que les montants votés dans ce Budget supplémentaire des dépenses représentent des prévisions ou plafonds maximaux « à concurrence de ».

Les dépenses réelles sont publiées dans les rapports financiers trimestriels, et les dépenses totales de 2022-2023 seront énumérées dans les Comptes publics du Canada, qui seront déposés après la fin de l’exercice.

(2140)

[Traduction]

Le budget des dépenses, ainsi que les comptes publics, les plans ministériels et les rapports sur les résultats ministériels — qui, je le rappelle, ont été déposés le 7 décembre —, fournissent des renseignements importants et nous aident, en tant que parlementaires, à examiner minutieusement les dépenses du gouvernement.

Chers collègues, cet examen minutieux est essentiel à une saine démocratie. Les Canadiens doivent savoir comment l’argent de leurs impôts est utilisé et avoir accès à une ventilation détaillée de ces dépenses. Il y a responsabilité lorsque le gouvernement est ouvert et transparent sur la façon dont l’argent des contribuables est dépensé. La responsabilisation et la bonne gouvernance vont de pair. La bonne gouvernance renforce donc la confiance du public dans le gouvernement.

Comme les honorables sénateurs le savent, le Budget supplémentaire des dépenses fournit des renseignements sur les besoins de dépenses supplémentaires. Ces exigences n’étaient pas suffisamment élaborées pour être incluses dans le Budget principal des dépenses ou ont été affinées pour tenir compte de développements récents.

À ce jour, pour le présent exercice, le Budget principal des dépenses 2022-2023 présente 397,6 milliards de dollars en dépenses budgétaires prévues, composées de 190,3 milliards de dollars en dépenses votées et de 207,3 milliards de dollars en dépenses législatives.

Le Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2022-2023 propose un montant supplémentaire de 9,7 milliards de dollars en dépenses budgétaires prévues, composées de 8,8 milliards de dollars en dépenses votées et de 860 millions de dollars en dépenses législatives dans 26 organisations fédérales.

Le présent Budget supplémentaire des dépenses (B) fournit des renseignements sur des dépenses budgétaires prévues de 25,8 milliards de dollars, soit 20,8 milliards de dollars en dépenses votées et 5 milliards de dollars en dépenses législatives.

Pris ensemble, ces deux Budgets supplémentaires des dépenses proposent à peu près le même montant de nouvelles dépenses que l’an dernier. Cette année, cependant, de nombreuses initiatives n’étaient pas prêtes à temps pour le budget des dépenses du printemps; elles sont donc incluses dans le budget des dépenses de cet automne.

Bien que les autorisations législatives soient approuvées par le Parlement au moyen d’une loi distincte, elles sont incluses dans le présent Budget supplémentaire des dépenses afin de fournir des renseignements sur les dépenses totales prévues des ministères.

[Français]

Dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses, le gouvernement continue d’investir dans des secteurs prioritaires, tels que l’appui aux peuples autochtones, l’aide aux sinistrés et le logement abordable.

Notamment, huit organisations demandent chacune 500 millions de dollars ou plus. Il s’agit des ministères et organismes suivants : le ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord, qui demande 6,3 milliards de dollars; le ministère des Services aux Autochtones, qui demande 2,2 milliards de dollars; le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile, qui demande 1,7 milliard de dollars; le Secrétariat du Conseil du Trésor, qui demande 1,4 milliard de dollars; l’Agence de la santé publique du Canada, qui demande 1,4 milliard de dollars; le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, qui demande 1,2 milliard de dollars; le ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration, qui demande 1,2 milliard de dollars; la Société canadienne d’hypothèques et de logement, qui demande 694,6 millions de dollars.

Chers collègues, permettez-moi de passer en revue quelques-uns des principaux secteurs de dépenses du Budget supplémentaire des dépenses.

[Traduction]

Permettez-moi de commencer par le soutien du gouvernement aux peuples autochtones et à leurs communautés.

Chers collègues, ce gouvernement est profondément résolu à renouveler la relation de nation à nation avec les peuples autochtones, une relation fondée sur la reconnaissance des droits, le respect, la vérité, la coopération et le partenariat.

Les nations autochtones ont le droit à l’autodétermination et à l’autonomie gouvernementale, et aspirent à juste titre à rétablir des communautés fortes et saines. Dans le cadre du cheminement continu du Canada vers la réconciliation, le gouvernement fait les investissements nécessaires pour soutenir les peuples autochtones et leurs communautés.

Honorables sénateurs, ces investissements ont de réelles répercussions. Ils aident à régler des revendications de longue haleine, ils permettent de construire des infrastructures importantes, et ils soutiennent des services qui sont essentiels à la santé et au bien-être physique, mental, social et économique des communautés autochtones.

[Français]

Honorables sénateurs, je tiens également à souligner que le gouvernement poursuit son important travail dans le but d’améliorer les infrastructures de logement, de soutenir l’éducation et la garde d’enfants et de répondre aux appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation.

Il va sans dire que des progrès importants sont réalisés. À titre d’exemple, grâce aux nouveaux investissements de 5,6 milliards de dollars annoncés depuis 2015, 137 avis concernant la qualité de l’eau potable à long terme ont été levés dans les réserves, et ce, en date du 1er décembre. Ces nouveaux fonds ont aussi permis de faire en sorte que 230 avis concernant la qualité de l’eau potable à court terme ne passent pas à des avis à long terme.

Dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses (B), des fonds totalisant 6,3 milliards de dollars sont destinés au ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord. Cela représente une augmentation de 86 % par rapport au budget des dépenses du ministère à ce jour pour 2022-2023. Permettez-moi de fournir une ventilation des principales initiatives incluses dans cette somme.

[Traduction]

Les sénateurs le savent, le gouvernement discute présentement avec différents groupes autochtones au sujet de contestations judiciaires.

Honorables collègues, je peux vous assurer que le gouvernement entend régler ces contestations au moyen d’un dialogue respectueux et de la médiation.

Le Budget supplémentaire des dépenses prévoit 3 milliards de dollars pour les règlements à l’amiable afin que le ministère soit en mesure de rapidement mettre en œuvre les ententes négociées, le cas échéant.

Un financement supplémentaire de 677,6 millions de dollars est prévu pour renflouer le Fonds de règlement des revendications particulières, et 673,5 millions de dollars sont attribués au règlement des revendications particulières relatives aux droits fonciers issus du Traité no 8 des Premières Nations de Blueberry River, de Doig River, d’Halfway River et de West Moberly.

Il convient de souligner que ces revendications particulières reposent sur ces doléances contre le gouvernement fédéral concernant des manquements allégués au respect des obligations historiques du Canada issues de traités ou une mauvaise gestion des terres et des biens des Autochtones.

Les revendications et les indemnités accordées par les tribunaux allant jusqu’à 150 millions de dollars sont payées à même le Fonds de règlement des revendications particulières. Le fonds doit donc être renfloué en prévision des paiements anticipés pour les ententes négociées et les indemnités accordées par les tribunaux.

[Français]

Plus précisément, dans le Budget supplémentaire des dépenses, le gouvernement propose 673,5 millions de dollars pour les coûts d’indemnisation et d’administration des ententes de règlement relatives aux externats indiens fédéraux et à la rafle des années 1960.

Les réclamations relatives à l’enfance désignent une vaste catégorie d’actions en justice qui ont eu lieu par le passé et qui sont en cours contre le gouvernement du Canada. Cela comprend les expériences vécues par les demandeurs autochtones liées aux pensionnats, aux internats, aux hôpitaux indiens, à l’adoption et au placement en famille d’accueil. Le financement sera utilisé pour effectuer des paiements d’indemnité liés à la Convention de règlement relative aux externats indiens fédéraux et pour couvrir le coût de la gestion continue des réclamations relatives à l’enfance, y compris les paiements pour les ententes existantes.

Enfin, 458,2 millions de dollars sont affectés au logement des Premières Nations, des Inuits et des Métis. Les fonds seront utilisés pour soutenir la planification et la préparation des sites, les nouvelles constructions, les réparations majeures et mineures, l’aménagement des terrains et des lots, le fonctionnement et l’entretien, le maintien des capacités et d’autres besoins liés au logement.

Honorables sénateurs, il est évident qu’il faudra du temps pour remédier à ces injustices historiques et répondre à ces besoins vitaux. Il reste que les investissements du gouvernement font une différence. Ils contribuent à réduire les inégalités qui existent entre les peuples autochtones et non autochtones au Canada.

[Traduction]

Je voudrais maintenant parler du deuxième poste en importance dans le Budget supplémentaire des dépenses : le financement pour l’aide en cas de catastrophe. D’un océan à l’autre, les Canadiens ont été victimes de diverses catastrophes naturelles provoquées par les changements climatiques. Les données scientifiques sont claires : ces événements destructeurs se reproduiront, et sans des mesures soutenues pour contrer les changements climatiques, leur fréquence augmentera.

(2150)

Alors que le gouvernement s’efforce d’établir un plan complet de lutte contre les changements climatiques, il se rend également compte que les Canadiens touchés par des catastrophes naturelles ont besoin d’aide et de soutien.

En cas de catastrophe naturelle de grande envergure, le gouvernement fournit une aide financière aux gouvernements provinciaux et territoriaux. Comme les honorables sénateurs le savent, le financement fédéral aux provinces et aux territoires est basé sur une formule de partage des coûts, avec un large éventail de dépenses admissibles. Cela comprend des mesures telles que le nettoyage et la réparation des infrastructures publiques, des biens des particuliers, des petites entreprises et des fermes.

Ce Budget supplémentaire des dépenses propose 1,5 milliard de dollars — sur les 1,7 milliard de dollars — pour les accords d’aide financière en cas de catastrophe afin d’aider la Colombie-Britannique à assumer les coûts d’intervention et de rétablissement à la suite des récentes catastrophes naturelles, y compris les inondations et les glissements de terrain de 2020 ainsi que les incendies, les inondations et les glissements de terrain de 2021.

Dans son rapport intitulé Remettre à flot : L’impact et la réponse aux inondations de 2021 en Colombie-Britannique, le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts a fait la lumière sur les difficultés dans le Sud-Ouest de la Colombie-Britannique en ce qui concerne la protection contre les inondations et la préparation aux situations d’urgence. Je félicite le comité de son excellent travail.

[Français]

Honorables sénateurs, bien que nous ayons fait beaucoup de chemin dans notre lutte contre la COVID-19, nous savons tous que la pandémie n’est pas encore terminée.

C’est particulièrement le cas dans les pays en développement, qui ont eu du mal à obtenir les tests et les traitements appropriés.

Le gouvernement croit que le Canada a un rôle important à jouer dans l’équité en matière d’accessibilité aux vaccins dans le monde.

C’est pourquoi ce Budget supplémentaire des dépenses propose d’accorder 732 millions de dollars au ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, afin de fournir aux pays en développement des vaccins, des tests et des traitements pour lutter contre la COVID-19.

Ce financement sera utilisé pour acheter et distribuer des vaccins contre la COVID-19, des tests de diagnostic et des produits thérapeutiques, ainsi que pour renforcer la capacité des systèmes de santé des pays en développement.

Dans les pays où les taux de vaccination sont faibles, le financement soutiendra la livraison et la production de vaccins contre la COVID-19 ainsi que les campagnes de sensibilisation et d’information visant à accroître la confiance à l’endroit des vaccins.

Nous savons tous également que la COVID-19, qui est toujours en évolution, n’a pas dit son dernier mot ici, au Canada. Par conséquent, le Canada sera prêt.

Dans cette optique, on propose d’octroyer 696,2 millions de dollars à l’Agence de la santé publique du Canada.

Ce financement permettrait d’appuyer le développement continu et l’acquisition de doses de vaccin, y compris de nouvelles formulations, dans le but d’offrir la meilleure protection qui soit contre la COVID-19.

Grâce à ces investissements, nous continuerons de faire face aux répercussions de la COVID-19 au Canada et à l’étranger.

[Traduction]

Honorables sénateurs, nous savons également que la pénurie de logements au Canada fait qu’il est difficile pour les Canadiens de trouver un logement abordable. Le budget de 2022 a proposé des mesures qui, en partenariat avec les mesures prises par d’autres ordres de gouvernement, mettront le Canada sur la voie du doublement de la construction de nouveaux logements et répondront aux besoins de logement du Canada au cours de la prochaine décennie.

Le Budget supplémentaire des dépenses (B) prévoit le financement des mesures suivantes en matière de logement énoncées dans le budget de 2022 : 750 millions de dollars aux provinces et aux territoires pour le transport en commun et le logement, ce qui a été autorisé en vertu de la Loi no 1 d’exécution du budget de 2022; les 458,2 millions de dollars pour le logement des Inuits, des Métis et des Premières Nations signataires de traités modernes et d’ententes sur l’autonomie gouvernementale dont j’ai parlé plus tôt; 441,6 millions de dollars pour l’Initiative pour la création rapide de logements, qui vise à créer de nouveaux logements abordables pour les personnes et les populations vulnérables; et 10,3 millions de dollars pour l’élaboration conjointe d’une Stratégie sur le logement pour les Autochtones en milieu urbain, rural et nordique.

Mais ce Budget supplémentaire des dépenses va encore plus loin. En plus du financement annoncé dans le budget de 2022, je suis heureuse de dire que ce budget des dépenses contient également des fonds pour un certain nombre d’autres programmes de la Société canadienne d’hypothèques et de logement, tels que 91,8 millions de dollars pour le Fonds d’innovation pour le logement abordable; 38 millions de dollars pour l’Initiative des terrains fédéraux, qui appuie le transfert de terres et d’immeubles fédéraux excédentaires pour les aménager ou les rénover en vue de leur utilisation comme logements abordables; et 27 millions de dollars pour l’Initiative de financement de la construction de logements locatifs.

En fin de compte, tous les Canadiens méritent de pouvoir vivre et élever leur famille dans un endroit sûr et abordable.

Honorables sénateurs, le financement proposé dans le présent budget des dépenses témoigne de l’engagement du gouvernement à l’égard des priorités au pays et à l’étranger, qu’il s’agisse d’investir dans les communautés autochtones, de fournir une aide financière en cas de catastrophe ou d’offrir des programmes de logement abordable.

[Français]

S’il y a une chose que les événements ayant cours dans le monde actuellement nous ont apprise, c’est que nous sommes tous dans le même bateau. Le budget des dépenses montre que le gouvernement répond aux besoins immédiats, tout en continuant à faire des investissements à long terme qui profitent à toute la population canadienne.

Avant de conclure ce discours, je tiens à remercier encore une fois le Comité sénatorial permanent des finances nationales de l’étude qu’il a faite. Merci pour votre travail assidu. Je suis consciente du temps que vous avez consacré à l’étude des divers projets de loi à teneur financière tout au long de l’année, et tout particulièrement durant les périodes d’octrois de crédits. Votre contribution est fort appréciée. Chers collègues, je vous invite à adopter ce projet de loi sans délai.

Je vous remercie.

[Traduction]

L’honorable Elizabeth Marshall : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du quatrième projet de loi de crédits du gouvernement cette année, après les projets de loi C-16, C-24 et C-25.

Ce projet de loi de crédits demande l’autorisation de dépenser 20 milliards de dollars supplémentaires. En plus des 20 milliards de dollars demandés, le gouvernement a déjà l’approbation du Parlement pour dépenser 200 milliards de dollars, qui ont été approuvés par les trois projets de loi de crédits précédents. L’approbation de ce projet de loi portera à 220 milliards de dollars les dépenses approuvées par les projets de loi de crédits.

Il y a aussi 215 milliards de dollars approuvés par des lois autres que les projets de loi de crédits, comme le Transfert canadien en matière de santé par le biais de la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces et les frais de la dette publique, qui sont approuvés par la Loi sur la gestion des finances publiques.

J’ai dit à plusieurs reprises dans cette enceinte que les parlementaires devraient consacrer plus de temps à l’examen des dépenses législatives. Les 215 milliards de dollars de dépenses législatives sont comparables aux 220 milliards de dollars demandés dans les projets de loi de crédits. Nous avons étudié les 220 milliards de dollars des projets de loi de crédits, mais il n’y a pas d’étude comparable concernant les 215 milliards de dollars de dépenses législatives.

Honorables sénateurs, les plans de dépenses du gouvernement changent souvent tout au long de l’année, ce qui complique la tâche des parlementaires quand vient le temps d’en faire l’examen. Pour vous donner une idée de la difficulté de suivre les dépenses du gouvernement, songe à ce qui suit. Avant le 1er avril, nous avons approuvé le premier projet de loi de crédits. Puis, nous avons reçu le projet de loi d’exécution du budget, qui approuve certaines, mais pas la totalité, des dépenses prévues dans le budget. En juin, nous avons reçu les deuxième et troisième projets de loi de crédits, qui se rapportaient au Budget principal des dépenses et au Budget supplémentaire des dépenses (A). En novembre, nous avons reçu l’énoncé économique de l’automne et le projet de loi C-32, qui vise à mettre en œuvre certaines des dépenses de cet énoncé et que nous étudions cette semaine.

En décembre, nous avons reçu un autre projet de loi de crédits qui était, lui, lié au Budget supplémentaire des dépenses (B). Il s’agit du projet de loi C-36, qui est à l’étude aujourd’hui. Ensuite, en mars, nous recevons un autre projet de loi de crédits fondé sur le Budget supplémentaire des dépenses (C), qui comprend certains postes budgétaires et certaines mises à jour fiscales.

(2200)

Dans l’intervalle séparant chacun de ces projets de loi, d’autres projets de loi fourniront l’approbation parlementaire de dépenser de l’argent pour d’autres programmes. Par exemple, le projet de loi C-31, récemment adopté, autorise le gouvernement à dépenser pour une prestation dentaire pour les enfants et une prestation pour le logement locatif.

Pour compliquer davantage le processus, le gouvernement demande parfois l’autorisation pour une partie du financement d’un programme dans un premier projet de loi, et l’autorisation pour le reste du financement dans des projets de loi subséquents. C’est le processus qui a été utilisé pour les 30 milliards de dollars destinés au nouveau programme de garderies : 2,6 milliards de cette somme ont été approuvés dans la loi d’exécution du budget de 2021, tandis que l’autorisation pour le reste est demandée dans des projets de loi de crédits.

En outre, de nombreuses autres transactions s’effectuent hors des projets de loi de crédits et ne sont pas étudiées dans le cadre de notre examen des projets de loi de crédits et des documents budgétaires. Comme je l’ai mentionné plus tôt, jusqu’à présent cette année, les dépenses législatives excèdent les 200 milliards de dollars, les prestations d’assurance-emploi s’élèvent à 24 milliards de dollars et l’Allocation canadienne pour enfants représente également 24 milliards de dollars. Il y a également un certain nombre de transactions importantes qui ont une incidence sur les dépenses du gouvernement et qui ne sont pas incluses dans notre étude du budget des dépenses, des budgets supplémentaires des dépenses et des projets de loi de crédits.

Honorables collègues, si je vous explique le processus d’approbation des dépenses du gouvernement, c’est pour vous montrer qu’il est difficile d’assurer le suivi de ces dépenses. Le processus utilisé par le gouvernement pour obtenir l’approbation parlementaire de dépenser de l’argent est, selon Scott Brison, l’ancien président du Conseil du Trésor, « totalement irrationnel », ou « un désordre absolu », comme l’a déclaré le directeur parlementaire du budget dans un balado diffusé par The Hill Times. À sa défense, M. Brison a bien essayé de corriger le processus ou, du moins, d’harmoniser les divers éléments. Toutefois, après son départ, le gouvernement n’a pas poursuivi le travail pour simplifier le processus.

Le gouvernement a été élu en 2015 en présentant une plateforme dans laquelle il promettait de « [modifier] les mécanismes financiers parlementaires pour uniformiser et clarifier les pratiques comptables gouvernementales. » De plus, il s’engageait à assurer « la cohérence comptable entre le budget des dépenses et les Comptes publics. » Nous attendons toujours que le gouvernement honore son engagement.

Honorables sénateurs, il est temps que le gouvernement règle le problème du processus budgétaire ou, du moins, qu’il commence à le faire. En fait, il est grand temps qu’il le fasse.

Dans ce projet de loi de crédits, le gouvernement demande un financement supplémentaire de 20 milliards de dollars pour 89 ministères et organismes. Sept organismes demandent plus de 1 milliard de dollars chacun, et la Société canadienne d’hypothèques et de logement demande 695 millions de dollars. Il y a également 7 milliards de dollars en dépenses législatives qui ont déjà été approuvées dans le cadre d’autres lois. Ces 7 milliards de dollars comprennent 2 milliards de dollars pour un supplément ponctuel au Transfert canadien en matière de santé, un peu moins de 2 milliards de dollars pour l’aide à l’Ukraine, 1,8 milliard de dollars pour des tests de dépistage de la COVID-19 et 750 millions de dollars aux provinces et aux territoires pour le transport et le logement. Nous n’étudions aucune de ces dépenses.

L’un des engagements fondamentaux du gouvernement actuel est son engagement à faire preuve d’ouverture et de transparence et à rendre des comptes. J’ai souvent parlé au Sénat du manque d’ouverture et de transparence du gouvernement et du retard avec lequel il présente des documents où il rend des comptes sur ses activités comme les comptes publics, les rapports sur la gestion de la dette et les rapports sur les résultats ministériels. Les commentaires que j’ai faits jusqu’à présent aujourd’hui expliquent les difficultés qui apparaissent lorsqu’on essaie de faire le suivi dans le dédale des plans de dépenses du gouvernement.

L’Institut C.D. Howe, un groupe de réflexion très respecté, fournit régulièrement un bulletin sur l’utilité des budgets, des dépenses et des états financiers des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Le plus récent rapport, publié en septembre, a examiné les états financiers de l’exercice 2020-2021, ainsi que les budgets et les dépenses de l’exercice 2022-2023 des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux.

L’Alberta était en tête de la catégorie avec un A, suivie de près par le Yukon avec un A-. Dans la catégorie B, on retrouve la Saskatchewan, le Nouveau-Brunswick, l’Ontario et le Québec. Dans la catégorie C, on trouve l’Île-du-Prince-Édouard et la Nouvelle‑Écosse. Dans la catégorie D, on retrouve le gouvernement fédéral, Terre-Neuve-et-Labrador, le Manitoba, la Colombie‑Britannique et les Territoires du Nord-Ouest. Il s’agit d’une amélioration pour le gouvernement fédéral, car l’année dernière, il avait obtenu la note F.

Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement fédéral, avec toutes les ressources dont il dispose, a obtenu la note F l’année dernière pour les documents de responsabilité financière et la note D cette année. Le gouvernement devrait être capable de faire mieux. Les Canadiens et les parlementaires méritent mieux.

Les rapports sur les résultats ministériels ont été publiés le 6 décembre, beaucoup trop tard pour être d’une quelconque utilité lors de notre examen du Budget supplémentaire des dépenses (B), du présent projet de loi de crédits C-36 et du projet de loi C-32. Un bref examen indique que 84 organismes ont établi 2 676 indicateurs ou objectifs de rendement, dont 1 331 ont été atteints, soit un peu moins de 50 %.

Nous n’avons toujours pas soumis les rapports sur les résultats ministériels à une étude approfondie, mais je peux donner une idée des difficultés que ce genre d’étude pourrait révéler. Le gouvernement a lancé une stratégie sur l’éducation préscolaire et les services de garde des enfants en 2020, dont le coût a été estimé à 30 milliards de dollars sur cinq ans. Les cibles, ou objectifs de rendement, prévoient une réduction de 50 % des frais moyens des services de garde d’ici la fin du mois en cours, la création de 250 000 places en garderie sur cinq ans ainsi que la création d’environ 50 000 postes en service de garde. Le ministère n’a pas établi d’objectifs de rendement pour établir chaque année le nombre de places en garderie ou de postes en service de garde supplémentaires qui auront été créés. Le ministère vérifie plutôt si l’accès à l’éducation préscolaire et aux services de garde a augmenté, et il se fixe un objectif de 40 000 places d’ici la date cible du 31 mars 2022.

Cependant, on constate qu’il n’y a tout simplement aucun résultat disponible dans les rapports sur les résultats ministériels de 2019-2020, 2020-2021 ou 2021-2022. Par ailleurs, aucun critère ou objectif de rendement n’a été prévu pour établir si les frais de garderie auront été réduits de 50 % d’ici la fin du mois en cours. Sans ce genre de données sur le rendement, le gouvernement ne peut pas savoir si la stratégie qu’il met en œuvre au coût de 30 milliards de dollars est efficace.

Dans son rapport sur le Budget principal des dépenses, le directeur parlementaire du budget a donné un aperçu de l’augmentation des dépenses relatives aux Autochtones dans les deux ministères concernés. Les dépenses de ces deux ministères combinés sont passées de 14 milliards de dollars en 2018-2019 à 57 milliards de dollars jusqu’à présent dans l’exercice en cours.

Une partie importante du financement de Services aux Autochtones Canada sert aux ententes à l’amiable, dont 20 milliards de dollars pour la compensation des enfants et des familles autochtones ayant subi des préjudices en raison du sous‑financement des services à l’enfance et à la famille. Le gouvernement et l’Assemblée des Premières Nations ont conclu une entente de principe pour le versement des fonds, mais le Tribunal canadien des droits de la personne n’a pas appuyé l’entente de principe. Les fonctionnaires de Services aux Autochtones Canada ont informé le Comité des finances et le gouvernement fédéral que l’Assemblée des Premières Nations demanderait une révision judiciaire de la décision du Tribunal canadien des droits de la personne de rejeter l’entente de 20 milliards de dollars.

Mes honorables collègues se souviendront peut-être que j’avais posé une question au sénateur Gold à ce sujet le mois dernier. Lors d’une récente réunion du Comité des finances, des représentants du ministère et du Conseil du Trésor ont assuré au comité que les 20 milliards de dollars sont gelés et qu’« ils demeurent dans notre système de crédits. [...] Ils sont destinés à l’indemnisation et ne peuvent pas être dépensés pour d’autres priorités ».

La semaine dernière, l’Assemblée des Premières Nations a adopté une résolution exhortant le Canada à placer un minimum de 20 milliards de dollars destinés à l’indemnisation dans un compte portant intérêt et à indemniser toutes les victimes visées à la fois par les décisions du tribunal et le recours collectif. Étant donné le financement important accordé aux deux ministères pour diverses réclamations et divers règlements, il est important que le Comité des finances poursuive sa surveillance de ces dépenses importantes.

Le Budget supplémentaire des dépenses (B), qui soutient le projet de loi C-36, comprend 2 milliards de dollars de dépenses législatives pour le Transfert canadien en matière de santé. Cette somme s’ajoute aux 45 milliards de dollars prévus dans le Budget principal des dépenses. Ces 2 milliards de dollars ont été versés aux provinces pour réduire les retards accumulés du côté des interventions chirurgicales et des autres interventions pendant la pandémie.

(2210)

Le Transfert canadien en matière de santé est le plus important transfert aux provinces et aux territoires pour les aider à financer les soins de santé. Notre système de soins de santé est en crise, et les provinces et les territoires ont demandé au gouvernement fédéral d’accroître de 28 milliards de dollars les fonds destinés aux soins de santé, ce qui, selon eux, ferait passer la part fédérale des dépenses en santé du taux actuel de 22 % des coûts à 35 %. Or, aucun document budgétaire ne prévoit le versement de fonds supplémentaires au titre du Transfert canadien en matière de santé.

Honorables sénateurs, le gouvernement se heurte à d’importants défis économiques, et il peine à assurer la prestation de services gouvernementaux de base. L’inflation s’est implantée, et les Canadiens ont du mal à suivre l’augmentation du prix des aliments, du carburant et d’autres produits essentiels.

Le 5 décembre, quatre universités canadiennes ont publié le Rapport annuel sur les prix alimentaires 2023, qui prévoit que le prix des aliments continuera d’augmenter de 5 à 7 % en 2023, les légumes, les produits laitiers et la viande étant ceux qui connaîtront la plus forte augmentation. Le recours aux banques alimentaires est en hausse partout au pays. Les taux d’intérêt continuent d’augmenter, alors que le gouvernement avait assuré aux Canadiens que ceux-ci demeureraient bas. Compte tenu de l’augmentation de l’inflation, les Canadiens doivent maintenant emprunter davantage pour joindre les deux bouts.

Les propriétaires voient leurs paiements hypothécaires augmenter. Certains Canadiens qui ont acheté un logement lorsque les prix de l’immobilier ont atteint un sommet ont maintenant des hypothèques dont le montant dépasse la valeur de leur logement.

La hausse des taux d’intérêt et l’augmentation des emprunts font également augmenter les coûts du service de la dette du gouvernement, à tel point que le programme du service de la dette du gouvernement est maintenant l’un de ses programmes les plus coûteux. En plus de ces contraintes économiques, les économistes prévoient une récession au début de 2023.

Les Canadiens n’ont pas accès aux soins de santé. Un grand nombre de Canadiens n’ont pas de médecin de famille, et les files d’attente pour obtenir des services dans les cliniques et les salles d’urgence sont longues. Les opérations chirurgicales et les services de diagnostic sont reportés, et nos fournisseurs de soins de santé sont débordés. Les conséquences du manque de services de santé sur nos enfants sont particulièrement inquiétantes. Les médicaments en vente libre pour les enfants sont en nombre insuffisant.

Le gouvernement est mis au défi de fournir d’autres services publics. Il y a des files d’attente aux bureaux des passeports. Les demandes d’aide financière et de services des anciens combattants accusent du retard, et sur les 2,2 millions de demandes d’immigration en attente, environ 1,2 million accuse du retard.

Même les demandes d’accès à l’information sont en souffrance, alors que l’objectif de la Loi sur l’accès à l’information est d’améliorer « la responsabilité et la transparence des institutions fédérales du Canada ». Le commissaire à l’information du Canada a récemment déclaré à un comité permanent de l’autre endroit que le gouvernement n’avait pas respecté les délais prescrits par la loi pour plus de 30 % des 400 000 demandes d’accès à l’information présentées l’année dernière.

Honorables sénateurs, les Canadiens attendent que leur gouvernement assume son rôle de leader. Combien de temps encore devront-ils attendre?

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : L’honorable sénatrice Gagné, avec l’appui de l’honorable sénateur Gold, propose que le projet de loi soit lu pour la deuxième fois.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)

[Français]

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Gagné, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

Les travaux du Sénat

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-13(2) du Règlement, je propose :

Que la séance soit maintenant levée.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(À 22 h 14, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)

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