Aller au contenu
Séances précédentes
Séances précédentes
Séances précédentes

Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 92

Le mercredi 14 décembre 2022
L’honorable George J. Furey, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 14 décembre 2022

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le groupe d’amitié interparlementaire pour un Iran libre

L’honorable Ratna Omidvar : Honorables sénateurs, je prends la parole dans de tristes circonstances. La République islamique d’Iran continue de faire la guerre à son propre peuple, en ciblant tout particulièrement les femmes. Les femmes en Iran subissent de la discrimination et des iniquités, qui sont inscrites dans la Constitution et dans le code pénal de leur pays. En vertu de la loi, les femmes valent deux fois moins que les hommes. Elles n’ont pas le droit de porter ce qu’elles veulent. Elles ne sont pas autorisées à exercer certaines professions. Leurs droits de propriété sont limités. Pire encore, lorsqu’elles divorcent, elles sont privées de leurs droits à leurs enfants. Elles ne peuvent pas non plus voyager sans la permission de leur tuteur masculin.

Les femmes participant à des manifestations sont couramment incarcérées, torturées, placées en isolement cellulaire et violées. On a ordonné — je répète, ordonné — au Corps des Gardiens de la révolution islamique de tirer dans les yeux, le visage et les organes génitaux des manifestantes afin qu’il soit impossible de pratiquer une chirurgie reconstructive.

Chers collègues, au cours du dernier mois, les Iraniennes ont exprimé leur ras-le-bol. Elles ne se contentent pas de dénoncer la situation là-bas. Elles mènent une révolution éclatante, qui résonne partout dans le monde.

Je suis ravie de vous dire que les Nations unies viennent d’adopter une résolution visant à expulser l’Iran de la Commission de la condition de la femme, car sa présence au sein de cet organisme aurait tourné le fer dans la plaie.

Cependant, nous devons prendre d’autres mesures qui sont à notre portée. Je suis donc très heureuse de vous informer que le député Ali Ehsassi de Willowdale et moi avons formé un groupe d’amitié interparlementaire pour un Iran libre.

Je vous exhorte tous à en devenir membres. Nous vous simplifions la tâche à cette fin. Cochez la case et renvoyez votre réponse. Il n’y a pas d’argent en jeu. En vous inscrivant, vous veillerez à amplifier la voix des Iraniens, des Canadiens d’origine iranienne et des amoureux de la démocratie sur la Colline du Parlement et, le cas échéant, nous ajouterons nos voix à la leur en tant que législateurs et parlementaires. Nous mettrons en contact les membres de la diaspora iranienne avec les parlementaires — avec vous — et organiserons des discussions avec des leaders d’opinion et des dirigeants de la société civile. Ce faisant, nous animerons la discussion sur la Colline du Parlement de manière à appuyer le mouvement pour un Iran libre et démocratique.

Chers collègues, c’est l’occasion de vous joindre à notre appel et à celui de tous ceux qui se battent pour les femmes, pour la vie et pour la liberté.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Jan, Jack et Freya Byrd. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Bovey.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Le décès de l’honorable Jim Carr, c.p., O.M.

L’honorable Patricia Bovey : Honorables sénateurs, lundi dernier, nous avons été ébranlés par la nouvelle du décès de Jim Carr. Ce fier Manitobain, Canadien, député et ancien ministre avait l’intérêt supérieur de tous à cœur.

Dans le cadre de toutes les fonctions qu’il a occupées, cet homme à l’esprit universel a su tirer parti de ses innombrables talents et intérêts.

J’ai rencontré Jim il y a 50 ans. Il travaillait dans les communications pour la sous-ministre adjointe du ministère des Affaires culturelles du Manitoba, Mary Elizabeth Bayer. J’organisais pour elle une exposition qu’on devait lancer en France, et Jim était le relationniste à qui je devais m’adresser.

Jim était un joueur de hautbois exceptionnel et a fait partie de l’orchestre symphonique de Winnipeg. Il a aussi été directeur général du Conseil des arts du Manitoba. Il a été par ailleurs député de l’Assemblée législative du Manitoba, fondateur du Business Council of Manitoba, conseiller à l’Université du Manitoba et, plus récemment, député de la Chambre des communes et ministre fédéral.

Nos fonctions, nos amis et nos expériences de vie nous ont réunis à maintes reprises pendant de nombreuses années, et encore davantage pendant qu’il était à l’autre endroit et moi au Sénat. J’ai été ravie qu’il accepte de parrainer le projet de loi S-208, Loi sur la Déclaration sur le rôle essentiel des artistes et de l’expression créatrice au Canada. Il a dit que la visite d’un quatuor de l’orchestre symphonique de Winnipeg dans sa classe de 3e année a changé sa vie. J’ai aussi vécu une expérience semblable en 3e année, lors d’une visite du Musée des beaux-arts de Winnipeg.

Il connaissait bien l’importance des arts, les défis auxquels sont confrontés les organismes culturels du domaine artistique et les besoins très réels des artistes eux-mêmes. Ces questions ont été au centre de bon nombre de nos conversations, en comité, à l’aéroport et autour d’un repas, auxquelles se sont mêlées des conversations sur notre magnifique province.

Chers collègues, ce bâtisseur de ponts, cet auteur d’un livre sur le sénateur Charles Dufferin « Duff » Roblin, ce législateur qui a rapproché notre province et les autres provinces et le gouvernement fédéral, ce leader communautaire qui a rapproché les arts et les affaires, les affaires et le gouvernement, la collectivité et les universités, ce fier homme juif qui a tissé des liens interconfessionnels au Manitoba, sur la Colline du Parlement et à l’échelle internationale me manquera.

Jim adorait sa famille, et il arborait un large sourire lorsqu’il parlait de ses petits-enfants. Lors de notre dernière conversation, il y a moins de deux semaines, il se réjouissait à l’idée de célébrer les Fêtes au sein de la famille Carr et de réaliser un voyage au Mexique avec sa femme, Colleen.

Mes pensées accompagnent sa femme, Colleen, ses enfants, ses petits-enfants et ses très nombreux amis.

Merci, Jim — cher ami, cher collègue — des années que tu as consacrées de tant de façons à notre collectivité, chez nous et partout au pays.

Que Dieu te bénisse.

Julia Levy

Félicitations pour l’obtention de la bourse Rhodes

L’honorable Sabi Marwah : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet de Julia Levy, de la Colombie‑Britannique, qui vient de recevoir une bourse Rhodes.

La bourse Rhodes, de l’Université d’Oxford, est l’une des plus prestigieuses bourses d’études supérieures. Créée en 1902, elle est la plus ancienne bourse d’études supérieures au monde. Parmi les principaux critères de la bourse Rhodes, on retrouve l’excellence académique, la capacité de leadership et l’engagement à servir de manière à changer le monde de façon positive.

Julia répond à ces trois critères, et plus encore. C’est une scientifique, une artiste et une militante, et elle est aussi la première femme trans à recevoir une bourse Rhodes au Canada.

Julia a obtenu un baccalauréat avec un majeur en chimie et un mineur en arts visuels de l’Université de Victoria. Pendant sa deuxième année, elle a combiné les deux domaines d’études et inventé un programme de réalité virtuelle afin d’aider les étudiants en chimie à mieux visualiser les molécules. Elle a ensuite réalisé un modèle en réalité augmentée afin de visualiser des molécules complexes. Le professeur Jeremy Wulff a dit au sujet de Julia qu’elle était destinée à faire de grandes choses.

(1410)

Julia a aussi contribué à un projet universitaire de vérification des drogues sur l’île de Vancouver et au Gender Generations Project, une initiative venant en aide aux jeunes personnes transgenres et à leur famille.

J’ai parlé à Julia hier et je lui ai demandé si elle avait un message à transmettre aux Canadiens. Voici ce qu’elle m’a répondu :

Je veux célébrer tout le chemin parcouru. Être une femme transgenre est l’expérience la plus merveilleuse et la plus joyeuse de ma vie.

Les personnes transgenres peuvent offrir une contribution essentielle à notre pays. En acceptant cette bourse, j’espère avoir une influence positive sur mon prochain.

Je suis extrêmement reconnaissante de partager ces quelques mots avec vous, en tant que femme transgenre, britanno-colombienne et canadienne. Mon intention, et mon souhait, est d’apporter une contribution au monde entier qui fera la fierté du Canada.

Chers collègues, comme nombre d’entre vous le savent, la bourse Rhodes est associée à des règles et à un historique d’inégalité raciale et de discrimination envers les genres et les classes sociales.

Elizabeth Kiss, directrice de la Rhodes House, à Oxford, reconnaît que le fonds de fiducie Rhodes est aux prises avec son passé. Toutefois, alors que les aspects négatifs de la vision du fondateur de cette bourse d’études sont rejetés, nous avons conservé les valeurs fondamentales qui demeurent pertinentes de nos jours. À titre d’exemple, Mme Kiss a déclaré que M. Rhodes voulait développer le potentiel de personnes qui possédaient l’énergie nécessaire pour être des leaders et qui faisaient preuve de bienveillance à l’égard d’autrui. Selon elle, Julia Levy possède amplement ces qualités.

En tant que première femme transgenre au Canada à recevoir cette bourse, Mme Levy prouve que l’excellence et la réussite sont accessibles à tous, peu importe leur expression de genre et leur orientation sexuelle. Merci.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune du grand chef du Conseil des Premières Nations du Yukon, Peter Johnston et de sa famille. Ils sont les invités de l’honorable sénateur Loffreda.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Expression de vœux pour un joyeux temps des Fêtes

L’honorable Yuen Pau Woo : Mes excuses à M. Clement Clarke Moore.

C’était la semaine avant Noël, et partout au Sénat,

Les sénateurs avaient hâte à la fin des débats.

Dans l’enceinte, on discourait avec circonspection,

Espérant voir ici et là-bas un changement d’opinion.

Le rapport sur le C-11 étant enfin adopté,

De la troisième lecture le BRG se met à rêver.

Comme les feuilles mortes virevoltent avant l’ouragan furieux,

Quand un obstacle sur le chemin se dresse, on devient belliqueux.

Pour la Loi sur la radiodiffusion, ce fut bien le cas,

Quoique la découvrabilité fut sauvée du trépas.

Le Président, de la toge vêtu et du tricorne coiffé,

Dans le fauteuil où il siège d’ordinaire était installé.

Soudain, de l’antichambre s’éleva un brouhaha,

Et les pages s’élancèrent pour agir comme il se doit.

Avec l’huissier du bâton noir, toujours leste et plein de zèle,

J’ai su dès lors que ce n’était pas le père Noël.

Le clair de lune qui se reflétait sur la neige de la Colline

Et éclairait comme en plein jour une scène citadine

Permit à mes yeux émerveillés de distinguer

Six nouveaux sénateurs, dynamiques et motivés.

Les parrains se présentèrent, rapides comme le vent,

Les appelant par leur nom, qui sifflant, qui criant :

« Allez, Shugart! Osler, Greenwood et Burey!

Allez, Cardozo et Patterson! Saluez Furey!

Bienvenue dans la Chambre rouge vénérable et sacrée,

Pour que le PM pourvoie les autres sièges, priez! »

Voilà qu’une note nous parvint, d’un halo cerclée,

Écrite de la main du greffier Gerald. Écoutez :

« Une fois Noël passé, ce Noël va devenir

Le dernier de nos Noëls pour les Noëls à venir. »

Quelle prophétie impressionnante, mais qui en était l’objet?

C’était le sénateur Dan, notre ami de Membertou, en fait.

Avec un nom comme Christmas, ce bon vieux lutin

Humble et sage ne pouvait s’empêcher d’être un peu taquin.

L’héritage qu’il nous laisse est d’une abondance rare.

De savoir-faire, de gentillesse et de patience il n’était pas avare.

Il sera parti à la retraite à notre retour,

Mais il demeurera pour nous un exemple pour toujours.

Avant de sauter sur nos traineaux et de donner le signal,

Avant de filer dans le froid hivernal,

Avant que Dan ne nous quitte, nous nous exclamerons

Jamais CHRISTMAS nous n’oublierons; ce qu’il a fait est bon!

Joyeux temps des Fêtes à tous.

Des voix : Bravo!

L’usurpation de l’identité autochtone

L’honorable Mary Jane McCallum : Honorables sénateurs, je tiens à remercier le Groupe des sénateurs canadiens de m’avoir permis de prendre la parole aujourd’hui. En collaboration avec le Groupement des femmes autochtones, je prends la parole pour aborder un problème omniprésent et grave auquel notre nation est confrontée : l’usurpation de l’identité autochtone, ou le fauxtochtonisme.

Il ne s’agit pas d’un crime sans victime. Ce problème nuit à tous les Autochtones, mais plus particulièrement aux femmes autochtones. Il permet à des intrus de nous voler notre voix, notre pouvoir et notre place durement gagnée dans la société. Ces fauxtochtones sont rusés. Ils trouvent les fissures laissées par des siècles de colonialisme et ils s’y faufilent. Ils s’appuient ensuite sur l’ambivalence de ces institutions coloniales et sur le silence de nombreux dirigeants autochtones masculins pour revendiquer du soutien et de la légitimité.

Cette tromperie a permis aux fauxtochtones d’infiltrer le monde universitaire, la politique, la magistrature, les services correctionnels et divers autres secteurs du pouvoir. Ce vol d’identité et cette mise en scène du traumatisme à des fins personnelles constituent un racisme opportuniste flagrant. Si ces activités ne sont pas dénoncées et combattues ouvertement, elles sont encouragées, car c’est le silence qui entoure la violence coloniale contre les femmes autochtones qui nous tue. La marginalisation continue des femmes autochtones que cette usurpation engendre nous rend encore plus vulnérables à toutes les formes de violence. Elle nous maintient dans le silence et dans l’isolement, avec des effets dévastateurs.

Or, ces fauxtochtones ne nuisent pas seulement aux Autochtones. Ils nuisent aux gens avec qui ils ont travaillé et à ceux qu’ils ont côtoyés. Ces fraudeurs nuisent aux causes qu’ils prétendent soutenir et aux gens qui dépendent de ce travail. Ils nuisent à la réconciliation au Canada.

Cependant, nous, les femmes autochtones, en avons assez de garder le silence pendant que ces abuseurs demeurent impunis. Nous avons une valeur. Nos voix ont de l’importance. Nous continuerons de prendre la parole et de dénoncer les diverses formes de violence qui nous oppriment — que la violence soit systémique, latérale, patriarcale, fondée sur le genre ou autre.

Si le Sénat a à cœur la réconciliation, nous devons briser le silence assourdissant entourant le fauxtochtonisme. Nous devons dénoncer ce comportement honteux, y mettre fin et reconnaître les répercussions qu’il a sur les Autochtones, en particulier sur les femmes et les enfants autochtones. Chers collègues, nous devons tous unir nos forces pour renoncer à notre attitude complaisante et faire en sorte que cette forme de violence ne serve plus à marginaliser davantage les femmes autochtones, en volant leur voix et leur pouvoir. Ayons le courage d’être de bons alliés et de faire front commun contre ces actes sournois.

Kinanâskomitin. Merci.


PÉRIODE DES QUESTIONS

(Conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 7 décembre 2021, visant à inviter un ministre de la Couronne, l’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles, comparaît devant les honorables sénateurs durant la période des questions.)

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, nous accueillons aujourd’hui l’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles, pour lui poser des questions concernant ses responsabilités ministérielles.

Conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 7 décembre 2021, les sénateurs ne sont pas tenus de se lever. Les questions sont limitées à une durée d’une minute et les réponses à une durée d’une minute et demie. Le greffier lecteur se lèvera 10 secondes avant l’expiration de ces délais. La période des questions sera d’une durée d’une heure.

Le ministère des Ressources naturelles

Le secteur de l’énergie

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Monsieur le Ministre, on estime que le plan environnemental de votre gouvernement coûtera des dizaines de milliers d’emplois bien rémunérés dans le secteur de l’énergie. Votre lettre de mandat indique que vous devez « collaborer avec le ministre du Travail, pour favoriser l’adoption d’un projet de loi et de mesures exhaustives pour assurer une transition équitable » pour ces travailleurs. Nous voilà un an plus tard et votre collègue n’a toujours pas déposé de projet de loi en ce sens.

(1420)

Monsieur le ministre, votre gouvernement a-t-il abandonné l’idée de présenter un plan de transition équitable pour les travailleurs du secteur de l’énergie? Pendant combien de temps encore les travailleurs canadiens du pétrole et du gaz, dont les emplois sont en jeu, devront-ils attendre un plan concret de la part de votre gouvernement?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Permettez-moi d’abord de remercier les honorables sénateurs de m’accueillir ici aujourd’hui. Je reconnais que cette séance se déroule sur les terres traditionnelles et ancestrales du peuple algonquin anishinabe.

Sénateur, je vous remercie de votre question. En fait, je conteste une chose que vous avez dite au départ, car selon la plupart des prévisions, le processus de transition énergétique nous fera gagner beaucoup plus d’emplois qu’il ne nous en fera perdre.

Je dirais également que beaucoup des emplois de demain, tels que ceux du domaine de la production d’hydrogène ou de biocarburants, requièrent à peu près les mêmes compétences que les emplois actuels du secteur de l’énergie au pays.

Cela dit, nous travaillons au dialogue sur la juste transition. Il faut se doter d’un plan économique pour un avenir économique solide et prospère dans un contexte à faibles émissions de carbone. Il faut également s’adapter à l’éventuel déplacement de travailleurs, notamment les travailleurs des centrales électriques au charbon. Nous y travaillons assurément et nous avons l’intention de présenter un projet de loi dans la nouvelle année.

Le sénateur Plett : Monsieur le ministre, la réalité, c’est que 300 000 Canadiens du secteur pétrolier et gazier ont déjà perdu leur emploi depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement actuel. Votre collègue, le ministre du Travail, dit que les travailleurs de l’industrie doivent savoir à quel point nous apprécions leurs talents et à combien ils sont précieux. À l’approche de Noël, ces travailleurs ont besoin d’avoir l’assurance que leur emploi n’est pas en péril et qu’ils ne seront pas obligés de quitter leur région rurale pour gagner leur vie.

Monsieur le ministre, pouvez-vous garantir aujourd’hui aux travailleurs du secteur de l’énergie que leur emploi sera protégé pendant cette période économique qui est déjà difficile?

M. Wilkinson : Merci, sénateur, de votre question. Je dirais que, présentement, la production de pétrole et de gaz atteint des sommets au pays. Il y a eu une certaine attrition quant au nombre d’emplois dans le secteur de l’énergie, mais cela est en grande partie attribuable à l’automatisation. Assurément, nous constatons que, à mesure que nous avançons vers une situation où le pétrole et le gaz auront un moins grand rôle à jouer dans la croissance économique du Canada, nous devons mettre en place des programmes économiques de création d’emplois dans les régions du pays qui connaîtront croissance et prospérité, mais aussi des programmes pour nous assurer que les gens touchés puissent faire une transition en fonction des compétences dont ils auront besoin pour occuper les nouveaux emplois créés.

Oui, nous en avons la ferme intention. En ce qui concerne votre observation au sujet des emplois perdus dans ce secteur, à l’heure actuelle, compte tenu des volumes produits, ces pertes sont surtout attribuables à l’automatisation.

La boucle de l’Atlantique

L’honorable Michael L. MacDonald : Monsieur Wilkinson, les habitants du Canada atlantique sont préoccupés. Ils ont besoin d’être rassurés et soutenus par le gouvernement fédéral au sujet de la boucle de l’Atlantique. Il n’y a pas longtemps, vous avez dit que les événements récents étaient « un accident de parcours ».

La boucle de l’Atlantique est indispensable pour le Canada atlantique. Elle permettra de fournir l’électricité nécessaire pour éliminer progressivement les centrales au charbon et de préparer la voie pour que les provinces puissent atteindre leurs cibles en matière d’énergie propre d’ici 2030.

Il y a quelques mois, vous avez dit que le gouvernement fédéral s’efforçait activement de mettre en œuvre ce projet, mais, monsieur le ministre, j’ai entendu que ce corridor énergétique ne pourra pas être construit à temps si les travaux ne commencent pas très bientôt. Le temps presse. Monsieur le ministre, les fonds destinés à la boucle de l’Atlantique doivent-ils figurer dans le budget du printemps pour que le projet puisse aller de l’avant? Quelles seront les répercussions si les fonds ne sont pas prévus dans le budget?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Je vous remercie de cette question très importante. Comme vous l’avez indiqué, la boucle de l’Atlantique est un projet électrique crucial pour le Canada atlantique, car il permettra d’éliminer progressivement le charbon, d’utiliser des énergies non émettrices, mais aussi de préparer le Canada atlantique à accroître sa production d’électricité. C’est là une étape nécessaire si l’on veut électrifier les transports, le chauffage domestique et toutes sortes d’autres choses, mais aussi disposer de suffisamment d’énergie propre pour attirer des industries et fabriquer des produits.

La boucle de l’Atlantique est donc un projet extrêmement important. Je collabore activement avec toutes les provinces concernées et je m’entretiens régulièrement avec les premiers ministres Houston, Higgs et Furey, sans oublier, bien sûr, le gouvernement du Québec. Il s’agit d’une priorité commune, mais c’est un projet auquel nous devons bien réfléchir. Le gouvernement fédéral reconnaît certainement qu’il doit participer aux discussions pour trouver une solution. Nous y travaillons activement. Je dirais cependant que nous avons l’intention de conclure un accord de principe au cours des premiers mois de l’année prochaine. Comme vous l’avez dit, le temps presse.

La transition équitable

L’honorable Hassan Yussuff : Je vous remercie d’être parmi nous aujourd’hui, monsieur le ministre. Je tiens aussi à vous remercier pour le bon travail qui se fait partout au pays, particulièrement dans le domaine dont vous êtes responsable.

Comme vous le savez peut-être, je consacre une bonne partie de mon temps à défendre les intérêts des travailleurs. Dans ce contexte, j’ai coprésidé le groupe de travail sur l’élimination graduelle du charbon pour la production d’électricité. Les travailleurs ont accueilli favorablement les 10 recommandations formulées dans le rapport du groupe de travail. Je sais que le gouvernement consulte sans nul doute des travailleurs au sujet de la mise en œuvre d’une mesure législative sur la transition équitable.

Pouvez-vous confirmer au Sénat que dans un avenir rapproché — donc d’ici le printemps — votre gouvernement pourrait concrétiser le programme sur la transition équitable? Ce programme comprendra-t-il tous les éléments recommandés par le Groupe de travail sur la transition équitable pour les collectivités et les travailleurs des centrales au charbon canadiennes?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Je vous remercie de la question. Oui, nous travaillons très activement sur la transition équitable, qu’on qualifie aussi, depuis quelque temps, de plan visant à créer des emplois durables. Il n’y a pas que moi, mais aussi les ministres O’Regan et Qualtrough ainsi que les députés néo-démocrates chargés de ces dossiers, qui sont parties à l’entente de soutien et de confiance.

Nous avons l’intention de passer aux actes au début de la nouvelle année en présentant une mesure législative et une ébauche de plan d’action comportant bon nombre d’éléments indiquant ce que le gouvernement a fait ainsi que les objectifs qu’il vise. Cette ébauche inclura divers éléments qui sont ressortis des consultations que nous avons menées au cours des deux dernières années et qui tiennent largement compte du mouvement syndical.

Il va sans dire que le plan ne porte pas uniquement sur la formation professionnelle et l’adaptation. Il vise également à bâtir une économie qui offrira de bons emplois aux Canadiens dans l’avenir.

Nous analysons le travail qui a été fait précédemment dans le dossier du charbon. Je sais que vous étiez très actif dans ce dossier, monsieur le sénateur. Nous avons déjà donné suite à certaines recommandations, et nous examinerons celles qui restent au fur et à mesure que nous mettrons en œuvre le plan global qui vise non seulement les travailleurs du charbon, mais aussi ceux d’autres secteurs. Comme vous le savez, même le financement mis en place pour les travailleurs du charbon expire à la fin de 2023.

Il reste évidemment du temps entre ce moment et la fermeture de certaines de ces usines, et c’est donc une conversation plus large qui doit avoir lieu.

Les émissions de carbone

L’honorable Paul J. Massicotte : Bienvenue, monsieur le ministre. Les forêts boréales du Canada représentent le quart des forêts du monde. Depuis de nombreuses années, nous sommes un chef de file en matière de gestion durable des forêts. Ces forêts stockent une quantité importante de carbone dans le sol, et ce carbone est libéré dans l’atmosphère lors de l’exploitation forestière. On estime que cette dernière libère chaque année 122 mégatonnes de CO2. Le gouvernement prend-il ces émissions en considération? Dans l’affirmative, comment votre gouvernement envisage-t-il de les réduire pour atteindre nos cibles de carboneutralité?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Merci. Oui, comme vous le dites, les forêts sont d’importants puits de carbone, tout comme les milieux humides et les tourbières. Nous sommes certainement déterminés à tenter d’améliorer les puits de carbone grâce à des programmes comme le programme 2 milliards d’arbres. Toutefois, comme vous l’avez également souligné à juste titre, l’industrie forestière, particulièrement tout ce qui concerne les éléments comme les déchets laissés dans les forêts, produit du méthane et, parfois, du CO2, qui contribuent aux changements climatiques.

Le Canada tient effectivement compte de tous ces éléments. Nous utilisons des lignes directrices reconnues par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Certains organismes environnementaux estiment que certaines de ces lignes directrices devraient être différentes ou modifiées. Nous avons communiqué avec certains d’entre eux, notamment Nature Canada et le Natural Resources Defense Council. Nous discutons avec ces organismes, mais, bien sûr, le Canada ne veut pas inventer ses propres lignes directrices. Nous voulons travailler de concert avec nos partenaires internationaux, et c’est ce que nous faisons régulièrement.

Nous sommes certainement déterminés à tenter de trouver des moyens, par exemple, de mieux exploiter la valeur des déchets qui sont actuellement laissés dans les forêts, ce qui produit du méthane, mais qui fait aussi perdre de l’argent à l’économie.

[Français]

La boucle de l’Atlantique

L’honorable Clément Gignac : Bonjour, monsieur le ministre.

En tant qu’ancien ministre des Ressources naturelles du Québec, permettez-moi tout d’abord de souligner votre bon travail et l’importance que les Canadiens doivent accorder au développement des ressources naturelles comme source de création de richesse dans le respect de l’environnement.

J’aimerais poursuivre la discussion amorcée par mon collègue au sujet de la boucle de l’Atlantique. J’aimerais entendre davantage vos commentaires à cet égard. L’échéancier de 2030 est très court lorsqu’il s’agit de délais en matière d’infrastructure. J’aimerais savoir quelle forme d’aide financière pourrait être accordée dans le cadre de ce projet.

(1430)

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : C’est un enjeu très important. Bien sûr, le délai est court pour un projet qui comprend de nombreuses infrastructures. Nous avons travaillé très fort avec nos homologues des provinces et territoires. J’ai un rendez-vous avec le ministre Fitzgibbon pour tenir une discussion, mercredi prochain. Bien sûr, l’énergie et l’électricité sont de compétence provinciale. Nous savons que nous devons jouer un rôle, particulièrement sur le plan financier, pour soutenir le projet.

Évidemment, on ne peut pas avoir une situation où il y a des coûts pour les citoyens qui vivent dans les provinces et les territoires et nous avons quelques outils que nous voulons utiliser, mais à l’heure actuelle, nous négocions avec nos partenaires des provinces et territoires. Je suis très optimiste à l’idée de parvenir à un plan qui fonctionne pour le Canada et pour les provinces et les territoires, y compris le Québec, puisque l’énergie provient de la province du Québec.

La Stratégie canadienne pour l’hydrogène

L’honorable Josée Verner : Merci, monsieur le ministre. En avril 2022, le commissaire à l’environnement et au développement durable, Jerry DeMarco, concluait dans un rapport que la Stratégie canadienne pour l’hydrogène surestimait son potentiel de réduire nos émissions de gaz à effet de serre en raison de l’utilisation, et je le cite, d’« hypothèses irréalistes ». Lors de son témoignage devant notre Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles, en octobre dernier, M. DeMarco a expliqué cette situation en partie par le fait que votre ministère avait privilégié « un scénario transformateur qui supposait l’adoption de politiques audacieuses et parfois inexistantes ». Que répondez-vous au constat préoccupant du commissaire DeMarco?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Merci pour la question; je vais répondre en anglais pour être plus clair.

[Traduction]

Je vois d’un bon œil le rapport de M. DeMarco; il contenait de nombreux éléments que j’approuvais. Je dirais que ce qu’a fait Ressources naturelles Canada était différent de ce qu’a fait Environnement et Changement climatique Canada. Ce dernier s’est doté d’un plan de lutte contre les changements climatiques qui est fondé sur la réduction des émissions que permettrait l’hydrogène au cours de la période visée, et le ministère a seulement examiné une application. En ce qui concerne Ressources naturelles Canada, le ministère a examiné ce qu’on appelle le « plein potentiel », c’est‑à‑dire l’ensemble des applications possibles de l’hydrogène, et il a dressé le portrait de ce que serait ce potentiel si l’on saisissait toutes les occasions d’utiliser l’hydrogène.

Souvent, comme vous le savez, les entreprises font une étude de plein potentiel pour essayer de comprendre toutes les possibilités qui s’offrent à elles. Cela ne veut pas dire que toutes les options seront forcément mises en œuvre. Cependant, je dirais qu’une étude de plein potentiel est utile pour s’assurer de comprendre les meilleures occasions, à la fois du point de vue de la réduction des émissions et du point de vue économique.

Je suis certain que le travail que nous avons déjà accompli et que nous continuerons d’accomplir nous aidera à faire avancer cette notion de plein potentiel dans le contexte de la stratégie sur l’hydrogène. J’ai déjà dirigé une entreprise axée sur l’hydrogène. C’est un domaine que je connais assez bien, et je crois que l’hydrogène offre d’excellentes perspectives économiques au Canada. Nous aurons besoin d’utiliser ce genre d’énergie dans des contextes où il est très difficile d’avoir recours à l’électricité, par exemple pour les camions de gros tonnage ou même, dans certains cas, pour le chauffage de résidences.

J’accueille donc favorablement le rapport de M. DeMarco, mais il m’apparaît important de comprendre que l’angle choisi est légèrement différent.

La Stratégie sur les minéraux critiques

L’honorable Elizabeth Marshall : Bienvenue au Sénat du Canada, monsieur le ministre. J’ai lu votre Stratégie sur les minéraux critiques et j’ai regardé votre conférence de presse. Comme des milliards de dollars seront consacrés à cette stratégie, quand commencerez-vous à faire rapport aux Canadiens des progrès de la stratégie, des sommes dépensées, qui atteindront les milliards de dollars, et des résultats de la stratégie? J’aimerais en savoir davantage sur la reddition de comptes.

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : C’est une très bonne question, sénatrice. Comme vous le savez, l’argent destiné à la Stratégie sur les minéraux critiques — 3,8 milliards de dollars — a été prévu dans le budget de 2022. C’est d’ailleurs très inhabituel pour un gouvernement de financer à l’avance une stratégie qui n’a pas encore été complétée, mais c’est ce que nous avons fait dans ce budget, puis nous avons lancé la version finale de la stratégie la semaine dernière.

Elle est vitale pour le Canada. Comme vous m’aurez entendu le dire à la conférence de presse, elle représente une occasion économique générationnelle pour notre pays, pas seulement sur le plan de l’extraction, mais aussi sur celui du traitement et de la fabrication de batteries et de véhicules électriques. Il est également important, alors que nous allons de l’avant, de faire preuve de transparence à l’égard des Canadiens au sujet des progrès réalisés le long de la chaîne. Des 3,8 milliards de dollars, une partie est consacrée à des projets, une autre aux infrastructures et une autre à la géologie.

Je m’attends à ce que nous fassions rapport au sujet des progrès de cette stratégie au moins une fois par année.

[Français]

L’exploitation aurifère

L’honorable Claude Carignan : Monsieur le ministre, Nordgold est une société dont le siège social est situé à Moscou. Il s’agit d’une propriété d’Alexeï Mordachov, un oligarque russe, et elle l’était jusqu’au début de cette année, alors qu’il a transféré ses actions à sa conjointe pour éviter les sanctions.

Nordgold, grâce à sa filiale Northquest, détient une concession minière pour un site à haute teneur en or situé au Nunavut. On a imposé une interdiction d’entrée à M. Mordachov en Europe, aux États-Unis et en Australie, mais pas au Canada. L’or n’est pas sur la liste des métaux stratégiques annoncés par le ministre Champagne.

Qu’entendez-vous faire pour éviter qu’un ami de Vladimir Poutine continue à passer entre les mailles du filet et exploite des mines d’or au Canada?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Je vous remercie de la question. Je voudrais dire que la responsabilité de la liste des gens qui sont bannis relève de la ministre Joly. Je suis très ouvert à l’idée d’avoir une conversation, si vous pouvez me donner l’information dont vous avez parlé. C’est important, car le Canada est un chef de file lorsqu’il s’agit de bannir les gens qui sont de mauvais acteurs, dont la Russie, qui a envahi l’Ukraine. Je suis très ouvert à l’idée d’avoir une conversation avec vous et ensuite avec la ministre Joly.

[Traduction]

Les exportations d’hydrogène

L’honorable Peter M. Boehm : Monsieur le ministre, je vous remercie de votre présence parmi nous aujourd’hui. Ce n’est un secret pour personne : nos amis et alliés européens auront un dur hiver à traverser. Qui plus est, l’agression de la Russie contre l’Ukraine empirera les choses, surtout dans un contexte où les pays délaissent graduellement les hydrocarbures de la Russie.

Lors de sa visite au Canada il y a quelques mois, le chancelier allemand Olaf Scholz a signé l’Alliance Canada-Allemagne pour l’hydrogène, une initiative axée sur le développement de l’exportation d’hydrogène, surtout à partir de Terre-Neuve. J’aimerais savoir quelles sont vos observations sur la faisabilité de cette initiative et comment évoluent les travaux dans ce domaine très concurrentiel où il existe déjà de gros joueurs internationaux.

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : C’est une excellente question. Je dirais que le Canada fait tout en son pouvoir pour soutenir ses amis et alliés européens dans la foulée de l’invasion brutale et illégale de l’Ukraine. Pour commencer, nous avons pris l’engagement d’augmenter la production de pétrole et de gaz de 300 000 barils par jour au pays afin de créer plus de liquidités sur le marché mondial pour permettre à des pays comme l’Allemagne de délaisser le pétrole et le gaz russes. Cependant, cela touche aussi certainement à la question de l’hydrogène.

Le chancelier Scholz et mon homologue, le vice-chancelier Habeck, ont fait une visite très importante et, à mon avis, fructueuse chez nous. Comme vous l’avez dit, la signature du protocole d’entente sur l’hydrogène en faisait partie. Celui-ci concerne Terre‑Neuve-et-Labrador et la Nouvelle-Écosse, qui a également des aspirations très fortes dans ce domaine.

La première étape consiste à mettre en place un régime réglementaire afin d’encadrer de manière appropriée l’industrie de l’énergie éolienne en mer. Certains projets commencent par des installations terrestres, auquel cas un régime est déjà en place ou peut être mis en place relativement rapidement par la province. Ensuite, nous préparons actuellement avec ces deux provinces un règlement fédéral-provincial visant l’énergie éolienne en mer et nous cherchons des moyens de travailler pendant que cela progresse.

L’objectif est d’être en mesure de commencer à expédier de l’hydrogène en Allemagne dès 2025, ce qui n’est pas un échéancier très lointain. Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, en particulier, a établi des cibles publiques très audacieuses quant à ce qu’il souhaite voir dans l’avenir au chapitre de l’hydrogène. Il s’agit d’un dossier sur lequel je travaille de près avec les provinces et les territoires concernés.

(1440)

De façon plus générale, le secteur de l’hydrogène offre également d’énormes possibilités pour l’Ouest du Canada. Il s’agira probablement d’hydrogène dérivé du gaz naturel associé à un captage du carbone approprié. C’est l’une des avenues que le Canada peut emprunter pour contribuer à la sécurité énergétique dans le monde.

L’exploitation du Cercle de feu

L’honorable Donna Dasko : Je vous souhaite la bienvenue, monsieur le ministre.

En 2006, le Cercle de feu, dans la région des basses terres de la baie James, en Ontario, a été désigné comme un endroit riche en minéraux critiques. On l’a décrit à maintes reprises comme un lieu où les ressources sont uniques et où les possibilités sont abondantes.

Cependant, le rythme auquel le projet d’exploitation avance a de quoi décourager. D’ailleurs, on ne sait même pas avec certitude si on finira par exploiter les abondantes ressources de cette région.

Je sais également que les consultations auprès des communautés autochtones sont importantes, et même essentielles, tout comme les diverses évaluations, environnementales et autres, qui doivent être effectuées.

Mes questions sont les suivantes. Qu’est-ce qui pourrait faire avancer ce projet? Pouvez-vous nous indiquer si un échéancier réaliste a été établi pour l’exploitation du Cercle de feu? Si vous croyez qu’il est évident que rien n’ira de l’avant, peut-on en aviser les intervenants le plus tôt possible? Merci.

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Merci.

Je vais parler de manière générale, puis j’en viendrai au Cercle de feu. De manière plus générale, nous avons du travail à faire pour garantir que nos processus réglementaires peuvent avancer à la vitesse nécessaire afin que l’on ait accès aux minéraux requis pour la transition énergétique. Il faut procéder dans le respect de l’environnement — sans prendre de raccourcis à l’égard de la durabilité environnementale —, de nos devoirs et des droits des peuples autochtones.

Nous travaillons activement au sein de la famille fédérale pour trouver des moyens d’y parvenir, et un certain nombre d’initiatives sont en cours. Nous collaborons directement avec la plupart des provinces et des territoires, dans le cadre des tables régionales sur l’énergie et les ressources, afin d’harmoniser les divers éléments.

Le Cercle de feu constitue toutefois un dossier particulièrement complexe. Il se trouve en grande partie dans des tourbières, qui constituent un énorme puits de carbone. La dernière chose que nous voulons faire dans la lutte contre le changement climatique, c’est d’aggraver la situation. Les Autochtones de la région ont aussi des préoccupations légitimes, dont il faut prendre connaissance afin d’y répondre.

Un processus est en cours pour l’évaluation de deux routes, mais celles-ci sont largement indépendantes de tout projet : elles sont destinées aux communautés autochtones. Une évaluation régionale est aussi en cours, ce qui devrait permettre d’évaluer des projets particuliers à l’avenir.

Nous n’avons pas encore de proposition de projet spécifique. Beaucoup de gens croient qu’il existe un projet pour le Cercle de feu. Je sais que Wyloo Metals, qui en détient les droits, souhaite aller de l’avant avec l’exploitation de cette région, mais aucun projet n’a été soumis à une évaluation environnementale. Cependant, une évaluation régionale est en cours.

Au bout du compte, nous désirons trouver des moyens qui permettraient de procéder à l’exploitation minière de certaines parties de la région d’une façon respectueuse de l’environnement. Pour cela, nous devons tenir compte du risque que posent pour l’environnement les tourbières. Nous devons aussi répondre aux préoccupations légitimes des groupes environnementaux si nous voulons pouvoir aller de l’avant. C’est le travail que j’effectue tous les jours.

Formation sur les questions autochtones

L’honorable Brian Francis : Bienvenue, monsieur le ministre Wilkinson. En octobre dernier, la CBC nous apprenait que peu de fonctionnaires fédéraux participaient à la formation sur les questions autochtones proposée par l’École de la fonction publique du Canada. Étant donné le rôle central de ces fonctionnaires dans la conception, la mise en œuvre et le maintien des lois, des politiques et des autres mesures susceptibles d’avoir une incidence néfaste sur les populations autochtones, ces conclusions sont alarmantes.

Pourriez-vous nous confirmer que vous seriez favorable à ce qu’une directive rende obligatoire la formation sur les questions autochtones pour les employés de Ressources naturelles Canada et de tous les autres ministères et organismes fédéraux?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Je suis certainement d’accord avec vous pour dire que cette formation est extrêmement importante. Je serais ravi de vous fournir ultérieurement des statistiques à ce sujet comparant Ressources naturelles Canada aux autres ministères, si cela vous intéresse.

Ressources naturelles Canada est un chef de file à bien des égards. D’ailleurs, l’ancienne Direction des grands projets du ministère se nomme maintenant Nòkwewashk, un mot anishinaabe, et elle met davantage l’accent sur le partenariat. Nous avons travaillé fort pour changer complètement notre façon de penser.

En outre, nous examinons les moyens qui nous permettraient de faire en sorte que les projets qui se réalisent dans leur territoire traditionnel apportent aux collectivités autochtones des retombées avantageuses plus soutenues et à plus long terme que, disons, six emplois et trois marchés publics. Nous voulons également nous assurer que ces collectivités ont voix au chapitre lorsqu’il s’agit de déterminer la façon de réaliser ces projets.

Ainsi, j’appuie fermement la démarche que vous avez mentionnée. Cependant, en général, les directives à l’intention du personnel au sein des ministères relèvent du sous-ministre, qui est responsable des employés. Cela dit, mon sous-ministre et moi encourageons chaque jour le ministère à s’améliorer dans ce domaine. Je serais bien surpris que nous ne soyons pas l’un des ministères affichant les meilleures statistiques concernant cette formation.

[Français]

La Stratégie canadienne pour l’hydrogène

L’honorable Josée Verner : Monsieur le ministre, la Stratégie canadienne pour l’hydrogène accorde une place importante à l’hydrogène vert compte tenu des ressources enviables du Canada en matière d’hydroélectricité, plus particulièrement au Québec. C’est effectivement très prometteur. Or, le processus d’électrolyse est dispendieux et consomme beaucoup d’électricité, dont l’offre n’est pas illimitée.

En mars 2022, la présidente d’Hydro-Québec, Sophie Brochu, a d’ailleurs affirmé que la province n’aura plus de surplus d’électricité propre d’ici 2027. Quelle est votre réaction face à cet enjeu important? Cela vous amène-t-il à croire qu’il serait éventuellement opportun de revoir la stratégie fédérale afin qu’elle tienne compte de cet enjeu important?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Je vous remercie pour la question, sénatrice. Elle est importante, mais elle n’est pas très simple. Souvent, avec l’hydrogène vert, comme les gens l’appellent — je n’aime pas forcément qu’on le qualifie avec des couleurs, car je crois que l’on devrait plutôt parler de l’intensité des émissions de carbone lors de l’électrolyse —, lors du processus, il faut faire des choix à savoir comment nous voulons utiliser l’électricité, et cela dépend des circonstances.

Les provinces de l’Atlantique veulent utiliser l’électricité éolienne pour produire de l’hydrogène, mais le Québec a une perspective différente. Elle veut utiliser un peu d’hydrogène pour l’utilisation domestique, mais n’a pas beaucoup d’intérêt pour son exportation. Comme je l’ai déjà dit, il existe d’autres solutions. Pour l’Alberta, par exemple, nous pouvons utiliser le gaz naturel pour produire l’hydrogène qui ne crée pas beaucoup de CO2.

Toutes les provinces et les territoires n’ont pas les mêmes perspectives. Bien sûr, nous devons faire des choix. Le coût de l’électricité est plus élevé que celui du gaz naturel, lequel devient un choix plus économique pour l’instant. Cependant, si les coûts de l’électrolyse baissent à l’avenir, cela changera.

[Traduction]

La taxe sur le carbone pour les agriculteurs

L’honorable Denise Batters : Monsieur le ministre, l’une des ressources naturelles les plus abondantes au Canada est la production de nos agriculteurs, mais le triplement de la taxe sur le carbone par le gouvernement Trudeau met leur gagne-pain en péril. Le gouvernement prétend que les carburants agricoles sont exemptés de taxe sur le carbone, mais le gaz naturel et le propane ne le sont pas. Les agriculteurs qui dépendent de ces combustibles pour faire sécher leur grain et chauffer leurs granges voient leurs factures s’élever à des dizaines de milliers de dollars. Le remboursement moyen de 860 $ de la taxe sur le carbone que vous promettez ne représente que des miettes.

Même si les agriculteurs canadiens sont déjà des gardiens prudents de l’environnement, ils doivent constamment payer la taxe sur le carbone de Trudeau qui frappe le carburant, les engrais et le transport des céréales et du bétail jusqu’aux marchés. Cela fait grimper le prix des aliments, ce qui, encore une fois, se répercute sur les agriculteurs et les consommateurs. Cela se répercute également sur la facture d’épicerie de tous les Canadiens, qu’ils habitent en milieu rural ou urbain.

Quand le gouvernement va-t-il éliminer la taxe sur le carbone sur tous les carburants agricoles et donner à nos agriculteurs et à tous les consommateurs canadiens un répit bien nécessaire?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Merci de votre question, sénatrice.

Je suis originaire de la Saskatchewan et j’ai déjà travaillé pour le premier ministre de cette province. Je comprends bien le secteur agricole et certaines préoccupations qui sont soulevées.

La tarification de la pollution est un élément important de la lutte contre les changements climatiques, tant pour réduire les émissions que pour encourager l’innovation et la mise au point de technologies carboneutres ou à très faibles émissions. Nous avons offrons un remboursement pour les détaillants, y compris en Saskatchewan, où 80 % des familles récupèrent plus d’argent qu’elles n’en paient. Nous offrons aussi un remboursement aux familles d’agriculteurs afin d’essayer de résoudre le problème que vous soulevez et qui ne se posait pas auparavant. Donc, il y a un remboursement pour le moment.

(1450)

Il est vraiment important que les politiciens des deux chambres du Parlement comprennent vraiment que les changements climatiques constituent une menace existentielle pour l’avenir de la race humaine. Nos enfants en sont terrifiés quand ils songent à leur avenir. Aucun parti politique ne peut dire qu’il prend ses responsabilités s’il ignore tout simplement la crise climatique. Nous devons avoir une approche réfléchie, et cela devrait être le cas dans tous les partis politiques. Selon nous, il ne devrait pas être permis de polluer librement n’importe où dans ce pays. La tarification de la pollution est un élément important d’un plan climatique crédible qui tient également compte des réalités économiques.

La boucle de l’Atlantique

L’honorable Mary Coyle : Bienvenue, monsieur le ministre. Je suis une fière Néo-Écossaise, mais je suis inquiète : en 2021, 47 % — près de la moitié — de l’électricité produite dans la province provenait du charbon. La province vient d’approuver la réouverture de la mine de charbon Donkin pour sept années supplémentaires. Mes collègues — le sénateur MacDonald et le sénateur Gignac — vous ont posé des questions sur la boucle de l’Atlantique, un projet qui reliera notre réseau à l’hydroélectricité du Labrador et du Québec, comme vous le savez bien. Emera a suspendu ses investissements dans la boucle de l’Atlantique en raison du plafonnement des tarifs d’électricité de la province, comme vous le savez.

Monsieur le ministre, vous avez réitéré l’engagement du gouvernement envers la boucle de l’Atlantique. Pourriez-vous nous en dire plus sur le travail que vous ferez précisément avec la Nouvelle-Écosse pour faire progresser ce projet essentiel?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Oui, c’est un projet essentiel; je suis d’accord avec vous, sénatrice. C’est un projet sur lequel nous avons travaillé activement au cours des dernières années. Je me suis entretenu régulièrement avec le premier ministre Houston à ce sujet. Mon point de vue est qu’il s’agit d’un projet essentiel, et d’après ce qu’il m’a exprimé — et je le crois sur parole —, il s’agit d’un projet essentiel pour lui aussi.

Évidemment, nous devons nous assurer d’agir d’une manière qui convient aux contribuables, à la province et aux autres provinces concernées, mais aussi que cela est sensé sur le plan des finances pour le gouvernement fédéral. Je crois qu’il existe un moyen d’y parvenir. C’est ce que nous nous efforçons d’établir. Ce n’est pas simple, mais c’est urgent. Comme je l’ai dit en réponse à la question précédente, mon espoir est de conclure une certaine forme d’accord de principe au début de la nouvelle année.

[Français]

Le Réseau national des gardiens des Premières Nations

L’honorable Michèle Audette : Monsieur le ministre, moi aussi, je suis une fière sénatrice innue, québécoise et un petit peu du Labrador.

La semaine dernière, le gouvernement a participé au lancement du Réseau national des gardiens des Premières Nations dont l’objectif est de mettre en commun les expertises et les connaissances, surtout eu égard à la conservation dirigée par et pour les communautés autochtones.

Selon vous, monsieur le ministre, comment les gardiens autochtones peuvent-ils soutenir les éléments clés du mandat de votre ministère sur les enjeux liés à la planification de l’exploitation des ressources et de la gestion des feux de forêt?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Merci, madame la sénatrice. Je crois que l’événement dont vous parlez est la COP15, la 15e Conférence des Parties à la Convention des Nations unies sur la diversité biologique. J’étais là; c’était organisé en collaboration avec les communautés, comme vous l’avez dit, ainsi qu’avec le ministre des Ressources naturelles. J’ai participé au début de cette réunion très importante.

Nous avons mis en place un processus pour discuter d’un cadre permettant d’examiner les avantages des projets d’exploitation des ressources naturelles et nous y travaillons avec les peuples autochtones : les Inuits, les Métis et les Premières Nations. Nous devons avoir ces conversations et obtenir leur accord.

Je suis tout à fait déterminé à faire en sorte que nous parlions de réconciliation économique et pas seulement de services et de gouvernance. Il faut parler de réconciliation économique afin que les communautés puissent disposer des ressources dont elles ont besoin pour soutenir leur population. C’est très important.

[Traduction]

Le Fonds national des corridors commerciaux

L’honorable Dennis Glen Patterson : Bienvenue, monsieur le ministre. La riche province géologique des Esclaves, qui jouxte les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut, contient une abondance de minéraux qui figurent sur la liste des minéraux critiques du Canada, comme le zinc, le cobalt, des éléments des terres rares et du nickel, pour ne nommer que ceux-là. La Kitikmeot Inuit Association a fait avancer le projet de construction d’une route praticable en toute saison et d’un port à Grays Bay, qui, en plus d’offrir à la communauté l’avantage du réapprovisionnement et de l’entreposage de carburants, sera essentiel pour libérer le potentiel de la province géologique des Esclaves au Nunavut.

Cependant, à cause des graves répercussions de la pandémie de COVID-19 dans le Nord, les 21 millions de dollars qu’a reçus la Kitikmeot Inuit Association du Fonds national des corridors commerciaux pour faire avancer le projet demeurent inutilisés et expireront à la fin du présent exercice financier. Je vous demande de vous servir de vos bons offices pour obtenir une prolongation d’une année de cette importante contribution financière pour les infrastructures.

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Je vous remercie de votre question. Je crois assurément que certaines de ces questions d’infrastructure sont extrêmement importantes alors que nous pensons à des choses comme les minéraux critiques. Deux ministres des Territoires du Nord-Ouest étaient ici l’autre jour pour nous parler de quelques projets d’infrastructure qui ne sont pas très différents de ce dont vous parlez. Une partie de ces projets portent sur la construction de routes. Une autre partie porte sur la construction de lignes de transport en vue de fournir un accès à l’énergie. Une autre partie porte sur les ports; il y a un autre problème lié aux ports au Yukon qui n’est pas très différent. Nous sommes certainement au fait de la situation et nous y réfléchissons.

De la somme affectée aux minéraux critiques, 1,5 milliard de dollars sont consacrés aux infrastructures, alors de l’argent est investi dans ce secteur ainsi que dans le secteur du ministre LeBlanc. Toutefois, il y a également le fonds des corridors commerciaux, comme vous l’avez dit, qui relève du ministère des Transports. Je me pencherai là-dessus avec plaisir. Je ne suis pas tout à fait sûr de connaître l’état de la situation, mais je serai très heureux de m’en informer et d’en discuter avec le ministre Alghabra.

L’industrie pétrolière et gazière

L’honorable David M. Wells : Je vous remercie et vous souhaite la bienvenue, monsieur Wilkinson. À la fin du mois d’août, le chancelier allemand Olaf Scholz est venu à Terre-Neuve-et-Labrador, la province que je représente, pour une visite officielle. Il cherchait, entre autres, d’autres sources d’approvisionnement en gaz naturel que la Russie après avoir subi des pressions à ce sujet. Le chancelier Scholz a souligné que le Canada était son premier choix, et il n’est pas le seul en Europe qui considère que le Canada est la meilleure option pour l’approvisionnement en gaz naturel et pour les sources d’énergie autres que le pétrole.

Il est venu ici pour conclure une entente, monsieur le ministre, et il s’est fait montrer la porte. En fait, le premier ministre Trudeau a dit, lors d’une conférence de presse conjointe, qu’il n’y a jamais eu d’arguments de poids pour justifier une telle entente. Bien sûr, nous savons que ce n’est pas le cas. Par ailleurs, nous avons maintenant appris que l’Allemagne a signé, avec le Qatar, une entente sur le gaz naturel d’une durée de 15 ans et d’une valeur de plusieurs milliards de dollars.

Monsieur le ministre, il existe un régime de réglementation, un marché et un approvisionnement de ce marché. L’Allemagne est l’une de nos alliées et l’une de nos partenaires de l’Accord économique et commercial global. Quand l’industrie canadienne pourra-t-elle obtenir des précisions du gouvernement sur ces débouchés?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Merci de votre question. Comme je l’ai dit plus tôt, nous sommes tout à fait prêts à soutenir, de toutes les façons possibles, nos amis en Europe en cette période de grand stress. C’est pour cette raison que nous avons augmenté la production et l’approvisionnement de pétrole et de gaz, par l’entremise des États-Unis, de 300 000 barils par jour et nous sommes en voie d’atteindre cet objectif. Du gaz naturel liquide sera exporté du Canada dès 2024 à partir des installations que LNG Canada est en train de construire à Kitimat.

Sur la côte Est, ce que les Allemands ont affirmé publiquement — et qu’ils m’ont répété à plusieurs reprises —, c’est qu’ils ont besoin d’une solution qui serait prête d’ici trois ans, autrement, cela ne les intéresse pas. Ils croient être en mesure d’avoir complètement remplacé le gaz russe d’ici là, notamment grâce à la transition qu’ils veulent opérer à grande vitesse vers les énergies renouvelables et l’hydrogène et grâce à des contrats qu’ils pourraient conclure avec d’autres alliés qui disposent des capacités nécessaires.

Nous nous sommes attelés à la tâche. En fait, il n’y a vraiment qu’un seul projet susceptible de respecter cet échéancier. Il faudrait un pipeline déjà existant et, idéalement une infrastructure déjà en place. Or, on trouve tout cela au Nouveau-Brunswick, mais le pipeline nécessite des travaux de mise à niveau, dont une partie au Canada et une autre aux États-Unis, puisqu’il passe dans le Maine et le New Hampshire. Nous examinons cette possibilité et nous travaillons activement avec le premier ministre Higgs sur le dossier. Si vous vous adressez à TC Énergie, la société exploitant le pipeline, vous constaterez qu’elle se préoccupe de l’approbation du processus réglementaire aux États-Unis. Elle n’est pas préoccupée par l’approbation au Canada.

Pour ce qui est de l’étude de rentabilité, je crois que nous avons peut-être trouvé une façon de contourner le problème, mais il coûte très cher d’expédier du gaz de l’Alberta jusqu’au Nouveau‑Brunswick. Cependant, il y a peut-être un mécanisme de financement différent qui permette de ne pas payer exactement la même chose que si le gaz venait du golfe du Mexique. Nous analysons encore cette possibilité, mais il faut comprendre que l’enjeu réglementaire se trouve du côté des Américains, et non de celui des Canadiens.

La diversification des marchés

L’honorable Colin Deacon : Monsieur le ministre, je vous remercie d’être avec nous, au Sénat.

(1500)

Je m’intéresse aux façons dont Ressources naturelles Canada pourrait servir de catalyseur d’innovation et de diversification des marchés en ce qui concerne l’utilisation des déchets de bois. Vous avez abordé ce sujet plus tôt. Comme vous le savez, il existe de plus en plus d’utilisations convaincantes des déchets de bois. Je pense par exemple aux granules de bois, au biocharbon — qui séquestre le carbone et améliore la santé du sol — ou à d’autres applications innovantes.

En Nouvelle-Écosse, nous dépendions beaucoup trop d’une seule utilisation pour les déchets de bois : la pâte de bois. La fermeture d’une usine de pâte à papier a donc eu des conséquences catastrophiques et causé des difficultés économiques à des milliers de familles rurales qui dépendaient de ce secteur, et ce malgré le prix élevé du bois d’œuvre en 2021.

Quelles mesures — comme des réformes ou des incitatifs réglementaires — votre ministère envisage-t-il afin de créer des débouchés innovateurs et plus diversifiés concernant des utilisations à valeur ajoutée et écologiques des déchets de bois?

Merci.

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Merci. Je suis d’avis que c’est un secteur très important. C’est aussi un secteur que je connais passablement bien. Auparavant, je travaillais dans une entreprise qui produit de l’énergie à partir de la biomasse. Elle utilise les déchets du bois pour produire de l’énergie thermique, notamment pour alimenter en énergie l’Université de la Colombie-Britannique. Cet établissement n’utilise pas du tout le gaz.

En ce qui concerne la situation au Canada, si l’on tient compte des dollars par mètre cube, notre rendement n’est pas très bon au chapitre de l’utilisation de notre matière fibreuse. Plusieurs raisons expliquent cela, mais on peut faire mieux. Une partie de la solution consiste à optimiser l’utilisation de ce que l’on considère comme un déchet. C’est un secteur extrêmement important. Il s’inscrit dans la nouvelle stratégie que Ressources naturelles Canada espère mettre en œuvre. Nous mettons vraiment l’accent sur cet aspect, c’est‑à‑dire améliorer le rendement des dollars par mètre cube. Cela signifie qu’il faut investir dans les technologies et l’innovation dans le secteur de l’utilisation des déchets.

Je sais que ce secteur occupe une place importante dans vos travaux depuis un certain temps. Nous sommes aussi très investis dans ce secteur.

Le transport des produits du pétrole et du gaz

L’honorable Patricia Bovey : Bienvenue, monsieur le ministre.

Depuis notre collaboration sur le projet de loi C-55, vous connaissez mes préoccupations à l’égard des océans et de leur fragilité. Cela étant dit, ma question porte sur les nombreuses propositions qui ont été faites de transporter du pétrole et du gaz naturel depuis Churchill en passant par la baie d’Hudson et l’océan Arctique. En tant que ministre des Ressources naturelles et qu’ancien ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, appuyez-vous ces propositions? Dans l’affirmative, en quoi les risques de dommages environnementaux vous préoccupent-ils?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Premièrement, jusqu’à présent, je n’ai vu aucun projet mis de l’avant par des promoteurs qui ont été mûrement réfléchis. Je dirais que c’est exactement pour cela que le processus d’évaluation environnementale existe. En toute franchise, c’est pour cela que nous avons mis en place de meilleures règles en ce qui concerne les évaluations environnementales. C’est pour que nous puissions examiner les choses attentivement et consulter les communautés autochtones. C’est pour que nous puissions nous pencher attentivement sur les risques associés à ce genre de projets.

D’après moi, le plus grand défi consiste à réfléchir à une façon d’assurer le transport sécuritaire de ces ressources dans l’Arctique. Ce n’est pas pour rien qu’il y a un moratoire sur les forages dans l’Arctique. C’est un écosystème très sensible. Nous n’avons pas les capacités de nettoyage nécessaires dans cette région. La Garde côtière n’est pas très présente là-bas. Nous n’avons pas les mêmes capacités qu’au port de Vancouver, par exemple, pour intervenir très rapidement en cas de déversement afin de limiter les dégâts.

Par conséquent, tout projet qu’on nous soumettrait devrait tenir compte de ces problèmes dès le départ pour qu’il puisse aller de l’avant. Cependant, comme je l’ai dit, je n’ai pas encore vu de projets détaillés à cet égard.

La Stratégie sur les minéraux critiques

L’honorable Dennis Glen Patterson : Monsieur le ministre, le Nunavut a d’importantes quantités d’or; il compte quatre mines en production et d’autres sont prévues. Cependant, il a aussi de grands problèmes d’infrastructure et de transport.

Je me demande si on envisage la possibilité d’ajouter l’or à la liste des minéraux critiques.

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Nous nous appuyons sur une définition pour déterminer les minéraux qui sont critiques. Elle concerne notamment la disponibilité des ressources au pays. Il est aussi question des domaines où nous prévoyons une explosion de la demande, essentiellement des minéraux qui seront liés d’une façon ou d’une autre à la transition énergétique. Il ne s’agit pas seulement de ceux qui servent à la fabrication des batteries, mais également, par exemple, de l’uranium qui est utilisé pour l’énergie nucléaire.

En ce moment, je ne pense pas que l’or répond à ces critères. Cependant, nous avons dit que la liste sera passée en revue tous les trois ans, et il est possible de présenter des arguments dans le cadre de ce processus. Des gens font valoir que d’autres minéraux devraient se trouver sur la liste. C’est pourquoi la liste se veut évolutive.

Comme vous le savez très bien, monsieur le sénateur, l’or est un secteur florissant au Canada que nous avons pu développer. C’est un secteur plutôt prospère. Comme je le dis souvent, il ne faut jamais dire jamais. C’est pourquoi nous en avons fait une liste évolutive.

Le développement de l’énergie nucléaire

L’honorable Andrew Cardozo : Bonjour, monsieur le ministre. Je me trouve à votre droite. Je ne sais pas si c’est d’un point de vue politique ou non, mais...

Je vous remercie d’être ici et de répondre à nos questions. Je vous remercie de vos observations au sujet de la transition équitable, qui est extrêmement importante. J’aurais une chose à dire sur le programme que l’on appelle la taxe sur le carbone. À mon avis, il s’agit d’une taxe sur le carbone assortie d’un remboursement, mais les gens ont tendance à en parler comme d’une taxe seulement sans tenir compte du remboursement.

Je suggère donc que vous l’appeliez ainsi : « taxe sur le carbone avec remboursement » ou « tarification de la pollution avec remboursement », tout en insistant sur le mot « remboursement ».

Il ne s’agit pas d’une opération de relations publiques pour le gouvernement, mais pour ce projet de société qui, je pense, est la plus grande chose que nous faisons en matière d’environnement. Il faudrait peut-être mieux l’expliquer aux Canadiens pour qu’ils en aient une meilleure idée.

Enfin, j’aimerais que vous nous parliez de l’avenir de l’énergie nucléaire et du panier énergétique de l’avenir.

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Je vais retenir votre suggestion. Je ne suis pas en désaccord avec vous. Je pense qu’il est important que ce soit plus évident pour les Canadiens.

En ce qui concerne l’énergie nucléaire, je dirais que nous nous dirigeons vers un avenir qui doit être beaucoup plus faible en carbone, ce qui, de mon point de vue, signifie que toutes les formes d’énergie non émettrices doivent être mises sur la table. Certaines provinces de ce pays ont l’avantage d’avoir de grandes quantités d’hydroélectricité. Il s’agit de Terre-Neuve-et-Labrador, du Québec, du Manitoba et de la Colombie-Britannique. Vous disposez d’une grande batterie de stockage, ce qui vous permet d’utiliser potentiellement des sources d’énergie plus intermittentes comme l’éolien et le solaire, tout en étant en mesure de les compenser.

Par contre, dans des provinces comme l’Alberta et la Saskatchewan, où l’énergie de base est fournie principalement par le charbon et, dans une certaine mesure, par le gaz, les choix sont plus difficiles en ce qui concerne l’énergie de base. Je dirais qu’à l’heure actuelle, on se dirige probablement vers le nucléaire ou le gaz naturel avec une bonne réduction du carbone et potentiellement, à l’avenir, l’hydrogène. Les choix ne sont pas illimités, mais il reste impossible technologiquement de construire un réseau uniquement à partir de l’énergie éolienne et solaire avec une certaine capacité de stockage. Monétairement parlant, cette solution n’est probablement pas envisageable.

Dans ce contexte, je crois que l’énergie nucléaire est la véritable solution non émettrice. Je crois que les gens diraient que cette technologie est sécuritaire. De toute évidence, les résidus sont problématiques. Il faut faire en sorte que les Canadiens deviennent à l’aise avec la façon dont nous allons gérer l’existence de déchets nucléaires. Je crois que nous devons tenir une discussion sérieuse avec les Canadiens à savoir comment nous allons faire cela. Soyons clairs : en Ontario, une partie considérable de l’électricité provient de centrales nucléaires.

[Français]

Les émissions de carbone

L’honorable Julie Miville-Dechêne : Chaque année, le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) publie son Production Gap Report, qui mesure l’écart entre la production prévue de combustibles fossiles et les niveaux de production compatibles avec une limitation du réchauffement des températures de 1,5 degré à 2 degrés Celsius. Le PNUE écrit que, pour limiter le réchauffement à 1,5 degré Celsius, les gouvernements du monde entier devraient réduire de moitié la production de combustibles fossiles d’ici 2030. Pourtant, le Canada prévoit d’augmenter de près de 18 % sa production de pétrole et de gaz entre 2019 et 2040.

Monsieur le ministre, l’approche du Canada en matière de changement climatique n’est-elle pas contradictoire? Nous nous engageons à réduire nos émissions au pays, tout en augmentant le pétrole et le gaz que nous exportons.

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Je vous remercie de la question. Pour être très clair, je vais répondre en anglais.

[Traduction]

Je crois que c’est une question très importante. Prenons un peu de recul et examinons, par exemple, le scénario d’un réchauffement planétaire de 1,5 degré Celsius selon l’Agence internationale de l’énergie. Le monde n’en est pas encore là; les engagements de tous les pays ne sont pas encore au rendez-vous. Cependant, en supposant que l’on parvienne à limiter à 1,5 degré l’augmentation de la température au cours des prochaines décennies, il nous faudra tout de même utiliser des quantités considérables d’hydrocarbures. Même en 2015, en supposant que l’on parvienne à limiter à 1,5 degré l’augmentation de la température, il nous faudra toujours utiliser une quantité considérable d’hydrocarbures, sans toutefois nous en servir comme combustible. Nous nous en servirons pour fabriquer des solvants, des cires, des produits pétrochimiques et de l’hydrogène. Même dans un tel scénario, il nous faudra toujours consommer 25 millions de barils de pétrole, soit un quart de notre production actuelle, et environ la moitié de la quantité de gaz naturel que nous utilisons aujourd’hui.

(1510)

Dans ce cas, il faut pouvoir en assurer la production en générant des émissions quasi nulles. Il faut distinguer les émissions issues de la combustion et les émissions issues de la production. Même si on élimine toutes les émissions issues de la combustion parce qu’on utilise ces hydrocarbures dans des applications sans combustion, il faut tout de même en assurer la production en ne générant aucune émission ou presque. C’est là-dessus que nous nous concentrons actuellement, afin de réduire les émissions de tous les secteurs pétroliers et gaziers du pays — non seulement en Alberta et en Saskatchewan, mais aussi à Terre-Neuve-et-Labrador — pour en arriver à produire des hydrocarbures avec des émissions de carbone pratiquement nulles.

Il n’y a actuellement aucune prévision qui dit que la consommation de pétrole diminuera avant 2030 ou 2035, ou à peu près. Elle diminuera à ce moment-là, car nous déploierons davantage de véhicules. Le Canada veut évidemment tirer profit de ses ressources, mais il veut le faire d’une manière compatible avec un monde carboneutre.

Le crédit d’impôt pour la capture du carbone

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Monsieur le ministre, les promoteurs de l’industrie pétrolière et gazière ont demandé au gouvernement fédéral un crédit d’impôt à l’investissement de 75 % afin de stimuler l’investissement dans les technologies de captage et de stockage du carbone, ce qui réduirait la mise de fonds initiale liée à la construction de cette technologie essentielle. Cependant, l’annonce du gouvernement n’a pas répondu aux attentes et n’a promis qu’un crédit d’impôt de 50 %. Nombreux sont ceux dans l’industrie qui ont déclaré que la taille du crédit signifiait qu’un grand nombre des projets prévus n’iraient pas de l’avant.

Monsieur le ministre, compte tenu des répercussions que cette technologie pourrait avoir sur la réduction des émissions, êtes-vous préoccupé par le fait qu’un grand nombre de ces projets pourraient désormais ne pas voir le jour?

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Je ne suis pas d’accord avec votre affirmation. Il est extrêmement important que ces projets se concrétisent. C’est particulièrement vrai pour les sables bitumineux, où le captage, l’utilisation et le stockage du carbone figurent parmi les principales possibilités de réduction des émissions.

Nous devons être sensibles à deux choses : les perspectives économiques des projets et ce que font nos amis aux États-Unis en vertu de l’Inflation Reduction Act.

Nous avons adopté ce que nous pensions être des mesures incitatives appropriées afin d’attirer le capital nécessaire à la construction de ce type de projets. Nous attendons du secteur privé qu’il mette également ses capitaux en jeu; il fait aussi partie de la solution. Il existe d’autres moyens de créer de la valeur — par exemple, les contrats pour les écarts, un élément que nous intégrons dans le nouveau Fonds de croissance du Canada, qui a de la valeur et qui doit être pris en compte dans les perspectives économiques des projets.

Nous attendons que le gouvernement de l’Alberta nous présente ce qu’il compte faire dans le cadre de son régime de redevances. Il y travaille depuis un certain temps déjà, mais cela fait partie de la démarche à suivre. Nous avons fait beaucoup d’analyses afin de savoir comment nous nous comparons aux États-Unis. La position du Canada est tout à fait raisonnable, en fait.

Il est clair que nous voulons que ces projets aillent de l’avant. Je discute régulièrement avec les PDG d’Alliance nouvelles voies et les représentants de l’Alberta. À mon avis, ces projets vont aller de l’avant. Le gouvernement du Canada est déterminé à faire ce qu’il faut, mais, de toute évidence, nous nous attendons à ce que le secteur fasse sa part.

Le conseil du réseau pancanadien

L’honorable Tony Loffreda : Monsieur le ministre, bienvenue au Sénat.

Il y a exactement un an, vous avez reçu votre lettre de mandat, dans laquelle on vous demande notamment de créer un conseil du réseau pancanadien dans le but de promouvoir les investissements dans les infrastructures, les réseaux intelligents, l’intégration de réseaux et l’innovation dans le secteur de l’électricité.

Pouvez-vous nous en dire plus sur ce conseil, sa création, sa structure, ses membres et ses priorités? Je pose cette question car, en tant que sénateur du Québec, je suis fier que 94 % de notre électricité soit produite grâce à l’énergie hydraulique. Les Canadiens peuvent être fiers du fait que 80 % de notre électricité provient de sources non émettrices. Par contre, selon certains rapports, malgré d’importants investissements ces dernières années, nous devrons encore investir environ 200 milliards de dollars d’ici 2035 afin d’atteindre nos objectifs en matière de réseaux écologiques de distribution et même davantage afin de répondre à la hausse rapide de la demande en électricité.

L’honorable Jonathan Wilkinson, c.p., député, ministre des Ressources naturelles : Merci. C’est une question très importante.

Les gens se concentrent souvent sur les transports, ou sur le pétrole et le gaz, ou les édifices — des secteurs où il est important de réduire les émissions et de bâtir l’économie de l’avenir —, mais ils oublient souvent de parler du réseau. Or, le réseau sous-tend l’ensemble du système.

Pour éliminer progressivement l’utilisation du charbon et du gaz naturel, il est crucial d’avoir un réseau robuste qui fournit une abondance d’énergie non émettrice, mais il faut également réduire les émissions provenant des transports. Si on électrifie l’ensemble du parc automobile, il faudra davantage d’énergie. Il en sera de même si on électrifie le chauffage résidentiel. C’est crucial pour notre avenir économique.

De nombreux fabricants de batteries et, maintenant, de voitures s’établissent au Canada parce qu’on y produit de l’électricité non émettrice. Essentiellement, ces fabricants veulent que leur production soit presque carboneutre. Si un fabricant utilise de l’électricité générée au charbon, la voiture qu’il propose n’est pas carboneutre. Si on souhaite élargir la base industrielle au Canada — que ce soit dans le secteur de l’hydrogène, des biocarburants, des minéraux critiques ou de la fabrication automobile —, il faudra davantage d’énergie. Il faudra doubler ou tripler la production d’électricité au Canada au cours des prochaines décennies.

Le gouvernement fédéral doit faire partie de la solution. D’un point de vue financier, je dis souvent qu’il s’agit du chemin de fer de notre siècle. C’est d’une importance fondamentale. Il est aussi important que nous collaborions avec les provinces et les territoires tout en respectant leurs compétences pour trouver des façons de faire les choses plus efficacement et plus rapidement. C’est notamment le rôle du conseil national du réseau, que nous proposons, de tenter de trouver des idées qui sortent des sentiers battus concernant les régimes réglementaires pour nous permettre d’agir de façon à répondre aux besoins liés à la transition énergétique et d’examiner les pratiques exemplaires.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, la période des questions est terminée. Je suis certain que vous voudrez vous joindre à moi pour remercier le ministre Wilkinson de sa présence parmi nous aujourd’hui. Merci, monsieur le ministre.

Des voix : Bravo!


AFFAIRES COURANTES

Projet de loi sur la diffusion continue en ligne

Projet de loi modificatif—Présentation du troisième rapport du Comité des transports et des communications

L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le troisième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, qui porte sur le projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres lois.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 1152.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

Le sénateur Housakos : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5f) du Règlement, je propose que l’étude du rapport soit inscrite à l’ordre du jour de la présente séance.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Sur la motion du sénateur Housakos, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la présente séance.)

[Français]

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Présentation du neuvième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le neuvième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, qui porte sur le projet de loi S-205, Loi modifiant le Code criminel et une autre loi en conséquence (mise en liberté provisoire et engagement en cas de violence familiale).

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 1143.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion de la sénatrice Jaffer, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

(1520)

[Traduction]

Projet de loi d’harmonisation no 4 du droit fédéral avec le droit civil

Projet de loi modificatif—Présentation du dixième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

L’honorable Mobina S. B. Jaffer, présidente du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant :

Le mercredi 14 décembre 2022

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l’honneur de présenter son

DIXIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi S-11, Loi n° 4 visant à harmoniser le droit fédéral avec le droit civil du Québec et modifiant certaines lois pour que chaque version linguistique tienne compte du droit civil et de la common law, a, conformément à l’ordre de renvoi du 8 décembre 2022, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

La présidente,

MOBINA S. B. JAFFER

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons‑nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Clement, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

Projet de loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2022

Présentation du huitième rapport du Comité des finances nationales

L’honorable Clément Gignac, au nom du sénateur Mockler, président du Comité sénatorial permanent des finances nationales, présente le rapport suivant :

Le mercredi 14 décembre 2022

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales a l’honneur de présenter son

HUITIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-32, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 3 novembre 2022 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022, a, conformément à l’ordre de renvoi du 13 décembre 2022, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Le président,

PERCY MOCKLER

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons‑nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Loffreda, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

Le Budget des dépenses de 2022-2023

Le Budget supplémentaire des dépenses (B)—Dépôt du neuvième rapport du Comité des finances nationales

L’honorable Clément Gignac : Honorables sénateurs, au nom du sénateur Mockler, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le neuvième rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales intitulé Budget supplémentaire des dépenses (B) pour l’exercice se terminant le 31 mars 2023. Je propose que l’étude du rapport soit inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.

(Sur la motion du sénateur Gignac, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

Projet de loi sur le développement d’une économie verte dans les Prairies

Présentation du septième rapport du Comité de l’agriculture et des forêts

L’honorable Robert Black, président du Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts, présente le rapport suivant :

Le mercredi 14 décembre 2022

Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts a l’honneur de présenter son

SEPTIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-235, Loi concernant le développement d’une économie verte dans les Prairies, a, conformément à l’ordre de renvoi du 13 décembre 2022, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Le président,

ROBERT BLACK

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons‑nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Cotter, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

Affaires étrangères et commerce international

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L’honorable Peter M. Boehm : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5j) du Règlement, je propose :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international soit autorisé à se réunir le jeudi 15 décembre 2022, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)


[Français]

ORDRE DU JOUR

Projet de loi de crédits no 4 pour 2022-2023

Troisième lecture—Ajournement du débat

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) propose que le projet de loi C-36, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l’administration publique fédérale pendant l’exercice se terminant le 31 mars 2023, soit lu pour la troisième fois.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

[Traduction]

Projet de loi sur la diffusion continue en ligne

Projet de loi modificatif—Adoption du troisième rapport du Comité des transports et des communications

Le Sénat passe à l’étude du troisième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications (projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres lois, avec des amendements et des observations), présenté au Sénat le 14 décembre 2022.

L’honorable Leo Housakos propose que le rapport soit adopté.

 — Honorables sénateurs, votre comité a terminé son étude du projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres lois. L’objectif déclaré du projet de loi est de moderniser la Loi sur la radiodiffusion afin d’élargir les pouvoirs du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, le CRTC, de façon à ce qu’il puisse régir les plateformes de diffusion continue en ligne et exiger de ces entreprises en ligne qu’elle contribuent, notamment financièrement, aux systèmes canadiens de soutien des créateurs et de la culture.

Au départ, le comité avait été autorisé, le 31 mai 2022, à mener une étude préalable de la teneur du projet de loi C-11 avant que ce dernier soit renvoyé au Sénat et il a tenu sa première réunion sur le sujet le 8 juin 2022. Le projet de loi a été renvoyé au comité le 25 octobre 2022 et son étude s’est conclue le 8 décembre 2022.

Dans le cadre de l’étude du projet de loi, le comité a tenu 31 réunions, dont 9 réunions pour l’étude article par article — un record —, représentant 67 heures et 30 minutes d’étude.

(1530)

Nous avons reçu 67 mémoires et entendu 138 témoins de tous les horizons. Parmi ceux-ci, on compte des représentants du secteur des arts et de la culture, des radiodiffuseurs canadiens traditionnels, des géants de la technologie et des plateformes de diffusion en continu, des créateurs de contenu en ligne, des syndicats, des groupes des minorités visibles et linguistiques, des personnes handicapées, des membres de la communauté LGBTQ2+, des universitaires et des chercheurs.

Nous avons aussi rencontré des hauts fonctionnaires du ministère du Patrimoine canadien, de Justice Canada et d’Affaires mondiales Canada, des représentants du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada et du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes ainsi que d’anciens présidents et vice-présidents du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes.

Dès le début des travaux, deux points de vue sont clairement ressortis à propos de cette mesure législative, y compris au sein du secteur que ce projet de loi vise à appuyer. Toutefois, même les plus ardents défenseurs du projet de loi se sont présentés devant le comité pour demander d’apporter des amendements. Certains de ces amendements se retrouvent dans la version du projet de loi qui vous est présentée aujourd’hui.

Au total, 73 amendements ont été proposés au comité par les sénateurs Batters, Clement, Cormier, Dasko, Dawson, Downe, Manning, Miville-Dechêne, Plett, Quinn et Wallin. De plus, 13 sous-amendements ont été proposés à l’égard de ces derniers. Au final, 26 amendements, touchant 11 articles, et 2 sous-amendements ont été adoptés.

Les principales sources d’inquiétude des témoins portaient sur l’inclusion — involontaire ou autre — du contenu généré par les utilisateurs, la définition du contenu canadien, l’indépendance et la transparence de l’organisme de réglementation, la protection de la vie privée pour les utilisateurs des médias sociaux ainsi que les possibles ramifications du commerce et de la réciprocité.

Je ne parlerai pas de chacun des 26 amendements qui ont été adoptés, mais j’en mentionnerai quelques-uns. Votre comité a adopté une motion d’amendement présentée par l’honorable sénatrice Miville-Dechêne en coopération avec la sénatrice Simons afin de garantir que le contenu produit par les utilisateurs ne sera pas visé par cette mesure législative. Cet amendement à l’article 4 exigera que l’organisme de réglementation tienne compte de critères spécifiques lorsqu’il décidera d’inclure ou non un certain contenu dans son champ d’action.

Un autre amendement, qui n’a pas été adopté par le comité, aurait pu, selon certains sénateurs, renforcer cette exigence en rendant les critères cumulatifs et déterminants.

Votre comité a aussi adopté un amendement proposé par le sénateur Manning selon lequel aucun des critères énoncés n’est déterminant. Cela concorde avec la déclaration du ministre, qui a dit que la définition du contenu canadien peut être modernisée et qu’elle tient compte des investissements que les diffuseurs en ligne étrangers consacrent déjà à l’industrie canadienne du film et de la télévision et à la présentation d’histoires canadiennes.

Par ailleurs, votre comité a choisi d’éliminer l’article 7, qui risquait, selon les sénateurs, de politiser davantage le travail du CRTC. Votre comité considère que l’indépendance de l’organisme de réglementation est essentielle. Des amendements provenant du gouvernement ont aussi été adoptés; l’un d’entre eux vient régler certaines des préoccupations soulevées par le commissaire à la protection de la vie privée. Cela vous donne, chers collègues, un bref aperçu des 26 amendements adoptés.

Bien que votre comité soit convaincu que ces amendements améliorent le projet de loi, il convient de noter que de nombreuses préoccupations subsistent, comme le soulignent les observations incluses dans le rapport du Groupe des sénateurs indépendants, du Groupe des sénateurs canadiens et du caucus conservateur au Sénat. Nous exhortons le gouvernement à tenir dûment compte des amendements ainsi que des observations fournies en annexe par le comité.

En terminant, j’aimerais remercier tous mes collègues du comité, chacun d’entre eux, en particulier la vice-présidente, la sénatrice Miville-Dechêne, mon collègue du comité directeur, le sénateur Dawson, le porte-parole pour le projet de loi, et le sénateur Quinn. Ce fut parfois un processus acrimonieux et ardu, mais je pense que tous les points de vue ont été pris en compte dans cette étude particulière. Vous avez vu le nombre considérable de témoins et le temps qui y a été consacré. Nous avons fait notre travail de façon diligente.

Je tiens également à remercier tous les intervenants, les témoins et les Canadiens qui ont témoigné devant le comité, car sans leur concours, la démocratie ne fonctionne pas. Je tiens également à remercier le personnel de chacun de nos collègues, car le processus a été long et fastidieux, et sans leur soutien, aucun des sénateurs ne serait en mesure d’accomplir le travail que nous avons réussi à faire pour produire ce rapport.

Je remercie également les membres du personnel administratif, y compris Isabelle Brideau, qui est conseillère juridique, les analystes Jed Chong et Khamla Heminthavong, l’adjointe administrative Brigitte Martineau et, bien sûr, le greffier du comité, Vincent Labrosse, de leur patience, de leur soutien et de la diligence voulue dont ils ont fait preuve dans le cadre de cette étude. Merci beaucoup, chers collègues.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer? L’honorable sénateur Housakos, avec l’appui de l’honorable sénatrice Martin, propose que le rapport soit adopté.

Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente intérimaire : À mon avis, les oui l’emportent.

Et deux honorables sénateurs s’étant levés :

Son Honneur la Présidente intérimaire : Nous tiendrons un vote par appel nominal. Il y a un accord pour que la sonnerie retentisse pendant 15 minutes. Le vote aura lieu à 15 h 50.

Convoquez les sénateurs.

(1550)

La motion, mise aux voix, est adoptée et le rapport est adopté :

POUR
Les honorables sénateurs

Anderson Gignac
Bellemare Gold
Black Harder
Boehm Hartling
Boniface Jaffer
Bovey Klyne
Busson LaBoucane-Benson
Campbell Loffreda
Cardozo Marwah
Clement Massicotte
Cordy McCallum
Cormier Miville-Dechêne
Cotter Moncion
Coyle Omidvar
Dagenais Pate
Dalphond Patterson (Ontario)
Dasko Petitclerc
Dawson Quinn
Deacon (Nouvelle-Écosse) Ravalia
Deacon (Ontario) Ringuette
Dean Saint-Germain
Downe Sorensen
Dupuis Tannas
Francis Woo
Gagné Yussuff—51
Gerba

CONTRE
Les honorables sénateurs

Ataullahjan Plett
Batters Richards
Carignan Seidman
Housakos Smith
MacDonald Verner
Martin Wallin
Oh Wells—15
Patterson (Nunavut)

ABSTENTIONS
Les honorables sénateurs
Aucun

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons‑nous le projet de loi modifié pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Dawson, la troisième lecture du projet de loi modifié est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

L’étude des questions concernant les droits de la personne en général

Dépôt du cinquième rapport du Comité des droits de la personne

Consentement ayant été accordé de revenir à la présentation ou au dépôt de rapports de comités :

L’honorable Salma Ataullahjan : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le cinquième rapport (provisoire) du Comité sénatorial permanent des droits de la personne intitulé Restrictions du Canada sur l’aide humanitaire à l’Afghanistan. Je propose que l’étude du rapport soit inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.

(Sur la motion de la sénatrice Ataullahjan, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

Projet de loi portant sur un conseil national de réconciliation

Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Audette, appuyée par l’honorable sénatrice Mégie, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-29, Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation.

L’honorable Renée Dupuis : Honorables sénatrices et sénateurs, je prends la parole à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi C-29, Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation.

Lorsque j’ai accepté la responsabilité d’agir à titre de témoin honoraire de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, je me suis engagée à poursuivre la recherche de la vérité tout en m’engageant dans la voie de la réconciliation avec les peuples autochtones.

(1600)

J’appuie le principe de la création d’un conseil national de réconciliation. Le projet de loi C-29 répond à plusieurs appels à l’action formulés par la Commission de vérité et réconciliation. L’appel à l’action 53 demande :

[...] au Parlement du Canada d’adopter, en consultation et en collaboration avec les peuples autochtones, des dispositions législatives visant à mettre sur pied un conseil national de réconciliation.

C’est le cœur du projet de loi C-29.

L’appel à l’action 54 de la Commission de vérité et réconciliation demande, de plus, au gouvernement du Canada de garantir ce qui suit :

[...] un financement pluriannuel [...] y compris la dotation d’une fiducie de la réconciliation nationale pour faire avancer le dossier de la réconciliation.

L’article 16.1 du projet de loi reprend les termes de l’appel à l’action 55, qui précise le contenu du rapport que le ministre responsable doit adresser au Conseil national de réconciliation.

Enfin, le paragraphe 17(3) du projet de loi reprend l’appel à l’action 56 sur la réponse que doit donner le premier ministre, au nom du gouvernement, sur la situation des peuples autochtones une fois que le Conseil national de réconciliation a produit son rapport annuel.

Le sixième paragraphe du préambule du projet de loi rappelle que le gouvernement s’est engagé à mener à bien la réconciliation avec les peuples autochtones. Selon la définition du dictionnaire, le terme « réconciliation » renvoie à la reprise de relations normales après un différend; remettre en accord, remettre en harmonie. Ce terme évoque explicitement une idée de rapprochement après une période de conflit.

La Commission de vérité et réconciliation du Canada constitue un mécanisme national de justice transitionnelle, même si elle n’a pas été présentée ainsi. Dans un document publié en mars 2021, l’Organisation internationale de la Francophonie situe la Commission de vérité et réconciliation du Canada parmi les processus de justice transitionnelle menés dans différents pays. Ces mécanismes découlent la plupart du temps de contextes politiques et juridiques particuliers : guerres civiles ou coloniales, politiques discriminatoires, litiges judiciaires, etc. Dans tous les cas, ils impliquent des violations grossières des droits de la personne et dépassent les limites des procédures judiciaires usuelles de prescription de recours, de moyens de preuve et autres. Des demandes de justice, de reconnaissance, de réparations sont à l’origine de mécanismes alternatifs visant à faire émerger la vérité des victimes, le respect de leur mémoire, lesquels peuvent éventuellement contribuer à renforcer la démocratie et la confiance des citoyens envers l’État.

Chers collègues, je suis d’avis, par ailleurs, que le Sénat doit porter un regard attentif sur certains aspects du projet de loi pour lesquels j’ai posé des questions auxquelles le gouvernement doit nous donner des réponses avant l’adoption du projet de loi. Certains concepts utilisés dans le projet de loi sont imprécis, non définis et prêtent à confusion, en plus d’introduire des incohérences entre la version anglaise et la version française. Il s’agit, à mon avis, de clarifier des éléments juridiques qui sont déterminants pour la suite des travaux de ce conseil. J’invite les sénatrices et les sénateurs qui étudieront le projet de loi C-29 au sein d’un comité à examiner entre autres les questions suivantes.

Premièrement, pourquoi le premier paragraphe du préambule utilise-t-il des termes différents dans les versions anglaise et française? Par exemple, dans la version anglaise on utilise le terme « their Indigenous lands », alors que dans la version française on dit plutôt « leur territoire » au singulier.

Deuxièmement, au deuxième paragraphe du préambule on dit que depuis l’arrivée des colons et la colonisation, les peuples autochtones ont subi une oppression. Or, ce sont les États successifs, dans l’histoire, y compris l’État canadien actuel, qui ont colonisé les Autochtones en appliquant des lois et des politiques qui visaient l’assimilation des Autochtones. La formulation devrait donc être rajustée en conséquence.

Troisièmement, pourquoi le quatrième paragraphe du préambule utilise-t-il l’expression « tous les peuples » quand on énonce à qui incombe la réconciliation? De quels peuples parle-t-on? D’où vient ce concept? Comment est-il défini? La formulation utilisée ici pose problème. Elle devrait être revue de sorte à préciser que la réconciliation incombe à l’État et qu’elle exige des efforts de tous et un engagement qui s’étend sur plusieurs générations.

Quatrièmement, pourquoi le paragraphe 2(1) inclut-il des gouvernements provinciaux dans la définition du terme « gouvernements »? Quelle autorité le Parlement fédéral a-t-il de légiférer pour inclure les gouvernements provinciaux dans ce projet de loi?

Cinquièmement, pourquoi le même paragraphe 2(1) ne mentionne-t-il pas les gouvernements des trois territoires, soit le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut, dans la définition du terme « gouvernements »?

Sixièmement, l’article 12 porte sur la composition du conseil d’administration — qui doit refléter une diversité de représentation. Qu’entend-on, dans cet article, par l’expression « des autres peuples au Canada »? Qui sont ces autres peuples qui devraient être représentés au conseil d’administration? C’est un concept qui n’existe pas. Si on entend ici les personnes qui ne sont pas des Autochtones, habituellement désignées comme étant non autochtones, on doit le dire clairement, d’autant plus qu’on utilise déjà le terme « non autochtone » à l’article 16 du projet de loi C-29. La réconciliation relève de la responsabilité de l’État, mais les membres de ce conseil sont, de toute évidence, des personnes qui vont siéger à ce conseil d’administration. Il est essentiel que dans cette voie de la réconciliation se rencontrent des personnes qui ne sont pas des Autochtones et des personnes qui sont des Autochtones, toutes ces personnes étant engagées dans l’entreprise commune de la réconciliation. Cela doit être dit clairement et ne doit pas être enfoui sous un concept qui n’a pas de fondement dans notre régime politique ni dans notre régime juridique.

Septièmement, quels organismes ont été consultés dans l’élaboration du projet de loi C-29? Nous avons entendu la semaine dernière le président de l’Inuit Tapiriit Kanatami dire publiquement que son organisation retirait son appui au projet de loi C-29. D’autres groupes ont déploré le fait de ne pas être représentés au conseil d’administration, y compris l’Alliance autochtone du Québec. J’ai demandé la liste des organismes consultés dans le cadre de l’élaboration de ce projet de loi. Il est important que le Sénat obtienne des réponses claires de la part du gouvernement pour être en mesure de constater qu’une véritable consultation a eu lieu.

Honorables sénatrices et sénateurs, j’invite les membres du comité qui étudiera le projet de loi à poser entre autres ces questions.

Quand j’ai accepté de remplir la fonction de témoin honoraire dans le cadre des travaux de la Commission de vérité et réconciliation, j’ai vécu l’expérience singulière d’entendre les récits traumatiques d’hommes et de femmes que j’ai côtoyés professionnellement pendant des années, et aussi de mesurer l’ampleur de la dévastation que ces personnes ont connue et l’énergie de survie et de résilience qui est la leur. Selon moi, l’engagement d’un témoin honoraire comporte deux volets principaux : premièrement, écouter et entendre, entre autres, la vérité des survivants des écoles, des pensionnats, devenus des aînés dans leur communauté ou des porte-parole d’anciens élèves décédés et la vérité de leurs descendants qui vivent des traumatismes intergénérationnels; deuxièmement, poursuivre la recherche et la diffusion de la vérité, notamment dans les médias, les institutions d’enseignement et au Sénat du Canada, et participer activement à la réconciliation avec ces survivants et leurs descendants une fois que les travaux de la commission seront terminés.

Chers collègues, je conclus mes propos en insistant sur la nécessité de déplier le récit historique officiel pour faire émerger les voix qui ont été étouffées ou annulées, celles qui n’ont pas été retenues à ce jour, pour que la complexité des mémoires respectives, souvent divergentes sinon contradictoires, puisse enfin être entendue. C’est un prérequis au rapprochement que sous-tend la réconciliation. Comme je l’ai déjà dit, la réconciliation avec les peuples autochtones doit dépasser les engagements individuels. Le projet de loi C-29 constitue une réponse institutionnelle déterminante en faveur de la réconciliation. À cette étape-ci, il nous appartient de faire en sorte que le Conseil national de la réconciliation voie le jour. Ce travail est le nôtre.

Merci.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

(1610)

Projet de loi sur les nouvelles en ligne

Première lecture

Son Honneur la Présidente intérimaire annonce qu’elle a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-18, Loi concernant les plateformes de communication en ligne rendant disponible du contenu de nouvelles aux personnes se trouvant au Canada, accompagné d’un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Gold, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la séance d’après-demain.)

Le Code criminel
La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés

Message des Communes

Son Honneur la Présidente intérimaire annonce qu’elle a reçu de la Chambre des communes le projet de loi S-223, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (trafic d’organes humains), accompagné d’un message informant le Sénat qu’elle a adopté ce projet de loi sans amendement.

[Traduction]

Projet de loi sur la protection des pensions

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L’honorable David M. Wells propose que le projet de loi C-228, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension, soit lu pour la deuxième fois.

 — Honorables sénateurs, je suis ravi d’intervenir aujourd’hui pour parrainer au Sénat le projet de loi C-228, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension.

Ce projet de loi, dont le titre abrégé est « Loi sur la protection des pensions », a été en préparation pendant longtemps. Il comporte trois éléments simples. Premièrement, le surintendant des institutions financières doit, chaque année, présenter un rapport au Parlement. Deuxièmement, les travailleurs ayant un régime de retraite à prestations déterminées doivent être payés en priorité en cas de faillite de l’entreprise. Enfin, les entreprises doivent être autorisées à financer les régimes de retraite déficitaires, sans pénalité financière.

La plupart d’entre vous se rappellent l’effondrement de Nortel en 2009. Le 14 janvier 2009, Nortel se plaçait sous la protection de la loi sur les faillites, laissant plus de 10 000 retraités face à la perspective de perdre soudainement leur pension. Une fois la poussière retombée, les retraités de Nortel ont obtenu environ la moitié de leur pension.

L’histoire s’est répétée en 2017 lorsque Sears Canada s’est placée sous la protection de la loi sur les faillites. Encore une fois, ce sont les pensionnés qui ont dû payer les pots cassés. Le régime à prestations déterminées de Sears Canada avait un manque à gagner d’un quart de milliard de dollars et, lors des procédures de faillite, les 16 000 anciens employés ont dû passer après les banques et les autres prêteurs pour toucher leur argent. Au final, leur pension a été amputée d’approximativement 30 %.

Chers collègues, on estime que plus de 100 000 Canadiens ont vu leur pension amputée lorsque des entreprises ont fait faillite. Si on remonte jusqu’en 1982, la Fédération canadienne des retraités indique que ce chiffre pourrait atteindre 250 000 personnes. Chers collègues, c’est inacceptable.

Lors des audiences du comité sur le projet de loi C-253, la version antérieure du présent projet de loi, tenues au cours de la dernière législature, Mme Laura Tamblyn Watts, de CanAge, a raconté l’histoire d’un couple qui a travaillé toute sa vie et qui a cotisé à un régime de pension à prestations déterminées. Après la faillite de Sears, ces personnes ont perdu leur sécurité financière. Elles ont demandé comment il était possible qu’elles aient travaillé toute leur vie et cotisé à leur régime et qu’elles soient maintenant confrontées à la pauvreté parce qu’elles seront les dernières à toucher leur argent.

Chers collègues, la réponse à cette question est simple : c’est possible parce que la loi le permet. Si une entreprise fait faillite aujourd’hui, les actifs sont actuellement divisés dans cet ordre : les premiers sont les fiducies réputées. Elles comprennent des choses comme les retenues à la source non versées liées au Régime de pensions du Canada ou au Régime de rentes du Québec, les impôts sur le bénéfice à payer et les cotisations à l’assurance-emploi. Il s’agit essentiellement de toutes les sommes qui sont présumées être détenues en fiducie au bénéfice de l’État. Essentiellement, chers collègues, c’est le gouvernement qui est payé en premier.

Une fois que le gouvernement est payé, c’est au tour des fournisseurs impayés. Ces derniers ont le droit de reprendre possession des biens impayés qui ont été livrés dans les 30 jours précédant la faillite. Sont ensuite payés ceux qui jouissent de ce qu’on appelle la « priorité absolue » sur les autres créanciers. Cela comprend la valeur des produits agricoles et d’aquaculture livrés dans les 15 jours précédant la faillite, la valeur des salaires et des allocations impayés jusqu’à concurrence de 2 000 $ par employé, les frais engagés par une administration publique pour décontaminer le terrain inclus dans les actifs du failli, et la valeur des cotisations déduites du salaire des employés ainsi que des cotisations de l’employeur à un régime de pension enregistré.

Chers collègues, ne vous méprenez pas. Ce dernier élément concernant les pensions comprend uniquement les cotisations de l’employé au régime de pension qui ont été déduites de son salaire, et non la somme que le régime lui-même lui doit. Cela ne représente qu’une fraction de la pension à laquelle l’employé a droit et équivaut, essentiellement, au total de ses cotisations.

Après les créanciers détenant la priorité absolue, on paie les créances garanties. Ensuite viennent les créances privilégiées. Puis, finalement, on traite le passif des régimes de retraite, calculé au prorata, ainsi que la valeur de toute autre créance non garantie. Autrement dit, le régime de pension auquel les employés ont cotisé peut-être toute leur vie passe en dernier. Cela doit changer. Chers collègues, c’est exactement ce que propose le projet de loi C-228.

Au cours des 10 dernières années, on a tenté à de nombreuses reprises de régler ce problème, d’abord avec le projet de loi C-501 en 2010. Il y a ensuite eu le projet de loi C-405 en 2018, les projets de loi C-253 et C-269 en 2020, le projet de loi C-225 en 2022 et, finalement, le projet de loi C-228, qui est à l’étude aujourd’hui. Ce sont tous des projets de loi d’initiative parlementaire qui ont par conséquent eu de la difficulté à franchir les étapes du processus à l’autre endroit.

Le projet de loi C-253 de la députée bloquiste Marilène Gill est celui qui s’est rendu le plus loin : il a été étudié lors de sept réunions du comité avant d’être renvoyé à la Chambre avec un amendement. Or, il n’a pas été plus loin en raison du déclenchement de l’élection générale, à l’été 2021.

Plutôt que d’essayer de réinventer la roue, la députée Marilyn Gladu, la marraine du projet de loi C-228, a repris les parties des projets de loi présentés dans le passé qui faisaient consensus et elle a retiré les éléments litigieux. Dans son discours à l’étape de la deuxième lecture, Mme Gladu a expressément mentionné qu’elle s’était grandement inspirée des projets de loi C-405 et C-253. Vous le savez sans doute, le projet de loi à l’étude a reçu un appui unanime à l’autre endroit mais, comme je l’ai dit ici à de nombreuses reprises, cela ne doit pas empêcher le Sénat de remplir son devoir.

L’objectif du projet de loi est en fait assez simple. Il s’agit de protéger les actifs des régimes de pension et d’assurer la solvabilité des régimes de pensions à prestations déterminées sur trois fronts.

Primo, le projet de loi C-228 modifie la Loi sur la faillite et l’insolvabilité et la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies pour garantir que, en cas de procédure de faillite, les réclamations relatives au passif non capitalisé ou au déficit de solvabilité des régimes de pension reçoivent la priorité absolue. Au lieu de toucher un paiement calculé au prorata de l’ensemble des créances ordinaires, les fonds de pension seront traités en priorité et protégés au même titre que les salaires et les cotisations au fonds de pension. Ces créances non garanties gagneront ainsi en priorité.

Secundo, l’article 6 du projet de loi modifie l’article 40 de la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension pour modifier les exigences relatives au rapport annuel. Actuellement, il faut un rapport annuel sur la solvabilité des fonds de pension, mais il est soumis au Bureau du surintendant des institutions financières.

(1620)

On ne sait pas trop à quelles mesures éventuelles la production ou la réception d’un tel rapport pourrait donner lieu.

Le projet de loi C-228 exigerait donc qu’un rapport annuel sur la solvabilité des fonds de pension soit déposé devant les deux chambres du Parlement, qui aurait ainsi la possibilité d’exercer une surveillance accrue. Le rapport déposé serait accessible au public à des fins de transparence et de sensibilisation.

Tertio, chers collègues, le projet de loi C-228 prévoit un mécanisme pour transférer des sommes à un fonds de pension sans pénalité fiscale afin d’en rétablir la solvabilité. Ensemble, ces trois modifications permettront de garantir aux Canadiens que leur pension et leur retraite ne seront plus menacées.

Lors des audiences du comité sur le projet de loi C-228 et sur sa version antérieure le projet de loi C-253, trois préoccupations ont été soulevées, et j’aimerais les aborder. La première, c’est que si le projet de loi est adopté, les employeurs offriront de moins en moins de régimes de pension à prestations déterminées. Or, chers collègues, c’est déjà le cas.

Au cours des 22 dernières années, le pourcentage de régimes à prestations déterminées est passé de 21,3 % en 2000 à 9,6 % aujourd’hui. Comme l’a souligné Brett Book, agent chargé des politiques à CanAge, dans son témoignage du 8 juin 2021 devant le Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes, les employeurs ne créent plus de régimes à prestations déterminées.

Il a déclaré :

En Ontario, le nombre de ces régimes a diminué de plus de 10 % entre 2017 et 2019, même après que le gouvernement de l’Ontario a fait passer de 100 à 85 % des obligations de financement pour en assurer la solvabilité.

La réduction des obligations de financement n’a aucunement encouragé plus d’entreprises à établir des régimes à prestations déterminées. Comme l’a dit M. Book : « Tout ce qui a changé, c’est qu’il y a moins — et non plus — de régimes à prestations déterminées, et les sociétés ont économisé des milliards de dollars. »

La deuxième préoccupation qui a été soulevée est l’affirmation selon laquelle les entreprises qui ont des régimes à prestations déterminées finiront par payer des taux d’intérêt plus élevés sur leurs emprunts, ce qui les rendra non concurrentielles et entraînera davantage de faillites. L’Association canadienne des gestionnaires de caisses de retraite et l’Association canadienne des professionnels de l’insolvabilité et de la réorganisation ont soulevé cette préoccupation au cours des audiences du comité sur ce projet de loi. Elles soutiennent que si on accorde la priorité aux retraités, les entreprises dont les fonds sont insolvables devront payer des taux d’intérêt plus élevés pour obtenir du crédit et seront moins susceptibles de faire des demandes de crédit. Cela pourrait à son tour accélérer le taux d’insolvabilité.

Chers collègues, le projet de loi donne aux entreprises quatre ans pour éliminer tout passif non capitalisé présent dans leurs régimes de retraite à prestations déterminées. Comme l’a souligné la marraine du projet de loi, la députée Marilyn Gladu :

[...] si une entreprise n’est pas en mesure de rétablir la solvabilité de son fonds après un délai de cinq ans, elle devrait effectivement payer un taux d’intérêt majoré pour obtenir du crédit, car elle présente réellement un risque plus élevé.

Selon le troisième argument, chers collègues, accorder la priorité absolue aux actifs des régimes de retraite complique la restructuration des entreprises insolvables voulant éviter la faillite. Bien franchement, comme l’a encore souligné M. Book dans son témoignage :

Ce n’est tout simplement pas le cas. Les entreprises ont la capacité financière de financer les régimes de pension, mais choisissent plutôt d’utiliser leur argent pour accorder des primes aux hauts dirigeants, payer des dividendes et racheter des actions. Comme la loi n’oblige pas les sociétés à protéger les régimes de pension, elles ne le font pas.

De plus, comme l’a souligné M. Michael Powell, président de la Fédération canadienne des retraités, cette même préoccupation a été soulevée en 2005 lors de l’adoption de la Loi sur le Programme de protection des salariés. Cette loi accordait la priorité absolue aux salaires impayés, aux dépenses impayées et à certaines autres choses. Monsieur Powell a noté à l’époque que l’Institut d’insolvabilité du Canada soulevait la même mise en garde, affirmant que le fait d’accorder la priorité absolue aux salaires pourrait avoir :

[...] de lourdes conséquences sur la productivité et l’emploi au Canada puisque les entreprises auront plus de difficulté à obtenir du financement, et leurs coûts pourraient augmenter considérablement.

Comme l’a mentionné M. Powell, cela ne s’est jamais produit. Il a souligné ce qui suit :

[...] personne n’a fourni de données indiquant que l’on puisse attribuer des effets négatifs au [Programme de protection des salariés]. S’il s’agissait d’une mesure aussi draconienne, s’il devait y avoir une catastrophe financière, nous devrions avoir des données. Ce sont des choses que les gens surveillent.

Chers collègues, on pourrait alors se demander pourquoi cette mesure législative ne comprend pas également une disposition de protection des indemnités de départ et de cessation d’emploi. C’est une question honnête et, en principe, sensée. Pourquoi protéger les salaires et les pensions, mais pas les indemnités de départ? Un tel amendement a bel et bien été proposé au comité, avec l’appui enthousiaste de la marraine du projet de loi, la députée Marilyn Gladu. Toutefois, cet amendement a été contesté et jugé irrecevable par le Président de l’autre endroit. Chers collègues, si nous l’incluons ici, il subira le même sort lorsque nous le renverrons.

J’ai hâte d’entendre les diverses opinions des parties prenantes au comité. Comme je l’ai dit, il est important que nous fassions preuve de diligence raisonnable. Il est essentiel que nous ne perdions pas de vue l’objectif de la mesure législative dont nous sommes saisis, qui consiste à trouver un moyen de protéger les pensions des travailleurs qui, après avoir travaillé et cotisé à un régime de retraite, apprennent que l’entreprise qui détient leur fonds de pension a fait faillite et qu’ils se retrouvent au bout de la file, derrière tous les autres créanciers et hauts dirigeants.

Comme Bill VanGorder, chef de l’exploitation de l’Association canadienne des individus retraités, l’a dit au comité :

La plupart des Canadiens âgés ont un revenu fixe, mais doivent faire face à la hausse des coûts, à l’inflation croissante, à une économie imprévisible et à une épargne-retraite qui en pâtit. La CARP estime qu’il est essentiel que le gouvernement fédéral protège les retraités en leur accordant un statut « prioritaire » [...]. Cette proposition contribuerait grandement à la réalisation de cet objectif.

Je suis d’accord avec M. VanGorder. Ce projet de loi apporte les changements requis pour améliorer considérablement la protection des régimes de pension des Canadiens qui ont travaillé fort toute leur vie et qui ont payé leurs cotisations.

Dans un article du Hill Times paru la semaine dernière, Michael Powell, de la Fédération canadienne des retraités, a résumé le problème comme suit :

En vertu de la loi actuelle sur l’insolvabilité, les banques se servent en premier. Quand les actifs d’une entreprise en faillite sont divisés entre les créanciers garantis, les banques sont les premières à toucher leur argent.

En fait, chers collègues, même s’il a dit que ce sont les banques qui sont les premières à toucher l’argent, en réalité, ce sont plutôt les pouvoirs publics. Il a ajouté :

Les retraités n’ont aucun droit ni statut en cas d’insolvabilité de leur employeur. En accordant la priorité absolue aux retraités, ceux-ci seraient en haut de la liste et auraient plus de chances de recevoir leur pleine pension.

L’adoption de ce projet de loi historique permettra enfin de protéger véritablement les pensions des retraités canadiens.

Chers collègues, j’ai très hâte d’examiner plus en détail ce projet de loi en comité. Je sollicite votre appui pour qu’il franchisse la prochaine étape.

Merci.

L’honorable Marty Deacon : Le sénateur accepte-t-il de répondre à une question?

Le sénateur Wells : Oui. Merci.

La sénatrice M. Deacon : Je vous remercie d’avoir de nouveau pris la parole sur ce sujet pour nous amener à y réfléchir.

Ma question concerne les éléments juridiques du libellé du projet de loi et les préoccupations relatives aux modifications apportées à l’article 40 de la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension. Comme vous l’avez dit, le projet de loi modifie la loi afin qu’elle contienne les passages suivants :

[...] le surintendant présente au ministre [...] un rapport relatif aux questions suivantes : [...]

b) la mesure dans laquelle les régimes de pension satisfont aux exigences de capitalisation, établies conformément à l’article 9, et les mesures correctives prises ou ordonnées pour remédier aux régimes de pension qui ne satisfont pas aux exigences de capitalisation.

Cet article donnera-t-il au surintendant le pouvoir d’obliger l’entreprise concernée à mettre en œuvre des mesures correctives, par exemple le gel des paiements de dividendes jusqu’à ce que le régime soit de nouveau solvable, ou reviendra-t-il à l’entreprise de décider si elle prend ou non les mesures en question?

Le sénateur Wells : Je vous remercie de votre question, sénatrice Deacon.

Le Bureau du surintendant des institutions financières est un organisme de réglementation fédéral indépendant. Évidemment, des lois sont édictées afin de permettre aux organismes de réglementation d’établir des règlements et ce sera dans ce cas-ci le rôle du surintendant.

Le surintendant des institutions financières est chargé de réglementer les institutions financières — les banques, les créanciers, etc. Les règles qui encadrent ces institutions sont les règlements. S’il y a violation de ces règlements — j’ai moi-même eu la chance d’être à la tête d’un organisme de réglementation fédéral, alors je comprends les rouages —, si une institution ne respecte pas les règlements, le surintendant peut lui imposer des sanctions. On peut donc dire que les institutions sont obligées de respecter les règlements ou qu’on peut les obliger à s’y conformer.

Dans bien des cas, comme il est question d’institutions financières, ces dernières connaîtront immédiatement les règlements et leurs obligations.

Peut-on les obliger à respecter les règlements? Oui, mais cette obligation découle de leur acceptation des règlements au moment d’obtenir leur permis.

L’honorable Lucie Moncion : Le sénateur accepte-t-il de répondre à une question?

Sénateur Wells, nous avons déjà parlé de cette question auparavant. Je veux connaître le nombre de personnes au Canada qui ont accès à un régime de pension à prestations déterminées et le nombre de ces régimes qui sont financés par le public et le nombre qui sont financés par le privé.

Le sénateur Wells : Merci beaucoup de votre question. Je sais que, à l’heure actuelle, les régimes à prestations déterminées représentent environ 350 milliards de dollars. Je ne sais pas combien de personnes sont concernées, mais ces 350 milliards de dollars représentent un montant élevé, évidemment. Les entreprises qui font faillite chaque année se comptent par centaines. Récemment, le nombre était de quelques centaines, mais il y a 10 ans, il s’approchait du millier. Je déteste dire que le nombre est faible, mais c’est bel et bien le cas.

(1630)

Encore une fois, j’ignore combien de gens sont bénéficiaires d’un régime à prestations déterminées financé par l’État et combien ont un tel régime financé par le privé, mais c’est une question que nous pourrions explorer en comité.

La sénatrice Moncion : Je voudrais simplement ajouter quelque chose à la dernière observation que vous avez faite. Il s’agit d’une information qui serait précieuse pour les membres du comité, afin que nous puissions mieux comprendre combien de personnes bénéficient d’avantages en or et combien ne sont peut-être pas aussi bien protégées. Le fait de disposer de ces chiffres facilite souvent la prise de décision à la fin du processus, lorsque le projet de loi nous revient, n’est-ce pas?

Le sénateur Wells : Évidemment, les régimes à prestations déterminées sont de moins en moins nombreux de nos jours — je pense même que c’est moins de 10 %. Mais vous avez raison. Nous devons connaître la portée de cette mesure. Cependant, chers collègues, il est également important de ne pas oublier le principe du projet de loi, qui est de protéger ceux qui sont au dernier rang parmi les créanciers et qui ont cotisé à régime de pension. En fait, lorsque vous êtes embauché par une entreprise et que vous versez des cotisations de ce genre, il s’agit essentiellement d’un contrat. Il s’agit d’une entente — c’est l’un des avantages, comme votre salaire ou vos heures — lorsque vous vous engagez à travailler dans une entreprise. C’est ce contrat que ce projet de loi vise à protéger.

[Français]

L’honorable Pierre J. Dalphond : Le sénateur Wells accepterait-il de répondre à une autre question?

Le sénateur Wells : Oui.

[Traduction]

Le sénateur Dalphond : J’ai deux questions. La première concerne la Loi sur les normes de prestation de pension, comme la question qu’a posée la sénatrice Marty Deacon. La loi s’applique seulement aux régimes de pension dans les secteurs de compétence fédérale. Elle ne s’applique pas à la plupart des régimes de pension réglementés par les provinces. Ai-je raison ou ai-je tort?

Le sénateur Wells : Vous avez tort. Je n’aime pas le répéter, mais vous avez tort. Elle s’appliquerait aux secteurs fédéraux et provinciaux.

Le sénateur Dalphond : Voulez-vous dire que les modifications à la Loi sur les normes de prestation de pension s’appliqueront aux régimes de pension dans les secteurs de compétence provinciale?

Le sénateur Wells : Les régimes de pension seraient considérés comme des institutions financières, donc seraient de compétence fédérale.

Le sénateur Dalphond : Je suppose que c’est un aspect sur lequel le comité se penchera, car les fonds de pension provinciaux sont réglementés par des autorités provinciales et non par le Bureau du surintendant à Ottawa. C’est même une question constitutionnelle.

Mon autre question a trait à la portée de ce projet de loi. Je comprends et appuie certainement l’objectif du projet de loi, qui vise à protéger les retraités. Ils ont travaillé pendant de nombreuses années, et ils ont planifié leur retraite en fonction des prestations de retraite qu’ils s’attendaient à recevoir. Si l’entreprise pour laquelle ils travaillaient devait subir une réorganisation, alors il se pourrait que leurs prestations soient réduites. Vous avez parlé de Sears et de Nortel. Algoma Steel est une autre entreprise qui est passée par ce processus, mais qui n’a pas pu réorganiser son régime de pension de manière à pouvoir rétablir les prestations de retraite.

Si j’ai bien compris, vous avez dit que ces nouvelles dispositions ne s’appliqueraient qu’aux régimes de retraite à prestations déterminées, et que les personnes qui ont droit à des prestations de ce genre représentent maintenant moins de 10 % des retraités au Canada. Je crois aussi comprendre que, s’il est adopté, ce projet de loi n’entrera pas en vigueur immédiatement, mais plutôt dans quatre ans, conformément à un amendement qui a été adopté à la Chambre des communes, et ce, afin de prévoir une période de transition pour les employeurs qui doivent verser les prestations de retraite. Au bout du compte, croyez-vous que le nombre de personnes qui bénéficieront de ce projet de loi représentera encore moins que 10 % des retraités?

Le sénateur Wells : Il pourrait très bien être inférieur à 10 %. Je pense qu’il est important de souligner que les régimes de pension à prestations déterminées sont actuellement financés à environ 109 %. Cela ne veut pas dire que tous les régimes de pension sont surfinancés, car ce n’est pas le cas. Certains sont manifestement en dessous de ce niveau. Avec le temps, vous avez raison, cela va diminuer.

L’idée de ces quatre années est de permettre à ceux qui doivent s’assurer que leurs fonds de pension sont financés de se mettre à niveau. Cette période de quatre ans doit permettre d’éviter qu’une entreprise subisse des effets néfastes si elle doit puiser dans une source quelconque, comme ses revenus ou ses avoirs, pour compléter ses régimes. C’est ce que permet cette période de quatre ans et, bien sûr, le projet de loi vise en grande partie à permettre aux entreprises de faire cela sans subir de sanction pécuniaire néfaste si elles placent des actifs vendus ou liquidés ou d’autres revenus dans un régime. Cela leur permettrait essentiellement de le faire sans pénalité fiscale.

Le sénateur Dalphond : Pour conclure sur la dernière question, je comprends que pendant cette période, ce projet de loi n’empêchera pas un employeur, avec le consentement du syndicat, de passer d’un régime de pension à prestations déterminées à un régime à cotisations déterminées sans prestations déterminées.

Le sénateur Wells : Le projet de loi est muet à ce sujet. La décision reviendrait à l’entreprise et aux fiduciaires du fonds de pension, qu’il s’agisse du syndicat, de l’association des employés ou tout simplement d’une entente avec tous les employés.

L’honorable Brent Cotter : Le sénateur Wells accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Wells : Bien sûr.

Le sénateur Cotter : Pour mettre les choses en contexte — et je pense que le sénateur Wells sait où je veux en venir —, vous avez parlé du fait que les employés obtiennent un degré modeste de super-priorité pour les salaires impayés et que le Programme de protection des salariés comble en partie cet écart. Les données de ce programme indiquent toutefois qu’un manque à gagner considérable demeure pour les employés. En effet, le programme lui-même reconnaît que son taux de recouvrement — par subrogation, pour les travailleurs — s’établit à environ 2 ou 3 %.

Je comprends le dilemme que vous avez décrit à propos de l’autre endroit. Toutefois, lorsqu’on pense aux travailleurs et que l’on compare la possibilité de perdre une partie d’une pension qu’ils toucheront dans 20 ans avec la possibilité d’un manque à gagner pour le mois précédent ou le mois d’avant qui les oblige à payer le loyer avec des cartes de crédit, il me semble qu’une super-priorité est une mesure intéressante pour les portions de salaire qu’ils n’ont pas pu recevoir. Je me demande si vous pensez qu’il serait approprié d’examiner cette question dans le cadre de cet exercice.

Le sénateur Wells : C’est un excellent point, sénateur Cotter, et nous en avons parlé ensemble. J’ai lu les comptes rendus de l’autre endroit où ce sujet a été abordé. Cette mesure n’a pas été supprimée parce que c’était une mauvaise idée. Je pense que c’est une excellente idée. Je conviens que les indemnités de départ et les salaires impayés pourraient même être plus importants — ils le sont certainement tout autant.

Je pense que nous devrions approfondir cette question en comité. S’il y a un amendement à apporter, nous en parlerons à ce moment-là. S’il y a des aspects problématiques qui pourraient suggérer que le projet de loi ne serait pas adopté à l’autre endroit, alors nous devrons y remédier. En principe, je pense que c’est une excellente idée. Si ce projet de loi permet de la concrétiser, c’est formidable. Si ce n’est pas le cas, alors cette assemblée devrait peut-être chercher à le faire.

L’honorable Hassan Yussuff : Honorables sénateurs, je me trouve à un moment très intéressant de ma vie. Je suis le porte‑parole d’un projet de loi que je suis en mesure de défendre, alors je vais faire de mon mieux pour vous expliquer pourquoi ce projet de loi dont nous sommes saisis est digne de notre considération et de notre appui.

Je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-228, Loi sur la protection des pensions. Bien que ce projet de loi traite d’un sujet complexe, déroutant et souvent difficile à décrire — la législation sur la faillite —, il porte fondamentalement sur une mesure que tous les députés peuvent facilement comprendre et à laquelle ils seront favorables, non seulement pour eux-mêmes, mais aussi pour leurs enfants et petits-enfants qui prendront un jour leur retraite.

(1640)

C’est simple : les gens veulent et méritent une retraite dans le respect et la dignité. Voilà l’objet de ce projet de loi. Il veille à ce que, lors d’une faillite, la dignité et le respect des personnes ne soient pas relégués à l’arrière-plan quand leur régime de pension n’est pas pleinement capitalisé, mais qu’ils soient plutôt placés au premier plan.

Honorables sénateurs, nous avons tous entendu les histoires bouleversantes des retraités qui ont travaillé toute leur vie pour des entreprises comme Nortel, Sears Canada et White Birch, des gens auxquels on avait promis qu’ils jouiraient d’une sécurité financière à leur retraite, uniquement pour voir ce sentiment de sécurité être remplacé par de la crainte, de l’anxiété et de l’incertitude quand leur entreprise a été acculée à la faillite et qu’ils ont découvert que leur régime de pension n’était pas pleinement capitalisé.

Depuis 1982, plus de 250 000 aînés ont perdu leur pension quand leur entreprise a sous-financé leur régime de retraite, puis fait faillite. Les lois sur la faillite actuellement en vigueur ont relégué tous ces retraités à l’arrière-plan quand leur entreprise a fait faillite. Le projet de loi C-228 changera le statu quo et accordera la priorité aux travailleurs et aux retraités lors de la faillite d’une entreprise.

Chers collègues, je veux parler aujourd’hui de la raison pour laquelle nous devrions appuyer ce projet de loi. C’est pour veiller à ce que les retraités puissent vivre dans la dignité et le respect, comme ils le méritent.

Honorables sénateurs, permettez-moi de commencer par mettre en contexte le projet de loi. Le projet de loi C-228 porte sur les régimes de pension d’employeur, en particulier les régimes à prestations déterminées. Selon nos données, environ 1,2 million de Canadiens cotisent actuellement à des régimes à prestations déterminées du secteur privé et on estime que 2,8 millions de retraités touchent des prestations de ces régimes.

Les régimes de pension d’employeur font partie du processus de négociation collective et de l’entente entre les employés et les employeurs. Ils sont négociés et acceptés de la même manière que les salaires. Les travailleurs acceptent souvent des augmentations de salaire plus faibles, car ils préfèrent que l’argent soit versé dans le régime de pension pour jouir d’une plus grande sécurité financière au moment de la retraite.

Qu’est-ce que cela signifie? En gros, les pensions sont des salaires différés : au lieu d’être versé immédiatement, cet argent est gagné pendant les années de vie active et versé à la retraite. À la base, un régime de pension d’employeur est une promesse — une promesse faite entre l’employeur et ses employés. Les employés s’engagent à travailler aujourd’hui pour aider l’entreprise à prospérer et à se développer afin de jouir d’une sécurité financière le jour où ils prendront leur retraite. En échange, l’employeur promet de capitaliser entièrement le régime de pension. C’est ce que l’on attend de chaque partie, ni plus ni moins.

Honorables sénateurs, je tiens à être clair : les prestations des régimes de pension des employés sont négociées et méritées. Il ne s’agit pas d’une aumône. Les employés négocient et acceptent qu’une partie de leur salaire soit reportée afin de jouir d’une plus grande sécurité financière au moment de la retraite, c’est-à-dire d’une retraite dans la dignité. Voilà l’entente.

Pour les retraités, la faillite de leur ancien employeur peut avoir des conséquences désastreuses si le fonds de pension est sous‑capitalisé, et ce, non pas durant un mois ou un an, mais durant le reste de leur vie, comme nous l’avons vu à la suite de certaines faillites. Cela signifie que leur revenu fixe est réduit. Il leur sera donc plus difficile de subvenir à leurs besoins essentiels. Des retraités ont dû vendre leur maison ou leur voiture, ou ont dû choisir entre faire des courses, mettre de l’huile dans la fournaise, prendre des médicaments ou même reprendre le travail à un âge très avancé, malgré le fait qu’ils avaient planifié leur retraite.

Alors, que feront les modifications proposées dans le projet de loi C-228 pour aider à protéger les revenus de retraite des personnes retraitées? Ce projet de loi accordera la priorité absolue aux régimes de pension offerts par les employeurs en cas de faillite et d’insolvabilité. Ainsi, en cas de faillite ou de restructuration en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, les déficits des régimes de retraite passeront en premier, avant les créanciers garantis, au moment de la distribution des fonds.

Le but du projet de loi est de protéger les pensions des retraités des entreprises qui se retrouvent en situation d’insolvabilité, comme General Chemical, Eaton’s et Co-op Atlantic. Dans ces cas, il ne restait pas assez d’argent dans le fonds de pension pour couvrir toutes les obligations, et comme les régimes de pension sont des créances non garanties en vertu des lois sur la faillite actuelles, les retraités devaient subir une réduction très douloureuse de leur revenu de retraite.

Les détracteurs du projet de loi disent qu’accorder la priorité absolue aux retraités au détriment des créanciers garantis comme les banques aura un effet négatif sur les prêts soit en empêchant les entreprises d’obtenir des prêts, soit en augmentant les intérêts.

La vérité, c’est que chaque jour, les créanciers garantis prennent des décisions d’investissement éclairées et ajustent les modalités des prêts en fonction du risque de l’investissement. C’est ce que font les banques. Ce sont des prêteurs avisés qui peuvent facilement évaluer les risques, même lorsqu’ils sont difficiles à définir ou à mesurer.

Les travailleurs et les retraités, eux, n’ont pas la même occasion ou la même capacité de diversifier les risques et les placements de leur régime de pension. Les régimes de retraite constituent souvent leurs seules économies et ils n’ont aucun contrôle sur les placements. Ils n’ont pas d’autre choix que d’avoir confiance que leur employeur tiendra sa promesse de garder leur régime de retraite entièrement capitalisé. L’avenir de leur retraite dépend de cette confiance.

Malheureusement, pour beaucoup trop de travailleurs, cette confiance a été trahie. Pour les travailleurs et les retraités, le projet de loi C-228 est une assurance contre les employeurs qui brisent ce lien de confiance et qui détruisent la sécurité de leur retraite.

Voici un autre fait au sujet des priorités absolues en droit de la faillite. La Loi sur la faillite et l’insolvabilité comporte déjà des priorités qui se classent avant les créances garanties et non garanties, dont l’impôt dû, les cotisations au Régime de pensions du Canada et à l’assurance-emploi, les biens récemment livrés et jusqu’à concurrence de 2 000 $ de salaire.

Les banques et les autres prêteurs garantis doivent déjà tenir compte de ces super‑priorités au moment d’évaluer les risques et de décider s’ils vont accorder un prêt à une entreprise. Je suis convaincu qu’ils ont l’expertise et les connaissances spécialisées nécessaires pour tenir compte d’une super‑priorité à l’égard de retraités.

Cependant, je sais que c’est un changement de taille qui touche des lois complexes. C’est pourquoi le fait d’accorder une période de transition de quatre ans après l’adoption du projet de loi est un compromis acceptable permettant aux banques et au secteur des investissements de retraite de s’adapter.

Par ailleurs, le projet de loi exige qu’un rapport annuel concernant la solvabilité des régimes de pension sous réglementation fédérale soit présenté à la Chambre des communes pour assurer plus de transparence en ce qui concerne la viabilité des régimes de pension sous réglementation fédérale, car, en ce qui concerne les régimes provinciaux, ce sont les gouvernements des provinces qui ont ce pouvoir.

Honorables collègues, plus de 250 000 retraités ont vu leurs plans de retraite complètement chamboulés dans les 40 dernières années. J’aimerais vous poser une question simple. Peut-on accepter qu’une personne qui a travaillé fort toute sa vie peine à joindre les deux bouts pendant sa retraite? Ce projet de loi vise à ce qu’on puisse répondre non à cette question.

Les détracteurs des modifications aux lois sur la faillite qui sont proposées dans le projet de loi parlent souvent du risque de conséquences imprévues. Je veux donc prendre quelques minutes pour en parler — non pas des conséquences imprévues non démontrées de l’adoption du projet de loi C-228, mais des conséquences imprévues bien réelles des lois actuelles sur la faillite. Nous continuerons de voir ces conséquences si nous n’adoptons pas le projet de loi C-228. En effet, à cause du statu quo, quelque 250 000 retraités ont été pris au dépourvu, au cours des 40 dernières années, quand leur ancien employeur a fait faillite et que la résorption du déficit de leur régime de pension s’est retrouvée en queue de peloton. Cela a eu des conséquences dévastatrices sur ces personnes.

Je sais que les anciens employés de Sears, d’Eaton, de Caterpillar et de Coop Atlantique ont vraiment subi les conséquences imprévues de nos lois actuelles sur la faillite et qu’ils vivront avec ces conséquences durant le reste de leur existence.

Imaginez avoir travaillé pour une entreprise pendant plus de 27 ans, uniquement pour apprendre que vous avez perdu votre emploi et que vous n’obtiendrez pas votre pleine pension, même si vous avez versé des cotisations durant toute votre vie professionnelle. Est-ce juste?

C’était la réalité à laquelle a été confrontée Gail Paul, qui a 62 ans et habite à Corner Brook, à Terre-Neuve, ainsi que plus de 17 000 employés de Sears partout au Canada qui étaient près de la retraite ou qui l’avait déjà prise, et qui ont perdu près de 20 % de leurs revenus de pension pour le reste de leur vie. C’est à cela qu’ils ont eu à faire face lorsque l’entreprise a fait faillite parce qu’ils étaient des créanciers non garantis et les actifs de leur entreprise en faillite n’allaient pas servir à financer leur régime de pension parce qu’ils ne représentaient pas une priorité pour les gouvernements précédents et les législateurs fédéraux.

(1650)

Honorables sénateurs, les retraités d’entreprises dont les régimes de retraite ont été réduits ou éliminés, comme ceux de Wabush Mines, Timminco et Smoky River Coal, sont de vraies personnes. Vous les connaissez; ce sont des amis, des voisins, peut-être même des membres de votre famille. Ils ont été placés dans une situation très difficile à cause des lois sur la faillite qui sont actuellement en vigueur au Canada.

Je vous invite à écouter leurs récits, car ils peuvent nous en apprendre beaucoup sur les conséquences non souhaitées qui se produiront si ce projet de loi n’est pas adopté. Si le projet de loi C-228 avait été adopté plus tôt, bon nombre de ces retraités auraient pu vivre une retraite digne et respectueuse. Voilà ce qui devient possible grâce à ce projet de loi.

Chers collègues, avant de conclure, je tiens à saluer les activistes et les militants qui travaillent sans relâche depuis deux décennies pour que les changements proposés dans le projet de loi C-228 deviennent réalité. L’un d’entre eux se trouve devant vous aujourd’hui. Je pense, tout d’abord, aux parlementaires qui ont commencé à proposer des projets de loi d’initiative parlementaire et des projets de loi publics il y a une quinzaine d’années. Ils ont ouvert la voie qui a mené jusqu’à la députée Marilyn Gladu, laquelle a collaboré avec tous les partis à l’autre endroit et a ainsi fait adopter cette mesure à l’unanimité à l’autre endroit le mois dernier.

Je tiens également à reconnaître le travail des groupes syndicaux, comme le Syndicat des Métallos, Unifor et le Congrès du travail du Canada, qui se sont battus pour que ce jour arrive, non seulement pour leurs retraités, mais aussi pour leurs adhérents, qui comptent un jour toucher leur pension à la retraite.

Enfin, je tiens à rendre hommage aux groupes de défense des pensions qui étaient présents hier. Ils n’ont jamais renoncé à lutter pour l’équité et la justice. Ces groupes se sont battus non seulement pour leurs propres prestations — qu’ils n’obtiendront pas avec l’adoption du projet de loi —, mais ils se battent aussi pour les prestations de la prochaine génération de retraités. Je parle de groupes tels que CanAge; l’Association canadienne des retraités; la Fédération canadienne des retraités; le Réseau canadien pour la prévention du mauvais traitement des aînés; le Réseau FADOQ; l’Association des syndicalistes à la retraite du Canada; et la Fédération nationale des retraités. Je les remercie pour leur travail acharné et leur détermination inébranlable à changer les lois qui les placent, eux et leurs familles, en queue de peloton.

En conclusion, chers collègues, je veux que vous réfléchissiez à l’injustice des lois actuelles sur la faillite, qui ont causé tant de douleur à des personnes qui voulaient seulement prendre leur retraite dans la dignité et le respect. Ces hommes et ces femmes ont travaillé toute leur vie dans l’attente d’une retraite qui leur avait été promise grâce au régime de retraite de leur employeur.

J’aimerais que vous réfléchissiez tous à ce qui arriverait si, au moment de la retraite, après avoir travaillé toute votre vie, vos proches et vous ne pouviez plus compter sur un revenu de retraite garanti, si vous appreniez que l’entreprise pour laquelle vous travailliez a fait faillite, et si vos prestations de retraite étaient réduites de 20 % ou davantage parce que le régime de pension de l’entreprise était sous-capitalisé et déficitaire. Votre fonds de pension serait parmi les derniers facteurs considérés dans le cadre des procédures de faillite.

C’est ainsi que les choses se déroulent actuellement à cause du cadre législatif en vigueur en ce qui a trait aux faillites. Ce cadre n’est pas conçu pour protéger les intérêts des retraités lorsqu’une entreprise fait faillite ou doit se réorganiser. Les employés s’attendent à ce que les entreprises remplissent leur engagement de leur fournir un revenu de retraite garanti une fois à la retraite. Le régime de pension fait partie des conditions d’emploi auxquelles contribuent à la fois l’employeur et les employés. Un employeur qui ne s’assure pas de capitaliser suffisamment son régime de pension est tout aussi fautif qu’un employeur qui ne paie pas le salaire convenu à ses employés.

Sénateurs, nous trouverions inacceptable de permettre à un employeur de ne pas payer à ses employés le salaire qu’ils ont gagné et qui leur est dû. Permettre aux entreprises de ne pas payer les salaires différés devrait être tout aussi inacceptable. Les détracteurs de ce projet de loi parleront du risque de conséquences imprévues. Je vous rappelle que les conséquences imprévues des lois actuelles sont déjà trop bien connues des pensionnés, dont la dignité et le respect passent en dernier depuis beaucoup trop longtemps.

Chers collègues, une vie de travail ne devrait pas laisser une personne dans l’insécurité et la pauvreté à la retraite en raison d’une loi injuste dans ce grand pays qui est le nôtre. Ce projet de loi peut changer cela. Je vous exhorte à l’appuyer pour le renvoyer au comité, où nous entendrons des témoins. L’important, c’est qu’il reviendra au Sénat pour un vote final. J’espère que, après des décennies d’histoire, nous pouvons enfin rédiger la loi comme elle était censée l’être, de sorte que les travailleurs puissent jouir de la dignité et que les entreprises puissent demeurer prospères et continuer de contribuer à notre grand pays. Merci beaucoup.

Des voix : Bravo!

L’honorable Percy E. Downe : Honorables sénateurs, en écoutant le dernier intervenant, j’ai réalisé que nous nous approchons d’un conflit d’intérêts puisque, si le gouvernement du Canada fait faillite, notre régime de pensions sera protégé par cette disposition.

Chers collègues, nous avons tous eu connaissance de ce genre de cas : une entreprise fait faillite, les créanciers font la file et les travailleurs et les retraités de l’entreprise passent en dernier. Une fois que les créanciers se sont servis, les travailleurs et les retraités obtiennent ce qui reste. S’il ne reste pas assez pour financer le régime de pension et la couverture collective des soins de santé, eh bien, tant pis.

Nous nous souvenons tous de l’affaire Nortel. À son sommet, l’entreprise avait presque 95 000 employés — 25 000 uniquement au Canada —, mais tout s’est écroulé en 2013. Peu importe les causes de l’effondrement de Nortel — la mauvaise gestion menée par les cadres supérieurs ou le piratage de ses secrets industriels en vue de leur revente par le gouvernement chinois —, l’impact de sa faillite nous sert dans l’étude du projet de loi dont nous débattons.

Chers collègues, des projets de loi similaires ont été présentés dans le passé. Pendant la préparation de mon discours, j’ai relu la correspondance que j’avais reçue dans le cadre de l’étude d’un de ces projets de loi de la part d’ex-employés de Nortel qui éprouvaient des difficultés financières, ou étaient près de la faillite, dans la foulée de l’effondrement de l’entreprise. Ils me parlaient de travailleurs qui ne pouvaient plus travailler à cause d’une invalidité. Des membres de leur famille m’avaient écrit ceci :

Il se considérait très chanceux d’avoir travaillé pour une entreprise comme Nortel, qui offrait un merveilleux régime de pension. Imaginez l’état dans lequel il s’est retrouvé lorsqu’on lui a dit que ce régime n’existait plus.

Bien que des mots comme « cauchemar », « désespoir », « choc », « horreur » et « ruine financière » revenaient souvent, il ressortait de leur propos un sentiment commun : la colère. La colère de voir les cadres supérieurs encaisser des indemnités de départ alors que les employés et les retraités devaient passer en dernier, se retrouvant ainsi abandonnés à leur sort.

Cela s’est reproduit avec Sears. L’entreprise a fait faillite. Il s’est avéré que le fonds de pension avait été largement sous-financé, et ce, malgré le fait qu’entre 2005 et 2013, Sears Canada a versé environ 3 milliards de dollars en dividendes à ses actionnaires. Les employés et les retraités se sont retrouvé le bec dans l’eau. En fait, l’histoire de Sears est encore plus révoltante. Alors que le sort de Nortel peut être attribué aux forces du marché, la faillite de Sears Canada est attribuable à d’autres facteurs.

J’ai mentionné le versement de 3 milliards de dollars en dividendes à compter de 2005. Cette année-là, la société mère américaine de l’entreprise a été achetée par un gestionnaire de fonds spéculatifs milliardaire. À la lumière des événements qui ont suivi, on peut présumer que la « direction » de Sears Canada n’avait pas vraiment comme mandat de faire croître l’entreprise, mais plutôt de la liquider. Des magasins phares dans de grandes villes, la division des services financiers, qui était rentable à l’époque, et d’autres biens ont été vendus, ce qui a permis de verser des dividendes aux actionnaires beaucoup plus élevés que ceux des autres entreprises pour la même période.

Pourtant, pendant tout ce temps, le fonds de pension de Sears Canada présentait un manque à gagner de centaines de millions de dollars, une situation qui s’est poursuivie malgré les nombreux avertissements des employés et des pensionnés de l’entreprise. Lorsque la fin est finalement arrivée, lorsqu’il n’y avait plus aucun bien à vendre, l’entreprise a déclaré faillite en 2017. Encore une fois, les pensionnés ont dû passer après tous les créanciers.

Ainsi, la personne qui vendait des sofas ou des réfrigérateurs au magasin Sears à Charlottetown a presque tout perdu, mais le gestionnaire de fonds spéculatifs a pu s’acheter un yacht de 300 pieds. Je ne lui reproche pas d’avoir un tel yacht; ce que je trouve déplorable, c’est que ce sont les pensions et les avantages sociaux qu’ont perdus les pensionnés qui lui ont permis de l’acheter.

Honorables sénateurs, comme il a été affirmé à maintes reprises pendant l’étude de ce projet de loi à la Chambre, les pensions ne sont pas des cadeaux dépendant du bon vouloir des employeurs. Il s’agit d’un revenu différé que les employés toucheront une fois à la retraite.

(1700)

Le projet de loi à l’étude, comme ceux qui l’ont précédé, vise à reconnaître leur contribution de façon tangible en veillant à ce que si une entreprise fait faillite, les gens qui ont travaillé à la bâtir aient davantage droit aux actifs qui restent que les entités qui profiteraient de la disparition de l’entreprise.

Honorables sénateurs, ce projet de loi a été adopté à la Chambre des communes par 318 voix contre 0. Après avoir refusé d’agir pendant des années, les députés ont soudainement déployé beaucoup d’énergie et se sont activés de façon presque maniaque. Tout cela mérite un second examen objectif de la part du Sénat. J’ajouterai que, selon moi, ce projet de loi s’est longtemps fait attendre et que le comité sénatorial trouvera peut-être des façons de l’améliorer et de corriger toute erreur ou omission.

Je ne me réjouis pas à la perspective de l’adoption de ce projet de loi. Le Parlement devrait avoir honte du nombre d’années qu’il lui a fallu avant de faire le nécessaire. L’adoption possible de cette mesure serait teintée de tristesse, parce que beaucoup de travailleurs et leur famille ont énormément souffert avant que le Parlement se décide enfin à agir.

Je vous remercie, chers collègues.

L’honorable Mary Coyle : Honorables sénateurs, alors que nous nous réunissons aujourd’hui au Sénat du Canada sur les terres non cédées du peuple algonquin anishinabe, nous sommes saisis d’un projet de loi à l’étape de la deuxième lecture, le projet de loi C-228, qui porte essentiellement sur l’équité, la justice et la reddition de comptes pour les travailleurs canadiens, leurs familles et leurs collectivités.

C’est un projet de loi qui vise à assurer la sécurité du revenu et la sécurité financière d’un grand nombre d’aînés canadiens. Il touche à la surveillance parlementaire et à la prévention de l’érosion et de la vulnérabilité des pensions au Canada. Il concerne mes amis et mes voisins, ainsi que les vôtres, et, malheureusement, il arrive trop tard pour mes amis Anne et Peter.

Je n’ai pas l’intention de parler longtemps; je vais plutôt nous encourager à renvoyer ce projet de loi, qui a l’objectif important de protéger les pensions, au comité pour une étude approfondie et réfléchie.

Bien que certains collègues de l’autre endroit aient initialement demandé d’accélérer l’étude du projet de loi et de le faire passer rapidement à l’étape de la sanction royale, j’exhorte le comité sénatorial qui étudiera le projet de loi à le faire avec beaucoup de soin et d’attention, car la dernière chose que nous voulons, c’est engendrer des conséquences négatives imprévues pour les personnes qui cotisent à des régimes de pension à prestations déterminées ou les personnes qui dépendent des paiements qu’elles tirent de ces régimes.

De plus, comme l’a dit le sénateur Yussuff, nous ne voudrions pas voir les conséquences qu’aurait le fait de ne pas trouver un moyen de protéger nos retraités.

Chers collègues, il a été question de projets de loi précédents qui découlaient d’intentions similaires — les projets de loi C-253, C-405, C-259 et C-225 —, et nous avons été informés que la marraine de ce projet de loi d’intérêt public des Communes, la députée de Sarnia—Lambton, Marilyn Gladu, souhaite que celui-ci atteigne trois objectifs. Les deux premiers visent à assurer la solvabilité des régimes de pension à prestations déterminées et le troisième, qui porte sur l’équité, à donner la priorité aux travailleurs et aux pensionnés en cas de faillite de l’employeur.

Comme on a pu l’entendre, le projet de loi exigerait qu’un rapport annuel sur la solvabilité des fonds de pension soit déposé à la Chambre des communes afin d’accroître la transparence et de favoriser la surveillance. Il mettrait en place un mécanisme permettant de transférer des fonds dans un régime de pension afin d’en rétablir la solvabilité ou d’en assurer la partie insolvable jusqu’à ce que la solvabilité soit rétablie. Troisièmement, en cas de faillite, les pensions seraient versées avant que les gros créanciers ne soient remboursés et que les primes des dirigeants ne soient versées.

De par leur nature, ces trois grands volets nécessitent de modifier la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et la Loi sur la faillite et l’insolvabilité.

Honorables sénateurs, nos collègues les sénateurs Wells, Yussuff et Downe nous ont parlé des nombreux retraités ruinés notamment par Nortel, Sears et Coop Atlantic, dont la rancœur est justifiée. Lors des débats à l’autre endroit, on a également cité Eaton, Cliffs Natural Resources et General Chemical.

J’ai mentionné plus tôt que, malheureusement, ce projet de loi arrive trop tard pour mes amis Anne et Peter. Mon amie Anne et moi nous ressemblons beaucoup à certains égards. Nous sommes toutes les deux nées en 1954; nous venons toutes les deux d’une famille de sept enfants; nous avons toutes les deux des enfants et des petits-enfants que nous chérissons; nous vivons toutes les deux à Antigonish, en Nouvelle-Écosse; et nous avons été les deux premières femmes à occuper la vice-présidence de l’Université St. Francis Xavier. Nous avons mené de belles carrières, en grande partie dans le secteur à but non lucratif, où les régimes de pension à prestations déterminées étaient inexistants.

Contrairement à la mienne, la carrière professionnelle d’Anne a été écourtée par de graves problèmes de santé et des accidents. Bien qu’elle demeure aussi active et productive que possible, s’adonnant à l’écriture et à la création artistique lorsqu’elle en est capable, Anne se heurte à beaucoup de limitations dans notre monde capacitiste. S’identifiant comme une personne handicapée, Anne ne peut plus conduire. Elle se déplace en fauteuil roulant, et ses graves problèmes de santé et de gestion de la douleur peuvent mobiliser son énergie et s’avérer coûteux, très coûteux.

L’époux d’Anne, Peter, est plus vieux qu’elle. Il a également des enfants et des petits-enfants qu’il adore. Peter a mené une carrière très active et productive à titre de forestier professionnel. Il a travaillé pendant 27 ans pour Stora Enso, une entreprise suédoise de produits forestiers située à Port Hawkesbury, au Cap-Breton. Il a également contribué bénévolement et avec grande compétence à la conception et à l’aménagement de magnifiques sentiers de randonnée dans notre région.

Malheureusement, peu de temps après avoir pris sa retraite, Peter a fait une chute et s’est cassé une hanche. Il a aussi été atteint de démence, ce qui l’a finalement amené à avoir besoin de soins spécialisés dans une maison de soins de longue durée dans notre ville.

Comme de nombreux Canadiens, Anne et Peter ont travaillé fort, ils ont économisé pour leur retraite et ils ont fait preuve de discipline pour le remboursement de leur prêt hypothécaire. Pendant 27 ans, Peter a cotisé au régime de pension de son employeur, tout comme ses collègues de travail. Stora a été vendue à une société américaine, NewPage, en 2007.

Malheureusement, le cas de Peter, et de ses collègues de Stora et de NewPage, constitue un autre exemple d’une entreprise — NewPage — qui a déclaré faillite en 2011, et dont les travailleurs et les retraités se sont retrouvés à payer la note. NewPage a finalement été vendue à Pacific West Commercial Corporation en 2012, qui ne voulait rien savoir du passif des régimes de pension. L’usine est maintenant exploitée sous le nom de Port Hawkesbury Paper.

En conséquence, après 27 années de service et après avoir versé au régime de pension des cotisations prélevées sur son salaire différé, la pension de Peter a été réduite de près d’un tiers alors qu’elle n’était déjà pas très élevée à l’époque. Cela l’a laissé avec un niveau de revenu de retraite très bas, à peu près équivalent à la Prestation canadienne d’urgence, que nous connaissons. Ce n’est pas le montant sur lequel lui et Anne comptaient lorsqu’ils ont planifié leur retraite et certainement pas ce dont ils ont besoin, compte tenu de leurs multiples problèmes de santé qui s’accumulent.

Anne croit que les répercussions du stress et du traumatisme qu’ils ont subis à cause du choc de la faillite et de l’insécurité financière qui en a résulté ont aussi exacerbé leurs nombreux problèmes de santé.

Ils n’ont pas perdu leur maison — pas immédiatement, en tout cas —, même si cela a été le cas pour beaucoup d’autres, mais ils ont dû se résoudre à la vendre pour compenser la perte de revenus et payer leurs soins de santé et autres frais de subsistance qui, comme nous le savons tous, ne cessent d’augmenter.

Anne me dit maintenant qu’elle va tâcher de se trouver un emploi rémunéré même si cela risque d’être difficile. Lors de ma conversation avec Anne ce matin, elle m’a indiqué que Peter avait versé à son fonds de pension des cotisations prélevées sur son salaire qui ont totalisé des milliers et des milliers de dollars et que c’est son argent et celui de ses collègues qui a servi à payer des avocats, des créanciers et des actionnaires de New York. Elle a aussi admis que même si la perte du tiers de la pension de Peter leur a fait beaucoup de mal, de nombreux travailleurs forestiers ont subi des pertes encore plus grandes — plus de 30 % — car leurs fonds de pension étaient dans un état encore plus lamentable.

Chers collègues, si je vous raconte l’histoire d’Anne et de Peter, une histoire d’aînés vulnérables qui ont de graves problèmes de santé et qui contemplent un avenir fait d’insécurité financière, c’est parce que ce projet de loi, le projet de loi C-228, vise des gens comme eux et cherche à empêcher une pareille injustice de se produire encore et encore et de faire d’autres victimes parmi les Canadiens.

Comme je l’ai dit plus tôt, cette loi arrive malheureusement trop tard pour Peter, Anne et les autres retraités de Stora/NewPage. Chers collègues, NewPage a déclaré faillite en 2011. L’année suivante, en 2012, le surintendant des pensions a déclaré que, parmi les 131 439 Néo-Écossais participant à un régime de retraite à prestations déterminées, seulement 43 % avaient alors un régime adéquatement capitalisé.

Nous savons que beaucoup de gens, au Canada, sont dans une situation vulnérable semblable et pourraient voir leur pension disparaître.

Honorables collègues, il est temps de faire la lumière sur les graves vulnérabilités des régimes de pension et de trouver des façons efficaces de protéger les aînés qui nous sont chers.

(1710)

Honorables sénateurs, renvoyons le projet de loi C-228 au comité. Garantissons aux aînés canadiens qu’ils seront traités dignement et de manière juste, équitable et responsable. Je cite ce que le député d’Essex, Chris Lewis, a dit à l’autre endroit, lors de son discours à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi C-228 : « Le moment est toujours opportun pour faire ce qui s’impose. » En toute franchise, j’ajouterais qu’il est grand temps que nous fassions ce qui s’impose. Wela’lioq, merci.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons‑nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Wells, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie.)

Le Code criminel
La Loi sur les juges

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Dalphond, appuyée par l’honorable sénateur Harder, c.p., tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-233, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les juges (violence contre un partenaire intime).

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons‑nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Dalphond, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)

La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Oh, appuyée par l’honorable sénateur Wells, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-242, Loi modifiant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (visas de résident temporaire pour les parents et les grands-parents).

L’honorable Ratna Omidvar : Honorables sénateurs, j’aimerais aujourd’hui vous parler du projet de loi C-242, Loi modifiant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (visas de résident temporaire pour les parents et les grands-parents). Je suis la porte‑parole officielle de ce projet de loi. Comme mon rôle est de critiquer, selon le dictionnaire, je dois trouver des fautes, des éléments de désaccord ou exprimer une opinion défavorable. Dans ce cas, chers collègues, vous avez devant vous une véritable impostrice, car, en réalité, j’aime presque tout de ce projet de loi. J’aimerais féliciter le député Kyle Seeback et le sénateur Victor Oh d’avoir porté ce projet de loi à notre attention.

Ce projet de loi me touche personnellement, comme il touche de nombreux immigrants et aspirants immigrants. Cinq petites années après mon arrivée au Canada, j’ai parrainé mes parents pour les faire venir ici et bâtir notre nouvelle vie. Vous m’avez souvent entendu affirmer dans cette enceinte que, si je peux accomplir mon rôle de sénatrice aujourd’hui, c’est parce que ma mère restait derrière pour prendre soin de mes enfants et s’occuper de ma maison pendant que je travaillais de longues heures, y compris les soirs et les fins de semaine.

Il n’a fallu que six mois pour que ma demande de parrainage soit acceptée et que mes parents puissent venir comme résidents permanents. Évidemment, à l’heure actuelle, c’est un rêve chimérique. Nous devons trouver de nouvelles voies, des innovations et des solutions de rechange pour réunir les familles.

Bien que je n’aie pas été d’accord avec de nombreuses politiques d’immigration du premier ministre Harper, je dois dire que l’établissement d’une voie accélérée pour les parents et les grands‑parents grâce aux super visas était, franchement, une super innovation. Cette mesure reconnaissait que de nombreux parents et grands-parents souhaitent disposer d’une voie sûre mais souple pour prolonger leur séjour sans nécessairement vouloir s’installer de façon permanente au Canada. Ils ont leur propre vie dans leur pays, ils ont une maison, et je sais que beaucoup redoutent nos hivers. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’autres personnes qui veulent vivre en permanence au Canada, et je ferai une observation sur cette cohorte peu plus loin dans mon propos.

Ce projet de loi est l’expression de nos ambitions plus larges pour ce que j’appellerais un Canada plus grand et plus audacieux. Nous savons qu’environ un quart de la population du Canada est ou a été un immigrant reçu ou un résident permanent. Récemment, le gouvernement a annoncé son ambition d’accueillir 500 000 immigrants. En outre, selon un récent sondage d’Environics, 7 Canadiens sur 10 appuient ces mesures d’immigration. Je crois personnellement qu’une augmentation de l’immigration — bien faite — est bonne pour le Canada, pour les immigrants et pour nous tous. Ce projet de loi sur les parents et les grands-parents nous fait avancer dans cette direction pour une raison simple.

Honorables sénateurs, je considère que le Canada a un avantage concurrentiel sur d’autres pays en raison de sa position à l’égard des parents et des grands-parents. Comme on le sait, il y a des arriérés de demandes dans tous les volets du système, et l’intégration présente aussi des défis. Malgré cela, les immigrants ne tournent pas le dos au Canada. En fait, la file de gens qui souhaitent venir ici continue de s’allonger. Vous vous demandez peut-être pourquoi. Eh bien, il y a plusieurs raisons très importantes. Premièrement, le Canada est un pays sûr et sécuritaire. Deuxièmement, nous avons un excellent système d’éducation public et un système de santé public, lequel est peut-être en difficulté en ce moment. Le point final, c’est notre capacité d’accueillir les parents et les grands-parents. C’est notre ingrédient secret, celui qui nous distingue d’autres pays. C’est notre joyau.

Le processus de réunification des familles a toutefois été très cahoteux au cours des 10 dernières années. La demande a augmenté. Le nombre de parents et de grands-parents qui peuvent venir au Canada dans le cadre de la réunification permanente des familles est de 20 000 par année, et ces places s’envolent en une nanoseconde. Comme les demandes se font en ligne, je m’inquiète toujours du fait que certaines personnes sont capables de remplir la demande en une nanoseconde, mais que d’autres personnes n’y arrivent pas et sont exclues. Le gouvernement a utilisé toutes sortes de méthodes pour tenter de gérer le temps d’attente; il a même organisé un système de loterie, à un moment donné, ce qui m’apparaît comme un abandon de ses responsabilités de gestion.

Le projet de loi C-242 constitue une mesure importante, car il facilite la délivrance de visas de longue durée pour les parents et les grands-parents hors de la filière de la résidence permanente. Il améliore la voie de sortie que nous avons créée. Il permet aux parents ou aux grands-parents de demander un visa de résident temporaire les autorisant à séjourner au pays plus longtemps — pas 2 ans sur 10, mais 5 ans sur 10. Cela ne signifie pas qu’ils resteront ici pendant cinq ans, mais qu’ils peuvent aller et venir à leur guise. Le projet de loi leur permet de souscrire une assurance-maladie auprès d’une compagnie d’assurance à l’extérieur du Canada. Bon nombre de ces parents et grands-parents ont des polices obtenues chez leur propre assureur. Comme c’est le cas au Canada, ils doivent souscrire dans leur pays une assurance automobile, une assurance-vie et toutes sortes d’autres assurances. Ils font déjà affaire avec des compagnies d’assurance, alors ils paieront probablement des primes moins élevées à de meilleurs taux en s’adressant à elles, tout en ayant de meilleures chances de voir leurs demandes approuvées.

Le projet de loi autorise les compagnies étrangères à fournir une assurance-maladie aux demandeurs d’un super visa, à une condition : le ministre doit les avoir incluses parmi les compagnies agréées. Il devra y avoir une liste, qui sera probablement constituée au moyen d’instructions ministérielles. Je pense que c’est une question à laquelle le comité chargé d’étudier le projet de loi devrait réfléchir sérieusement.

En ce qui a trait au coût, contracter une assurance auprès d’une compagnie canadienne peut coûter, selon l’âge de la personne, entre 2 000 $ et 5 000 $. Si l’on tient compte du prix des billets d’avion, des examens médicaux et de l’assurance, on parle d’environ 10 000 $ tous les deux ans, dans le système actuel. Pour beaucoup de parents et de grands-parents de la classe moyenne, cela pourrait être un facteur dissuasif que, à mon avis, le projet de loi tente d’éliminer.

Le projet de loi présente aussi une disposition extrêmement intéressante. Dans le sommaire du projet de loi, on peut lire :

Il prévoit aussi l’obligation pour le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration d’établir et de déposer un rapport concernant la réduction de l’exigence que l’enfant ou le petit‑enfant est tenu de respecter en matière de revenu minimum pour que son parent ou son grand-parent en visite puisse entrer au Canada et y séjourner pendant une longue période.

(1720)

J’appuie cette mesure. Des études ont montré que les exigences financières imposées pour le parrainage familial — qu’il soit permanent ou temporaire — sont lourdes. Les familles nouvellement établies au Canada sont en train de recommencer leur vie. Nous connaissons les difficultés qu’elles rencontrent pour obtenir un emploi. Je crois que c’est précisément au moment où elles ont un faible revenu qu’elles ont le plus besoin de la présence de membres de leur parenté pour se faire aider, de la même façon que mes parents m’ont aidée.

Ce projet de loi demande au ministre de déposer un rapport dans un délai d’un an après la sanction royale afin que l’on puisse trouver une voie raisonnable et fondée sur des faits.

Honorables sénateurs, j’ai trois commentaires à faire, si je peux m’exprimer ainsi. Le premier dépasse la portée de ce projet de loi, mais il mérite votre attention.

Il existe une filière permanente d’immigration pour les parents et les grands-parents. Elle dépend aussi du niveau de revenu. Puisque ce tremplin est largement destiné aux parents d’immigrants de la classe moyenne et à revenu moyen qui sont à l’étranger, je crois que la filière permanente devrait privilégier les parents à faible revenu en leur accordant la priorité.

Ma deuxième observation est la suivante : aucun responsable d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada n’a jamais pu m’indiquer le nombre de parents et le nombre de grands-parents qui viennent vivre au Canada en tant que résidents permanents ou en tant que résidents temporaires. Cette information est importante parce qu’il y a trop de mythes à ce sujet.

Ma troisième observation — et il serait important que le comité se penche dessus — est que le projet de loi ne prévoit aucune façon de faire appel en cas de rejet d’une demande de visa de résident temporaire pour des parents ou des grands-parents.

Enfin, je termine sur une note optimiste en précisant que le projet de loi a reçu un appui sans réserve à l’autre endroit. En cette ère d’hyperpartisanerie, je suis heureuse de voir qu’il arrive des moments où tous les partis s’entendent, surtout au sujet des solutions concernant l’immigration, car nous savons que ce sujet est une pomme de discorde. C’est encourageant de voir le consensus devenir de plus en plus fort sur la scène politique, relativement à l’idée que l’immigration est non seulement bonne pour le Canada, mais qu’elle fait partie intégrante de notre prospérité future. Merci, chers collègues.

Son Honneur le Président : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : L’honorable sénateur Oh propose, avec l’appui de l’honorable sénateur Wells, que le projet de loi soit lu pour la deuxième fois.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons‑nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Oh, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.)

(À 17 h 23, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)

Haut de page