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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 93

Le jeudi 15 décembre 2022
L’honorable George J. Furey, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 15 décembre 2022

(Conformément à l’article 3-6(1) du Règlement, le Sénat a été rappelé pour se réunir à 10 heures le 15 décembre 2022 au lieu de 14 heures tel qu’ordonné antérieurement.)

La séance est ouverte à 10 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

Les travaux du Sénat

L’honorable Raymonde Saint-Germain : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5j) du Règlement, je propose :

Que, nonobstant toute disposition du Règlement ou toute pratique habituelle, pour la séance d’aujourd’hui, la durée des déclarations de sénateurs soit de 45 minutes, afin de rendre hommage à notre collègue l’honorable sénateur Christmas, sans compter le temps pour sa réponse.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Hommages

L’honorable Dan Christmas

L’honorable Raymonde Saint-Germain : Chers collègues, je veux d’abord saluer les trois enfants et les deux petits-enfants de notre collègue Dan Christmas, qui sont avec nous aujourd’hui, et leur dire combien ils peuvent être fiers de leur père et grand-père.

C’est avec le cœur lourd que je prends la parole aujourd’hui afin de rendre hommage à mon estimé collègue, le sénateur Dan Christmas, lors de sa dernière journée dans cette Chambre.

[Traduction]

C’est bel et bien le cœur lourd que je prends la parole aujourd’hui, car tous ceux qui ont côtoyé le sénateur Christmas au fil des ans peuvent témoigner de son grand esprit et de son caractère profondément humain.

Cher Dan, vous nous manquerez beaucoup pour ces raisons et pour vos qualités indéniables en tant que sénateur. Depuis vous avez été nommé au Sénat en 2016, vous avez fièrement représenté la communauté mi’kmaq et votre province, la Nouvelle-Écosse. Cependant, nous savons tous que votre engagement envers les deux remonte bien avant vos années en tant que sénateur.

Avant votre vie au Sénat, vous étiez déjà un leader et un organisateur pour la communauté de Membertou et votre peuple à l’île du Cap-Breton. Ces gens sont heureux de vous ravoir parmi eux à temps plein, tout comme vos trois enfants et vos deux petits‑enfants, qui ont de nombreuses raisons d’être fiers de vous en tant que père et grand-père.

Si je devais décrire le sénateur Christmas en seulement quelques mots, je dirais que c’est un homme de cœur qui est dévoué à sa famille. Le destin a voulu que vous choisissiez de demeurer près de votre peuple et de vous acquitter de vos responsabilités les plus importantes, à savoir celles que vous avez envers votre famille. Même si votre départ nous attriste, nous ne pouvons qu’admirer la décision que vous officialisez aujourd’hui. Vous avez été un membre très dévoué du Groupe des sénateurs indépendants, de même qu’un excellent pédagogue, un homme de dialogue et de médiation qui, grâce à sa bonne connaissance de l’environnement, nous a aidés à avancer vers la réconciliation, ainsi qu’à comprendre et reconnaître des enjeux autochtones cruciaux.

Vous étiez constamment animé par un esprit d’équipe, donniez invariablement des conseils judicieux et remplissiez toujours vos fonctions de sénateur avec beaucoup de patience. C’était un réel plaisir de travailler avec vous. Sénateur Christmas, sachez qu’au sein de notre groupe, on se souviendra de vous comme une personne qui excelle dans le rapprochement des peuples.

En tant que membre et président du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, vous avez contribué à des études percutantes qui étaient plus que nécessaires pour faire avancer notre pays sur la voie difficile de la réconciliation. Vous aurez laissé votre empreinte sur ce comité, et nous ferons de notre mieux pour poursuivre votre œuvre, en sachant pertinemment que ce ne sera pas une mince tâche.

Sénateur Christmas, même si nous comprenons et respectons votre décision, elle est malgré tout synonyme de perte pour le Sénat. Disons qu’il s’agit d’un gain pour votre famille et votre collectivité. Aujourd’hui, elles récupèrent un leader naturel et un homme dévoué à sa famille. Au nom de tous les membres du Groupe des sénateurs indépendants, je vous souhaite un heureux départ à la retraite du Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

L’honorable Patti LaBoucane-Benson : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au nom du bureau du représentant du gouvernement afin de rendre un humble hommage à notre collègue le sénateur Dan Christmas, qui nous quittera à la fin de janvier. Même si, à mon avis, son départ représente une grande perte pour notre institution, je comprends pourquoi il doit rentrer auprès des siens. La famille passe avant tout.

Le sénateur Christmas est arrivé au Sénat il y a six ans ce mois‑ci. Il était le premier sénateur mi’kmaq nommé au Sénat du Canada. Avant son arrivée ici, il avait occupé plusieurs postes de dirigeant au sein de la nation mi’kmaq de la Nouvelle-Écosse. Il a notamment participé activement à la mise en œuvre des droits ancestraux et issus de traités des Mi’kmaq de sa province. Ses réalisations et son expérience auprès et au nom de sa communauté, en Nouvelle‑Écosse, ont constitué des antécédents parfaits pour son travail au Sénat. Il émanait de lui un sentiment de calme, peu importe la situation, et ses contributions pendant son séjour ici ont été nombreuses.

De mon point de vue, la façon dont il a présidé le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones pendant l’étude du projet de loi C-15, Loi concernant la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, a été décisive. Il a dirigé des heures de séances incluant les témoignages de dizaines de personnes. N’oublions pas que la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones avait été adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies en 2007, et qu’elle était enfin là, devant notre comité sénatorial, 14 ans plus tard, en pleine pandémie de surcroît.

Le calme et la dignité de Dan ainsi que le respect dont il faisait preuve envers ses collègues et les témoins étaient contagieux. Il nous était impossible de mal nous comporter lorsqu’il occupait le fauteuil — nous avons essayé —, même lorsque les réunions étaient longues et litigieuses. Les débats étaient polis, les désaccords étaient tempérés et les résolutions étaient négociées.

J’en attribue entièrement le mérite au sénateur Christmas, qui a su nous diriger — et par extension, diriger le Canada — pour enfin codifier les objectifs de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.

Sur une note personnelle, Dan, votre sagesse, votre force tranquille et votre détermination me manqueront. Le Sénat perd un émissaire qui fait valoir avec passion les droits et les préoccupations des Premières Nations, des Inuits et des Métis.

Je termine en citant le sénateur lui-même. À son discours à l’étape de la troisième lecture du projet de loi concernant la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, il a déclaré :

Cette question, chers collègues, a une grande importance pour les Premières Nations, les Métis, les Inuits, les détenteurs de droits, les nations visées par des traités et, plus encore, pour l’établissement de véritables relations de nation à nation. C’est d’une importance cruciale pour le Canada alors qu’il cherche à trouver les façons d’avancer sur la voie de la paix et de l’amitié avec les peuples autochtones.

(1010)

Dan, je vous souhaite, ou plutôt, nous vous souhaitons tous la paix et l’amitié pour l’avenir. Hiy hiy.

Des voix : Bravo!

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, je prends aussi la parole aujourd’hui pour rendre hommage à notre collègue le sénateur Dan Christmas. Comme on l’a déjà dit, il y a six ans, l’honorable Dan Christmas a été le premier Mi’kmaq à être nommé à la Chambre haute.

Chers collègues, comme la sénatrice LaBoucane-Benson l’a déjà dit, je connais particulièrement bien le travail que le sénateur Christmas a accompli à titre de président du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones lors de l’étude de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.

Sénateur Christmas, je dois dire que la façon dont vous avez mené les débats m’a impressionné et a impressionné tous les sénateurs. Vous étiez constant et juste. En tant que leader de l’opposition, je vous en suis reconnaissant.

Chers collègues, je tiens à vous raconter une histoire. Il y a quelques années, peu de temps après la nomination du sénateur Christmas à la Chambre haute, je me suis rendu au Cap-Breton. J’étais là pour assister à des parties de curling. Comme cela m’arrive souvent, j’ai eu une excellente conversation avec un chauffeur de taxi alors qu’il me conduisait à mon hôtel.

Je me souviens bien de notre conversation. Comme tout bon Canadien, nous avons commencé à parler de la météo et de la raison de ma présence au Cap-Breton, mais notre conversation a rapidement pris une tournure intéressante quand le chauffeur de taxi m’a demandé ce que je faisais comme travail. Je lui ai répondu que j’étais un sénateur du Manitoba.

Laissez-moi vous dire, chers collègues, que cela a éveillé son intérêt. C’était un moment assez remarquable. La réaction a été soudaine. J’étais soudainement distingué et célèbre, mais non pas parce que j’étais un sénateur. Pourquoi? Eh bien, la première chose que le chauffeur m’a demandée a été : « Connaissez-vous le sénateur Dan Christmas? » Quand j’ai dit que oui, c’est tout ce dont il a voulu parler pendant le reste du trajet jusqu’à l’hôtel — en me disant à quel point Dan Christmas était un grand personnage, et un grand représentant des Mi’kmaqs et aussi du Cap-Breton.

Sénateur Christmas, le fait de vous connaître est ce qui m’a rendu notable aux yeux de cet homme. Vous étiez perçu comme un modèle, non seulement par cet homme, mais aussi par tous les habitants du Cap-Breton.

La marque de reconnaissance que j’ai reçue ce jour-là est restée gravée dans ma mémoire. Il était donc tout naturel que je la partage avec vous aujourd’hui.

Certes, le fait de vous dire au revoir dans cette enceinte est peut‑être triste pour nous, ici à Ottawa, mais je suis convaincu que, chez vous, vous rendrez plus de gens heureux, car ils auront l’occasion de vous voir plus souvent.

Sénateur Christmas, je sais que ces dernières années ont été difficiles pour vous, votre épouse et partenaire de vie étant décédée beaucoup trop tôt, mais je vous souhaite que Dieu vous donne la paix et sa bénédiction en cette période des Fêtes, car c’est surtout à ce moment qu’on ressent de la solitude.

Sénateur Christmas, ce fut un privilège de travailler avec vous et de faire votre connaissance. Au nom du caucus conservateur, je vous souhaite la meilleure des chances dans vos nouvelles aventures. J’ai bon espoir que vous pourrez jouir de votre célébrité dans votre coin de pays. Je vous souhaite une retraite heureuse.

Des voix : Bravo!

L’honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, il nous arrive souvent d’être si préoccupés par les affaires quotidiennes liées à nos réunions, à nos courriels et à nos appels téléphoniques qu’il est facile de ne pas voir le temps passer. Nous devons faire un effort conscient pour nous rappeler pourquoi nous sommes ici : c’est pour donner une voix aux personnes que nous représentons.

Sénateur Christmas, vous avez rempli votre rôle de manière exemplaire. Je suis enchantée de vous rendre hommage aujourd’hui pour vos années à titre de sénateur et votre engagement envers votre collectivité. Parallèlement, je suis triste à l’idée de ne plus entendre résonner au Sénat ce fort accent néo-écossais — cette voix puissante de Membertou, au Cap-Breton.

Sénateur Christmas, vous êtes le premier sénateur mi’kmaq à avoir été nommé au Sénat. Vous avez dû en ressentir une grande fierté, mais aussi une certaine pression. Soyez rassuré, vous avez été plus qu’à la hauteur.

Sénateur Christmas, vous avez passé votre vie à faire valoir les droits ancestraux et issus de traités des Mi’kmaqs en Nouvelle‑Écosse, ce qui vous a valu d’être reconnu pour vos efforts à faire de Membertou l’une des collectivités des Premières Nations les plus florissantes de notre pays. Votre travail n’est pas passé inaperçu. Vous avez reçu des doctorats honorifiques de l’Université Dalhousie, de l’Université Saint Mary’s et de l’Université du Cap‑Breton, en plus d’un diplôme honorifique du Collège communautaire de la Nouvelle-Écosse. Vous avez aussi reçu le Prix national d’excellence en leadership des Autochtones de l’Association des agents financiers autochtones du Canada.

Sénateur Christmas, j’ai pu constater par moi-même votre engagement envers les droits issus de traités le printemps dernier, lorsque nous avons tous deux travaillé au sein du Comité sénatorial des pêches et des océans pour étudier la question du respect des pêches fondées sur les droits des Mi’kmaqs et de l’avancement de la mise en œuvre complète de ces droits. Par votre expérience et vos connaissances, vous avez apporté une aide inestimable au comité.

Sénateur, votre voix nous manquera au comité. Après votre nomination au Sénat, sénateur Christmas, vous avez dit que vous vous sentiez comme un ambassadeur de la nation mi’kmaq à Ottawa, ce qui est très vrai. Toutefois, nous avons aussi eu de la chance de vous avoir comme ambassadeur du Sénat du Canada au Cap-Breton et à Membertou.

Ottawa peut parfois donner l’impression d’être très loin pour ceux d’entre nous qui vivent en région. En ouvrant votre bureau sénatorial à Membertou, vous avez contribué à combler la distance entre votre collectivité et le Sénat. Je suis sûre que pour les membres de votre collectivité, ce point de contact a été extrêmement important.

Dan, vous êtes l’exemple même du leadership fort. Vous n’êtes pas bruyant, mais vous êtes énergique. Vous êtes réfléchi et mesuré. Vous êtes juste. Vous écoutez et vous êtes respectueux. Les gens veulent travailler avec vous.

Dan, ce fut un plaisir et un privilège de travailler avec vous et d’apprendre à vous connaître au cours des six dernières années. Au nom du Groupe progressiste du Sénat, je vous souhaite le meilleur dans le prochain chapitre de votre vie.

Au fait, j’ai toujours l’intention d’accepter votre invitation à assister au pow-wow de Membertou. Merci.

Des voix : Bravo!

L’honorable Dennis Glen Patterson : Honorables sénateurs, c’est un plaisir et un honneur de rendre hommage, au nom du Groupe des sénateurs canadiens, au sénateur Dan Christmas, un gentilhomme aimable avec lequel j’ai eu le privilège de collaborer étroitement au sein du Comité des peuples autochtones.

Ma première rencontre avec Dan Christmas remonte à mai 2014, quand le Comité des peuples autochtones s’est rendu dans sa collectivité adorée, Membertou, au Cap-Breton, en Nouvelle‑Écosse, dans le cadre de son enquête sur le logement dans les réserves des Premières Nations. Dan avait expliqué au comité comment le fait de se libérer de la Loi sur les Indiens avait permis à sa collectivité de se transformer et de devenir une puissance économique. Membertou est une tête d’affiche parmi les bandes des Premières Nations du pays et pendant plusieurs années, Dan Christmas a décidément joué un rôle crucial, aux côtés du chef Terry Paul, dans l’histoire de cette réussite étonnante et inspirante.

J’ai employé le terme « gentilhomme » pour vous décrire, cher ami, car il trouve un écho dans ma culture, mais je vous considère aussi comme l’incarnation même de ce que le terme « aîné respecté » représente, à ma connaissance, pour les peuples autochtones : un homme respectueux, versé dans la culture et la tradition, qui sait écouter et qui est rempli de sagesse, de bienveillance et de compassion.

J’estime au plus au point la façon dont vous avez présidé le Comité des peuples autochtones. Comme le savent les sénateurs, les comités directeurs accomplissent un travail crucial dans nos comités. Dan était toujours bien préparé pour notre comité directeur. Il avait déjà lu et étudié l’ensemble des documents d’information et pouvait indiquer les points saillants et les omissions à la vitesse de l’éclair. En tant que président, il était scrupuleusement impartial et équitable envers tout le monde, et le respect qu’il témoignait aux gens ainsi que son sens de l’humour l’aidaient toujours à amener les gens à se rallier à une cause commune.

(1020)

Nous avons dû nous pencher sur des dossiers complexes, notamment lorsque nous avons étudié le projet de loi C-15, soit le projet de loi de mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, et que nous avons dû nous battre et demander des comptes au gouvernement pour que le principe d’égalité des genres soit respecté dans le cadre de la Loi sur les Indiens, une tâche colossale qui n’est toujours pas terminée.

Sénateur Christmas — Dan —, vous avez été, pour ceux d’entre nous qui ont eu le privilège de travailler avec vous, un brillant exemple de ce que peut accomplir un sénateur et un défenseur indéfectible des intérêts du peuple mi’kmaq et de votre région. Je sais que vous êtes un père de famille dévoué, et c’est pour cela que vous quittez le Sénat trop tôt.

Au nom du Groupe des sénateurs canadiens, je vous offre mes meilleurs vœux alors que vous amorcez un nouveau chapitre de votre vie dans votre région et auprès de votre famille, sachant que vous avez été pour nous un modèle dont nous pourrons nous inspirer pour mieux défendre les intérêts des minorités et des régions de ce grand pays. Merci. Qujannamiik.

Des voix : Bravo!

L’honorable Yvonne Boyer : Honorables sénateurs, je suis heureuse de rendre hommage au sénateur Dan Christmas. Nous connaissons tous les conséquences que le fait de siéger au Sénat peut avoir sur notre famille, surtout ceux qui doivent venir à Ottawa depuis de lointaines régions du pays. J’aimerais donc commencer cet hommage en prenant le temps de remercier les enfants du sénateur Christmas, Peter, Lacey et Gail, ainsi que ses petits‑enfants, Rawlin et Arya. Au nom de tous les sénateurs, je vous dis merci d’avoir partagé votre père et votre grand-père avec nous et avec tout le Canada. Son travail a vraiment changé les choses, et nous sommes extrêmement chanceux d’avoir bénéficié de sa sagesse et de ses contributions pendant toutes ces années.

Les réalisations du sénateur Christmas, tant au cours de son mandat au Sénat que dans sa vie antérieure, ne peuvent tout simplement pas tenir dans un hommage de trois minutes. Grâce à son travail sur le projet de loi visant à mettre en application la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones au Canada et en tant que président et vice-président du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, le sénateur Christmas a joué un rôle important dans l’élaboration de quelques‑unes des lois les plus importantes pour les peuples autochtones de même que pour tout le Canada. Il nous laisse un énorme vide à combler.

Je prends aussi un instant pour parler du rôle prépondérant que le sénateur Christmas joue au sein de sa communauté — un rôle de défenseur des intérêts de la communauté mi’kmaq de Membertou, en Nouvelle-Écosse. Son grand dévouement envers sa communauté et son peuple l’ont mené à consacrer toute sa vie professionnelle à les servir dans d’innombrables fonctions. Par exemple, en juillet 2019, j’ai eu la chance de me rendre à Membertou pour parler du fléau qu’est la stérilisation forcée avec la population là‑bas. Comme tous les sénateurs peuvent sûrement se l’imaginer, les rencontres portant sur ce sujet sont difficiles et chargées d’émotions. Tout au long de cette rencontre et des conversations qui ont suivi, j’ai pu voir les liens étroits que le sénateur Christmas entretenait avec sa communauté ainsi que le respect et l’admiration qu’ils se portaient mutuellement.

On se souviendra du sénateur Christmas pour bien des raisons, mais je me souviendrai par-dessus tout qu’il était toujours là pour soutenir sa communauté, prêt à s’attaquer aux questions difficiles et à faire tout ce qu’il pouvait pour aider.

Après avoir servi sa nation et, en fait, l’ensemble des Premières Nations, des Métis et des Inuits partout au Canada, il peut à nouveau se concentrer sur le plus important travail qui soit : être père et grand-père. Chi-Meegwetch, mon ami. Je vous offre mes meilleurs vœux.

Des voix : Bravo!

L’honorable Brian Francis : Honorables sénateurs, je prends la parole pour rendre hommage au sénateur Dan Christmas. Fier Mi’kmaq de la Première Nation de Membertou, Dan est un père de famille dévoué et un ami pour de nombreuses personnes. Il est également un leader et un défenseur reconnu de sa communauté et de notre nation mi’kmaq.

En tant que premier Mi’kmaq à être nommé au Sénat, Dan est une source d’inspiration, de fierté et d’espoir pour moi et pour d’innombrables autres personnes qui ne se sont jamais senties représentées sur la Colline du Parlement. Je suis honoré d’avoir marché dans ses traces deux ans plus tard. Plus qu’un collègue, Dan est un ami et un mentor que je respecte et que j’admire énormément. J’ai la chance d’avoir travaillé en étroite collaboration avec lui pour faire en sorte que les droits, les intérêts et les aspirations des Mi’kmaqs soient entendus et pris en compte à Ottawa.

Nous avons, par exemple, encouragé nos collègues à se joindre à nous pour demander au gouvernement fédéral de procéder à la mise en œuvre complète des pêches fondées sur les droits des Mi’kmaqs et des autres Premières Nations après plus de vingt ans d’échec.

Je plaisante souvent en disant que les gens nous voient comme une sorte de duo dissident à cause de nos critiques retentissantes. Il n’est pas rare non plus que certains nous confondent. Bien que nous ne nous ressemblions pas tous, je le prends comme le plus grand des compliments. Qui ne voudrait pas être confondu avec quelqu’un d’aussi intelligent, beau et charismatique que Dan?

Des voix : Bravo!

Le sénateur Francis : Chers collègues, Carol, qui a travaillé pour Dan au cours des six dernières années, m’a dit que ce fut une grande chance pour elle de rencontrer une personne aussi exceptionnelle. En parlant de la retraite de son patron, elle a cité un proverbe, selon lequel on peut faire des projets, mais que notre destin est entre les mains du Créateur. Alors que Dan entame un nouveau chapitre de vie, je sais que le Créateur continuera de le guider et de le protéger.

Chers collègues, la présence et l’influence de Dan au Sénat me manqueront, mais sachez que nous continuerons à collaborer dans l’intérêt de notre nation et de tous ceux qui habitent au Mi’kma’ki et ailleurs.

Wela’lin, Dan, pour tout. Vous êtes unique en votre genre et vos contributions continueront à se faire sentir. Je vous souhaite, à vous ainsi qu’à vos enfants, vos petits-enfants et le reste de votre famille, la meilleure des chances, aujourd’hui et pour toujours. Dans la langue mi’kmaq, il n’y a pas de mot pour adieu. On dit « à plus tard ». Ainsi, Dan, nemultes nitap. À plus tard, mon ami.

Des voix : Bravo!

L’honorable Colin Deacon : Honorables sénateurs, je prends la parole afin de rendre hommage au premier sénateur mi’kmaq de l’histoire, le sénateur Dan Christmas. Le sénateur Christmas a déjà décrit son parcours et ses objectifs :

En tant que sénateur autochtone, je peux vous dire qu’atteindre une véritable réconciliation est un élément clé de la modernisation du Sénat et de l’accroissement de l’indépendance de la Chambre haute. Pour bien des Autochtones, entreprendre un réel dialogue, franc et ouvert, au sujet des lois, des conventions et des institutions qui ont eu des effets déterminants et destructeurs au cours de l’histoire du Canada est essentiel à la réconciliation entre le Canada et les peuples autochtones.

Le sénateur Christmas sait de quoi il parle. Sa communauté, Membertou, a dû se battre pour surmonter les contraintes destructives de la Loi sur les Indiens et d’autres obstacles systémiques. Si elle a réussi, c’est grâce à l’audace du sénateur Christmas et d’autres entrepreneurs de la communauté qui ont choisi de s’affranchir de la Loi sur les Indiens et de créer leur propre régime d’autonomie gouvernementale. On dit souvent que les possibilités créées par les leaders de Membertou relèvent du miracle. Il ne s’agit pas d’un miracle. Elles ont été rendues possibles grâce à la capacité d’adaptation, à la persévérance et à la responsabilité des leaders.

Voici trois exemples parmi tant d’autres : premièrement, afin d’inciter les grandes sociétés à bâtir des installations et à offrir des services dans la communauté, Membertou a fait le travail nécessaire pour obtenir la certification ISO en matière de qualité de la gestion. Cette clairvoyance et les grands efforts déployés pour obtenir cette certification ont montré l’engagement des dirigeants de la communauté en matière de responsabilisation et de respect des normes internationales.

Deuxièmement, il y a un peu plus d’un siècle, les efforts d’un député fédéral ont entraîné l’expulsion de la communauté de Membertou de ses terres ancestrales qui formaient alors la réserve de Kings Road, qui correspond au site du port de Sydney. Fait étonnant, la communauté a racheté ces terres en 2016, dans le cadre d’une transaction immobilière commerciale. Je suis émerveillé par la persévérance et le génie stratégique qui ont mené la communauté à racheter ses terres ancestrales.

Troisièmement, grâce à l’appui d’un organisme caritatif novateur appelé Oceans North, Membertou arrive en tête de peloton au chapitre du virage vers la carboneutralité dans le secteur des pêches. La nation de Membertou a constaté qu’environ 70 % des pêcheurs côtiers de homard pêchent dans un rayon de 20 kilomètres de la côte et que, de ce fait, leurs bateaux peuvent être alimentés par un système électrique à batterie. Grâce à sa capacité d’adaptation, la nation de Membertou fait preuve de leadership sur le plan climatique.

Chers collègues, nous avons eu l’honneur d’écouter un des principaux architectes et instigateurs de cette remarquable transformation et de travailler avec lui et d’apprendre de lui.

(1030)

Sénateur Christmas, votre capacité d’adaptation, votre persévérance et votre sens des responsabilités nous inspirent tous, ainsi que votre bienveillance, votre humilité et votre profonde humanité. Vous nous aurez tous marqués. Je vous remercie sincèrement de votre dévouement constant à l’égard de l’entrepreneuriat et de l’excellence. Je me réjouis à la perspective de continuer à apprendre de vous. Vous avez raison, sénateur Christmas : il faut songer aux enfants et au monde que nous leur léguons. Wela’lin, Dan.Wela’lioq.

L’honorable Kim Pate : Je vous remercie de me donner le privilège et la responsabilité de prendre la parole pour exprimer ma profonde admiration, mon estime, mon respect, mon admiration, mon amour et ma gratitude à l’égard de notre cher collègue et de mon voisin de banquette bien-aimé.

Il y a un mois, nous avons souligné le fait que l’Université Queen’s vous a remis un cinquième doctorat honorifique, l’une des plus récentes distinctions qui vous ont été décernées. Aujourd’hui, nous avons la tâche difficile et quelque peu déchirante de vous rendre hommage alors que vous vous apprêtez à quitter cet endroit auquel vous avez apporté votre leadership exceptionnel et inégalé en tant que membre des Premières Nations ainsi que votre contribution inestimable à la cause des peuples autochtones, toujours animé par la bonté, la compassion et l’amour, et en faisant preuve de calme, de sérénité, de bienveillance et d’une grande sagesse.

La première fois que je me suis rendue dans la Première Nation de Membertou, c’était avec votre cousin Junior Marshall, et la communauté était au bord de la faillite. Comme de nombreux sénateurs viennent de l’indiquer, le leadership de Dan — votre leadership —, est reconnu comme la force motrice qui a permis à Membertou de devenir la communauté prospère et dynamique que nous connaissons.

La dernière fois que j’ai eu le privilège de m’y rendre, vous avez fait preuve, comme d’habitude, d’une générosité incroyable et vous avez pris le temps de me faire visiter les lieux et de me présenter à tous ceux qui saluaient chaleureusement leur sénateur, que ce soit chez vous, à votre bureau de sénateur au centre commercial, au centre culturel, et partout où nous sommes allés dans la communauté.

En siégeant avec vous dans cette enceinte et au Comité des peuples autochtones, j’ai beaucoup appris et je me suis enrichie grâce à vos brillantes interventions, à votre leadership tranquille, mais tellement clair, à votre sens de la diplomatie paisible et à votre militantisme efficace. J’admire le fait que vous êtes toujours guidé par une immense bienveillance, une compassion et une patience apparemment sans bornes et une grande générosité d’âme.

Vous représentez la quintessence du leadership inspirant, de la formation de coalitions et du militantisme courageux, car toute votre vie durant, vous avez travaillé sans relâche pour vous attaquer aux défis auxquels un trop grand nombre de nos concitoyens sont confrontés à cause d’attitudes et de systèmes discriminatoires qui perdurent.

Je suis extrêmement reconnaissante d’avoir eu l’occasion de rencontrer votre chère et vraiment charmante et talentueuse Dozay, vos enfants tout aussi talentueux et remarquables, ainsi que vos petits-enfants chéris. Peter, Lacey, Rawlin, Arya, Gail et petit Wastew, je vous remercie d’être ici avec nous aujourd’hui. Nous sommes extrêmement reconnaissants envers vous, votre famille et votre communauté d’avoir partagé votre spectaculaire tata’t et umijgamijl avec nous pendant les six dernières années. Il nous manquera, et nous nous souviendrons notamment de sa profonde sagesse ainsi que de ses idées claires, bienveillantes, patientes et réfléchies. Le sénateur Christmas est pour chacun d’entre nous un modèle formidable et une grande source d’inspiration. Wela’lin, chi-meegwetch, merci.

L’honorable Mary Coyle : Honorables sénateurs, membres de la famille et amis de notre collègue à l’aube de sa retraite, nous sommes réunis aujourd’hui pour célébrer le premier sénateur mi’kmaq du Canada, l’honorable, le formidable et très attachant Dan Christmas. Récemment, en discutant du sénateur Christmas avec Al Fleming, le mot anglais « gravitas » m’est venu à l’esprit. « Gravitas » est l’une des anciennes vertus romaines qui dénote le sérieux, la dignité et l’importance et qui évoque la retenue et la rigueur morale. Elle transmet un sentiment de responsabilité et d’engagement envers la tâche et, dans la Rome antique, elle était considérée comme une caractéristique idéale chez les dirigeants.

Chers collègues, le sénateur Dan Christmas, le leader intelligent, humble, aimable et très efficace de la communauté Membertou d’Unama’ki, est l’incarnation du terme « gravitas » et il inspire chacun d’entre nous à devenir de meilleures personnes et à prendre nos responsabilités, comme il le fait, avec sagesse et attention.

En 2017, dans son allocution à l’occasion de la conférence « Father Greg MacLeod Lecture », Dan a dit :

La leçon la plus importante que j’ai apprise est peut-être que, pour être efficace, un parlementaire doit être capable de parler franchement aux personnes au pouvoir.

Parler franchement sans monter sur ses grands chevaux et sans faire valoir sa position de pouvoir ou ses droits, mais plutôt en travaillant avec diligence pour susciter un dialogue utile et pragmatique, pas forcément pour énoncer une longue liste de plaintes sur des points négatifs, mais plutôt en travaillant de concert avec les autres pour trouver des options menant à une façon constructive de procéder.

Chers collègues, le sénateur Dan Christmas s’est joint à nous à la suite d’une brillante carrière en tant qu’agent de changements et il n’a pas dévié de ce rôle à la Chambre haute du Canada. Il a contribué à des changements positifs grâce à son rôle de président du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, à l’adoption du projet de loi C-15, la loi fondatrice de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, à son parrainage efficace du projet de loi C-68, qui modernise la Loi sur les pêches, à son travail important sur la pêche de subsistance convenable des Mi’kmaqs, et à de nombreuses autres contributions.

Pour nous, le sénateur Christmas a été un guide, une main tendue qui nous aidait à avancer dans la bonne direction.

En juin 2021, au sujet de la découverte tragique des 215 tombes non marquées à Kamloops, il a dit :

Aujourd’hui, le Canada est balayé par un raz-de-marée de larmes, que nous devons laisser couler. Notre peuple, mon peuple et, oui, votre peuple [...] sont accablés par le deuil et le chagrin. Nous pleurons la perte de nos bébés, de nos anges, de notre culture et de nos libertés, la rupture avec nos terres et nos traditions ainsi que la façon dont nous devons sans cesse nous battre pour convaincre le Canada qu’il doit comprendre, reconnaître et accepter qui nous sommes ainsi que les aspirations que nous continuons de vouloir réaliser.

Sénateur Dan Christmas, vous êtes, en mi’kmaq, un Kepmi‑de’lmut Nikan-es, c’est-à-dire un leader très respecté. Mon ami, votre héritage est immense. Nous vous remercions tous. Je suis honorée de vous connaître et je vous souhaite, ainsi qu’à votre magnifique famille, beaucoup de bonheur. Wela’lin, sénateur Christmas.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune des enfants du sénateur Chrismas, Peter, Lacey et Gail, ainsi que de ses petits-enfants Rawlin et Arya.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

L’honorable Dan Christmas

Remerciements

L’honorable Dan Christmas : Que puis-je dire? Chers amis et collègues, je tiens à vous remercier de tous vos bons mots au sujet de mon passage au Sénat. L’un des grands avantages de siéger au Sénat est de pouvoir rencontrer de nombreux sénateurs de toutes les régions du Canada et de tous les horizons, et de travailler avec eux. Vous êtes tous extrêmement doués, et votre bagage et vos expériences sont tellement variés que vous êtes véritablement un atout précieux pour notre grand pays.

Avant de poursuivre, je tiens à prendre un moment pour vous expliquer pourquoi j’ai décidé de quitter le Sénat bien avant la date de ma retraite obligatoire.

Comme on l’a mentionné, il y a trois ans, ma chère épouse, Dozay, a entrepris son voyage vers le monde des esprits. À ce moment-là, j’avais sérieusement envisagé de démissionner du Sénat. J’étais devenu le parent unique d’une fille de 9 ans et de mon chien, Westo. Il était impensable pour moi de ne pas être à la maison avec ma fille pendant son enfance.

Toutefois, un bon ami m’a conseillé de prendre le temps d’y réfléchir. Finalement, quelques mois plus tard, la pandémie de COVID est survenue, et nous avons commencé à tenir des séances hybrides. Cela m’a permis d’être à la maison avec ma fille tout en continuant de travailler comme sénateur.

Bien sûr, je savais qu’il faudrait un jour revenir aux séances en personne et que je devrais alors prendre une décision. J’ai pris la décision il y a quelques mois. Cependant, je tiens à vous assurer, mes chers collègues, que ma démission n’a rien à voir avec le travail du Sénat ni l’occasion de travailler avec vous tous. Si mes circonstances personnelles avaient été différentes, j’aurais été très heureux de continuer de travailler avec vous.

Je vous prie de ne pas penser que ma décision d’être avec ma famille a été difficile à prendre. Ce n’est pas le cas. Rien n’est plus gratifiant ou satisfaisant dans ma vie qu’être un père pour mes trois enfants et un grand-père pour mes deux petits-enfants. J’adore passer du temps avec eux, et je suis impatient d’élever ma fille cadette jusqu’à l’âge adulte.

(1040)

Un des faits saillants de ma carrière au Sénat a été ma participation au Comité des peuples autochtones et au Comité des pêches et des océans. J’ai eu le plaisir de travailler avec des présidents extraordinaires : d’abord, l’ancienne sénatrice Lillian Dyck, et maintenant, mon collègue et bon ami le sénateur Brian Francis au Comité des peuples autochtones, ainsi que le sénateur Fabian Manning au Comité des pêches et des océans. Je ne saurais les remercier suffisamment pour leur leadership, leur dur travail et leur sens solide de l’équité. Wela’lioq.

J’ai particulièrement aimé travailler avec le Comité des peuples autochtones. Nous avons eu le plaisir de travailler avec deux analystes exceptionnelles de la Bibliothèque du Parlement, Sara Fryer et Brittany Collier. Le comité a eu plusieurs greffiers au fil des ans, mais lorsque j’en ai assumé la présidence en 2020 et qu’Andrea Mugny en a été nommée la greffière, nous avons tous deux appris sur le tas, ensemble, très rapidement. Au bout du compte, je ne sais trop comment, nous avons réussi à maintenir notre tête hors de l’eau. Je crois certainement qu’Andrea est une étoile montante au Sénat du Canada.

J’ai aussi aimé prendre part aux travaux du Groupe de travail des sénateurs autochtones, mis sur pied en 2018 par l’ancien sénateur Murray Sinclair. Je salue mes prédécesseurs, soit le sénateur Patrick Brazeau et la sénatrice Sandra Lovelace Nicholas ainsi que les anciens sénateurs Charlie Watt, Lillian Dyck et Murray Sinclair. Je tiens à remercier les membres actuels, les sénateurs Marty Klyne, Dawn Anderson, Patti Laboucane-Benson, Mary Jane McCallum, Yvonne Boyer, Brian Francis et Michelle Audette. La sénatrice Josée Forest-Niesing est malheureusement décédée l’année dernière.

J’ai beaucoup aimé participer à nos réunions et à nos nombreuses discussions pendant ces réunions, et il est certain que cela me manquera énormément.

Je tiens aussi à offrir mes remerciements sincères à mes deux frères mi’kmaqs à Ottawa, le sénateur Brian Francis et le député Jaime Battiste. Ils m’ont toujours soutenu et n’ont jamais hésité à m’aider en cas de besoin, et croyez-moi, j’en ai eu besoin. Ils sont pour moi de vrais frères, dans tous les sens du terme. Wela’lioq.

J’ai également aimé faire partie du Groupe des sénateurs indépendants. Je me suis joint au groupe lorsqu’il a été mis sur pied, en 2016, par la regrettée Elaine McCoy. Depuis ce temps, j’ai aussi eu le plaisir de travailler avec deux excellents facilitateurs, le sénateur Yuen Pau Woo et la sénatrice Raymonde Saint-Germain. Je vous remercie, honorables collègues, de m’avoir accueilli dans votre groupe.

Je tiens également à remercier les membres de mon personnel, qui m’ont accompagné dès le début : Alan Fleming, qui a été comme un frère pour moi; Carol Pereira, qui a géré mon bureau d’Ottawa de façon incroyable; Karina Matthews-Denny, qui s’est occupée de notre bureau de Membertou; et Rosalie Francis, de Sipekne’katik, qui a fourni des conseils juridiques éclairés au fil du temps. Comment pourrais-je remercier suffisamment chacun d’entre vous? Un sénateur est aussi bon que son personnel. Vous m’avez certainement permis de faire le meilleur travail possible. Wela’lioq. Vous êtes tous des gens extraordinaires.

Et comment remercier suffisamment ma famille, qui me permet de faire ce travail? Je n’ai pas besoin de vous expliquer les incroyables sacrifices personnels qu’il faut faire pour servir en tant que sénateur : les longues heures, les réunions interminables, les nombreuses heures de voyage et les semaines passées loin de nos proches. Ce sont nos familles qui portent le fardeau de nos absences de la maison.

J’ai perdu ma femme pendant mon séjour au Sénat. Je dois tellement à ma famille : mon fils Peter; mes filles Lacey et Gail; et mes deux petits-enfants Rawlin et Arya. J’ai travaillé ici avec du temps emprunté à leurs vies. Il m’est impossible de les rembourser pour tout ce qu’ils m’ont donné pendant ces six années. Les trois dernières ont été particulièrement difficiles pour eux et pour moi, mais nous avons survécu et nous sommes toujours très proches. J’ai hâte d’entreprendre la prochaine partie de notre périple familial, peu importe ce qu’il sera.

Chers collègues, je ne vous souhaite que de belles choses pour l’avenir. Mes pensées et mes prières vous accompagneront toujours. Je vais continuer de surveiller vos travaux de temps en temps afin de voir comment les choses se passent. Mes années de service avec vous au Sénat ont été le point culminant de ma vie et de ma carrière.

Que notre Créateur bénisse chacune et chacun d’entre vous. Wela’lioq

Des voix : Bravo!


[Français]

PÉRIODE DES QUESTIONS

Les finances

Le taux d’inflation au Canada

L’honorable Leo Housakos : Ma question s’adresse au leader du gouvernement. La semaine dernière, je vous ai posé une question sur la « Justinflation ». Vous m’avez répondu en citant un rapport de la Banque Scotia qui, selon vous, dit que votre gouvernement n’a pas créé la « Justinflation ».

Laissez-moi citer le rapport en question des économistes Jean‑François Perreault et René Lalonde, qui mentionne ce qui suit : « [...] il est aussi absolument évident que les mesures d’aide pendant la pandémie auraient pu être rappelées plus rapidement [...]. » Je poursuis : « [...] le résultat inflationniste laisse entendre que la consolidation aurait dû intervenir à un rythme plus rapide. »

Selon ces économistes, il est clair que le gouvernement Trudeau n’a pas mis fin aux mesures relatives à la COVID assez rapidement, et que la spirale inflationniste que nous connaissons est directement attribuable à ce retard à réagir.

Sénateur Gold, quand allez-vous enfin reconnaître que la « Justinflation » a été créée par le gouvernement Trudeau?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question. Le gouvernement du Canada est fier de l’aide financière qu’il a accordée aux Canadiens et Canadiennes pendant la pandémie. Le rapport que vous avez cité démontre clairement que l’inflation est causée par de multiples facteurs, la grande majorité n’ayant rien à voir avec la décision, appuyée par les partis d’opposition et par le Sénat, d’accorder de l’aide aux personnes et aux entreprises pendant cette période. Le gouvernement du Canada reste fier et convaincu qu’il a pris la bonne décision en aidant les Canadiens durant cette période difficile.

Le sénateur Housakos : Sénateur Gold, il est évident que vous êtes en train de dire que vous êtes fier de la façon dont votre gouvernement a géré les finances publiques, mais la réalité, sur le plan des résultats, est catastrophique. Nous faisons face à un taux d’inflation historique.

Ce rapport de la Banque Scotia, que vous aimez beaucoup, est intitulé Les dérapages de la politique monétaire laissent des traces : Tableaux des prévisions de la Banque Scotia. Sénateur Gold, selon vous, qui était au volant lorsque la politique monétaire du Canada a dérapé de façon assez grave?

(1050)

Le sénateur Gold : Je vous remercie pour la question. Chaque fois que vous posez cette question, je vous rappelle que l’économie canadienne va bien, même très très bien, par rapport aux autres pays développés du G7. De plus, notre statut dans le secteur financier, selon les entités qui évaluent notre fiabilité fiscale, est bien solide. Je répète : le gouvernement a fait ce que tout gouvernement doit faire face à une crise presque existentielle pour l’économie et la vie des Canadiens pendant cette pandémie. Le gouvernement va continuer de faire tout ce qu’il faut pour aider les Canadiens.

Le commerce international

L’épandage des boues d’épuration municipales

L’honorable Claude Carignan : Ma question s’adresse au leader du gouvernement.

Le Maine a adopté un nouveau règlement qui interdit l’épandage des boues d’épuration municipales. On parle ici de boues provenant des stations d’épuration municipales. Pour se débarrasser de ces substances, les boues et matières biosolides sont exportées au Canada et épandues dans les champs des agriculteurs ici, au Québec.

Les experts en commerce international affirment qu’aucune règle n’interdit l’importation — ou exportation, selon le cas — de boues d’épuration municipales. Qu’entend faire le gouvernement pour que cette importation de boues d’épuration municipales cesse? Je vous laisse imaginer ce qu’elles contiennent.

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie pour la question. Je vais faire des recherches auprès du gouvernement pour mieux comprendre l’enjeu et la direction que le gouvernement entend prendre à cet égard. Je reviendrai au Sénat avec une réponse dès que je l’aurai reçue.

Le sénateur Carignan : Pourriez-vous également demander si des études existent au sujet des conséquences que peut entraîner l’utilisation des boues de stations d’épuration municipales sur les produits consommés? Ne devrait-on pas faire preuve de prudence devant l’incertitude qui existe à cet égard?

Le sénateur Gold : Encore une fois, merci de la question et de la suggestion. Je vais ajouter cet élément à mes recherches.

[Traduction]

Les affaires étrangères

Les relations sino-canadiennes

L’honorable Yuen Pau Woo : Sénateur Gold, dans les derniers jours, la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement Jody Thomas, la ministre des Affaires étrangères Mélanie Joly, le ministre des Affaires intergouvernementales, de l’Infrastructure et des Collectivités Dominic LeBlanc, ainsi que d’autres hauts fonctionnaires ont confirmé qu’ils ne sont au courant d’aucune ingérence de la part de la Chine en ce qui concerne 11 candidats aux élections de 2019. Même si c’est le cas, une chasse aux sorcières est en cours pour trouver le nom des 11 candidats et l’identité d’un certain nombre de travailleurs de campagne électorale et de membres du personnel politique qui sont aussi soupçonnés d’avoir été financés par le gouvernement chinois.

Il n’est pas surprenant que les Canadiens d’origine chinoise soient parmi les personnes les plus susceptibles d’être en butte aux soupçons. Que fait le gouvernement pour mettre fin à ce genre de spéculation irresponsable?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie, sénateur Woo, de poser cette question et de mettre en lumière l’effet qu’a cette situation sur la communauté sino-canadienne.

Il existe malheureusement, comme on le sait, de réelles préoccupations au sujet de l’ingérence de la Chine dans nos institutions. Cela a été souligné, notamment, par le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, et des enquêtes sont d’ailleurs en cours. Il est encourageant de savoir que rien ne démontre que les élections tenues récemment n’étaient pas intègres.

L’inquiétude que vous exprimez est bien réelle. Je sais que des enquêtes sont en cours, mais je ne sais pas ce que le gouvernement fait, ou envisage de faire, pour rassurer les membres de la communauté sino-canadienne qui ont l’impression d’être sous les projecteurs ou se sentent ciblés. Les Canadiens peuvent avoir l’assurance que le gouvernement mène des enquêtes approfondies au sujet des allégations et qu’une fois les enquêtes terminées, d’autres faits seront communiqués.

Le sénateur Woo : Cette allégation émane d’un article de Global News qui ne nommait aucune source. De plus, aucun autre média d’information n’a validé cette nouvelle par la suite. Pourtant, cette histoire a été répétée ad nauseam par d’autres médias et par les membres des deux Chambres. Si cette histoire est réellement fausse, elle a sérieusement entaché notre démocratie. En fait, ce type de reportage correspond à du déni électoral.

Pourquoi le gouvernement ne dénonce-t-il pas un exemple aussi flagrant de désinformation?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question.

Comme je l’ai dit, le gouvernement enquête sur ces allégations. D’ici à ce que les enquêtes soient terminées, le gouvernement n’est pas en mesure de se prononcer sur ces histoires, quelle qu’en soit la nature.

Je le répète, le gouvernement prend très au sérieux non seulement ces allégations, mais aussi leur incidence sur la population. Les enquêtes sont en cours.

Les sanctions économiques

L’honorable Donna Dasko : Sénateur Gold, un sondage d’opinion commandé par la sénatrice Omidvar et moi-même a été publié cette semaine. On y apprend que les Canadiens appuient fortement la saisie des biens canadiens détenus par les responsables russes qui font la guerre en Ukraine et les responsables iraniens qui violent les droits de la personne en Iran, ainsi que l’utilisation de ces biens saisis pour venir en aide aux victimes.

En fait, en juin dernier, comme vous le savez monsieur le sénateur, le projet de loi C-19 a amélioré deux régimes de sanctions du Canada, soit la loi de Sergueï Magnitski et la Loi sur les mesures économiques spéciales, pour aller au-delà du gel des avoirs des dirigeants étrangers corrompus en permettant leur confiscation et leur redistribution.

Mes questions sont les suivantes, et j’aimerais me concentrer sur l’utilisation actuelle de ces outils, en particulier contre les responsables russes. Le gouvernement a-t-il recours à ces nouveaux outils? Quels efforts sont déployés? Quelles mesures sont prises? Quels plans sont mis au point pour réaffecter ces avoirs, notamment à titre d’indemnisation possible pour l’Ukraine?

Merci.

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre importante question, madame la sénatrice.

Pour ce qui est de la dernière partie de votre question, comme tous les sénateurs le savent, le gouvernement a recours à des sanctions de type Magnitski pour exercer de la pression sur le régime russe et le faire répondre de ses actes, mais le gouvernement a maintenant de nouvelles mesures pour aller plus loin, non seulement pour saisir, mais aussi pour permettre la confiscation des actifs des oligarques et de leurs entreprises. Je crois comprendre, madame la sénatrice, que des démarches sont en cours pour mettre en œuvre le processus de liquidation, qui permettrait au Canada d’indemniser les victimes et de soutenir la reconstruction. Ces outils qui sont maintenant à notre disposition feront du Canada un chef de file du régime de sanctions, si je peux m’exprimer ainsi, au sein des pays du G7.

Alors que le gouvernement travaille à la mise en œuvre de ces outils, il prend également des mesures analogues pour aider l’Ukraine. Je ne citerai qu’un exemple. Nous savons maintenant que la vice-première ministre et ministre des Finances a récemment annoncé que le Canada transférera 150 millions de dollars de recettes douanières perçues sur les importations en provenance de Russie et du Bélarus pour réparer le réseau électrique de Kiev à la suite des attaques répétées et soutenues de la Russie.

Ce n’est qu’un exemple de l’engagement du Canada à exiger des comptes à la Russie et à ses oligarques, et à utiliser les outils dont il dispose maintenant pour veiller à ce que ces actifs soient utilisés à la fois pour la reconstruction et pour l’aide à l’Ukraine, ainsi que pour l’indemnisation des personnes qui ont été lésées par les actions de la Russie dans le cadre de son invasion illégale.

(1100)

[Français]

Le patrimoine canadien

Le développement du soccer au Canada

L’honorable Amina Gerba : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, depuis quatre semaines, la planète entière est tournée vers le Qatar. Cela se justifie par la Coupe du monde de soccer, qui tire à sa fin ce week-end.

Dans notre pays, nous avons vu l’effervescence des Canadiens, le sentiment d’appartenance nationale et une union totale autour des Rouges, notre équipe nationale de soccer.

Outre l’épanouissement physique des Canadiens, le soccer a donné une vitrine internationale au Canada. Ce sport illustre la grande diversité de couleurs et d’origines de chacun d’entre nous, ainsi que le caractère multiculturel de notre pays.

Considérant la participation historique du Canada à la Coupe du monde de soccer de 2022 au Qatar, et considérant le fait que le Canada accueillera la Coupe du monde de 2026 avec les États-Unis et le Mexique, que fait le gouvernement du Canada pour soutenir ce sport international qui est très peu développé dans notre pays?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie pour la question. Le gouvernement est très fier d’accueillir la Coupe du monde de la FIFA de 2026 au Canada avec nos partenaires nord-américains : le Mexique et les États-Unis.

Le soutien sportif, au Canada, engage de nombreux intervenants, dont le gouvernement du Canada, le secteur privé, les gouvernements provinciaux et territoriaux, les organismes nationaux de services multisports (OSM), les organismes nationaux de sport (ONS) et les centres et instituts canadiens de sport.

En tant que principal investisseur dans le système sportif amateur du Canada, le gouvernement du Canada joue un rôle important dans ce système. Par l’entremise de Sport Canada, le gouvernement élabore des programmes et des politiques pour aider le système sportif à répondre aux besoins des Canadiens. Il existe de nombreux programmes de financement qui appuient les athlètes de haut niveau et des organisations canadiennes qui accueillent des événements sportifs, dont le Programme d’aide aux athlètes, le Programme d’accueil et le Programme de soutien au sport.

Je note que dans le cadre du Programme de soutien au sport, le gouvernement s’est engagé à fournir 60 millions de dollars sur deux ans afin d’aider les organisations nationales déjà bénéficiaires qui peinent, pour des raisons financières, à instaurer leurs programmes et services en raison de la COVID-19, et jusqu’à concurrence de 6 millions en 2021-2022 pour aider les athlètes olympiques et paralympiques à payer leurs frais de déplacement attribuables aux exigences liées à la compétition.

La sénatrice Gerba : Sénateur Gold, je vous remercie pour votre réponse. En 2020, notre équipe féminine de soccer a remporté la médaille d’or olympique.

Le 5 décembre dernier, deux anciennes joueuses de la sélection canadienne féminine de soccer, Christine Sinclair et Diana Matheson, ont annoncé la création d’une ligue professionnelle de soccer féminin au Canada en 2025. Quel appui le soccer féminin peut-il espérer de la part du gouvernement pour son développement dans notre pays?

Le sénateur Gold : Je vous remercie pour la question. Le gouvernement est très fier de nos athlètes féminines.

Je tiens à souligner que dans le budget de 2018, le gouvernement a annoncé qu’il avait pour objectif d’atteindre l’équité entre les genres dans le sport à tous les niveaux d’ici 2035 et a consacré 30 millions de dollars sur trois ans à cet effet.

De plus, je note que dans le budget de 2021, le gouvernement s’est engagé à verser 1,9 milliard de dollars afin d’appuyer notamment le secteur du sport pour favoriser sa croissance, en plus de contribuer à la création de bons emplois pour la classe moyenne.

Le gouvernement du Canada continue de travailler avec l’ensemble des partenaires sportifs afin de s’assurer que nous créons collectivement un milieu sportif sécuritaire et inclusif pour tous.

En ce qui a trait au soccer féminin en particulier, c’est avec plaisir que je ferai un suivi auprès du gouvernement et que je reviendrai avec une réponse pour la Chambre.

[Traduction]

L’immigration, les réfugiés et la citoyenneté

Les relations Canada-Russie

L’honorable Percy E. Downe : Ma question s’adresse au sénateur Gold. Je ne vais pas poser ma question habituelle sur les questions écrites qui demeurent sans réponse. J’en ai une nouvelle à poser pour terminer la session, sénateur Gold.

Il n’y a pas seulement le gouvernement chinois qui tente de miner la démocratie canadienne, lui qui a ouvert, paraît-il, des postes de police sur notre territoire et qui s’est ingéré dans nos élections : c’est aussi le cas du gouvernement russe. Dans les années 1980, l’ancienne Union soviétique a fait entrer en douce au Canada deux espions qui ont volé l’identité de deux enfants canadiens décédés. Ils se sont servis de notre pays pour s’infiltrer aux États-Unis, leur véritable destination, car c’était des agents dormants attendant d’être activés pour servir leur mère patrie, la Russie.

Ces faux Canadiens, Donald Heathfield et Tracey Foley, se nommaient en réalité Andreï Bezroukov et Elena Vavilova. Ces espions ont vécu au Canada pendant de nombreuses années pour asseoir leur couverture en fréquentant l’université, puis en travaillant. Pendant cette période, le couple a eu deux enfants.

En 2010, après leur déménagement aux États-Unis, ils comptaient parmi les 10 agents russes arrêtés par le FBI et ils ont été expulsés vers la Russie. Là-bas, le président Poutine leur a accordé une foule d’honneurs et il leur a donné des postes importants au sein de leur service du renseignement.

Pourquoi le gouvernement du Canada continue-t-il d’autoriser les deux enfants de ce couple, qui sont maintenant adultes, à voyager dans le monde comme citoyens canadiens avec des passeports canadiens, étant donné que leur citoyenneté est fondée sur des mensonges et la duplicité de leurs parents? Ne peut-on pas révoquer leur citoyenneté?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de soulever ce cas et je vous sais gré de votre question. Je devrai me renseigner auprès du gouvernement au sujet de cette affaire. Normalement, comme vous devez le savoir, même si j’avais la réponse, je ne suis pas certain qu’il soit approprié de traiter de certains cas particuliers. Je ne suis pas au courant de la situation, alors je dois me renseigner.

Le sénateur Downe : Je comprends, sénateur Gold. J’attendrai votre réponse avec impatience.

Vous devez également savoir que lorsque les agents du FBI ont fait enquête sur les parents, ils ont entendu une conversation au domicile familial — la maison était sous écoute — selon laquelle les enfants du couple étaient eux aussi disposés à servir la Russie.

Comme je l’ai dit, ces enfants, qui sont titulaires d’un passeport canadien, sont maintenant des adultes. Ils peuvent aller n’importe où dans le monde, sauf aux États-Unis, où ils sont interdits de territoire. Ils peuvent même s’installer au Canada, où ils bénéficieraient d’une entière protection et de plein droit — sans aucune restriction —, pour agir au nom de la Russie.

Même s’ils ne souhaitent pas faire de l’espionnage pour le compte de la Russie, est-ce que Poutine leur laisserait le choix, ou risqueraient-ils de tomber d’une fenêtre? Ils n’ont peut-être pas le choix, mais le Canada, si. Nous avons le choix d’adopter la même position que le Royaume-Uni en reconnaissant la nouvelle réalité dans laquelle nous vivons, soit que le Canada a des ennemis, notamment la Chine et la Russie, qui tentent de miner sa démocratie. Le Royaume-Uni a adopté une mesure législative prévoyant la révocation de la citoyenneté si elle a été obtenue frauduleusement. Le Canada devrait suivre le courant et adopter une mesure similaire dans le cas qui nous intéresse ici.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Gold : Merci pour votre question. Le Canada est lucide quant aux menaces que certains pays, dont la Russie, font peser sur notre démocratie.

Il ne ressort pas clairement de votre question — et je ne dispose certainement pas d’information à ce sujet — que les enfants à qui vous faites référence ont obtenu leur citoyenneté de façon frauduleuse. Comme je l’ai dit, je ne veux pas présumer de ce que je ne sais pas. Je vais me renseigner et, dans la mesure où je pourrai en rendre compte, je le ferai.

Le Cabinet du premier ministre

L’éthique et la transparence

L’honorable Leo Housakos : Ma question s’adresse au leader du gouvernement et elle porte sur un domaine où le gouvernement libéral Trudeau excelle, à savoir la violation du Code régissant les conflits d’intérêts des députés. Cette semaine, le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique a signalé au Parlement que la ministre Mary Ng avait enfreint le code à deux reprises. Elle a en effet accordé deux contrats à une proche du Parti libéral qui est aussi une amie personnelle, à hauteur de dizaines de milliers de dollars, sans respecter la procédure établie.

(1110)

Je sais que, pour mes collègues du Groupe des sénateurs indépendants qui sont au Parlement depuis peu, cela semble être généralement accepté au sein du nouveau gouvernement Trudeau, mais dans un régime parlementaire de Westminster, du moins c’était le cas jusqu’en 2015, les conventions veulent qu’un ministre qui fait quelque chose de scandaleux ou qui enfreint le code d’éthique rende des comptes. Ce concept semble être complètement étranger au gouvernement Trudeau.

Ma question est bien simple, monsieur le leader du gouvernement. Quand le premier ministre Trudeau mettra-t-il à la porte la ministre Ng pour sa violation du code d’éthique?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question. D’abord et avant tout, le gouvernement tient à remercier le commissaire du rôle important qu’il joue pour le maintien de la transparence et de la responsabilité au sein des institutions canadiennes. Comme l’indique son rapport, la ministre Ng assume pleinement la responsabilité de ses actes. Elle a reconnu qu’elle aurait dû se récuser et elle s’est excusée de ne pas l’avoir fait.

On m’a assuré qu’à aucun moment quelqu’un n’a tenté d’obtenir un avantage indu. La ministre s’astreint à des normes élevées en matière de transparence et de responsabilité et les Canadiens sont en droit de s’y attendre. La ministre s’est excusée et elle ne recommencera pas.

Le sénateur Housakos : Sénateur Gold, je suis heureux d’entendre que le gouvernement remercie le commissaire de son travail. L’ensemble du Parlement remercie le commissaire de son travail.

Cependant, il n’est pas nécessaire que le premier ministre remercie le commissaire de son travail. Par contre, il faudrait que le premier ministre commence à faire le sien. Au final, le Parlement a la responsabilité de s’assurer que les ministres agissent de la manière la plus éthique qui soit. Lorsqu’ils manquent à ce devoir, il ne suffit pas, comme à la maternelle, d’aller s’excuser auprès du directeur de l’école et de promettre de ne pas recommencer. En effet, il est question de l’argent des contribuables et du code d’éthique qui s’applique au Parlement et au gouvernement.

Quand le gouvernement va-t-il commencer à faire son travail? Le problème est-il que le premier ministre ne peut plus obliger les ministres à rendre des comptes car, ayant lui-même enfreint le code d’éthique à plusieurs reprises, il serait plutôt hypocrite de sa part de se débarrasser de ministres pour ce motif? Est-ce là le problème, monsieur le leader du gouvernement? Comment le régler?

Le sénateur Gold : Non, ce n’est pas là le problème. Je vous remercie de votre question. La ministre s’est excusée et le premier ministre a accepté ses excuses.

La sécurité publique

L’influence étrangère au Canada

L’honorable Leo Housakos : De toute évidence, nous sommes conscients que le gouvernement actuel est corrompu et qu’il refuse d’assumer la responsabilité de ses manquements graves.

Ma prochaine question, et j’espère y obtenir une réponse, est plutôt liée à l’incompétence. Elle fait suite à la question du sénateur Downe, et nous avons soulevé ce sujet à maintes reprises. Nous constatons que le monde est devenu de plus en plus dangereux. La démocratie est plus menacée que jamais. L’influence étrangère est un véritable problème sur les réseaux sociaux. Les institutions canadiennes subissent une influence, que l’on pense aux secteurs universitaire, politique, culturel ou autres. Que fait le gouvernement pour lutter contre l’influence étrangère au sein de nos institutions et de notre pays? Quelles mesures concrètes prend-il?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. L’allégation selon laquelle le gouvernement est corrompu est inacceptable et indigne de la loyale opposition de Sa Majesté, même au Sénat.

Cela dit, j’ai indiqué à maintes reprises que le gouvernement prend toutes les mesures nécessaires pour protéger le Canada contre l’ingérence étrangère, y compris des enquêtes appropriées, tant par la GRC que par nos forces de sécurité. Il tient les dirigeants de ces gouvernements responsables de leurs actes en imposant des sanctions de plus en plus sévères et en exigeant des réponses de leurs représentants au Canada. Le gouvernement continuera à faire ce qui est nécessaire pour protéger nos institutions.

Heureusement, le Canada dispose d’un système de sécurité très solide, et des mesures sont en place pour protéger l’intégrité de nos élections et de nos institutions. Le gouvernement continuera à travailler pour renforcer ces institutions et à utiliser toute leur vigueur pour protéger les intérêts des Canadiens.

Le sénateur Housakos : Sénateur Gold, ce n’est pas moi qui qualifie ce gouvernement de corrompu. C’est le commissaire à l’éthique qui, à plusieurs reprises, a dit que le premier ministre et certains ministres avaient enfreint le code. D’ailleurs, l’ancienne ministre de la Justice a dû démissionner quand elle a essayé de demander des comptes au gouvernement. Il semble que la ministre Wilson-Raybould soit la seule ministre à qui on a demandé des comptes parce qu’elle a dit la vérité et qu’elle a été renvoyée.

Pour en revenir à votre piètre réponse concernant l’ingérence et l’influence étrangères, la vérité est que ce problème s’est aggravé au cours des deux dernières années, monsieur le leader du gouvernement. Jusqu’à il y a une semaine, ce problème n’avait pas du tout été abordé par votre gouvernement. Nous avons un projet de loi au Sénat qui traîne, et le gouvernement l’a mis sur la glace.

Le gouvernement n’a pris aucune mesure législative pour lutter contre l’influence étrangère, à l’exception d’une déclaration faite il y a quelques semaines par le ministre de la Sécurité publique, qui a dit qu’il s’agissait d’une question qu’il étudierait et réexaminerait au cours de la nouvelle année. C’est ce qu’a dit ce ministre lors d’une conférence de presse.

Pourquoi le gouvernement a-t-il mis si longtemps pour agir concrètement? La seule promesse qui a été faite est de revoir la situation au cours de la nouvelle année. Voilà toute la question. La question est de savoir quand le gouvernement passera à l’action plutôt que de faire de beaux discours.

Le sénateur Gold : Eh bien, cela doit être réconfortant de pouvoir analyser des questions complexes de manière aussi simpliste. Comme le savent tous les sénateurs — ou comme ils devraient le savoir, à mon avis —, outre la présentation de projets de loi, on prend de nombreuses autres mesures pour protéger nos institutions. Cela comprend, comme je l’ai déjà dit, le travail vigoureux de nos agences de renseignements et de nos organismes d’application de la loi, ainsi que les efforts diplomatiques qu’on continue de déployer. Les Canadiens peuvent être certains que le gouvernement prend ces responsabilités très au sérieux et qu’il utilise tous les outils à sa disposition pour protéger les institutions canadiennes et les intérêts du pays.

Les pêches et les océans

La Commission des pêcheries des Grands Lacs

L’honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, pendant 68 ans, la Commission des pêcheries des Grands Lacs a travaillé en partenariat avec l’Ontario, huit États bordant les Grands Lacs, quelque 40 collectivités autochtones, d’innombrables intervenants universitaires et les gouvernements fédéraux du Canada et des États-Unis. Ses objectifs sont définis dans un traité binational. Toutefois, cet héritage positif est maintenant menacé. Le Canada n’a pas financé ce travail à la hauteur de ce qui avait été convenu, et notre partenaire, les États-Unis, est très frustré.

Le mois dernier, la section des États-Unis s’est retirée parce que le Canada n’a pas respecté ses promesses. La section des États-Unis a dit qu’elle ne participerait plus à la commission à moins que le Canada finance cette dernière selon le niveau convenu. La Commission des pêcheries des Grands Lacs est un outil essentiel pour notre relation binationale.

Sénateur Gold, dans le budget de 2022, que nous avons mis aux voix et adopté, le gouvernement a promis de consacrer 19,6 millions au financement de la Commission des pêcheries des Grands Lacs. Pourquoi, alors, le ministère des Pêches et des Océans a-t-il retenu les fonds promis à la commission? Merci.

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je ne connais pas la réponse à cette question. Je suis heureux que les fonds aient été affectés. Je vais me renseigner.


ORDRE DU JOUR

Les travaux du Sénat

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’article 4-13(3) du Règlement, j’informe le Sénat que, lorsque nous passerons aux affaires du gouvernement, le Sénat abordera les travaux dans l’ordre suivant : la troisième lecture des projets de loi C-32, C-36 et S-11, suivie de tous les autres articles dans l’ordre où ils figurent au Feuilleton.

Projet de loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2022

Troisième lecture—Débat

L’honorable Tony Loffreda propose que le projet de loi C-32, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 3 novembre 2022 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022, soit lu pour la troisième fois.

 — Honorables sénateurs, c’est un honneur pour moi de m’exprimer à nouveau sur le projet de loi proposé par le gouvernement portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne, de même que certaines dispositions du budget déposé au Parlement le printemps dernier.

Il y a deux jours, à l’étape de la deuxième lecture, j’ai parlé abondamment de certaines des mesures principales contenues dans le projet de loi C-32. Aujourd’hui, à l’étape de la troisième lecture, je vais me concentrer sur deux questions au sujet desquelles le comité a soulevé des préoccupations. Comme promis, je vais donner plus de précisions.

La première question porte sur la sous-alinéa g) de la partie 1, à la rubrique « Sommaire », où il est prévu d’élargir les obligations de reddition compte des fiducies, touchant l’enjeu du secret professionnel. La deuxième question porte sur la section 3 de la partie 4, où l’on énonce la Loi sur l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres de premières nations.

En ce qui concerne la sous-alinéa g) de la partie 1, à la rubrique « Sommaire », et les fiducies — comme je l’ai expliqué mardi —, le gouvernement espère que le projet de loi C-32 permettra d’améliorer la collecte de renseignements sur la propriété effective des fiducies en proposant d’obliger ces dernières à fournir de l’information additionnelle chaque année à l’Agence du revenu du Canada.

(1120)

Présentement, une fiducie qui n’a aucun revenu ou qui n’a fait aucun versement au cours d’une année n’a habituellement pas à remplir de formulaire T3 de déclaration de revenu. Le projet de loi C-32 change la situation.

En outre, lorsqu’une fiducie sera tenue de produire une déclaration de revenu, elle devra indiquer l’identité de tous ses fiduciaires, bénéficiaires et auteurs, ainsi que celle de toute personne en mesure d’exercer une influence sur les décisions du fiduciaire concernant l’affectation du revenu ou du capital de la fiducie.

Le gouvernement propose ces modifications afin d’aider l’Agence du revenu du Canada à recueillir suffisamment d’information pour établir les obligations fiscales des contribuables et lutter efficacement contre l’évitement fiscal abusif, ainsi que l’évasion fiscale, le blanchiment d’argent et d’autres activités criminelles.

La cueillette de ces renseignements permettrait également au Canada de se conformer à ses obligations internationales en matière de transparence et de propriété effective. C’est le point qu’a souligné la ministre Freeland lorsqu’elle est venue témoigner au comité il y a une semaine. Elle a dit :

[...] à mon sens, il est vraiment important que le Canada fasse beaucoup mieux que ce qu’il a fait jusqu’à maintenant en matière de propriété effective. Il s’agit d’un élément important de l’équité fiscale. Il s’agit d’un élément important pour que le Canada puisse se mettre au niveau des normes de ses pairs à l’internationale. Je crois fermement au travail que nous accomplissons au sujet de la propriété effective.

Il convient également de souligner que les comptes fiduciaires généraux des avocats sont exemptés de ces exigences de déclaration.

En outre, ces règles prévoient expressément que les nouvelles exigences de déclaration ne s’appliquent pas aux renseignements qui sont assujettis au secret professionnel de l’avocat. Cette exclusion générale a été ajoutée au projet de loi et se trouve à la ligne 3, page 59 du projet de loi C-32.

La disposition se lit comme suit :

Il est entendu que les paragraphes (1.1) à (1.3) n’ont pas pour effet d’exiger la communication d’informations assujetties au privilège des communications entre client et avocat.

Le ministère des Finances nous a informés que cette exemption générale a été ajoutée en réponse aux préoccupations soulevées par l’Association du Barreau canadien et d’autres juristes. En effet, l’Association du Barreau canadien et la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada ont exprimé des réserves quant à la constitutionnalité de cette nouvelle exigence de déclaration. L’Association du Barreau canadien soutient que « les modifications ne résisteraient pas à un examen constitutionnel, compte tenu de la jurisprudence émise par la Cour suprême du Canada », et que les obligations de déclaration proposées pour les comptes en fiducie propres aux clients sont incompatibles avec l’article 8 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Pour sa part, la fédération estime que :

[…] cette disposition générale est ambiguë et ne suffit pas à prévenir les violations probables du secret professionnel lorsque les juristes tentent de se conformer à l’obligation de déclarer les informations sur les comptes fiduciaires distincts.

Dans son énoncé concernant la Charte, le ministre de la Justice a reconnu que cette nouvelle obligation de fournir des renseignements sur les fiducies « pourrait porter atteinte à l’article 8 de la Charte ». Toutefois, on peut ensuite lire ce qui suit :

[…] le ministre n’a pas relevé d’effets possibles qui pourraient constituer une atteinte déraisonnable au droit à la vie privée protégé par l’article 8 de la Charte.

De toute évidence, je ne peux pas parler au nom du ministre ou du gouvernement, mais, à mon avis, l’exemption générale qui s’applique au privilège des communications entre client et avocat assure le respect de ce privilège et veille à ce que la capacité des avocats de s’acquitter de leurs obligations envers leurs clients ne soit pas entravée.

La ministre Freeland nous a dit qu’elle était persuadée que cette disposition est constitutionnelle. Elle a aussi indiqué que les fonctionnaires de son ministère et elle se sont penchés sur cette question de manière très approfondie. Ils ont mené des consultations, et elle croit qu’ils ont trouvé le juste équilibre.

En réponse à ma question, la ministre a été on ne peut plus claire quand elle affirmé ceci : « Nous avons confiance dans le fait que cette mesure n’exige pas la divulgation de renseignements protégés par le secret professionnel de l’avocat. »

La semaine dernière, le Comité des finances nationales a eu l’occasion d’entendre de nouveau des fonctionnaires du ministère des Finances afin qu’ils puissent répondre à toutes les questions en suspens. J’ai demandé à Mme Lindsay Gwyer, directrice générale de la législation, de nous fournir des renseignements supplémentaires sur la question. Elle a souligné que le gouvernement avait mené de vastes consultations, et elle a expliqué que l’exemption générale relative au privilège des communications entre client et avocat avait été prévue pour prendre en considération la décision de la Cour suprême qui donnait une interprétation large de ce privilège.

Cette exemption constitue une réponse directe à la décision de la cour et aux interventions des parties prenantes, afin de veiller à ce que ces règles permettent aux avocats de ne pas signaler toute information qui, selon une interprétation large, serait considérée comme un secret professionnel, comme l’a souligné Mme Gwyer :

Les exceptions que nous prévoyons dans la réglementation visent à trouver un juste équilibre entre l’exemption totale de tout compte fiduciaire qu’un avocat ne pourrait jamais ouvrir et la mise en place d’exceptions ciblées, tout en précisant qu’il n’est pas nécessaire de fournir les renseignements protégés par le secret professionnel.

Chers collègues, je ne suis pas avocat, mais j’ai consulté certains de nos collègues du Sénat qui le sont, et ils partagent l’avis du gouvernement sur cette question.

En fin de compte, j’ajouterai simplement que je conviens que le secret professionnel est essentiel à la bonne administration de la justice dans notre pays. Le gouvernement est de cet avis et il estime avoir trouvé le juste équilibre en protégeant ce privilège par l’exemption générale prévue dans le projet de loi.

J’aimerais maintenant porter mon attention sur la section 3 de la partie 4 du projet de loi, qui traite de la Loi sur la gestion des terres des premières nations. Nos collègues, les sénateurs McCallum, Francis et Patterson, ont déjà parlé de cette question. Je ne répéterai pas tout ce qu’ils ont dit ni la chronologie des événements, mais permettez-moi de vous fournir plus de précisions sur la question.

Honorables sénateurs, comme vous le savez, pour la plupart des Premières Nations, les terres des réserves sont gérées par le Canada, conformément à la Loi sur les Indiens. L’Accord-cadre relatif à la gestion des terres des premières nations permet aux Premières Nations participantes d’adopter et d’administrer leurs propres codes fonciers et de se soustraire à l’application des dispositions de la Loi sur les Indiens relatives aux terres. Cet accord-cadre a été ratifié par voie législative en 1999. Aujourd’hui, près de 25 ans plus tard, le gouvernement propose une nouvelle mesure législative pour que l’accord-cadre devienne le principal instrument de référence en matière de gestion des terres par les Premières Nations. Il fallait mettre de l’ordre dans les dispositions législatives actuelles qui contenaient des incohérences et pouvaient semer la confusion, et c’est exactement ce que ferait le projet de loi C-32 en faisant de l’accord-cadre le document de référence à consulter pour connaître les dispositions législatives en la matière.

Les nouvelles dispositions législatives proposées se trouvent aux pages 144 à 155 du projet de loi C-32 et ont été élaborées conjointement par le Conseil consultatif des terres et les organisations autochtones qui représentent les Premières Nations signataires des accords-cadres.

Le gouvernement soutient que le remplacement de la Loi sur la gestion des terres des premières nations moderniserait le processus de gestion des terres des Premières Nations de manière à ce qu’il soit mieux aligné sur les besoins et les attentes des Premières Nations signataires et à reconnaître le principe voulant que la gestion des terres des Premières Nations soit menée par les Premières Nations elles-mêmes.

Comme je l’ai mentionné mardi dernier, la mesure législative proposée a l’appui de 194 Premières Nations dans l’ensemble du pays, dont la plupart en sont au processus d’élaboration ou de mise en œuvre prévu par la loi.

Lorsque Mme Roxanne Gravelle, de Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada, a comparu devant le comité, elle a fort bien résumé le nouveau projet de loi comme suit :

[Il] sera plus court, plus simple et indiquera que l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres des premières nations constitue l’autorité centrale en vertu de laquelle les Premières Nations délaisseront les 44 dispositions de la Loi sur les Indiens concernant les terres […]

Il réduit considérablement le processus et les démarches bureaucratiques requises pour modifier l’accord-cadre, puisque les Premières Nations passeront par le Conseil consultatif des terres des Premières Nations pour communiquer les changements souhaités et les défendre […]

Je prendrai maintenant un moment pour parler de préoccupations qui ont été exprimées par les MKO — les Manitoba Keewatinowi Okimakanak — et ont grandement retenu l’attention des sénateurs. Le sénateur Patterson nous a rappelé que, dans le mémoire qu’ils ont soumis, les MKO employaient des termes très forts pour parler des lacunes dans l’application des règlements créés par des Premières Nations en vertu des pouvoirs que la Loi sur la gestion des terres des premières nations confère aux collectivités des Premières Nations, et que les MKO ont suggéré d’apporter des modifications de coordination à diverses mesures législatives connexes dans le but de régler les préoccupations importantes concernant l’application des dispositions de la nouvelle Loi sur la gestion des terres des premières nations.

La semaine dernière, Mme Gravelle a expliqué au comité que, lorsqu’ils ont commencé à rédiger le projet de loi, leur objectif était de simplifier la loi et de voir à ce que « l’accord-cadre soit l’autorité centrale en vertu de laquelle les Premières Nations gèrent leurs terres ».

Elle a clairement dit qu’ils n’avaient pas les pouvoirs nécessaires en matière de politiques pour aller au-delà de la portée de la loi actuelle. Le gouvernement est conscient des préoccupations soulevées par les MKO au sujet de l’application et reconnaît qu’il existe certains défis. Selon Mme Gravelle, le Conseil consultatif des terres est justement en pourparlers avec les Premières Nations signataires au sujet de l’application. En fait, elle a même laissé entendre que le projet de loi C-32 donnera force de loi à l’entente‑cadre et qu’il permettra au Conseil consultatif des terres de mettre en œuvre des solutions ou des changements beaucoup plus facilement. Il ne serait plus nécessaire de présenter des changements législatifs complexes.

(1130)

À mon avis, les MKO ont des préoccupations légitimes qui méritent qu’on s’y attarde davantage, et je crois, en tout respect, que les parlementaires ne sont peut-être pas les mieux placés, si tard dans le processus, pour faire progresser les exigences des MKO sans tenir un débat approfondi. De plus, les modifications proposées par les MKO à la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada et à la Loi sur le directeur des poursuites pénales sont peut-être légèrement hors sujet pour l’instant, car ces deux lois ne figurent même pas dans le projet de loi C-32. Les points soulevés sont valables, mais il serait peut-être préférable de les aborder par d’autres voies.

Comme je l’ai dit mardi, dans une lettre datée du 9 décembre, le chef Robert Louie, président du Conseil consultatif des terres, confirme que le conseil « appuie généralement la position des MKO et ses efforts relativement à l’application des lois des Premières Nations », mais ne peut appuyer un amendement au projet de loi pour les raisons suivantes :

Nous n’avons pas l’approbation de tous les signataires d’ententes-cadres pour apporter la moindre modification au libellé de la loi sur l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres de premières nations. Une modification de la loi créerait une incohérence avec l’accord-cadre auquel renvoie la loi. Autrement dit, à l’heure actuelle, rien dans l’accord-cadre ne traite de la législation relative à la GRC ou aux poursuites pénales.

Le chef Louie ajoute que le Conseil espère continuer d’appuyer les MKO et de collaborer avec eux et :

[...] propose de poursuivre leurs démarches conjointes auprès des provinces et du gouvernement fédéral relativement à l’application de la loi et s’engage à continuer de s’aligner sur la position des Premières Nations signataires en ce qui a trait à tout changement approprié à l’accord-cadre.

Le chef Louie écrit, et j’approuve ce qui suit :

[...] consentir à des modifications à [l’Accord-cadre] avant de demander l’approbation des Premières Nations va à l’encontre du principe de respect mutuel et de la relation de nation à nation que nous nous sommes efforcés de bâtir et d’entretenir depuis la signature de l’accord-cadre en 1996.

Pour conclure, je soulève deux derniers points. Premièrement, les modifications proposées dans le projet de loi C-32 ont été conjointement élaborées et unanimement appuyées par tous les signataires de la Loi sur la gestion des terres des premières nations. C’est précisément ce qu’ils souhaitent. Deuxièmement, les amendements que réclament les MKO sont légitimes et méritent d’être examinés de plus près. Néanmoins, j’estime que le projet de loi C-32 n’est pas le véhicule pour procéder à ces modifications. En fait, certains pourraient même avancer que cette mesure risque de nuire à la réconciliation et à l’autodétermination des Premières Nations.

En conclusion, honorables sénateurs, j’espère que les explications que j’ai fournies sur ces deux sujets vous convaincront de voter en faveur du projet de loi C-32. Je ne suggère nullement que nous ne tenions pas compte des préoccupations soulevées à l’égard de la Loi sur la gestion des terres des premières nations ou des obligations de reddition de comptes des fiducies. Je pense qu’il s’agit de préoccupations valables qui devraient être surveillées de près, mais j’estime que le gouvernement a fait preuve de diligence raisonnable et je suis heureux de voter en faveur de l’adoption de ce projet de loi.

Avant de conclure, je tiens à remercier, une fois de plus, nos collègues du Comité des finances nationales pour tout le travail qu’ils ont accompli en examinant comme il se doit le projet de loi et, finalement, en l’adoptant sans amendement hier matin. Merci.

Un grand merci également à tous les témoins qui ont comparu devant notre comité. J’ai été particulièrement impressionné par les représentants de notre gouvernement. Au nom de tous les Canadiens, je les remercie pour tout ce qu’ils font. C’est souvent un travail ingrat, mais je leur suis réellement reconnaissant de se présenter devant nos comités et de répondre aux questions difficiles des sénateurs.

Je souhaite également exprimer ma gratitude au personnel administratif associé à notre comité, notamment notre greffière, Mireille Aubé, et son adjointe, Tracy Amendola. Nous apprécions tout ce que vous faites dans l’ombre.

Enfin, je profite de l’occasion qui m’est offerte pour vous souhaiter à tous un très joyeux temps des Fêtes. J’espère que vous passerez tous du bon temps en famille et entre amis.

Chers collègues, je vous remercie de votre attention et j’espère que nous pourrons adopter ce projet de loi aujourd’hui. Merci.

L’honorable Mary Jane McCallum : Honorables sénateurs, j’interviens encore pour parler du projet de loi C-32, Loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2022, et plus particulièrement de la section 3 de la partie 4, c’est-à-dire la Loi sur l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres de Premières Nations.

Le rapport publié en juin 2021 intitulé Démarches collaboratives en matière d’application des lois dans les collectivités autochtones : Rapport du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord indique ceci :

La capacité des Premières Nations d’appliquer leurs lois et leurs règlements administratifs sur leurs terres est essentielle à l’autodétermination et à l’autonomie gouvernementale. Toutefois, bon nombre de communautés se heurtent à des obstacles pour faire appliquer leurs lois et leurs règlements administratifs [...]

Le Comité reconnaît que l’enjeu est complexe et que la détermination des obstacles à l’application des lois et des règlements administratifs des Premières Nations est difficile. Il est clair, cependant, que pour y arriver on doit pouvoir compter sur une étroite collaboration entre les Premières Nations, les ministères et les organismes fédéraux ainsi que les provinces et territoires. Il n’y a pas de solution standard et toute prête, et toute réponse doit être fondée sur les distinctions et reconnaître que chaque communauté doit élaborer ses propres solutions, comme elle le veut, afin de respecter ses droits inhérents.

Honorables sénateurs, comme cet accord-cadre nous a été soumis pour que nous l’examinions par l’intermédiaire du projet de loi C-32, nous devenons un maillon de cet important instrument de collaboration avec les Premières Nations. Nous devons également agir de manière à respecter leurs droits inhérents et à favoriser leur autodétermination et leur autonomie gouvernementale. La principale fonction du Sénat est d’entendre leur voix pour que nous puissions nous-mêmes influencer le gouvernement du Canada pour l’amener à agir maintenant. À titre de sénateurs, nous devons nous assurer que les dirigeants des Premières Nations du Manitoba savent à quoi s’en tenir.

Il serait irresponsable de la part du Sénat de laisser planer l’incertitude, mais le fait de ne pas faire une étude complète serait inacceptable. Essentiellement, nous laissons sciemment les dirigeants des Premières Nations dans le flou, ce qui les place dans une position de vulnérabilité. Comme le sénateur Loffreda vient de le dire, cela mérite une plus grande attention, mais il se fait tard.

Le rapport concernant les effets de l’application insuffisante de la loi sur les Premières Nations cite le chef Robert Louie, président du Conseil consultatif des terres des Premières Nations :

Nous exhortons le Comité à tirer la sonnette d’alarme en soulignant l’ampleur des dommages causés par l’incapacité à faire respecter les lois des Premières Nations.

Le moins que le Sénat aurait pu faire, c’est de tirer la sonnette d’alarme, de formuler des recommandations, puis de confirmer et appuyer les recommandations formulées dans le rapport. Mais le Sénat ne s’est pas donné suffisamment de temps pour entendre des témoins.

Je sais que l’on a beaucoup parlé d’un amendement, et je ne sais pas pourquoi les gens ont cru que des amendements allaient être proposés. Lorsque l’on parle de la sorte, on brouille les pistes.

Rejet de la motion d’amendement

L’honorable Mary Jane McCallum : Par conséquent, honorables sénateurs, je propose l’amendement suivant :

Que le projet de loi C-32, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 3 novembre 2022 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022, ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu’il soit renvoyé de nouveau au Comité sénatorial permanent des finances nationales pour étude additionnelle.

L’honorable Patti LaBoucane-Benson : Honorables sénateurs, je serai brève. J’aimerais simplement faire deux observations rapides.

Premièrement, je tiens à remercier la sénatrice McCallum d’avoir donné, avec une passion et un dévouement inébranlable, une voix à ses concitoyens manitobains autochtones. Deuxièmement, je tiens à rappeler aux honorables sénateurs que la partie du projet de loi C-32 qui traite de la gestion des terres des Premières Nations est vraiment une bonne chose. Elle marque un beau moment dans l’évolution des relations entre le Canada et les Premières Nations.

(1140)

Depuis les années 1990, 194 Premières Nations ont signé un accord avec le gouvernement pour se soustraire aux dispositions de la Loi sur les Indiens en matière de gestion des terres et pour reprendre contrôle de leur territoire. Depuis plus de 20 ans, il y a des incohérences entre cet accord et la loi fédérale visant à le mettre en œuvre.

D’ailleurs, honorables sénateurs, le sénateur Christmas nous a aidés à comprendre cela lors des réunions du Comité des peuples autochtones.

Le projet de loi C-32 éliminera enfin ces incohérences et donnera pleine force de loi à l’accord.

Le processus d’élaboration conjointe qui a précédé la présentation du projet de loi C-32 a été exhaustif et exemplaire. Comme le Conseil consultatif de terres, qui représente les 194 nations signataires, est venu le dire au Comité des peuples autochtones, le processus s’est étendu sur de nombreux mois et a été dirigé par des Autochtones. Dans sa forme actuelle, le projet de loi reflète l’approche que ces 194 Premières Nations ont approuvée.

L’étude que le Comité des peuples autochtones a faite du projet de loi C-32 a été rapide, mais pas pour autant superficielle. D’ailleurs, nous avons discuté précisément de la question que soulève la sénatrice McCallum au nom des Manitoba Keewatinowi Okimakanak Inc., ou MKO, c’est-à-dire de l’application des lois des Premières Nations.

Après que le Conseil consultatif des terres eut témoigné et donné avec enthousiasme son aval à cette partie du projet de loi C-32, la sénatrice Hartling a cherché à savoir quelles seraient les difficultés à surmonter dans le domaine de la gouvernance des Premières Nations si le projet de loi est adopté.

Voici la réponse qu’a donnée à la sénatrice Hartling le président du conseil, le chef Robert Louie, de la Première Nation de Westbank, en Colombie-Britannique :

Il nous reste beaucoup de travail à faire. Les questions sur lesquelles nous nous penchons en ce moment sont liées à l’application de la loi, en l’occurrence celles des Premières Nations.

Les 20 dernières années nous ont permis de comprendre que le Canada et la GRC n’appliquent pas et n’appuient pas les lois qui ont été adoptées par les Premières Nations. Nous n’avions pas anticipé cet accroc au départ [...]

 — c’est-à-dire, il y a 25 ans —

[...] mais nous essayons d’y remédier en collaboration avec les gouvernements et les procureurs généraux au niveau fédéral et provincial.

Le comité sénatorial était bien au fait de cette question. C’est un aspect extrêmement important qui, comme le chef Louie l’a expliqué, fait actuellement l’objet de discussions entre les Premières Nations et les différents ordres de gouvernement.

C’est ainsi que la question devrait être réglée : au moyen d’un dialogue direct et diligent, exactement comme le processus qui a mené au projet de loi dont nous sommes saisis aujourd’hui.

Honorables sénateurs, dans ses observations sur le projet de loi C-32, le Comité des peuples autochtones a écrit que le processus de corédaction du projet de loi « fournit un modèle de corédaction des prochaines mesures législatives sur l’autonomie gouvernementale des Premières Nations ».

Je suis tout à fait d’accord. Une démarche exemplaire d’élaboration conjointe a eu lieu. Les 194 Premières Nations signataires y ont toutes participé. Nous ne devrions pas renvoyer ce projet de loi au comité. Au contraire, nous devrions l’adopter aujourd’hui et donner enfin force de loi à l’accord qui a été signé il y a 25 ans, afin que les Premières Nations puissent exercer pleinement le contrôle de leurs terres.

J’exhorte les honorables sénateurs à s’opposer à cette motion et à appuyer le projet de loi C-32.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénatrice McCallum, avez-vous une question?

La sénatrice McCallum : Oui. Il a été question des 194 signataires. Cependant, comme je l’ai indiqué — et c’était dans le rapport de l’autre endroit —, le projet de loi ne prévoit pas de solution standard et toute prête. Toute réponse doit être fondée sur les distinctions et reconnaître que chaque communauté doit élaborer ses propres solutions, comme elle le veut, afin de respecter ses droits inhérents.

Pour ce qui est de ceux qui ne font pas partie des 194 signataires de l’accord, comment vous ont-ils dit qu’ils comptaient procéder avec leur propre cadre?

La sénatrice LaBoucane-Benson : Merci de votre question. De ce que j’en comprends, cette importante question sera réglée par les Premières Nations dans le cadre de leurs propres négociations au Conseil consultatif des terres. L’idée du projet de loi est de donner un pouvoir exécutoire de prendre ces décisions. D’après ce que j’ai compris, le gouvernement les épaule dans leur volonté d’apporter les changements dont ils ont besoin.

Après avoir discuté avec le chef Louie, j’ai la conviction que la direction du Conseil consultatif des terres comprend la situation. Elle travaille avec les MKO. Des discussions sont en cours. Le problème de l’application des textes législatifs des Premières Nations doit être réglé avec les provinces, avec la GRC et avec le gouvernement fédéral. D’après ce que j’en comprends, les MKO et toutes les Premières Nations qui ont ce problème ont été réunis pour discuter de l’application du code foncier.

La sénatrice McCallum : Je souligne ces préoccupations au nom des MKO. Je sais qu’ils ont parlé au Conseil consultatif des terres, mais ils tiennent néanmoins à exprimer leur inquiétude. Donc, les deux organismes ne sont pas en accord. Chacun a ses propres préoccupations à l’égard de ce projet de loi, notamment parce que des modifications à deux autres lois s’imposent si cet élément reste là.

Les gens disent constamment qu’ils collaborent avec les Autochtones, qu’ils travaillent avec eux, alors qu’ils ne consultent que certains groupes. La préoccupation que je soulève, c’est que cela a été exprimé par les MKO. C’est leur voix. J’estime que nous devons tenir compte de cela, et non minimiser ou taire leur voix.

La sénatrice LaBoucane-Benson : Je ne suis pas certaine qu’il y avait une question, mais je vous remercie de votre intervention. Je crois effectivement que nous devons tous garder les préoccupations des MKO au premier plan dans notre réflexion.

Je sais également que le gouvernement effectue actuellement des consultations au sujet d’une éventuelle loi sur les services de police des Premières Nations. Lorsque le Sénat sera enfin saisi de ce projet de loi, nous aurons l’occasion de discuter en profondeur de la question de l’application du code foncier et des autres lois autochtones au Canada. Je suis d’accord avec vous, sénatrice; ces préoccupations sont importantes.

La sénatrice McCallum : Le discours que j’ai prononcé l’autre jour mettait en contexte de mon intervention d’aujourd’hui sur les études préalables et sur la rapidité avec laquelle on traite le projet de loi. Cela fait partie du problème. Il importe de souligner que la mesure n’a pas reçu l’attention qu’elle mérite. Elle a franchi les étapes à la vitesse grand V.

La sénatrice LaBoucane-Benson : Je remercie l’honorable sénatrice pour son commentaire. Cependant, il n’est pas de mon ressort de décider des études préalables. Je ne suis qu’une simple agente de liaison ici. Ce n’est pas de mon ressort.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : L’honorable sénatrice McCallum, avec l’appui de l’honorable sénateur Patterson (Nunavut), propose en amendement :

Que le projet de loi C-32, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 3 novembre 2022 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022, ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu’il soit renvoyé de nouveau au Comité sénatorial permanent des finances nationales pour étude additionnelle.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Une voix : Oui.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente intérimaire : La motion est rejetée.

(La motion d’amendement de l’honorable sénatrice McCallum est rejetée avec dissidence.)

Troisième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Loffreda, appuyée par l’honorable sénatrice Sorensen, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-32, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 3 novembre 2022 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente intérimaire : À mon avis, les oui l’emportent.

Et deux honorables sénateurs s’étant levés :

Son Honneur la Présidente intérimaire : Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie? Sommes-nous d’accord pour que la sonnerie retentisse pendant 15 minutes?

Une voix : Une sonnerie de 10 minutes.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Une sonnerie de 10 minutes.

Convoquez les sénateurs pour 11 h 59.

(1200)

La motion, mise aux voix, est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté :

POUR
Les honorables sénateurs

Anderson Francis
Bellemare Gagné
Black Gerba
Boehm Gignac
Boniface Gold
Bovey Harder
Boyer Hartling
Burey LaBoucane-Benson
Busson Loffreda
Cardozo Marwah
Clement Massicotte
Cordy Miville-Dechêne
Cormier Moncion
Cotter Omidvar
Coyle Pate
Dagenais Petitclerc
Dalphond Ringuette
Dasko Saint-Germain
Dawson Smith
Deacon (Nouvelle-Écosse) Sorensen
Deacon (Ontario) Tannas
Dean Woo
Downe Yussuff—47
Dupuis

CONTRE
Les honorables sénateurs

Ataullahjan Martin
Batters Plett
Carignan Seidman
Housakos Wells—9
MacDonald

ABSTENTIONS
Les honorables sénateurs

McCallum Patterson (Nunavut)—2

Projet de loi de crédits no 4 pour 2022-2023

Troisième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Gagné, appuyée par l’honorable sénatrice LaBoucane-Benson, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-36, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l’administration publique fédérale pendant l’exercice se terminant le 31 mars 2023.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté, avec dissidence.)

[Français]

Projet de loi d’harmonisation no 4 du droit fédéral avec le droit civil

Projet de loi modificatif—Troisième lecture

L’honorable Bernadette Clement propose que le projet de loi S-11, Loi no 4 visant à harmoniser le droit fédéral avec le droit civil du Québec et modifiant certaines lois pour que chaque version linguistique tienne compte du droit civil et de la common law, soit lu pour la troisième fois.

— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi S-11, que je suis fière de parrainer.

Le projet de loi S-11 est la quatrième loi visant à harmoniser le droit fédéral avec le droit civil du Québec et à modifier certaines lois afin que chaque version linguistique tienne compte de la common law et du droit civil.

Pour résumer rapidement, notre travail en ce qui a trait à cette harmonisation est en cours depuis 1993. Le projet de loi S-11 apporte des modifications techniques à 51 lois et met l’accent sur les lois qui régissent les institutions financières.

[Traduction]

Je sais que ce projet de loi n’éveille pas l’enthousiasme de tout le monde mais, pendant l’étude en comité, j’avais l’impression d’être de retour à la Faculté de droit. C’était vraiment agréable d’être de nouveau dans une pièce remplie d’autres intellos — je le dis affectueusement — aussi intéressés que moi par le sujet : le sénateur Harder, qui s’informait du processus d’harmonisation; la sénatrice Pate, qui cherchait à mieux saisir si l’harmonisation était le concept approprié pour inclure les traditions autochtones; et la sénatrice Batters, qui décrivait la rédaction législative comme un domaine d’expertise très particulier. Je n’arriverai peut-être pas à rendre justice à la rencontre du comité ici, mais j’ai une mauvaise blague pour vous, je vous en avertis : je sais que le père Noël ne vous évitera pas l’examen article par article des cadeaux de Noël, mais j’espère que vous profiterez des Fêtes pour regarder ce qui s’est passé pendant cette réunion de comité où des intellos enthousiastes ont étudié le projet de loi S-11.

Depuis que ce projet de loi a été présenté au Sénat, en octobre, nous avons entendu la sénatrice Dupuis, le sénateur Dalphond et le sénateur Carignan, qui ont tous souligné l’importance de ce travail. Je les remercie d’avoir contribué à la discussion.

[Français]

Le sénateur Carignan nous a dit que tous les projets de loi d’harmonisation précédents ont reçu un appui multipartisan, autant ici, au Sénat, qu’à l’autre endroit. Il nous a aussi dit qu’il avait appuyé ce projet de loi à l’étape de la deuxième lecture parce qu’il vise à renforcer la vitalité du bijuridisme.

(1210)

Le sénateur Dalphond nous a dit ce qui suit, et je cite :

On ne comprend pas assez cette contribution d’un État, comme le Canada, qui est fédératif et bijuridique; il n’y en a pas beaucoup dans le monde. Notre contribution, non seulement en common law en français, en droit civil en anglais et en ce qui a trait au bijuridisme en même temps, est tout à fait unique, à mon avis. Dans ce sens, au Québec comme ailleurs au Canada, je pense qu’on peut en être fier. Puis, on participe aux deux grandes traditions juridiques dans le monde entier, ce qui est fantastique également.

Ma collègue la sénatrice Dupuis a fort bien expliqué que cette initiative d’harmonisation repose sur des fondements juridiques profondément liés à l’histoire canadienne et québécoise, de même qu’à cette réalité. La coexistence de la common law et du droit civil remonte à plus de deux siècles. Comme nous le savons, il ne s’agit que de deux des traditions juridiques du Canada; il faut aussi ajouter que le droit autochtone a davantage besoin de notre attention.

[Traduction]

L’honorable Serge Joyal a parrainé un projet de loi d’harmonisation en 2004. Dans son discours à l’étape de la troisième lecture, il a dit, en parlant des conversations entourant le droit autochtone, qu’il s’agissait d’un « sujet tout à fait nouveau dans le débat parlementaire ». Honorables sénateurs, ce n’est plus du tout nouveau pour nous et ce n’est certainement pas nouveau pour les communautés de l’ensemble du pays qui s’efforcent de revitaliser leurs traditions et leur culture. J’espère que nous continuerons de voir plus de progrès, de mesures concrètes et d’inclusion.

Le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles a étudié le projet de loi S-11 pendant deux réunions brèves, mais chargées. Nous avons entendu David Lametti, ministre de la Justice et procureur général du Canada, ainsi que France Allard et Riri Shen, fonctionnaires au ministère de la Justice. Le ministre Lametti nous a dit que son ministère travaille fort pour que l’on puisse renforcer ce qu’il appelle des « systèmes normatifs autochtones ». J’ai été heureuse de l’entendre dire que le pluralisme juridique est un principe qui lui tient très à cœur et que l’épanouissement des systèmes juridiques autochtones est une priorité. Le ministre a d’ailleurs parlé d’intégrer le droit autochtone aux programmes universitaires de la façon suivante :

Je pense que le rôle du ministre et du ministère de la Justice est de faciliter et de soutenir ce genre de travail, et que le droit canadien finira par parvenir à un nouveau stade d’évolution.

[Français]

Le comité a également entendu des témoignages sur les consultations, au cours desquelles plus de 400 intervenants ont été invités à émettre des critiques et des commentaires. Nous avons accordé une attention particulière aux propositions de la Chambre des notaires du Québec, et j’ai bien aimé entendre les explications des témoins sur le processus de rédaction de ce projet de loi.

[Traduction]

Nous savons donc que l’harmonisation ne signifie pas qu’un système disparaît au détriment de l’autre. Il s’agit plutôt de la coexistence de la common law et du droit civil dans les mêmes lois fédérales.

À cette fin, une approche spécifique est utilisée, que l’on appelle la « corédaction ». Nous en avons discuté au comité. Au lieu de rédiger un code, une constitution ou un projet de loi en anglais, en suivant la tradition de la common law, puis de le traduire en français, la corédaction signifie que le texte est rédigé à la fois en anglais et en français, en tenant compte de la common law et du droit civil simultanément.

À la manière des mordus dont j’ai parlé précédemment, le sénateur Cotter et le ministre de la Justice Lametti ont tous deux raconté avec fierté leur expérience de corédaction.

Lorsqu’on rédige un texte de loi, on adopte la terminologie, les concepts et les principes des deux traditions juridiques. Il vaut la peine de s’arrêter ici pour souligner que, grâce à la corédaction, il ne sera pas forcément nécessaire de faire une harmonisation rétroactive, puisque les nouveaux projets de loi sont rédigés en fonction de la politique sur le bijuridisme législatif. Mme Allard nous a dit que l’exercice de corédaction force l’établissement d’un dialogue entre les deux langues, et j’aime bien l’imaginer. Au lieu d’être effectué en vase clos, le travail est intégré et il se fait simultanément, ce qui engendre une compréhension mutuelle plus approfondie.

[Français]

Nous voici donc à l’étape de la troisième lecture. C’est maintenant ma responsabilité de vous rappeler toutes les raisons pour lesquelles ce projet de loi est important et devrait être adopté.

[Traduction]

J’ai déjà comparé cette mesure législative à une boîte de chocolats, ce qui, soit dit en passant, a incité la sénatrice Bovey à me donner des chocolats. Je l’en remercie. J’ai indiqué à certains sénateurs que des lois qui revêtent de l’importance pour eux seraient modifiées par le projet de loi S-11. Il me reste une autre arme dans mon arsenal : un appel au cœur des sénateurs.

L’édification d’une nation est un processus compliqué et délicat, qui évolue constamment. Les frontières sont tracées sur une carte pour diverses raisons, ce qui donne souvent lieu à des conflits, à des débats et à des renégociations. Dans le cadre de ce processus, on compare les façons de faire des pays. On définit la culture, les règles, les langues et les régions, entre autres. Il y a constamment des choix à faire, des choix qui entraînent des conséquences; la prise de mesures et les réactions que cela provoque.

Le projet de loi à l’étude vise à favoriser l’édification de notre pays, même s’il n’englobe pas toutes nos traditions juridiques, qu’il n’est pas mentionné dans les journaux, qu’il ne déclenche pas une tempête de protestations sur les médias sociaux, et qu’il n’inspire pas les cœurs et les esprits de tous les Canadiens. Parfois, l’édification d’une nation est quelque chose de technique, de particulier. C’est une question un petit peu spécialisée.

[Français]

Cependant, il s’agit d’un travail fondamental. Nous nous assurons de la coexistence et de la vitalité de deux systèmes juridiques, deux langues et deux cultures. Même si j’aimerais que l’on puisse dépasser la soi-disant « dualité » et entrer dans une réalité qui englobe des traditions autres que l’anglais et le français, la common law et le droit civil, je sais que ce travail prendra du temps. Je suis heureuse d’y participer.

Donc, alors que nous concluons notre étude du projet de loi S-11, permettez-moi de vous rappeler très rapidement ce qu’il fait. Premièrement, il permet de rendre notre législation plus compréhensible pour tous les Canadiens en utilisant des concepts et une terminologie appropriés et qui leur sont familiers, quelle que soit leur province d’origine ou que ce soit la common law ou le droit civil qui fait partie de leur quotidien.

Deuxièmement, le projet de loi S-11 réduit l’incertitude quant à l’application et à l’interprétation de l’intention du législateur, ce qui facilite l’accès à la justice. Troisièmement, ce projet de loi fait progresser l’égalité du statut de l’anglais et du français dans le cadre du système juridique canadien.

Enfin, le projet de loi S-11 est une œuvre de collaboration. Ce projet de loi est une danse minutieuse qui consiste à intégrer la terminologie du droit privé provincial au sein du droit fédéral. La constitution des institutions provinciales et territoriales, en plus des 400 autres intervenants qui ont participé aux consultations, témoigne du respect du rôle et des compétences des provinces et des territoires, tel qu’ils ont été conférés par la Constitution.

[Traduction]

En 2004, le comité a étudié un autre projet de loi d’harmonisation, le projet de loi S-10. Dans son rapport sur le projet de loi, le comité a mentionné le témoignage de l’honorable Irwin Cotler, qui était alors ministre de la Justice. Le rapport indique que le ministre :

[...] invitait tout le monde à avoir à l’esprit que le bijuridisme n’est pas limitatif. Selon lui, il s’agit plutôt d’un modèle ouvert, qu’il souhaite voir se transformer en modèle de pluralisme, avec le temps.

Je remercie tous les fonctionnaires, les analystes et les mordus de leur travail diligent et de leurs contributions remarquables au projet de loi S-11. Honorables sénateurs, j’espère que vous vous joindrez à moi pour saisir cette occasion de faire progresser le projet d’édification nationale en appuyant le projet de loi S-11. Merci, nia:wen.

Des voix : Bravo!

[Français]

L’honorable Claude Carignan : Permettez-moi de féliciter la marraine du projet de loi pour son discours, car elle a réussi à mettre de l’émotion dans un projet de loi très technique. C’est du talent.

Je prends la parole aujourd’hui pour appuyer le projet de loi S-11 à l’étape de la troisième lecture. Son titre abrégé est la Loi d’harmonisation no 4 du droit fédéral avec le droit civil. L’étude du projet de loi S-11 s’est déroulée à un rythme accéléré, en raison de la volonté du gouvernement de le faire adopter avant les Fêtes.

Ce projet de loi, quoiqu’il soit imposant par son nombre de pages, est différent de bien d’autres projets de loi du gouvernement. Il suscite le consensus. Il vise simplement à préciser le vocabulaire ayant trait à des articles de loi, sans changer les règles de droit qui sont au cœur des 52 lois modifiées par le projet de loi.

Pour reprendre l’expression utilisée par les fonctionnaires pendant l’étude du comité sénatorial, une loi d’harmonisation a pour principe de ne pas modifier l’orientation législative des articles de loi. Le témoignage des fonctionnaires au comité m’a convaincu que le contenu du projet de loi S-11 respectait ce principe.

Cela étant dit, tout en reconnaissant le travail exceptionnel des fonctionnaires qui ont rédigé ce projet de loi technique et consensuel, les paramètres de l’étude du comité sénatorial n’étaient pas optimaux, en raison de l’échéancier très serré du gouvernement, qui tenait à faire adopter le projet de loi S-11 cette semaine.

Voici quelques exemples de points à améliorer. Je vous les mentionne afin que le gouvernement les garde à l’esprit s’il demande au Sénat d’étudier d’autres projets de loi d’harmonisation à l’avenir.

D’abord, le ministère de la Justice Canada a envoyé très tardivement aux membres du comité sénatorial la liste des intervenants qu’il a consultés en 2017 au moment de la conception du projet de loi. En effet, bien que les consultations aient pris fin il y a plus de cinq ans, le gouvernement a transmis cette liste seulement hier, alors que l’étude du comité sénatorial était déjà terminée.

(1220)

Pour les prochains projets de loi, je suggère donc au gouvernement qu’il transmette plus rapidement à tous les sénateurs la liste des intervenants qu’il a consultés, sans que nous ayons besoin de la demander aux fonctionnaires.

Je suggère aussi qu’on nous communique non seulement la liste de noms des intervenants consultés, mais également un sommaire des opinions qu’ils ont exprimées lors des consultations, incluant leurs critiques et leurs suggestions de modifications au projet de loi.

Si les sénateurs pouvaient recevoir ces documents dès le départ, cela accroîtrait la transparence du gouvernement relativement à son processus de consultation. Ces documents nous aideraient aussi à déterminer rapidement les intervenants clés n’ayant pas été consultés, ce qui nous permettrait de les inviter au comité sénatorial.

Revenons au cas du projet de loi S-11. Les fonctionnaires ont affirmé lors du breffage technique aux sénateurs que Justice Canada avait sollicité l’avis de plus de 400 intervenants clés et membres de la communauté juridique. J’estime que cette consultation était assurément complète, car la liste des intervenants contactés par le gouvernement énumère un nombre très impressionnant d’experts universitaires ou d’organisations susceptibles d’être visés par les mesures du projet de loi.

Malheureusement, les seuls témoins entendus pendant l’étude du projet de loi S-11 par le comité sénatorial ont été les représentants de Justice Canada, incluant le ministre Lametti. Autrement dit, il n’y a eu aucun témoin non gouvernemental. L’étude du comité n’a duré qu’une seule journée, et elle a eu lieu moins de cinq jours après l’ordre de renvoi du projet de loi au comité.

Je déconseille que nous adoptions la même approche la prochaine fois que nous étudierons un projet de loi d’harmonisation. Je rappelle que contrairement au projet de loi S-11, les trois dernières lois d’harmonisation ont été étudiées pendant plusieurs réunions de comité. Je donne l’exemple du projet de loi S-12, en 2010, dont j’étais le parrain.

Comme pour le projet de loi S-11, le gouvernement cherchait à faire adopter son projet de loi avant les Fêtes, mais son échéancier laissait un peu plus de temps au comité pour mener son étude. Le comité avait alors pu tenir quatre réunions en 2010 pour étudier le projet de loi S-12, du 1er au 9 décembre, ce qui a permis qu’il soit adopté au Sénat le 14 décembre, avant l’ajournement des Fêtes. Malheureusement, le projet de loi S-12 est mort au Feuilleton par la suite, mais les mesures qu’il proposait ont été reprises dans un projet de loi identique, le projet de loi S-3, qui est entré en vigueur en 2011.

Cela dit, bien que l’étude du projet de loi S-11 au comité sénatorial n’ait duré qu’une seule journée, elle nous a permis d’obtenir plusieurs informations utiles et nécessaires pour bien analyser le contenu du projet de loi.

À titre d’exemple, le comité a pu étudier les commentaires formulés par la Chambre des notaires du Québec sur le projet de loi S-11 dans une lettre envoyée au comité le 9 décembre.

De plus, les fonctionnaires ont fourni au comité des explications pertinentes sur les raisons pour lesquelles ils n’ont pas retenu certaines propositions reçues des intervenants, dont certaines de la Chambre des notaires du Québec, pendant les consultations de 2017.

Les fonctionnaires ont indiqué avoir écarté ces propositions, notamment pour l’une des quatre raisons suivantes : 1) parce qu’elles auraient eu une incidence sur l’orientation législative des dispositions à harmoniser; 2) parce qu’elles n’étaient pas requises pour préciser les dispositions législatives à harmoniser; 3) parce qu’elles proposaient des choix de rédaction non conformes aux conventions de rédaction des lois fédérales.

La quatrième raison pour laquelle certains commentaires reçus pendant les consultations n’ont pas été retenus est qu’ils visaient des lois qui ne faisaient pas partie de la liste des lois que le gouvernement avait choisi d’harmoniser dans le cadre de ce projet de loi.

Il faut comprendre que le projet de loi S-11 vise 52 lois qui ont été choisies en raison de leur secteur d’activités et selon les ministères responsables de ces lois. Ainsi, bien que le projet de loi S-11 soit la quatrième loi d’harmonisation, il reste d’autres lois à harmoniser dans une prochaine réforme.

En résumé, même si l’étude du projet de loi S-11 au comité sénatorial a comporté des lacunes en raison de l’échéancier serré du gouvernement, je suis convaincu, à la lumière du texte du projet de loi, de la documentation reçue des fonctionnaires et de leur témoignage au comité, que le projet de loi mérite d’être adopté.

En terminant, je désire revenir sur une question que m’a posée la sénatrice Clement, ainsi que sur une intervention du sénateur Dalphond. La sénatrice m’a demandé si le projet de loi S-11, en tenant compte du progrès qu’il apporte au bijuridisme canadien, était bien reçu par mes collègues civilistes qui sont majoritairement francophones au Canada. J’estime que le projet de loi S-11 est un pas en avant. Cependant, je rappelle que la législation fédérale doit non seulement être bijuridique, mais aussi bilingue. Je suis d’avis qu’il reste beaucoup de chemin à faire, et beaucoup d’autres efforts à accomplir par Justice Canada pour faire respecter le principe du bilinguisme législatif au Canada.

Je partage donc sans réserve la revendication du sénateur Dalphond, qu’il a exprimée dans une question posée au ministre Lametti durant son témoignage au comité en lui demandant ce qui suit :

[...] vous avez parlé d’accessibilité à la justice et d’accessibilité aux lois fédérales. La loi la plus importante du pays, la Loi constitutionnelle de 1867, ne contient que sept articles — et depuis peut-être huit depuis la semaine dernière — qui ont été adoptés dans les deux langues et qui ont une version bilingue. Il reste bon nombre d’articles, plus d’une centaine, qui sont toujours officiels en anglais seulement.

Que fait le ministère pour mettre fin à cette situation inacceptable, qui est contraire à l’article 55 de la Loi constitutionnelle de 1982?

Si le projet de loi S-11 a permis de modifier 52 lois afin d’améliorer l’harmonisation du droit fédéral avec le droit civil, je suis convaincu que le ministre Lametti a les moyens d’agir pour faire adopter la version française des textes constitutionnels canadiens.

Qu’est-ce qui empêche le gouvernement fédéral de modifier, par exemple, le projet de loi C-13 sur les langues officielles pour mettre en œuvre la recommandation de la motion adoptée par le Sénat le 29 mars dernier? Cette motion demande simplement au gouvernement de considérer, dans sa réforme de la Loi sur les langues officielles, l’ajout d’une exigence voulant que le gouvernement produise un rapport annuel sur ses efforts visant à faire adopter la version française de la Constitution canadienne.

Si le gouvernement juge vraiment que le principe du bilinguisme des lois fédérales est important, qu’attend-il pour agir maintenant afin de faire adopter la version française des textes constitutionnels, qui sont les lois les plus importantes au pays?

Cela fait 40 ans qu’il a cette obligation de le faire, depuis l’entrée en vigueur de l’article 55 de la Loi constitutionnelle de 1982. Je suis avocat depuis 1988 et je ne voudrais pas qu’une autre génération d’avocats francophones vive, comme moi, toute une carrière professionnelle à appliquer les lois les plus importantes au Canada sans qu’elles aient leur version française ou sans qu’elles soient rédigées correctement en vertu des principes du bijuridisme et du bilinguisme.

Je vous remercie, chers collègues, de votre attention, et j’en profite pour vous souhaiter de joyeuses Fêtes; je souhaite au leader du gouvernement un bon repos.

[Traduction]

Son Honneur le Président : Sénatrice McCallum, la parole est à vous.

L’honorable Mary Jane McCallum : Merci, Votre Honneur.

Je propose l’ajournement du Sénat.

Son Honneur le Président : Sénatrice Moncion?

L’honorable Lucie Moncion : Je suis désolée, Votre Honneur. La sénatrice McCallum n’a pas la parole dans le cadre du débat. J’invoque l’article 5-13(2) du Règlement. Elle ne peut pas proposer l’ajournement du débat.

Son Honneur le Président : Vous auriez normalement raison, sénatrice Moncion. Toutefois, quand un débat sur un sujet a été entamé et que je donne la parole à un sénateur, je lui demande d’intervenir dans le cadre du débat.

Ainsi, l’article 5-13(2) du Règlement s’applique. La sénatrice intervient dans le cadre du débat et, par conséquent, elle peut proposer l’amendement.

Y a-t-il un comotionnaire pour l’amendement?

La sénatrice Moncion : Elle a dit « ajournement ».

Son Honneur le Président : Toutes mes excuses. Elle peut proposer l’ajournement. Elle intervient dans le cadre du débat quand je lui donne la parole.

La sénatrice Moncion : Toutefois, j’ai entendu « ajournement du Sénat ». C’est ce qu’elle a dit.

Son Honneur le Président : Je tiens à préciser, chers collègues, que l’article 5-13(2) du Règlement stipule qu’il faut participer à un débat pour proposer l’ajournement du Sénat. Le débat a commencé sur le projet de loi S-11. Lorsque j’ai donné la parole à la sénatrice McCallum, je l’ai fait dans le cadre du débat sur le projet de loi S-11. Il est donc tout à fait possible pour elle de proposer l’ajournement du Sénat.

Je demande maintenant s’il y a un comotionnaire de la motion d’ajournement de la sénatrice McCallum. S’il n’y en a pas, la motion ne peut être acceptée.

Sénateur Housakos, appuyez-vous cette motion?

L’honorable Leo Housakos : Elle n’a pas besoin d’un comotionnaire pour ajourner le Sénat.

Son Honneur le Président : Toutes les motions doivent avoir un comotionnaire, sénateur Housakos.

Le sénateur Housakos : Pour un vote, mais pas pour un ajournement.

Son Honneur le Président : Pour un ajournement aussi.

Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer sur la motion principale?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté, avec dissidence.)

(1230)

Projet de loi sur le développement d’une économie verte dans les Prairies

Troisième lecture—Débat

L’honorable Brent Cotter propose que le projet de loi C-235, Loi concernant le développement d’une économie verte dans les Prairies, soit lu pour la troisième fois.

 — Honorables sénateurs, c’est peut-être la saison, peut-être le sentiment d’honneur que j’éprouve à servir dans cette enceinte, peut-être l’honneur de parrainer le projet de loi à l’étude. Quoi qu’il en soit, je suis porté par un sentiment de joie aujourd’hui et, par conséquent, je vais m’écarter de mon style oratoire habituel austère, sérieux et sans humour.

Mon grand-père était un homme bon, dévot, craignant Dieu et pratiquant. Il n’a jamais utilisé un gros mot dans sa vie. Un jour, un ami est venu le voir et lui a dit : « Bill, j’aimerais en savoir un peu plus sur ta religion. » Mon grand-père, toujours prêt à convertir les personnes de son entourage, a emmené cet homme à la messe du dimanche. Au début du service religieux, lorsque quelque chose se produisait à l’avant de l’église, l’ami se penchait vers mon grand‑père et lui demandait : « Qu’est-ce que cela signifie? » et mon grand-père lui expliquait patiemment. Un peu plus tard, l’ami se penchait encore vers lui et lui demandait : « Qu’est-ce que cela veut dire? » et mon grand-père lui expliquait patiemment.

À peu près au milieu de la messe, le prêtre s’est approché d’un lutrin très semblable à celui-ci, a soigneusement retiré sa montre‑bracelet et l’a placée sur le lutrin, comme je le fais maintenant. L’ami s’est penché vers mon grand-père et lui a demandé : « Qu’est-ce que cela veut dire? » Mon grand-père a secoué la tête et a répondu tristement : « Absolument rien. »

Bref, Votre Honneur, quand mes deux heures seront écoulées — je pense que j’ai droit à deux heures —, quelqu’un devrait me faire signe.

Dans la même veine, mais un peu plus en lien avec le projet de loi, hier après-midi, la sénatrice Gagné est venue me parler brièvement et en toute confidentialité. Elle ne fait pas cela très souvent, alors j’avais d’assez grands espoirs. Elle venait peut-être me dire que le premier ministre voulait m’honorer en quelque sorte pour avoir parrainé le projet de loi, qu’il y avait un poste vacant à la Cour suprême du Canada ou que le gouvernement avait besoin d’un ambassadeur en Irlande. Donc, pour reprendre certaines remarques qui ont été faites tout à l’heure, j’ai brièvement pensé aux bonbons.

Je suis en train de révéler une confidence, mais la sénatrice Gagné est venue me demander quel était le minimum de temps dont j’avais besoin pour faire mes commentaires sur le projet de loi. Je m’excuse d’avoir révélé une confidence, sénatrice. La réponse est six minutes, du moins à partir de maintenant.

Permettez-moi d’abord de remercier les leaders au Sénat d’avoir trouvé un moyen pour que le projet de loi C-235 puisse être examiné en temps opportun et très rapidement — je sais que c’est trop rapide pour certains.

J’aimerais aussi remercier les leaders des groupes du Sénat. Je fais partie du Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts, qui est dirigé de main de maître par le sénateur Black, lui‑même appuyé avec brio par Ferda Simpson et son équipe. Nous travaillons consciencieusement, dans une merveilleuse collégialité. Toutefois, notre travail s’effectue relativement dans l’ombre comparativement à d’autres comités sénatoriaux plus prestigieux.

Mon frère me l’a rappelé il n’y a pas longtemps. Il m’a téléphoné pour me dire que sa femme et lui regardaient les travaux du Comité de l’agriculture sur CPAC. Il m’a dit que comme la séance était diffusée sur CPAC au lieu de ParlVu, elle bénéficiait d’une audience nationale, et qu’avec sa femme et lui devant la télévision, la cote d’écoute était probablement passée de cinq à sept personnes. Mon frère est retraité, mais il semble avoir un emploi à temps partiel qui consiste à me rappeler de ne pas trop m’enfler la tête. Il fait un excellent travail.

Cependant, cette semaine, nous avons été bien choyés au Comité de l’agriculture par la participation régulière du leader du gouvernement au Sénat, le sénateur Gold, et du leader de l’opposition, le sénateur Plett, ainsi que la présence des leaders des trois autres groupes, la sénatrice Saint-Germain, la sénatrice Cordy et le sénateur Tannas. Ils se sont intéressés activement aux questions relatives au projet de loi C-235 dont le comité a été saisi. Le sénateur Gold et le sénateur Plett en particulier ont participé de façon active aux délibérations du comité et aux discussions avec les témoins. Je tiens à leur exprimer ma reconnaissance. Le Comité de l’agriculture n’a pas toujours la chance d’accueillir ainsi la royauté du Sénat.

De plus, je tiens à remercier le sénateur Black ainsi que Ferda Simpson et son équipe de leur excellent travail pour faciliter l’étude du projet de loi C-235 et pour faire en sorte que la troisième lecture devienne une réalité aujourd’hui. Je remercie en outre les témoins qui, avec très peu de préavis, ont comparu devant le comité au début de la semaine, tout particulièrement, la procureure générale et ministre de la Justice de ma province, l’honorable Bronwyn Eyre, qui, à très court préavis, s’est rendu disponible pendant deux heures complètes pour témoigner devant le comité au début de la semaine.

Comme vous le savez, il s’agit d’un projet de loi d’initiative parlementaire parrainé à l’autre endroit par le député Jim Carr. M. Carr serait ravi de voir jusqu’où s’est rendu son projet de loi ici, aujourd’hui. En effet, lorsque je lui ai parlé la semaine dernière, il m’a dit que seulement 3 % des projets de loi d’initiative parlementaire de l’autre endroit franchissaient la ligne d’arrivée.

J’espérais pouvoir lui dire aujourd’hui — sous réserve du jugement que vous exprimerez sous peu — que, grâce à son excellent travail, ce pourcentage venait d’augmenter légèrement. Malheureusement, je n’aurai jamais l’occasion de le lui dire. J’aurais également aimé lui dire que je suis honoré d’avoir pu parrainer ce projet de loi.

Comme je l’ai mentionné à l’étape de la deuxième lecture, le projet de loi comporte deux parties qui visent à permettre une meilleure coordination entre certains ministères fédéraux et provinciaux clés pour l’économie des Prairies. La deuxième partie du projet de loi vise une coordination et une coopération accrues en ce qui concerne la mise en œuvre de programmes fédéraux qui contribueront à bâtir une économie verte et durable dans les Prairies, entre divers titulaires d’intérêts et intervenants de la région des Prairies, notamment les provinces, les municipalités, les dirigeants autochtones, les employeurs, les associations de travailleurs, etc.

Je me dois d’ajouter que, comme l’a souligné le sénateur Gold lors de la réunion du comité hier, le paragraphe 5 du projet de loi établit un cadre de responsabilité qui exige du principal ministre concerné la production de rapports réguliers aux deux Chambres, ainsi que la possibilité pour le Parlement de mener de façon périodique une vérification pour s’assurer que l’initiative produit de bons résultats.

Même si je n’en ai pas discuté longuement avec lui, à mon sens, l’objectif de M. Carr était que le projet de loi mène à une plus grande coordination interne des programmes de développement dans cette région — un besoin évident — et à un meilleur dialogue avec les intérêts et les collectivités touchés par ces initiatives, en particulier les partenariats avec les provinces, ce qui serait essentiel pour l’adoption, l’adaptation et, ultimement, la réussite des plans adoptés par le fédéral.

À cet égard, le projet de loi représente en quelque sorte une critique implicite des pratiques adoptées jusqu’à maintenant par le gouvernement pour le déploiement des initiatives en matière de durabilité dans les Prairies.

En ce qui a trait au projet de loi comme tel, nous avons vu des réactions mitigées. Une des préoccupations était qu’il n’y avait pas eu suffisamment de consultations au sujet du projet de loi. Je crois qu’il s’agit d’une observation légitime, mais je voudrais tout de même me porter un peu à la défense de M. Carr. On se souviendra qu’il s’agit d’un projet de loi émanant d’un député et non du gouvernement. Étant donné les faibles chances qu’un tel projet de loi franchisse toutes les étapes du processus législatif, il est quelque peu injuste de s’attendre à ce que le gouvernement lui-même se soit retroussé les manches pour mener de vastes consultations à l’égard de ce projet de loi.

(1240)

Même si, en dépit de ses problèmes de santé, M. Carr a consulté de nombreuses personnes dans les Prairies au sujet du projet de loi, il n’était, après tout, qu’un député aux ressources limitées. Il semble donc légèrement injuste de laisser entendre qu’il aurait dû mener des consultations équivalant à tout un processus de consultation du gouvernement pendant l’étude du projet de loi ou avant sa présentation.

Enfin, si je peux me permettre de revenir à la critique implicite et subtile ancrée dans le projet de loi de M. Carr comme quoi le gouvernement doit s’améliorer à la fois dans son fonctionnement, mais également dans la façon dont il consulte les collectivités concernées par cet ensemble d’initiatives et doit également, comme l’a mentionné le sénateur Gold, rendre des comptes, je crois que M. Carr exprime un deuxième message au moyen de ce projet de loi : la certitude que le gouvernement peut faire mieux et, grâce à cette directive législative, qu’il fera mieux. J’ai le même espoir.

Vous connaissez sans doute l’expression « trouver des solutions et non des coupables », ce qui est également implicite dans ce cas‑ci, selon moi, et c’est ce que M. Carr tente de faire. En d’autres termes, avec ce projet de loi, M. Carr nous encourage à allumer une bougie plutôt que de maudire les ténèbres. À mon avis, cela semble être une métaphore parlante et juste tant pour le projet de loi que pour la vie de M. Carr. Si allumer une bougie ne fonctionne pas, il y aura amplement de temps pour maudire les ténèbres. Toutefois, ces jours-ci, pour rendre hommage à M. Carr, un éminent parlementaire et un grand homme, il me semble que nous devrions opter pour le scénario le plus optimiste.

Je vous remercie de votre attention. J’espère que vous appuierez le projet de loi lorsqu’il sera mis aux voix.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Permettez-moi de commencer mon intervention en suivant l’exemple du sénateur Cotter. J’ai aussi une anecdote qui se passe dans une église. Il n’y est pas question de mon grand-père, mais de moi. Une église de l’Alberta que fréquentent mes enfants m’a fait l’honneur de me demander si je voulais prononcer le sermon. Beaucoup d’entre vous seront peut-être surpris qu’on me demande de prononcer un sermon lors du service du dimanche matin, mais c’est pourtant le cas. Ils m’ont donné la tribune vers 11 h 30 du matin, et j’ai demandé : « Combien de temps dois-je parler? » Le prêtre m’a répondu : « Le temps de parole est illimité. Vous pouvez parler aussi longtemps que vous le souhaitez. Je dois simplement vous prévenir qu’à midi, nous allons tous nous lever et rentrer chez nous, mais vous pouvez continuer à parler aussi longtemps que vous le désirez. »

Je ne m’offusquerai donc pas si vous partez à 13 h 30 ou à 14 h alors que je suis en train de radoter ici. Faites ce que vous pensez être approprié.

Chers collègues, j’aimerais commencer mon discours à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-235 en reconnaissant, encore une fois, le grand cœur et l’intention de son parrain — mon ami, et le vôtre — feu l’honorable Jim Carr. Comme je l’avais mentionné à l’étape de la deuxième lecture, Jim et moi avons été des adversaires politiques. Toutefois, je n’ai jamais douté de son amour pour le Canada et les Prairies ni de sa profonde admiration pour le Manitoba. C’est sa passion qui l’a inspiré à concevoir le projet de loi C-235, Loi concernant le développement d’une économie verte dans les Prairies. C’est aussi cette passion qui lui a donné la force de venir à Ottawa durant la dernière semaine de sa vie pour porter son projet de loi jusqu’à la ligne d’arrivée dans l’autre endroit. Au moins, il a pu vivre ce moment.

Jim avait un cœur d’or et je suis convaincu qu’il imaginait tout le bien découlant de ces mesures législatives. En principe, je peux comprendre quel était son but. Il s’agit d’un grand effort de collaboration entre le fédéral, les provinces, les municipalités, les peuples autochtones, le secteur industriel et les entreprises pour faciliter la concrétisation d’une priorité que Jim avait à cœur. Je félicite mon ami pour son travail et son intention. J’éprouve un très grand respect pour ce qu’il voulait accomplir.

Malheureusement, son plan comporte une lacune majeure : son plan pourra seulement se réaliser si le gouvernement fédéral met en œuvre le projet de loi dans le même esprit que Jim l’a conçu — un esprit de collégialité et de collaboration. Or, le gouvernement est clairement incapable d’agir dans un esprit de collégialité et de collaboration.

Chers collègues, nous l’avons clairement vu, même lors des réunions de notre comité. En effet, plusieurs témoins ont mentionné à quel point ils étaient heureux, voire surpris, d’être invités au comité pour parler du projet de loi. Vous pourriez considérer cela comme un compliment, mais je n’ai pas pu m’empêcher de le voir comme une grave condamnation du gouvernement. Quand des représentants de secteurs clés de l’économie sont surpris d’être invités à témoigner sur des enjeux qui pourraient avoir des répercussions considérables sur leur secteur, cela nous dit que le gouvernement actuel a un bilan déplorable en matière de consultation.

N’oubliez pas que le gouvernement n’a pas présenté ce projet de loi. Il s’agit d’un projet de loi d’initiative parlementaire, comme l’a signalé à juste titre le sénateur Cotter. Toutefois, c’est une mesure législative qui exigera des consultations et une collaboration de la part du gouvernement fédéral. Si ce dernier avait fait son travail, il n’aurait jamais été nécessaire d’élaborer un tel projet de loi. Avoir besoin d’un projet de loi d’initiative parlementaire pour favoriser la tenue de consultations et pour élaborer en commun un plan sur cet enjeu important est une condamnation accablante du bilan du gouvernement. Cela ne me donne pas l’espoir que ce projet de loi atteindra le but recherché par Jim Carr.

Je crois qu’à bien des égards, le traitement que fait subir le gouvernement aux provinces des Prairies depuis sept ans est de mauvais augure pour ce projet de loi. C’est la principale raison pour laquelle aucune de ces provinces n’en veut, et cela en dit long sur la relation entre le gouvernement actuel et les provinces des Prairies. Le député Pat Kelly a expliqué la situation en ces termes à l’autre endroit :

[...] ce projet de loi ne fera rien d’autre qu’imposer à des provinces réticentes un processus dont les personnes concernées ne veulent pas en vue d’atteindre des objectifs que les habitants des provinces touchées n’approuvent pas, tout cela pour faire rapport à un gouvernement fédéral qui n’écoute pas et dont le bilan laisse croire qu’il portera encore davantage préjudice à trois provinces canadiennes à qui il a déjà causé de graves préjudices.

Je dirais que c’est un assez bon résumé. Si vous croyez que c’est un peu sévère, vous devez comprendre que, à l’heure actuelle, les mesures phares du gouvernement en ce qui concerne l’économie « verte » des Prairies sont la taxe sur le carbone et le plan de réduction des émissions liées aux engrais, deux mesures extrêmement nuisibles à l’économie des Prairies qui n’ont pas fait l’objet de véritables consultations. Souvenons-nous par ailleurs du projet de loi C-69, le projet de loi anti-pipelines, et du projet de loi C-48, le projet de loi contre l’exploitation des ressources naturelles. Les gouvernements des Prairies se sont opposés à toutes ces initiatives, mais on leur a quand même imposé ces mesures sans leur laisser le choix. Voilà l’idée que le gouvernement fédéral se fait de la consultation.

Vous m’excuserez donc si je ne suis pas aussi optimiste que d’autres sénateurs quant à la capacité du gouvernement fédéral de mettre en œuvre un cadre exigeant une consultation et une collaboration véritables et visant à stimuler l’économie des Prairies. Cela n’a jamais fait partie de ses priorités, et rien ne laisse entendre que ce projet de loi va soudainement en faire une priorité. C’était la priorité de Jim Carr. Jim aimait les Prairies. Cependant, dans tout ce que le gouvernement dit ou fait, rien ne nous permet de croire que les Prairies lui tiennent à cœur.

Prenez simplement le fait qu’en dépit de l’opposition des trois provinces des Prairies, le gouvernement fait tout en son pouvoir pour faire adopter ce projet de loi rapidement. Si on se fie au comportement du leader du gouvernement, les libéraux considèrent ce projet de loi comme une mesure d’initiative ministérielle. Je n’ai pas souvenir qu’un leader du gouvernement au Sénat se soit déjà présenté, en tant que membre d’office, à une séance de comité portant sur l’étude d’un projet de loi d’initiative parlementaire. De toute évidence, il avait reçu des instructions du Cabinet du premier ministre à ce sujet.

Chers collègues, cette situation est regrettable, non seulement parce que nous n’avons pas vraiment eu la possibilité d’exercer une diligence raisonnable, mais aussi parce qu’elle indique aux provinces qu’elles peuvent s’attendre à la même chose à l’avenir.

Chers collègues, par respect et par admiration pour Jim Carr, je me suis engagé envers lui à ne pas m’opposer à l’étude de ce projet de loi. Même si je n’appuie pas cette mesure, je respecte mon engagement, et j’accepterai qu’elle soit adoptée avec dissidence. Cela dit, chers collègues, la décision vous revient. Merci.

(1250)

L’honorable Mary Jane McCallum : Honorables sénateurs, je prends la parole à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-235, Loi concernant le développement d’une économie verte dans les Prairies.

Je tiens à exprimer clairement mes inquiétudes au sujet de la procédure accélérée adoptée pour ce projet de loi au Sénat — un projet de loi d’initiative parlementaire qui bénéficie d’un traitement privilégié lui permettant d’avoir préséance sur les projets de loi d’initiative ministérielle à l’étude. C’est une procédure que je n’avais encore jamais vue.

Je suis consciente que ce traitement privilégié et cette exception ont reçu l’aval des leaders des quatre caucus. À titre de sénatrice non affiliée, je ne fais partie d’aucun caucus. Je n’ai donc pas participé à la conclusion de cette entente et je n’en ai pas été informée. De surcroît, je m’y oppose. Par conséquent, il n’y avait pas consentement unanime pour adopter cette procédure qui cherche à marginaliser, à exclure et à réduire au silence certains segments de la population canadienne.

Je sais que le projet de loi a été étudié rapidement en hommage à un regretté collègue, mais je trouve très inquiétant qu’on nous demande de précipiter l’adoption d’une mesure législative pour cette raison uniquement. Je ne connaissais pas personnellement ce collègue, mais selon les hommages que j’ai entendus, je suis portée à croire qu’il aurait voulu que son legs comprenne l’équité, la diversité, l’inclusion, le respect, les rapports humains, l’intégrité, la confiance, la réconciliation et la confiance du public. Toute étude exceptionnelle et rapide nécessite un examen rigoureux pour qu’il y ait de la transparence et pour que la confiance du public soit maintenue. Cependant, ce projet de loi n’a été étudié que trois jours au Sénat.

Le débat à l’étape de la deuxième lecture a commencé il y a seulement deux jours, et, aujourd’hui, nous tiendrons le vote final sur un projet de loi très complexe qui n’a pas besoin d’être adopté rapidement. Dans le cadre de ce processus, on a décidé de tenir seulement une réunion du comité pour entendre le point de vue des nombreux détenteurs de droits et intervenants. Lors de cette étude, absolument aucun témoin des Premières Nations n’a été entendu sur les questions qui ont une grande incidence sur elles en tant que détenteurs de droits, sur leurs droits issus de traités, sur leurs droits économiques et sur leurs droits de la personne. Toutefois, vous êtes au courant, étant donné que vous avez adopté le projet de loi C-15.

Comme beaucoup d’entre vous le savent grâce à la correspondance que nous avons tous reçue au cours des 24 dernières heures, les Premières Nations n’étaient pas au courant de la présentation imminente du projet de loi et du peu de temps accordé à son étude au Sénat. Cette situation a empêché les Premières Nations d’exprimer leurs préoccupations à l’égard du projet de loi. Dans le cadre de discussions sur le processus adopté par le Sénat, l’Assemblée des chefs du Manitoba a fait le commentaire suivant : « L’absence d’avis et de participation des Premières Nations est aussi ridicule qu’irrespectueuse. »

Cette réaction en dit long, chers collègues. Elle est directe, mais je suis tout à fait d’accord sur ce qu’elle exprime. Parmi les rôles bien établis du Sénat figure celui de faire entendre les droits et les intérêts des minorités dans notre étude des projets de loi. À titre de sénateurs, nous avons le devoir de promouvoir les principes et valeurs fondamentaux de notre système démocratique, particulièrement parce que le Sénat a traditionnellement pour rôle d’agir au nom de groupes sous-représentés à la Chambre des communes, comme l’a souligné la Cour suprême du Canada dans le Renvoi relatif à la réforme du Sénat, 2014 :

Avec le temps, le Sénat en est aussi venu à représenter divers groupes sous-représentés à la Chambre des communes. Il a servi de tribune aux femmes ainsi qu’à des groupes ethniques, religieux, linguistiques et autochtones auxquels le processus démocratique populaire n’avait pas toujours donné une opportunité réelle de faire valoir leurs opinions.

Nous nous retrouvons cependant, une fois de plus, à participer à un processus qui écarte ces voix marginalisées de la conversation et les muselle délibérément. C’est particulièrement troublant, étant donné que le projet de loi à l’étude aura des conséquences considérables et immédiates pour les Premières Nations des provinces des Prairies. En tant que sénateurs, nous sommes titulaires d’une charge publique unique qui nous demande, à titre de parlementaires, de confronter le racisme sans hésitation et de veiller à l’intégrité de l’institution.

Hier, les sénateurs ont reçu un mémoire de l’Assemblée des chefs du Manitoba, dans lequel les chefs soulignent leur préoccupation à l’égard du projet de loi C-235. Dans leur mémoire, ils expriment l’impasse dans laquelle les a placés la façon d’agir du Sénat. Selon leurs mots, « cela a sévèrement réduit la capacité de l’Assemblée des chefs du Manitoba à se préparer correctement et à demander à être un témoin pour en parler ».

Nous avons reçu la même chose. Je sais que l’organisation Manitoba Keewatinowi Okimakanak avait déposé une demande afin de prendre parole.

Disons-le clairement : l’Assemblée des chefs du Manitoba a souligné son soutien au développement d’une économie verte. Cependant, comme ils le soutiennent à juste titre, cette approche :

[...] doit se faire avec les Premières Nations en tant que partenaires de traités avec la Couronne jouant un rôle beaucoup plus important dans les questions qui touchent les terres cédées en vertu d’un traité et les territoires traditionnels des Premières Nations, ainsi que les eaux qui les traversent.

L’Assemblée des chefs du Manitoba a déclaré, chers collègues, que le projet de loi C-235 représente :

[...] l’élaboration d’un cadre par un processus de consultation et de participation légiféré qui maintient le statu quo et qui ne tient pas compte des développements actuels qui ont des répercussions sur leurs droits inhérents et les droits issus de traités des Premières Nations du Manitoba et d’autres provinces.

Honorables sénateurs, l’Assemblée des chefs du Manitoba met en évidence une préoccupation plus grande et plus directe à l’égard de ce projet de loi lorsqu’elle écrit :

Le projet de loi C-235 traite des provinces du Manitoba, de la Saskatchewan et de l’Alberta, qui ont toutes autrefois adopté des lois visant à transférer le contrôle de leurs terres de la Couronne et de leurs ressources naturelles du gouvernement fédéral à leurs gouvernements provinciaux sans le consentement libre, préalable et éclairé des Premières Nations. Selon l’Assemblée des chefs du Manitoba, le fait d’appuyer un projet de loi qui touche directement la loi concernant le transfert des ressources naturelles, les terres visées par un traité, les droits issus de traités ainsi que l’autodétermination et la souveraineté des Premières Nations du Manitoba peut être interprété comme un appui au statu quo et une acceptation des questions non résolues qui restent à régler.

Honorables sénateurs, il est important de souligner que la Fédération des nations indiennes de la Saskatchewan tiendra une conférence de presse demain pour annoncer qu’elle intente une poursuite relativement aux lois concernant le transfert des ressources naturelles. Cette poursuite a l’appui des chefs des Premières Nations du Manitoba et de l’Alberta. Chers collègues, grâce à ce préavis, nous sommes tous maintenant conscients que cette poursuite est imminente. L’adoption d’une loi fédérale qui interférera avec ce processus est à la fois imprudente et contraire à la pratique habituelle du Sénat, surtout en ce qui concerne un projet de loi dont l’adoption rapide n’est pas nécessaire. En tant que sénateurs, nous avons besoin de précisions sur la poursuite à venir.

Chers collègues, nous devons réfléchir à l’importante mesure législative que nous avons adoptée, le projet de loi C-15, qui vise à harmoniser les lois canadiennes avec la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Cette chambre a voté en faveur de ce projet de loi, affirmant ainsi sa volonté que les articles de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones servent de principes directeurs pour la rédaction et la mise en œuvre des mesures législatives fédérales pour ce qui est de leur incidence sur les peuples autochtones du Canada et de leur inclusion.

Le projet de loi C-235 représente un test décisif pour déterminer dans quelle mesure le Sénat respecte les principes de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. L’une des caractéristiques fondamentales de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones est qu’elle exige du Canada qu’il collabore avec les Premières Nations, qu’il les sollicite et les consulte directement, dans le cadre de relations de nation à nation. Cette preuve de respect et cette volonté de conciliation font cruellement défaut dans ce projet de loi.

Ce manque de respect et de volonté de conciliation s’est clairement manifesté dans le cadre de l’étude du projet de loi C-235 par le comité. Les Premières Nations ont fait savoir qu’elles souhaitaient être entendues comme témoins sur cette mesure législative. Comme elles n’ont pas été consultées lors de l’élaboration du projet de loi, il est essentiel de leur permettre de se faire entendre pendant l’étude en comité. Or, comme nous le savons, le comité ne s’est que très peu penché sur ce projet de loi. Cette étude a eu lieu hier soir, et un seul groupe de témoins a été entendu. Pas un seul représentant des Premières Nations n’a pu s’exprimer dans le cadre de ces travaux. Comment a-t-on décidé d’inviter certains témoins plutôt que d’autres?

Honorables sénateurs, il convient de nous interroger pour déterminer si l’adoption du projet de loi C-235 à ce moment-ci est responsable, équitable et juste. Si nous voulons rester honnêtes envers nous-mêmes, nous devons reconnaître qu’il ne nous a pas été possible d’effectuer une étude approfondie, détaillée, et donc responsable du projet de loi.

(1300)

Le fait que les Premières Nations et d’autres groupes qui subiront des répercussions négatives n’aient pas eu l’occasion de se faire entendre sur cette question même s’ils ont manifesté le désir de le faire devrait être une raison suffisante pour nous inciter à reporter temporairement le vote final. Le musellement est un comportement violent et ne constitue pas un bon fondement pour un projet de loi.

Reporter le vote final jusqu’au début de la nouvelle année n’aura aucun effet délétère sur le projet de loi. Cependant, réduire au silence les Premières Nations lorsqu’elles demandent d’être entendues aurait un effet délétère sur le Canada — et sur le Sénat. Nous devons donc nous demander pourquoi nous avons adopté des projets de loi qui étaient censés favoriser l’autodétermination et l’établissement d’une relation de nation à nation.

Chers collègues, il n’est pas trop tard pour faire ce qui est juste en reportant l’adoption d’une rapidité troublante du projet de loi. Cela donnera à tous les intervenants touchés la possibilité de se faire entendre et permettra aux sénateurs de traiter le projet de loi de façon responsable et respectueuse et de procéder à un second examen objectif.

Rejet de la motion d’amendement

L’honorable Mary Jane McCallum : Par conséquent, honorables sénateurs, je propose l’amendement suivant :

Que le projet de loi C-235, Loi concernant le développement d’une économie verte dans les Prairies, ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu’il soit renvoyé de nouveau au Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts pour étude additionnelle.

Merci, kinanâskomitin.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : À mon avis, les non l’emportent.

Et deux honorables sénateurs s’étant levés :

Son Honneur le Président : Y a‑t-il entente au sujet de la sonnerie?

Des voix : Dix minutes.

Des voix : Une heure.

Son Honneur le Président : Par défaut, elle retentit pendant une heure. J’ai entendu la sénatrice McCallum dire « une heure ».

Le vote aura lieu à 14 h 2.

Convoquez les sénateurs.

(1400)

La motion d’amendement de l’honorable sénatrice McCallum, mise aux voix, est rejetée :

POUR
Les honorables sénateurs

McCallum Patterson (Nunavut)—3
Pate

CONTRE
Les honorables sénateurs

Bellemare Dupuis
Black Gagné
Boehm Gerba
Boniface Gold
Bovey Harder
Busson Hartling
Cardozo LaBoucane-Benson
Carignan Loffreda
Clement Marwah
Cordy Miville-Dechêne
Cormier Moncion
Cotter Omidvar
Coyle Petitclerc
Dagenais Ringuette
Dalphond Saint-Germain
Dasko Smith
Dawson Sorensen
Deacon (Nouvelle-Écosse) Woo
Deacon (Ontario) Yussuff—39
Dean

ABSTENTIONS
Les honorables sénateurs

Ataullahjan Martin
Batters Patterson (Ontario)
Downe Seidman
Housakos Tannas
MacDonald Wells—10

Troisième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Cotter, appuyée par l’honorable sénatrice Petitclerc, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-235, Loi concernant le développement d’une économie verte dans les Prairies.

L’honorable Scott Tannas : Honorables sénateurs, je serai bref.

D’abord, je veux transmettre mes condoléances à la famille de M. Carr. Je ne le connaissais pas du tout, mais, à l’évidence, le Canada a perdu un grand homme public.

Le projet de loi C-235 a de grandes ambitions, comme l’ont souligné beaucoup d’intervenants, et il pourrait mener à une nouvelle ère de coopération sur des enjeux vitaux que certains qualifieraient d’existenciels pour le pays et la planète. Je crois que le projet de loi a été conçu avec optimisme par un optimiste des Prairies et nous sommes nombreux ici à faire confiance au processus d’essais et d’erreurs, d’échecs, de correction et de nouveaux essais jusqu’à la réussite. C’est ce que font les optimistes. On dit que la mince consolation des pessimistes, c’est d’avoir raison.

Comme moi, bon nombre de mes collègues du Groupe des sénateurs canadiens n’étaient pas à l’aise avec le processus. Mes collègues leaders étaient au courant. Or, nous n’avons pas essayé d’empêcher la mise aux voix aujourd’hui. Cela dit, je suis tout de même mal à l’aise et j’ai l’intention de m’abstenir de voter pour le signifier.

(1410)

Le Sénat a accordé la priorité à ce projet de loi pour des raisons émotionnelles. Je pense que beaucoup d’entre nous sont d’accord avec ce constat. C’est en tout cas mon avis. En pareil cas, les gens sont prêts à adopter rapidement une mesure législative pour des raisons personnelles et émotionnelles. Je crois, cependant, que chacun d’entre nous doit reconnaître ce fait et sa position concernant le projet de loi. Sur ce, je pense que nous pouvons témoigner pour une dernière fois du respect envers M. Carr en tant qu’auteur du projet de loi et du respect envers le Sénat en tant qu’assemblée qui examine les projets de loi.

Nous demanderons un vote par appel nominal avec une sonnerie la plus courte possible. Merci.

Des voix : Bravo!

Son Honneur le Président : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : L’honorable sénateur Cotter, avec l’appui de l’honorable sénatrice Petitclerc, propose que le projet de loi soit lu pour une troisième fois. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : À mon avis, les oui l’emportent.

Et deux honorables sénateurs s’étant levés :

Son Honneur le Président : Je vois deux sénateurs se lever. Y a‑t-il entente au sujet de la sonnerie?

Des voix : Maintenant.

Son Honneur le Président : Le vote aura lieu maintenant.

La motion, mise aux voix, est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté :

POUR
Les honorables sénateurs

Boehm Gagné
Boniface Gerba
Bovey Gold
Busson Harder
Cardozo Hartling
Clement LaBoucane-Benson
Cordy Loffreda
Cormier Marwah
Cotter Miville-Dechêne
Coyle Omidvar
Dasko Petitclerc
Dawson Ringuette
Deacon (Nouvelle-Écosse) Saint-Germain
Deacon (Ontario) Woo
Dean Yussuff—31
Furey

CONTRE
Les honorables sénateurs

Ataullahjan Martin
Batters McCallum
Black Patterson (Nunavut)
Carignan Plett
Dagenais Seidman
Housakos Smith—12

ABSTENTIONS
Les honorables sénateurs

Bellemare Patterson (Ontario)
Dalphond Sorensen
Downe Tannas
Dupuis Wells—9
Pate

Les travaux du Sénat

Expression de vœux pour un joyeux temps des Fêtes

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, nous y sommes enfin. C’est la fin de l’année 2022 et nous tenons encore debout.

Lorsque nous sommes revenus l’automne dernier et que nous l’avons fait en personne, j’admets que l’option de la connexion virtuelle m’a manqué. Cela dit, il a été vraiment agréable de se rencontrer en personne, de prendre un café — parfois quelque chose d’un peu plus fort — et de compatir tout en abordant les problèmes auxquels les Canadiens sont confrontés et en faisant de notre mieux pour améliorer les choses.

[Français]

Les séances du Sénat et les réunions des comités ont été plus fréquentes à partir du mois de février et nous sommes maintenant pratiquement revenus à la normale. Sachez que je suis reconnaissant pour le travail accompli et les progrès réalisés en matière d’études et de législation.

[Traduction]

À mes collègues du bureau du représentant du gouvernement, les sénatrices Gagné et LaBoucane-Benson, sachez que votre aide est inestimable. J’ai beaucoup de gratitude envers vous. Nous formons une petite, mais redoutable équipe. Nous nous soutenons mutuellement tout en échangeant des idées, des frustrations et des éclats de rire. Je vous suis reconnaissant de votre sagesse, de votre engagement et de votre amitié.

Au personnel du bureau du représentant du gouvernement, il n’est pas exagéré de dire que nous trois ne pourrions pas faire notre travail sans tout ce que vous faites pour nous : vos recherches, vos séances d’information, la façon dont vous organisez nos journées et nos vies, vos conseils, les textes que vous rédigez parfois pour nous, le travail de communication que vous faites entre vous, vos interventions quotidiennes pour nous préparer à assumer nos responsabilités dans cette enceinte, ainsi que votre amitié.

[Français]

Votre appui est essentiel à l’accomplissement de notre travail; il est donc, par extension, essentiel au travail du gouvernement, et ce, dans l’intérêt supérieur du Canada. Merci.

[Traduction]

Je remercie mes collègues en position de leader, les sénateurs Plett, Saint-Germain, Cordy et Tannas, de la patience dont ils ont fait preuve à mon égard et dont, franchement, nous faisons preuve entre nous et dont vous faites preuve à l’égard de tous les sénateurs. Nos discussions et nos négociations ne sont pas toujours faciles, mais je n’ai jamais douté que nos débats et nos décisions étaient sincères et qu’ils émanaient d’une préoccupation légitime pour les Canadiens et pour cette assemblée, ainsi que d’un désir sincère de faire ce qu’il y a de mieux pour les membres de vos groupes, et par le fait même pour les régions qu’ils représentent et, bien sûr, pour le pays dans son ensemble.

(1420)

[Français]

Nous adressons également nos sincères remerciements aux greffiers, aux pages, aux interprètes, au Service de protection parlementaire, aux sténographes, au service à la clientèle et au personnel de l’Administration du Sénat. Cette Chambre et nos comités fonctionnent grâce à votre dévouement. Merci mille fois.

[Traduction]

Vous avez tous fait un travail remarquable pendant la pandémie et vous avez été à nos côtés constamment et fidèlement tout au long de l’année. Vous méritez énormément de reconnaissance, et je sais que nous partageons tous cette gratitude à votre égard.

Sénateur Furey, merci. Je vous remercie du calme et de la fermeté dont vous avez fait preuve lorsqu’il le fallait. Je vous remercie aussi pour votre sagesse, votre grâce et votre expérience. Ils constituent des exemples et des inspirations pour nous tous. J’en suis énormément reconnaissant, de même que de tout ce que vous faites pour nous.

Enfin et surtout, je tiens à remercier mon épouse, Nancy, qui semble n’avoir rien de mieux à faire ces jours-ci que de regarder les délibérations du Sénat. Donc, si tu nous regardes, Nancy, merci de me soutenir dans cette aventure.

Comme l’a dit plus tôt Dan Christmas, nos familles portent le fardeau du travail que nous accomplissons tous au nom des Canadiens, alors merci à ma chère épouse.

À vous tous, je vous souhaite ce qu’il y a de mieux pour les Fêtes et pour la nouvelle année et je vous prie de transmettre mes meilleurs vœux à votre famille, ainsi qu’à tous vos amis et à vos proches. Je vous souhaite une année 2023 enrichissante et remplie de santé et de prospérité.

Que nous fassions nos célébrations à l’église, à la synagogue, au temple, à la mosquée ou simplement autour de la table familiale, j’espère sincèrement que les Fêtes seront comblées par la famille, les amis, l’amour et du repos bien mérité. Merci à tous.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, ceux d’entre vous qui étaient à la réunion du Comité de la régie interne ce matin savent que j’étais un peu grincheux. Je vais donc terminer la saison en disant quelques mots aimables.

Chers collègues, alors que la session tire à sa fin et que Noël approche à grands pas, je veux profiter de l’occasion pour dire quelques mots gentils et remercier quelques personnes. J’ai dressé une petite liste, une liste d’actes de gentillesse à poser pour Noël.

Les remerciements sont le premier élément de cette liste. Je souhaite tout d’abord remercier le Président d’avoir organisé la fête de Noël du Sénat cette année. C’était une merveilleuse occasion de passer du temps ensemble après deux ou trois ans, je ne me souviens plus très bien à quand remontait la dernière fête de la sorte. Nous avons passé de beaux moments ensemble et nous avons dansé toute la nuit, du moins jusqu’à 20 h 30, ce qui était suffisant pour certains d’entre nous.

Trêve de plaisanteries, Votre Honneur, il est peut-être un peu trop tôt pour en parler, mais, d’ici Noël 2023, vous serez à la retraite. Ce Noël sera donc le dernier où vous serez des nôtres au Sénat, à moins que vous trouviez un nouveau certificat de naissance. Par conséquent, Votre Honneur, je tiens également à vous remercier personnellement de tout ce que vous avez fait au fil des années, tant comme Président que dans le cadre de vos fonctions précédentes. Je vous suis reconnaissant d’avoir veillé au bon déroulement des travaux du Sénat en faisant preuve d’une patience exceptionnelle, mais je suis encore plus reconnaissant de votre amitié.

J’offre aussi ma gratitude à la Présidente intérimaire, aux greffiers au Bureau, à l’huissier du bâton noir ainsi qu’à son bureau, au personnel de sécurité, à l’Administration du Sénat et à l’ensemble des sénateurs et des membres de leur personnel qui font partie de cette grande famille à laquelle nous appartenons.

Je remercie les membres de mon personnel du soutien exceptionnel qu’ils m’ont offert ainsi qu’à mon caucus. Je me vante souvent d’avoir la meilleure équipe sur la Colline du Parlement, mais je crois que ce n’est pas de la vantardise quand on dit la vérité.

Je remercie les membres de mon caucus et de mon équipe de direction pour l’année que nous avons passée ensemble. Comme nous sommes moins nombreux maintenant, nous avons eu la possibilité de tisser des liens solides en collaborant plus étroitement que jamais afin de remplir efficacement notre rôle d’opposition au Sénat du Canada. Les Canadiens d’un océan à l’autre ont constaté l’incroyable travail que vous faites en leur nom et je vous remercie de votre dévouement inlassable.

Je souhaite aux chefs des autres groupes sénatoriaux— Marc, Raymonde, Jane et Scott — de profiter du répit que nous offre le temps des Fêtes. Je suis ravi de siéger avec vous. Nous avons parfois des discussions houleuses, mais c’est un plaisir de travailler avec vous tous.

Le prochain acte de gentillesse sur ma liste à l’occasion de Noël cette année me tient vraiment à cœur. Je remercie les exceptionnels hommes et femmes en uniforme, soit les militaires, les agents de sécurité et les pompiers. Vous êtes les courageux héros de notre pays. Votre travail au service de vos concitoyens est une source de réconfort et d’espoir pour l’avenir. Que vous soyez à l’étranger ou au Canada, je tiens à ce que vous sachiez que nous vous apprécions et que vous méritez notre infinie reconnaissance.

Je salue les anciens combattants auxquels les récentes nouvelles causent sans doute beaucoup de soucis, ce qui est regrettable. Je prie sincèrement pour que vous ressentiez la véritable gratitude qu’éprouvent les Canadiens pour ce que vous faites et ce que vous continuez à défendre. Vous méritez notre plus grand respect.

Cela m’amène au troisième point sur ma liste d’actes de gentillesse : chanter des chants de Noël. Jeudi dernier, j’ai toutefois constaté, une fois de plus, que les plus doués pour la musique sont le sénateur Gold, la sénatrice Ringuette, l’huissier du bâton noir et le sénateur Cormier. J’éviterai donc de chanter. En fait, nous avons découvert que j’ai plutôt un talent de danseur. Je remercie la sénatrice Pate de m’avoir tiré de ma chaise et de m’avoir sorti de ce que je décrirais comme ma zone de confort. Mon épouse m’a cependant rappelé qu’après quelques verres, j’étais probablement dans ma zone de confort.

Chers collègues, dans l’esprit de ces actes de gentillesse, j’ai décidé d’être bref mais, comme le demande le quatrième élément de ma liste, je vous parlerai de ce que Noël représente vraiment pour moi.

La naissance du Christ est au cœur de cette saison sacrée; elle est porteuse d’espoir et de renouveau. C’est une période de rassemblements joyeux avec la famille et les amis, et l’occasion de réfléchir aux bienfaits de la vie, de redonner aux personnes dans le besoin et de prier pour elles. J’espère que le message de Noël sera source de réconfort pour chacun d’entre nous quand nous repenserons à l’année qui s’achève, et qu’il nous donnera de l’espoir alors que nous nous préparerons à accueillir la nouvelle année.

À vous tous, membres de ma famille du Sénat, je souhaite un très joyeux Noël et une joyeuse Hanoukka, et j’offre mes meilleurs vœux pour 2023. Soyez prudents. J’ai sincèrement hâte de vous retrouver et de passer du temps avec vous l’an prochain. Merci, chers collègues.

Des voix : Bravo!

[Français]

L’honorable Raymonde Saint-Germain : Chers collègues, je veux moi aussi offrir mes meilleurs vœux des Fêtes à notre grande famille du Sénat, aux sénateurs de toutes les affiliations, au personnel de nos bureaux, aux équipes de l’Administration du Sénat, à notre équipe de la Chambre qui nous est aussi précieuse, ainsi qu’aux membres du Service de protection parlementaire et de la Bibliothèque du Parlement. Le sénateur Plett l’a très bien dit : « ma famille du Sénat ». Je pense qu’en nous retrouvant en personne en septembre, nous avons compris qu’ensemble, nous sommes aussi une grande famille, avec, comme dans toutes les familles, certains qui sont plus ou moins sages, certains qui se chicanent entre eux, mais au bout du compte, un groupe, une famille qui se tient, qui est solidaire et qui s’aime. C’est très beau et je suis très heureuse de faire partie de cette famille.

J’ai aussi une pensée pour les membres de notre famille sénatoriale qui ne sont pas avec nous aujourd’hui, pour des raisons médicales ou parce que cette année, ils ont perdu des êtres chers qu’ils pleurent encore. Nos pensées sont avec vous, chers collègues; nous avons espoir et hâte de vous retrouver en 2023 et nous savons que ce premier Noël sans vos êtres chers sera difficile, alors nous sommes avec vous de tout cœur.

(1430)

[Traduction]

J’aimerais aussi remercier tout spécialement mes collègues qui occupent des postes de leaders : les sénateurs Gold, Plett et Tannas ainsi que la sénatrice Cordy — l’autre femme du groupe. Nous avons dû mener de nombreuses négociations au cours de l’année, certaines plus difficiles que d’autres — je dirais même éprouvantes —, mais je me réjouis de pouvoir compter sur votre bonne foi et votre camaraderie. Cela dit, je sais que la pause jusqu’en février nous fera le plus grand bien.

Je tiens à exprimer mon respect et ma gratitude envers notre Président, le sénateur Furey, pour sa compréhension et ses directives diplomatiques quand vient le temps d’appliquer le Règlement et nos pratiques. Je lui suis aussi reconnaissante de faire observer le décorum et de maintenir la civilité à la Chambre haute. Je transmets ces mêmes remerciements à Son Honneur la Présidente intérimaire, la sénatrice Ringuette. Je vous suis sincèrement reconnaissante à tous les deux pour votre sagesse, votre dignité et vos connaissances approfondies de cette institution.

Par ailleurs, j’aimerais prendre le temps de remercier chaleureusement l’équipe de facilitation — c’est une expression que nous avons inventée — du Groupe des sénateurs indépendants. Sénateurs Dean, Petitclerc, Duncan et notre nouvelle membre, la sénatrice Clement, je tiens à vous dire que votre soutien quotidien pour servir et représenter notre merveilleux groupe est crucial. Je me sens privilégiée de vous avoir à mes côtés.

Chers collègues, je suis fière du travail que nous avons réussi à accomplir cette année, que ce soit dans cette enceinte avec des interventions réfléchies et efficaces, au sein des comités lors des études et de l’examen attentif des projets de loi, ou encore à l’extérieur du Sénat dans le cadre des activités publiques.

À nos nouveaux et très prometteurs sénateurs et collègues — les sénateurs Burey, Cardozo, Greenwood, Osler, Patterson et Shugart —, je dirai que chaque sénateur peut contribuer de manière unique au Sénat. N’hésitez pas à soumettre vos idées et à faire en sorte que le Sénat reste un lieu dynamique où servir adéquatement les Canadiens.

De la part de tous les membres du Groupe des sénateurs indépendants, je vous souhaite un merveilleux temps des Fêtes. Reposez-vous, et nous nous reverrons tous l’an prochain. Merci, meegwetch.

L’honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, j’aimerais moi aussi transmettre quelques souhaits et vous remercier au nom du Groupe progressiste du Sénat.

La fin de l’année est souvent un moment de réflexion. Nous avons dit au revoir à plusieurs collègues cette année, dont un pas plus tard que ce matin. Par contre, nous avons aussi souhaité la bienvenue à d’autres, un peu plus tôt cette semaine entre autres. Chaque fois que nous accueillons de nouveaux sénateurs, cela réveille en nous des souvenirs heureux de cet endroit. Chaque fois que je vois un nouveau sénateur arriver, cela me rappelle ma propre arrivée au Sénat. Cela ne date pas d’hier, mais mes souvenirs sont encore bien frais à ma mémoire.

Je crois que nous arrivons tous ici avec de grands projets, et nous apprenons — certains plus rapidement que d’autres — que les choses ne se déroulent pas toujours comme prévu. Lors de certaines de mes conversations avec nos plus récentes recrues, je les ai invitées à garder l’esprit ouvert et de visiter tous les comités, car nous avons été nombreux à être surpris par ce qui peut susciter notre intérêt, ce qui a changé l’orientation de nos travaux.

Cette année, en tant que leader, j’ai dit à tous les membres qu’ils pouvaient choisir les comités qu’ils voulaient et que je me contenterais de ceux qui resteraient. L’un d’entre eux était le Comité des pêches et des océans. Je me suis dit : « Je viens du Canada atlantique, mais je ne connais pas grand-chose à la pêche, si ce n’est que j’aime manger du poisson. » Je dois toutefois avouer que j’adore ce comité. Il est très agréable de travailler avec ses membres. Son président, le sénateur Manning, est très accueillant, et j’ai énormément appris. Il est donc possible d’apprendre des choses lorsqu’on fait partie d’un comité chargé de questions sur lesquelles on ne sait pas grand-chose.

Nous devons nous rappeler que tout ne se passe pas toujours au moment où nous le souhaiterions. Bien que cela puisse être exaspérant, il est certain que cette réalité reflète souvent le fait que nous travaillons toujours sur plusieurs dossiers en même temps et que nous ne pouvons jamais prévoir quand une nouvelle question prendra notre temps et notre intérêt.

En cette période de réflexion, puissions-nous tous regarder avec fierté nos réalisations, mais également réfléchir à la façon de faire mieux l’année prochaine. Nous disons souvent que même si nous ne sommes pas toujours d’accord, nous sommes tous ici dans le même but. Je suis reconnaissante de nos échanges de points de vue productifs au service de tous les Canadiens.

J’exprime ma sincère reconnaissance à nos collaborateurs pour les efforts qu’ils consentent. Je remercie également le Président et son personnel pour leurs conseils et leur leadership. Je remercie également les employés des bureaux des sénateurs, car c’est grâce à eux que nous faisons toujours bonne figure.

À titre personnel, je remercie sincèrement le sénateur Furey d’assumer la présidence en faisant toujours preuve d’équité et en veillant au bon déroulement des travaux. Vous sollicitez également la participation des chefs et des leaders au Sénat lorsque vous prenez des décisions, ce qui est très apprécié.

Je remercie également la Présidente intérimaire, qui est toujours prête à occuper le fauteuil de façon fort compétente.

Au nom du Groupe progressiste du Sénat, je remercie également les très nombreuses personnes qui appuient le travail que nous faisons, notamment les greffiers au Bureau, les pages, les sténographes, les interprètes, les traducteurs, ainsi que le personnel du Bureau de la procédure et des travaux de la Chambre, de la Direction des services d’information, de la Direction des communications du Sénat, du Bureau du légiste, des comités, de la Direction de la sécurité institutionnelle et de la Direction des biens et services. Vous vous acquittez toujours extrêmement bien de votre tâche en dépit des défis des dernières années.

En examinant la liste plus tôt aujourd’hui, je me suis fait la réflexion qu’un grand nombre de personnes contribuent à ce que le Sénat fonctionne rondement.

Je remercie les leaders de tous les groupes, c’est-à-dire les sénateurs Gold, Plett, Saint-Germain et Tannas, de tout ce qu’ils font pour faciliter le bon fonctionnement du Sénat. Nous ne nous entendons pas toujours et il faut s’en réjouir. Parfois, nous sommes vigoureusement en désaccord. Cependant, lorsque nous quittons la salle, nous comprenons tous que nos commentaires sont représentatifs des convictions du groupe auquel nous appartenons et nous passons à autre chose. Il s’agit d’un grand compliment pour chacun des leaders. Je vous en remercie infiniment. C’est en effet un plaisir de travailler avec vous.

En ce qui concerne les membres du Groupe progressiste du Sénat, vous savez que je vous aime tous et que je me trouve chanceuse de pouvoir travailler avec vous. Que nous soyons au Sénat ou à la maison, je pense souvent que nous sommes vraiment chanceux de pouvoir travailler dans un groupe aussi formidable. Nous formons une équipe formidable.

Je remercie le sénateur Dalphond, mon adjoint compétent et leader adjoint de notre groupe; la sénatrice Bovey, qui est notre agente de liaison et qui prendra sa retraite en 2023 — je n’arrive pas à le croire —; et le sénateur Francis, qui est le président du caucus. En tant que membres de l’équipe de direction, nous nous réunissons et discutons ensemble de nombreuses choses. Je vous en remercie infiniment.

Je terminerai en offrant mes souhaits les plus sincères à tous, en espérant que nous aurons l’occasion de nous reposer et nous ressourcer afin de revenir frais et dispos en 2023. Alors que nous nous apprêtons à nous réunir en famille et entre amis pour célébrer la saison des Fêtes, je souhaite à tous santé et bonheur, et une pause suffisamment longue pour que nous soyons enthousiasmés de revenir en 2023.

Joyeuse Hanoukka, joyeux Noël, joyeux Kwanzaa et une très bonne année à chacun de vous. Merci.

L’honorable Scott Tannas : Honorables sénateurs, je joins ma voix à celles de mes collègues leaders pour vous transmettre mes meilleurs vœux en cette dernière séance de 2022. Il s’est passé beaucoup de choses au Canada pendant la dernière année. Nous avons appris que la reprise à la suite de plusieurs années de confinement en raison de la pandémie, le retour graduel au travail des Canadiens et la relance de notre économie, est un processus, et non pas une destination.

Le début de l’année a été marqué par le jubilé de platine de la reine, mais ces célébrations ont laissé place à une grande tristesse lors de son décès à l’automne.

Nous avons aussi vécu un événement tragique lorsqu’une série d’attaques au couteau en Saskatchewan a causé la mort de 12 âmes innocentes. Nous avons ressenti cette perte ici, tous ensemble.

Cette année, le « convoi pour la liberté » s’est installé dans les rues de la ville pendant plusieurs semaines et à certains postes frontaliers. Une fois que les rues ont été dégagées, nous nous sommes livrés à l’un des passe-temps favoris des Canadiens, après le hockey et la crosse : instituer une commission d’enquête et en suivre les délibérations.

Des élections ont eu lieu dans certaines provinces. Il y a eu des campagnes à la direction à l’échelle nationale et provinciale. Nous avons reçu le pape. Le Canada s’est rendu à la Coupe du monde. Nous avons aussi applaudi Mattea Roach à l’émission « Jeopardy » à 23 reprises.

Je mentionne ces événements pour montrer non seulement que l’année a été fort mouvementée, mais également que, malgré les hauts et les bas, le pays a continué d’avancer. Lorsque nous avançons, nous pouvons toujours espérer un avenir meilleur. C’est la marque de commerce des Canadiens. Nous voyons l’avenir avec optimisme.

(1440)

Je vous souhaite à tous, honorables sénateurs, chers collègues de l’Administration, des bureaux des sénateurs, de la sécurité, de la télédiffusion et de l’interprétation et du Sénat, ainsi qu’à l’ensemble de nos autres collaborateurs, de joyeuses Fêtes, de la paix, de la joie et un repos bien mérité.

Sur une note un peu plus personnelle, je veux remercier mes collègues leaders. C’est un privilège de travailler avec le sénateur Plett, le sénateur Gold, la sénatrice Saint-Germain et la sénatrice Cordy. Je remercie également mes collègues du Groupe des sénateurs canadiens du soutien qu’ils m’apportent, ainsi que mes collègues de la direction et les autres membres du groupe.

Enfin, je veux remercier tous les sénateurs. Aujourd’hui, le sénateur Dan Christmas a parlé du respect et de l’admiration qu’il a pour tous les sénateurs. Je sais comment il se sent. J’avais la larme à l’œil. Je n’en reviens pas : je pleurais. Je pensais que le sénateur Plett était le seul homme à pleurer. Je sais que, comme moi, le sénateur Christmas vient d’une petite collectivité, et les petites collectivités sont merveilleuses, mais travailler avec 105 Canadiens d’exception amène un grand sentiment de respect. C’est réellement un honneur, et je suis heureux que le sénateur nous l’ait rappelé aujourd’hui à sa façon humble et authentique.

Là-dessus, je conclurai en disant joyeuses Fêtes. À ceux d’entre vous qui me connaissent, je dis aloha et je souhaite mes meilleurs vœux pour 2023. Merci.

Son Honneur le Président : Chers collègues, alors que la pause hivernale approche, je tiens à profiter de l’occasion pour exprimer mes sincères remerciements et ma gratitude à chacun des membres de la famille du Sénat. Je sais que je parle au nom de tous les sénateurs quand je remercie chaleureusement le personnel et l’Administration, bureaux et directions du Sénat confondus, de leur travail.

Je remercie tout particulièrement l’huissier du bâton noir et les pages du Sénat, qui travaillent sans relâche pour que les travaux du Sénat et des comités se déroulent bien.

Je remercie toutes les personnes qui ne ménagent aucun effort pour permettre aux sénateurs d’accomplir leur travail au nom de tous les Canadiens. Les dernières années ont été très difficiles et, parfois, extrêmement ardues pour nous tous, mais, pendant toutes ces périodes éprouvantes, tous les membres de la famille du Sénat se sont montrés à la hauteur et ont fourni un soutien inestimable.

[Français]

Je dois dire que je suis très fier des progrès que nous avons accomplis ensemble, malgré des difficultés et des défis sans précédent.

La nouvelle année apportera sans doute de nouveaux défis et des occasions qui nous permettront d’apprendre et de grandir. Toutefois, je suis sûr d’une chose : vous serez tous à nos côtés pour nous aider à passer par-dessus toutes les difficultés qui vont se présenter.

[Traduction]

On dit que, au moment d’exprimer sa gratitude, il ne faut jamais oublier que la plus grande preuve de reconnaissance n’est pas la parole prononcée, mais le geste qui l’accompagne. J’espère que, d’une manière ou d’une autre, c’est ce que nous, sénateurs, faisons chaque jour.

J’espère que mes collègues et tous ceux qui travaillent avec nous passeront de bons moments avec leur famille et leurs amis au cours des prochaines semaines. Partez aussi loin d’ici que possible, éteignez vos téléphones et profitez du temps des Fêtes. Vous l’avez bien mérité.

Des voix : Bravo!

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5j) du Règlement, je propose :

Que la séance soit suspendue jusqu’à nouvelle convocation de la présidence pour attendre l’annonce de la sanction royale, et que la sonnerie pour la convocation des sénateurs se fasse entendre pendant cinq minutes.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

(La séance du Sénat est suspendue.)

[Français]

(Le Sénat reprend sa séance.)

(1510)

La sanction royale

Son Honneur le Président informe le Sénat qu’il a reçu la communication suivante :

RIDEAU HALL

Monsieur le Président,

J’ai l’honneur de vous aviser que la très honorable Mary May Simon, gouverneure générale du Canada, a octroyé la sanction royale par déclaration écrite aux projets de loi mentionnés à l’annexe de la présente lettre le 15 décembre 2022 à 14 h 54.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’assurance de ma haute considération.

Le secrétaire du gouverneur général et chancelier d’armes,

Ian McCowan

L’honorable

Le Président du Sénat

Ottawa

Projets de loi ayant reçu la sanction royale le jeudi 15 décembre 2022 :

Loi concernant la Journée nationale de la jupe à rubans (projet de loi S-219, chapitre 16, 2022)

Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’identification des criminels et apportant des modifications connexes à d’autres lois (réponse à la COVID-19 et autres mesures) (projet de loi S-4, chapitre 17, 2022)

Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (trafic d’organes humains) (projet de loi S-223, chapitre 18, 2022)

Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 3 novembre 2022 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022 (projet de loi C-32, chapitre 19, 2022)

Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l’administration publique fédérale pendant l’exercice se terminant le 31 mars 2023 (projet de loi C-36, chapitre 20, 2022)

Loi concernant le développement d’une économie verte dans les Prairies (projet de loi C-235, chapitre 21, 2022)

L’ajournement

Adoption de la motion

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5g) du Règlement, je propose :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 31 janvier 2023, à 14 heures.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

(À 15 h 19, le Sénat s’ajourne jusqu’au mardi 31 janvier 2023, à 14 heures.)

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