Débats du Sénat (Hansard)
1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 151
Le mardi 24 octobre 2023
L’honorable Pierrette Ringuette, Présidente intérimaire
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- PÉRIODE DES QUESTIONS
- ORDRE DU JOUR
- Projet de loi visant à protéger les merveilles naturelles du Canada
- Le Sénat
- Aide médicale à mourir
- Le Tarif des douanes
- Projet de loi sur le Mois du patrimoine hellénique
- La Loi concernant le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement
- Le Sénat
- Les défis et possibilités auxquels font face les municipalités canadiennes
LE SÉNAT
Le mardi 24 octobre 2023
La séance est ouverte à 14 heures, la Présidente intérimaire étant au fauteuil.
Prière.
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
La Semaine de la coopération
L’honorable Lucie Moncion : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui afin de souligner la Semaine de la coopération, qui se déroulait du 15 au 21 octobre 2023 sous le thème « Tous pour un ».
La Semaine de la coopération est l’occasion de célébrer le modèle coopératif et de sensibiliser le milieu entrepreneurial, les Canadiens et les gouvernements à ses vertus. Contrairement aux entreprises capitalistes qui priorisent avant tout le profit, le modèle coopératif s’inscrit dans une perspective de développement socioéconomique durable et responsable, au cœur de laquelle sont les personnes, les communautés et leurs besoins.
C’est par l’innovation, la bienveillance et une capacité d’adaptation surprenante que le modèle coopératif a fait ses preuves au fil des années tant sur la scène nationale que mondiale.
Pour illustrer mon propos, je me dois de mettre de l’avant des modèles de réussite tirés d’un peu partout au Canada et d’ailleurs dans le monde. Il s’agit, entre autres, d’Agropur, de Federated Co‑operatives Limited, de Co-operators, de Sollio Groupe coopératif, de Gay Lea, d’Arctic Co-operatives Limited, de Fogo Island Co‑operative Society Ltd. et de bien d’autres. Il s’agit également des Packers de Green Bay, d’Ocean Spray, de Crédit Mutuel et de Mondragon.
Bien que le modèle d’affaires coopératif ne soit pas toujours au premier plan en matière de retour sur investissement rapide, il n’en demeure pas moins qu’il répond aux besoins de personnes qui choisissent de travailler ensemble.
Je vous ai déjà parlé de la Coopérative régionale de Moonbeam Ltée. Vous vous souviendrez qu’en 2012, l’épicerie locale était sur le point de fermer ses portes puisqu’elle ne trouvait aucun acheteur pour prendre la relève.
Les citoyens de Moonbeam s’étaient mobilisés pour former une coopérative, amasser des fonds et élire un conseil d’administration. Onze ans plus tard, la coopérative poursuit toujours ses opérations. Forte de son succès, elle est maintenant en voie d’expansion. Un nouvel édifice plus grand et plus moderne sera construit au cours de la prochaine année, ce qui lui permettra de servir encore mieux sa clientèle.
La Semaine de la coopération est l’occasion de mettre en valeur le modèle coopératif et les réussites d’affaires comme celle de la Coopérative régionale de Moonbeam Ltée.
Je profite de l’occasion qui m’est donnée aujourd’hui pour remercier les représentants et les organismes de ce secteur, qui œuvrent et qui font la promotion des intérêts des coopératives auprès des gouvernements locaux, provinciaux et fédéral. Vos contributions sont essentielles à l’élaboration de lois et de politiques inclusives qui font du modèle coopératif une solution de choix.
Je vous remercie de votre attention.
[Traduction]
Le programme From Scrap to Art
L’honorable Dennis Glen Patterson : Honorables sénateurs, en 2018, la municipalité de Cambridge Bay a mis sur pied From Scrap to Art, un programme de soudure qui consiste à transformer de la ferraille en œuvres d’art. Grâce à la collaboration de la municipalité, de la GRC, du ministère de la Justice et de l’Association inuite du Kitikmeot, ce programme a été conçu pour répondre aux besoins des jeunes à risque dans la collectivité.
Pour la majorité des jeunes qui y participent, ce programme représente une dernière chance avant d’être incarcéré. Ce programme met l’accent sur la soudure, enseignée par un compagnon soudeur détenant un certificat Sceau rouge, tout en préparant les jeunes à occuper un emploi et en leur inculquant les compétences dont ils auront besoin pour réussir à l’issue du programme. Ce programme porte sur la maîtrise de la lecture, de l’écriture et du calcul, la résolution de problèmes, et bien d’autres sujets.
À ce jour, selon le ministère des Services à la famille du Nunavut, ce programme enregistre le taux de fréquentation le plus élevé de tous les programmes éducatifs du Nunavut, et aucun des jeunes qui y participent n’a été incarcéré ou n’a eu d’incident. En fait, j’ai été enchanté d’apprendre que tous les participants — dont trois travaillent à la nouvelle mine de Goose Lake pour B2Gold, et un travaille pour le programme lui-même comme adjoint soudeur —, ont un emploi rémunéré ou poursuivent leurs études.
Le programme a eu des effets positifs sur l’environnement. En effet, depuis son lancement, on a transformé en œuvres d’art plus de 700 barils qui encombraient auparavant le site d’enfouissement local. La semaine dernière, la Redfish Arts Society a été créée. Ce nouvel organisme sans but lucratif du Nunavut repose sur la notion que les jeunes peuvent accomplir de grandes choses et se sentir inspirés si on leur en donne l’occasion, si on les encadre et si on leur fournit un espace sûr où s’exprimer. L’objectif de l’organisme est de développer le programme From Scrap to Art en obtenant un financement stable à long terme et en finissant par reproduire ce modèle dans des communautés du Nunavut autres que Cambridge Bay.
Je tiens à féliciter les membres du premier conseil d’administration : le président Attima Hadlari, le vice-président David Hik, de même que Dmitri Malakhov, Melissa Lawson et Rebecca Jaremko Bromwich. Je tiens aussi à exprimer ma sincère reconnaissance à M. Mark Slatter, directeur général du studio Red Fish Arts et instructeur du programme.
Je remercie toutes ces personnes de leur détermination à améliorer la vie des jeunes dans leur communauté et ailleurs.
Qujannamiik. Koana. Taima.
Visiteur à la tribune
Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Carolyn Winter. Elle est l’invitée de l’honorable sénateur Dean.
Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
Le rôle des sénateurs indépendants
L’honorable Andrew Cardozo : Honorables sénateurs, j’aimerais parler brièvement de ce que c’est que d’être un sénateur indépendant. Je crois que bien des Canadiens s’intéressent beaucoup à cette nouvelle réforme importante du Sénat, entreprise en 2015, et on me demande souvent ce que c’est que d’être un sénateur indépendant. Je réponds alors de la façon suivante.
Premièrement, voici des résultats intéressants : 83 % des sénateurs sont maintenant indépendants. Avant cette réforme, le Sénat amendait en moyenne un projet de loi ou deux par année. Maintenant, nous amendons environ 40 % à 50 % des projets de loi et, plus important encore, plus des deux tiers de ces amendements sont adoptés par les élus de la Chambre des communes. Je suis fier de faire partie d’un Sénat moderne et moins partisan qui met de côté les anciennes luttes partisanes pour se concentrer véritablement sur le rôle qu’il devait jouer à l’origine, soit soumettre les projets de loi à un second examen objectif. Aujourd’hui, plus que jamais, les Canadiens veulent moins de partisanerie et plus de coopération.
Comment est-ce que je me conduis en tant que sénateur indépendant? Le plus important, c’est que je décide moi-même comment voter sur chaque question en fonction de ce que je considère comme étant dans l’intérêt supérieur des Canadiens et en me fondant sur ce que j’entends et je lis, sur mes valeurs et sur ma vision du monde en général. Je consacre mon temps et mes ressources aux travaux du Sénat. Je m’efforce de travailler avec l’ensemble des pouvoirs publics, le milieu des affaires, le milieu syndical, le milieu universitaire, les organismes sans but lucratif, les spécialistes et les Canadiens concernés.
Je vais maintenant passer en revue quelques règles que je suis. Je ne suis membre d’aucun parti politique. Je ne participe à aucun caucus d’un parti politique à la Chambre des communes, même si je travaille avec des députés de tous les partis, au besoin. Je ne recueille pas de fonds pour un parti. Je n’utilise pas d’extraits vidéo du Sénat ou d’ailleurs dans le but de recueillir des fonds pour un parti. Mon travail au Sénat ne sert pas à contribuer à des collectes de fonds.
(1410)
Je rappelle aux gens que je ne participe pas à l’élaboration de stratégies pour le programme d’un parti, pour des campagnes électorales ou pour des courses à la direction de partis et que je ne m’implique pas non plus à l’échelle des circonscriptions. Je ne mène pas d’activités de mobilisation pour un parti politique. Je souligne également que je n’accélère pas ni ne retarde l’étude des projets de loi, pas plus que je ne tire autrement avantage des règles du Sénat à des fins partisanes. Mes discours ne me sont pas remis par un parti. Aucun parti ne définit ce que je dois dire ou ne pas dire. En bref, Votre Honneur, je dis aux Canadiens que je suis un sénateur indépendant.
Taïwan
L’honorable Michael L. MacDonald : Honorables sénateurs, pendant la semaine de relâche, j’ai eu l’immense plaisir de diriger une délégation du Sénat en République de Chine, ou à Taïwan, comme on l’appelle plus souvent aujourd’hui. Connue en Occident sous le nom de Formose depuis le XVIe siècle, Taïwan est aujourd’hui un exemple remarquable d’évolution sociale, économique et politique qui est presque sans pareil dans le monde moderne.
Lorsque je suis né, en 1955, Taïwan était encore une société relativement pauvre et essentiellement agraire, régie par la loi martiale et dotée d’une économie du tiers monde. Territoire légalement japonais depuis 1895, l’île a été occupée à la fin de l’année 1945 par le gouvernement chinois de l’époque, au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, et le Japon a renoncé à ses prétentions sur l’île en 1952.
Pendant les trois premières décennies sous la nouvelle administration chinoise, Taïwan a connu une existence difficile; la vie était rude. Toutefois, dans les années 1960, Taïwan a amorcé une période de croissance économique rapide et, au début des années 1990, elle était passée d’un État à parti unique régi par la loi martiale à une démocratie multipartite.
Aujourd’hui, Taïwan est un pays prospère et développé, dont la population est la plus alphabétisée de la planète. Elle est une cheffe de file dans la production de semi-conducteurs, et la force et la vitalité de ses établissements médicaux, de son secteur des transports, de ses établissements d’enseignement et de ses institutions scientifiques sont sans égales. Au cours des 75 dernières années, Taïwan est devenue l’une des grandes démocraties d’Asie, malgré les obstacles et les incertitudes qui pèsent sur ses libertés, son indépendance et sa survie.
Même si ce n’était pas ma première visite en République de Chine, ce l’était pour nombre de mes collègues du Sénat, et ils étaient évidemment à la fois impressionnés et émus de ce qu’ils ont vu et vécu là-bas. Le lundi 9 octobre, notre délégation a rencontré les représentants du Bureau commercial du Canada à Taipei dans le cadre d’une séance d’information. Par la suite, nous avons visité la tour Taipei 101. Le mardi 10 octobre, nous avons participé aux célébrations de la Fête nationale de Taïwan en compagnie de nos hôtes. Au cours des deux journées suivantes, nous avons eu la chance de discuter avec les dirigeants de plusieurs organisations de grande importance, notamment le Secrétariat général du Conseil de sécurité nationale, le Bureau de l’égalité des genres de Taïwan, le Conseil des peuples autochtones, l’Institut taïwanais pour la défense nationale et la recherche sur la sécurité, le ministère de la Santé et du Bien-être et le ministère du Conseil des affaires continentales.
Je tiens à souligner que notre visite d’un institut de lutte contre les cyberattaques de la Chine continentale a été particulièrement intéressante. Taïwan compte beaucoup de jeunes gens très brillants. Le jeudi soir, nous avons participé à une discussion très enrichissante lors d’un dîner avec Joseph Wu, le ministre des Affaires étrangères, qui s’est avéré être un hôte très courtois et bien informé.
Nos engagements officiels se sont terminés avec le point culminant de notre voyage : une audience d’une heure avec madame la présidente Tsai Ing-wen, au Palais présidentiel, le vendredi matin. Je sais sans l’ombre d’un doute que tous mes collègues qui y ont participé conviennent que nous avons eu une merveilleuse discussion avec la présidente. D’ailleurs, elle souhaite que nous transmettions ses vœux d’amitié à tous les Canadiens et que nous leur disions à quel point cette amitié est précieuse pour la population de la République de Chine.
Honorables sénateurs, dans un proche avenir, je prendrai la parole au sujet du projet de loi S‑277, Loi concernant un cadre visant à renforcer les relations entre le Canada et Taïwan. Je vous exhorte à bien l’étudier. Il ne s’agit absolument pas d’une mesure radicale, et je crois qu’elle représente un bon pas vers la modernisation des relations du Canada avec Taïwan, de façon à ce que celles-ci reflètent les rapports de collaboration qui existent entre les deux pays en cette troisième décennie du XXIe siècle. Le peuple de Taïwan a bâti un grand pays et il mérite notre soutien entier.
Le décès de l’honorable Monique Bégin, C.C.
L’honorable Marilou McPhedran : Je remercie le Groupe des sénateurs indépendants et le sénateur Gold de me donner l’occasion de prendre la parole aujourd’hui. Je le fais en tant que sénatrice féministe militante pour rendre hommage à une pionnière du féminisme au Québec, l’honorable Monique Bégin, décédée il y a environ six semaines.
Comme l’a affirmé le premier ministre Justin Trudeau :
[Français]
En 1972, Mme Bégin a été élue députée de la circonscription montréalaise de Saint-Michel, devenant ainsi l’une des trois premières Québécoises à siéger à la Chambre des communes. [...]
Militante passionnée, Mme Bégin a laissé une marque indélébile sur le Canada.
Avant de faire son entrée aux communes, Mme Bégin a forgé sa réputation en tant que figure de proue du mouvement féministe au Québec.
En 1966, elle a notamment signé la charte fondatrice de la Fédération des femmes du Québec, dont elle a été la première vice‑présidente. L’année suivante, elle a été nommée secrétaire générale de la Commission royale d’enquête sur la situation de la femme au Canada, dont le rapport, publié en 1970, demeure important aujourd’hui.
[Traduction]
L’honorable Monique Bégin a ensuite mené une brillante carrière à titre de ministre du Revenu national, puis de ministre de la Santé nationale et du Bien-être social, en instaurant à la fois le crédit d’impôt pour enfants et la Loi canadienne sur la santé. Étant les deux seules femmes au Cabinet durant la période de renouvellement constitutionnel de 1980 à 1982, Mme Bégin et sa collègue l’honorable Judy Erola protégeaient les droits des femmes à l’égalité dans l’ébauche de la Charte des droits.
D’après mon expérience personnelle, je peux vous assurer que Mme Bégin a appuyé discrètement et efficacement les efforts que nous avons déployés pour protéger la garantie d’égalité des sexes prévue à l’article 28 contre la disposition de dérogation prévue à l’article 33.
Après sa carrière politique, Mme Bégin est devenue une éminente universitaire, d’abord en tant que coprésidente des études féminines à l’Université d’Ottawa et à l’Université Carleton, puis en tant que doyenne des sciences de la santé pendant des années. J’ai communiqué avec elle il y a 20 ans pour lui demander si elle accepterait de rédiger l’avant-propos d’un livre sur un sujet impopulaire que j’avais corédigé, intitulé Preventing Sexual Abuse of Patients: A Legal Guide for Health Care Professionals. Son appui a aidé à intégrer le livre aux programmes d’études partout au Canada.
On lui a décerné de nombreux diplômes honorifiques et prix, notamment le Prix du Gouverneur général en commémoration de l’affaire « personne » en 2017 et le grade de Compagnon de l’Ordre du Canada l’année dernière. Son amie Deborah Davis m’a écrit ce matin pour me rappeler que Mme Bégin était loin d’être définie par ses prix : elle était un modèle et une source d’inspiration. Elle encourageait généreusement les nouvelles générations à s’épanouir. Je conclurai en disant que l’une des premières et plus mémorables invitations à dîner que j’ai reçues en tant que sénatrice m’a été adressée par Mme Bégin, qui a préparé un délicieux repas que nous avons partagé avec les sénatrices Pamela Wallin et Nancy Ruth. Ce fut une sacrée conversation.
[Français]
Monique, grande dame, à la prochaine!
AFFAIRES COURANTES
La vérificatrice générale
Dépôt du rapport spécial
Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport spécial de la vérificatrice générale du Canada, conformément à la Loi sur le vérificateur général, L.R.C. 1985, ch. A-17, par. 8(2).
[Traduction]
Le Conseil du Trésor
Les Comptes publics du Canada—Dépôt du rapport de 2022-2023
L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, les comptes publics du Canada pour l’exercice terminé le 31 mars 2023, intitulés (1) Volume I — Revue et états financiers consolidés, (2) Volume II — Détails des charges et des revenus, (3) Volume III — Informations et analyses supplémentaires, conformément à la Loi sur la gestion des finances publiques, L.R.C. 1985, ch. F-11,par. 64(1).
Projet de loi modifiant la Loi canadienne sur les sociétés par actions et apportant des modifications corrélatives et connexes à d’autres lois
Présentation du neuvième rapport du Comité des banques, du commerce et de l’économie
L’honorable Pamela Wallin, présidente du Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie, présente le rapport suivant :
Le mardi 24 octobre 2023
Le Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie a l’honneur de présenter son
NEUVIÈME RAPPORT
Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-42, Loi modifiant la Loi canadienne sur les sociétés par actions et apportant des modifications corrélatives et connexes à d’autres lois, a, conformément à l’ordre de renvoi du 26 septembre 2023, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.
Respectueusement soumis,
La présidente,
PAMELA WALLIN
Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?
(Sur la motion du sénateur Downe, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)
(1420)
[Français]
Le Code criminel
Projet de loi modificatif—Présentation du dix-septième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles
L’honorable Brent Cotter, président du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant :
Le mardi 24 octobre 2023
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l’honneur de présenter son
DIX-SEPTIÈME RAPPORT
Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-48, Loi modifiant le Code criminel (réforme sur la mise en liberté sous caution), a, conformément à l’ordre de renvoi du 21 septembre 2023, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport avec les modifications suivantes :
1.Article 1, pages 2 et 3 :
a) À la page 2 : Remplacer les lignes 36 et 37 par ce qui suit :
« (4) Le paragraphe 515(6) est modifié par adjonction, après l’alinéa b.1), de ce qui suit : »;
b) à la page 3 :
(i) supprimer les lignes 1 à 6,
(ii) ajouter, après la ligne 22, ce qui suit :
« (13.1) S’il rend une ordonnance en application du présent article, le juge de paix est tenu de verser au dossier de l’instance une déclaration indiquant comment il a déterminé si le prévenu est un prévenu visé à l’article 493.2 et quelle a été sa décision. S’il détermine que le prévenu est un prévenu visé à l’article 493.2, il doit également verser au dossier de l’instance une déclaration indiquant comment il a tenu compte de la situation particulière du prévenu aux termes de cet article. ».
2.Article 2, page 3 : Remplacer les lignes 27 et 28 par ce qui suit :
« soumises à l’examen du comité permanent du Sénat et du comité permanent de la Chambre des communes habituellement chargés ».
Respectueusement soumis,
Le président,
BRENT COTTER
(Le texte des observations figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 2044.)
Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?
(Sur la motion du sénateur Cotter, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)
[Traduction]
Sécurité nationale, défense et anciens combattants
Préavis de motion tendant à autoriser le comité à déposer des rapports sur l’étude des questions concernant les anciens combattants auprès du greffier pendant l’ajournement du Sénat
L’honorable Tony Dean : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer auprès du greffier du Sénat des rapports portant sur son étude sur les questions relatives aux anciens combattants, y compris les services et les prestations dispensés, les activités commémoratives, et la poursuite de la mise en œuvre de la Loi sur le bien-être des vétérans, si le Sénat ne siège pas à ce moment-là, et que les rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat.
PÉRIODE DES QUESTIONS
Les affaires mondiales
Le conflit entre Israël et le Hamas
L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Sénateur Gold, juste avant 22 heures samedi soir dernier, le ministre Blair a publié une déclaration indiquant que le Canada ne croit pas qu’Israël a bombardé un hôpital dans la bande de Gaza jeudi dernier. Aujourd’hui, il a évidemment déclaré que le Hamas devait être éradiqué.
Après que les médias aient initialement accusé Israël d’avoir attaqué cet hôpital, le premier ministre Trudeau s’est empressé de se prononcer au vu et au su de tous. Cependant, depuis que le ministre Blair a fait sa déclaration, le premier ministre n’a rien fait pour revenir sur ses propos de la semaine dernière, en se rétractant ou en faisant une déclaration à cette fin. Il n’a même pas pris la peine de publier un gazouillis tardif comme l’a fait le ministre.
Monsieur le leader, le premier ministre refuse-t-il de revenir sur ses propos en raison de la division qui règne au sein du caucus libéral pour ce qui est d’appuyer Israël dans le cadre de cette guerre contre le Hamas?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Lorsqu’il prend la parole, le ministre Blair, à titre de membre du Cabinet, s’exprime au nom du gouvernement. Il ne fait aucun doute que le gouvernement du Canada déplore l’attaque terroriste du Hamas et reconnaît le droit d’Israël à se défendre en vertu du droit international.
Le gouvernement du Canada est également d’avis que les personnes coincées à Gaza qui sont, comme de nombreuses autres dans le contexte de cette guerre, des victimes innocentes, méritent de recevoir de l’aide humanitaire, et le Canada continue de déployer des efforts en ce sens.
Le premier ministre a clairement indiqué la position du Canada, et celle-ci demeure la même. Il existe, au Canada, une grande diversité d’opinions. Des familles et des amis sont déchirés. Le gouvernement maintient ses politiques de longue date et il continuera à le faire.
Le sénateur Plett : Ce serait bien de connaître l’avis du premier ministre. Il garde le silence.
Monsieur le leader, la semaine dernière, vous m’avez accusé d’être trop partisan. Or, les désaccords au sein du Parti libéral dictent ce que le premier ministre dit ou s’abstient de dire au sujet d’Israël et du Hamas. Après huit longues années, le premier ministre Trudeau n’a toujours pas de boussole morale et il n’arrive pas à faire preuve de leadership, pas même au sein de son propre caucus. Il n’en vaut pas le coût pour le bien-être du Canada, ne croyez-vous pas, monsieur le leader? Les Canadiens ne méritent-ils pas mieux?
Le sénateur Gold : Merci de votre question. Je vous félicite d’avoir repris le slogan qu’on entend assez souvent ces temps-ci.
Il n’est pas approprié pour les sénateurs, ou pour quiconque, de se servir de la situation tragique au Moyen‑Orient pour semer la discorde et faire des gains politiques. Le gouvernement a affirmé soutenir Israël, le peuple de Palestine et la recherche d’une solution juste.
L’agriculture et l’agroalimentaire
La taxe sur le carbone
L’honorable Denise Batters : Sénateur Gold, la semaine dernière, au Comité sénatorial de l’agriculture, des sénateurs nommés par Trudeau, dont votre propre leader adjointe du gouvernement, ont vidé de toute substance un projet de loi du Parti conservateur qui vise à exempter les agriculteurs de devoir payer la taxe sur le carbone sur le propane et le gaz naturel. Un amendement a retiré du projet de loi le chauffage et le refroidissement des granges et des autres bâtiments agricoles. Dès le lendemain, les médias nous ont appris que le gouvernement Trudeau a dépensé 8 millions de dollars des contribuables pour remplacer une grange à Rideau Hall par un garage d’automobiles carboneutre chauffé de deux étages qu’il appelle « la grange ». Quel parfait exemple montrant que le premier ministre n’en vaut pas le coût.
Sénateur Gold, est-ce là le prototype d’un nouvel avenir ambitieux et carboneutre pour les exploitations agricoles canadiennes selon le gouvernement? Pourquoi le gouvernement Trudeau est-il si déterminé à donner du fil à retordre aux gens qui nourrissent les Canadiens?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je crois qu’il vaut la peine de corriger quelques-unes de vos affirmations.
Le projet de loi a effectivement été amendé. Il n’a pas été vidé de toute substance. Le comité l’a amendé, comme il en a la prérogative. Premièrement, le procès-verbal montrera qui était présent et qui a voté, ce qui démentira légèrement l’histoire qui a été racontée aux médias et qui a été propagée.
En ce qui concerne la grange, c’est plus qu’une grange, sénatrice Batters. Il s’agit d’un garage d’entreposage et de véhicules partiellement chauffé à deux étages qui comprend également 70 panneaux solaires installés sur le toit, lesquels produiront suffisamment d’énergie pour entièrement satisfaire aux besoins de Stornoway en matière d’électricité. Voilà les faits.
Une fois de plus, j’encourage les sénateurs, comme je l’ai déjà fait à maintes occasions, à me poser des questions adéquates fondées sur des faits vérifiés.
La sénatrice Batters : Sénateur Gold, je vous garantis que n’importe quel agriculteur canadien pourrait construire une grange pour beaucoup moins de 8 millions de dollars. Ce projet de loi a été adopté par la Chambre des communes avec le soutien de tous les partis. Le fait de soumettre les granges et les bâtiments agricoles à la taxe punitive sur le carbone du gouvernement Trudeau désavantage les producteurs agricoles canadiens par rapport à ceux du reste du monde. Les solutions que le gouvernement que vous représentez proposent aux agriculteurs ne reposent pas sur des considérations pratiques ou sur le bon sens. Quand le gouvernement offrira‑t-il plus que des paroles en l’air aux agriculteurs canadiens et supprimera‑t‑il cette taxe punitive sur le carbone?
Le sénateur Gold : Je ne risque pas de me répéter lorsque la même question m’est posée à tant d’occasions différentes. La tarification de la pollution fait partie d’un ensemble de mesures que le Canada met en œuvre pour nous guider sur la bonne voie, tout comme le soutien que le gouvernement apporte aux agriculteurs et à tous ceux qui assument le coût de cette mesure, et je reconnais qu’elle a effectivement un coût.
[Français]
Les affaires mondiales
Le conflit dans la bande de Gaza
L’honorable Julie Miville-Dechêne : Honorables sénateurs, sénateur Gold, depuis 3 jours, 5 agences onusiennes et 12 organisations humanitaires au Canada ainsi que des voix juives demandent un cessez-le-feu à Gaza. La France, l’Irlande et la Belgique lancent aussi un appel à la trêve.
Le Canada n’est pas un pays puissant sur la scène internationale. Par le passé, toutefois, nous avons pu magnifier notre influence en démontrant notre intégrité et notre adhésion — en paroles et en actes — aux principes du droit international.
(1430)
Sénateur Gold, personne ici ne conteste l’horreur des attentats du 7 octobre, ni le droit d’Israël à se défendre, ni les manœuvres nécessaires pour récupérer plus de 200 otages. Cependant, je m’inquiète que notre silence à propos d’une trêve humanitaire érode notre autorité morale.
Quand le gouvernement canadien demandera-t-il une trêve humanitaire qui pourrait mener à un cessez-le-feu à Gaza?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question.
La position du gouvernement du Canada est très claire : la violence doit cesser, les civils doivent être protégés et les otages doivent être libérés.
Je crois savoir que la ministre Joly a souligné les graves préoccupations du Canada concernant la détérioration de la situation humanitaire à Gaza et l’importance de veiller à ce que l’aide puisse atteindre les civils palestiniens.
À ce sujet, le Canada fournit un financement de 50 millions de dollars d’aide humanitaire afin de répondre aux besoins aigus des Palestiniens dans la bande de Gaza et les régions voisines, tout en veillant à ce qu’aucune partie de cette somme ne se retrouve entre les mains du Hamas.
La sénatrice Miville-Dechêne : Sénateur Gold, comme l’écrivait Nicholas Kristof dans le New York Times, les États ne peuvent pas donner l’impression qu’il existe une hiérarchie dans les vies humaines.
C’est une question philosophique, mais jugez-vous que c’est un risque? Est-ce que, si vous demandiez une trêve, vous pourriez rééquilibrer les choses du point de vue diplomatique?
Le sénateur Gold : Toute vie humaine est sacrée à l’image de Dieu. Cela fait partie de ma tradition et de plusieurs traditions dans le monde.
Malheureusement, une trêve ne met fin ni à la violence ni au danger. Comme l’ont souligné les Américains et le ministre, ce n’est pas le moment opportun de la considérer.
[Traduction]
Le Cabinet du premier ministre
Les postes vacants au Sénat
L’honorable Bev Busson : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.
Sénateur Gold, à la lumière de l’étude que mène actuellement le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans, nous savons que les côtes atlantique et pacifique de notre grand pays abritent une trop grande population de phoques. Toutefois, le Sénat ne compte pas un trop grand nombre de sénateurs de la côte Ouest. La Colombie‑Britannique compte uniquement six sièges alors que cette province arrive au troisième rang en termes de population au Canada, après l’Ontario et le Québec. Or, depuis ma nomination en 2018, ma province n’est toujours pas représentée par le nombre de sénateurs prévus.
Sénateur Gold, signalerez-vous immédiatement au premier ministre qu’il reste un siège à combler au Sénat pour la Colombie‑Britannique et lui demanderez-vous de nommer un nouveau sénateur et de faire ratifier cette nomination dans les meilleurs délais?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de cette question au sujet des postes vacants au Sénat.
Les collègues de mon bureau et moi soulevons régulièrement ce problème auprès du Cabinet du premier ministre. À l’instar de l’ensemble des sénateurs, nous souhaitons vraiment que les vacances au Sénat soient comblées aussi rapidement que possible.
De nombreux facteurs semblent avoir contribué à retarder certaines nominations. Je vais continuer de soulever cette question auprès du gouvernement chaque fois que j’en aurai l’occasion.
La justice
L’avancement des travaux législatifs
L’honorable Dennis Glen Patterson : Sénateur Gold, lors de la dernière session, nous nous sommes dépêchés de conclure l’étude et l’étape de la troisième lecture du projet de loi S‑12, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et la Loi sur le transfèrement international des délinquants. On nous avait dit que nous devions absolument faire vite pour donner à l’autre endroit le temps d’étudier le projet de loi et de nous le renvoyer bien avant la date butoir imposée par la cour, soit le 28 octobre. Or, cette date approche à grands pas et le Sénat va encore une fois être obligé d’étudier le message et ses 11 amendements à toute vitesse. Personne ne veut qu’il y ait une interruption dans l’enregistrement des délinquants sexuels, mais votre gouvernement tarde à nous renvoyer le projet de loi.
Votre gouvernement demandera-t-il à la cour une prolongation du délai afin que le Sénat ait le temps d’étudier le message convenablement?
Des voix : Bravo!
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci pour votre question.
Je m’attends à ce que tous les parlementaires, sénateurs y compris, s’emploient à faire adopter le projet de loi avant la date butoir du 28 octobre établie par la Cour suprême. Comme vous le savez tous, le message devrait nous être transmis très bientôt. Il me tarde donc que nous nous penchions sur cette importante mesure législative, qui vise à améliorer le Registre national des délinquants sexuels, à donner une voix aux victimes et à renforcer la confiance envers le système de justice pénale.
Le gouvernement n’a pas tardé à renvoyer le projet de loi au Sénat. C’est un projet de loi qui provenait du Sénat au départ. Il a été renvoyé à un comité de l’autre endroit, et celui-ci a étudié le projet de loi et les modifications proposées par le Sénat et a fait des propositions en vue de l’améliorer. En fait, le projet de loi a passé moins de temps à l’autre endroit qu’au Sénat.
Le sénateur D. Patterson : Sénateur Gold, nous sommes prêts à travailler fort, mais pas à la dernière minute, à l’extérieur des jours de séance prévus.
Le gouvernement a demandé trois prolongations devant les tribunaux pour le projet de loi S‑3, qui visait à mettre fin à la discrimination fondée sur le sexe des dispositions de la Loi sur les Indiens concernant l’inscription. Nous avons ainsi pu faire notre travail de façon appropriée. Ces prolongations ont été accordées par les tribunaux parce qu’ils avaient la preuve, comme dans le cas présent, que des progrès substantiels étaient réalisés. Le respect envers le Sénat devrait être aussi important que le respect envers les tribunaux.
Sénateur Gold, je vous pose la question à nouveau : insisterez‑vous auprès du gouvernement sur la nécessité de demander de toute urgence une prolongation au tribunal afin que le Sénat ait le temps de faire son travail?
Le sénateur Gold : Merci. Je serai heureux de soulever cette question auprès du gouvernement.
Soyons clairs : tout porte à croire que nous pourrons nous pencher sur ce sujet jeudi, un jour de séance prévu où nous pourrons tenir un débat approfondi sur le message de l’autre endroit. J’ai bon espoir que nous pourrons régler cette question avant l’ajournement de la séance de jeudi. Nous pourrions également siéger vendredi, si nécessaire, pour respecter l’échéance.
[Français]
L’industrie
Le soutien aux petites entreprises
L’honorable Amina Gerba : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.
La Banque de développement du Canada a récemment publié une étude qui fait un constat très préoccupant.
Le pays compte en effet 100 000 entrepreneurs de moins qu’il y a 20 ans.
Il y a deux décennies, près de 3 Canadiens sur 1 000 tentaient l’aventure entrepreneuriale. Aujourd’hui, on parle d’un Canadien sur 1 000.
En 2021, les petites entreprises employaient 8 millions de personnes au Canada, soit les deux tiers des emplois du secteur privé.
Sénateur Gold, visiblement les initiatives mises en place pour les entrepreneurs ne sont pas suffisantes. Que compte faire le gouvernement pour soutenir davantage les entrepreneurs?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de la question. Le gouvernement sait très bien que les petites entreprises sont le moteur de nos communautés et jouent un rôle crucial dans l’économie canadienne. Elles emploient plus de 10 millions de travailleurs dévoués dans toutes les régions du pays.
La Semaine de la PME vient de se terminer, et à cette occasion, la ministre Valdez a annoncé un nouveau financement pour soutenir les entrepreneurs et les petites entreprises, y compris des fonds pour aider 2 000 femmes entrepreneures de partout au Canada à démarrer et à mettre en œuvre leur plan de croissance. Le financement du Conseil canadien pour l’entreprise autochtone pourra aider à accroître les outils et les ressources dont les propriétaires des petites entreprises et les entrepreneurs autochtones ont besoin pour prospérer.
Le gouvernement continuera à soutenir les petites entreprises dans tout le pays, qu’elles soient en phase de démarrage, qu’elles tendent à se développer ou qu’elles s’efforcent d’étendre leur portée à de nouveaux marchés.
La sénatrice Gerba : Sénateur Gold, merci de votre réponse.
Le Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes a permis aux petites entreprises de bénéficier d’un prêt qui doit être remboursé avant le 18 janvier 2024. Les premiers ministres des provinces et territoires ont récemment demandé à ce que cette échéance soit repoussée.
Le gouvernement compte-t-il accéder à leur demande?
Le sénateur Gold : Dans le cas de la poursuite du soutien aux propriétaires de petites entreprises et à leurs travailleurs, comme vous le soulevez, le gouvernement va déjà apporter un assouplissement. La date limite du 18 janvier 2024 à laquelle vous faites référence est déjà une prolongation d’une année de plus de la date antérieure. Les entreprises pourront également bénéficier d’une remise partielle. Bref, elles pourront aussi profiter d’autres mesures. Cependant, le manque de temps ne me permet pas d’élaborer.
(1440)
[Traduction]
La sécurité publique
L’application ArriveCAN
L’honorable Leo Housakos : Sénateur Gold, la semaine dernière, j’ai demandé au ministre Duclos qui est responsable, à l’Agence des services frontaliers du Canada et à Services publics et Approvisionnement Canada, de la vérification des consultants et des sous-traitants externes. Nous avons vu des informations troublantes dans le Globe and Mail ce matin, selon lesquelles l’argent des contribuables a servi à débourser 54 millions de dollars pour ArriveCAN, de l’argent qui a été versé à des consultants qui ont non seulement falsifié leur CV, mais qui ont aussi inventé une expertise pour des entreprises qui, semble-t-il, n’existent même pas. Compte tenu de ces renseignements et étant donné que, depuis 2015, le gouvernement a augmenté de 74 % ses dépenses en sous‑traitants et en consultants externes, comment pouvez-vous justifier cette situation?
Pouvez-vous dire à cette assemblée qui, au sein du gouvernement Trudeau, est responsable de l’approbation de ces contrats? En fin de compte, ArriveCAN est devenu une escroquerie et un fiasco. On parle d’« ArnaqueCAN ». Qui est responsable de cette affaire?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : En ce qui concerne les allégations troublantes relatives à ArriveCAN, comme les sénateurs le savent, l’affaire fait non seulement l’objet d’une enquête de la part de la GRC, mais aussi d’une enquête interne sous les auspices de l’Agence des services frontaliers du Canada.
Par ailleurs, comme vous le savez, chers collègues, la ministre Anand a récemment annoncé de nouvelles lignes directrices pour la fonction publique concernant la sous-traitance et l’approvisionnement, les cas où ceux-ci sont nécessaires et les outils à employer pour atténuer les risques et garantir la transparence et la pertinence des processus.
Je ne peux rien dire de plus sur les enquêtes, si ce n’est qu’elles sont en cours tant à la GRC qu’à l’Agence des services frontaliers du Canada, qui sont les instances appropriées pour mener ces enquêtes.
Le sénateur Housakos : Personne n’est tenu responsable, mais nous savons qu’il y a toutes sortes d’enquêtes et que tout cela sent mauvais. Sénateur Gold, bien que nous ayons encore beaucoup à apprendre au sujet de la pourriture qu’on appelle « ArnaqueCAN », une chose est on ne peut plus claire : c’est que les Canadiens ordinaires qui travaillent fort et qui respectent la loi doivent payer des amendes exorbitantes associées à ce stratagème visant à enrichir des proches du Parti libéral. Je veux parler de Canadiens comme M. Milad, un tailleur d’Ottawa qui rentrait chez lui après avoir rendu visite à sa famille au Moyen‑Orient et qui devra maintenant fermer son magasin pour se présenter au tribunal à Montréal, ce qui lui coûtera une petite fortune, sénateur Gold.
Quand le gouvernement fera-t-il ce qui s’impose — pendant que ces enquêtes se poursuivent — et annulera-t-il au moins les amendes impayées qui ont été imposées aux Canadiens à cause de l’application ArriveCAN?
Le sénateur Gold : Je porterai certainement votre suggestion à l’attention du ministre compétent. Je ne présumerais pas d’une façon ou d’une autre que chaque infraction pour laquelle quelqu’un a reçu une amende était nécessairement inappropriée, mais je transmettrai votre suggestion le plus rapidement possible.
[Français]
L’environnement et le changement climatique
La Loi sur l’évaluation d’impact
L’honorable Claude Carignan : Monsieur le leader, le 13 octobre dernier, le gouvernement a subi une cuisante défaite devant la Cour suprême, la cour estimant qu’une partie importante du projet de loi C-69 en matière d’évaluation environnementale était inconstitutionnelle et dérogeait aux champs de compétence, notamment des provinces.
Nous vous avions avisé, monsieur le leader. Le premier ministre Kenney, de l’Alberta, vous avait avisé; le ministre de l’Environnement du Québec, Benoit Charette, vous avait avisé; l’ensemble des membres de l’opposition l’ont fait à plusieurs reprises; la ministre McKenna ainsi que moi-même vous avions avisé de l’inconstitutionnalité du projet de loi C-69.
Pourquoi votre gouvernement fait-il fi des revendications des provinces lorsqu’elles se font entendre, et des conseils de sa loyale opposition?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci pour la question. Encore une fois, il faut être clair sur les faits. La Cour suprême a affirmé le champ de compétence de la législature du Parlement du Canada en ce qui concerne l’environnement. Cela reste un important aspect de la loi et de la juridiction du Parlement du Canada.
Oui, il y a des éléments du projet de loi qui ont été jugés par la cour comme inconstitutionnels. Le gouvernement a déjà répondu. Le gouvernement du Canada va suivre la lecture et apprendre de la lecture des motifs du jugement de la Cour suprême; il va collaborer avec les provinces et les groupes autochtones pour veiller à ce que le processus serve les Canadiens et travaillera rapidement pour corriger les problèmes et continuer d’avoir un projet de loi qui sert les Canadiens.
Le sénateur Carignan : Quand le gouvernement va-t-il éliminer ce qu’il reste du projet de loi C-69 pour avoir un projet de loi qui puisse autoriser des projets en 12 mois et non pas en 12 ans?
Le sénateur Gold : Je ne suis pas exactement au courant de l’échéancier de travail qui sera établi pour retourner au Parlement avec les révisions et les amendements au projet de loi. Aussitôt que cela sera connu et rendu public, la Chambre en sera avisée.
[Traduction]
L’infrastructure et les collectivités
Le Fonds pour accélérer la construction de logements
L’honorable Leo Housakos : J’aimerais maintenant parler d’un autre fiasco. Un an et demi s’est écoulé depuis que le gouvernement Trudeau a annoncé le Fonds pour accélérer la construction de logements au Canada. Or, on n’a jamais construit aussi peu de logements à Toronto, à Montréal ou à Vancouver. Quand le gouvernement se rendra-t-il compte que son plan pour la construction résidentielle est un échec, et quand va-t-il revoir son plan ou, mieux encore, donner tout simplement sa démission pour le bien des futures générations de Canadiens?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Eh bien, il est vraiment surprenant qu’une personne venant du milieu des affaires pose une question qui témoigne d’une aussi faible compréhension des aspects économiques du marché immobilier.
Le gouvernement met en œuvre son plan pour doubler la construction de logements afin de rendre les logements plus abordables. Depuis l’annonce, en avril, des nouvelles mesures visant le compte d’épargne libre d’impôt, plus de 150 000 Canadiens ont ouvert un compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété.
En prenant des mesures comme l’exonération de la TPS fédérale pour les immeubles à logements locatifs neufs tout en exhortant les provinces à suivre son exemple, le gouvernement fédéral a stimulé l’entrepreneuriat dans l’ensemble du pays. Il a par ailleurs offert 20 milliards de dollars d’argent frais pour faire construire 30 000 appartements par année. De plus, le gouvernement a annoncé qu’il a conclu des accords avec les villes d’Hamilton, de London et de Vaughan dans le cadre du Fonds pour accélérer la construction de logement, et que des pourparlers se poursuivent avec d’autres localités.
Voilà comment on fait preuve d’un véritable leadership afin d’apporter des solutions concrètes sur le terrain pour résoudre un problème qui affecte tous les Canadiens et auquel il faut répondre par des solutions adéquates plutôt que par des discours.
Le sénateur Housakos : Les seules personnes qui se livrent à de beaux discours sont dans votre gouvernement. Sénateur Gold, même le ministre du Logement a reconnu que le gouvernement et les Canadiens doivent revoir leurs attentes à la baisse. Nul besoin d’être un génie pour comprendre cela : il suffit de s’adresser aux jeunes Canadiens, qui ont du mal à louer un appartement, à plus forte raison à acheter une maison.
En ce moment, les jeunes Canadiens, les acheteurs d’une première maison, doivent amortir leur hypothèque sur 200 ans afin de payer une maison au pays. Ne me faites pas de sermons sur les principes commerciaux au pays, car vous savez pertinemment, pour avoir parlé à de jeunes Canadiens, qu’il n’a jamais été aussi difficile d’acheter une maison.
Le sénateur Gold : Il est plus difficile pour les jeunes Canadiens d’acheter une maison. Assurément, c’est une chose que je comprends, puisque j’ai travaillé dans l’immobilier dans une autre vie et que j’ai des enfants et des petits-enfants. Cela ne signifie pas, cependant, qu’il incombe uniquement au gouvernement fédéral de régler un problème national...
Son Honneur la Présidente intérimaire : Le sénateur Gold a la parole.
Le sénateur Gold : Je maintiens ma réponse. Je vous remercie, Votre Honneur, d’être intervenue. J’aime avoir un peu d’attention lorsque j’essaie de donner une réponse.
L’industrie
Le harcèlement et la violence au travail
L’honorable Marilou McPhedran : C’est mon jour de chance, Votre Honneur. Je vous remercie. J’ai une question pour le sénateur Gold.
Technologies du développement durable Canada est une agence financée par le gouvernement fédéral. Elle a pour mission de cibler, de financer et de favoriser des projets d’innovation canadienne dans le domaine des technologies vertes ou propres. À ce jour, elle a versé plus de 1,5 milliard de dollars à des entreprises canadiennes en démarrage.
Malheureusement, elle a également été ébranlée par des allégations de mauvaise gestion financière, de conflits d’intérêts, de harcèlement en milieu de travail et de climat de travail instable et toxique. Le ministère de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique a ordonné un examen des pratiques de l’agence, qui est à présent terminé.
Sénateur Gold, des dénonciateurs potentiels qui connaissent ce milieu de travail m’ont contactée. Ils ont indiqué que certains employés ont subi des pressions pour signer des ententes de non‑divulgation afin de dissimuler des renseignements sur leurs mauvaises expériences. Étant donné que l’on a décrit l’examen…
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : J’anticipe la conclusion de votre question. Notre temps de parole est limité; c’est la même chose pour moi quand je donne mes réponses.
(1450)
Je crois comprendre qu’un expert indépendant a été nommé pour faire enquête dès que l’organisme a pris connaissance de ces allégations générales. Le gouvernement a un reçu le rapport de cet expert et le prend au sérieux. Il a immédiatement pris des mesures correctives, y compris la mise en œuvre d’un plan d’action d’ici décembre.
Je ne suis pas au courant, sénatrice McPhedran, de la question des ententes de non-divulgation. Je vais certainement me renseigner à ce sujet afin d’avoir une réponse plus complète la prochaine fois que vous me poserez la question.
La sénatrice McPhedran : Merci beaucoup. De plus, pourriez‑vous demander au gouvernement de présenter une réponse publique à l’examen et de préciser si cet organisme financé par le gouvernement fédéral a eu recours ou non à des ententes de non‑divulgation? Merci.
Le sénateur Gold : Je vais ajouter cet élément à ma demande de renseignements.
Les affaires mondiales
Le Corps des Gardiens de la révolution islamique
L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Sénateur Gold, cela fait des années que les Canadiens d’origine iranienne réclament que le gouvernement Trudeau inscrive le Corps des Gardiens de la révolution islamique sur la liste des entités terroristes. Ils l’ont fait avant et après que ce groupe a abattu le vol PS752, tuant par le fait même des citoyens canadiens et des résidents permanents. Ils l’ont fait l’an dernier, après l’assassinat de Mahsa Amini, une femme de 22 ans. Ils l’ont fait encore une fois dans la foulée des horribles attaques perpétrées par le Hamas en Israël et qui ont assurément été appuyées par le régime iranien.
Le ministre LeBlanc a dit avoir demandé à ses fonctionnaires de mettre à jour leurs conseils concernant l’ajout du Corps des Gardiens de la révolution islamique sur la liste. Sénateur Gold, combien de temps encore faudra-t-il avant de faire officiellement de ce groupe terroriste une organisation criminelle?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci pour votre question, sénateur Plett.
Comme mes collègues le savent, en général, les réactions du Canada aux activités de l’Iran, y compris les sanctions et d’autres mesures, sont parmi les plus sévères au monde. Le Canada continuera de faire pression sur ce régime. Toutes les options sont envisagées.
Vous savez tout aussi bien que moi que le gouvernement a déjà interdit de territoire à jamais les représentants du Corps des Gardiens de la révolution islamique et qu’il a imposé des sanctions aux élites de ce groupe et de l’ensemble de l’appareil sécuritaire, économique et de renseignement du régime. Il s’agit d’un effort pangouvernemental. Le Canada n’hésitera pas à utiliser tous les outils — diplomatiques et autres — à sa disposition pour réagir aux agressions du régime iranien, qu’elles aient lieu en Iran ou à l’étranger.
Le sénateur Plett : Sénateur Gold, la semaine dernière, lorsque le sénateur Housakos vous a posé une question au sujet de l’inscription du Corps des Gardiens de la révolution islamique sur la liste des entités terroristes, vous nous avez donné la même réponse que vous nous donnez depuis des années. Toutefois, lorsqu’on a posé une question semblable au ministre LeBlanc à la Chambre, il a donné une réponse très différente. Le ministre a dit qu’il avait évidemment demandé aux professionnels de la sécurité de mettre à jour leurs conseils. Monsieur le leader, pourquoi votre réponse était-elle différente de celle du ministre?
Le sénateur Gold : Elle n’était pas différente, bien que je n’aie pas répété la réponse que vous avez intégrée à votre question et que vous répétez maintenant. Lorsque cet examen sera terminé, la décision sera rendue publique. D’ici là, il ne convient pas de se prononcer sur les conseils que les services de sécurité — ou, en fait, quiconque — prodiguent au ministre.
[Français]
Le Bureau du Conseil privé
L’analyse comparative entre les sexes
L’honorable Renée Dupuis : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement.
Sénateur Gold, est-ce que vous allez convaincre le Conseil privé de déposer systématiquement, à chaque comité qui examine un projet de loi, l’analyse comparative entre les sexes plus?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie. L’importance de cette analyse est fondamentale, comme je l’ai déjà mentionné dans le contexte d’un comité. Le gouvernement est au courant des attentes des membres des comités. Je vais souligner l’importance de cet aspect du processus législatif auprès du gouvernement.
[Traduction]
ORDRE DU JOUR
Projet de loi visant à protéger les merveilles naturelles du Canada
Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat
L’honorable Karen Sorensen propose que le projet de loi S-14, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux du Canada, la Loi sur les aires marines nationales de conservation du Canada, la Loi sur le parc urbain national de la Rouge et le Règlement sur la pêche dans les parcs nationaux du Canada, soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, je prends la parole à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi S‑14, Loi visant à protéger les merveilles naturelles du Canada. Le projet de loi agrandit les limites de zones terrestres et aquatiques protégées en vertu de la Loi sur les parcs nationaux du Canada et de la Loi sur les aires marines nationales de conservation du Canada et il renforce certaines des dispositions liées à ces lois. Ces deux lois et leurs règlements connexes assurent la protection des écosystèmes naturels, des espèces sauvages indigènes et du patrimoine culturel.
Dans ma carrière précédente, j’ai passé des années à collaborer étroitement avec Parcs Canada en tant que conseillère municipale et mairesse de Banff, qui est située dans le parc national Banff. Je peux témoigner de la réglementation rigoureuse qui permet de protéger les merveilles naturelles inestimables du Canada et de la diligence dont font preuve les agents de Parcs Canada qui les appliquent. En marrainant ce projet de loi, je suis fière de contribuer un tant soit peu à accorder cette protection à davantage de régions sauvages.
Le projet de loi achèverait le processus de création de la réserve à vocation de parc national Akami-UapishkU–KakKasuak–Monts Mealy, au Labrador. Cette région montagneuse qui surplombe le lac Melville abrite un écosystème diversifié composé de toundra, de forêts, de côtes, d’îles et de rivières. Le projet de loi S‑14 permettrait d’assurer la préservation de ce joyau tout en permettant et en réglementant les activités traditionnelles d’utilisation des terres dans la région.
Le projet de loi achèverait aussi le processus de création de l’aire marine nationale de conservation Tallurutiup Imanga.
Située dans l’océan Arctique, cette aire marine de conservation est considérée comme l’une des zones écologiques les plus importantes au monde et comme un habitat essentiel pour certaines des espèces les plus emblématiques du Canada, notamment l’ours polaire, le béluga, la baleine boréale et le narval. Elle couvre une zone qui s’étend de Resolute Bay, à l’ouest, jusqu’à l’entrée est du passage du Nord-Ouest, soit près de 110 000 kilomètres carrés au total.
De plus, le projet de loi S‑14 étendra officiellement les limites de sept parcs nationaux et d’une réserve de parc national existants situés dans cinq provinces et deux territoires.
J’aimerais prendre un peu de mon temps pour vous faire visiter ces lieux remarquables. Le Nunavut abrite le parc national le plus septentrional du Canada, le parc national Quttinirpaaq, qui est situé au nord de l’île d’Ellesmere. Ce parc compte des troupeaux de bœufs musqués et de caribous de Peary, un éventail d’écosystèmes particulièrement adaptés à la vie dans cet environnement redoutable de glaciers et de montagnes, ainsi que des sites archéologiques datant de plusieurs milliers d’années.
Cette terre est d’une importance capitale pour de nombreux groupes, dont les Inuits des communautés de Resolute Bay et de Grise Fiord. Elle joue également un rôle mondial dans la compréhension des impacts des changements climatiques. Le projet de loi S‑14 ajouterait officiellement 1 300 hectares au parc de 3,7 millions d’hectares.
Plus au sud, il y a le parc national du Mont-Riding, dans le sud‑ouest du Manitoba, qui a été créé en 1929 pour protéger la région naturelle des plaines et plateaux boréaux du Sud du Canada. En raison de son écologie, de sa géographie, de sa flore et de sa faune particulières, le parc du Mont-Riding fait désormais partie du réseau mondial de réserves de biosphère créé par l’UNESCO. Le projet de loi S‑14 ajoutera 1 100 hectares au parc national du Mont-Riding.
En voyageant vers l’ouest, vous trouverez le parc national des Prairies, dans le sud-ouest de la Saskatchewan, qui s’agrandira de 29 000 hectares.
Les prairies du Canada sont considérées comme l’un des écosystèmes les plus menacés et les moins protégés du pays. On estime qu’il reste moins de 20 % de ce qui était autrefois un véritable océan de prairies.
Le parc national des Prairies est le seul à protéger un exemple représentatif de cet écosystème, un endroit où l’on peut vraiment voir les bisons errer, et les cerfs et les antilocapres jouer. Ce projet de loi augmentera sa taille de près d’un tiers.
À l’autre bout du pays, on trouve le pittoresque parc national de l’Île‑du‑Prince‑Édouard, qui abrite certaines des plus belles plages, falaises, dunes et forêts de l’île, un lieu de prédilection pour les oiseaux aquatiques, les renards et les familles de tout le Canada. Le projet de loi S‑14 ajoutera 587 hectares à ce parc national.
Ce projet de loi ajouterait également des terres au parc national de la Pointe‑Pelée, près du lac Érié, une région que chérissent depuis longtemps les ornithologues et les passionnés de la faune et de la flore. Étant donné son emplacement idéal dans le couloir de migration, plus de 390 espèces d’oiseaux ont été recensées dans la zone d’observation des oiseaux de la Pointe‑Pelée. Il s’agit également d’une halte de prédilection pour les papillons monarques en migration.
La réserve à vocation de parc national de l’Archipel‑de‑Mingan, au Québec, où l’on retrouve la plus importante concentration de certaines des formations rocheuses les plus distinctives du Canada, serait également agrandie de 41 hectares.
(1500)
Le projet de loi S‑14 protégerait davantage l’un des parcs nationaux les plus accessibles du Canada, soit le parc national des Mille‑Îles, situé en Ontario le long des berges du fleuve Saint‑Laurent. Plus de 15 millions de Canadiens habitent à moins de trois heures de route de ce parc.
Le parc national Tuktut Nogait, quant à lui, est probablement le parc national le moins accessible du pays. Situé à 170 kilomètres au nord du cercle polaire arctique, ce parc national est aussi magnifique qu’inhospitalier. Le projet de loi S‑14 agrandirait la superficie du parc national Tuktut Nogait de plus de 10 %, quelque 184 000 hectares, soit une superficie un peu plus grande que celle de la Jamaïque. L’agrandissement proposé comprend des mesures pour protéger le droit des participants à l’accord définitif du Sahtu d’utiliser ce territoire pour la chasse et la cueillette d’animaux et de plantes sauvages.
Il est important de rappeler que ces terres sont déjà sous l’égide de Parcs Canada, mais ne sont pas couvertes par les mêmes protections que celles que les lois susmentionnées accordent. Des préoccupations ont été exprimées à propos du braconnage et, surtout, des déversements illégaux. Il est impératif d’agir rapidement pour permettre à Parcs Canada de faire appliquer la loi afin d’empêcher que des activités illicites endommagent ces écosystèmes d’une grande richesse écologique.
Le projet de loi S‑14 renferme des modifications d’ordre administratif visant à préciser et à renforcer les outils réglementaires au moyen desquels Parcs Canada protège et préserve les territoires qui sont sous sa responsabilité. Un de ces changements, par exemple, élargirait et préciserait les infractions liées au déversement ou au dépôt de substances dans un parc national, un parc urbain national ou une réserve à vocation de parc national.
Le gouvernement élargit la portée de la loi et présente ces outils de réglementation à un moment où, au Canada et partout dans le monde, il est urgent de protéger les écosystèmes terrestres et marins. L’équilibre écologique de nombreux sites naturels est sérieusement compromis. Des paysages sensibles se dégradent. Des écosystèmes vitaux sont perturbés. Des habitats disparaissent et des espèces sont menacées. Entretemps, la crise climatique accélère le rythme des changements et en augmente les conséquences.
Cependant, la nature peut être très résiliente si on lui en donne la moindre chance. Si on soustrait des terres et des eaux au stress direct du développement humain et qu’on les protège au titre des lois nationales et de la réglementation de Parcs Canada, on fait un premier pas vital pour sortir d’un cycle vicieux de dégradation et de dommages environnementaux pour se diriger vers un cycle vertueux de protection et de restauration écologiques. Le gouvernement se sert des outils réglementaires pour protéger la biodiversité et améliorer la santé des écosystèmes.
Au bout du compte, cette approche ne bénéficie pas uniquement à l’habitat immédiat et à ses habitants, mais contribue aussi à la santé planétaire, notamment en atténuant les effets du changement climatique. Elle bénéficie en outre au développement social, culturel et national. La conservation et la protection des aires naturelles, qu’il s’agisse des terres ou des eaux, mobilisent les parties prenantes et les amènent à s’allier pour atteindre des objectifs communs.
Parcs Canada a mené de vastes consultations auprès des titulaires de droits autochtones pour garantir que les territoires traditionnels dont ils prennent soin depuis des temps immémoriaux sont protégés, et pour veiller au respect de leurs droits inhérents relatifs à la chasse et à la récolte. Pendant des dizaines d’années, les voix des Autochtones ont été exclues alors que de vastes étendues de leurs territoires traditionnels étaient intégrées au réseau des parcs nationaux. Aujourd’hui, Parcs Canada consulte plus de 300 communautés des Premières Nations, des Inuits et des Métis à l’échelle du pays au sujet de la conservation, de la restauration et de la présentation du patrimoine naturel et culturel du Canada. Le projet de loi S‑14 est un excellent exemple de ce que nous pouvons réaliser lorsque les communautés autochtones sont respectées, consultées et incluses.
Je voudrais attirer votre attention sur les parties du projet de loi qui permettraient d’achever le processus d’établissement de la réserve à vocation de parc national des Monts Mealy et de l’aire marine nationale de conservation Tallurutiup Imanga, ainsi que d’agrandir le parc national Tuktut Nogait. Les modifications que propose le projet de loi S‑14 visent à garantir que les activités traditionnelles, comme les droits de récolte des Inuits, continueront d’être protégées dans les régions concernées, comme le prévoient l’entente fédérale-provinciale sur le transfert du territoire, l’Accord sur les revendications territoriales des Inuit du Labrador, l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut et l’accord définitif du Sahtu. Ces mesures sont impératives pour que le Canada puisse respecter ses obligations envers ses partenaires des traités modernes et ceux des gouvernements autonomes afin de défendre l’honneur de la Couronne.
De plus, le projet de loi remplacera le nom de la réserve à vocation de parc national Gwaii Haanas du Canada par réserve à vocation de parc national et site du patrimoine haïda Gwaii Haanas, de façon à reconnaître l’histoire et le rôle continu du peuple haïda, qui considère cette région comme sa demeure depuis longtemps.
Le projet de loi S‑14 ne fait pas qu’étendre la protection de millions d’hectares d’écosystèmes terrestres et marins uniques, il contribuera également à soutenir des cultures et des modes de vie qui existent depuis des siècles. Ces merveilles naturelles font partie de l’histoire et de l’identité du Canada. Le Canada est reconnu à travers le monde pour son éventail de paysages qui n’existent nulle part ailleurs.
Ces territoires définissent qui nous sommes. Ils font partie de nous et ils nous dépassent. Ils étaient là avant que nous venions au monde et, si nous travaillons à leur protection, ils seront encore là longtemps après que nous aurons quitté ce monde.
J’espère que vous vous joindrez tous à moi pour aider les plus grands experts en conservation du Canada à protéger nos merveilles naturelles.
Merci. Hiy hiy.
Des voix : Bravo!
L’honorable Mary Jane McCallum : Merci pour votre discours. Vous avez dit dans votre intervention que ces terres appartiennent à Parcs Canada et sont sous son contrôle. Ne se trouvent-elles pas sur des territoires non cédés? Sinon, pourquoi reconnaissons-nous les territoires traditionnels et citons-nous les régions visées par des traités numérotés dans le cadre de notre travail?
La sénatrice Sorensen : Merci de votre question. Je ne me suis peut-être pas exprimée de façon appropriée. Ce que je peux dire, c’est que toutes les terres dont on prévoit agrandir les limites sont actuellement gérées par Parcs Canada. Il importe de souligner qu’en les assujettissant à ces deux lois — la Loi sur les aires marines nationales de conservation du Canada et la Loi sur les parcs nationaux du Canada — il sera possible d’y faire appliquer la loi.
La sénatrice McCallum : Parmi ces terres, y en a-t-il qui sont visées par des revendications territoriales?
La sénatrice Sorensen : Merci. Je m’excuse, mais je ne peux pas répondre à votre question pour l’instant. Je me renseignerai à ce sujet lors de la séance d’information que je m’attends à recevoir.
(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)
Le Sénat
Motion concernant les séances du jeudi pour le reste de la présente session—Question de privilège—Décision de la présidence
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Gold, c.p., appuyée par l’honorable sénatrice LaBoucane-Benson,
Que, pour le reste de la présente session et nonobstant toute disposition du Règlement, lorsque le Sénat siège un jeudi, la séance soit levée à 18 heures ou à la fin des affaires du gouvernement, selon la dernière éventualité, comme si cette heure-là était, à tous égards, l’heure fixée pour la clôture de la séance prévue à l’article 3-4 du Règlement.
Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, je suis prête, après consultation avec la Présidente, à rendre une décision sur la question de privilège soulevée par la sénatrice McCallum le 19 octobre au sujet de la motion 132 du gouvernement.
La sénatrice McCallum a fait référence à l’article 13-4 du Règlement dans sa question de privilège, mais je tiens à souligner qu’il existe une disposition précise concernant les préavis donnés au cours des affaires courantes. L’article 4-11(2) du Règlement stipule que :
Un sénateur peut soulever toute question de privilège relative :
a)à une affaire dont préavis a été donné au cours des affaires courantes seulement au moment où l’affaire est appelée pour la première fois.
Ce point n’est évoqué que rarement, mais il s’agit de la disposition qui doit être prise en compte lorsqu’on traite d’une question de privilège concernant les affaires en préavis. Dans le cas précis qui nous occupe, le résultat est le même, et l’affaire a été soulevée au bon moment, mais il n’est pas nécessaire que ce soit toujours le cas.
En ce qui concerne le fond de la question, nous sommes guidés par les quatre critères énoncés à l’article 13-2(1) lorsque nous examinons une question de privilège. Tous les critères doivent être respectés.
Le premier critère est que l’affaire doit être soulevée à la première occasion. La sénatrice McCallum a fait part de ses préoccupations dès que possible après que le préavis a été donné, et ce critère a donc été respecté.
Les deuxième et troisième critères exigent que la question de privilège « se rapporte directement aux privilèges du Sénat, d’un de ses comités ou d’un sénateur » et qu’elle « vise à corriger une atteinte grave et sérieuse ». En considérant ces points, nous devons tenir compte du fait que le privilège existe pour nous permettre de remplir nos devoirs en tant que sénateurs. Ce point a été soulevé dans diverses décisions, dont celles du 23 mai 2013; du 24 février 2016; du 22 mars 2018; et du 29 octobre 2020. La présidence a noté que « … les droits et privilèges du Sénat comme tel l’emportent sur ceux des sénateurs, à titre individuel ». Les droits et privilèges d’un sénateur individuel peuvent donc être limités par le Sénat.
Le droit le plus fondamental du Sénat est probablement celui de contrôler ses affaires internes, incluant le Règlement et le déroulement des délibérations. Le Sénat a lui-même adopté son Règlement et il peut en varier comme il le juge approprié. C’est ce que nous faisons régulièrement en décidant de ne siéger les lundis et les vendredis que lorsque cela s’avère nécessaire, et en adoptant des ordres sessionnels concernant la levée de la séance à 16 heures les mercredis.
La motion du sénateur Gold propose une autre variation de ce type. Elle aurait pour effet de modifier l’heure normale de levée de la séance les jeudis. L’adoption de cette motion constituerait un exercice par le Sénat de son droit fondamental de réglementer ses travaux.
En ce qui concerne le quatrième critère — à savoir qu’il ne doit y avoir aucune réparation qui peut vraisemblablement être obtenue par une autre procédure parlementaire — les points soulevés peuvent être traités de la manière la plus appropriée dans le cadre du débat sur la motion elle-même. Les sénateurs peuvent en effet s’inquiéter, comme l’a fait la sénatrice McCallum, qu’une telle proposition ne restreigne indûment les possibilités de débattre d’affaires non gouvernementales. Bien que cette motion soit le résultat de discussions entre les leaders et les facilitateurs, chaque sénateur peut maintenant prendre part au débat, argumenter pour ou contre la proposition, et voter pour ou contre celle-ci. Des amendements peuvent être proposés. Ce n’est que si la motion est acceptée par le Sénat lui-même — dans l’exercice de son droit fondamental de régir ses travaux — que la proposition devient contraignante.
Il n’y a donc pas de question de privilège et le débat peut se poursuivre.
(1510)
Motion concernant les séances du jeudi pour le reste de la présente session—Ajournement du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Gold, c.p., appuyée par l’honorable sénatrice LaBoucane-Benson,
Que, pour le reste de la présente session et nonobstant toute disposition du Règlement, lorsque le Sénat siège un jeudi, la séance soit levée à 18 heures ou à la fin des affaires du gouvernement, selon la dernière éventualité, comme si cette heure-là était, à tous égards, l’heure fixée pour la clôture de la séance prévue à l’article 3-4 du Règlement.
L’honorable Mary Jane McCallum : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet de la motion no 132 du gouvernement. J’aimerais d’abord exprimer mon inquiétude au sujet de la limitation des débats. Chaque fois que nous limitons les débats au Sénat, nous créons un dangereux précédent pour nous-mêmes tout en envoyant un piètre message aux Canadiens.
Chers collègues, par la motion no 132, le bureau du représentant du gouvernement propose d’ajourner le Sénat à la fin de la période réservée aux affaires du gouvernement, mais au plus tard à 18 heures, tous les jeudis pour le reste de la session en cours, ce qui limiterait encore davantage les débats au Sénat.
Au cours du débat sur la question de privilège que j’ai soulevée à ce sujet le 19 octobre, il a été mentionné que je ne comprenais peut‑être pas l’intention et les ramifications de cette motion, en pensant peut-être que cela signifiait que les projets de loi d’initiative parlementaire ne seraient plus examinés le jeudi. Je tiens à assurer à tous mes honorables collègues que j’ai bien compris les conséquences de cette motion et que je demeure aussi préoccupée aujourd’hui que lorsque j’ai soulevé ma question de privilège.
À ce moment-là, nous allions passer au vote sur cette question sans en débattre ni en expliquer la raison d’être. Si je n’avais pas soulevé ma question de privilège, nous n’aurions pas obtenu d’information du gouvernement à ce sujet.
Honorables sénateurs, dans l’affaire Canada (Chambre des communes) c. Vaid, la Cour suprême du Canada a déclaré :
Dans le contexte canadien, le privilège parlementaire est la somme des privilèges, immunités et pouvoirs dont jouissent le Sénat, la Chambre des communes et les assemblées législatives provinciales ainsi que les membres de chaque Chambre individuellement, sans lesquels ils ne pourraient s’acquitter de leurs fonctions
Par le passé, au Sénat, on n’a pas mis l’accent sur l’absence de questions relatives aux populations autochtones, et c’est ce que j’essaie de changer dans le cadre de mon travail, qui est durement touché par la limitation du débat.
Chers collègues, dans ses remarques du 19 octobre, le sénateur Gold a déclaré que nous pourrions souvent continuer à traiter des affaires autres que celles du gouvernement les jeudis, ce qui sous-entend que cette motion pourrait faire en sorte qu’il y ait de nombreux jeudis où nous ne traiterions aucune affaire autre que celles du gouvernement.
Le sénateur Gold a également déclaré — et je paraphrase — qu’il viendra un temps où nous serons submergés par les affaires du gouvernement. Cela nous occupera probablement jusqu’à très tard les jeudis.
Il est bien connu qu’à l’approche des vacances de décembre et de juin, le rythme des affaires gouvernementales s’accélère rapidement. Beaucoup d’entre nous admettront que ces semaines, voire ces mois, nécessitent l’annulation des autres affaires, car les affaires du gouvernement ont préséance. Lorsque ce déferlement d’affaires du gouvernement commencera, excuserons-nous encore les sénateurs pour qu’ils rentrent chez eux les jeudis, ou est-ce que tous seront tenus de rester?
Chers collègues, puisqu’il y a déjà des mois dans l’année où nous ne pouvons pas légitimement nous occuper des affaires autres que celles du gouvernement, ne devrions-nous pas privilégier le traitement de ces affaires pendant que nous avons la possibilité de le faire? Au lieu de cela, la motion no 132 sacrifie encore plus le temps qui est réservé à ces questions cruciales.
Il convient également de mentionner que l’on s’attend à ce que la réforme du Sénat donne lieu à une diversité accrue de la représentation et, par conséquent, du travail que nous accomplissons. Dans l’article « Birds of a Feather? Loyalty and Partisanship in the Reformed Canadian Senate », les auteurs affirment que les récentes nominations au Sénat ont conduit à une augmentation de la diversité raciale et de genre. Ils ajoutent que les deux principales fonctions du Sénat sont complémentaires : la protection des minorités politiques et l’examen des mesures législatives. Ainsi, la protection des minorités politiques se concrétise par la promotion des intérêts des minorités dans l’amendement, le rejet ou même la création de projets de loi. Cependant, nous ne pourrons pas remplir ces fonctions de manière adéquate si les affaires autres que celles du gouvernement continuent d’être considérées comme non essentielles, et, par conséquent, les lacunes dans la loi continueront de se creuser.
Honorables sénateurs, le sénateur Gold estime qu’il y a 75 projets de loi d’intérêt public du Sénat au Feuilleton, ce qui ne comprend pas les nombreuses motions et interpellations non gouvernementales, qui, toutes, concernent aussi divers sujets de grande importance.
Il est vrai que le nombre d’articles inscrits sous ces diverses rubriques peut être plus élevé qu’il ne l’a été habituellement par le passé, mais c’est simplement le résultat des efforts que nous sommes tous fiers d’avoir déployés afin de moderniser le Sénat.
Étant donné que les sénateurs soulèvent plus souvent des questions d’une importance cruciale pour les collectivités et les régions qu’ils représentent, comment pouvons-nous justifier de consacrer moins de temps à l’étude d’un plus grand nombre de sujets?
Honorables collègues, la réforme du Sénat devrait normalement donner lieu à une hausse des activités législatives. Le nombre d’interventions ne cause aucun problème. Par contre, là où il y a un problème, c’est quand les leaders limitent le processus entourant ces interventions en n’autorisant pas la tenue d’un vote pour celles-ci, en ne désignant aucun porte-parole, en ne permettant pas aux comités de siéger à une fréquence régulière pendant que le Sénat siège, en refusant l’option des séances hybrides et en limitant le nombre d’heures de débats pour des questions en particulier.
(1520)
Honorables sénateurs, la justification officielle invoquée pour la motion no 132 est que les leaders voulaient trouver une façon de permettre aux sénateurs d’arriver à la maison en temps voulu. L’un des avantages pour le Sénat de ne pas siéger les lundis et les vendredis est que ces journées servent aux déplacements. Ainsi, les sénateurs peuvent faire le trajet entre Ottawa et leur région respective pour être à la maison et auprès de la collectivité du début à la fin du week-end.
Il n’en demeure pas moins que, durant les semaines de séance, l’horaire du Sénat est habituellement réparti sur trois jours de séances par semaine. Nous savons qu’en raison des diverses réunions des comités et des caucus — qui doivent également être prévues durant ces mêmes trois jours — le Sénat ne commence habituellement à siéger qu’à 14 heures. De plus, nous savons que les séances du Sénat sont ajournées plus tôt les mercredis pour permettre aux comités de siéger également en soirée. En toute honnêteté, il est franchement difficile de justifier cette proposition d’ajourner plus tôt les jeudis quand, dans la réalité, notre précieux temps de séance au Sénat est déjà si restreint.
Chers collègues, dans la pratique, la motion no 132 indique que les sénateurs sont disposés à accepter que la rubrique Autres affaires puisse être traitée adéquatement, de façon fiable, une journée par semaine — le mardi —, avec l’espoir que nous puissions glisser certaines de ces affaires avant l’ajournement anticipé les mercredis et jeudis.
Honorables sénateurs, comme elle sert de fondement à l’argument général que j’espère faire valoir, j’aimerais rappeler la décision de la Cour suprême du Canada dans la question du renvoi relatif à la réforme du Sénat de 2014. Dans son jugement, en particulier aux paragraphes 15 et 16 de sa décision, la Cour a confirmé le rôle du Sénat en assurant :
[...] aux régions que leurs voix continueraient de se faire entendre dans le processus législatif, même si elles devenaient minoritaires au sein de l’ensemble de la population canadienne.
Chers collègues, j’aimerais également lire le paragraphe 16 de l’arrêt rendu par la Cour suprême en 2014 :
Avec le temps, le Sénat en est aussi venu à représenter divers groupes sous‑représentés à la Chambre des communes. Il a servi de tribune aux femmes ainsi qu’à des groupes ethniques, religieux, linguistiques et autochtones auxquels le processus démocratique populaire n’avait pas toujours donné une opportunité réelle de faire valoir leurs opinions.
Honorables sénateurs, la Cour suprême a bien cerné ce que nous faisons et ce que nous sommes censés faire ici. Nous nous penchons sur des dossiers dont l’autre endroit s’occupe mal en offrant une voix et une tribune aux groupes qui ont toujours été — et demeurent — mal représentés dans la population en général.
Chers collègues, nous ne devons jamais oublier les responsabilités qui sont inhérentes à notre poste de sénateur, notamment celles-ci :
Premièrement, se conformer aux normes de conduite les plus élevées attendues pour donner l’exemple et préserver la confiance du public. Comment pouvons-nous prétendre nous en acquitter si nous envisageons sérieusement de réduire les débats au Sénat pendant un jour de séance afin de permettre aux sénateurs de rentrer chez eux le jeudi, alors que nous avons déjà le privilège de le faire le lundi et le vendredi? De nombreux sénateurs partent déjà tôt le jeudi.
La deuxième responsabilité consiste à communiquer et à participer à des débats publics, et à chercher sincèrement à comprendre et à respecter le point de vue des autres sénateurs qui sont les porte‑parole de ceux et celles qui n’avaient encore jamais eu l’occasion de faire entendre leur voix. En tant que sénateurs, nous bénéficions des interventions de nos collègues, ce qui nous permet de comprendre la myriade de dossiers dont le Sénat est saisi. Limiter le débat revient à nous limiter tous.
Troisièmement, nous devons exercer les fonctions sénatoriales avec diligence et dans l’intérêt public. Cela suppose non seulement d’accorder de la place aux questions régionales et sous représentées, mais aussi de consacrer suffisamment de temps pour entendre ces questions et en débattre. En outre, cela suppose de permettre aux projets de loi d’être mis aux voix à la fin du débat et de transcender la partisanerie qui a entraîné des inefficacités historiques dans nos activités.
Quatrièmement, nous devons faire la promotion des exigences juridiques ainsi que des valeurs et des objectifs énoncés dans la Constitution, y compris le droit à l’égalité et la protection contre la discrimination illicite. Bon nombre des affaires non gouvernementales dont nous sommes saisis portent sur le racisme institutionnel, géographique et environnemental tant historique qu’actuel, soit des questions qui n’ont jamais été débattues au Sénat. En limitant le débat sur ces affaires et sur des questions semblables, qui reposent sur des exigences juridiques énoncées dans la Constitution, nous obligeons certains groupes, notamment les Premières Nations, à dépendre continuellement des tribunaux et des poursuites pour faire respecter leurs droits constitutionnels.
Je remercie mes collègues de m’avoir écoutée et j’exhorte chacun d’entre vous à agir de sorte que nous fassions collectivement ce qui s’impose afin de ne pas restreindre ni limiter davantage le débat sur les affaires non gouvernementales.
Merci.
(Sur la motion de la sénatrice Clement, le débat est ajourné.)
Aide médicale à mourir
Reconstitution du Comité mixte spécial—Message des Communes—Adoption de la motion
Le Sénat passe à l’étude du message de la Chambre des communes :
Le mercredi 18 octobre 2023
EXTRAIT,—
Que,
a)le Comité mixte spécial sur l’aide médical à mourir soit reconstitué, conformément à la recommandation 13 du deuxième rapport du Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir;
b)le Comité soit composé de cinq sénateurs et de 10 députés, dont cinq députés qui proviennent du parti ministériel, trois députés de l’opposition officielle et deux députés des autres partis de l’opposition qui ne sont pas l’opposition officielle, avec deux coprésidents, le coprésident agissant au nom de la Chambre représentant le parti ministériel et le coprésident agissant au nom du Sénat étant choisi par le Sénat;
c)outre les coprésidents, le Comité élise trois vice‑présidents agissant au nom de la Chambre, dont le premier vice-président soit un député du Parti conservateur du Canada, le deuxième vice-président soit un député du Bloc québécois et le troisième vice‑président soit un député du Nouveau Parti démocratique;
d)le quorum du Comité soit fixé à huit membres lorsqu’il y a prise d’un vote, d’une résolution ou d’une décision, à la condition que les deux chambres et un député du parti ministériel, un député de l’opposition et un membre du Sénat soient représentés, et les coprésidents soient autorisés à tenir réunion, à entendre des témoignages et à autoriser leur impression, à la condition que six membres du Comité soient présents et que les deux chambres et un député du parti ministériel, un député de l’opposition et un membre du Sénat soient représentés;
e)les membres de la Chambre des communes soient nommés par le whip de leur parti respectif par dépôt, auprès du greffier de la Chambre, de la liste des membres qui siégeront au Comité au plus tard cinq jours de séance après l’adoption de la présente motion;
f)les changements apportés à la représentation de la Chambre des communes au sein du Comité entrent en vigueur dès le dépôt de l’avis du whip auprès du greffier de la Chambre;
g)les membres de la Chambre des communes puissent se faire remplacer au besoin et que les avis de substitution, de la manière prévue à l’article 114(2) du Règlement;
h)le cas échéant en ce qui concerne un comité mixte spécial, les dispositions relatives aux séances hybrides des comités dans le Règlement de la Chambre des communes s’appliquent également au Comité;
i)le Comité ait le pouvoir de :
(i)siéger durant les séances de la Chambre et au cours des périodes d’ajournement,
(ii)faire rapport de temps à autre, de convoquer des témoins, de demander le dépôt de documents et de dossiers, et de faire imprimer des documents et des témoignages dont le Comité peut ordonner l’impression,
(iii)retenir les services de spécialistes et du personnel professionnel, technique et de soutien, notamment de conseillers juridiques,
(iv)mettre sur pied, en se servant de ses propres membres, tous les sous-comités qu’il jugera utiles, et de déléguer à ces sous-comités tous ses pouvoirs, sauf celui de faire rapport au Sénat et à la Chambre des communes,
(v)autoriser la diffusion vidéo et audio d’une partie ou de la totalité de ses délibérations et que les délibérations publiques soient rendues disponibles au public via les sites Web du Parlement du Canada;
j)le Comité présente au Parlement son rapport final, faisant état notamment de ses recommandations, au plus tard le 31 janvier 2024;
k)le Comité cesse d’exister lorsque son rapport final est présenté dans les deux chambres;
qu’un message soit envoyé au Sénat le priant de se joindre à la Chambre pour les fins susmentionnées et de choisir, s’il le juge opportun, des sénateurs pour le représenter audit Comité mixte spécial.
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) propose :
Que :
a)le Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir soit reconstitué, conformément à la recommandation 13 du deuxième rapport du Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir;
b)le comité soit formé de cinq sénateurs, dont un sénateur de l’opposition, deux sénateurs du Groupe des sénateurs indépendants, un sénateur du Groupe des sénateurs canadiens, et un sénateur du Groupe progressiste du Sénat, et de dix députés, avec deux présidents, le coprésident agissant au nom du Sénat étant de l’opposition et le coprésident agissant au nom de la Chambre des communes étant du parti ministériel;
c)outre les coprésidents, le comité ait un vice-président agissant au nom du Sénat étant du Groupe des sénateurs indépendants et trois vice-présidents agissant au nom de la Chambre;
d)le quorum du comité soit fixé à huit membres lorsqu’il y a prise d’un vote, d’une résolution ou d’une décision, à la condition que les deux Chambres soient représentées, qu’un membre du Sénat, un député du parti ministériel et un député de l’opposition soient présents, et que les coprésidents soient autorisés à tenir des réunions, à entendre des témoignages et à autoriser leur publication, à la condition que les deux Chambres soient représentées et que six membres du comité soient présents et qu’un membre du Sénat, un député du parti ministériel et un député de l’opposition soient présents;
e)les cinq sénateurs qui seront membres du comité soient nommés au moyen d’un avis signé par leur leader ou facilitateur respectif, ou leurs délégués respectifs, et remis au greffier du Sénat au plus tard à 17 heures le jour suivant l’adoption de cette motion, faute de quoi, le leader ou facilitateur, et, dans le cas du Groupe des sénateurs indépendants, le facilitateur adjoint s’il y a lieu, de tout parti ou groupe identifié au paragraphe b) qui n’a pas remis le nom d’un sénateur au greffier du Sénat, sera réputé être nommé au comité, les noms des sénateurs nommés à titre de membres étant consignés aux Journaux du Sénat;
f)pour plus de certitude, les modifications apportées à la représentation du Sénat au sein du comité soient apportées conformément à l’article 12-5 du Règlement du Sénat;
g)il soit entendu que les dispositions de l’ordre adopté par le Sénat le 17 octobre 2023 concernant la participation des sénateurs aux réunions hybrides des comités mixtes jusqu’au 30 juin 2024 s’appliquent aux sénateurs qui sont membres de ce comité;
h)le comité ait le pouvoir de :
(i)se réunir durant les séances et au cours des périodes d’ajournement du Sénat;
(ii)faire rapport de temps à autre, de convoquer des témoins, de demander le dépôt de documents et de dossiers, et de faire publier des documents et des témoignages tel qu’ordonné par le comité;
(iii)retenir les services de spécialistes et du personnel professionnel, technique et de soutien, notamment de conseillers juridiques;
(iv)autoriser la diffusion vidéo et audio d’une partie ou de la totalité de ses délibérations publiques et de les rendre disponibles au public sur les sites Web du Parlement du Canada;
i)le comité présente au Parlement son rapport final, faisant état notamment de ses recommandations, au plus tard le 31 janvier 2024;
j)le comité cesse d’exister lorsque son rapport final est présenté dans les deux Chambres;
k)un rapport du comité puisse être déposé auprès du greffier du Sénat à tout moment pendant une période d’ajournement du Sénat, et que tout rapport ainsi déposé puisse être déposé électroniquement, le rapport étant alors réputé avoir été présenté ou déposé au Sénat;
Qu’un message soit transmis à la Chambre des communes pour l’en informer.
(1530)
[Français]
L’honorable Pierre J. Dalphond : Honorables sénateurs, j’appuie cette motion. Je veux juste faire une précision. La motion dit ce qui suit dans son paragraphe b) :
[...] le coprésident agissant au nom du Sénat étant de l’opposition et le coprésident agissant au nom de la Chambre des communes étant du parti ministériel;
Je rappelle qu’il s’agit de reconstituer le comité. La motion originale prévoyait que le coprésident du Sénat soit choisi par les sénateurs membres du comité. À la suite d’une rencontre que le sénateur Gold a eu le plaisir de présider, nous avions convenu de désigner la sénatrice Martin comme coprésidente du comité. Elle a fait un excellent travail, que je salue. J’appuie cette motion, parce qu’elle renvoie au fait que la coprésidence du Sénat sera exercée par un membre de l’opposition, en l’occurrence la sénatrice Martin. J’appuie également la motion qui reconstitue le comité tel que nous l’avions constitué à l’origine, mais pas parce que j’appuie le principe selon lequel lorsqu’un comité mixte du Sénat et de Chambre des communes est présidé par un membre du parti au gouvernement, cela entraîne automatiquement que la coprésidence est confiée au Parti conservateur au Sénat. Merci.
Le sénateur Gold : Je remercie le sénateur Dalphond de cette précision et de son appui à cette motion.
[Traduction]
Honorables sénateurs, je prends brièvement la parole au sujet de la motion en réponse au message de la Chambre des communes concernant le renouvellement du mandat du Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir.
L’objectif de reconstituer le Comité et la nécessité d’adopter cette motion en temps opportun est de respecter la recommandation 13 du deuxième rapport du comité, qui se lit comme suit :
Que, cinq mois avant l’entrée en vigueur de l’admissibilité à l’AMM lorsque le trouble mental est le seul problème médical invoqué, un comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir soit rétabli par la Chambre des communes et le Sénat afin de vérifier le degré de préparation atteint pour une application sûre et adéquate de l’AMM (en situation de TM-SPMI). À la suite de cette évaluation, le Comité mixte spécial fera sa recommandation finale à la Chambre des communes et au Sénat.
En bref, la motion que j’ai proposée ne vise qu’à rétablir le comité mixte dans les conditions qui s’appliquent à la législature actuelle, une approche qui jouit de l’appui des leaders au Sénat. J’aimerais également souligner que le message reçu de la Chambre des communes a été adopté à l’unanimité.
Honorables sénateurs, ce comité nécessite une certaine continuité et le sujet, comme nous le savons tous, est très délicat.
La question à l’étude est plutôt pointue, soit l’admissibilité à l’aide médicale à mourir lorsque le seul problème de santé invoqué pour en justifier la demande est une maladie mentale. Comme nous le savons, chers collègues, l’entrée en vigueur de la disposition portant précisément sur ce genre de situation a été retardée d’un an et reportée à mars 2024.
Je mentionne le délai, car il est impératif que le comité entame ses travaux dès que possible. Comme je l’ai mentionné lorsque j’ai lu la motion, la date à laquelle le comité doit présenter son rapport est le 31 janvier 2024.
Si le Sénat, dans toute sa sagesse, adopte la motion aujourd’hui, le Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir pourra se réunir dans les plus brefs délais. Par conséquent, je vous exhorte à appuyer cette motion pour que le comité mixte puisse entreprendre cette tâche sérieuse et importante. Merci, chers collègues.
Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Des voix : Le vote!
Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
(La motion est adoptée.)
[Français]
Le Tarif des douanes
Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Housakos, appuyée par l’honorable sénatrice Ataullahjan, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-204, Loi modifiant le Tarif des douanes (marchandises en provenance du Xinjiang).
L’honorable Bernadette Clement : Honorables sénateurs, je constate que cet article en est à son 15e jour et je ne suis pas prête à intervenir. Par conséquent, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 4-15(3) du Règlement, je propose l’ajournement du débat pour le temps de parole qu’il me reste.
Son Honneur la Présidente intérimaire : Le consentement est‑il accordé, honorables sénateurs?
Des voix : D’accord.
(Le débat est ajourné.)
[Traduction]
Projet de loi sur le Mois du patrimoine hellénique
Deuxième lecture—Suite du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Loffreda, appuyée par l’honorable sénatrice Moncion, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-259, Loi désignant le mois de mars comme Mois du patrimoine hellénique.
L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Je propose l’ajournement du débat pour le reste du temps dont je dispose.
(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)
[Français]
La Loi concernant le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement
Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Gerba, appuyée par l’honorable sénateur Klyne, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-282, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (gestion de l’offre).
L’honorable Diane Bellemare : Chers collègues, je tiens d’abord à souligner que je prononce ce discours à partir des territoires non cédés du peuple algonquin anishinabe.
Je prends la parole aujourd’hui pour appuyer le projet de loi C-282, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (gestion de l’offre) à l’étape de la deuxième lecture.
(1540)
Je ne veux pas répéter les arguments de la marraine du projet de loi, la sénatrice Gerba, ni ceux du sénateur Forest, car ils ont bien expliqué les raisons et les objectifs de la gestion de l’offre.
Je sais aussi que le sujet de la gestion de l’offre des produits laitiers, des œufs et de la volaille peut polariser bien des Canadiens. Pourquoi faudrait-il payer plus cher les fromages d’ailleurs, les œufs, le lait et la volaille? C’est, évidemment, une question légitime.
Plusieurs économistes — dont mon mari fait partie — sont contre la gestion de l’offre, surtout lorsqu’on aime les fromages français de certains types que l’on ne peut pas avoir chez nous.
Pour ma part, je suis économiste, mais je ne considère pas que la théorie économique me permet de rejeter du revers de la main le système que nous avons au Canada.
Je ne crois pas être suffisamment bien informée pour me prononcer a priori sur la gestion de l’offre et sur le fait qu’il est évident que les coûts de cette mesure sont plus grands que les bénéfices qui y sont associés. Je considère que c’est un système complexe et fortement réglementé, et qu’on ne doit pas s’y attaquer sans connaissance de cause.
En prononçant ce discours, je vais essayer de vous convaincre qu’il faut voter rapidement en faveur du projet de loi C-282.
Pourquoi? Parce que ce projet de loi n’est pas un vote sur la gestion de l’offre, mais sur une question de principe. Le principe est le suivant : voulons-nous soustraire aux négociations de libre‑échange des éléments institutionnels qui nous distinguent comme pays, comme dans le cas des industries canadiennes culturelles et de nos programmes sociaux?
J’arrive maintenant à la substance de mon discours.
Le projet de loi C-282 tient en quelques lignes. Il modifie la Loi sur le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement dans le but d’interdire au ministre de prendre des engagements au nom du gouvernement en vue d’augmenter les importations de produits laitiers, d’œufs et de volaille ou de réduire les tarifs.
Bref, le projet de loi interdit au ministre de négocier, au nom du gouvernement, des ententes de libre-échange sur le dos de la gestion de l’offre.
Pourquoi voit-on cette attribution à la faveur de la gestion de l’offre? La réponse est simple : ce système, fondé sur le contrôle de la production, des prix et des importations, est complexe et il a beaucoup de valeur, soit plus de 36 milliards de dollars — en fait, près de 37 milliards de dollars. J’y reviendrai.
Si les Canadiens veulent transformer ce système, ils peuvent le faire. Je suggère que ce soit dans le cadre de choix et de décisions transparentes qui se prendront dans le contexte d’un débat public.
À première vue, ce système de gestion de l’offre fonctionne assez bien et il s’est avéré efficace pour assurer la stabilité de l’approvisionnement local pour ses denrées essentielles, ce qui était son objectif.
Il n’est pas légitime de s’être attaqué à cet enjeu de manière indirecte par le biais des négociations de libre-échange, car les enjeux sont importants. Les choix de politiques publiques qui ont été faits dans les années 1970 ne peuvent être remis en question que dans le cadre d’autres choix de politiques publiques en toute connaissance de cause. Comme d’autres l’ont dit avant moi, le système de la gestion de l’offre a été mis en place dans les années 1970, afin de répondre à des problèmes de surproduction qui faisaient baisser les prix de certaines denrées essentielles et menaçaient la viabilité des fermes canadiennes.
Avant de poursuivre, j’aimerais vous raconter une petite anecdote personnelle. Le sénateur Cotter présente souvent, en guise de préambule à une argumentation, une petite anecdote personnelle qui réussit toujours à capter mon attention. Je me suis donc inspirée de lui.
Mon père a longtemps été propriétaire et chauffeur de taxi, et ce, jusqu’à mes 10 ans. Il était chauffeur professionnel et fier de l’être. Il travaillait de longues heures et il aimait être son propre employeur. C’est pour cela qu’il était propriétaire de son taxi.
À cette époque et encore aujourd’hui, l’industrie du taxi était fortement réglementée et suivait les principes de la gestion de l’offre. Une personne ne pouvait pas et ne peut toujours pas s’improviser chauffeur de taxi — c’était avant Uber. L’offre était strictement réglementée par un nombre fixe de permis pour les voitures de taxi. Mon père avait donc acheté un permis de taxi qui lui permettait de conduire un taxi dans la Ville de Montréal. Donc, pour une personne comme mon père, qui était chauffeur de taxi, il fallait avoir un permis de conduire, une voiture et un permis de taxi. Le prix de ces permis de taxi variait selon la conjoncture économique, mais ils étaient en nombre fixe.
À la fin des années 1950 et au début des années 1960, l’activité économique avait fortement ralenti au Canada et mon père, qui était le pourvoyeur de la famille, avait de la difficulté à couvrir les coûts liés au taxi et à gagner suffisamment d’argent pour nourrir sa famille de quatre enfants. Le prix des permis de taxi commençait à baisser. C’était normal; il y avait moins d’activité et c’était plus difficile. Mon père a alors eu l’idée de vendre son permis de taxi de la Ville de Montréal — avant que le prix ne baisse trop — pour acheter un permis moins cher d’une petite ville adjacente, pour continuer à conduire un taxi pendant de longues heures et éviter de s’endetter. Toutes ces conversations se sont imprimées dans ma tête, car ma mère était très inquiète de cette décision.
Finalement, l’industrie du taxi a pris beaucoup de temps à se remettre de la récession du début des années 1960, et mon père a été obligé de vendre le deuxième permis de taxi et d’arrêter de conduire un taxi. En effet, malgré ses longues heures de travail, il ne réussissait pas à couvrir les coûts de son entreprise.
Cet épisode m’a beaucoup marquée et m’a permis de comprendre un peu mieux le fonctionnement de l’industrie du taxi et la base de la gestion de l’offre : il s’agissait dans ce cas de contrôler l’offre de service par l’émission d’un nombre limité de permis de taxi.
Quand je faisais ma maîtrise à l’Université Western Ontario, cela m’a permis de me distinguer lors d’un examen, alors que la plupart de mes collègues n’avaient pas compris la question. Évidemment, la gestion de l’offre est une question complexe.
Vous vous demandez sans doute quel est le lien avec le projet de loi C-282. Il est simple : les agriculteurs de l’industrie des produits laitiers, des œufs et de la volaille doivent aussi acheter un permis de produire; ce sont des quotas de production. Ces quotas de production sont en nombre limité. Quand ils ont été émis par le gouvernement en 1970 pour limiter la production, ils ont été distribués gratuitement. Avec le temps, les fermes ont changé de main et les quotas ont donc pris de la valeur. Actuellement, les quotas s’échangent mensuellement selon le prix de l’offre et de la demande.
Ainsi, un agriculteur ne peut s’improviser producteur de lait, d’œufs ou de volaille. Il doit d’abord acheter des quotas de production — comme dans le cas du permis de taxi. Au Québec, pour une ferme de taille moyenne, la valeur des quotas de production peut se situer autour de 1,5 million de dollars; si ma mémoire est bonne, c’est pour une ferme possédant 64 vaches. Cet investissement de 1,5 million de dollars dans un quota de production ne tient pas compte de la valeur des bêtes, ni de la ferme, ni du terrain.
(1550)
C’est pourquoi les quotas de production sont considérés comme des actifs financiers. Affaiblir indirectement le système de la gestion de l’offre au moyen des ententes de libre-échange qui ouvrent le marché à l’importation, c’est jouer sur les actifs des producteurs fermiers et sur le montage financier des fermes canadiennes. C’est un aspect important, parce que les fermiers s’endettent pour acheter des quotas.
Chers collègues, comme l’ont très bien expliqué la sénatrice Gerba et le sénateur Forest, la gestion de l’offre dans les produits laitiers, les œufs et la volaille repose sur trois piliers : les quotas de production, la gestion des prix et le contrôle des importations. Il est clair qu’une libéralisation du secteur par l’entremise des ententes de libre-échange aura des effets sur les prix des produits et sur la valeur des quotas de production.
La gestion de l’offre des secteurs du lait, des œufs et de la volaille est un système complexe, surtout en raison de la réglementation sous-jacente. Ce secteur est très important pour le Canada.
Selon une étude de la Bibliothèque du Parlement menée en 2018 avec des données de 2017, ce secteur représente près de 350 000 emplois, une production de 29,6 milliards de dollars et près de 7 milliards en revenus pour les gouvernements. Toutefois, il y a encore plus. En 2017, la valeur des quotas de production atteignait près de 37 milliards de dollars. Il s’agit de la valeur totale de la gestion de l’offre et ce montant est réparti dans toutes les provinces, dans toutes nos régions sénatoriales.
En Ontario, par exemple, la valeur des quotas représente 14 milliards de dollars. Au Québec, elle représente environ 10 milliards de dollars.
Pour les régions de l’Ouest — la Colombie-Britannique, l’Alberta la Saskatchewan et le Manitoba —, on parle de 11 milliards de dollars en actifs financiers. Pour les provinces maritimes, cela représente 2 milliards de dollars. Donc, cela vaut quelque chose.
Lorsqu’on ouvre le marché canadien aux producteurs étrangers, qui sont largement subventionnés par leur gouvernement respectif, notre système est perturbé et on ne connaît pas l’ampleur des conséquences inattendues de tout cela.
Pour cette raison, je suis en faveur de ce projet de loi, qui empêche le ministre des Affaires étrangères de faire des concessions dans le cadre de négociations de libre-échange. Le système de la gestion de l’offre est trop complexe pour le soumettre aux ballottements des négociations de libre-échange. À mon avis, il vaut bien trop cher.
Pour toutes ces raisons, je vais voter en faveur du projet de loi et je vous invite à faire de même, indépendamment de votre position concernant la gestion de l’offre.
Comme vous le savez, le vote à l’étape de la deuxième lecture d’un projet de loi porte sur le principe du projet de loi. La question est la suivante : souscrivons-nous au principe de ce projet de loi? Or, cette loi vient du principe général selon lequel on ne veut pas transformer nos institutions, qu’elles soient culturelles, sociales ou économiques — dans ce cas-ci, dans le contexte des ententes de libre-échange.
Par ailleurs, je vous rappelle que ce projet de loi a été adopté à l’étape de la troisième lecture à l’autre endroit et qu’il a obtenu l’appui des quatre chefs de parti.
Il ne me semble pas légitime de voter contre ce projet de loi à l’étape de la deuxième lecture.
Merci. Meegwetch.
[Traduction]
Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, il reste 33 secondes. Sénatrice Bellemare, si vous souhaitez répondre à des questions, vous devez demander cinq minutes de plus.
[Français]
Sénatrice Bellemare, voulez-vous demander cinq minutes de plus?
La sénatrice Bellemare : S’il y a des questions, je suis prête à y répondre.
Des voix : Non.
[Traduction]
Son Honneur la Présidente intérimaire : Aucune prolongation n’est accordée et votre temps de parole est écoulé.
(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)
Le Sénat
Motion tendant à demander au gouvernement d’accélérer la mise en œuvre des solutions numériques qui transforment l’expérience des Canadiens en matière de prestation des services publics—Suite du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Deacon (Nouvelle-Écosse), appuyée par l’honorable sénateur Smith,
Que le Sénat demande au gouvernement du Canada de remplacer ses systèmes de prestation de programmes et de technologie de l’information désuets en accélérant, de toute urgence, la mise en œuvre de solutions numériques axées sur les usagers qui transforment l’expérience des Canadiens en matière de prestation des services publics et, en fin de compte, réduisent le coût de la prestation des programmes.
L’honorable Tony Dean : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet de la motion du sénateur Colin Deacon, qui demande au gouvernement du Canada de réformer ses systèmes de prestation de programmes et de technologie de l’information en accélérant, de toute urgence, la mise en œuvre de solutions numériques axées sur les usagers qui transforment l’expérience des Canadiens en matière de prestation des services publics, tout en réduisant les coûts. J’appuie la motion du sénateur Colin Deacon, chers collègues, et j’imagine que c’est aussi le cas de la majorité d’entre vous.
J’aimerais parler cet après-midi du contexte de la réforme des services publics en général et vous faire part de ma propre expérience en matière de réforme des services publics, en tant qu’ancien chef de la fonction publique de l’Ontario. Je vais d’abord donner un exemple de réforme de la prestation des services publics, puis offrir quelques conseils qui me semblent importants dans le cadre de la motion du sénateur Deacon.
Peu de temps après sa première élection en 2003, l’ancien premier ministre de l’Ontario Dalton McGuinty m’a chargé de résoudre certains problèmes urgents dans la prestation des services publics, par exemple en réduisant les délais d’attente pour d’importantes procédures de soins de santé comme des chirurgies cardiaques et des chirurgies contre le cancer; en améliorant les résultats des élèves aux tests standardisés et en réduisant le taux de décrochage dans les écoles secondaires; et en éliminant l’énorme arriéré dans la délivrance de certificats de naissance. J’ai fini par accomplir toutes ces choses. Aujourd’hui, je vais me concentrer sur la délivrance de certificats de naissance parce qu’elle montre directement les avantages de la numérisation.
Honorables collègues, en 2004, il fallait attendre neuf mois pour obtenir un certificat de naissance en Ontario, ce qui a amené les gens à établir certaines analogies; vous savez ce que je pourrais dire à propos d’une soirée romantique. Cependant, le premier ministre de l’Ontario de l’époque n’y voyait évidemment rien d’amusant. La prestation des services publics était devenue un enjeu politique. L’équipe de la fonction publique, dirigée par une sous-ministre de l’époque, Michelle DiEmanuele, qui est actuellement à la tête de la fonction publique de l’Ontario, s’est penchée sur le processus de délivrance des certificats de naissance et s’est rendu compte que tout se faisait sur papier. Les demandes arrivaient par la poste à Toronto, puis étaient transportées dans un fourgon jusqu’à Thunder Bay pour y être traitées. On renvoyait ensuite la documentation au sud, à Toronto, pour finalement expédier les certificats aux demandeurs. Le resserrement des protocoles de sécurité à la suite des attentats du 11 septembre, survenus deux ans plus tôt, n’avait fait qu’aggraver la situation.
L’équipe a vite conclu que la numérisation du processus permettrait de réduire le temps de traitement de plusieurs mois à quelques jours et de réduire les coûts de plusieurs dollars à quelques cents par transaction. Le coût initial était d’environ 5 $ ou 6 $ par transaction. Cette proposition de refonte permettait aussi de réaffecter des employés à des tâches ayant une plus grande valeur ajoutée. « Faisons-le », ai-je dit. Après une discussion avec le premier ministre de la province, le processus a été lancé.
(1600)
Le nouveau système a été lancé moins d’un an plus tard après deux ou trois essais de fonctionnement hors ligne.
Le délai pour la délivrance d’un certificat de naissance en Ontario est passé de 9 mois à 14 jours, avec l’option d’un service accéléré de 7 jours qui était assorti d’une garantie de remboursement si le délai n’était pas respecté. Il est facile de comprendre que ce service est devenu très populaire — je n’exagère pas — et les lettres de réclamation ont rapidement été remplacées par des lettres de remerciement, ce qui est très rare dans la fonction publique.
Quelles leçons pouvons-nous tirer de cette expérience?
Premièrement, c’est plus facile si une priorité de transformation est aussi une priorité pour le premier ministre provincial ou fédéral, car elle devient automatiquement une priorité pour le chef de la fonction publique.
Deuxièmement, comme dans toute organisation, l’une des tâches clés des dirigeants consiste à cerner les principaux problèmes et à les régler, ou à cibler les grandes occasions et à les saisir.
Troisièmement, la compétence des dirigeants des ressources humaines est cruciale. C’est un aspect dont on a souvent trop peu reconnu la valeur dans le passé, ce qui est d’ailleurs encore le cas aujourd’hui selon moi, alors qu’il faudrait en faire grand cas. Il s’agit d’un facteur de réussite déterminant en matière de direction et de gestion du changement. La décision la plus importante que nous avons alors prise en matière de ressources humaines a été de ne pas avoir recours à des cabinets d’experts-conseils, mais plutôt d’embaucher un gestionnaire des TI chevronné de l’un des plus grands fournisseurs de services de téléphonie du Canada, qui avait chapeauté la numérisation de la prestation des services à la population.
Quatrièmement, il fallait que les bonnes personnes se penchent sur ces priorités. Ce n’était pas une tâche comme une autre. Nous avons donc choisi des gens innovateurs enthousiastes qui voyaient l’occasion de transformer les services publics pour les améliorer. Il faut me croire : dans tous les ordres de gouvernement, y compris au fédéral, un nombre incalculable de fonctionnaires ont ces compétences et attendent qu’on leur demande de les utiliser. Il suffit qu’on le leur demande et qu’on leur confie cette tâche.
Si on a pu réaliser ce projet, pourquoi ne pourrait-on pas réformer les processus de demande et d’accès pour les enregistrements des naissances à l’échelle municipale, ce qui est nécessaire pour les certificats de naissance, les permis de conduire, les renouvellements de carte d’assurance-maladie et les numéros d’assurance sociale du fédéral, des documents qui servent à leur tour à l’obtention d’un passeport, bien sûr, et à d’autres services du gouvernement fédéral?
Chers collègues, bon nombre de ces services sont maintenant accessibles en ligne ou dans des centres de services intégrés comme Service Nouveau‑Brunswick, Service BC, Service Alberta et ServiceOntario. D’autres provinces et des territoires ont des centres de services similaires.
Chers collègues, le fait d’amener le Canada à cette table a permis de regrouper la prestation de services par des moyens numériques et par l’intermédiaire de centres de services à guichet unique regroupés et a constitué le dernier obstacle à la création de ce système intergouvernemental.
À la suite d’une réunion franche entre le chef de la fonction publique de l’Ontario de l’époque et un ministre de premier plan représentant le gouvernement fédéral de l’époque, le principal obstacle à la collaboration entre le gouvernement fédéral, la province et les municipalités a été éliminé. Tous auraient leur drapeau sur le toit et leur nom sur la porte. C’est ce qu’il a fallu faire à un moment donné parce que l’enjeu en était un de visibilité — une préoccupation compréhensible.
Qu’avons-nous appris de ces initiatives de réforme? Comme partout ailleurs, l’exercice du leadership et la définition des attentes par les dirigeants politiques constituent un important moteur de changement. De bonnes initiatives de réforme visant à améliorer les services publics attirent des partisans et des militants au sein des organisations de la fonction publique, et des percées sont réalisées. La gorge de la serrure se bloque, la combinaison se met en place, la serrure s’ouvre et le changement se produit.
Comme nous l’avons entendu, la numérisation réduit le coût de chaque transaction, le faisant passer de quelques dollars à quelques cents.
Surtout, l’amélioration de la prestation des services publics accroît la confiance des citoyens dans le gouvernement, ce qui est prouvé. Les chiffres importent moins que les attentes et les expériences des consommateurs, des clients et des citoyens au cœur de la prestation. Ils se demandent : combien de temps dois-je attendre au téléphone ou en ligne pour obtenir un service public ou un traitement du cancer? Ai-je confiance en mes enseignants? L’école de mon enfant est-elle propre? Combien de temps dois-je attendre pour obtenir d’autres services médicaux? J’ai parlé des chirurgies cardiaques, mais qu’en est-il des chirurgies de la hanche, du genou et de l’œil?
Chers collègues, l’amélioration des services publics est la voie à suivre.
Enfin, je tiens à aborder un point qui est très important, surtout lorsque nous examinons les organisations nationales fédérales. C’est vrai non seulement pour le Canada, mais aussi pour d’autres pays, et c’est certainement vrai pour d’autres fédérations.
De toute évidence, l’échelle a de l’importance. Lorsque nous avons créé ServiceOntario, une organisation de prestation de services autonome, j’ai voulu savoir pourquoi le Nouveau‑Brunswick avait une longueur d’avance sur nous. Pourquoi le Nouveau‑Brunswick, à l’instar de quelques autres petites administrations, nous a-t-il devancés dans ce domaine? Il m’a fallu beaucoup de temps pour obtenir des réponses à cette question. Le Nouveau‑Brunswick avait évidemment des dirigeants audacieux, mais il nous a devancés en partie parce qu’il est relativement petit et, plus une province est petite, plus un changement peut être mis en œuvre rapidement et facilement.
L’échelle tend également à jouer un rôle important sur le plan international, les petits pays et les gouvernements sous-nationaux progressant plus vite que les gouvernements nationaux. Par exemple, les États australiens, tout comme les provinces canadiennes, font preuve d’esprit d’entreprise par rapport à leurs homologues au niveau national. Ce sont deux pays vers lesquels fonctionnaires et les dirigeants politiques du monde entier se tournent pour trouver des exemples de réussite dans le domaine de l’administration publique. Cela est également vrai au niveau fédéral, chers collègues.
Il en va de même en Europe. Les petits pays qui se sont modernisés récemment sont souvent en avance sur leurs plus grands homologues. La Lituanie en est un excellent exemple, tout comme l’Albanie.
Cela dit, le Royaume‑Uni a également parcouru un long chemin — il s’agit d’un grand pays doté d’un imposant gouvernement national —, notamment en numérisant le processus de renouvellement des passeports et en automatisant, pendant une longue période, le traitement de l’impôt sur le revenu pour les personnes ayant un emploi régulier.
Comme beaucoup d’entre vous le savent, les travailleurs réguliers qui perçoivent des revenus horaires et les salariés peuvent choisir de ne pas remplir de déclaration de revenus. Ces dernières sont par ailleurs automatisées et on reçoit tout simplement un remboursement ou un ordre de payer l’impôt dû.
Ainsi, chers collègues, oui, nous devons attendre davantage de notre gouvernement fédéral, et nous savons qu’il est capable de répondre à nos attentes. Nous l’avons vu avec le déploiement de l’Allocation canadienne pour enfants, qui a permis à près de 400 000 enfants de se sortir de la pauvreté depuis 2016.
Voici une autre anecdote. Quand je travaillais dans la fonction publique, nous avions l’habitude de dire que la pauvreté était un problème insoluble — un problème trop complexe, trop vaste pour que nous puissions y remédier —, jusqu’à ce que la pauvreté devienne trop coûteuse. C’est à ce moment-là que nous avons commencé à chercher des solutions. L’Allocation canadienne pour enfants est un exemple parfait de mesure qui permet de sortir un grand nombre de démunis de la pauvreté. Le Supplément de revenu garanti pour les aînés en est un autre exemple. Il y a une multitude d’exemples.
Enfin, il est important de souligner le travail de l’Institut des services axés sur les citoyens, créé il y a des décennies par un groupe de fonctionnaires fédéraux et de fonctionnaires de l’Ontario, qui produit encore des rapports comparatifs périodiques sur des éléments clés de la prestation de services publics. Certains de mes anciens collègues du fédéral ici savent de quoi je parle.
Chers collègues, nous pouvons être fiers des fonctionnaires de tous les ordres de gouvernement au pays. Ils travaillent aussi fort et font preuve du même esprit d’entreprise que les travailleurs des autres secteurs de l’économie, mais ils travaillent dans un milieu qui a peur du risque — ce qui est probablement compréhensible. Chers collègues, nous devons envoyer les bons messages. Il suffit de laisser libre cours à cet esprit d’entreprise et, dans un laps de temps relativement court, nous arriverons à atteindre ce que souhaite le sénateur Deacon.
(1610)
Pour chacune des histoires de réforme réussie des services publics dont j’ai parlé ce soir, il y en a d’innombrables autres, mais il reste encore beaucoup à faire. Je remercie le sénateur Deacon d’avoir lancé cette importante discussion. Merci.
L’honorable Colin Deacon : Sénateur Dean, je vous remercie de nous faire profiter de votre excellente expérience. Je me demande si vous pourriez nous parler brièvement de la nécessité de modifier les politiques, les règlements et les pratiques pour réaliser de tels gains d’efficience. On ne peut pas numériser les vieilles habitudes; il faut changer la façon dont on fait les choses. Pouvez-vous nous en parler? Merci.
Le sénateur Dean : Merci, sénateur Deacon. J’ai vu des organisations dont les systèmes de réglementation sont extrêmement lourds, et il est remarquable de voir comment ils peuvent être dissous — quoique peut-être temporairement — lorsque un premier ministre du Canada ou un premier ministre provincial et un chef de la fonction publique demandent à des fonctionnaires d’atteindre rapidement un certain objectif. De tels obstacles peuvent être éliminés. Je ne voudrais pas donner l’impression qu’il faut passer par une longue période de modification de la myriade de règles qui existent dans les organisations de la fonction publique pour atteindre rapidement l’objectif.
Ces choses doivent être faites, mais je conseillerais de ne pas s’empêtrer là-dedans. Définissons clairement les objectifs, donnons‑leur du poids politique, obtenons l’appui des dirigeants de la fonction publique et affectons aux bons postes les bonnes personnes ayant les bons antécédents et ayant déjà réussi une telle entreprise, et nous ferons avancer les choses.
(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)
Les défis et possibilités auxquels font face les municipalités canadiennes
Interpellation—Suite du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénatrice Simons, attirant l’attention du Sénat sur les défis et possibilités auxquels font face les municipalités canadiennes, et sur l’importance de comprendre et de redéfinir les relations entre les municipalités du Canada et le gouvernement fédéral.
L’honorable David M. Arnot : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer l’interpellation de la sénatrice Simons sur les défis et les possibilités qui se présentent aux municipalités canadiennes. Je remercie la sénatrice Simons d’avoir donné au Sénat l’occasion de réfléchir à ce sujet crucial et d’actualité. J’ajoute ma voix à celle de nos collègues, en utilisant ma province natale, la Saskatchewan, comme point de repère pour formuler mes observations.
Comme dans d’autres provinces, la loi oblige les municipalités de la Saskatchewan à exercer une bonne gouvernance et à fournir des services et des installations de qualité, tout en favorisant le bien‑être économique, social et environnemental et en assurant la sécurité publique. Ces objectifs semblent simples et acceptables. Pourquoi la présente interpellation est-elle nécessaire?
Au cours de l’été, j’ai pris contact avec des responsables municipaux pour les rencontrer et les écouter. Ces dirigeants sont de véritables champions pour leurs communautés et ils sont engagés et motivés à servir le public. Ils poursuivent de grands projets tels que de nouvelles bibliothèques publiques, des centres multifonctionnels et des partenariats visant à promouvoir l’enseignement postsecondaire.
Comme partout ailleurs au Canada, les collectivités de la Saskatchewan font également face à une dure réalité. Outre les projets que l’on pourrait considérer comme des « joyaux », elles créent — en partenariat — des abris chauffés dans les parcs, des programmes d’accès rapide, des équipes de proximité travaillant à la prévention des surdoses et des services d’aide psychologique pour les enfants, les jeunes et les aidants. Ils répondent aux défis sociaux, sécuritaires et économiques importants liés à la santé mentale et aux dépendances, aux médicaments toxiques et contaminés, à la violence familiale, et aux infections transmissibles sexuellement et par le sang.
De plus en plus, les administrations municipales doivent s’attaquer à des défis sociaux de longue date, dont beaucoup sont exacerbés par la hausse des coûts des refuges, de la nourriture et du carburant. Elles doivent remplacer des infrastructures vieillissantes qui n’ont jamais été aussi coûteuses à réparer et à remplacer. Les municipalités composent avec ces dures réalités avec ou sans le soutien des gouvernements fédéral et provinciaux.
Charlie Clark, le maire de Saskatoon, a noté ceci :
Nous avons actuellement une mosaïque de programmes de financement qui offrent peu de prévisibilité ou de capacité de planification. De plus en plus, les villes doivent sortir de leurs domaines de compétence pour répondre aux besoins de leur communauté, car on nous impose davantage de responsabilités.
Les partenariats fédéraux-provinciaux et fédéraux-territoriaux servent depuis longtemps à atteindre des objectifs sociaux et d’infrastructure. Par exemple, le plan Investir dans le Canada est une stratégie d’investissement de 188 milliards de dollars s’étendant sur 12 ans qui a débuté en 2016. Toutefois, le directeur parlementaire du budget a signalé que ce programme a probablement :
[...] contribué à l’augmentation des dépenses en immobilisations des municipalités, mais pas de celles des provinces. [...] le financement du gouvernement fédéral [...] a probablement entraîné un déplacement des investissements [...] des provinces [...]
Les dirigeants municipaux agissent en fonction — et parfois au‑delà — des contraintes de leur mandat et de leurs ressources. Ils doivent prendre des décisions difficiles pour deux raisons. Premièrement, ils ne peuvent accumuler de déficit, et deuxièmement, leur capacité à taxer leurs citoyens n’a pas été conçue pour les réalités actuelles et n’arrive pas à suivre le rythme.
Les municipalités sont au cœur de la prestation de services, et les coûts pour assurer leur fonctionnement et répondre à leurs résidants augmentent. Les citoyens doivent composer avec une augmentation annuelle du coût de la vie et le fait que l’indice des prix à la consommation a augmenté de près de 4 % au cours des 12 derniers mois. Les municipalités répondent à ces augmentations de prix, comme le coût du gaz et du carburant, et à la diminution du nombre de logements, qui a pour effet d’amplifier les problèmes de toxicomanie, de santé mentale et d’itinérance. Par exemple, la Fédération canadienne des municipalités demande depuis longtemps que le fédéral investisse dans des programmes qui visent à répondre à la fois aux besoins en matière de logement et d’itinérance chronique, en particulier pour les populations les plus vulnérables.
Dans ma ville, Saskatoon, 550 personnes sont en situation d’itinérance, ce qui représente une augmentation de 15 % depuis 2018. Ce chiffre est considéré comme une estimation très conservatrice. Parmi ces personnes, 83 % s’identifient comme Autochtones, et 49 % affirment être en situation d’itinérance chronique. La Saskatchewan a signalé une augmentation de 14,8 % des mises en chantier entre septembre 2022 et septembre 2023, soit une différence de 1,6 % entre les deux années.
Ce changement est le bienvenu, mais, actuellement, le parc de logements en Saskatchewan est extrêmement limité. Il y a quelques semaines, la Saskatchewan Realtors Association a indiqué que le parc de logements était à son plus bas niveau depuis 2009. En s’appuyant sur la croissance démographique prévue au cours des huit prochaines années, le Saskatchewan Housing Continuum Network prévoit qu’il faudra plus de 100 000 logements d’ici 2030.
Soyons clairs. Les dirigeants municipaux sont des bâtisseurs. Ils sont fiers des résidants qu’ils représentent, de leur municipalité et de leur province. Ce qu’ils réclament, c’est une meilleure relation entre les gouvernements provincial et fédéral et avec ceux-ci pour que les villes et les gens puissent prospérer.
Son Honneur le maire Charlie Clark m’a dit qu’il appuie :
[...] les démarches en vue de trouver un nouveau modèle de financement et de gouvernance pour les villes qui reflète la réalité urbaine du Canada d’aujourd’hui. Une si grande partie de ce qui détermine le bien-être de notre pays — la santé des citoyens, le climat, l’économie et la démocratie — se joue dans les rues de nos villes. Pourtant, les villes sont les organes d’administration publique qui ont le moins de flexibilité en termes de revenu et de compétence pour pouvoir remédier aux problèmes et répondre aux besoins des citoyens. Or, il est urgent de remédier à ces problèmes, en particulier de se doter des outils nécessaires pour satisfaire les besoins en matière d’infrastructure, s’adapter aux changements climatiques, bâtir une nouvelle ère de vérité et de réconciliation en milieu urbain, et stopper la crise de l’itinérance et de la dépendance, qui ne cesse de s’aggraver.
(1620)
Son Honneur la mairesse de Regina, Sandra Masters, fait écho à ces sentiments dans la lettre qu’elle m’a adressée. Par ailleurs, elle insiste sur le lien entre les changements climatiques, les infrastructures et les ressources :
L’adaptation aux changements climatiques demeure une priorité pour la Ville de Regina, alors que nous travaillons à réaliser la transition vers la carboneutralité et à adopter les énergies renouvelables d’ici 2050. Les travaux de réaménagement et de modernisation des infrastructures en vue de satisfaire aux exigences de carboneutralité ne sont pas une mince affaire et nécessitent un financement considérable. De plus, le renouvellement des infrastructures a une incidence directe sur notre capacité de remédier à d’autres problèmes en matière d’infrastructures municipales. Les programmes fédéraux tels que le Fonds pour le développement des collectivités du Canada et le programme d’infrastructure Investir dans le Canada nous sont d’une aide précieuse, mais nous aimerions vraiment avoir un accès direct à d’autres programmes de financement souple...
— du gouvernement fédéral.
Le besoin de financement et de sources de revenu est commun à toutes les municipalités canadiennes, d’autant plus que les grandes villes, les petites villes et les villages du Canada sont responsables de 60 % des infrastructures au Canada.
Dans ma province, l’association des municipalités urbaines de la Saskatchewan a déclaré que les projets, notamment des projets d’infrastructure essentielle, coûtent plus cher que prévu en raison de la hausse des coûts de construction et des pénuries de main‑d’œuvre. Résultat, des projets sont annulés ou, de plus en plus, leur envergure est redéfinie et leur réalisation, échelonnée à plus long terme.
Par exemple, les prix soumissionnés pour des projets de réfection de routes et de trottoirs sont 30 % plus élevés qu’en 2021, il y a seulement deux ans. De plus, les coûts de construction ont augmenté d’au moins 6 %. Les municipalités urbaines réclament — et utilisent — des subventions fédérales pour les infrastructures afin de s’acquitter de leurs obligations.
Mme Randy Goulden, présidente de l’Association des municipalités urbaines de la Saskatchewan, m’a dit que la ville de Yorkton, où elle habite, compte 25 000 habitants et fait face à d’importants défis en ce qui concerne son réseau d’aqueduc. Les programmes d’infrastructures lui ont refusé du financement à plusieurs reprises. Mme Goulden croit que des délais de financement plus longs sont nécessaires pour combler les déficits imminents au chapitre de l’infrastructure dans les municipalités urbaines. Ensemble, les villes de Saskatoon et de Regina représentent plus de 40 % de la population de 1,1 million d’habitants de la Saskatchewan.
Toutefois, les problèmes sociaux et les problèmes liés aux ressources ne sont pas propres aux milieux urbains. Plus de 30 % de la population de la Saskatchewan vit en milieu rural. M. Ray Orb, président de la Saskatchewan Association of Rural Municipalities, m’a dit que les besoins des gens qu’il sert sont quelque peu différents. L’accent est mis sur la terre, l’eau et le transport, ce qui crée des emplois liés à l’économie agricole de la Saskatchewan.
La crise de la sécheresse de l’été dernier, par exemple, fait augmenter les demandes pour acheminer l’eau là où on en a besoin. Or, c’est impossible faute d’infrastructures appropriées. Résultat : il n’est pas possible d’utiliser à des fins agricoles 70 % de l’eau douce disponible en Saskatchewan.
Même les programmes fédéraux qui offrent les deux tiers des fonds et qui pourraient contribuer à surmonter de telles difficultés sont souvent hors de portée pour les municipalités rurales. En raison de leur assiette fiscale limitée, ces municipalités n’ont pas la capacité financière de fournir le tiers des fonds. De toutes les choses qui peuvent aider les municipalités rurales, M. Orb n’a parlé ni de programmes ni d’argent. Il a réclamé de meilleurs processus de communication et de consultation, ainsi que la participation directe des municipalités dans les discussions fédérales-provinciales qui les concernent.
Chers collègues, je crois que le Canada est prêt à entamer un dialogue direct. En réalité, nous en avons besoin. Comme me l’ont dit des dirigeants municipaux :
Le Canada ne pourra prospérer que si les villes et les communautés peuvent prospérer. Il est temps de mettre en place un modèle de financement et de gouvernance qui permet qu’une telle chose se produise [...]
— dans un monde moderne.
Quelles sont les solutions? On a soutenu de façon convaincante que la doctrine constitutionnelle selon laquelle les municipalités sont des « créatures des provinces » est une fiction juridique. Il faut reconnaître la place importante et réelle que les municipalités occupent dans l’État canadien. Je crois que c’est notre rôle, en tant que sénateurs, de tenir compte des aspects pratiques et juridiques de cette interpellation. Celle-ci reconnaît l’importance pratique et réelle des municipalités dans la mosaïque canadienne.
Bien sûr, les provinces protègent, à juste titre, leur autorité. Il est également vrai que le gouvernement fédéral a la capacité et les outils — voire l’obligation — de travailler avec les provinces et les municipalités. Ces relations sont vitales pour nos municipalités. De bonnes relations sont un gage de réussite. Les dirigeants locaux en sont conscients.
Dans une municipalité, que l’on soit maire, préfet ou conseiller municipal, on ne peut pas éviter les questions sur les taxes, les services ou les voies publiques lorsqu’on est à l’épicerie en train de faire la file à la caisse. Autrement dit, les dirigeants municipaux sont obligés de rendre des comptes à leurs concitoyens au quotidien. Cela fait partie du métier.
Les attentes des Canadiens ne devraient pas être moins élevées concernant les relations entre le gouvernement fédéral, les provinces et les municipalités. J’ai dit à maintes reprises que la santé et le bien-être des collectivités sont directement liés à la santé et au bien-être de toutes les collectivités qui composent l’ensemble. Les Canadiens veulent des collectivités et des municipalités saines, et ils le méritent.
Les problèmes aigus doivent être cernés et résolus. J’appuie l’interpellation et j’attends avec impatience le rapport qui en découlera.
Merci.
[Français]
L’honorable Éric Forest : Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?
Le sénateur Arnot : Oui.
Le sénateur Forest : Je vous félicite pour votre intervention. C’était de la musique à mes oreilles. Au Québec, environ 10 % de l’ensemble des revenus provenant des taxes et des impôts sont perçus par les municipalités. Or, celles-ci sont responsables de 60 % des infrastructures. Il y a là un déséquilibre inacceptable. Est‑ce la même situation dans votre province?
[Traduction]
Le sénateur Arnot : J’observe la même chose que vous, sénateur Forest, et je crois que c’est l’objectif de cette interpellation. Il faut un nouveau modèle de gouvernance et une nouvelle relation directe entre les municipalités et le gouvernement fédéral.
Merci de votre question et de votre appui.
Une voix : Bravo!
(Sur la motion de la sénatrice Clement, le débat est ajourné.)
(À 16 h 30, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)