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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 153

Le jeudi 26 octobre 2023
L’honorable Pierrette Ringuette, Présidente intérimaire


LE SÉNAT

Le jeudi 26 octobre 2023

La séance est ouverte à 14 heures, la Présidente intérimaire étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le Jour de l’émancipation

L’honorable Wanda Thomas Bernard : Honorables sénateurs, je suis reconnaissante de prendre la parole aujourd’hui sur le territoire algonquin anishinabe non cédé, pour faire une déclaration au sujet du Jour de l’émancipation.

Certaines collectivités d’un bout à l’autre du Canada célèbrent le Jour de l’émancipation depuis plus de 160 ans, mais c’est en 2021 que le gouvernement fédéral, le Sénat et la Nouvelle‑Écosse ont officiellement désigné le 1er août comme Jour de l’émancipation.

La célébration du Jour de l’émancipation constitue une reconnaissance de l’esclavage au Canada. Il s’agit d’une première étape importante pour nous aider à nous rappeler, à réfléchir, à apprendre et à tisser des liens avec les communautés noires ainsi qu’à reconnaître le tort causé par le racisme contre les Noirs qui tire son origine de l’esclavage qu’ont subi nos ancêtres.

Chaque année en août, je suis impressionnée de voir combien de ministères, d’organisations, de milieux de travail, de municipalités et de personnes organisent des événements, des activités et des programmes spéciaux, et 2023 n’a pas fait exception à la règle. J’ai vu des festivals de fin de semaine, des marches communautaires, des services religieux, des dîners-causeries avec le personnel et des programmes d’habilitation. Le milieu du travail social s’est activement engagé en organisant une série de séminaires. Ce fut pour moi un privilège de collaborer à ces séminaires avec l’Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux et les associations provinciales des travailleurs sociaux noirs de la Nouvelle‑Écosse, de l’Alberta et de la Saskatchewan.

Mon bureau a offert aux Afro-Canadiens du troisième âge le premier séminaire sur la réparation. Cette activité faisait suite à l’appel à l’action de la Déclaration d’Halifax.

Cette année, à l’occasion du Jour de l’émancipation, je me suis adressée à de nombreux groupes communautaires. J’ai demandé à chaque groupe : « Quelle est la prochaine étape? » J’ai entendu de nombreuses réponses qui vont au-delà de la sensibilisation. Nombreux sont ceux qui insistent sur la nécessité de présenter des excuses, d’accorder des réparations et de trouver des moyens d’honorer notre passé collectif. Nous avons discuté des moyens à prendre pour assurer plus que la survie de base des Canadiens noirs, ainsi que des changements systémiques à apporter.

Alors que je réfléchis au Jour de l’émancipation de 2023 et à tout le travail qui nous attend, je suis encouragée par le sentiment d’espoir collectif et essentiel qui continue de nourrir notre passion pour le changement.

Asante. Merci.

Visiteur à la tribune

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Catherine Boivie, présidente fondatrice de l’Association des directeurs des systèmes d’information du Canada. Elle est l’invitée de l’honorable sénatrice Jaffer.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Terre-Neuve-et-Labrador

L’honorable Bev Busson : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour vous faire part de quelques réflexions sur le voyage que j’ai effectué le mois dernier à Terre‑Neuve‑et‑Labrador, en compagnie de mes collègues du Comité des pêches et des océans, afin d’étudier les effets d’une population de phoques surabondante sur la pêche canadienne.

Au risque de voler le texte du sénateur Manning, je voudrais vous parler de la qualité exceptionnelle des habitants de Terre‑Neuve‑et‑Labrador et de leur remarquable hospitalité. On dit souvent que vous n’y trouverez pas d’étrangers, mais seulement des amis que vous n’avez pas encore rencontrés.

Cela ne saurait être plus vrai que dans les collectivités visitées par notre comité. Port de Grave, la ville natale de la sénatrice Petten, est l’un de ces lieux dont on pourrait penser qu’ils n’existent que sur une carte postale. L’endroit est orné de magnifiques bateaux de pêche qui parsèment le port pittoresque. Là, des habitants au cœur aussi grand que l’océan Atlantique lui-même nous ont raconté l’histoire de la chasse aux phoques, aujourd’hui disparue, et de l’effondrement de la pêche à la morue. Ces histoires nous ont été transmises dans un salon de thé local qui avait été fermé pour la saison, mais qu’on a ouvert juste pour nous. On pouvait sentir la chaleur, l’hospitalité et la gentillesse authentique autour de la table. C’était un peu comme une réunion de famille avec des parents perdus de vue depuis longtemps.

Outre leur accueil chaleureux, les habitants de Port de Grave nous ont invités à revenir en décembre, quand tous les bateaux du port sont illuminés de milliers de lumières de Noël et que les quais se transforment en paradis hivernal scintillant. C’est déjà dans mon calendrier.

J’ai été étonnée d’apprendre que, dans les années 1930, à l’époque où la province était encore une colonie britannique, l’économie de l’île était en ruine. Le prix du poisson avait chuté, et le gouvernement était en faillite. Toute cette mauvaise gestion et la corruption ambiante ont déclenché une violente émeute. L’édifice Colonial, à St. John’s, a été pris d’assaut par les émeutiers, qui ont fait éclater des vitres, démoli des portes et ravagé le mobilier.

Le gouvernement de Londres a répliqué en imposant un gouvernement colonial non élu et dirigé depuis la Grande‑Bretagne. Malgré cette atteinte à leurs droits, et peut-être aussi à cause de leur très fort sentiment d’indépendance, les Terre‑Neuviens ont voté en faveur de l’adhésion de la province au Canada par une très faible marge en 1949.

J’ai aussi beaucoup aimé la superbe House From the Sea, qui abrite le centre d’interprétation John C. Crosbie sur la chasse au phoque. On peut y admirer une statue montrant Reuban et Albert John Crewe — le père et le fils — qui sont morts de froid enlacés lors de la tragédie de 1914, qui a coûté la vie à pas moins de 251 phoquiers.

Je peux vous assurer que nous n’avons pas chômé, mais le point culminant de ce voyage a été le « party de cuisine » organisé par la sénatrice Petten le dernier soir. Le flétan frais pêché a rendu cette expérience encore plus unique. Évidemment, un party de cuisine n’en serait pas un sans divertissement. Justement, le fils du sénateur Manning, Mark, est un musicien de talent — il a même été finaliste pour un prix Juno — et il est venu agrémenter cette soirée inoubliable de sa belle voix.

Je terminerai en remerciant tous ceux et celles qui ont rendu ce voyage possible, à commencer par les Téneliens, qui m’ont rappelé le sens du mot « hospitalité ». Comme on dit là-bas : bon vent!

Des voix : Bravo!

[Français]

Les délinquants sexuels récidivistes

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Honorables sénateurs, mardi matin, à l’autre endroit, mon collègue le député Blaine Calkins a déposé une pétition de plus de 22 000 noms qui exhortent le gouvernement à adopter rapidement le projet de loi C-336, déposé par mon collègue le député Gerald Soroka, et le projet de loi S-266, que j’ai déposé dans cette enceinte le 6 juin dernier.

Je vous rappelle que le 16 septembre 2021, Robert Keith Major, un délinquant sexuel récidiviste connu a assassiné Mchale Busch, âgée de 24 ans, et Noah, son bébé de 16 mois, dans leur logement à Hinton, en Alberta.

Pourtant, ce dangereux criminel avait des conditions de remise en liberté très sévères, et malgré l’interdiction de s’approcher de lieux où se trouvent des enfants, il demeurait près d’une école primaire, près d’un parc et dans un immeuble où habitaient de nombreuses familles, dont la famille de Cody McConnell.

Je vous demande de vous mettre à la place de ce père, ne serait‑ce que le temps de ma déclaration. Un père qui arrive de travailler et qui voit son immeuble entouré de policiers, à qui ces derniers interdisent de retourner dans son logement, qui apprend quelques heures plus tard qu’on vient de trouver son bébé mort dans une benne à déchets. Puis, les policiers retrouvent, quelques minutes plus tard, le corps de sa conjointe à proximité de son enfant.

(1410)

Imaginez que vous apprenez que l’assassin était votre voisin, qu’il est un récidiviste sexuel dangereux en liberté illégale. Quelle serait votre réaction? Sans doute la même qu’ont eue la famille et les amis de ces innocentes victimes quand je les ai rencontrés pour la première fois en Alberta, au printemps dernier. Le système de justice a failli à sa tâche de protéger cette mère et son bébé en ayant libéré dans le silence ce criminel dangereux sans scrupule.

Chers collègues, je vous pose les questions suivantes aujourd’hui : à quoi sert un système qui remet en liberté des hommes prédateurs sexuels dangereux et récidivistes ayant des conditions très sévères si personne ne les surveille? Pourquoi le non-respect de ces conditions n’entraîne-t-il aucune conséquence pour les récidivistes? Pourquoi le système de justice garde-t-il secrète la présence de récidivistes dans un logement à côté du vôtre?

Voilà la définition du mot « échec » — échec à protéger la population de ces récidivistes, surtout les femmes et les enfants, malgré le fait que le Canada s’est doté d’une charte qui leur reconnaît le droit à la protection.

Ces 22 000 signataires demandent au gouvernement fédéral d’exiger que les délinquants sexuels reconnus coupables se présentent au poste de police le plus proche lors de tout changement de résidence, de procéder immédiatement à l’arrestation d’un récidiviste qui manque à cette obligation et de créer une catégorie de délinquants sexuels dangereux spécialement désignés quand ils s’attaquent aux enfants et aux femmes.

La protection de la vie des femmes et des enfants canadiens n’appartient à aucun parti politique. Cette responsabilité appartient aux législateurs du Parlement canadien qui ont le privilège et le devoir de faire adopter des lois à cet effet.

Honorables sénatrices et sénateurs, si personne n’est tenu responsable de suivre et d’encadrer ces criminels dangereux remis en liberté, et qui récidivent trop souvent au Canada, tous ces signataires vous demandent de l’être et d’adopter rapidement le projet de loi S-266.

Noah et Mchale ont payé de leur vie pour cet échec. La famille vous demande aujourd’hui : combien d’autres devront payer ce prix? Merci.

[Traduction]

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de l’honorable Pearnel Charles Jr., ministre du Travail et de la Sécurité sociale du gouvernement de la Jamaïque, de Mme Marsha Coore Lobban, haute-commissaire de la Jamaïque au Canada et d’autres membres de la délégation. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Moodie.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

L’initiative Assurer un avenir en santé

L’honorable Rosemary Moodie : Honorables sénateurs, tout d’abord, en ces tristes circonstances, je tiens à exprimer mon profond chagrin à la suite du décès de notre honorable collègue, le sénateur Shugart. J’offre mes condoléances à sa famille, à ses amis et à tous ceux qui pleurent son départ, y compris dans cette enceinte.

Je tiens à prendre un instant pour souhaiter la bienvenue à l’honorable Pearnel Charles Jr., ministre du Travail et de la Sécurité sociale de la Jamaïque, à Marsha Coore Lobban, haute-commissaire de la Jamaïque, et à Son Excellence, Mme Colette Roberts Risden, secrétaire permanente du ministère du Travail et de la Sécurité sociale du gouvernement de la Jamaïque. Bienvenue.

Honorables collègues, je prends la parole aujourd’hui pour parler de l’initiative Assurer un avenir en santé et pour souhaiter la bienvenue aux centaines de délégués venus à Ottawa pour assister au sommet « Un avenir digne des enfants », qui aura lieu demain.

L’initiative Assurer un avenir en santé a été créée en pleine pandémie de COVID‑19 dans le but de s’attaquer à de nombreux problèmes de longue date auxquels étaient confrontés les enfants et les familles au Canada. Depuis, il s’est formé une vaste et puissante coalition de jeunes, de parents, de chercheurs, d’éducateurs, de défenseurs, de décideurs, de prestataires de services, de dirigeants communautaires et de chefs d’entreprise de partout au pays qui se penche sur les problèmes urgents auxquels les jeunes sont confrontés dans le but de créer un programme innovateur qui nous aidera à aller de l’avant. Cette coalition a eu une forte influence. Par exemple, elle a joué un rôle prépondérant dans les pressions qui ont incité le gouvernement du Canada à promettre plus tôt cette année 2 milliards de dollars pour contrer la crise des soins pédiatriques. De plus, elle a obtenu 125 millions de dollars du gouvernement fédéral pour One Child Every Child, une initiative pancanadienne de recherche sur la santé des enfants dirigée par l’Université de Calgary.

En conclusion, chers collègues, j’aimerais vous proposer deux occasions de discuter avec ces délégués de partout au pays qui sont réunis ici, à Ottawa. Premièrement, je vous invite à la réception Imaginer l’avenir qui aura lieu ce soir. Ce sera une excellente occasion de rencontrer ces jeunes gens, ces défenseurs et ces chercheurs qui contribuent à améliorer notre système de santé. Deuxièmement, je vous invite à participer demain matin au déjeuner du caucus parlementaire sur la santé des enfants afin de discuter plus à fond des voies vers l’avenir et des façons dont nous, les parlementaires, pouvons être des partenaires solides et fiables.

Chers collègues, ce n’est pas le moment de nous reposer sur nos lauriers. Nous avons connu quelques réussites pour les enfants, mais ce n’est qu’une fraction de ce dont ils ont besoin pour vivre en santé, heureux et épanouis. Je vous invite à participer à faire de cet avenir une réalité. Merci.

[Français]

Le décès d’Hubert Reeves, C.C.

L’honorable Jean-Guy Dagenais : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour souligner le décès d’un grand Canadien, l’astrophysicien Hubert Reeves, à l’âge de 91 ans et dont les funérailles ont été célébrées hier à Paris. Né dans la petite ville de Léry sur la Rive-Sud de Montréal, Hubert Reeves était selon moi l’un des vulgarisateurs scientifiques les plus éloquents.

L’astronomie et la physique ne sont pas des sujets passionnants pour la majorité des gens, mais dès qu’Hubert Reeves prenait la parole, sur toutes les tribunes confondues, sa passion devenait contagieuse. Sa description pédagogique du cosmos était telle qu’il rendait la science accessible autant aux enfants qu’aux adultes.

Chercheur, professeur et vulgarisateur, Hubert Reeves — bien avant d’autres — a cherché à éveiller la conscience des gens face aux changements climatiques que nous vivons. Il était en avance sur son temps. Il avait des inquiétudes sérieuses quant à l’état de la planète Terre bien avant nos politiciens actuels.

Auteur d’une quarantaine de livres dont Poussières d’étoiles, publié en 1984, Hubert Reeves a aussi participé à la production de nombreux documentaires télévisés sur le monde scientifique. Il a enseigné à l’Université de Montréal, mais aussi dans des universités aux États-Unis, en Belgique et en France, en plus d’être consultant auprès de la NASA.

Ce Québécois de souche a aussi été directeur du Centre national de la recherche scientifique de France. Dans les années 1980, après avoir élu domicile dans le petit village de Malicorne, en France, Hubert Reeves n’hésitait pas à revenir régulièrement à Montréal pour épauler l’animateur de radio de l’époque Louis-Paul Allard, qui avait mis sur pied en 1987 la Fondation québécoise en environnement. Je vous rappelle que c’était il y a plus de 35 ans.

Combien d’entre nous, au milieu des années 1980, étaient vraiment préoccupés par les questions environnementales? Déjà à cette époque, le petit homme à la voix unique racontait, sans être alarmiste, les dangers qu’il voyait venir. En faisant le point sur l’environnement, Hubert Reeves insistait pour dire qu’il y avait toujours place à l’optimisme, pourvu que l’humain s’occupe de l’humanité.

Hubert Reeves avait été fait Compagnon de l’Ordre du Canada et avait reçu l’ordre de la Légion d’honneur de France. Le Canada vient donc de perdre un de ses plus grands scientifiques qui mériterait, selon moi, le titre de sonneur d’alerte des dangers climatiques.

Merci.

La Journée mondiale contre la polio

L’honorable Amina Gerba : Chers collègues, je souhaite tout d’abord offrir mes condoléances à la famille de notre regretté collègue.

Je prends la parole aujourd’hui pour souligner que le 24 octobre dernier avait lieu la Journée mondiale de lutte contre la polio. Il s’agit d’une grave maladie très contagieuse paralysante et que combat le Rotary International à travers son programme PolioPlus.

Hier, j’ai eu l’occasion de coparrainer un événement du Rotary dédié à la lutte contre la maladie. Je tiens à remercier mes collègues qui ont pris part à cet événement. Cette occasion nous permet de nous réjouir du long chemin parcouru, mais aussi de nous rappeler que le combat contre cette terrible maladie doit se poursuivre pour définitivement l’éradiquer.

En tant qu’ancienne membre du Rotary, j’ai pu voir à quel point les efforts déployés par l’organisation ont été déterminants. En effet, depuis 1985, l’éradication de la polio est l’action phare du Rotary, qui y a contribué à hauteur de 2,6 milliards de dollars. Nous devons aussi être très fiers du rôle joué par notre pays en vue d’un monde sans polio.

En effet, depuis près de 40 ans, le Canada est un partenaire clé de cette lutte, grâce à un soutien financier continu totalisant aujourd’hui près d’un milliard de dollars.

(1420)

Toutefois, si les efforts mondiaux ont permis de vacciner trois milliards d’enfants et d’éviter 20 millions de cas de paralysie, le combat n’est pas terminé. C’est pourquoi nous devons redoubler d’efforts et continuer à agir pour mettre définitivement fin à ce fléau.

Je profite de cette occasion pour rendre hommage à un survivant de la polio, Ramesh Ferris, célèbre résidant de Whitehorse, au Yukon. Ancien président du Club Rotary de Whitehorse Rendezvous et membre agréé Paul Harris, M. Ferris a parcouru en 2008 plus de 7 000 kilomètres, ralliant le Canada d’ouest en est grâce à son vélo adapté, ce qui lui a permis de collecter des milliers de dollars pour l’éradication de la polio.

M. Ferris est une source d’inspiration et son exemple nous incite à nous mobiliser pour enfin vaincre la polio.

Merci.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

Visiteur à la tribune

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Vina Nadjibulla, de la Fondation Asie Pacifique du Canada. Elle est l’invitée de l’honorable sénateur Woo.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


AFFAIRES COURANTES

Projet de loi portant sur un conseil national de réconciliation

Présentation du quinzième rapport du Comité des peuples autochtones

L’honorable Brian Francis : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le quinzième rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, qui porte sur le projet de loi C-29, Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 2065.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Francis, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

La Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre

Projet de loi modificatif—Présentation du douzième rapport du Comité de l’agriculture et des forêts

L’honorable Paula Simons, au nom du sénateur Black, président du Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts, présente le rapport suivant :

Le jeudi 26 octobre 2023

Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts a l’honneur de présenter son

DOUZIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-234, Loi modifiant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, a, conformément à l’ordre de renvoi du 13 juin 2023, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport avec les modifications suivantes :

1.Article 1, pages 1 et 2 :

a)À la page 1, remplacer les lignes 4 à 17 par ce qui suit :

« 1 (1) L’alinéa c) de la définition de machinerie agricole admissible, à l’article 3 de la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, est »;

b) à la page 2, supprimer les lignes 1 à 8.

2.Faire tous les changements nécessaires à la désignation numérique des dispositions et aux renvois qui découlent des amendements au projet de loi.

Votre comité a aussi fait certaines observations qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,

ROBERT BLACK

(Le texte des observations figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 2068.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion de la sénatrice Simons, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

La Loi sur les aliments et drogues

Projet de loi modificatif—Première lecture

Son Honneur la Présidente intérimaire annonce qu’elle a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-252, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (interdiction — publicité d’aliments et de boissons destinée aux enfants), accompagné d’un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Dasko, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la séance d’après‑demain.)

[Français]

Projet de loi sur la protection financière pour les producteurs de fruits et légumes frais

Projet de loi modificatif—Première lecture

Son Honneur la Présidente intérimaire annonce qu’elle a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-280, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l’insolvabilité et la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (fiducie réputée — fruits et légumes périssables), accompagné d’un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Martin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la séance d’après‑demain.)

Projet de loi sur la stratégie nationale sur les soins oculaires

Première lecture

Son Honneur la Présidente intérimaire annonce qu’elle a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-284, Loi prévoyant l’élaboration d’une stratégie nationale sur les soins oculaires, accompagné d’un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Ravalia, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la séance d’après-demain.)

[Traduction]

L’Association parlementaire canadienne de l’OTAN

La visite conjointe de la sous-commission sur la coopération transatlantique en matière de défense et de sécurité et la sous-commission sur la résilience et la sécurité civile, du 12 au 16 septembre 2022

L’honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Association parlementaire canadienne de l’OTAN concernant la visite conjointe de la sous-commission sur la coopération transatlantique en matière de défense et de sécurité et la sous-commission sur la résilience et la sécurité civile, tenue à Copenhague, au Danemark, et à Nuuk, au Groenland, du 12 au 16 septembre 2022.

La réunion du Bureau et la réunion de la commission permanente du printemps, tenues les 25 et 26 mars 2023—Dépôt du rapport

L’honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Association parlementaire canadienne de l’OTAN concernant la réunion du Bureau et la réunion de la commission permanente du printemps, tenues à Oslo, en Norvège, les 25 et 26 mars 2023.


(1430)

PÉRIODE DES QUESTIONS

La défense nationale

Le jour du Souvenir

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Monsieur le leader, les Canadiens ont de plus en plus l’impression que leur foi est attaquée. C’est vrai, peu importe où ils pratiquent leur religion, que ce soit dans une mosquée, une synagogue, un temple, une cathédrale ou une église. On se souvient d’un acte démoniaque inimaginable commis dans une mosquée de Québec en 2017. Il y a deux ans, des églises aux quatre coins du Canada ont été incendiées. À Toronto, en fin de semaine dernière, un restaurant appartenant à des juifs a été la cible d’un vaste groupe de manifestants antisémites. Maintenant, monsieur le leader, on rapporte que les Canadiens n’entendront pas de prières pour les disparus pendant les cérémonies du jour du Souvenir.

Pourquoi le gouvernement Trudeau agit-il ainsi, monsieur le leader?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question.

Le respect des croyants est un aspect fondamental de l’identité canadienne. Il est protégé par la Charte canadienne des droits et libertés et il s’agit d’une chose en laquelle tous les gens de bonne volonté croient, si vous me passez l’expression, peu importe leurs convictions religieuses et peu importe s’ils en ont ou non.

Comme je l’ai déjà dit en réponse à cette question, d’après ce que je comprends, l’idée n’est pas de cesser de prononcer des prières : c’est plutôt que les prières et les autres formes de commémorations prononcées au début devraient refléter la diversité des religions et des croyances des Canadiens, de manière à être inclusives. C’est ce que je comprends.

Le gouvernement a comme position, et il n’en changera jamais, qu’il faut respecter les gens qui ont des convictions religieuses, dans toute leur diversité.

Le sénateur Plett : Monsieur le leader, la nouvelle directive du gouvernement Trudeau ne parle des prières que sous un angle historique : elle affirme que les prières prononcées lors de cérémonies passées n’étaient ni inclusives ni sensibles aux diverses réalités. Cette directive montre malheureusement, une fois de plus, que le premier ministre Trudeau n’a aucun sens moral et qu’il cherche constamment à diviser les Canadiens. Il ne vaut pas les dommages qu’il cause à l’unité canadienne.

Monsieur le leader, si votre gouvernement est fier de la directive, qu’il est en mesure de la justifier et qu’il n’a rien à cacher, pourquoi les députés de la coalition néo-démocrate—libérale ont-ils clos le débat dans un comité qui devait étudier cette nouvelle directive avant-hier, mardi?

Le sénateur Gold : Monsieur le sénateur, je vais vous lire un extrait de la directive :

Les aumôniers s’efforceront de faire en sorte que tous se sentent inclus et en mesure de participer à la réflexion [...] quelles que soient leurs croyances [...]

Il n’est pas question d’interdire la prière. Il est faux de continuer à prétendre le contraire, et c’est même insultant pour ceux qui voudraient voir leur foi et leurs croyances reflétées dans ces importantes déclarations publiques.

L’agriculture et l’agroalimentaire

La taxe sur le carbone

L’honorable Denise Batters : Sénateur Gold, la semaine dernière, la leader adjointe du gouvernement s’est rendue au Comité de l’agriculture et des forêts pour aider à vider de sa substance un projet de loi qui exonérerait les agriculteurs du paiement de la taxe sur le carbone sur le propane et le gaz naturel. Cette semaine, sénateur Gold, vous êtes allé à la réunion du même comité et vous avez voté en faveur d’un amendement visant à affaiblir davantage ce projet de loi.

Tout d’abord, le gouvernement Trudeau a dit aux agriculteurs qu’ils n’avaient pas besoin d’une exonération de la taxe sur le carbone. Ensuite, il n’a corrigé qu’une petite partie du problème, puis, quand un projet de loi d’initiative parlementaire visant à corriger la situation a été adopté par la Chambre des communes avec le soutien de tous les partis, les sénateurs nommés par Trudeau ont tenté de le retarder et de le vider de sa substance. Aujourd’hui, vous et votre leader adjointe, en tant que représentants du gouvernement Trudeau au Sénat, êtes intervenus dans l’examen par le comité de ce projet de loi d’initiative parlementaire pour que les agriculteurs soient pénalisés.

Qui vous a ordonné de procéder ainsi? Le Cabinet du premier ministre? Il est évident que le Cabinet ne veut pas de ce projet de loi. Pourquoi le gouvernement Trudeau est-il si déterminé à léser les agriculteurs avec sa taxe sur le carbone punitive?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question.

Le gouvernement du Canada est d’avis qu’il est dans son intérêt et qu’il a le droit d’adopter une position à l’égard des projets de loi qui sont à l’étude à la Chambre des communes ou au Sénat. C’est ce que fait le gouvernement actuel. Le vote à l’autre endroit reflète nettement les préoccupations du gouvernement par rapport à ce projet de loi d’initiative parlementaire. Bien qu’une poignée de députés ministériels l’aient appuyé, la grande majorité s’y est opposée.

À l’instar du bureau de l’opposition, le bureau du représentant du gouvernement au Sénat a le droit d’envoyer des membres d’office à des réunions des comités. Nous le faisons lorsqu’on nous avise que nos pendants seront présents. On nous a informés que ce serait le cas, et nous avons assisté à ces réunions pour écouter le débat et exprimer notre point de vue. Dans le premier cas, ma collègue s’est abstenue de voter à l’égard de l’amendement mis aux voix, et celui-ci a tout de même été adopté.

Une voix : C’est effectivement ce que j’ai fait.

Le sénateur Gold : Le procès-verbal confirmera que j’ai raison. La sénatrice Batters a raison de dire que j’ai voté en faveur d’un amendement; toutefois, l’amendement en question a été rejeté.

La sénatrice Batters : Voilà exactement le genre de réponse à laquelle je m’attendais de la part d’un sénateur membre du parti au pouvoir. Votre leader adjointe a voté pour annuler la décision du président du comité selon laquelle le retrait des granges de l’exemption était irrecevable. De plus, elle a voté en faveur de l’élimination de la disposition de caducité du projet de loi, ce qui l’a rendu pratiquement inutile. Je sais ce qu’en penseraient les agriculteurs qu’elle est censée représenter en Alberta.

Vous esquivez la question, sénateur Gold : quel est le problème du gouvernement Trudeau avec les agriculteurs qui nous nourrissent?

Le sénateur Gold : Le gouvernement soutient les producteurs de grain. Ils accomplissent un travail important et noble pour nous tous.

Le fait que le gouvernement ait une position différente à propos d’un projet de loi et qu’il utilise son droit — notre droit en tant que sénateurs — d’essayer d’améliorer les projets de loi est tout à fait approprié, et le gouvernement n’a pas à s’en excuser.

La santé

La consommation de cannabis

L’honorable Tony Loffreda : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

Dans un rapport fraîchement publié dans le Journal de l’Association médicale canadienne, on apprenait que la prévalence de la consommation de cannabis avait surtout augmenté ou était demeurée stable depuis la légalisation il y a cinq ans. Or, Statistique Canada a rapporté une augmentation générale de la consommation de cannabis de 22 % à 27 % chez les Canadiens de 16 ans et plus de 2017 à 2022.

Nous savons que Santé Canada prévoit dépenser 136 millions de dollars pour son Programme sur l’usage et les dépendances aux substances cette année. Que fait le gouvernement pour réduire la consommation de cannabis au sein de la population, en particulier chez les jeunes Canadiens? N’êtes-vous pas préoccupé par le fait que la campagne de sensibilisation aux méfaits de la consommation de cannabis du gouvernement ne semble pas porter ses fruits?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question. Elle est importante.

Le gouvernement a adopté une approche axée sur la santé publique à l’égard de la réglementation du cannabis. C’était le pilier de la mesure législative que nous avons adoptée au Sénat, il y a un certain nombre d’années. Avec les provinces et d’autres intervenants, le gouvernement, dans le respect de ses responsabilités, fournit de l’information et des données claires aux utilisateurs et aux utilisateurs potentiels au sujet des risques pour la santé, de la puissance des produits, de leur composition, de leur provenance et ainsi de suite. De cette façon, les Canadiens de tous les âges sont en mesure de faire des choix éclairés sur la décision de consommer, sur les produits qu’ils achèteront et sur les moments opportuns pour consommer.

Le gouvernement continuera à rendre accessible de l’information publique pour éduquer et informer les Canadiens sur le cannabis. Il soutient la tenue d’un dialogue national sur les questions de santé et de sécurité liées à ces produits et il y participe.

Le sénateur Loffreda : Je vous remercie de la réponse.

Bien du travail doit être fait pour réduire les longs délais d’attente dans les urgences. Nous le savons tous. Dans ma province, les patients attendent, en moyenne, plus de 5 heures dans les urgences et plus de 18 heures sur des civières.

Les visites aux urgences pour des problèmes liés au cannabis ont augmenté depuis la légalisation. Dans certains cas, la hausse des visites associées à la consommation de produits comestibles a atteint jusqu’à 20 %.

Malgré les questions de partage des compétences que ce sujet pourrait soulever, que fait le gouvernement afin que les visites aux urgences pour des problèmes liés au cannabis suivent la bonne tendance?

Le sénateur Gold : J’ai trois choses à dire. Premièrement, je crois comprendre que le gouvernement a créé des groupes de travail avec les provinces et les territoires, et que ceux-ci se rencontrent régulièrement depuis 2017 afin de discuter de la campagne de sensibilisation du public et de la coordonner. Deuxièmement, comme nous le savons, un examen législatif de la Loi sur le cannabis a été lancé l’an dernier. Troisièmement, à cet égard, on m’a informé que l’examen est mené par un groupe d’experts indépendant. Leur important travail se poursuit.

[Français]

Les femmes et l’égalité des genres

Le Plan d’action fédéral 2ELGBTQI+

L’honorable René Cormier : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, en cette Journée de la visibilité intersexe, j’aimerais rappeler qu’au Canada, des interventions chirurgicales non consenties sont toujours légales dans le but de « normaliser le corps » de personnes intersexes.

J’aimerais souligner que le Plan d’action fédéral 2ELGBTQI+ annonçait que des consultations devaient être menées à partir de l’automne 2022 sur la criminalisation de telles interventions pratiquées sur des personnes intersexes pendant leur enfance.

En avril dernier, j’ai porté cet engagement à l’attention du gouvernement fédéral en vous posant une question qui demeure toujours sans réponse, à savoir à quel moment ces consultations seraient lancées.

Sénateur Gold, j’aimerais réitérer ma question et vous demander précisément quel est l’échéancier du gouvernement fédéral dans ce dossier.

(1440)

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Cela est très important. Je vous remercie aussi pour votre travail continu pour la communauté 2ELGBTQI+.

Je me suis renseigné auprès du gouvernement, cher collègue. Malheureusement, je n’ai pas encore reçu de nouvelles.

Je peux dire que le gouvernement a été très clair en ce qui concerne les droits de la personne. Le gouvernement ne choisit pas, il est là pour tous les Canadiens, quels qu’ils soient. Le gouvernement défendra toujours les communautés 2ELGBTQI+.

Le sénateur Cormier : Merci, sénateur Gold. C’est une question de santé. Vous comprendrez que c’est urgent.

Le mardi 17 octobre dernier, 10 sénateurs ont pris la parole dans cette enceinte afin de dénoncer l’augmentation de la haine envers les communautés 2ELGBTQI+, particulièrement envers la population trans. La majorité de ces sénateurs a exhorté le gouvernement à aller de l’avant avec l’élaboration du Plan d’action national de lutte contre la haine, comme il l’a annoncé dans le budget fédéral de 2023.

Sénateur Gold, à quel moment ce plan d’action sera-t-il enfin déposé?

Le sénateur Gold : Merci, cher collègue.

Comme vous le savez, le gouvernement a déjà mis en œuvre la première stratégie antiraciste du Canada et s’appuie actuellement sur ce travail pour élaborer une nouvelle stratégie qui comprend un plan d’action pour lutter contre la haine. Cette stratégie est soutenue par un financement de près de 200 millions de dollars.

Bien que je n’aie pas de nouvelle date pour le lancement du plan d’action national, le gouvernement s’est engagé à soutenir les communautés 2ELGBTQI+ et s’opposera toujours à la haine.

Le patrimoine canadien

CBC/Radio-Canada

L’honorable Jean-Guy Dagenais : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Au fil des années, la Société Radio-Canada a réduit considérablement le temps de diffusion des bulletins de nouvelles et d’émissions spéciales d’information sur ses canaux de base pour investir davantage dans des variétés et des téléséries. La mission première de Radio-Canada est de donner accès à tous les Canadiens à un service d’information de qualité.

Or, pour suivre le développement des événements récents, comme l’attaque terroriste en Israël ou encore la soirée des élections provinciales au Manitoba, les Québécois doivent payer un abonnement au câble pour avoir accès à l’information continue de RDI. Ce service devrait être gratuit, tout comme la chaîne météo.

Votre gouvernement peut-il justifier pourquoi les Canadiens n’ont pas accès gratuitement aux canaux d’information continue de Radio-Canada et CBC?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de la question et de souligner l’importance, non seulement de RDI et CBC pour les Canadiens, mais aussi de l’accès à l’information. Je mets de côté tous les enjeux entourant le projet de loi C-18 et tous les enjeux liés au financement de Radio‑Canada — qui restent toujours des enjeux, surtout dans plusieurs parties de notre pays.

Je vais certainement prendre votre préoccupation au sérieux et la transmettre au gouvernement au fur et à mesure qu’il aura la possibilité de faire quelque chose pour mieux aider les Canadiens à avoir accès à l’information dont nous avons tous besoin.

Le sénateur Dagenais : CBC et Radio-Canada reçoivent annuellement 1,3 milliard de dollars du gouvernement fédéral. C’est l’argent des taxes et de l’impôt des Canadiens. Votre gouvernement ne cesse de parler d’accès à une information de qualité dans sa guerre plutôt futile et sans fin contre les géants du Web.

Au lieu de vouloir mettre à sa main Meta et Google, votre premier ministre pourrait-il d’abord s’assurer que la mission d’information de Radio-Canada est respectée et surtout gratuite?

Le sénateur Gold : Encore une fois, l’importance de l’accès à l’information est primordiale dans une démocratie. Je vais ajouter cela à mes questions à poser au gouvernement.

Les finances

La collaboration avec les provinces et les territoires

L’honorable Diane Bellemare : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement, le sénateur Gold.

Dans plusieurs comités, notamment le Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie, on entend souvent les acteurs économiques se plaindre du manque de leadership au Canada pour définir des stratégies claires et efficaces pour répondre aux crises du logement, de la santé et de la main‑d’œuvre qualifiée dans des secteurs stratégiques comme la construction, le logement et le numérique. On sait que ces secteurs sont de compétence provinciale ou encore de compétence partagée.

Le gouvernement fédéral ne pourrait-il pas prendre un certain leadership dans cette matière pour assurer une meilleure coordination? Pouvez-vous m’informer de ce que fait le gouvernement sur le plan de la coordination pour régler ces crises?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie. Compte tenu de la diversité et du grand nombre d’aspects économiques dans notre système et du fait que, comme vous l’avez bien mentionné, il y a beaucoup d’aspects qui relèvent soit du gouvernement fédéral ou des gouvernements provinciaux, il est fondamental qu’il y ait une coordination, et que le gouvernement fédéral ait un rôle à jouer — un rôle de leadership — pour faire en sorte qu’il y ait au moins une communication, sinon une coordination avec tous les acteurs politiques et autres.

Cela dit, dans le contexte de la crise du logement, le ministre est en contact avec ses homologues pour les encourager à faire leur part, et aussi avec le secteur privé pour l’encourager à profiter de l’appui financier du gouvernement.

Il y a beaucoup d’autres exemples que je n’ai pas le temps d’énumérer. Merci.

La sénatrice Bellemare : Le gouvernement fédéral s’associe à l’initiative de l’Organisation de coopération et de développement économiques ou OCDE appelée Global Deal, qui vise à promouvoir le dialogue social entre les associations syndicales, les représentants des entreprises et les gouvernements.

Pouvez-vous nous dire ce que le gouvernement a fait de concret, ces dernières années, pour stimuler le dialogue tripartite en matière de développement des compétences sur le plan de l’assurance-emploi?

Le sénateur Gold : Je n’ai pas de détails à partager avec vous. Toutefois, je tiens à réitérer l’importance, comme vous l’avez souligné — et elle est partagée avec le gouvernement —, d’avoir des dialogues, non seulement avec les provinces et les territoires, et non seulement avec la partie patronale, mais aussi avec les syndicats. Il est primordial pour notre économie que toutes les parties prenantes soient à la table des négociations.

[Traduction]

La responsabilité financière

L’honorable Elizabeth Marshall : Sénateur Gold, plus tôt cette semaine, l’Institut C.D. Howe a publié son rapport annuel sur la transparence et la responsabilité financières des gouvernements d’ordres supérieurs du Canada, ce qui comprend donc les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral. Cette année encore, le gouvernement fédéral se retrouve au bas du classement, avec la note de C moins. J’en ai parlé dans un discours l’an dernier. Le gouvernement fédéral semble toujours se retrouver au bas du classement.

Pourquoi le gouvernement fédéral, avec toutes les ressources à sa disposition, traîne-t-il au bas du classement d’un rapport sur la transparence et la responsabilité financières?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Eh bien, cela ne plaît à personne, y compris au gouvernement du Canada, je suppose, et certainement pas à ce bureau, qu’on lui rappelle que le gouvernement du Canada n’arrive pas à faire mieux. S’il y a une chose que nous pouvons affirmer avec certitude, c’est que la performance du gouvernement ne sera pas attribuée à la persistance avec laquelle...

[Français]

— c’est tout à votre honneur —

[Traduction]

... vous soulevez la question.

Je préfère ne pas m’avancer sur ce qui explique les différences, les capacités, la portée et les difficultés du gouvernement fédéral et celles des provinces et territoires, mais vous pouvez compter sur moi pour attirer de nouveau l’attention du gouvernement là-dessus et pour l’implorer de s’améliorer.

La sénatrice Marshall : Je vous remercie. J’ai une question complémentaire.

Pour vous prouver qu’il s’agit d’un problème bien connu qui dure depuis plusieurs années déjà, en 2019, le gouvernement a donné son appui à un rapport du Comité des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires de la Chambre sur l’amélioration des rapports et processus financiers du gouvernement. Si ce rapport avait eu des suites, les documents financiers du gouvernement seraient plus transparents, tout comme son processus de reddition de comptes. Il y a bien eu quelques projets pilotes, mais le gouvernement les a annulés après deux ans. On n’a jamais su pourquoi, et personne n’a pu me donner d’explications.

Pourquoi le gouvernement a-t-il annulé le projet sur la transparence budgétaire et pourquoi ne lui a-t-il jamais redonné vie?

Le sénateur Gold : Je n’ai pas la réponse à cette question-là non plus sénatrice Marshall, aussi légitime soit-elle. Je vais certainement me renseigner afin de mieux comprendre de quoi il retourne.

[Français]

Le coût de la vie

L’honorable Claude Carignan : La question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Au Québec, 872 000 personnes ont recours chaque mois aux banques alimentaires, selon un bilan de fin 2023. Selon une étude menée par le réseau des Banques alimentaires du Québec, c’est 30 % de plus que l’an dernier et 73 % de plus qu’en 2019. C’est le triste constat ou portrait qui est fait par les banques alimentaires.

(1450)

Le nombre de travailleurs qui ont recours à l’aide alimentaire a plus que doublé depuis 2019. Comment le leader du gouvernement explique-t-il un tel désastre?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Chaque fois que j’essaie d’expliquer la multitude de facteurs qui contribuent malheureusement aux défis auxquels font face les Canadiens — non seulement les pauvres, mais de plus en plus les familles de la « classe moyenne » —, on accuse le gouvernement d’irresponsabilité.

Le gouvernement fait sa part pour aider les Canadiens qui ont besoin d’aide. Il encourage les producteurs et les entreprises des chaînes d’approvisionnement à faire en sorte que l’augmentation des prix cesse, et dans l’espoir qu’on verra une baisse des prix et également d’autres programmes de soutien pour les familles canadiennes qui souffrent de l’augmentation du coût de la vie.

Le sénateur Carignan : Monsieur le leader, dans certaines autres provinces, évidemment, c’est encore pire. À Terre-Neuve-et-Labrador, c’est plus de 44 %, à l’Île-du-Prince-Édouard, c’est plus de 42 %; mais c’est en Ontario, avec plus de 40 %, que la hausse annuelle est la plus marquée.

Lorsqu’on demande les principales raisons pour lesquelles les gens ont recours aux banques alimentaires cette année, on répond que c’est en raison du coût de la nourriture et du coût du logement. Ce sont deux secteurs où ce gouvernement a complètement failli à la tâche.

Monsieur le leader, pouvez-vous nous nommer les produits alimentaires dont le prix a baissé à l’Action de grâce, comme s’était engagé à le faire votre collègue le ministre Champagne?

Le sénateur Gold : Merci pour la question. Vous avez raison de dire que les deux causes des défis auxquels font face les Canadiens sont le prix de la nourriture et celui du logement. Encore une fois, je le répète, le gouvernement continuera de mettre la main à la pâte pour faire en sorte que la situation s’améliore au bénéfice des Canadiens.

L’immigration, les réfugiés et la citoyenneté

L’arriéré de traitement des demandes d’immigration

L’honorable Marie-Françoise Mégie : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Sénateur Gold, ma question porte sur le neuvième rapport de la vérificatrice générale du Canada concernant les demandes de résidence permanente qui s’accumulent à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada ou IRCC.

Alors que le nombre d’employés d’IRCC s’élève à environ 2 600, la cible des dossiers à traiter a augmenté de 50 % entre 2018 et 2023, passant de 310 000 à 465 000 dossiers. Si l’objectif du gouvernement est de hausser la cible à 500 000, va-t-il également augmenter les ressources humaines pour traiter ces dossiers de façon humaine?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question. Le gouvernement du Canada déploie tous les efforts pour réduire les temps d’attente et éliminer les arrérages dans le traitement des demandes, et pour accueillir davantage de nouveaux arrivants au pays.

On m’avise que le gouvernement a pu traiter environ 5,2 millions de demandes, soit deux fois plus que l’année précédente, et qu’il a pu revenir aux normes de service de 60 jours pour les nouvelles demandes de permis d’étude. Cela a été possible grâce à la numérisation des demandes, à l’embauche de nouveaux employés et à la rationalisation des processus de demande.

La sénatrice Mégie : Dans ce même rapport de la vérificatrice générale, nous avons appris que le traitement des données des gens venant d’Haïti se retrouvait presque automatiquement dans un processus de gestion manuelle, ce qui prolonge indûment les délais de traitement.

Pourrait-on simplifier le processus d’immigration au Canada pour éviter que ces délais ne deviennent synonymes de peine de mort pour certains demandeurs d’asile?

Le sénateur Gold : Il y a une crise migratoire mondiale, y compris au Canada. Le gouvernement a rationalisé ses procédures de demande d’asile et a augmenté sa capacité de traitement, et il en a beaucoup fait pour relever ce défi. Je comprends que le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté et l’Agence des services frontaliers du Canada mettent en œuvre des mesures innovantes pour rationaliser et traiter le plus rapidement possible les demandes qui sont en attente.

[Traduction]

Les finances

L’impôt minimum de remplacement

L’honorable Ratna Omidvar : Sénateur Gold, je n’ai besoin de rafraîchir la mémoire de personne dans cette enceinte — pas même la vôtre — sur les grandes difficultés que les organismes de bienfaisance ont vécues pendant et après la pandémie de COVID‑19. Les dons ont diminué, mais la demande pour les services a augmenté. De plus, ces organismes doivent maintenant composer avec les changements apportés à l’impôt minimum de remplacement dans le budget de 2023. Selon un rapport publié par l’Association canadienne des professionnels en dons planifiés, les modifications proposées pourraient avoir pour conséquence de diminuer jusqu’à 30 % le total de 11,4 milliards de dollars versés en dons aux organismes de bienfaisance. On est loin de la menue monnaie. C’est énormément d’argent, sénateur Gold.

Je ne suis pas contre le principe de l’impôt minimum de remplacement. Les Canadiens, qu’ils soient bien nantis ou non, doivent payer leur juste part d’impôt. Toutefois, cela ne doit pas se faire au détriment des organismes de bienfaisance. Le gouvernement supprimera-t-il les dispositions ayant une incidence sur les organismes de bienfaisance?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question et de tout votre travail pour veiller à ce que le secteur des organismes de bienfaisance soit soutenu par les Canadiens et nos politiques publiques. Toutefois, si les personnes qui bénéficient de l’appui de ce secteur ne faisaient par leur part, nous perdrions beaucoup de mesures d’aide que nous tenons pour acquises au Canada, surtout en cette période difficile.

Je n’ai pas été mis au courant des plans du gouvernement à cet égard, mais je vais certainement prendre note de vos préoccupations légitimes et les soumettre à la ministre.

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie, sénateur Gold. On m’a informé que le ministère des Finances a effectué à l’interne son propre calcul du montant en question. Nous l’estimons à 30 % de 11,4 milliards de dollars. Il se peut que les calculs du gouvernement donnent un résultat différent. Je vous demanderais de bien vouloir nous les transmettre.

Le sénateur Gold : Je ne manquerai pas de me renseigner sur la réflexion du gouvernement à cet égard. Encore une fois, il est important que nos politiques publiques parviennent à un juste équilibre afin de soutenir le secteur caritatif tout en tenant compte d’autres considérations. Je suis convaincu que c’est l’objectif du gouvernement.

Les services publics et l’approvisionnement

Le processus d’acquisition

L’honorable Leo Housakos : Sénateur Gold, au cours des deux dernières années, le gouvernement a versé plus de 164 millions de dollars à la société GC Strategies pour des services informatiques. C’est la société qui a conçu l’application ArriveCAN, qui a coûté 54 millions de dollars. Cette société compte deux propriétaires, mais aucun employé. Aucun de ces deux propriétaires n’effectue de travaux informatiques. Ils font appel à des sous-traitants, ce qui, bien entendu, permet au gouvernement de dissimuler des renseignements et d’éviter tout examen public.

Sénateur Gold, qui, au sein du gouvernement Trudeau, a pris la décision de faire appel à cette société? Quel membre de l’équipe libérale a pensé qu’au plus fort de la pandémie, il était judicieux de faire appel à une petite entreprise qui n’a pas fait ses preuves, qui ne compte aucun employé et qui n’a pas l’expertise nécessaire pour concevoir une application que vous décrivez constamment comme ayant joué un rôle crucial dans la lutte contre la COVID? De qui au sein du gouvernement Trudeau ces deux propriétaires sont-ils les amis?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. J’ai indiqué à plusieurs reprises les raisons pour lesquelles le gouvernement a agi rapidement pendant la pandémie et je ne les répéterai pas. La pandémie est maintenant derrière nous. Comme vous l’avez fort justement fait remarquer, des éléments en sont ressortis, qu’il s’agisse d’une question de coûts ou d’autre chose. Comme les sénateurs le savent et comme je l’ai dit ici, la GRC enquête sur certaines allégations d’actes répréhensibles. Ces enquêtes sont en cours, elles sont faites correctement et elles sont menées en toute indépendance du gouvernement.

Toute autre spéculation, insinuation et chose du genre devra attendre qu’on communique les conclusions des enquêtes.

Le sénateur Housakos : Prendre des décisions rapidement, c’est bien, mais prendre des décisions de manière transparente pour rendre des comptes au Parlement, c’est encore mieux.

(1500)

Sénateur Gold, nous savons désormais que, dès septembre 2021, une autre entreprise qui avait obtenu un contrat de votre gouvernement a dénoncé les pratiques irrégulières liées à GC Strategies et à votre gouvernement. Pourquoi votre gouvernement a‑t-il ignoré les avertissements de ces dénonciateurs et continué d’externaliser encore davantage de travail à GC Strategies, à hauteur de 17 millions de dollars? Est-ce la raison pour laquelle votre gouvernement refuse également d’annuler les amendes déraisonnables imposées aux Canadiens par le biais d’ArriveCAN? Est-ce parce qu’il faut payer les proches du Parti libéral?

Le sénateur Gold : Encore une fois, sénateur Housakos, vous laissez entendre que des actes repréhensibles ont été commis, et vous lancez de nombreuses accusations sans preuve. Je ne m’abaisserai pas à y répondre, mais je tiens à préciser que toutes les allégations d’actes répréhensibles font l’objet d’une enquête menée à l’interne ou, comme je l’ai déjà mentionné, par la GRC.


ORDRE DU JOUR

Le Code criminel
La Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels
La Loi sur le transfèrement international des délinquants

Projet de loi modificatif—Message des Communes—Amendements

Son Honneur la Présidente intérimaire annonce qu’elle a reçu de la Chambre des communes le projet de loi S-12, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et la Loi sur le transfèrement international des délinquants, accompagné d’un message informant le Sénat qu’elle a adopté ce projet de loi avec les amendements ci-après, qu’elle prie le Sénat d’accepter :

1.Article 2, pages 2 et 3 :

a)à la page 2, remplacer les lignes 27 à 30 par ce qui suit :

« l’ordonnance de ce fait; »;

b)à la page 3, remplacer la ligne 2 de la version anglaise par ce qui suit :

« who is the subject of the order and is about that person »;

c)à la page 3, remplacer la ligne 7 par ce qui suit :

« l’identité est protégée par une ordonnance interdisant de publier ou de diffuser de quelque façon que ce soit tout renseignement qui permettrait d’établir son identité, ou des détails »;

d)à la page 3, remplacer la ligne 16 par ce qui suit :

« ments au public, notamment lorsque la communication est faite à un professionnel du droit, à un professionnel de la santé ou à une personne dans une relation de confiance avec la victime ou le témoin. ».

2.Article 3, pages 3 et 4 :

a)à la page 3, remplacer la ligne 23 de la version anglaise par ce qui suit :

« who is the subject of the order and is about that person »;

b)à la page 3, remplacer la ligne 30 par ce qui suit :

« l’identité est protégée par une ordonnance interdisant de publier ou de diffuser de quelque façon que ce soit tout renseignement qui permettrait d’établir son identité, ou des détails »;

c)à la page 3, remplacer la ligne 37 par ce qui suit :

« blic, notamment lorsque la communication est faite à un professionnel du droit, à un professionnel de la santé ou à une personne dans une relation de confiance avec la victime, le témoin ou la personne associée au système judiciaire. »;

d)à la page 4, remplacer les lignes 30 à 33 par ce qui suit :

« nance de ce fait; ».

3.Article 4, page 5 :

a)à la page 5, remplacer la ligne 17 par ce qui suit :

« qui fait l’objet d’une ordonnance inter- »;

b)à la page 5, remplacer la ligne 24 par ce qui suit :

« de toute personne qui fait l’objet d’une ».

4.Article 32.1, pages 32 et 33 : supprimer l’article 32.1.

5.Nouvel article 48.1, page 49 : ajouter, après la ligne 2, ce qui suit :

« 48.1 (1) Les paragraphes (2) à (4) s’appliquent en cas de sanction du projet de loi C-291, déposé au cours de la 1re session de la 44e législature et intitulé Loi modifiant le Code criminel et d’autres lois en conséquence (matériel d’abus et d’exploitation pédosexuels) (appelé « autre loi » au présent article).

(2) Si l’article 8 de l’autre loi entre en vigueur avant le paragraphe 6(2) de la présente loi, le sous‑alinéa a)(xi) de la définition de infraction primaire, au paragraphe 490.011(1) du Code criminel, est remplacé par ce qui suit :

(xi) l’article 163.1 (matériel d’abus et d’exploitation pédosexuels),

(3) Si le paragraphe 6(2) de la présente loi entre en vigueur avant l’article 8 de l’autre loi, cet article 8 est remplacé par ce qui suit :

8 Le sous-alinéa a)(xi) de la définition de infraction primaire, au paragraphe 490.011(1) de la même loi, est remplacé par ce qui suit :

(xi) l’article 163.1 (matériel d’abus et d’exploitation pédosexuels),

(4) Si l’entrée en vigueur de l’article 8 de l’autre loi et celle du paragraphe 6(2) de la présente loi sont concomitantes, cet article 8 est réputé être entré en vigueur avant ce paragraphe 6(2), le paragraphe (2) s’appliquant en conséquence. ».

[Français]

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le message?

(Sur la motion du sénateur Gold, l’étude du message est inscrite à l’ordre du jour de la présente séance.)

[Traduction]

Projet de loi modificatif—Message des Communes—Adoption de la motion d’adoption des amendements des Communes

Le Sénat passe à l’étude du message de la Chambre des communes concernant le projet de loi S-12, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et la Loi sur le transfèrement international des délinquants :

1.Article 2, pages 2 et 3 :

a)à la page 2, remplacer les lignes 27 à 30 par ce qui suit :

« l’ordonnance de ce fait; »;

b)à la page 3, remplacer la ligne 2 de la version anglaise par ce qui suit :

« who is the subject of the order and is about that person »;

c)à la page 3, remplacer la ligne 7 par ce qui suit :

« l’identité est protégée par une ordonnance interdisant de publier ou de diffuser de quelque façon que ce soit tout renseignement qui permettrait d’établir son identité, ou des détails »;

d)à la page 3, remplacer la ligne 16 par ce qui suit :

« ments au public, notamment lorsque la communication est faite à un professionnel du droit, à un professionnel de la santé ou à une personne dans une relation de confiance avec la victime ou le témoin. ».

2.Article 3, pages 3 et 4 :

a)à la page 3, remplacer la ligne 23 de la version anglaise par ce qui suit :

« who is the subject of the order and is about that person »;

b)à la page 3, remplacer la ligne 30 par ce qui suit :

« l’identité est protégée par une ordonnance interdisant de publier ou de diffuser de quelque façon que ce soit tout renseignement qui permettrait d’établir son identité, ou des détails »;

c)à la page 3, remplacer la ligne 37 par ce qui suit :

« blic, notamment lorsque la communication est faite à un professionnel du droit, à un professionnel de la santé ou à une personne dans une relation de confiance avec la victime, le témoin ou la personne associée au système judiciaire. »;

d)à la page 4, remplacer les lignes 30 à 33 par ce qui suit :

« nance de ce fait; ».

3.Article 4, page 5 :

a)à la page 5, remplacer la ligne 17 par ce qui suit :

« qui fait l’objet d’une ordonnance inter- »;

b)à la page 5, remplacer la ligne 24 par ce qui suit :

« de toute personne qui fait l’objet d’une ».

4.Article 32.1, pages 32 et 33 : supprimer l’article 32.1.

5.Nouvel article 48.1, page 49 : ajouter, après la ligne 2, ce qui suit :

« 48.1 (1) Les paragraphes (2) à (4) s’appliquent en cas de sanction du projet de loi C-291, déposé au cours de la 1re session de la 44e législature et intitulé Loi modifiant le Code criminel et d’autres lois en conséquence (matériel d’abus et d’exploitation pédosexuels) (appelé « autre loi » au présent article).

(2) Si l’article 8 de l’autre loi entre en vigueur avant le paragraphe 6(2) de la présente loi, le sous‑alinéa a)(xi) de la définition de infraction primaire, au paragraphe 490.011(1) du Code criminel, est remplacé par ce qui suit :

(xi) l’article 163.1 (matériel d’abus et d’exploitation pédosexuels),

(3) Si le paragraphe 6(2) de la présente loi entre en vigueur avant l’article 8 de l’autre loi, cet article 8 est remplacé par ce qui suit :

8 Le sous-alinéa a)(xi) de la définition de infraction primaire, au paragraphe 490.011(1) de la même loi, est remplacé par ce qui suit :

(xi) l’article 163.1 (matériel d’abus et d’exploitation pédosexuels),

(4) Si l’entrée en vigueur de l’article 8 de l’autre loi et celle du paragraphe 6(2) de la présente loi sont concomitantes, cet article 8 est réputé être entré en vigueur avant ce paragraphe 6(2), le paragraphe (2) s’appliquant en conséquence. ».

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) propose :

Que, en ce qui concerne le projet de loi S-12, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et la Loi sur le transfèrement international des délinquants, le Sénat accepte les amendements apportés par la Chambre des communes;

Qu’un message soit transmis à la Chambre des communes pour l’en informer.

(1510)

 — Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi S‑12, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et la Loi sur le transfèrement international des délinquants.

[Français]

Vous vous souviendrez que notre Chambre a apporté plusieurs amendements à ce projet de loi en juin dernier, notamment en ce qui concerne le régime traitant des interdictions de publication. Ce projet de loi nous revient encore une fois, puisqu’il nous a été renvoyé avec d’autres amendements à considérer.

[Traduction]

Le projet de loi S‑12 propose d’importantes réformes visant à donner du pouvoir aux victimes d’actes criminels. À cette fin, il modifie les règles qui régissent les interdictions de publication et le droit à l’information des victimes. Il modifie également le Registre national des délinquants sexuels en réponse à la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire R c. Ndhlovu, qui, comme vous vous en souviendrez, a déclaré que certaines dispositions relatives à l’inscription des délinquants sexuels et à la durée de ces ordonnances étaient inconstitutionnelles.

Les dispositions relatives à l’interdiction de publication sont celles qui ont été modifiées par l’autre endroit et qui font l’objet de notre examen aujourd’hui.

Chers collègues, les interdictions de publication sont des outils utiles pour protéger l’identité des victimes et des témoins et leur permettre ainsi d’éviter de subir d’autres préjudices. Cependant, il n’est pas rare que certains survivants souhaitent rendre leur histoire publique et ils peuvent être surpris d’apprendre qu’ils ne peuvent pas le faire en raison des interdictions en vigueur. En outre, les survivants sont rarement au courant des procédures à suivre pour faire lever ces interdictions.

C’est en réponse à ces préoccupations que le projet de loi S‑12 propose de modifier le régime d’interdiction de publication, dans le but de permettre aux victimes de mieux se faire entendre et d’avoir davantage de pouvoir au sein du système de justice pénale, y compris les survivants d’agressions sexuelles et les victimes qui souhaitent raconter leur histoire.

[Français]

Les groupes de victimes qui ont comparu devant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles étaient d’avis que, tel qu’il a été présenté, le projet de loi n’allait pas assez loin pour atteindre l’objectif, qui est de respecter la volonté des victimes et des témoins lors de l’imposition d’une interdiction de publication. Les témoins estimaient qu’il fallait plus de clarté pour identifier les comportements censés être protégés par une interdiction et qu’il fallait simplifier le processus de modification ou de révocation d’une interdiction. Par conséquent, le comité a apporté plusieurs amendements pour créer une approche plus solide et centrée sur la victime en ce qui concerne les interdictions de publication.

Même si la majorité de ces amendements du Sénat sont maintenus dans le projet de loi dont nous sommes saisis, un petit nombre de changements ont été apportés à l’autre endroit, et ces derniers ont une incidence sur les amendements que nous avions apportés. Ces changements ont été faits en raison des préoccupations exprimées par les témoins quant aux conséquences imprévues qui y sont associées. Il demeure néanmoins, à mon avis, que la version actuelle du projet de loi reflète l’esprit et les objectifs du projet de loi adopté par le Sénat plus tôt cette année.

[Traduction]

Le premier changement concerne l’amendement du Sénat selon lequel le poursuivant doit informer la victime ou le témoin de l’existence d’une interdiction de publication et des effets qu’elle pourrait avoir. Cela comprendrait les circonstances dans lesquelles il serait possible de divulguer des renseignements d’identification sans enfreindre l’ordonnance.

Des procureurs généraux — en particulier ceux de l’Ontario et de la Nouvelle‑Écosse — ont émis des réserves au sujet de la deuxième partie de l’amendement, selon lequel le poursuivant doit expliquer quels renseignements peuvent être divulgués. Ils avaient l’impression que cet élément risquait d’exiger involontairement que le poursuivant fournisse des conseils juridiques aux victimes et aux témoins sur un dossier au sujet duquel le poursuivant pourrait devoir intenter des poursuites plus tard en cas d’infraction. Mme Megan Stephens, une avocate spécialisée en droit criminel et constitutionnel qui a travaillé comme procureure pendant plus de dix ans et qui représente les victimes dans des procès pour agression sexuelle, y compris des procès visant à faire lever des interdictions de publication, abonde dans le même sens.

Par conséquent, compte tenu de cette information, le projet de loi S‑12 a été amendé afin de supprimer cette exigence, éliminant ainsi les risques juridiques et en matière de politique concernant l’indépendance de la poursuite et les conflits d’intérêts possibles pour les poursuivants dans de tels cas. Chers collègues, les poursuivants devront toujours, toutefois, fournir des renseignements aux victimes au sujet des interdictions de publication, y compris sur le droit de demander une modification ou une révocation.

Chers collègues, deux amendements de forme ont également été inclus afin de veiller à ce que les objectifs du projet de loi soient bien compris. Le premier précise le type de communication de renseignements qui ne serait pas visé par une interdiction de publication, y compris lorsqu’une victime ou un témoin communique des renseignements à son propre sujet, à condition que ces renseignements n’identifient pas une personne qui est protégée par une autre interdiction de publication. Lorsqu’elles ont été adoptées par le Sénat, les dispositions du projet de loi à cet égard se limitaient aux personnes protégées par une même interdiction de publication. Grâce à cette modification de forme, on reconnaît que des victimes peuvent être protégées par différentes interdictions de publication.

Le deuxième amendement de forme portait sur le libellé de la version anglaise du projet de loi adopté par le Sénat qui parlait des personnes « subject to the order ». Cette disposition permettait aux victimes qui étaient protégées par une interdiction de publication de divulguer des renseignements à leur propre sujet. Cependant, comme l’a fait remarquer le témoin représentant l’Association nationale Femmes et Droit à l’autre endroit, cette idée serait mieux reflétée par la formulation « subject of the order ». À mon avis, cet amendement est approprié et harmonise le libellé de la version anglaise de la loi avec celui de la version française.

Ensuite, lors de l’étude du projet de loi S‑12 au comité de l’autre endroit, certains témoins ont dit souhaiter que le projet de loi établisse plus clairement à qui les victimes ou les témoins peuvent communiquer des renseignements sans tomber sous la portée d’une interdiction de publication. Le comité sénatorial a ajouté une disposition au projet de loi S‑12 pour garantir qu’une interdiction de publication ne s’applique pas quand c’est une personne dont l’identité est protégée qui communique des renseignements, à condition que la communication n’ait pas pour but de rendre les renseignements publics.

Cette limite a été amendée par souci de clarté et elle précise maintenant qu’elle comprend aussi les cas où les renseignements sont communiqués à un professionnel du droit ou de la santé, ou à une personne de confiance, mais pas dans le but de les rendre publics.

[Français]

J’aimerais maintenant attirer votre attention sur un changement mineur, mais important, apporté au libellé de l’article 4 du projet de loi, qui comprenait une référence au droit à la vie privée de l’accusé. L’amendement du Sénat incluait l’expression, et je cite, « autre que l’accusé » dans les paragraphes proposés 486.51(2) et 486.51(3), dans le but de montrer clairement que le droit à la vie privée de l’accusé ne devrait pas être pris en compte au moment de déterminer s’il convient de révoquer ou de modifier une interdiction de publication. Cet amendement a été compris comme étant une modification reflétant la common law, et on a conclu que les considérations liées à la vie privée de l’accusé n’étaient pas pertinentes pour déterminer s’il fallait prononcer une interdiction de publication ou s’il fallait la révoquer.

Toutefois, des inquiétudes ont été soulevées quant au fait qu’un libellé excluant spécifiquement le droit à la vie privée de l’accusé pourrait avoir l’effet inverse et conduire à la conclusion erronée que, sans ce libellé, l’accusé aurait pu autrement invoquer un droit à la vie privée dans la demande.

La common law est claire. Un accusé n’a aucun droit à la vie privée dans le cadre d’interdictions de publication. C’est pourquoi ce libellé a été supprimé du projet de loi, afin de mieux refléter l’intention politique de la disposition et, ainsi, éliminer tout risque de confusion.

[Traduction]

Un autre changement porte sur l’amendement apporté par le Sénat aux dispositions relatives à l’interdiction de publication dans le contexte du régime relatif aux troubles mentaux. Chers collègues, ce régime s’applique aux accusés qui sont déclarés inaptes à subir un procès ou qui ne peuvent pas être tenus criminellement responsables en raison de troubles mentaux.

(1520)

Cet amendement aurait exigé que la commission d’examen — l’organe chargé de la surveillance des personnes assujetties à ce régime — informe toute personne dont l’identité est protégée par une interdiction de publication aux termes de l’article 486.4 de l’existence d’une ordonnance, des exigences qui y sont liées et des conséquences en cas de non-respect.

De toute évidence, cet amendement visait un objectif louable, mais il suscitait des préoccupations, certains craignant que son ajout ne tienne pas compte des autres modifications apportées aux articles 486.4 et 486.5 en ce qui concerne les interdictions de publication. Il a été établi qu’une étude plus approfondie serait avantageuse.

Le régime de non-responsabilité criminelle, qui comporte divers aspects, constitue un élément unique en droit criminel et il doit être examiné de façon exhaustive. Je comprends également que les commissions d’examen mises sur pied dans le cadre de ce régime sont constituées au niveau provincial. Par conséquent, le gouvernement estime que le régime relatif aux troubles mentaux devrait faire l’objet d’un examen distinct de celui du projet de loi parce qu’il exige une étude plus approfondie, particulièrement au regard de ces dispositions. Par conséquent, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne de l’autre endroit a décidé à l’unanimité de supprimer cet article.

Finalement, une disposition de coordination entre le projet de loi S‑12 et le projet de loi d’initiative parlementaire C‑291 a été ajoutée. Le projet de loi C‑291, qui a été renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles en juin dernier, propose plusieurs modifications au Code criminel en remplaçant l’expression « pornographie juvénile » par l’expression « matériel d’abus et d’exploitation pédosexuels ». Cette disposition de coordination ferait en sorte que la nouvelle définition proposée pour « infraction désignée » dans le projet de loi S‑12 soit harmonisée à la nouvelle terminologie proposée dans le projet de loi C‑291, dans l’éventualité où ces deux mesures législatives obtiendraient la sanction royale et entreraient en vigueur.

En résumé, chers collègues, le comité de l’autre endroit a approuvé six amendements proposés par le Sénat, quoique présentés par le gouvernement et rédigés en collaboration avec des intervenants clés. L’autre endroit a aussi approuvé cinq autres amendements comportant d’autres modifications proposés par le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles, s’est opposé à un amendement du comité qui portait sur les troubles mentaux et a suggéré une disposition de coordination.

[Français]

Honorables sénateurs, je soutiens le projet de loi S-12 tel qu’il a été modifié. Ces amendements favorisent les objectifs initiaux du projet de loi et honorent l’esprit des améliorations que le Sénat a précédemment apportées. Je vous invite à soutenir ce projet de loi et à faciliter son adoption rapide.

[Traduction]

Avant de conclure, j’aimerais apporter une dernière précision. Comme vous le savez, chers collègues, le projet de loi S‑12 donne suite à la décision de la Cour suprême du Canada, qui a cerné un manquement à la Constitution dans les lois actuellement en vigueur. La cour a fixé au 28 octobre 2023 la date limite pour mettre en place les corrections législatives nécessaires.

Plus tôt cette semaine, le sénateur Dennis Patterson m’a demandé si le gouvernement serait disposé à demander un sursis à la Cour suprême. On m’a subséquemment informé que pour parer à toutes les éventualités, le gouvernement a effectivement agi de manière responsable et demandé un report de la date limite au cas où les choses ne fonctionnent pas à l’autre endroit ou au Sénat. Plus tôt aujourd’hui, on m’a informé qu’un sursis a effectivement été accordé hier.

Cela dit, j’encourage les sénateurs à procéder à l’étude et à l’adoption du message relatif au projet de loi S‑12 dès aujourd’hui, car je crois que le Sénat est prêt, sans compter que l’autre endroit a agi rapidement pour que ce projet de loi puisse recevoir la sanction royale et que les dispositions inconstitutionnelles en cause puissent être abrogées et remplacées par d’autres, plus solides, que notre travail a permis d’améliorer.

Tout comme le gouvernement a agi de manière responsable en demandant un sursis, je me permets d’avancer que la chose responsable à faire pour le Sénat aujourd’hui serait de conclure le débat et d’adopter le message afin d’éviter de prolonger la situation actuelle, que la Cour suprême a jugée inconstitutionnelle.

Le projet de loi S‑12 apporterait des précisions fort nécessaires concernant le Registre national des délinquants sexuels au Canada, il conférerait des pouvoirs accrus aux victimes d’actes criminels et contribuerait à renforcer la confiance dans le système de justice criminelle.

Chers collègues, je vous remercie du temps que vous m’avez accordé aujourd’hui.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Sénateur Gold, accepteriez-vous de répondre à une question?

Le sénateur Gold : Bien sûr.

Le sénateur Plett : Vous et moi avons abordé le sujet plus tôt, et je vous en suis reconnaissant. Je ne veux pas que ma question soit perçue comme une tentative de retarder les choses. Je crois que nous avons assurément démontré que nous sommes d’accord avec l’intention de ce projet de loi, tant au Sénat qu’à l’autre endroit.

Vous avez tout à fait raison. Non seulement le sénateur Dennis Patterson a posé cette question ici, mais nous l’avons également posé à plusieurs reprises lors de la réunion des leaders : pourquoi ne pourrions-nous pas demander une prolongation? Pourquoi nous demande-t-on de procéder à toute vitesse? On nous a constamment rappelé que nous devions faire vite, et c’est ce que nous avons fait.

Vous dites que le gouvernement a agi de façon responsable. Je dirais qu’être responsable, ce serait d’au moins nous dire qu’il essaie d’obtenir une prolongation, mais on ne nous a rien dit.

Alors, pourquoi le gouvernement ne nous a-t-il rien dit? Pourquoi ne nous avez-vous rien dit? Je reconnais que vous n’étiez peut-être pas au courant. Pourquoi le gouvernement ne vous a-t-il pas dit qu’il essayait de demander une prolongation?

Combien de temps durera cette prolongation? Si ce projet de loi n’est pas adopté aujourd’hui, combien de jours additionnels le gouvernement a-t-il obtenus? Quelle est la date butoir?

Le sénateur Gold : Il s’agit de bonnes questions. Je vous en remercie.

La réponse courte à la dernière partie de votre question, c’est que le gouvernement a demandé une prolongation de trois mois, ce que le tribunal lui a accordé en fin de journée hier. Mon bureau en a été informé en milieu de journée aujourd’hui, et la première chose que j’ai faite — j’espère que ceux qui peuvent le confirmer l’ont aussi dit à leurs collègues —, c’est de transmettre la nouvelle aux leaders de tous les groupes parlementaires. J’ai aussi appelé le sénateur Patterson, qui est le premier à avoir posé la question. À l’époque, je ne savais pas que le gouvernement avait demandé une prolongation et encore aujourd’hui, j’ignore à quel moment il a pris cette décision au juste.

Je peux toutefois affirmer avec assez de certitude que, lorsque le gouvernement demande une prolongation de délai, la date de l’audience n’est pas fixée automatiquement, et la réponse des tribunaux n’est jamais certaine. Je suis fermement convaincu que le gouvernement a agi de manière responsable en demandant une prolongation — qu’il a obtenue — lorsqu’il a vu que la date butoir approchait, car il arrive que les débats à l’autre endroit soient plus ou moins mouvementés et il a dû craindre de ne pas pouvoir nous renvoyer la version amendée à temps ou qu’une fois entre nos mains, nous n’ayons pas le temps, ou la volonté, de l’étudier sur‑le‑champ.

À cet égard, j’adresse à la fois un rappel et des remerciements aux sénateurs puisque, lorsque le projet de loi a été présenté ici même au Sénat, j’ai demandé aux leaders et aux sénateurs de l’étudier soigneusement — ce que nous avons fait, nous l’avons d’ailleurs amélioré — et de le faire rapidement, afin de pouvoir le renvoyer à la Chambre avant la pause estivale.

Pourquoi ai-je fait cette demande? Je l’ai faite parce que nous connaissions la date d’échéance et qu’il m’apparaissait approprié de laisser à la Chambre des communes autant de temps pour étudier le projet de loi que nous avions choisi d’en prendre nous-mêmes. Nous n’avons pas fait notre étude à la hâte et au final, les députés ont consacré moins de temps à ce dossier que nous avons pu le faire.

Votre question est légitime, sénateur Plett, et je n’en contesterais qu’une partie : on ne nous demande pas, selon moi, de précipiter l’étude de ce dossier. Je crois que notre comité a fait un travail fantastique. Plus tôt cette semaine, j’ai fait circuler parmi les leaders et les sénateurs un résumé général des amendements qui ont été acceptés, modifiés et présentés à l’autre endroit.

C’est aujourd’hui jeudi. Il est 15 h 30. Nous disposons d’amplement de temps pour que chaque sénateur puisse prendre la parole et participer au débat. Je continue d’espérer que nous conclurons le débat, que nous enverrons le projet de loi pour qu’il reçoive la sanction royale et que nous achèverons ainsi ce travail que nous avons si bien commencé.

Merci.

Le sénateur Plett : J’ai une brève question complémentaire. Vous avez raison, sénateur Gold; vous nous avez téléphoné à midi. Nous avons avisé notre porte-parole, mais, évidemment, compte tenu de l’heure, nous n’avons pas avisé tout le monde. Cependant, vous m’avez dit très clairement que vous alliez en parler au Sénat afin que tout le monde soit au courant avant de passer au vote. Je vous en remercie.

Vous avez répondu en partie à ma question, mais, puisque vous avez dit qu’ils demandaient une prolongation de trois mois, l’ont-ils obtenue?

Le sénateur Gold : Je suis désolé. Oui, ils l’ont obtenue. Ils ont demandé et obtenu une prolongation de trois mois.

Je suis désolé si je n’ai pas été clair à ce sujet.

L’honorable Kim Pate : Accepteriez-vous de répondre à une autre question, sénateur Gold?

Le sénateur Gold : Bien sûr.

(1530)

La sénatrice Pate : Un des amendements que le Sénat a adoptés visait à garantir que les victimes et les témoins touchés par une ordonnance de non-publication soient informés des effets de l’ordonnance et des circonstances où le projet de loi S‑12 permet la communication des informations visées par l’ordonnance de non‑publication.

Comme vous l’avez dit, cet amendement a été supprimé à l’autre endroit. Je me demande ce que le gouvernement entend faire pour s’assurer que les personnes visées par une ordonnance de non‑publication, en particulier les personnes les plus marginalisées et défavorisées, reçoivent l’information dont elles ont besoin pour comprendre leurs droits et avoir assez d’assurance pour les faire respecter — qu’elles soient convaincues qu’elles ne risquent pas de faire l’objet d’accusations criminelles, ce qui a motivé en partie la présentation de ce projet de loi.

Le sénateur Gold : C’est une excellente question. Je vais y répondre, et je ferai ensuite une observation.

J’ignore exactement quelles mesures pourraient être prises à l’avenir, que ce soit par le gouvernement fédéral, les procureurs, ou d’autres intervenants responsables de l’administration de la justice. Bien que le comité ait rejeté l’amendement, il n’en reste pas moins que les victimes et les témoins sont informés de la nature des ordonnances de non-publication et des procédures. Je ne manquerai pas de me renseigner. C’est une question importante pour la simple raison que certaines personnes savent s’y retrouver lorsque des tels renseignements leur sont transmis, mais que ce n’est pas aussi évident pour d’autres, que ce soit en raison des circonstances dans lesquelles ils se trouvent, du stress qu’ils éprouvent, ou de leur difficulté à accéder à des ressources que d’autres ont la chance d’avoir à leur disposition.

C’est une question légitime, et le gouvernement estime que l’objectif de ce projet de loi est louable. Cependant, certaines préoccupations ont été soulevées à la Chambre des communes. Je crois, sénatrice Pate, que c’est une décision qui a été prise à l’unanimité. Tous les membres du comité ont voté en faveur du rejet de cet amendement. Je ne manquerai pas de faire un suivi pour savoir ce qui est fait, le cas échéant, et pour transmettre vos préoccupations au ministre responsable, ce que vous allez également continuer de faire, j’en suis certain.

La sénatrice Pate : Merci beaucoup. J’attendrai la réponse avec impatience.

Un des autres amendements que le Sénat avait adopté et que l’autre endroit a pour ainsi dire rejeté porte sur le paragraphe 672.501(4) du Code criminel, et je sais que vous en avez parlé vous aussi. Cette disposition porte sur les ordonnances de non-publication qui peuvent être prises par les commissions d’examen chargées d’établir la responsabilité criminelle d’un prévenu souffrant de problèmes de santé mentale.

Bien qu’on trouve des ordonnances de non-publication très similaires ailleurs dans le Code criminel, elles n’ont pas été modifiées par le projet de loi S‑12, et l’amendement du Sénat devait garantir que les mêmes règles continueraient de s’appliquer à toutes les ordonnances de non-publication prévues dans le Code criminel. Selon ce que vous avez dit, l’autre endroit souhaite qu’on étudie davantage la question, mais je suis curieuse de savoir ce que le gouvernement entend faire avec les dispositions du Code criminel qui portent sur ce type d’ordonnance et qui n’ont pas été adaptées aux changements proposés dans le projet de loi S‑12.

Le sénateur Gold : Je vous remercie, car il s’agit encore une fois d’une question aussi importante que légitime. Je ne connais pas l’opinion du gouvernement là-dessus, et pour tout vous dire, je ne sais même pas s’il s’est penché sur cette question. Le changement apporté par l’autre endroit est encore très récent. Vous pouvez être sûre d’une chose : je vais poser la question. J’imagine qu’une fois la sanction royale accordée, on pourra s’attarder à cette question ainsi qu’à toutes les autres qui ressortent du projet de loi S‑12.

L’honorable Denise Batters : Sénateur Gold, j’aimerais vous poser une question sur la disposition de coordination avec le projet de loi C‑291 — un projet de loi proposé à la Chambre des communes par mes collègues les députés Mel Arnold et Frank Caputo et adopté à l’unanimité à l’autre endroit, que j’ai l’honneur de marrainer au Sénat. Nous attendons maintenant que le Comité des affaires juridiques l’étudie. Je pense que ceux qui ont modifié le libellé pour remplacer le terme « pornographie juvénile » par « matériel d’abus et d’exploitation pédosexuels » sont très visionnaires. Je tiens simplement à remercier ceux qui ont apporté cet amendement au projet de loi et je remercie également le gouvernement d’y avoir consenti. Je me demande si vous pouvez nous donner plus d’explications à ce sujet. Merci.

Le sénateur Gold : Je vous remercie pour vos observations. Franchement, je ne sais pas s’il y a quelque chose à ajouter. Je pense que cela reflète l’accord du gouvernement sur le fait que l’ancienne description de ce matériel était inappropriée et que la définition proposée dans le projet de loi — dont vous êtes la marraine au Sénat — est plus appropriée et plus juste pour désigner ce matériel. Aucun d’entre nous ne souhaite l’existence de ce matériel, mais il existe et, par conséquent, il faut le traiter de manière appropriée et dans le contexte du Code criminel.

L’honorable Percy E. Downe : J’invoque le Règlement. Maintenant que nous disposons d’une prolongation de trois mois, j’aimerais que Son Honneur et ses collaborateurs m’informent des fondements législatifs sur lesquels nous nous appuyons.

D’après mon expérience, les messages de la Chambre des communes au Sénat proviennent toujours du greffier de cette assemblée. Or, j’ai cru comprendre — et je me trompe peut‑être — qu’il n’y a pas actuellement de greffier à la Chambre des communes, mais un greffier par intérim. Est‑ce que le document que j’ai sous les yeux a été signé par le greffier par intérim ou par quelqu’un d’autre en son nom? Est-il admissible?

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Downe, on me dit que, oui, le document a été signé par le greffier par intérim de l’autre endroit et qu’un préavis en bonne et due forme a été donné. Le document est recevable.

Le sénateur Downe : Merci.

[Français]

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Honorables sénatrices et sénateurs, je prends la parole aujourd’hui en tant que porte-parole du projet de loi S-12, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et la Loi sur le transfèrement international des délinquants, déposé par l’honorable Marc Gold, représentant du gouvernement libéral au Sénat.

Chers collègues, j’aimerais commencer mon discours sur les mesures que contient le projet de loi S-12 en traitant des ordonnances de non-publication. Au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, le projet de loi avait reçu une série d’amendements visant à refléter les demandes de My Voice, My Choice, une initiative créée par des victimes d’actes criminels qui souhaitent modifier l’article 486.4 du Code criminel pour qu’aucune personne ne soit jamais forcée au silence en raison d’une interdiction de publication non désirée.

Chers collègues, j’aimerais vous rappeler certaines des histoires partagées par ce groupe de victimes.

En 2021, une victime de Victoria, Kelly Favreau, s’est présentée elle-même devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique pour demander la levée de son interdiction de publication. Elle a découvert l’existence de cette interdiction quatre ans après la conclusion des procédures judiciaires. Elle a affirmé que ce processus avait de nouveau empiété sur sa liberté et qu’elle se sentait, encore une fois, victimisée par le système de justice canadien. L’auteur présumé dans cette affaire a été autorisé à présenter des arguments pour expliquer pourquoi l’interdiction ne devait pas être levée. La victime n’avait jamais consenti à une interdiction de publication.

En mai 2021, une victime d’Ottawa, Morrell Andrews, a demandé une audience à la procureure de la Couronne associée à son dossier pour lever l’interdiction de publication, mais celle-ci a déclaré qu’elle n’était pas sûre de la procédure ou de la politique en vigueur et qu’elle ignorait si le ministère public consentirait à la levée de l’interdiction.

(1540)

Après avoir fait cette demande directement au juge, pendant l’audience de détermination de la peine, Mme Andrews s’est fait dire que le juge n’avait plus compétence dans le dossier.

Lorsqu’un troisième procureur de la Couronne a finalement demandé la levée de l’interdiction de publication devant le tribunal, l’avocat de la défense du présumé criminel s’est opposé à la demande et a été autorisé à présenter des arguments sur les raisons pour lesquelles l’interdiction ne devait pas être levée. Cette victime n’avait jamais donné son consentement à une interdiction de publication.

Est-il normal que l’agresseur soit celui qui contrôle la décision de la victime? Ces interdictions de publication sont censées être un outil pour protéger les victimes. Elles ne devraient jamais se retourner contre elles. Lorsqu’une victime demande la levée d’une interdiction de publication, une procédure devrait automatiquement être mise en place par le système de justice afin d’étudier la demande et de décharger la victime de toute responsabilité.

Dans mon discours à l’étape de la deuxième lecture, j’avais affirmé qu’il est essentiel que le consentement de la victime soit sollicité avant d’émettre une interdiction de publication en son nom. Souvent, dans les premières étapes d’un procès, notamment à la comparution initiale de l’accusé, les procureurs de la Couronne ont tendance à appliquer des ordonnances de non-publication. Habituellement, la victime n’est pas présente à ce moment-là. Dans de tels cas, les victimes ne sont ni avisées ni consultées, ce qui contrevient à leurs droits à l’information et à la participation, droits pourtant garantis par la Charte canadienne des droits des victimes. Cela a pour résultat d’exclure les victimes des décisions judiciaires et de les réduire au silence, alors qu’elles sont les principales concernées et qu’elles devraient, en toute logique, être les premières informées.

Le projet de loi S-12, dans sa forme actuelle, suggère simplement d’informer les victimes. Il est toutefois important d’obtenir leur consentement explicite. Les victimes doivent pouvoir décider si elles souhaitent parler publiquement de leur expérience, dans la mesure où elles estiment que cela sert leurs intérêts. Il est inacceptable que quiconque puisse leur refuser ce droit ou restreindre leur liberté de parole sous le couvert de la protection.

Or, dans le cadre de l’étude du projet de loi S-12 par le Comité de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes, les libéraux et les néo-démocrates ont rejeté l’amendement PV-2, proposé par le Parti vert. Cet amendement avait une intention claire et essentielle : celle de s’assurer que toutes les victimes soient informées et aient la possibilité de décider si une interdiction de publication est appropriée, dans leur situation, avant qu’une telle mesure soit imposée de manière unilatérale par le tribunal.

Permettez-moi d’expliquer pourquoi cette décision est si problématique.

Dans le cadre actuel, lorsqu’une affaire judiciaire est ouverte, notamment à la première comparution de l’accusé devant le tribunal, il est fréquent que les juges ordonnent des interdictions de publication. Or, ces décisions sont prises sans que les victimes en soient informées, et encore moins consultées. Par conséquent, en maintenant le rejet de l’amendement PV-2, nous perpétuons un statu quo inacceptable.

Les victimes se voient donc privées de leur droit de choisir. Cette situation est non seulement contraire à l’esprit de notre système de justice, qui se veut équitable et transparent, mais elle néglige aussi les droits fondamentaux des victimes. Cela les laisse dans une position de faiblesse, souvent à un moment où elles sont particulièrement vulnérables. Cette situation perpétue la tradition juridique qui veut que les victimes soient accessoires à notre système de justice.

Les victimes méritent d’être entendues, informées et impliquées dans un processus qui les concerne directement. Il est impératif que notre système de justice reconnaisse et respecte ce droit fondamental.

J’aimerais maintenant aborder un autre aspect des modifications apportées à la Chambre des communes.

Tout d’abord, rappelons qu’à l’origine le projet de loi permettait à la victime ou au témoin de demander une modification ou une annulation de l’ordonnance de non-publication, ce qui exigeait la tenue d’une audience par le tribunal. Toutefois, le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a modifié cette disposition dans le but de simplifier la procédure pour les victimes ou les témoins qui souhaitent changer ou lever une ordonnance de non-publication. Le texte de loi révisé impose maintenant au procureur de déposer une demande de modification ou d’annulation en leur nom, et ce, le plus rapidement possible, bien que les victimes ou les témoins puissent toujours le faire eux-mêmes s’ils le souhaitent.

Le tribunal est tenu de modifier ou d’annuler l’interdiction de publication, conformément à la volonté des victimes ou des témoins, sauf si cela compromet la protection de la vie privée d’une autre personne également visée par l’interdiction. Dans ce cas, une audience doit être fixée pour déterminer si l’interdiction doit être modifiée ou levée.

Il est crucial de noter qu’un amendement apporté par la sénatrice Simons faisait en sorte que la vie privée de l’accusé n’était pas considérée dans la protection offerte par une ordonnance de non‑publication. L’intention d’une ordonnance de non-publication est avant tout de protéger la vie privée des victimes et des témoins, et non celle de l’accusé. L’accusé doit toutefois être informé en cas de levée, d’annulation ou de modification de l’interdiction. Or, au Comité de la justice et des droits de la personne des Communes, les libéraux ont décidé de proposer un amendement ayant pour effet de supprimer l’amendement de la sénatrice Simons et permettant ainsi aux criminels de bénéficier de la protection des ordonnances de non-publication.

Il est ironique et franchement inquiétant de constater que, sous le couvert de la protection, ces modifications permettent de maintenir le pouvoir des accusés dans le processus judiciaire. En vertu de ces changements, si une victime souhaite contester ou faire lever une ordonnance de non-publication, l’accusé peut toujours bénéficier d’une protection.

En effet, l’accusé, qui est souvent au cœur de l’affaire, peut se retrouver dans une position où il influence le maintien d’une ordonnance de non-publication, même si cette ordonnance va à l’encontre du souhait de la victime. Cela crée un déséquilibre flagrant. Nous sommes confrontés à une situation où les droits de l’accusé semblent prendre le dessus sur ceux de la victime, particulièrement en ce qui concerne la liberté d’expression et la capacité de partager sa propre histoire. Comment est-il juste qu’une victime, qui cherche à retrouver sa voix et à partager son récit, se retrouve bloquée par l’accusé, la personne même qui est à l’origine de ses souffrances?

Cette mesure, telle qu’elle a été adoptée, ouvre la porte à une forme d’injustice où l’accusé, qui bénéficie déjà de nombreuses protections en vertu de notre système judiciaire, peut se voir accorder un pouvoir supplémentaire : celui de museler indirectement la victime. Il est essentiel de remettre en question la logique d’une loi qui, au lieu de créer un équilibre entre les droits de l’accusé et ceux de la victime, penche davantage du côté de la personne qui se trouve en position de force par rapport à la victime. Devons-nous tolérer que notre système judiciaire soit utilisé non seulement pour défendre les accusés, ce qui est juste et nécessaire, mais pour potentiellement réprimer la voix des victimes?

La justice, dans sa forme la plus pure, doit permettre d’atteindre un équilibre entre la défense des droits de l’accusé et la protection des droits de la victime. Or, ces modifications récentes semblent avoir perturbé cet équilibre délicat.

Honorables sénateurs, il y aurait bien d’autres choses à dire sur les changements apportés à ce projet de loi, qui ont considérablement réduit la portée des amendements apportés par le Sénat. L’examen des modifications récentes apportées au projet de loi S-12 révèle une tendance inquiétante de la part de ce gouvernement, qui semble ignorer non seulement les contributions précieuses du Sénat, mais aussi, et c’est bien plus troublant, les voix des victimes elles-mêmes. En limitant considérablement la portée des amendements proposés par le Sénat, le gouvernement montre une réticence à accepter des perspectives extérieures et expertes. Cette approche unilatérale soulève de sérieuses préoccupations quant à la volonté du gouvernement d’écouter et d’intégrer des points de vue divers et essentiels pour concevoir une législation juste et équilibrée.

(1550)

Le Sénat, en jouant son rôle de Chambre de réflexion, a apporté des modifications réfléchies au projet de loi visant à renforcer les droits et la protection des victimes. Cependant, en écartant ces amendements, le gouvernement envoie un signal très clair : ses actions ne correspondent pas à ses paroles. Bien qu’il affirme défendre et écouter les victimes, ses actes montrent un manque de considération et de sensibilité pour les besoins réels des victimes et pour les recommandations qui cherchent à améliorer leur sort dans un processus judiciaire complexe et insensible.

Honorables sénatrices et sénateurs, j’aimerais maintenant faire un rappel de mon point de vue sur l’autre partie du projet de loi, qui concerne le Registre national des délinquants sexuels, que j’avais déjà exprimé dans cette Chambre il y a quelques mois. Mon propos sera donc plus bref.

Le projet de loi S-12 a été proposé pour répondre à la décision de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Ndhlovu, comme nous le savons tous. Le cas qui a été porté à l’attention de la Cour suprême est celui d’un jeune homme de 19 ans qui a agressé sexuellement deux femmes lors d’une fête pendant laquelle il avait touché les parties intimes des deux femmes.

Malgré ces actes que je qualifierais de graves et préoccupants, on a le sentiment, en lisant la décision de la Cour suprême, que l’inscription de ce délinquant au registre est injustifiée au regard des conséquences que l’inscription pourrait avoir sur sa vie. De même, la décision semble justifier l’invalidation des dispositions qui exigeaient l’inscription automatique de toute personne déclarée coupable ou non criminellement responsable d’une infraction de nature sexuelle, ainsi que les dispositions prévoyant l’inscription obligatoire à perpétuité au Registre national des délinquants sexuels dans le cas de certains agresseurs plus violents ayant commis des crimes plus graves.

Personnellement, je me demande si nous avons pris en compte le point de vue des victimes dans cette décision, si on leur a demandé si elles avaient subi des traumatismes et si elles conservent des séquelles à la suite de ces agressions. Pourquoi ne pas leur avoir demandé si elles croyaient que ce délinquant devait être inscrit au registre?

Ce genre de décision banalise les violences sexuelles envers les femmes au Canada et envoie un message négatif à celles qui sont victimes d’agressions sexuelles et qui n’osent pas dénoncer leur agresseur. Ce délinquant devrait être inscrit au Registre national des délinquants sexuels, car il est un délinquant sexuel. Les actes qu’il a commis sont inacceptables dans une société de droit comme la nôtre. L’objectif, c’est pourtant de protéger les femmes contre de futurs agresseurs.

Prenons le cas récent d’un agresseur sexuel condamné à trois ans et neuf mois de prison, le 11 avril 2023. Entre le 7 janvier et le 5 juin 2022, cet homme a agressé six femmes âgées de 30 à 65 ans.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Boisvenu, je regrette de vous interrompre, mais je me dois de vous rappeler que, en tant que porte-parole du projet de loi, lors d’une réponse à un message, le temps de parole est de 15 minutes. Vous pourriez conclure votre allocution en débat.

Je vais lire l’article du Règlement en question.

Le sénateur Boisvenu : Dans ce cas, Votre Honneur, je demanderais cinq minutes de plus.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Est-ce que le consentement est accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Je vais d’abord faire la lecture de l’article du Règlement et je demanderai ensuite si le consentement est accordé. L’article dit ceci :

[...] limité à 45 minutes aux étapes des deuxième et troisième lectures dans le cas du porte-parole du projet de loi, sauf si le porte-parole est le leader du gouvernement ou de l’opposition;

Donc, la durée est bien de 15 minutes en toute autre occasion.

[Traduction]

Le sénateur a-t-il le consentement du Sénat pour poursuivre encore cinq minutes, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Merci beaucoup, chers collègues. Je vais essayer de lire vite.

Prenons le cas récent d’un agresseur sexuel condamné à trois ans et neuf mois de prison, le 11 avril 2023. Entre le 7 janvier et le 5 juin 2022, cet homme a agressé six femmes âgées de 30 à 65 ans. Les crimes ont été perpétrés dans la région de Québec.

Imaginez : trois ans et neuf mois pour avoir agressé et traumatisé six femmes! Permettez-moi de dénoncer la permissivité de notre système de justice, qui est trop laxiste envers ces criminels. Ne nous étonnons pas d’avoir des statistiques aussi élevées par rapport aux crimes sexuels, et ne soyons pas surpris que les femmes renoncent à dénoncer leurs agresseurs. Les données de 2015 indiquaient que 50 % des femmes agressées sexuellement abandonnaient leur plainte durant les procédures judiciaires. Additionnez à cette statistique la non-dénonciation, qui est tout aussi élevée; seule une femme sur dix dénonce son agresseur. À peine 1 agresseur sur 30 sera condamné à une peine d’emprisonnement.

Honorables sénatrices et sénateurs, la cour avait fixé un délai jusqu’au 28 octobre 2023 pour que le gouvernement fédéral réagisse. Nous avions été pressés par le temps pour étudier ce projet de loi, car le gouvernement fédéral a attendu six mois avant de proposer un projet de loi. Ce retard a particulièrement affecté notre capacité d’étudier les modifications concernant le Registre national des délinquants sexuels.

Il est essentiel de prendre en compte les voix des victimes et de réfléchir aux séquelles qu’elles subissent. Les lois et les décisions judiciaires comme celle-ci peuvent dissuader les femmes de rapporter des agressions, ce qui est contre-productif dans notre combat en vue de contrer la violence faite aux femmes.

Les statistiques montrent clairement que la violence envers les femmes, notamment les femmes autochtones, est un problème majeur au Canada. Il est impératif que notre système de justice reflète l’urgence de traiter ces crimes avec le sérieux qu’ils méritent. Face aux statistiques alarmantes sur la violence faite aux femmes, il est impératif que nous renforcions notre législation. Le projet de loi S-12, en ne ciblant que les agresseurs de mineurs et les récidivistes pour ce qui est de l’inscription automatique au Registre national des délinquants sexuels, ne répond pas suffisamment à cette urgence. Les femmes sont majoritairement les victimes de crimes sexuels, et il est fondamental que tout homme condamné à plus de deux ans pour de tels crimes contre une femme soit automatiquement inscrit au registre.

J’avais soumis un amendement pour corriger cela et pour demander l’inscription systématique de délinquants condamnés à plus de deux ans pour crimes sexuels contre les femmes. Malheureusement, cet amendement a été rejeté. Je ne comprends toujours pas la décision de mes collègues du Comité des affaires juridiques sur ce sujet, qui est si important pour les victimes.

Certains évoquent une possible contradiction avec la décision de la Cour suprême, mais rappelons-nous que la Cour suprême n’a pas à dicter notre travail législatif. Nous devons agir avec courage pour la sécurité de nos citoyennes. Quand nous défendons les intérêts des victimes, la peur ne doit pas guider nos pas; c’est plutôt le courage qui doit nous animer, le même courage dont ont fait preuve ces victimes en dénonçant leurs agresseurs.

Nous sommes sur le point d’adopter le projet de loi S-12, mais je crains profondément qu’il ne soit pas à la hauteur de la réalité de la criminalité au Canada, surtout en ce qui concerne la violence envers les femmes. Ce projet de loi laisse de côté des améliorations essentielles au Registre national des délinquants sexuels et, par conséquent, pourrait permettre à de nombreux agresseurs de récidiver et de faire encore plus de victimes.

J’en parle en connaissance de cause, car ma propre fille Julie a été la victime tragique d’un délinquant sexuel. Le laxisme de notre système de justice envers ce dernier a été l’un des facteurs expliquant son acte criminogène. En 2002, le registre n’existait pas, ce qui a permis à un prédateur qui venait de sortir de prison de prendre la vie de ma fille. Je passe sous silence sa sentence qu’il avait reçue avant cette agression mortelle, laquelle aura été, en quelque sorte, un permis de récidiver pour ce criminel.

La sécurité des citoyennes canadiennes devrait toujours être prioritaire par rapport au droit à la vie privée d’un délinquant. Nous ne devons jamais sous-estimer les conséquences désastreuses d’une agression sexuelle, qui peuvent parfois mener jusqu’au féminicide. Je crains qu’un jour, avec ce projet de loi, nous regrettions nos actions.

Il est essentiel de reconnaître que les victimes, souvent oubliées ou mises à l’écart dans le processus judiciaire, méritent une attention et un soutien beaucoup plus marqués que de simples mots de réconfort. Ces femmes, marquées par des épreuves souvent traumatisantes, ont besoin que nous posions des actes réfléchis qui témoignent d’une véritable compréhension de leurs souffrances et de leurs besoins spécifiques.

En tant que membres engagés et responsables de notre société, il est de notre devoir de garantir que chaque victime soit traitée avec le respect et la dignité qu’elle mérite. Merci.

[Traduction]

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

(1600)

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Adoption du dix-septième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

Le Sénat passe à l’étude du dix-septième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (projet de loi C-48, Loi modifiant le Code criminel (réforme sur la mise en liberté sous caution), avec des amendements et des observations), présenté au Sénat le 24 octobre 2023.

L’honorable Brent Cotter propose que le rapport soit adopté.

 — Merci, Votre Honneur.

Je parlerai aujourd’hui du 17e rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, qui porte sur le projet de loi C‑48.

Pour bien vous situer, il s’agit du projet de loi intitulé Loi modifiant le Code criminel (réforme sur la mise en liberté sous caution).

Je reviendrai au texte lui-même dans un instant. Pour vous donner une idée, l’objectif principal de cette mesure législative consiste à faire augmenter le nombre d’infractions prévues dans le Code criminel pour lesquelles le fardeau de la preuve est inversé, ce qui signifie que c’est à l’accuser de persuader le juge que, selon la prépondérance des probabilités, il peut être mis en liberté sous caution. En termes juridiques, pour toutes ces infractions, c’est l’accusé qui portera le « fardeau de la preuve » pour prouver qu’il peut être relâché en attendant son procès.

Commençons par un peu de contexte. En règle générale, les personnes qui sont accusées d’un crime sont mises en liberté moyennant une caution. On présume en général qu’elles peuvent être relâchées. Le Code criminel prévoit trois cas où une personne peut rester en détention : pour garantir sa présence en cour, afin de protéger le public et la ou les victimes, et pour maintenir la confiance dans l’administration de la justice. Généralement, c’est à la poursuite d’établir si l’une de ces situations, ou conditions, s’applique et si la mise en liberté sous caution doit être refusée au prévenu.

Cependant, pour certaines infractions, le Code criminel prévoit ce qu’on appelle l’inversion du fardeau de la preuve; c’est-à-dire que l’accusé doit démontrer qu’il peut être mis en liberté. Dans le jargon juridique, on dit que le fardeau, à savoir la responsabilité de démontrer la justification de la mise en liberté, incombe à l’accusé plutôt qu’à la poursuite. Cette inversion du fardeau pour les infractions ciblées a été jugée conforme à la Constitution par la Cour suprême du Canada.

Comme je l’ai dit, le projet de loi C‑48 ajoutera une série d’infractions aux situations où il y a inversion du fardeau pour la mise en liberté sous caution. Les catégories d’infractions ciblées sont généralement différentes infractions liées à l’utilisation d’une arme à feu. Elles sont ciblées dans le projet de loi par les paragraphes 1(2) et 1(3) et par une partie du paragraphe 1(4). Il y a également des infractions liées à la violence entre partenaires intimes dans les situations où l’accusé a déjà obtenu une absolution pour une infraction du même ordre.

Pour bien comprendre cet aspect du projet de loi — il est important, en plus de faire l’objet d’un amendement —, je précise qu’il y a absolution lorsqu’une personne a admis sa culpabilité ou qu’elle a été reconnue coupable, mais que le juge prescrit qu’elle soit absoute de l’infraction, inconditionnellement ou sous conditions. Lorsque les conditions sont respectées, même si le casier est maintenu, la condamnation n’est essentiellement pas inscrite. On considère généralement cette peine comme la plus clémente des sanctions pour des infractions criminelles.

Cela dit, le cheminement du projet de loi C‑48 a été légèrement inhabituel. Il a été présenté à l’autre endroit le 16 mai 2023. Il a fait l’objet de débats périodiques à la fin du printemps 2023. Des discussions entre les ministres responsables de la justice et de la sécurité du gouvernement fédéral, des provinces et des territoires avaient eu lieu sur la teneur du projet de loi C‑48 avant sa présentation. La mesure législative était soutenue par les provinces et les territoires, ainsi que par les dirigeants des services de police du pays.

Comme bon nombre d’entre vous l’auront remarqué, au cours des derniers mois, on a beaucoup parlé des quelques rares cas où une personne en liberté sous caution, ou mise en liberté sur une base analogue, est accusée d’avoir commis un crime très grave, souvent un crime violent, ayant des conséquences tragiques pour les victimes. L’indignation suscitée par ces cas a motivé une approche rapide à l’égard du projet de loi C‑48.

Le 18 septembre de cette année — c’est-à-dire il y a environ un mois —, le projet de loi a franchi en une seule journée les étapes de la deuxième lecture, de l’étude en comité plénier et de la troisième lecture à l’autre endroit, en plus d’être adopté à l’unanimité sans renvoi au Comité de la justice de la Chambre des communes — et j’insiste sur ce point. Contrairement à presque tous les projets de loi de ce genre, il n’a pas fait l’objet d’une étude en comité avant son adoption à la Chambre.

Cela a transmis deux messages au Sénat : premièrement, l’urgence évidente de l’étude de ce projet de loi par le Sénat; deuxièmement, étant donné l’absence d’étude à l’autre endroit, c’était un argument de poids pour que le projet de loi fasse l’objet d’un examen sérieux et sans délai lorsqu’il a été renvoyé au Comité sénatorial permanent des Affaires juridiques et constitutionnelles le jeudi 21 septembre de cette année.

Dans ce cas-ci, le projet de loi a nécessité un premier examen objectif, si je puis m’exprimer ainsi, et c’est ce qu’il a obtenu à notre comité.

Votre comité a tenu quatre réunions et entendu 26 témoins, dont le ministre de la Justice et procureur général du Canada, des fonctionnaires du ministère de la Justice, la procureure générale de la Colombie‑Britannique, des représentants d’associations policières et juridiques, des groupes de revendication, des universitaires et des experts, des représentants autochtones et d’autres parties intéressées.

Le comité a également reçu neuf mémoires.

J’aimerais souligner brièvement certains aspects de ce que nous avons entendu au comité et indiquer les trois cas où le comité a adopté des amendements au projet de loi.

J’imagine que mes collègues y reviendront et qu’ils nous feront part de leur point de vue. J’aimerais aussi parler brièvement des observations adoptées par le comité.

Mes propos peuvent être regroupés selon les mêmes quatre grandes catégories que l’on trouve dans le rapport du comité.

Premièrement, de nombreux témoins ont souligné l’importance de recueillir des données précises et exhaustives sur la mise en liberté sous caution au Canada afin, d’une part, de mieux comprendre et résoudre les problèmes qui affligent le système de mise en liberté sous caution — un point qui a été repris par à peu près tous les témoins — et, d’autre part, d’analyser l’incidence de mesures législatives comme le projet de loi C‑48 sur les groupes déjà surreprésentés dans le système judiciaire.

Le fait est que la collecte des données sur les mises en liberté sous caution relève des provinces et des territoires et que ces données ne sont pas prioritaires parmi les statistiques et les données sur la justice. De nombreux témoins ont toutefois indiqué que les lois fédérales comme celle-ci doivent être fondées sur des données probantes et des données empiriques exhaustives. Or, je ne crois pas me tromper en disant que les données empiriques sur la foi desquelles on nous demande d’adopter cette mesure législative sont faibles.

Comme le dit une des observations, nous devons absolument en apprendre davantage sur le système général de mise en liberté sous caution et sur les effets, néfastes ou bénéfiques, que les amendements comme celui-ci peuvent avoir sur ce même système.

Vient ensuite la sécurité publique. Les témoins ont exprimé des points de vue divergents quant à la nécessité, à l’utilité et aux effets des mesures contenues dans ce projet de loi au regard de la sécurité publique.

Dans le contexte des récents incidents tragiques de violence impliquant des personnes en liberté provisoire, plusieurs témoins ont souligné qu’il était important de préserver la sécurité du public et sa confiance envers le système de justice pénale canadien en veillant à ce que les prévenus soient détenus lorsque la sécurité publique le justifie.

Le comité a entendu des témoignages expliquant que le projet de loi contient des mesures ciblées censées répondre aux préoccupations soulevées par les forces de l’ordre de partout au pays, ainsi qu’aux demandes des 13 premiers ministres provinciaux et territoriaux, qui souhaitent voir les dispositions relatives à l’inversion du fardeau de la preuve s’appliquer à certaines infractions supplémentaires, comme l’indique la lettre que ces derniers ont cosignée en janvier dernier.

(1610)

En revanche, certains témoins ont mis en doute l’efficacité éventuelle des modifications proposées, en faisant valoir que les procureurs peuvent déjà plaider que la détention d’un prévenu est justifiée, y compris pour des motifs de sécurité publique.

Certains témoins ont déclaré que le projet de loi n’entraïnerait pas une diminution des crimes violents, parce qu’il ne s’attaque pas à leurs causes profondes, et qu’il est essentiel d’investir dans de nombreux domaines utiles.

Cela m’amène au premier amendement que le comité a adopté. Certains témoins ont recommandé de supprimer une modification que le projet de loi propose pour élargir la disposition inversant le fardeau de preuve en matière de mise en liberté sous caution afin qu’elle s’applique à un prévenu ayant déjà obtenu une absolution inconditionnelle ou sous conditions pour une infraction antérieure impliquant de la violence contre un partenaire intime. Il s’agit de l’une des dispositions qui renverseraient le fardeau de la preuve. Les témoins ont soutenu que cette mesure ciblerait et criminaliserait indûment les survivants de violence entre partenaires intimes, car il arrive souvent qu’il y ait un recoupement important entre les auteurs et les survivants de ce type de violence. En quelque sorte, la disposition d’inversion du fardeau de la preuve a tendance à toucher des personnes relativement vulnérables. D’autres parties, incluant les gouvernements provinciaux et territoriaux, ont appuyé le projet de loi dans sa forme actuelle, y voyant un moyen de protéger les survivants de la violence entre partenaires intimes.

Le comité a étudié et a adopté un amendement visant à supprimer la disposition relative à l’inversion du fardeau la preuve dans les cas de libération et de violence contre un partenaire intime. Il a été adopté avec dissidence, même si je pense que cette façon de le dire est correcte uniquement en raison d’un détail de procédure. La sénatrice Batters m’a fait remarquer qu’il y a eu un vote par appel nominal et que le vote a été de 8 à 5.

Troisièmement, le rapport résume ce que le comité a entendu au sujet des répercussions du projet de loi C‑48 sur les communautés autochtones, racisées et marginalisées. Certains témoins ont dit craindre que les modifications proposées se traduisent par des contestations prolongées lors des audiences sur le cautionnement, une augmentation des demandes d’aide juridique, ainsi qu’une augmentation des délais de libération sous caution et des périodes de détention, ce qui exacerberait les retards actuels dans le système de mise en liberté sous caution. Certains témoins ont prévenu que ces effets négatifs toucheraient de façon disproportionnée les groupes autochtones, racisés et marginalisés, qui sont déjà surreprésentés dans le système judiciaire et désavantagés lorsqu’il s’agit d’obtenir une mise en liberté sous caution.

Tout cela a amené le comité à examiner et à adopter un amendement proposé, en l’occurrence, par la sénatrice Clement. Cet amendement exige que les juges tiennent davantage compte de la situation des personnes vulnérables dans leurs décisions en matière de mise en liberté sous caution. Le comité a amendé l’article 1 du projet de loi C‑48 afin d’exiger qu’un juge qui préside une enquête sur le cautionnement explique, dans le compte rendu des délibérations, comment il a procédé pour déterminer si une personne faisait partie d’une des catégories de personnes visées à l’article 493.2 qui méritaient une attention particulière — les Autochtones ou les personnes autrement vulnérables — et, le cas échéant, comment le juge a appliqué sa pensée à la question de la mise en liberté avant procès.

La quatrième de mes observations, qui tirent à leur fin, porte sur la proposition de prévoir un examen quinquennal sur les effets du projet de loi C‑48. Comme on l’a indiqué dans cette enceinte et au comité, il est étrange que l’article 2 de ce projet de loi prévoie uniquement un examen quinquennal effectué par le Comité de la justice et des droits de la personne. C’est peut-être un oubli. Ce n’est pas la question la plus importante à régler, car le Sénat est habilité à lancer une telle étude sans mandat législatif de l’autre endroit, mais le comité a quand même donné son avis et souligné cette lacune. Il a présenté un amendement qui, selon mon souvenir, a été adopté à l’unanimité afin que l’examen par un comité du Sénat — probablement le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles — soit inclus à l’article 2 du projet de loi C‑48, qui porte sur l’examen quinquennal.

Enfin, je vais souligner les quatre thèmes qui ressortent des observations du comité.

J’aimerais d’abord parler d’un aspect que j’ai déjà mentionné, soit la nécessité d’apporter des réformes pour permettre la collecte de données exhaustives sur la mise en liberté sous caution au Canada. Il est décourageant que les données soient aussi fragmentaires, et ce n’est pas une priorité, mais pour la personne qui doit attendre la tenue de son procès en prison, c’est fichtrement important.

Deuxièmement, j’aimerais parler de la violence fondée sur le sexe et de la violence à l’égard des femmes. Il y a une observation disant que, de façon générale, il faut se pencher de façon prioritaire sur les facteurs de vulnérabilité entourant la violence fondée sur le sexe, comme on l’a indiqué dans des rapports précédents.

Troisièmement, le fait est qu’il s’agit d’un sujet idéal que la Commission du droit du Canada devrait examiner dans le cadre de son étude du droit criminel. Le Code criminel a été modifié au coup par coup, parfois par le Sénat, pendant des décennies et il ne fait aucun doute que certaines dispositions lourdes, répétitives ou incohérentes doivent être complètement remaniées.

Le dernier point est le besoin de réaliser une analyse comparative entre les sexes plus. Je pense qu’il est juste de dire que le comité continue d’éprouver de la frustration à l’égard du gouvernement puisqu’il tarde à fournir des renseignements au sujet de l’analyse comparative entre les sexes. Ce fut également le cas pour le projet de loi. Nous n’avons reçu cette information que quelques jours avant l’étude article par article et je pense qu’il est juste de dire que le comité a été déçu de ne pas recevoir l’information avant d’entendre le témoignage du ministre. Pour mener une étude sérieuse et complète d’un projet de loi d’initiative ministérielle, le comité doit avoir accès à cette analyse en temps opportun. Le résultat, c’est que le comité exhorte le gouvernement fédéral à fournir en temps opportun l’information liée à l’analyse comparative entre les sexes plus lorsque le projet de loi lui est renvoyé, à défaut de quoi, le comité peut retarder l’étude du projet de loi jusqu’à ce qu’il reçoive cette information.

Je tiens à remercier les membres et le personnel du comité pour leur appui tout au long des travaux du comité sur le projet de loi. C’est une situation inhabituelle où nous avons rempli à la fois le rôle de la chambre du premier examen objectif et du second examen objectif du projet de loi.

Merci.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Français]

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi modifié pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Gold, la troisième lecture du projet de loi modifié est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

Projet de loi visant à protéger les merveilles naturelles du Canada

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Sorensen, appuyée par l’honorable sénatrice Audette, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-14, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux du Canada, la Loi sur les aires marines nationales de conservation du Canada, la Loi sur le parc urbain national de la Rouge et le Règlement sur la pêche dans les parcs nationaux du Canada.

L’honorable Dennis Glen Patterson : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui sur le projet de loi S‑14, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux du Canada, la Loi sur les aires marines nationales de conservation du Canada, la Loi sur le parc urbain national de la Rouge et le Règlement sur la pêche dans les parcs nationaux du Canada.

Ce projet de loi vise à apporter des modifications à diverses lois relatives aux parcs nationaux et aux aires de conservation, et à créer un parc national au Labrador — le Nunatsiavut —, ainsi que l’aire marine nationale de conservation Tallurutiup Imanga au Nunavut.

Je suis certain que personne ne sera surpris d’apprendre que mes observations porteront principalement sur les dispositions qui concernent mon territoire, le Nunavut.

Depuis les années 1960, les Inuits de l’Extrême‑Arctique, une région de ce qui est aujourd’hui le Nunavut, demandent la création d’une aire marine protégée dans le détroit de Lancaster. En 2010, le gouvernement de l’époque a présenté une première proposition. L’aire proposée excluait la zone dans laquelle Shell Canada détenait des concessions pétrolières et gazières. En 2016, Shell Canada a abandonné ses concessions et, en 2017, Parcs Canada, le gouvernement du Nunavut et la Qikiqtani Inuit Association ont signé une entente de principe en vue de créer l’aire marine Tallurutiup Imanga.

(1620)

Par la suite, il y a eu une approche pangouvernementale largement acclamée visant à définir les avantages pour les Inuits et un plan de gestion qui a abouti à une entente sur les répercussions et les avantages pour les Inuits, signée le 1er août 2019. Une telle entente est nécessaire pour tout changement important touchant les terres appartenant aux Inuits au Nunavut.

L’Entente sur les répercussions et les avantages pour les Inuits définit les droits, les rôles et les responsabilités des signataires en ce qui concerne Tallurutiup Imanga et comprend, sans s’y limiter, des dispositions fondamentales concernant l’utilisation continue par les Inuits de la région et l’accès à celle-ci pour des activités traditionnelles; l’intendance inuite de la région; la clarification des rôles des comités communautaires de gestion des terres et des ressources, des villages et des organisations de chasseurs et de trappeurs ainsi que l’établissement de mécanismes importants comme le Conseil Aulattiqatigiit. Le Conseil aulattiqatigiit revêt une importance particulière, car il est composé de représentants d’organismes inuits et du gouvernement du Canada. À cet égard, l’Entente sur les répercussions et les avantages dit précisément ceci :

[Les parties] travaillent ensemble pour parvenir à des décisions consensuelles par l’entremise du processus décrit dans la présente entente et visant à orienter la gestion de l’AMNC Tallurutiup Imanga [...]

Malheureusement, nous voici, quatre ans plus tard, et le conseil n’a pas été capable d’élaborer un plan directeur provisoire pour une zone protégée qui englobe un territoire énorme de 109 000 kilomètres carrés. En fait, chers collègues, j’attire votre attention sur l’article 25, qui indique que l’article 18, qui porte sur le tracé des frontières de l’aire marine Tallurutiup Imanga, contient une disposition d’entrée en vigueur différée. Il se lit comme suit :

L’article 18 entre en vigueur à la date de publication dans la Gazette du Canada d’un avis indiquant qu’un plan directeur provisoire pour l’aire marine nationale de conservation Tallurutiup Imanga a été approuvé par le Conseil Aulattiqatigiit, au sens de l’article 2.‍2 de l’Entente sur les répercussions et les avantages pour les Inuits de l’aire marine nationale de conservation Tallurutiup Imanga signée le 1er août 2019 au nom des Inuits de la région du Qikiqtani au Nunavut et de Sa Majesté la Reine du chef du Canada.

En bref, cet article confirme ce que je viens de signaler au Sénat : jusqu’à maintenant, le conseil a été incapable de résoudre les questions en litige entre les Inuits et le Canada, et, jusqu’à ce qu’elles soient résolues, l’aire marine Tallurutiup Imanga ne sera pas reconnue officiellement par la loi.

Chers collègues, j’aimerais préciser un autre point important. Outre l’Entente sur les répercussions et les avantages pour les Inuits, il y avait plusieurs autres accords parallèles portant sur des avantages additionnels pour les Inuits et les communautés touchées. Selon ces accords, Parcs Canada devait notamment construire des installations polyvalentes devant entre autres comprendre des espaces de bureaux pour la gestion et la surveillance de la région ainsi qu’un endroit pour abriter les appareils de collecte et de surveillance, et offrir la possibilité d’entretenir les appareils de collecte. Les communautés devaient aussi pouvoir y organiser des événements importants pour le transfert des connaissances et des pratiques culturelles.

À l’origine, Parcs Canada a fourni 26 millions de dollars pour construire cinq installations dans cinq communautés différentes, l’Association des Inuits du Qikiqtani acceptant d’assumer les hausses de coûts. Toutefois, personne n’aurait pu prévoir les effets qu’une pandémie mondiale aurait sur les chaînes d’approvisionnement et l’inflation. Cette situation a provoqué une hausse des coûts de l’ordre de 18 millions de dollars, un fardeau particulièrement lourd à faire porter à un organisme inuit régional aux ressources limitées et qui doit composer avec de nombreuses priorités concurrentes et un financement limité. À sa décharge, l’Association des Inuits du Qikiqtani a cherché des moyens de structurer les projets de manière à réduire les coûts d’exploitation et d’entretien, mais il reste malgré tout un déficit de 18 millions de dollars.

Par conséquent, seulement trois des cinq installations prévues sont en cours de construction. Grâce à une entente connexe entre le gouvernement du Nunavut et Transports Canada, on a promis des ports communautaires à Grise Fiord et à Resolute Bay, qui sont actuellement au stade de la conception. Transports Canada discute ouvertement et de façon continue du projet au sein d’un groupe de travail formé de Transports Canada, du gouvernement du Nunavut et de l’Association inuite du Qikiqtani.

Inversement, une entente entre les Inuits et Pêches et Océans Canada promettait des ports pour petits bateaux à Clyde River et à Arctic Bay. Après le processus d’appel d’offres, le ministère a informé l’association que l’estimation des coûts avait changé considérablement en raison de la pandémie et qu’il ne pourrait fournir qu’un seul port pour petits bateaux pour l’instant. Donc, les travaux sont en cours dans le port de Clyde River, mais on ne sait toujours pas quand on pourra relancer un appel d’offres pour le port d’Arctic Bay, si on peut un jour le faire.

Dans le même ordre d’idées, les Inuits ne disposent d’aucune information en ce qui concerne les coûts et les délais liés à ces deux projets. Les requêtes de l’association génèrent la réponse classique que le ministère « cherche des solutions ».

Les Inuits du Qikiqtani s’efforcent d’accroître la participation des Inuits à la gestion des pêches afin d’améliorer les avenues de développement économique pour eux. Les ports pour petits bateaux constituent un pas important pour aider à combler l’important déficit en matière d’infrastructures dans l’Arctique.

Honorables sénateurs, je dirais que ce projet de loi nous donne l’occasion d’examiner une question existentielle relative à l’honneur et au devoir de la Couronne. En effet, l’enjeu porte sur une aire marine de conservation que les Inuits défendent — et ce, depuis des décennies — et nous sommes sur le point de finalement l’enchâsser dans la loi, mais nous ne pouvons pas aller de l’avant tant et aussi longtemps que nous n’aurons pas dénoué l’impasse entre les Inuits et le Canada concernant le plan directeur provisoire.

Le gouvernement a louangé son approche pangouvernementale pour les négociations portant sur l’aire marine nationale de conservation Tallurutiup Imanga. En effet, il suffit de consulter l’article de la CBC publié le 18 août 2017, intitulé : « Le gouvernement fédéral et les Inuits signent une entente de travail sans précédent pour négocier un accord sur les avantages liés au détroit de Lancaster ». Le sous-titre se lisait comme suit :« L’approche pangouvernementale rend le Cabinet fédéral responsable de travailler dans l’unité ».

Si seulement il en avait été ainsi.

Même si la relation entre les Inuits et le gouvernement du Canada s’est améliorée, des frustrations subsistent à propos de l’incohérence des approches en vase clos pour traiter des questions autochtones au sein des divers ministères et même dans différents secteurs au sein d’un même ministère. Par exemple, la direction des affaires législatives de Parcs Canada met en œuvre ce projet de loi, tandis que la direction des politiques est incapable de s’entendre avec les Inuits pour résoudre les principaux problèmes entourant le plan directeur provisoire.

Parcs Canada doit collaborer avec l’organisation inuite pour faire face à l’inflation sans précédent des coûts liés aux installations polyvalentes, afin que l’infrastructure promise devienne réalité. Transports Canada a admirablement travaillé en étroite collaboration avec le gouvernement du Nunavut et les Inuits, de manière ouverte et transparente, pour faire avancer l’aménagement des ports communautaires promis, alors que l’approche et les progrès du ministère des Pêches et des Océans en ce qui concerne les ports pour petits bateaux promis restent entourés de secret.

Je dois faire remarquer que, pendant des décennies, le ministère des Pêches et des Océans a exclu le Nord du Canada — qui possède de loin le plus long littoral du pays — de son programme bien connu des ports pour petits bateaux, qui sert beaucoup de gens sur les côtes Est et Ouest du Canada. Nous assistons enfin à la mise en œuvre de ce programme avec les nouveaux ports pour petits bateaux de Pangnirtung et de Pond Inlet, qui sont les bienvenus.

Le ministère des Pêches et des Océans est au courant des défis et, bien sûr, des coûts de la construction de ports dans des endroits éloignés comme Arctic Bay, qui se trouve sur la côte nord de l’île de Baffin, à 73 degrés de latitude nord.

Je me souviens d’avoir regardé les informations nationales lorsque le premier ministre a annoncé — avec d’autres membres du Cabinet — la création de Tallurutiup Imanga à partir d’Arctic Bay, où une salle communautaire pleine à craquer, remplie de chasseurs, de pêcheurs et de leurs familles, était ravie d’entendre la promesse de l’aménagement du port pour les petits bateaux. Six ans après cette première annonce, le maire, le conseil et la population d’Arctic Bay sont déçus et mécontents et ils me demandent quand ils peuvent s’attendre à ce que soient franchies les premières étapes menant à l’aménagement de leur nouveau port pour petits bateaux.

(1630)

J’estime qu’il est de mon devoir, honorables sénateurs, de faire en sorte que le débat sur ce projet de loi porte aussi sur l’importance pour le gouvernement de remplir la totalité des promesses qu’il a faites lorsque cette aire marine de conservation a été négociée et acceptée. Nous devons veiller à ce que chaque mesure que nous adoptons préserve et maintienne l’honneur de la Couronne et à ce que l’ensemble des ministères concernés s’emploient à remplir les promesses que celle-ci fait aux Inuits.

Je tiens à féliciter la marraine du projet de loi, l’honorable Karen Sorensen. Je crois que c’est le premier qu’elle parraine au Sénat. Sa prononciation des termes inuktitute est impressionnante. Je suis content de me prononcer en faveur du principe du projet de loi, mais je tiens à prévenir sa marraine — car cela fait aussi partie de son travail, comme elle le sait sûrement —, et le gouvernement par son entremise, qu’il y a plusieurs détails à améliorer, notamment au chapitre de la mise en œuvre des promesses. En effet, je lui rappelle que le gouvernement n’a pas tenu toutes les promesses qu’il a faites aux Inuits, alors que ce sont en bonne partie ces promesses qui ont convaincu les Inuits d’appuyer la création de cette énorme aire de conservation dans la région du Nunavut.

Sur ce, honorables sénateurs, j’espère que le projet de loi sera renvoyé bientôt au comité, à qui j’ai clairement fait savoir — du moins je l’espère — que j’aurai des questions à poser au ministre et à la marraine du projet de loi.

Qujannamiik. Merci. Taima.

Des voix : Bravo!

L’honorable Michael L. MacDonald : Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui à titre de porte-parole pour le projet de loi S‑14, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux du Canada, la Loi sur les aires marines nationales de conservation du Canada, la Loi sur le parc urbain national de la Rouge et le Règlement sur la pêche dans les parcs nationaux du Canada, qui a été présenté au Sénat le 19 octobre 2023 par le sénateur Gold, le leader du gouvernement au Sénat.

Chers collègues, nous sommes ici aujourd’hui pour débattre d’un projet de loi qui vise à mettre en œuvre des modifications dans le domaine de la conservation et de la préservation du patrimoine naturel canadien.

Le projet de loi S‑14 modifie la Loi sur les parcs nationaux du Canada pour créer une nouvelle réserve à vocation de parc au Labrador. Il inclut des dispositions précises au sujet de son fonctionnement et de son administration.

Il propose également d’agrandir les limites de pas moins de sept parcs nationaux et d’une réserve à vocation de parc national.

Le projet de loi vise à renforcer les mesures législatives sur les infractions relatives au déversement ou au dépôt de substances nocives dans un parc national ou une réserve à vocation de parc national.

Il changera le nom d’un parc et modifiera la Loi sur les aires marines nationales de conservation du Canada. Cette portion du projet de loi cible la création de l’aire marine nationale de conservation Tallurutiup Imanga, une initiative qui souligne l’importance de préserver nos précieux écosystèmes marins.

Couvrant plus de 108 000 kilomètres carrés, ce parc représentera près de 1,9 % de nos zones de protection marine et constituera un bastion de la biodiversité dans l’Est de l’Arctique canadien. Cette zone n’est pas seulement cruciale pour sa biodiversité unique, mais aussi pour la survie et la subsistance des Inuits de l’Extrême‑Arctique. Décrit comme un moteur écologique, ce parc est bien plus que cela. Il est le cœur de tout un écosystème, une source de vie qui soutient non seulement un large éventail d’espèces marines, mais aussi les communautés humaines qui dépendent de ces eaux.

Enfin, le projet de loi modifie la Loi sur le parc urbain national de la Rouge afin d’imposer des peines plus sévères pour les infractions relatives au déversement ou au dépôt de substances dans ce parc urbain, assurant ainsi sa protection pour les générations futures.

Le gouvernement affirme que ces modifications visent à protéger et à mettre en valeur notre patrimoine naturel et culturel. Les parcs nationaux sont conçus pour préserver les écosystèmes terrestres et aquatiques qui sont représentatifs du Canada, tout en permettant au public d’en profiter et de les utiliser de manière durable.

Quant aux aires marines nationales de conservation, elles protègent les écosystèmes marins tout en favorisant une utilisation durable de leurs ressources sur le plan écologique.

Au-delà de ces objectifs, le gouvernement s’est fixé des cibles de conservation ambitieuses, comme la conservation de 25 % des terres et des eaux canadiennes d’ici 2025, et de 30 % de celles‑ci d’ici 2030. En outre, le but est de créer plusieurs nouveaux parcs nationaux, zones marines et parcs urbains dans les années à venir.

Honorables sénateurs, permettez-moi de me concentrer sur un point essentiel, c’est-à-dire la nécessité de soumettre ce projet de loi à une analyse plus approfondie. Nous sommes confrontés à des enjeux importants qui exigent une réflexion appropriée et éclairée.

Parmi les conséquences qu’il pourrait y avoir à agrandir les limites des parcs, l’une concerne les gens qui habitent à proximité. Certes, bon nombre des agrandissements portent sur des zones où habitent assez peu de gens, mais bon nombre se situent dans des secteurs où des gens, principalement des Autochtones, vont régulièrement chasser et pêcher. Il faut bien tenir compte de ces réalités.

Ajoutons que les parcs nationaux ne sont pas tous situés dans des régions éloignées. J’ai grandi à proximité d’un parc historique national, celui de la forteresse de Louisbourg, du côté ouest du port de Louisbourg. À la fin des années 1920, le gouvernement fédéral a acheté le terrain sur lequel la forteresse se trouvait à l’époque et il a désigné l’endroit « lieu historique national ».

Il n’y avait que quelques maisons sur ce terrain de 60 acres, et on les a fait disparaître. Le site était donc complètement vide, mis à part le charmant musée en pierres et la maison du gardien bâtis par le gouvernement fédéral au début des années 1930. En 1961, le gouvernement Diefenbaker a annoncé qu’il reconstruirait environ le quart de la forteresse d’origine.

Malgré mon jeune âge, j’étais enthousiaste au sujet des projets liés à la forteresse. Comme la famille de ma mère venait de West Louisbourg, j’y étais souvent; j’avais pour habitude de jouer sur les terrains de la forteresse. Les structures à l’épreuve des bombes du château original étaient exposées, et nous nous amusions à y grimper. Les vieilles routes étaient marquées, et certaines fondations d’immeubles importants, comme l’hôpital, avaient été reconstruites au fil des ans. L’idée que ce lieu soit restauré partiellement était évidemment emballante pour la communauté. Les habitants de Louisbourg ont toujours été fiers de l’histoire unique de la ville, et voir la forteresse renaître avait un attrait romantique pour toute la population.

Les travaux de reconstruction effectués du début des années 1960 au début des années 1980 ont généré des retombées économiques considérables pour la ville de Louisbourg et l’ensemble de la collectivité pendant cette période. Des mineurs qui avaient été mis à pied dans des localités comme Glace Bay se sont recyclés pour devenir, entre autres, des maçons, des briqueteurs et des métallurgistes. Pour célébrer la restauration, en 1966, le conseil municipal de Louisbourg a voté pour que l’ancienne appellation française de la ville soit rétablie. Bien des gens se sont bâti une carrière grâce à la reconstruction de la forteresse.

La reconstruction a aussi occupé une place importante dans ma vie personnelle, car, lorsque j’étais à l’université, de 1974 à 1978, j’y ai travaillé en archéologie pendant cinq étés. Évidemment, puisque j’ai toujours aimé l’histoire et que ma ville a une riche histoire, pouvoir travailler à cet endroit tout en demeurant chez moi pendant mes études universitaires était un cadeau formidable.

Cependant, il y avait aussi beaucoup d’inconvénients, certains sur le coup, et d’autres qui sont devenus beaucoup plus évidents avec le temps. Ottawa avait décidé d’exproprier West Louisbourg, une vieille localité principalement catholique irlandaise des années 1760 qui se trouvait à l’extérieur de la ville constituée et qui comprenait le site de la forteresse, tout comme les localités de Kennington Cove et de Deep Cove, le long de la côte atlantique vers l’ouest jusqu’à Gabarus, soit une distance d’environ huit milles.

Au total, lorsque les bureaucrates ont eu terminé, plus de 16 000 acres à l’ouest de la ville constituée ont finalement été expropriés par l’autorité fédérale. Toutes les maisons ont été enlevées et tous les habitants ont été chassés, et la charmante vieille église Stella Maris à West Louisbourg — qui se trouvait juste en face de la maison de mon grand-père Kehoe, où des générations de membres de la famille de ma mère étaient allées et où tous mes frères et sœurs et moi-même avons été baptisés — a été démolie par le gouvernement. Ce fut un jour très triste. Lorsque les gens demandent maintenant pourquoi on a ont dû démolir l’église, qui est loin du site de la forteresse et n’aurait jamais dû être détruite, on ne peut que conclure qu’elle devait bloquer la vue d’Ottawa sur la forteresse.

Beaucoup de gens ne voulaient pas déménager, mais Ottawa était déterminé à exproprier un territoire beaucoup plus vaste que ce qui était nécessaire pour la reconstruction. Les gens du coin n’étaient qu’un groupe de villageois et de campagnards qui ne disposaient d’aucun moyen de pression et qui ont fini par se plier aux ordres des autorités. Certains ont tenté de les contester, mais la plupart ont acquiescé et tenté de voir le positif dans tout cela.

Cela dit, le grand avantage stratégique historique de Louisbourg a toujours été d’être un port de mer actif. La majeure partie de ce qu’on appelle aujourd’hui la « région industrielle du Cap‑Breton » est surtout située autour ou près du havre de Sydney et de ses nombreuses collectivités, sur la côte nord-est de l’île, là où le détroit de Cabot pénètre dans le golfe du Saint‑Laurent.

Louisbourg elle-même est située loin de la région industrielle du Cap‑Breton, sur la côte sud-est du Cap‑Breton, sur l’océan Atlantique. C’est Louis XV et ses conseillers qui avaient choisi l’emplacement de la forteresse en raison de l’absence de glace dans le port en hiver — une caractéristique qui distingue l’endroit de la partie de l’île qui se trouve du côté du détroit de Cabot. Cette caractéristique a gardé son importance jusque dans les années 1950. Louisbourg a été le port de commerce d’hiver pour tout le secteur industriel du Cap‑Breton à partir de la fin des années 1890 — pour l’expédition de charbon et d’acier et l’arrivée de minerai de fer. Le reste des industries du Cap‑Breton n’était relié que par le chemin de fer. L’ère industrielle arrivait à sa fin, mais la forteresse donnait un sentiment de stabilité.

(1640)

Toutefois, à la fin des années 1980, alors que la reconstruction était terminée depuis longtemps, la population a commencé à s’atrophier de façon appréciable. Le nombre d’habitants a chuté et différents services ont disparu. Il y avait auparavant quatre stations‑service; il n’y en a plus aucune. La coopérative de crédit est partie depuis longtemps et la banque vient de fermer ses portes. Puis, il y a l’école secondaire de deuxième cycle qui a disparu, suivie de l’école secondaire de premier cycle et, aujourd’hui, il n’y a plus d’école du tout. La corporation municipale a été dissoute en 1994. Il n’y a plus de pharmacie, plus de médecin et plus grand‑chose d’ailleurs, à part pendant la saison touristique.

Pourquoi la ville a-t-elle commencé à perdre de sa vitalité? C’est vrai que beaucoup de petites villes du Canada sont en déclin, et c’est peut-être ce qui s’est passé chez nous aussi, mais le plus gros problème, c’est qu’en expropriant les terres à l’ouest de Louisbourg, le gouvernement fédéral a coupé le seul accès à la ville par l’ouest, c’est-à-dire par la route de Gabarus. Cette route, que les habitants du coin surnomment « la vieille route des Français », est la plus ancienne de l’île du Cap‑Breton. Il est maintenant impossible de traverser la ville. Tous les services qu’on s’attend généralement à voir dans une ville normale ont disparu parce que la demande était insuffisante en dehors de la saison touristique.

Le vieux port de mer est devenu de facto un petit port isolé, une impasse, un cul-de-sac. Impossible d’entrer en ville à l’ouest en passant par la côte. Tous les visiteurs doivent maintenant passer par le secteur industriel de Cap-Breton et rebrousser chemin vers Louisbourg.

C’est un avertissement que je vous sers. Si je raconte cette histoire, c’est parce c’est celle d’une expropriation qui n’a été précédée d’aucune consultation et qui a eu de graves conséquences imprévues. Je m’offusque — et je ne suis pas le seul — de voir la manière dont ma ville a été défigurée par cette vaste expropriation. Les dégâts sont immenses, et c’est d’autant plus dommage que la plupart d’entre eux auraient pu être évités. Tout ce qu’il fallait, c’était de laisser la route de Gabarus ouverte et la laisser traverser le parc.

J’attire l’attention du Sénat sur la saga de Louisbourg parce que je suis conscient des effets qu’une expropriation massive sans consultation appropriée peut avoir sur les collectivités. Toutefois, cela ne signifie pas que je ne suis pas relativement favorable aux objectifs énoncés dans le projet de loi, car je suis très favorable aux objectifs du projet de loi. Cependant, assurons-nous que les consultations ne soient pas une simple formalité, mais plutôt un dialogue authentique, respectueux et constructif avec toutes les collectivités touchées par les changements proposés.

Il y a des intérêts nationaux importants à prendre en compte. Nos parcs nationaux et nos réserves naturelles bordent souvent des zones d’activités de production d’énergie. Les décisions liées à la gestion et à l’agrandissement de ces zones protégées peuvent avoir un effet considérable sur l’accès aux ressources et les méthodes d’exploitation de l’énergie. Des consultations approfondies auprès de ce secteur permettent non seulement d’anticiper et de gérer les répercussions économiques, mais aussi d’innover pour trouver des solutions plus durables et plus respectueuses de l’environnement.

Le tourisme, quant à lui, profite directement de la beauté et de l’intégrité de nos espaces naturels. Les réserves et les parcs nationaux constituent des attractions importantes pour les touristes nationaux et internationaux. Il est essentiel d’évaluer les répercussions de nos décisions sur ce secteur, tant sur le plan des recettes que sur le plan de la qualité et de la viabilité de l’offre touristique.

Les secteurs de l’énergie et du tourisme sont importants pour le Canada et l’économie. Chaque modification que nous apportons à la gestion des parcs peut avoir des répercussions sur ces secteurs. Il est impératif de veiller à ce que tous les intervenants aient été consultés et les retombées économiques, rigoureusement évaluées.

En outre, alors que notre pays poursuit des objectifs de conservation ambitieux, nous devons également tenir compte des coûts financiers et humains liés à ces projets. Il faut des ressources pour mettre en œuvre ces nouveaux règlements et gérer de nouvelles réserves et de nouveaux parcs. Avons-nous un plan concret pour gérer tout cela? Nous ne pouvons pas nous permettre de prendre des décisions hâtives. Il est de notre devoir d’examiner en profondeur le projet de loi au comité pour assurer le bien-être de notre patrimoine, des citoyens et des générations futures.

Honorables sénateurs, chacun de nous peut témoigner de la splendeur géographique de notre pays. Nous sommes privilégiés au Canada d’être entourés de parcs nationaux d’une beauté époustouflante. Protéger ces espaces est plus qu’une responsabilité : c’est un devoir envers notre patrimoine, ainsi qu’un héritage que nous devons léguer intact aux générations futures.

J’exhorte le Sénat à renvoyer le projet de loi au comité le plus tôt possible afin que nous puissions l’étudier comme il se doit le plus rapidement possible. Chers collègues, je vous remercie de votre temps et de votre attention.

Des voix : Bravo!

L’honorable Mary Jane McCallum : Sénateur MacDonald, je vous remercie de votre discours. Je ne sais pas si vous vous rendez compte à quel point ce que vous avez raconté reflète ce qui est arrivé aux Premières Nations tout au long de l’histoire du Canada. Vous avez dit qu’il s’agissait d’une mise en garde au sujet de l’expropriation sans consultation et de l’expropriation massive de terres. Cela est arrivé à différentes personnes. Je veux que les sénateurs se souviennent que nous avons vécu du colonialisme et de la colonisation par le passé. Je veux que les sénateurs se souviennent que ce pour quoi nous nous battons est vrai et que nous aimerions que nos problèmes soient reconnus.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Une voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice LaBoucane-Benson, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles.)

Le discours du Trône

Motion d’adoption de l’Adresse en réponse—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Gold, c.p., appuyée par l’honorable sénatrice LaBoucane-Benson,

Que l’Adresse, dont le texte suit, soit présentée à Son Excellence la gouverneure générale du Canada :

À Son Excellence la très honorable Mary May Simon, chancelière et compagnon principal de l’Ordre du Canada, chancelière et commandeure de l’Ordre du mérite militaire, chancelière et commandeure de l’Ordre du mérite des corps policiers, gouverneure générale et commandante en chef du Canada.

QU’IL PLAISE À VOTRE EXCELLENCE :

Nous, sujets très dévoués et fidèles de Sa Majesté, le Sénat du Canada, assemblé en Parlement, prions respectueusement Votre Excellence d’agréer nos humbles remerciements pour le gracieux discours qu’elle a adressé aux deux Chambres du Parlement.

L’honorable David M. Arnot : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour répondre au discours du Trône, dans l’esprit de la longue tradition d’un discours inaugural.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Arnot : Comme je suis ici depuis deux ans, je ne suis plus un « nouveau » sénateur. Si j’ai attendu jusqu’à aujourd’hui, c’est en partie en raison de mon cheminement professionnel en tant qu’avocat, juge, commissaire aux traités et commissaire aux droits de la personne. Je préfère prendre le temps nécessaire afin de bien comprendre les faits et de les soupeser soigneusement avant de rendre un jugement ou une décision.

Chers collègues, je peux affirmer que même après deux années au Sénat, je ne peux offrir qu’un commentaire préliminaire — un rapport présentenciel, si vous préférez. Ce commentaire est en grande partie fondé sur ce que vous, chers collègues, et de nombreux autres Canadiens sages, éloquents et passionnés m’avez appris afin de m’aider à façonner ma vision du monde. Il s’agissait parfois de membres de ma famille, d’amis et de parlementaires, et parfois d’enseignants, d’éducateurs et d’aînés.

Les aînés m’ont appris une chose en particulier. Lorsqu’on se présente, il est utile de parler aux gens de notre lieu de naissance, de notre famille et de l’endroit où nous avons grandi afin de leur donner une idée de nos liens.

(1650)

Ma principale prétention à la célébrité découle probablement du fait que mon grand-père a joué au football pour les Roughriders de la Saskatchewan pendant 10 ans, de 1919 à 1929. Il a joué dans trois matchs de la coupe Grey.

En 1984, il était, à ce moment-là, le plus vieux des anciens joueurs des Roughriders toujours en vie, et le journal Leader-Post de Regina l’a interviewé. On lui a demandé ce qu’il n’aimait pas du jeu moderne par rapport aux règles sous lesquelles il avait joué. Il a répondu : « l’invention de la passe avant ». Cette règle permet à un joueur, lorsqu’il est derrière la ligne de mêlée, de lancer le ballon à un coéquipier placé plus près de la ligne des buts. L’objectif est d’augmenter les chances qu’il y ait un touché. Il s’agit, si l’on veut, d’un raccourci vers la victoire.

Bien que j’aie de l’admiration pour la Ligue canadienne de football, et assurément pour les Roughriders de la Saskatchewan, j’ai recherché le succès dans le domaine du droit. En 1972, ma mère se vantait fièrement à ma grand-mère du fait que j’avais été admis à la Faculté de droit. Ma grand-mère, cependant, n’était pas du tout impressionnée. En fait, elle était très contrariée. Elle était très préoccupée, non pas parce que j’allais peut-être devenir avocat, mais parce que j’allais peut-être devenir politicien.

Près de 50 ans plus tard, en juillet 2021, ses pires craintes se sont réalisées, lorsque j’ai eu l’honneur de me joindre au Sénat du Canada après avoir reçu un appel du premier ministre.

Même si je ne le saurai jamais, je crois que les craintes qu’elle entretenait pour la chose politique s’estomperaient en voyant la compagnie dans laquelle je me trouve, la vôtre, honorables sénateurs, et en sachant que nous sommes là pour représenter les régions, les provinces, les territoires, les villes, les villages, les citoyens, mais surtout, les groupes minoritaires, qu’on nous confie la supervision de bon nombre des plus grandes décisions qui se prennent dans notre pays et que nous prenons ces décisions au nom des Canadiens en mettant notre expertise en commun et en tirant parti des connaissances des autres.

Il y a des années, un collègue juge m’a mis au défi de mieux comprendre les peuples et les communautés autochtones. Il m’a demandé d’assister à une cérémonie de la suerie près de ce qui s’appelait alors Hobbema, en Alberta. C’était la première fois que je mettais les pieds dans une hutte de sudation. L’aîné m’a regardé et m’a dit qu’il réservait toujours les pierres les plus chaudes pour les juges. Je l’ai cru.

À la fin, je lui ai demandé de m’aider à tisser des liens avec les Premières Nations des environs de Battlefords. Il a écrit un nom et un numéro de téléphone au dos d’un carton d’allumettes en me disant d’appeler l’homme en question en rentrant chez moi. J’ai finalement attendu une semaine avant de l’appeler, le temps que je trouve le courage de décrocher le téléphone. Quand mon interlocuteur a répondu, je lui ai dit : « Bonjour, je suis le juge responsable de la région. J’aimerais vous parler de ce qui se passe dans le système de justice. » Il m’a dit : « Oh, je sais qui vous êtes. Nous attendons votre appel depuis plus d’une centaine d’années. » Il était sérieux.

Cet appel a été pour moi un véritable catalyseur. Il a changé la trajectoire de ma carrière et de ma vie. J’ai ressenti un profond désir de travailler avec des dirigeants, des communautés et des personnes autochtones.

J’ai eu la chance d’apprendre deux choses importantes en faisant ce travail. J’ai appris, premièrement, qu’il existait plus d’une vision du monde et que je devais comprendre celle des peuples autochtones. Deuxièmement, je me suis rendu compte que mon éducation était très incomplète. L’éducation doit être acquise dans un système d’enseignement formel, par l’histoire orale et par des expériences vécues.

Je soupçonne que ceux d’entre vous qui m’ont entendu parler du pouvoir de l’éducation, des droits issus des traités, des droits des Autochtones, des droits de la personne et de la citoyenneté se demandent pourquoi je suis si déterminé et si passionné quand il est question de ces enjeux. La réponse se trouve en partie à la croisée de deux visions du monde, celle de la politique et celle que m’inspirent l’histoire et la vie de J.K. McInnis, mon arrière-grand-père. Il était un politicien, un éducateur, un promoteur immobilier et un journaliste. Il était propriétaire du Regina Standard, un quotidien. Il a été le douzième maire de la Ville de Regina et également conseiller municipal pendant de nombreuses années.

Il s’est présenté dans Assiniboia-Ouest pour les élections fédérales de 1896. Il y a eu égalité des votes entre lui et son adversaire. À l’époque, la pratique voulait que le directeur du scrutin rompe l’égalité avec son vote. Il a ainsi voté pour l’autre candidat, un dénommé Nicholas Flood Davin. Cet avocat originaire de l’Irlande était propriétaire d’un journal rival à Regina, le Leader. M. Davin est plus tard devenu l’un des architectes clés du système des pensionnats autochtones, un système qui privilégiait l’assimilation plutôt que l’intégration, les priorités d’une vision du monde plutôt qu’une autre, et un mépris de la mosaïque culturelle qui rend le Canada si unique sur la scène mondiale de nos jours.

Certes, il a été dit que le Canada est l’expérience de pluralisme la plus réussie que le monde ait jamais connue. Cependant, le succès de la société pluraliste, multiethnique, multiconfessionnelle et multiculturelle du Canada est fragile. Cette fragilité est directement liée aux connaissances, à la compréhension et à l’engagement des Canadiens à l’égard de la démocratie, des institutions démocratiques et de la nécessité d’un engagement soutenu et actif à l’égard des responsabilités inhérentes à la citoyenneté.

J’ai été et je reste ému et honoré d’avoir été convoqué pour soutenir la démocratie et les droits des Canadiens. Je suis tout à fait conscient de l’énorme responsabilité et de l’engagement envers mes concitoyens canadiens et envers vous, mes collègues sénateurs. J’ai relevé le défi de faire partie d’une nouvelle culture au Sénat : être non partisan et indépendant, libre de prendre des décisions fondées sur ce que je considère être dans l’intérêt du Canada et dénuées de considérations politiques, et voter selon mon expérience et ma conscience.

En tant que juge, j’ai joui de l’indépendance judiciaire, un outil solide et essentiel, défini comme un principe fondamental du système judiciaire dans le maintien de la primauté du droit. Je suis un défenseur inébranlable de cette indépendance. Le XXe siècle et le XXIe siècle regorgent d’exemples de ce qui se produit lorsque la primauté du droit et l’indépendance judiciaire sont altérées, voire supprimées : on assiste alors à des bouleversements sociaux, au chaos économique, à des guerres et à des pertes de millions de vies humaines.

La réaction du monde à l’Holocauste se reflète dans la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. C’était la première fois de l’histoire qu’on reconnaissait les droits de tous les êtres humains. C’était il y a 75 ans seulement. Ce document sert de fondement à la Charte canadienne des droits et libertés, aux divers codes sur les droits de la personne au Canada et à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Je suis fier de dire que la première loi sur les droits de la personne en Amérique du Nord est la Déclaration des droits de la Saskatchewan, adoptée en 1947 et créée par Morris Shumiatcher et Tommy Douglas.

Tout comme la primauté du droit et l’indépendance judiciaire, les droits de la personne, les droits issus de traités et les droits des Autochtones ne sont pas et ne doivent jamais être sujets à des compromis. La capacité que nous avons d’agir indépendamment du gouvernement en tant que sénateurs et en tant que Chambre de second examen objectif ne doit pas être sujette à des compromis.

Les droits qu’ont les Canadiens en tant que citoyens et êtres humains demeurent forts grâce à la force de nos institutions. La force de nos institutions repose sur des gens intègres qui défendent sans relâche les principes d’équité, de justice et de vérité. Ces principes ne doivent pas être sujets à des compromis.

La neutralité est parfois incluse dans cette liste de qualités. Elle est essentielle au rôle du pouvoir judiciaire ainsi qu’au travail des sénateurs, qui doivent entendre des témoins, soupeser les témoignages et décider de la teneur du rapport.

Toutefois, une mise en garde s’impose. Je crois qu’en tant que sénateurs, nous ne devons pas faire de compromis sur notre responsabilité de défendre les droits des groupes minoritaires. Le Sénat ne doit pas succomber à la tyrannie de la majorité, ce qui signifie que nous avons un parti pris dans le respect de la Constitution, de la Charte et des droits de la personne. Il s’agit d’un parti pris dans le respect de la primauté du droit et de notre engagement à l’égard de la vérité et de la justice. C’est dans cette optique que nous demandons au Sénat de toujours, sans exception et avec les partis pris exigés de nos positions, demander des comptes au gouvernement en place et améliorer toutes les mesures législatives qu’on nous demande d’évaluer, afin de renforcer nos institutions démocratiques.

Il existe un vieux concept en common law qui, je crois, s’applique à notre travail. Il faut agir conformément à l’honneur de la Couronne. J’ai écrit à propos de l’honneur de la Couronne et j’en ai parlé à de nombreux auditoires, étudiants, universitaires, avocats, juges, chefs, aînés et décideurs. L’honneur de la Couronne est un principe et une convention qui exigent que, dans chacun de leurs actes et chacune de leurs décisions, les femmes et les hommes qui représentent la Couronne au Canada se comportent comme si leur honneur personnel et la réputation de leur famille en dépendaient.

(1700)

Je précise que je parle des personnes au sein des organes législatif et exécutif du gouvernement, car elles sont responsables des actes de la Couronne. Je sais que certains considèrent l’honneur de la Couronne comme étant un vestige d’une époque révolue, un anachronisme dont on ne doit pas tenir compte. Chers collègues, je ne suis pas de cet avis. Les principes de l’honneur de la Couronne exigent que les sénateurs et les Canadiens qui évoluent dans une société démocratique mature agissent conformément aux principes et aux normes morales les plus strictes. Surtout, peut-être, il est impératif que nos paroles et nos actes soient honorables et dignes de l’approbation de ma grand-mère. Même si mon grand-père et moi avons des opinions divergentes concernant les mérites de la passe avant, je suis conscient qu’il n’y a pas de passe avant rapide dans notre travail. On ne peut atteindre la réussite en empruntant des raccourcis pour nous défiler de nos responsabilités envers la prochaine génération.

En réfléchissant à l’avenir, je me souviens des propos tenus par le chef Mistawasis pendant des négociations du Traité no 6 qui se sont déroulées à Fort Carlton, en 1876, à quelques kilomètres seulement au nord de l’emplacement actuel de Saskatoon. Il était le chef principal. Il comprenait réellement le pouvoir de l’éducation. Il en parlait et le faisait valoir. Ses paroles, que voici, reflètent sa vision du monde. Il a dit :

Ce dont nous parlons et ce que nous faisons aujourd’hui durera aussi longtemps que le soleil brillera et que les rivières couleront, et nous avons à l’esprit nos petit-enfants [...]

Chers collègues, protéger notre démocratie exige de faire preuve d’une vigilance constante. Je suis fier d’être à vos côtés, chers collègues du Sénat, pour assurer l’avenir de notre pays et faire du Canada un endroit meilleur pour nos petits-enfants. Je vous remercie. Kinanâskomitinâwâw.

L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, tout d’abord, je voudrais féliciter le sénateur Arnot pour son premier discours au Sénat sur le discours du Trône. Je suis certain que ses connaissances et son expérience profiteront grandement à cette institution.

J’aimerais moi aussi vous faire part de mes réflexions sur le discours du Trône, un outil important pour les parlementaires. C’est dans le discours du Trône que la Couronne, c’est-à-dire le gouvernement, définit ses orientations, sa stratégie et ses objectifs. Bien entendu, il nous incombe d’examiner soigneusement ce document et, pour bon nombre d’entre nous qui avons à cœur de demander des comptes au gouvernement, d’exprimer notre point de vue.

Ainsi, à mon avis, si nous examinons le discours du Trône et la législature actuelle, force est de constater que le gouvernement a échoué sur tous les plans. Je pense qu’en réalité, en tant que parlementaires, nous avons l’obligation de mettre en lumière les échecs du gouvernement et d’exiger qu’il fasse mieux son travail. Si nous examinons les engagements du gouvernement en matière de responsabilité financière, nous constatons que celui-ci n’a pas respecté les engagements qu’il a pris dans le cadre de plusieurs discours du Trône, à commencer par le premier qu’il a présenté en 2015, et dans lequel il promettait un retour à l’équilibre budgétaire avant la fin de son premier mandat. Bien entendu, après les trois derniers discours du Trône, le plus récent fait complètement abstraction de toute responsabilité financière. Je suppose que, d’une certaine manière, le gouvernement a tenu promesse à cet égard.

Il a aussi dit, dans le discours du Trône, que le monde a besoin du Canada. Bien sûr, chers collègues, si nous examinons de près la situation du pays dans le dossier de la politique étrangère, que l’on pense à nos opérations en Afghanistan ou à la façon dont nous traitons la question du Corps des Gardiens de la révolution islamique, nous pouvons probablement dire que le Canada ne s’est jamais fait aussi discret sur la scène internationale. En ce qui concerne les capacités en matière de défense et de maintien de la paix, le Canada, qui était autrefois un grand pays, n’a plus les ressources qu’il a déjà eues dans le monde.

Bien sûr, il nous incombe de demander des comptes au gouvernement. Nous avons des comités, nous menons des études et, plus important encore, nous votons sur les projets de loi du gouvernement, qui se fondent sur le discours du Trône. Lorsque nous constatons que l’exécutif présente des mesures qui ne sont pas conformes à ses objectifs et qu’il n’atteint pas ses buts, nous avons l’obligation, selon moi, de les dénoncer, voire de voter contre.

Je voudrais en venir à un point particulier. Je ne souhaite pas prendre beaucoup de temps parce que je sais que vous connaissez mon opinion sur le gouvernement actuel et sur son bilan. Ses multiples échecs sont bien connus, et ils se reflètent par sa chute libre dans les sondages. Nous voyons ce que les Canadiens pensent du gouvernement. Revenons au discours du Trône. Il repose sur deux pierres angulaires. Nous savons maintenant comment le gouvernement va procéder. Comme il s’était engagé à le faire dans le discours du Trône, il a instauré une taxe sur le carbone, soutenant qu’elle ferait disparaître toute la pollution environnementale, qu’elle serait le catalyseur qui ferait du Canada un chef de file mondial dans la lutte contre la pollution et qu’elle ferait de nous des leaders en matière de changements climatiques et de défis environnementaux.

Bien sûr, la taxe sur le carbone a aussi frappé de plein fouet les Canadiens de la classe moyenne, et ce, à l’échelle du pays. Le sénateur Carignan a donné quelques statistiques sur le nombre de Canadiens qui font la queue aux banques alimentaires. Nous n’avions jamais vu cela auparavant. Cette situation est attribuable en grande partie à la taxe sur le carbone.

Les sénateurs de l’opposition qui sont partisans, ne souscrivent pas à cette politique publique et participent au débat sur la question, sont d’avis que la taxe ne remplit aucun objectif environnemental. Cette taxe ne fait qu’appauvrir les Canadiens, tout en faisant grimper l’inflation.

À mon grand étonnement, une autre promesse faite dans le discours du Trône vient d’être rompue il y a à peine quelques minutes. Le premier ministre Trudeau a décidé d’aller dans le Canada atlantique pour annoncer — je l’apprendrai peut-être à bon nombre d’entre vous — qu’il a décidé de suspendre l’application de la taxe sur le carbone sur le chauffage domestique. Félicitations, sénateur Gold. Cela fait des mois que nous posons des questions et que nous donnons de bons conseils et, enfin, quelqu’un au Cabinet du premier ministre a suivi nos conseils. Félicitations.

Cela ne me dérange pas trop que cette promesse ait été rompue. Je pense que c’est un bon début. Je ne pense vraiment pas que ce soit suffisant, parce que le secteur agricole canadien est toujours malmené par la taxe sur le carbone dont on sent les effets chaque fois qu’on se rend à l’épicerie pour acheter de la nourriture. La classe moyenne et les Canadiens démunis qui travaillent fort pour en faire partie — c’est une phrase tirée du discours du Trône — n’atteindront jamais leur objectif si nous continuons de les malmener parce que nous cherchons à sauver l’environnement.

Voici mon opinion, chers collègues : nous devrions débattre de cette question en profondeur. Je pense que nous avons l’obligation de discuter de la taxe sur le carbone dans ses moindres détails.

Voici ma question : sénatrice Galvez, la décision d’aujourd’hui signifie-t-elle que le gouvernement admet avoir échoué sur tous les plans en matière de lutte contre les changements climatiques et qu’il fait marche arrière? Ou est-ce une façon d’admettre qu’il s’agit d’une mauvaise stratégie économique et que le fait de faire payer des taxes aux Canadiens dans l’optique de sauver l’environnement peut seulement avoir pour effet d’augmenter la pauvreté et de pousser les Canadiens de la classe moyenne vers la misère? C’est l’un ou l’autre.

Le sénateur Plett : C’est peut-être l’un et l’autre.

Le sénateur Housakos : Vous avez raison, c’est peut-être l’un et l’autre. Je crois qu’il nous incombe, à titre de parlementaires, d’examiner la situation avec beaucoup de soin.

Nous savons tous, bien sûr, que les politiciens changent d’idée, qu’ils ne respectent pas les engagements qu’ils ont pris dans les discours du Trône et, dans ce cas précis, qu’ils changent d’idée à propos d’une politique qui est une pièce maîtresse de leur gouvernement depuis des années. Je soupçonne qu’ils font volte‑face, dans ce cas-ci, parce qu’ils se rendent compte que les Canadiens commencent à comprendre que, dans les faits, ils poussent les Canadiens vers la misère sans régler un seul problème lié aux changements climatiques.

De ce côté-ci, nous demeurerons partisans. Nous continuerons d’assumer la responsabilité qui est la nôtre en tant que parlementaires, celle pour laquelle nous avons été nommés, c’est‑à‑dire de participer à des débats publics et à l’élaboration de politiques publiques; de débattre des discours du Trône, de la politique énergétique et de la politique fiscale; et d’exercer avec la diligence requise notre rôle de second examen objectif dans l’intérêt des contribuables canadiens.

Votre jour est enfin venu, sénateur Gold. Aujourd’hui, je félicite votre gouvernement d’avoir enfin écouté la voix du bon sens. Il y aura encore plus de bon sens à l’avenir. Je vous remercie, chers collègues. Bonne fin de semaine.

(Sur la motion de la sénatrice LaBoucane-Benson, le débat est ajourné.)

(1710)

Projet de loi sur la Journée internationale pour la coopération et la justice fiscales

Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Dalphond, appuyée par l’honorable sénatrice Bernard, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-264, Loi instituant la Journée internationale pour la coopération et la justice fiscales.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

[Français]

Le Code criminel
La Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu propose que le projet de loi S-266, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je propose l’ajournement du débat pour le temps de parole qu’il me reste.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(Sur la motion du sénateur Boisvenu, le débat est ajourné.)

[Traduction]

Projet de loi sur le cadre national sur la publicité sur les paris sportifs

Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Deacon (Ontario), appuyée par l’honorable sénatrice Busson, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-269, Loi concernant un cadre national sur la publicité sur les paris sportifs.

L’honorable Gwen Boniface : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer le projet de loi S‑269 de la sénatrice Deacon, Loi concernant un cadre national sur la publicité sur les paris sportifs.

Mes collègues se souviendront peut-être des réserves de notre ancien collègue le sénateur White et des miennes à l’égard du projet de loi C‑218, qui portait sur les paris sur une seule épreuve sportive. À l’époque, et même aujourd’hui, j’estime que nous avons adhéré à ce projet trop rapidement en raison des échéanciers serrés.

Le projet de loi C‑218 aurait pu profiter grandement de plus amples consultations et recherches. Pour être adéquat et sûr, un régime de paris sur une seule épreuve sportive doit être accompagné de mesures de soutien pour dissuader les joueurs compulsifs et les gens susceptibles de le devenir. On pourrait soutenir que les mesures de soutien relèvent principalement des provinces, mais il aurait été prudent que le gouvernement fédéral discute avec les provinces et les territoires afin que des mesures de soutien soient mises en place avant la légalisation des paris sur une seule épreuve sportive.

Cela m’amène au projet de loi S‑269 dont nous sommes saisis aujourd’hui. C’est le genre de second examen objectif nécessaire quand on débat d’un projet de loi qui facilite les paris sportifs et qui crée une dépendance encore plus grande envers eux. C’est le genre de mesures de soutien nécessaires pour les personnes les plus touchées par le jeu et les plus vulnérables à celui-ci. Je félicite la sénatrice Deacon de ses efforts à cet égard, ainsi que le sénateur Cotter de sa contribution. Les sénateurs Deacon et Cotter ont défini brièvement pour nous l’objectif du projet de loi et ce qu’il est censé accomplir, alors je vais seulement les paraphraser à titre de rappel.

La deuxième partie du projet de loi prévoit l’obligation pour le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes de revoir ses règlements et ses politiques afin d’évaluer leur efficacité à réduire les préjudices attribuables à la prolifération de la publicité sur les paris sportifs. Du point de vue fédéral, il s’agit d’un bon outil à utiliser pour réduire les préjudices causés par ce type de jeu.

La première partie du projet de loi concerne l’élaboration d’un cadre national sur la publicité sur les paris sportifs. Les projets de loi qui portent sur des cadres et des stratégies sont importants, surtout dans le cas des lois intergouvernementales, car ils permettent d’engager les discussions nécessaires. Le projet de loi dont nous sommes saisis ferait appel au gouvernement fédéral, aux gouvernements provinciaux et territoriaux, à la communauté autochtone et à d’autres intervenants, comme les organismes de réglementation des jeux et les organismes associés à l’éthique sportive.

Ces discussions sont essentielles à l’élaboration d’une approche pancanadienne pour s’attaquer au problème des paris sportifs. L’élaboration d’une réglementation de base, avec l’accord des provinces et des territoires, créerait un régime cohérent, gérable et prévisible, qui permettrait un meilleur suivi des informations et des statistiques relatives aux paris sportifs et à leurs conséquences. Il s’agit de fixer des normes nationales pour aider à réduire les dépendances que les jeux de hasard peuvent provoquer et d’éviter une approche fragmentaire dans la mesure du possible.

Nous savons que le gouvernement de l’Ontario a décidé de restreindre le recours aux athlètes et à d’autres célébrités dans la publicité pour les paris sportifs, une mesure qui entrera en vigueur à la fin du mois de février. Des icônes de hockey de l’heure comme Connor McDavid et Auston Matthews — et la Merveille, Wayne Gretzky — sont apparues dans de telles annonces publicitaires depuis que les paris sur une seule épreuve sportive sont autorisés par la loi. De façon générale, ce ne sont pas les adultes que ces publicités tentent de séduire, mais bien les jeunes Canadiens vulnérables.

Ces athlètes sont considérés comme des idoles pour les jeunes, des modèles à imiter. Ce que je vois, ce sont des multimillionnaires qui font la promotion, principalement auprès des jeunes, d’habitudes malsaines et accoutumantes. Je pense qu’on peut supposer sans se tromper que ces athlètes bien nantis s’enrichissent encore plus en s’affichant dans ces publicités. Après tout, leur cachet ne doit rien avoir de modique. Le fait qu’on puisse se payer l’élite de la Ligue nationale de hockey pour promouvoir les paris sur une seule épreuve sportive donne une petite idée des profits qu’ils peuvent générer en Ontario.

Même si, en adoptant cette mesure, l’Ontario avance sur la bonne voie — et je m’attends à ce que toutes les provinces envisagent de s’en inspirer —, c’est un très petit pas en avant. En effet, interdire de faire appel au pouvoir attractif des vedettes pour publiciser les paris sportifs n’atténuera pas nécessairement l’activité publicitaire en tant que telle, ce qui constitue grosse partie du problème.

Des solutions potentielles ont été proposées par mes collègues qui ont pris la parole précédemment au sujet du projet de loi S‑269 : interdire la publicité avant, pendant et après les épreuves sportives, interdire la publicité aux heures où les jeunes forment une partie importante de l’auditoire et interdire la publicité dans les arénas et sur les uniformes des joueurs.

Ce dernier point correspond à la recommandation 47 du rapport de 2020 de la Chambre des lords intitulé Gambling Harm — Time for Action. Elle se lit comme suit :

Les exploitants de jeux de hasard ne devraient plus être autorisés à afficher de la publicité sur les maillots des équipes de sport ou toute autre pièce de leur équipement. Il ne devrait y avoir aucune publicité sur les paris à l’intérieur ou à proximité des terrains de sport et des installations sportives, y compris les programmes sportifs.

Le rapport contient d’autres recommandations importantes dont nous pouvons nous inspirer aujourd’hui. La recommandation 52 indique ce qui suit :

Les publicités qui sont objectivement perçues comme des incitations à commencer ou à continuer à parier, ou qui créent un sentiment d’urgence concernant la prise de paris, devraient être interdites [...]

La recommandation 46 a une portée plus vaste. Elle explique ceci :

Le gouvernement devrait diligenter des recherches indépendantes pour établir le rapport entre la publicité sur les paris et les préjudices associés aux paris chez les adultes et les enfants.

Des recherches devraient aussi être effectuées ici même pour développer une approche canadienne en matière de prévention des préjudices associés aux paris sportifs.

D’autres pays ont fait des progrès dont le Canada pourrait s’inspirer. Chers collègues, le travail se fait déjà ailleurs. Tenons-en compte dans nos réflexions et incorporons les éléments qui conviennent à notre propre cadre. Par exemple, l’Espagne, l’Italie et la Belgique ont déjà interdit presque toutes les publicités sur les paris, et les Pays‑Bas ont commencé pas plus tard qu’en juillet dernier à interdire les publicités sur les paris en ligne sans auditoire cible.

(1720)

Le Canada et ses provinces peuvent examiner les détails de ces interdictions pour voir ce qui pourrait fonctionner ici. Étant donné qu’il y a plus d’un suicide par jour en Grande-Bretagne en raison des préjudices liés au jeu, à compter de 2020, ce pays a mis fin à l’acceptation des cartes de crédit par les entreprises de paris. De toute évidence, l’accès au crédit accroissait l’endettement des toxicomanes et perpétuait leurs problèmes. Cette solution vaut également la peine d’être envisagée dans le contexte canadien.

Aucune de ces solutions possibles ne peut être administrée en vase clos. Comme dans le cas de tout traitement d’une dépendance, une approche holistique est nécessaire pour faire des progrès, car il s’agit d’une question très complexe. Une autre option qui pourrait être envisagée dans les discussions sur le cadre national serait une campagne de publicité sur les méfaits du jeu financée par le gouvernement à la télévision, à la radio, dans les médias sociaux et dans d’autres tribunes. Nous voyons actuellement ce genre de message ici, en Ontario, concernant les méfaits du cannabis, y compris la conduite avec facultés affaiblies par le cannabis.

On pourrait également proposer aux provinces une formule de financement pour soutenir la recherche, l’éducation — comme la campagne de sensibilisation du public mentionnée plus haut — et les services de traitement des méfaits du jeu. Cette formule pourrait s’appuyer sur les recettes générées par les paris sportifs financés par le gouvernement. Comme nous le savons, l’industrie des paris sportifs génère des milliards de dollars de revenus chaque année, dont 1,4 milliard de dollars par année en Ontario seulement, selon les estimations de l’Association canadienne du jeu.

En effet, selon un rapport de Jeux en ligne Ontario, une filiale de la Commission des alcools et des jeux de l’Ontario, les paris sportifs ont généré plus de 35 milliards de dollars de mises totales pendant la première année d’existence de ce marché, qui comprend plus de 1,6 million de comptes de joueurs actifs.

Comme nous avons adopté une loi visant à autoriser les paris sur une seule épreuve sportive avant que les provinces ne soient prêtes, à mon avis, nous sommes maintenant en mode rattrapage. La prolifération de la publicité sur les paris sportifs n’était pas exagérée, car elle n’était pas réglementée. Nous avons ouvert les vannes, ce qui a mené à la situation actuelle.

C’est aux provinces qu’il revient, peut-être avec une certaine aide de la part du gouvernement fédéral, de fournir le financement nécessaire afin de veiller à ce que le projet de loi C‑218 ne crée pas une génération de joueurs compulsifs et un système dépourvu de mesures de soutien à leur endroit. Le projet de loi S‑269 est une mesure essentielle qui permettra de mener les discussions qui s’imposent et de trouver des solutions globales.

Honorables sénateurs, lorsque je suis intervenue au sujet du projet de loi C‑218, j’avais dit que si nous devions permettre que cette pratique se fasse au grand jour, nous devrions alors garder les yeux bien ouverts. Eh bien, nous avons maintenant l’occasion d’ouvrir les yeux. Je remercie la sénatrice Deacon pour le leadership dont elle a fait preuve dans ce dossier. J’appuie avec enthousiasme et sans réserve le projet de loi S‑269 et son étude au comité, et j’invite mes collègues à en faire autant.

Merci, meegwetch.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur la stratégie nationale relative au racisme environnemental et à la justice environnementale

Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice McCallum, appuyée par l’honorable sénateur Boisvenu, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-226, Loi concernant l’élaboration d’une stratégie nationale visant à évaluer et prévenir le racisme environnemental ainsi qu’à s’y attaquer et à faire progresser la justice environnementale.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’étape de la deuxième lecture en tant que critique du projet de loi C‑226, Loi concernant l’élaboration d’une stratégie nationale visant à évaluer et prévenir le racisme environnemental ainsi qu’à s’y attaquer et à faire progresser la justice environnementale.

Permettez-moi, chers collègues, de faire un bref résumé du projet de loi C‑226. Ce ne sera pas long.

Ce projet de loi exige que le ministre de l’Environnement et du Changement climatique élabore une stratégie nationale visant à promouvoir les initiatives, dans l’ensemble du Canada, pour prévenir le racisme environnemental et faire progresser la justice environnementale.

En consultation ou en coopération avec toutes les personnes intéressées, la stratégie nationale devra inclure diverses mesures, comme les modifications possibles aux lois, politiques et programmes fédéraux et l’indemnisation des familles ou des collectivités. Le projet de loi prévoit que le ministre de l’Environnement et du Changement climatique établisse un rapport énonçant la stratégie nationale et le fasse déposer devant chaque chambre du Parlement dans un délai de deux ans suivant l’entrée en vigueur de la loi.

Chers collègues, je tiens à être clair. Je crois fermement que tous les Canadiens devraient vivre dans un environnement sain, et que nous devrions nous attaquer à toute forme de racisme. Cependant, je ne suis pas d’accord avec l’approche proposée par le projet de loi C‑226, soit de recourir à une stratégie nationale pour atteindre cet objectif.

Dès le départ, le projet de loi C‑226 n’établit pas de portée raisonnable pour le processus de consultation. Le projet de loi demande au ministre de collaborer avec « les personnes, collectivités, organismes et organisations intéressés » ou de les consulter, ce qui comprend les autres ministres et représentants du gouvernement du Canada et des communautés autochtones, mais il ne définit pas ce qui constitue une personne, une collectivité, une organisation ou un organisme « intéressé », laissant ainsi grande ouverte la portée de la consultation.

C’est à la fois lourd et irréalisable. Sans une portée précise, il est impossible de tenir un processus de consultation efficace. Quel que soit le but de toute stratégie nationale en cours d’élaboration, la portée des consultations doit comporter des paramètres clairs afin de donner une orientation concise à la stratégie ou au cadre.

Par exemple, au cours de la 42e législature, le député conservateur Todd Doherty a présenté le projet de loi C‑211, Loi concernant un cadre fédéral relatif à l’état de stress post‑traumatique, qui a reçu la sanction royale le 21 juin 2018. Ce projet de loi identifiait spécifiquement les différents ministres, représentants et intervenants qui devaient être consultés afin d’établir un cadre sur l’état de stress post-traumatique. Des ministres fédéraux étaient même nommés dans le projet de loi, de même que des représentants provinciaux et territoriaux et des représentants de la communauté médicale et de groupes de patients. Cette approche a fait en sorte que le projet de loi ait les meilleures chances de succès possible.

Lorsqu’on compare la disposition sur la consultation du projet de loi C‑211 à celle du projet de loi dont nous sommes saisis aujourd’hui, la différence est frappante.

Avec le projet de loi C‑226, on se demande où commencera la consultation, où elle se terminera et qui en fera partie. C’est extrêmement large et ambigu. On laisse le champ libre au ministre de choisir les personnes à consulter. Il peut adapter les consultations à ce qu’il veut entendre et voir inclus dans la stratégie nationale, tout en ignorant d’autres voix importantes.

Compte tenu du bilan lamentable du gouvernement en matière de consultation, il s’agit là d’une préoccupation bien légitime. Va-t-il donner la priorité à la consultation d’amis proches du gouvernement plutôt que d’écouter les gens sur le terrain? Les paramètres ne sont pas clairs, ce qui laisse le processus de consultation ouvert à la manipulation.

Le projet de loi C‑226 propose ensuite une série de mesures qui pourraient être prises dans le cadre de la stratégie nationale. La première d’entre elles consiste à suggérer d’éventuelles modifications aux lois, politiques et programmes fédéraux.

Encore une fois, comme pour la disposition du projet de loi sur la consultation, cette disposition est très large et prête à l’interprétation. Je crains que la stratégie nationale ne lutte pas efficacement contre le racisme environnemental et qu’elle ne fasse qu’ajouter des tracasseries administratives à un processus réglementaire qui est déjà compliqué en ce pays. En cette période économique difficile, nous avons besoin de plus de stabilité, pas de plus de bureaucratie.

Une autre mesure facultative proposée dans le projet de loi est l’indemnisation des particuliers ou des collectivités afin de promouvoir la justice environnementale et de lutter contre le racisme environnemental. Cependant, est-ce qu’on a établi les paramètres entourant l’indemnisation? Non. A-t-on la moindre information sur la façon dont ils seront établis? Non. Nous a-t-on seulement indiqué les conditions à respecter pour être admissible? Encore une fois, la réponse est non. On semble donner carte blanche au ministre pour décider de la façon d’indemniser les gens et les collectivités.

(1730)

Je n’ai jamais été d’accord pour que l’on donne carte blanche à un gouvernement. Bien franchement, cela vaut pour n’importe quel gouvernement, mais encore plus pour le gouvernement actuel. Or, le projet de loi C‑226 nous mène assurément sur cette voie en laissant le champ libre au gouvernement. Encore une fois, c’est un projet de loi dont la portée est très vaste et généralisée.

Enfin, honorables sénateurs, je dois vous faire part de mes préoccupations concernant les stratégies nationales du gouvernement, qui sont peu efficaces, voire pas du tout. En effet, je vous rappelle qu’en 2017, le gouvernement fédéral a lancé la Stratégie nationale sur le logement, un plan comprenant un financement de 72 milliards de dollars sur 10 ans pour répondre aux principaux problèmes qui touchent le logement au Canada. Il suffit d’observer les conditions actuelles du marché immobilier pour se rendre compte de l’échec du gouvernement Trudeau dans ce dossier. Nous nous retrouvons maintenant avec un marché immobilier beaucoup moins abordable et accessible pour ceux qui veulent acheter une première maison. Jusqu’à présent, la Stratégie nationale sur le logement a coûté des milliards de dollars aux Canadiens, et les résultats ne sont tout simplement pas au rendez-vous.

Peut-on faire confiance au gouvernement pour qu’il élabore une stratégie nationale raisonnable et efficace? Je crains que nous n’obtenions que de nouvelles dépenses sans aucun résultat. C’est pour cette raison que je doute fortement de la capacité du gouvernement Trudeau à produire une stratégie nationale relative au racisme environnemental et à la justice environnementale. Comme il est indiqué dans le projet de loi C‑226, le ministre aura deux ans pour établir un rapport énonçant la stratégie. Connaissant le modus operandi du gouvernement, les deux années de consultations ne seront pas menées avec l’objectif de protéger l’argent des contribuables.

En outre, honorables sénateurs, il faudra attendre cinq ans après le dépôt de la stratégie au Parlement pour en mesurer l’efficacité. Dans l’intervalle, le gouvernement pourrait avoir l’impression qu’il travaille à s’assurer que tous les Canadiens vivent dans un environnement sain et à combattre le racisme systémique, alors qu’il ne ferait rien de plus que gaspiller de l’argent pour une stratégie inefficace qui donne peu de résultats. À mon avis, le projet de loi C‑226 soulève trop de questions et d’incertitudes pour les Canadiens.

Je ne suis pas le seul à le penser, honorables sénateurs. Pendant l’étude du projet de loi C‑226, au Comité de l’environnement et du développement durable de l’autre endroit, Ellis Ross, député actuel de Skeena à l’Assemblée législative de la Colombie‑Britannique, qui a déjà été conseiller en chef de la nation Haisla, a indiqué que lui aussi considérait que le projet de loi ratisse trop large et qu’il pourrait être interprété de nombreuses façons. De plus, il a ajouté ceci :

[...] quelle est la limite pour ce qui est des coûts financiers? Tout ce que j’ai vu en ce qui concerne la politique gouvernementale finit toujours par être financé par le contribuable, ou on court après les investissements des provinces.

Honorables sénateurs, M. Ross a raison. En fin de compte, ce sont les contribuables qui paieront la note. Le Canada n’a pas les moyens de prendre des mesures coûteuses qui risquent de décourager les investissements au pays dans l’avenir. J’aurais souhaité que le comité de l’autre endroit étudie plus longuement le projet de loi et écoute une plus grande diversité de points de vue d’un océan à l’autre pour que nous ayons une meilleure compréhension de ce qui nous est proposé aujourd’hui, car somme toute, nous devons nous assurer que les stratégies nationales tiennent compte des questions provinciales et régionales sans outrepasser la compétence fédérale.

Chers collègues, je ne peux appuyer un projet de loi qui laisse autant de questions sans réponse. Mes collègues conservateurs et moi croyons sincèrement que tous les Canadiens devraient vivre dans un environnement sain et qu’il faut lutter contre toutes les formes de racisme. Cependant, je ne crois pas que ce projet de loi produira les résultats escomptés. Je crois plutôt qu’il risque d’entraîner des coûts élevés et qu’il ne servirait pas l’intérêt des Canadiens. Le projet de loi est trop général, ne comporte pas les définitions nécessaires et risque de créer encore plus d’incertitude pour trop d’industries en quête de stabilité. De plus, je ne crois pas que le gouvernement actuel ait fait la preuve de sa capacité à mener une telle consultation auprès des personnes qu’il doit consulter.

Honorables sénateurs, même si je m’oppose à ce projet de loi dans sa forme actuelle, j’ai toujours soutenu que les projets de loi devaient faire l’objet d’un examen approfondi par un comité. Je m’oppose donc au projet de loi, mais je suis d’accord pour qu’il soit renvoyé au comité pour un examen approfondi — je regarde la présidente en disant cela —, et je suis pour qu’il aille de l’avant. Je veillerai à ce que la motion soit adoptée avec dissidence. Merci, chers collègues.

Des voix : Bravo!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)

Renvoi au comité

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice McCallum, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles.)

[Français]

La sanction royale

Son Honneur la Présidente intérimaire informe le Sénat qu’elle a reçu la communication suivante :

RIDEAU HALL

Le 26 octobre 2023

Madame la Présidente,

J’ai l’honneur de vous aviser que la très honorable Mary May Simon, gouverneure générale du Canada, a octroyé la sanction royale par déclaration écrite aux projets de loi mentionnés à l’annexe de la présente lettre le 26 octobre 2023 à 17 h 18.

Veuillez agréer, Madame la Présidente, l’assurance de ma haute considération.

La sous-secrétaire du gouverneur général,

Christine MacIntyre

L’honorable

La Présidente du Sénat

Ottawa

Projets de loi ayant reçu la sanction royale le jeudi 26 octobre 2023 :

Loi modifiant la Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (utilisation du bois) (projet de loi S-222, chapitre 27, 2023)

Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et la Loi sur le transfèrement international des délinquants (projet de loi S-12, chapitre 28, 2023)

(1740)

[Traduction]

L’ajournement

Adoption de la motion

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5j) du Règlement, je propose :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 31 octobre 2023, à 14 heures.

Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

L’étude des responsabilités du gouvernement fédéral à l’égard des Premières Nations, des Inuits et des Métis

Adoption du douzième rapport du Comité des peuples autochtones et de la demande de réponse du gouvernement

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Francis, appuyée par l’honorable sénatrice Bellemare,

Que le douzième rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, intitulé Vu de l’extérieur : La mise en œuvre de la Loi sur le cannabis et ses effets sur les peuples autochtones, qui a été déposé au Sénat le 14 juin 2023, soit adopté et que, conformément à l’article 12-23(1) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre de la Santé étant désigné comme ministre responsable de la réponse au rapport, en consultation avec le vice-premier ministre et ministre des Finances, le ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales, le ministre des Affaires autochtones du Canada et le ministre du Revenu national.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence, et le rapport est adopté.)

Affaires étrangères et commerce international

La diplomatie culturelle à l’avant-scène de la politique étrangère du Canada—Adoption du vingt-sixième rapport du comité déposé pendant la première session de la quarante-deuxième législature et de la demande de réponse du gouvernement

Le Sénat passe à l’étude du vingt-sixième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, intitulé La diplomatie culturelle à l’avant-scène de la politique étrangère du Canada, déposé auprès du greffier du Sénat le 11 juin 2019, durant la première session de la quarante-deuxième législature.

L’honorable Peter M. Boehm propose :

Que le vingt-sixième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, intitulé La diplomatie culturelle à l’avant-scène de la politique étrangère du Canada, déposé auprès du greffier du Sénat le 11 juin 2019, durant la première session de la quarante-deuxième législature soit adopté et que, conformément à l’article 12-23(1) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre du Patrimoine canadien étant désigné ministre chargé de répondre à ce rapport, en consultation avec le ministre des Affaires étrangères.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Motion tendant à autoriser le comité à étudier la situation au Liban—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Housakos, appuyée par l’honorable sénateur Smith,

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, la situation au Liban et à déterminer si un envoyé spécial devrait être nommé, dès que le comité sera formé, le cas échéant;

Que le comité soumette son rapport final au plus tard le 28 février 2022.

L’honorable Leo Housakos : Votre Honneur, comme cet article en est à son 15e jour, avec le consentement du Sénat, j’aimerais que le débat soit ajourné à mon nom pour le temps de parole qu’il me reste.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Le débat est ajourné.)

Autorisation au comité d’étudier les intérêts et l’engagement du Canada en Afrique

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Boehm, appuyée par l’honorable sénateur Arnot,

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international soit autorisé à étudier, pour en faire rapport, les intérêts et l’engagement du Canada en Afrique, et d’autres questions connexes;

Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 31 décembre 2024;

Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer des rapports sur cette étude auprès du greffier du Sénat si le Sénat ne siège pas, et que les rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat;

Que le comité conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Peuples autochtones

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l’étude des obligations découlant des traités et les responsabilités constitutionnelles, politiques et juridiques du gouvernement fédéral envers les Premières Nations, les Inuits et les Métis

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Francis, appuyée par l’honorable sénatrice Gerba,

Que, nonobstant l’ordre du Sénat adopté le jeudi 3 mars 2022, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones concernant son étude sur les responsabilités constitutionnelles, politiques et juridiques et les obligations découlant des traités du gouvernement fédéral envers les Premières Nations, les Inuits et les Métis et tout autre sujet concernant les peuples autochtones, soit reportée du 31 décembre 2023 au 1er septembre 2025;

Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer auprès du greffier du Sénat ses rapports portant sur cette étude, si le Sénat ne siège pas à ce moment-là, et que les rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Droits de la personne

Autorisation au comité de déposer ses rapports sur les questions concernant les droits de la personne en général auprès du greffier pendant l’ajournement du Sénat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Ataullahjan, appuyée par l’honorable sénatrice Martin,

Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer auprès du greffier du Sénat ses rapports portant sur des questions concernant les droits de la personne en général, si le Sénat ne siège pas à ce moment-là, et que lesdits rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Affaires sociales, sciences et technologie

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l’étude du cadre législatif et réglementaire de la procréation assistée

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Omidvar, appuyée par l’honorable sénatrice Clement,

Que, nonobstant l’ordre du Sénat adopté le jeudi 19 mai 2022, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie concernant son étude sur le cadre législatif et réglementaire de la procréation assistée au Canada soit reportée du 31 octobre 2023 au 30 juin 2025.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

[Français]

Le rôle et le mandat de la GRC

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénateur Harder, c.p., attirant l’attention du Sénat sur le rôle et le mandat de la GRC, les compétences et capacités nécessaires pour que celle-ci remplisse son rôle et son mandat et comment elle devrait être organisée et dotée de ressources au XXIe siècle.

L’honorable Bernadette Clement : Honorables sénateurs, je constate que cet article en est à son 15e jour et la sénatrice Busson souhaite participer au débat. Par conséquent, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 4-15(3) du Règlement, je propose l’ajournement du débat au nom de la sénatrice Busson.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Le débat est ajourné.)

[Traduction]

L’apport commercial et économique des entreprises autochtones à l’économie du Canada

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénateur Klyne, attirant l’attention du Sénat sur l’apport commercial et économique continu des entreprises autochtones à l’économie du Canada.

L’honorable Mary Coyle : Honorables sénateurs, je prends la parole sur le territoire non cédé de la nation algonquine anishinabe pour parler de l’interpellation no 13 du sénateur Klyne qui souligne l’apport commercial et économique des entreprises autochtones à l’économie du Canada.

Voici ce qu’a dit le sénateur Klyne :

Il y a beaucoup de précieuses leçons à tirer et à mettre à profit pour réussir à accélérer la participation des Autochtones à l’économie du Canada.

Chers collègues, le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones a achevé son étude du projet de loi C‑29, Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation.

Nous savons, chers collègues, qu’avant l’arrivée des colonisateurs, les peuples autochtones avaient des économies prospères, des communautés florissantes et des structures de gouvernance dynamiques, et que la colonisation et l’assimilation, sous toutes leurs formes, ont mis fin à cette prospérité et à cette force.

Il est essentiel d’appuyer la prospérité des Autochtones en faisant progresser la réconciliation économique pour répondre à plusieurs des appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation. L’accès équitable à l’éducation, à l’emploi et aux possibilités économiques pour les Autochtones est essentiel et, bien sûr, ces efforts doivent être menés par les Autochtones eux-mêmes.

(1750)

Le nouveau conseil national de réconciliation sera chargé, entre autres, de suivre les progrès de la réconciliation dans tous les secteurs au Canada, y compris la réconciliation économique.

Cependant, cette responsabilité de surveillance n’est peut-être pas si facile à assumer.

Dans un document publié plus tôt ce mois-ci et intitulé An Overview of the Indigenous Economy in Canada, la Banque du Canada souligne qu’environ 1,8 million de personnes se sont déclarées Autochtones, ce qui représente 5 % de la population canadienne. De ce nombre, 1,05 million proviennent de plus de 630 Premières Nations, et environ 30 % vivent dans une réserve et 70 % hors réserve. Il y a 624 000 Métis et 70 500 Inuits, et près de 70 % des Inuits vivent dans l’Inuit Nunangat, où ils forment la population majoritaire.

Près de 60 % de la population autochtone du Canada vit dans des régions rurales, comparativement au tiers de la population non autochtone, et le quart des Autochtones vit dans les 12 plus grandes villes du Canada.

Voici ce que dit l’article de la Banque du Canada :

Les tentatives d’évaluation de la taille de l’économie autochtone au Canada ou de ses contributions sont contrariées par des problèmes de disponibilité et de qualité des données.

Malgré ces lacunes dans les données, certaines études ont tenté de quantifier la taille ou les contributions de l’économie autochtone [...] Bien que les estimations varient grandement, il en ressort que la part du produit intérieur brut (PIB) attribuable aux peuples autochtones correspond à beaucoup moins de la moitié de leur poids démographique, ce qui en dit long sur [...] l’inégalité économique qui existe entre les populations autochtones et les populations non autochtones du Canada.

Chers collègues, la moitié, 50 %, c’est un écart considérable.

Cette situation est-elle décourageante? Oui, elle l’est. Est-elle inacceptable? Assurément. Maintenant, chers collègues, voyons quelques exemples des efforts entrepris pour combler cet écart de prospérité.

Alors que le Mois de l’histoire des Mi’kmaqs tire à sa fin, j’attire votre attention sur deux exemples fantastiques de leadership économique en provenance du territoire des Mi’kmaqs, où j’ai la chance d’habiter. Un exemple porte sur Membertou, l’autre sur Paqtnkek.

Parlons tout d’abord de la réussite de la Première Nation de Membertou, une dynamo économique bien connue établie sur l’île du Cap-Breton. Je l’ai mentionnée la semaine dernière, dans une déclaration qui rendait hommage à sœur Dorothy Moore. Vous êtes probablement nombreux à savoir que l’honorable Dan Christmas, notre ancien collègue, a joué un rôle crucial dans la réussite de sa nation.

Je tiens tout d’abord à raconter le plus récent chapitre de cette histoire en lisant les mots du chef Terry Paul qui est, je tiens à le mentionner, le titulaire d’un diplôme de leadership obtenu en 1977 à l’Institut Coady, où j’ai déjà travaillé. Dans une lettre de novembre 2020 adressée à sa collectivité, il a écrit ceci :

Chers membres de la bande de Membertou, je suis extrêmement fier d’annoncer que Membertou a effectué un achat commercial majeur qui aura des effets bénéfiques durables sur notre communauté pendant les sept prochaines générations.

L’entreprise Clearwater Seafoods a été acquise aujourd’hui par une coalition mi’kmaq, qui comprend la bande de Membertou et notre nouveau partenaire commercial, Premium Brands. Clearwater est l’une des plus grandes entreprises de fruits de mer pleinement intégrées en Amérique du Nord et est maintenant détenue par les Mi’kmaqs. C’est un jour vraiment mémorable pour notre peuple.

Il a ajouté ce qui suit :

Dans le cadre de cette acquisition, il est prévu que Membertou et une coalition de communautés mi’kmaqs participantes de l’ensemble de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve possèdent 50 % de Clearwater Seafoods et 100 % de […] ses permis.

Depuis 13 000 ans, les Mi’kmaqs pratiquent une pêche durable dans les eaux du Canada atlantique, et, aujourd’hui, en ce jour réellement porteur de changement, nous devenons propriétaires d’une entreprise faisant partie des chefs de file mondiaux dans le secteur de la pêche.

Pendant de nombreuses années, nos collectivités n’étaient pas les bienvenues dans cette grande industrie. Aujourd’hui, à nos propres conditions, nous sommes propriétaires à 50 % d’une entreprise de pêche commerciale. Tous les avantages découlant de cette propriété reviendront à nos collectivités, et avoir un siège à la table procure la capacité d’influer sur le rôle de notre peuple dans le secteur de la pêche commerciale.

Il faut comprendre que cette acquisition commerciale est distincte de l’exercice de nos droits de pêche à des fins de subsistance convenable et de nos activités de pêche commerciale en eau douce. Avec la nouvelle d’aujourd’hui, nous devenons des participants dans tous les secteurs de la pêche.

Puis, le chef Terry ajoute ceci :

Grâce à la collaboration avec nos partenaires de l’Administration financière des premières nations [...] les collectivités ont fourni un financement total de 250 millions de dollars sur plus de 30 ans. Cet investissement est unique et distinct de nos activités commerciales actuelles, et il n’a aucune incidence financière sur la capacité de Membertou de continuer à offrir tous les services nécessaires pour communauté grandissante, de quelque façon que ce soit. En fait, nous récolterons ainsi de nouveaux revenus. Nous diversifions notre portefeuille financier et nous accroissons la prospérité de Membertou pour de nombreuses années à venir.

Il conclut comme suit :

Aujourd’hui, nous gardons une place spéciale dans nos cœurs pour notre héros, Donald Marshall Junior. Nous savons qu’il serait très fier de vivre ce moment avec nous.

Wela’lioq, chef Terry Paul.

De la fierté, c’est ce que tous les membres de la Première Nation de Membertou devraient ressentir. C’est très important. Nous poursuivons des décennies d’efforts de développement économique visionnaire, méticuleux et intelligent consentis par le chef Terry, Dan Christmas et d’autres dirigeants de Membertou. Depuis l’établissement de la Membertou Development Corporation en 1989, cette Première Nation est devenue la première communauté autochtone au monde à être certifiée ISO 9001, avant d’être nommée l’entreprise la mieux gérée au Canada, comme l’a dit le chef Terry : « Auparavant, on nous considérait comme un trou perdu. Maintenant, nous sommes prospères. »

En plus de leurs pêcheries, y compris Clearwater Seafoods, la Première Nation de Membertou a un palais du commerce et des congrès, un centre informatique, une entreprise de géomatique et une entreprise de fabrication de bateaux. Elle a investi dans le domaine des jeux et du divertissement, dans un centre de sports et de bien-être ainsi que dans l’immobilier commercial. Elle a des intérêts dans un projet de production d’hydrogène vert avec de l’énergie éolienne et elle nourrit encore d’autres grandes ambitions. Chers collègues, Membertou est souvent citée à titre d’exemple de réussite que d’autres communautés pourront imiter.

Honorables collègues, le deuxième exemple de réussite en matière de développement économique au sein de la communauté mi’kmaq dont j’aimerais vous parler vient de la Première Nation qui se trouve tout près de l’endroit où je vis, soit la Première Nation de Paqtnkek, dont notre nouveau collègue, le sénateur Prosper, a été le chef pendant sept ans avant de devenir chef régional pour la Nouvelle‑Écosse et Terre‑Neuve. Honorables collègues, mercredi soir, le développement économique de la Première Nation de Paqtnkek a été célébré tant sur la côte Ouest que sur la côte Est de notre pays. Sur la côte Est, à Antigonish, le prix de l’entreprise émergente de la Chambre de commerce d’Antigonish a été remis pour la première fois à une entreprise mi’kmaq, l’entreprise Bayside Travel Centre de la Première Nation de Paqtnkek. Sur la côte Ouest, à l’hôtel Westin Bayshore de Vancouver, Rose Paul, PDG de la Bayside Development Corporation, une entreprise de la Première Nation de Paqtnkek, a reçu le Prix ​​des femmes autochtones en leadership du Conseil canadien pour l’entreprise autochtone.

Je cite le texte publié au sujet de la lauréate :

[...] Faisant figure de pionnière en développement des affaires, en négociations et en partenariats au sein de la division commerciale de la Première Nation de Paqtnkek, Rose se consacre avec détermination à sa vision qui consiste à développer le plus possible le potentiel de création d’emplois et de développement des affaires pour les membres de la Première Nation de Paqtnkek.

[...] Rose et son équipe de direction ont élaboré le tout premier accord tripartite avec les gouvernements provincial et fédéral et ils ont obtenu le site de l’échangeur autoroutier de la sortie 38B, d’une valeur de plusieurs millions de dollars, ainsi que de terres qui avaient été confisquées à la communauté après la rupture d’une entente en 1960 [...]

[...] Rose a mis sur pied une stratégie de développement économique en concluant des partenariats stratégiques, en prenant place à des tables de prise de décision et de planification de même qu’en créant des partenariats avec des entreprises dans le cadre de la réconciliation économique. La vision économique à long terme de la communauté mise essentiellement sur des partenariats stratégiques avec des entreprises, telles qu’Everwind Fuels, chef de file de l’industrie et première en son genre en Amérique du Nord. Selon Mme Paul, cette alliance permettra à la communauté de devenir « souveraine sur le plan énergétique » et d’atteindre la carboneutralité afin de lutter contre le réchauffement climatique [...]

Rose Paul reconnaît au sénateur Prosper les qualités d’un grand chef de file qui a su se retrousser les manches pour collaborer avec elle afin de promouvoir la prospérité économique de Paqtnkek.

J’ai rencontré Rose Paul pour la première fois alors qu’elle participait au programme de leadership communautaire pour les femmes autochtones de l’Institut Coady. Elle a ensuite obtenu une maîtrise en administration des affaires de l’Université du Cap‑Breton. Elle a récemment suivi un programme de leadership exécutif à Harvard.

(1800)

Lorsque j’ai rencontré Rose Paul à Bayside, il y a quelques semaines, elle m’a raconté comment, depuis qu’elle est devenue responsable du développement économique en 2006, la récupération du terrain de l’autre côté de l’autoroute est devenue une priorité pour la communauté et un élément clé de sa prospérité future.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, il est maintenant 18 heures. Conformément à l’article 3‑3(1) du Règlement, je suis obligée de quitter le fauteuil jusqu’à 20 heures, moment où nous reprendrons nos travaux, à moins que vous souhaitiez ne pas tenir compte de l’heure.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, de ne pas tenir compte de l’heure?

Des voix : D’accord.

La sénatrice Coyle : Revenons à Rose Paul et à l’exemple de réussite qu’est la nation mi’kmaq Paqtnkek.

On prévoit qu’en plus de la nouvelle halte routière ultramoderne appelée Bayside Travel Centre, qui comporte une grande station-service, deux restaurants, un dépanneur, un magasin d’alcool, une boutique de souvenirs, un bureau d’information touristique de la Nouvelle‑Écosse, une aire de jeu et une aire de repos pour camionneurs, l’emplacement accueillera de nombreuses autres installations.

La nation Paqtnkek travaille également, par l’intermédiaire de Bayside Renewables, à des projets d’énergie renouvelable, dont des centrales solaires et le seul microréseau intégré du Canada atlantique, qui combinera des panneaux solaires, le stockage d’énergie dans des batteries et des bornes de recharge pour véhicules électriques directement sur place.

Tout comme Membertou, Paqtnkek a des intérêts dans l’entreprise de produits de la mer Clearwater Seafoords. Elle détient une part des capitaux propres et siège au conseil d’administration d’EverWind Fuels, une initiative en matière d’hydrogène vert. Elle s’implique auprès de Maritime Launch, le premier port spatial commercial du Canada, situé à Canso, en Nouvelle‑Écosse, et prévoit construire un centre d’affaires ainsi qu’un hôtel.

Lorsque j’ai demandé à Rose quelle est l’incidence de toute cette activité économique sur la communauté, elle m’a dit que le taux de bénéficiaires de l’aide sociale a diminué de 30 %. Plus de gens ont un emploi, et un véritable changement de paradigme — et de mentalité — s’opère chez les jeunes qui se voient maintenant saisir des occasions d’affaires ou occuper un emploi directement dans leur collectivité. Rose a dit que ces réussites se faisaient attendre depuis longtemps et qu’elles sont très importantes pour remplir la promesse de ses prédécesseurs — dont sa propre grand-mère —, leur rendre justice et honorer leurs efforts soutenus et leur vision.

Honorables sénateurs, je suis vraiment impressionnée par la directrice générale, Rose Paul, par le chef Terry Paul et par les nations mi’kmaqs de Membertou et de Paqtnkek. Ces leaders et ces communautés, comme leurs pairs de partout au Canada dont on entend parler, travaillent dur et cherchent au quotidien des façons créatives de combler le grand écart de prospérité dont nous avons parlé plus tôt. Ils le font dans l’objectif clair de réaliser la vision de leurs ancêtres et de créer des possibilités économiques et un avenir prospère et sain pour les générations à venir.

Honorables sénateurs, je vous prie de vous joindre à moi pour féliciter le chef Terry Paul et la directrice générale, Rose Paul, du leadership dont ils font preuve et de leurs nombreuses réalisations.

Wela’lioq. Merci.

(Sur la motion de la sénatrice Clement, le débat est ajourné.)

(À 18 h 4, le Sénat s’ajourne jusqu’au mardi 31 octobre 2023, à 14 heures.)

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