Délibérations du comité sénatorial permanent
des
Banques et du commerce
Fascicule 9 - Témoignages - Séance de l'après-midi
OTTAWA, le mardi 1er octobre 1996
Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui à 14 heures pour examiner l'état du système financier canadien (examen de la législation régissant les institutions financières).
Le sénateur Michael Kirby (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Sénateurs, nous poursuivons la discussion de ce matin sur les banques étrangères et les règles qui s'appliquent aux institutions étrangères.
Notre premier groupe de témoins représente quelques sociétés. Ils sont accompagnés comme d'habitude de leurs distingués conseillers juridiques de Toronto.
M. John van Leeuwen, président, Trans Canada Credit Corporation, Norwest Financial Inc.: M'accompagnent aujourd'hui M. Scarfo, de Trans Canada Credit, ainsi que MM. Steve Wagner et Richard Owens, du cabinet d'avocats Smith Lyons.
À cause de notre filiation, monsieur le président, Trans Canada Credit devrait devenir une banque à part entière tandis qu'aucun de nos autres concurrents ne serait tenu de devenir une banque. Ils seraient plutôt considérés comme des «quasi-banques».
Le président: J'ai discuté avec certains d'entre vous, alors je connais votre filiation, mais votre observation à ce sujet n'est peut-être pas évidente pour mes collègues du comité. Veuillez vous expliquer, je vous en prie.
M. van Leeuwen: Nous appartenons à Norwest Financial Inc., de Des Moines, en Iowa, qui est considérée comme une banque réglementée. Pour cette raison, Trans Canada Credit relèvera du nouveau palier d'institutions réglementées que sont les banques de l'Annexe II. Voilà le problème.
Nous sommes une société de prêt à la consommation. Au Canada, nous avons 150 succursales, d'un océan à l'autre. Essentiellement, nous accordons de petits prêts. Pour vous donner une idée de nos activités, nous avons tracé le portrait du client typique de Trans Canada Credit. Nos clients ont tendance à être jeunes, ils n'ont pas de cote de crédit et peu ou pas d'actifs ou de fortune. Habituellement, ils ont eu quelques problèmes de crédit par le passé et leurs demandes de crédit ont été refusées par des banques ou d'autres institutions financières.
Nous achetons aussi des contrats de vente à tempéraments auprès de petits détaillants tels que Cohen's Furniture, Advance TV et d'autres détaillants du secteur de l'ameublement et des appareils ménagers. Nous fournissons beaucoup de liquidités à certaines petites entreprises. Nous participons aussi au financement des achats d'automobiles et au crédit-bail automobile ainsi qu'au crédit-bail destiné à des achats d'ordinateurs et de télécopieurs par de petites entreprises.
Norwest Financial a acheté Trans Canada Credit du groupe insolvable Central Guaranty Trustco, en 1992, faisant ainsi économiser des sommes importantes à la SADC.
Tout comme nos concurrents -- Beneficial, Avco et d'autres -- Trans Canada Credit n'est pas une institution financière réglementée, même si nous sommes régis par de nombreuses mesures législatives provinciales visant à protéger le consommateur et par le droit sur les valeurs mobilières lorsque nous obtenons du financement. Contrairement aux banques et aux sociétés de fiducie, nous n'acceptons pas de dépôts et ne sommes pas membres du système de paiements canadien, de sorte que l'absence d'une réglementation exhaustive de nos activités n'est pas étonnante.
Mais comme je l'ai déjà indiqué, parce que notre société mère est une banque étrangère en vertu de la Loi sur les banques, Norwest Financial a dû obtenir un décret du Conseil lorsqu'elle a fait l'acquisition de Trans Canada Credit. En contrepartie, Norwest a pris quelques engagements concernant l'ampleur des activités de Trans Canada Credit et la valeur minimale des titres que nous pouvons émettre.
Pour la première fois, les autorités réglementaires tenteront d'établir une distinction entre les banques étrangères réglementées et les quasi-banques. Cette distinction reposera sur le fait que l'institution est régie ou non par les lois bancaires dans son pays d'origine et que les services bancaires constituent ou non une grande partie de ses activités.
D'après nos discussions avec le ministère des Finances et le BSIF, il semble que Norwest sera considérée comme une banque étrangère réglementée, ce qui ne sera pas le cas des concurrents de Trans Canada Credit. La distinction repose non pas sur nos services mais plutôt sur l'identité de notre actionnaire américain.
Pour pouvoir rester en affaires, nous devrions devenir une banque de l'Annexe II, avec tout ce que cela suppose. Par contre, presque tous nos concurrents seraient assujettis à une réglementation moins sévère que maintenant.
L'histoire de la réglementation au Canada démontre clairement qu'il y a deux grands motifs à la réglementation d'une institution financière. Le premier est le désir de protéger le public qui dépose ses économies dans l'institution et, indirectement, de protéger la SADC. Le second est la volonté d'assurer la stabilité du système de paiements.
Dans le cas des sociétés de prêt à la consommation comme Trans Canada Credit, ces motifs ne s'appliquent tout simplement pas. Nous n'acceptons pas de dépôts et nous ne participons pas au système de paiements canadien. Nos clients sont des emprunteurs, pas des épargnants.
Si Trans Canada devenait une banque, l'incidence générale sur le marché de cette obligation de nous présenter comme une banque nuirait considérablement à notre compétitivité. Quelle est la différence entre Trans Canada Credit, Beneficial et Household? Nous oeuvrons tous dans le secteur des prêts à la consommation et nous nous adressons tous à la même clientèle. Nous appartenons tous à des sociétés étrangères. Chacun de nous compte des banques parmi ses sociétés affiliées étrangères. Nous obtenons tous notre financement de la même façon.
En bref, en quoi importe-t-il, du point de vue réglementaire, que nous appartenions à une banque, à un grand conglomérat industriel ou à de nombreux actionnaires? Ce qui devrait importer, c'est la nature de nos activités et, sur cette base, tous ceux qui font la même chose devraient être traités sur un pied d'égalité.
Le régime proposé d'accès des banques étrangères soulève aussi des préoccupations concernant le traitement national en vertu de l'Accord de libre-échange nord-américain et la réciprocité chez nos partenaires de l'ALÉNA. Comme vous le savez, l'ALÉNA oblige le Canada à accorder aux investisseurs des autres pays membres un traitement tout aussi favorable que celui qu'il accorde à ses investisseurs et à leurs investissements. À notre avis, et de l'avis de notre conseiller juridique, le régime proposé enfreindrait cet engagement. De plus, les lois des États-Unis et du Mexique n'exigent pas qu'une banque canadienne crée une banque distincte réglementée pour offrir des services de prêt à la consommation dans ces pays. Nous recommandons que le gouvernement fédéral ne s'écarte pas de la réciprocité avec nos partenaires commerciaux à laquelle notre politique en matière de commerce international cherche habituellement à parvenir.
Depuis que Norwest a fait l'acquisition de Trans Canada Credit, nous avons fait passer le nombre de nos succursales de 129 à 150. Nos effectifs ont augmenté de 30 p. 100 et sont passés à plus de 1 000 employés. Nous avons l'intention d'ouvrir 50 autres succursales d'ici trois à cinq ans, créant ainsi de 250 à 350 nouveaux emplois. Notre chiffre d'affaires a augmenté de près de 40 p. 100. Nous avons emprunté des centaines de millions de dollars sur le marché obligataire canadien et nous avons aussi élargi la portée de nos opérations.
En février de cette année, nous avons reçu l'autorisation du gouvernement d'élargir notre champ d'activités pour inclure le crédit-bail et l'émission de cartes de crédit. Avant la publication du livre blanc en juin, ni le BSIF et ni le ministère des Finances n'avaient laissé entendre que les règles du jeu qui nous concernent seraient changées de manière aussi spectaculaire. Même si nous comprenons que la politique gouvernementale puisse et doive changer pour s'adapter aux circonstances, nous avons l'impression qu'on nous met des bâtons dans les roues, sans raison valable.
La solution, selon nous, consiste à réglementer les services financiers en fonction du type de services qui est offert au Canada. Ni la prudence, ni la compétitivité ne justifient que des règlements se fondent uniquement sur les services financiers offerts à l'étranger par une société affiliée à une société canadienne. La réglementation se fonderait sur l'activité qui a besoin d'être réglementée plutôt que sur le type d'institution qui l'exerce.
Dans le marché mondial des services financiers, qui évolue si rapidement de nos jours, la catégorisation des institutions d'après des idées préconçues est dépassée, à notre avis, à la fois comme façon de faire des affaires et comme justification de la réglementation.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Willey, auriez-vous l'obligeance de résumer la position de votre société à l'égard du livre blanc. Je sais que vous voulez soulever un problème précis concernant les cartes de crédit.
M. David M. Willey, vice-président et trésorier, Capital One Financial Corporation: Merci de nous avoir invités. M. Chris Curtis, avocat général adjoint de Capital One, m'accompagne aujourd'hui.
Capital One Financial Corporation est une société de services financiers dont la filiale principale, Capital One Bank, émet des cartes de crédit aux États-Unis et au Royaume-Uni. Au 30 juin 1996, Capital One gérait environ 11 milliards de dollars en comptes débiteurs sur des cartes de crédit et comptait près de 8 millions de clients. Capital One est l'un des dix principaux émetteurs de cartes de crédit MasterCard et VISA aux États-Unis. C'est là notre principal secteur d'activité.
Il y a six mois, Capital One Financial Corporation a reçu l'autorisation du gouvernement canadien de constituer une société canadienne -- une institution financière non réglementée -- pour offrir des produits MasterCard au Canada. On nous a laissé entendre que le processus prévu dans la Loi sur les banques exigeait que les arrivants étrangers, avant d'entreprendre des activités au Canada, obtiennent l'approbation du Bureau du surintendant des institutions financières et du ministre des Finances pour être finalement autorisés à procéder par décret du Conseil. Capital one a reçu toutes les autorisations nécessaires en mars.
Au moment de la publication du livre blanc, nous avons été sidérés d'apprendre que le gouvernement proposait que nous soyons tenus d'établir une banque ou une société de fiducie pour offrir un service de cartes de crédit, ce qui était tout à fait contraire au processus que nous venions à peine de suivre. À cause de cette annonce, plusieurs mois de planification et de démarches auprès de représentants gouvernementaux en vue d'obtenir l'autorisation nécessaire se sont écoulés en vain. La décision de pénétrer un nouveau marché ne se fait qu'après une planification considérable, et des changements subits, à la structure corporative par exemple, sont des facteurs clés, d'une importance majeure.
Jusqu'à maintenant, notre plan d'entreprise et nos placements reposaient sur cette structure corporative, et ce changement de politique, avec application rétroactive, nous a amenés à nous demander sérieusement s'il était viable et souhaitable de poursuivre nos démarches.
J'aimerais m'attarder à trois aspects. Le premier porte sur les avantages que Capital One peut, selon nous, apporter aux consommateurs canadiens si nous sommes autorisés à procéder comme il était prévu à l'origine. Le deuxième est l'absence d'une justification de principe rigoureuse pour la politique avancée dans le livre blanc. Le troisième est une solution de rechange qui permettrait de mieux atteindre les objectifs de politique visés par cet aspect du livre blanc.
Capital One n'est pas simplement un autre émetteur de cartes de crédit. À la fin des années 80, nous avons constaté que presque tous les émetteurs de cartes de crédit aux États-Unis exigeaient le même prix, à savoir un taux annuel d'environ 19,8 p. 100. Le taux d'intérêt ayant cours sur les cartes de crédit était élevé pour prémunir les banques émettrices contre la petite proportion de clients en défaut de paiement. Ainsi, les clients à faible risque subventionnent en réalité les clients à risque élevé.
N'étant pas banquiers de formation, nous avons mis au point une approche différente. Nous avons élaboré de puissants modèles statistiques nous permettant de prédire le risque de défaut de paiement de clients particuliers. Nous avons également étudié quelles caractéristiques des cartes de crédit attireraient divers groupes. Du fait que nous nous sommes concentrés sur ce secteur d'activité, nous sommes devenus des experts, et les consommateurs en ont grandement profité. En bref, nous avons mis au point des produits sur mesure pour chaque client. Alors que de nombreuses institutions financières offrent une carte VISA ou MasterCard selon quelques formules seulement, par exemple les versions régulières et «or», nous avons des milliers de formules différentes et nous pouvons fournir le bon produit à la bonne personne.
Nous tirons aussi fierté du fait que notre expertise nous a permis d'offrir des produits VISA et MasterCard à de nombreuses personnes qui n'auraient pu s'en procurer selon les normes de prêt traditionnelles des banques. Depuis 1988, lorsque nous avons amorcé notre stratégie actuelle, le taux d'intérêt moyen offert pour les nouveaux comptes de cartes de crédit aux États-Unis a chuté, passant de plus de 19 p. 100 à moins de 10 p. 100, en grande partie à cause des pressions concurrentielles exercées par Capital One et quelques autres émetteurs de cartes qui ont commencé à offrir un meilleur taux à la majorité des consommateurs.
Les consommateurs américains ont beaucoup profité de la concurrence accrue que Capital One et d'autres intervenants ont suscitée sur le marché grâce à un taux inférieur, à des caractéristiques améliorées des produits et à une plus grande disponibilité du crédit.
Je me tournerai maintenant vers notre interprétation de la justification de la politique avancée dans le livre blanc. Les artisans de la politique gouvernementale semblent avoir conclu que, parce que Capital One fonctionne comme une banque aux États-Unis, l'entreprise devrait fonctionner ainsi au Canada. On a cependant omis, en formulant cette conclusion, de prendre en considération certains facteurs clés.
La loi des États-Unis n'exige pas que Capital One fonctionne comme une banque dans ce pays. Il s'agit tout simplement pour nous d'un bon mode de fonctionnement aux États-Unis. Pour autant que nous le sachions, émettre des cartes de crédit n'a jamais nécessité, pas plus au Canada que dans d'autres pays, que l'émetteur soit réglementé en tant qu'institution financière. Depuis des années, de nombreux magasins de détail offrent des cartes de crédit. Dans le contexte d'une organisation qui émet des cartes de crédit à des consommateurs, on ne retrouve aucun des risques normalement couverts par la réglementation relative aux institutions financières.
Les banques canadiennes ne sont pas soumises à la réglementation parce qu'elles émettent des cartes de crédit; elles le sont parce qu'elles acceptent des dépôts des consommateurs, parce qu'elles sont assurées par la SADC et parce qu'elles font partie du système de paiements. Il n'est pas nécessaire d'exiger que Capital One soit réglementée à titre de banque au Canada pour protéger les dépôts de consommateurs puisque l'entreprise ne peut pas accepter et n'acceptera pas de dépôts du Canada. Il n'est pas non plus nécessaire de protéger le système de paiements étant donné que Capital One n'en fera pas partie. Réglementer Capital One au Canada comme une banque ne serait d'aucun avantage pour les consommateurs canadiens et ne ferait que mener à l'embauche d'un plus grand nombre de chargés de la réglementation, ce qui ne servirait aucune fin de principe.
Cela soulève également la question de savoir si d'autres émetteurs de cartes au Canada, par exemple Canadian Tire et Zellers, devraient être réglementés comme des banques simplement parce qu'ils émettent des cartes de crédit.
De fait, exiger de Capital One et d'autres entreprises semblables qu'elles fonctionnent au Canada comme des banques équivaudrait simplement à encourager ces compagnies à se fier sur les dépôts assurés qu'elles peuvent attirer pour une partie de leur financement, étirant par le fait même davantage le filet de sécurité que constitue l'assurance-dépôts fédérale.
La politique proposée imposerait à Capital One un fardeau réglementaire auquel les investisseurs canadiens ne seraient pas assujettis. Ce traitement discriminatoire enfreindrait les obligations du Canada aux termes de l'ALÉNA.
Capital One sera assujettie aux diverses règles provinciales qui régissent l'offre de crédit aux consommateurs. Capital One s'est également soumise volontairement aux règles fédérales sur la divulgation du coût d'emprunt, qui s'appliquent aux banques. Ces règles sont au coeur de la réglementation visant à contrebalancer comme il se doit les risques que comporte pour les consommateurs canadiens le prêt par carte de crédit.
Un important objectif de principe des facettes du livre blanc relatives aux banques étrangères est la catégorisation des fournisseurs de services financiers étrangers de manière à offrir à ces fournisseurs une approche réglementaire plus simple et plus claire. Nous croyons fermement que la proposition actuelle a l'effet contraire. Les banques étrangères ne constituent pas un groupe homogène; elles sont assujetties à une réglementation de types et de niveaux variés. Le ministre sera donc obligé de faire preuve d'une discrétion semblable pour ce qui est de la catégorisation des institutions financières, contrecarrant ainsi l'objectif recherché par la politique. Nous croyons qu'une solution de rechange consisterait à réglementer les banques étrangères en fonction des activités qu'elles exercent au Canada, plutôt qu'en fonction de la réglementation à laquelle elles sont assujetties dans leur pays d'origine pour les activités qu'elles y mènent.
Si une banque étrangère a l'intention d'accepter des dépôts assurés au Canada ou d'avoir recours au système de paiements, il convient peut-être de la réglementer au Canada comme une banque. Cependant, si elle limite ses activités au Canada à des services qui ne comportent pas l'acceptation de dépôts assurés ou qui ne touchent pas le système de paiements, cette banque étrangère n'aurait pas à être réglementée ici comme une banque.
Nous croyons que cette approche fonctionnelle permettrait de mieux atteindre l'objectif qui sous-tend le livre blanc, d'offrir aux consommateurs l'avantage d'une concurrence accrue et, en même temps, d'éviter les résultats inéquitables et incertains de la politique proposée.
En conclusion, Capital One aimerait beaucoup se lancer en opération au Canada. Si nous y parvenons, nous croyons pouvoir fournir aux consommateurs canadiens un service avantageux; l'aspect création d'emplois n'est pas non plus à négliger.
Mes collègues et moi nous ferons un plaisir de répondre aux questions que pourraient se poser le président ou les autres sénateurs.
Le président: Je vous remercie d'avoir été concis tout en nous permettant de comprendre l'enjeu stratégique.
Le sénateur Angus: Monsieur Willey, vous affirmez que vous aimeriez beaucoup émettre des cartes de crédit et vous lancer en affaires au Canada. Je pense que c'est ce que vous déclarez à la fin de votre mémoire. Par conséquent, vous n'avez pas encore commencé, même si vous avez obtenu les autorisations nécessaires.
M. Willey: C'est exact. Nous offrons nos cartes de crédit par publipostage direct. Nous devions faire un premier envoi postal au début de juillet, si je ne m'abuse. La lettre du BSIF est arrivée sur nos bureaux en juin.
Le sénateur Angus: Même s'il ne s'agit que d'un livre blanc -- ce n'est pas encore une loi -- le BSIF s'est appuyé sur ce document pour vous arrêter.
M. Willey: Non. La lettre indiquait que, compte tenu du livre blanc et du fait que nous serions considérés comme une banque étrangère en vertu de cette politique, on nous invitait à discuter avec eux de nos plans de transition pour nous adapter aux exigences du livre blanc. Cela voulait dire, évidemment, que nous serions une banque de l'Annexe II. Or, notre plan d'affaires ne le prévoyait pas du tout. Il faut des investissements beaucoup plus importants et un plan d'affaires bien différent pour appuyer une banque de l'Annexe II plutôt que la méthode d'accès qui avait déjà été approuvée.
Le sénateur Angus: Si j'ai bien compris, à part la publication du livre blanc aux fins de discussion, rien n'a changé. Les règles du jeu semblent avoir changé. Je comprends d'où vous vient cette impression. Mais en réalité, les règles n'ont pas changé.
Je comprends aussi que, lorsque les autorités vous disent qu'il vaudrait mieux ne pas aller de l'avant, malgré les autorisations accordées auparavant, vous obéissez. De fait, j'essaie d'organiser les questions que je poserai au BSIF. Franchement, cela me paraît un peu inhabituel.
M, Willey: Le BSIF nous a d'abord indiqué qu'il appliquerait cette politique immédiatement. À toutes fins utiles, nous avons compris que nous devions penser aux moyens de nous conformer à ce régime et qu'ils nous invitaient à discuter d'un plan de transition.
Le sénateur Angus: L'ont-ils fait par écrit? Vous ont-ils informés par écrit qu'ils appliqueraient cette politique immédiatement ou l'avez-vous appris au cours de votre rencontre avec eux?
M. Christopher T. Curtis, avocat général adjoint, Canada One Financial Corporation: Nous n'avons pas la lettre sous les yeux, mais le ministère des Finances nous a indiqué qu'il proposait cette politique qui, à son avis, pouvait avoir des conséquences pour nous. Ils nous ont demandé ce que nous en pensions et nous leur avons présenté notre mémoire.
Le sénateur Angus: Je crois comprendre. Je suis persuadé que le président Kirby vous demandera si vous pouvez nous montrer cette lettre.
Le président: Ce serait très utile.
Le sénateur Angus: J'ai quelques questions qui vous paraîtront peut-être enfantines, mais qui me permettront de mieux comprendre. Vous fonctionnez comme une banque aux États-Unis, n'est-ce pas?
M. Willey: Oui, monsieur.
Le sénateur Angus: Si nous appliquons les règles à la lettre, vous êtes une banque étrangère.
M. Willey: Nous sommes un animal étrange dans le milieu bancaire américain. Nous sommes une banque émettrice de cartes de crédit à buts limités. Capital One est une filiale principale. Aux fins de la réglementation, Capital One Financial Corporation n'est pas considérée comme un holding bancaire.
Nous avons choisi d'exercer nos activités aux États-Unis en tant que banque émettrice de cartes de crédit à buts limités à cause des caractéristiques particulières du marché américain, notamment le fait que nous nous sommes détachés d'une banque commerciale il y a plusieurs années. Il s'agissait d'une banque régionale appelée Signet.
Le sénateur Angus: Une banque qui acceptait des dépôts?
M. Willey: Une banque commerciale de détail à services complets.
Le sénateur Angus: Ce que vous n'êtes plus.
M. Willey: Non. D'ailleurs, nos statuts nous empêchent d'accepter des dépôts de particuliers de moins de 100 000 dollars américains et d'offrir des comptes de chèques. Nous sommes une institution financée sur le marché de gros aux États-Unis.
Le sénateur Angus: Je veux être certain de bien comprendre votre mode de fonctionnement. Vous affirmez que votre principale activité est l'émission de cartes de crédit. Vous avez donné des exemples de produits MasterCard et VISA. Pouvez-vous m'expliquer comment cela fonctionne? Je ne saisis pas comment votre société fonctionne aux États-Unis.
M. Willey: Nous offrons nos produits presque exclusivement par publipostage direct. Nous n'avons pas de succursales. Nous testons de nombreux produits différents, en fonction de la structure des prix, de l'ampleur du crédit offert, du fait qu'il s'agit d'une carte «or» ou qui a d'autres caractéristiques. Nous testons ces produits sur des créneaux différents et faisons une analyse scientifique des résultats pour voir ce qui fonctionne. Lorsque nous avons défini un risque de crédit acceptable, alors nous offrons le produit. Le processus consiste à trouver des créneaux et à concevoir des produits bien adaptés à chacun d'eux.
Le sénateur Angus: Peut-on faire une comparaison avec les pétrolières qui vendent l'essence au détail? Prenons la Pétrolière XYZ par exemple. Vous dégageriez un besoin pour ce produit chez certains consommateurs et émettriez ensuite une carte de crédit pour le produit?
M. Willey: Je vais vous donner deux exemples de certains produits que nous offrons. Un produit qui a remporté beaucoup de succès ces dernières années prévoyait un faible taux de lancement. Le taux d'intérêt annuel était assez bas pour une période de six, douze ou dix-huit mois. Nous visions les consommateurs à faible risque et leur avons donné la possibilité de transférer leur solde chez un émetteur qui exigeait un taux beaucoup plus élevé. Nous avons réussi et avons fait réaliser de grandes économies aux consommateurs parce que nos frais d'intérêt étaient moins élevés.
À l'autre bout du spectre -- ce n'est pas quelque chose que nous avons l'intention de faire au Canada et notre structure actuelle ne nous le permettrait pas non plus -- nous offrons aux États-Unis une carte garantie par le dépôt de sûretés à des gens qui n'ont pas accès au système de crédit ou qui se sont mis dans le pétrin et qui essaient de s'en sortir. C'est à l'autre bout du spectre des risques, mais encore une fois, il s'agit d'un produit sur mesure qui donne accès à du crédit à des consommateurs habituellement incapables d'obtenir un produit de crédit quelconque ou d'avoir accès à des prêts à la consommation.
Il est difficile de vivre sans carte de crédit de nos jours. Il est impossible de louer une voiture sans carte de crédit. Nous tentons de mettre un produit à la disposition de consommateurs que presque toutes les banques classiques excluent de leur clientèle. Nous offrons des cartes de crédit MasterCard ou VISA, des produits conçus sur mesure, soit par leur prix, soit par d'autres caractéristiques, à l'intention de créneaux particuliers.
Le sénateur Angus: VISA et MasterCard sont des marques de commerce, mais à qui appartiennent-elles? C'est clair pour la carte American Express pour la carte Diner's, mais à qui appartiennent VISA et MasterCard? Je suis un peu dérouté.
M. Willey: Vous n'êtes pas le seul. La structure de l'industrie est un peu déroutante. MasterCard et VISA sont des associations qui appartiennent à leurs membres. Une banque qui offre une carte MasterCard ou VISA inscrit son nom sur la carte mais aussi les symboles MasterCard ou VISA. La marque principale, si vous le voulez, est en réalité MasterCard et VISA.
Le sénateur Angus: Elles n'ont pas débuté ainsi. J'ai la mémoire courte, mais il me semble qu'une de nos banques a offert une carte VISA et une autre, pour lui faire concurrence, a commencé à émettre des cartes MasterCard. Maintenant, je constate que les banques les émettent toutes les deux.
M. Willey: Je parlerai d'abord du marché américain. Il s'agissait au départ de mécanismes de paiement concurrents, et les banques ne pouvaient pas faire partie des deux associations. Aux États-Unis, c'est possible désormais. Par l'entremise d'un de ses ancêtres, Capital One a été l'un des membres fondateurs de MasterCard, par exemple. Elle émet des cartes de crédit depuis 1953. Récemment, les règles se sont libéralisées afin que les banques puissent émettre aussi bien des cartes MasterCard que des cartes VISA, et c'est ce que nous faisons. Cela s'appelle la dualité, mais peu importe, puisque ce phénomène n'existe pas encore au Canada. Ici, les banques émettent une carte ou l'autre.
Le sénateur Angus: J'ai une dernière question. Elle porte non pas sur la définition précise de ce qu'est une carte de crédit, mais plutôt sur les services que vous offrez, vous ou Trans Canada Credit Corporation. S'agit-il de services bancaires, aux termes des lois canadiennes?
M. Willey: Je laisserai quelqu'un qui s'y connaît mieux que moi répondre à la question.
Le sénateur Angus: Votre conseiller juridique le saurait probablement, mais puisque vous êtes ici pour nous demander de l'aide et pour attirer l'attention sur cette anomalie qui semble exister, j'essaie de penser à des façons de vous aider. On pourrait peut-être proposer une modification de la définition des services bancaires.
M. Willey: Je pense qu'il ne faudrait vraiment pas considérer nos services comme des services bancaires. En définitive, il s'agit de prêts à la consommation. D'après ce que je sais des prêts à la consommation au Canada, il n'est pas nécessaire d'être une banque pour en accorder. D'ailleurs, l'une des raisons pour lesquelles nous voulions entrer sur le marché canadien et tenter d'aider les consommateurs canadiens dans la mesure de nos moyens est justement que nous n'avons pas besoin d'être une banque. Nous pouvons exercer nos activités par l'entremise d'une institution financière non réglementée. Je crois qu'il existe également au Canada d'autres émetteurs de cartes de crédit qui ne sont pas des banques. Je crois que les compagnies d'assurance peuvent elles aussi offrir des cartes de crédit. Il me semble incongru de parler de services bancaires quand tant d'institutions qui ne sont pas des institutions financières réglementées ou qui ne sont pas des banques peuvent émettre des cartes de crédit sur le marché national.
Le sénateur Kolber: Je suis un peu dérouté moi aussi. Si quelqu'un demande une carte VISA ou MasterCard, que vous donnez votre accord et fixez une limite de crédit, et que cette personne entre ensuite dans un magasin et se sert de la carte, à qui le marchand téléphone-t-il? Appelle-t-il votre société? Y a-t-il un bureau VISA ou MasterCard central?
M. Willey: Oui. Ce n'était pas le cas autrefois. VISA et MasterCard ont tous les deux des réseaux de compensation, si vous voulez. Quand vous entrez dans un magasin, présentez votre carte MasterCard et faites un achat, le marchand communique la transaction grâce à un réseau. La transaction suit son cours jusqu'à la banque émettrice, la Banque Toronto-Dominion ou la Banque de Montréal, peu importe, et est portée à votre compte à cette banque.
Le sénateur Kolber: Qui autorise le crédit à ce moment-là?
M. Willey: L'opération remonte dans le réseau jusqu'à la banque émettrice.
Le sénateur Kolber: Qui autorise le crédit.
M. Willey: Exactement.
Le sénateur Meighen: Qui paie le service que vous venez de décrire?
Le sénateur Kolber: Tous les membres.
M. Willey: Qui paie pour la transmission de l'information?
Le sénateur Meighen: Les membres de l'association ou VISA ou MasterCard?
M. Willey: VISA et MasterCard perçoivent des frais minimes pour chaque transaction afin d'assurer le fonctionnement de la chambre de compensation.
Le sénateur Meighen: Vous n'êtes pas membre, n'est-ce pas?
M. Willey: Si, nous sommes membres de MasterCard et de VISA.
Le sénateur Angus: Les marchands doivent les payer.
M. Willey: Pour boucler la boucle et que vous compreniez d'où proviennent les revenus tirés de ce service, la première source de revenu, ce sont les frais d'intérêt que les consommateurs paient en empruntant sur leur carte de crédit et en reportant une partie du solde. C'est la source de revenu la plus importante.
Il y a deux autres sources. Premièrement, il existe des frais, sous une forme ou une autre, tels que les frais annuels pour maintenir le compte. Deuxièmement, le marchand chez qui vous avez fait un achat de 100 $, ne reçoit en réalité que 97,85 $ environ. Une partie de la différence entre ce montant et 100 $ est aussi remise à la banque émettrice.
Le sénateur Kolber: Pouvez-vous trouver une bonne raison pour laquelle vous devriez être considérés comme une banque si Eaton ne l'est pas?
M. Willey: Non, je n'en vois pas. Les banques sont réglementées afin d'assurer une protection contre les risques inhérents au système bancaire et qui, comme nous l'avons mentionné, nous semblent découler du fait qu'elles acceptent des dépôts, ainsi qu'une protection contre les risques de contagion d'une faillite dans le système de paiements.
Le sénateur Kolber: Il y a un autre risque, cependant. Le marchand court-il un risque?
M. Willey: En réalité, non. Dans la mesure où il fait ce qu'il faut, soit transmettre le message qu'une transaction est sur le point de se faire, le marchand est protégé contre les risques.
Le sénateur Kolber: Si Capital One fait faillite, qui paie la note?
M. Willey: Les transactions sont compensées tous les jours. Il y a un règlement quotidien. Mais c'est un argument défendable, je suppose.
Le sénateur Kolber: Les transactions d'une journée ne seraient pas payées.
M. Willey: Au pire, c'est un risque d'une journée. En réalité, de la façon dont nous prévoyons entrer sur le marché, une banque canadienne existante assumera ce risque de crédit quotidien pour nous. Nous avons conclu une entente avec Canada Trust, qui nous fournira un service et nous donnera accès au système de paiements. Ils nous surveillent et évaluent le risque que nous présentons sur une base quotidienne. Il s'agit uniquement d'un risque de crédit commercial pour Canada Trust.
M. Richard C. Owens, associé, Smith Lyons, Capital One Financial Corporation: MasterCard est une association à deux paliers. Les membres du deuxième palier n'ont pas d'accès direct au système de paiements et n'assument donc aucun risque lié aux marchands MasterCard. Seuls les membres adhérents, qui font aussi partie de l'Association canadienne des paiements -- tous les Canada Trust et toutes les succursales de la Banque de Montréal du monde entier --, assument les risques auxquels s'exposent ces marchands. Ils sont complètement protégés.
Le sénateur Kolber: Ils ne sont pas exposés au risque que vous présentez, n'est-ce pas?
M. Willey: En effet.
Le sénateur Meighen: Vous avez affirmé, en réponse à la question du sénateur Kolber, que vous ne voyez pas pourquoi Eaton ne devrait pas être réglementé de la même façon. Faut-il établir une distinction à cause du fait que Canadian Tire ou Zellers, pour reprendre vos exemples, oeuvrent dans le domaine de la vente de produits, pour le meilleur et pour le pire, alors que vous vous contentez de vendre des cartes de crédit?
M. Willey: Il y a certains avantages, pour cette raison. D'habitude, les détaillants financent des ventes non pas parce que c'est une opération très lucrative, mais plutôt parce que cela fait monter leur chiffre d'affaires. C'est une façon d'accroître les bénéfices. De ce point de vue, nous sommes un peu désavantagés parce que nous ne sommes pas des détaillants.
M. Nick Scarfo, vice-président adjoint et conseil général, Trans Canada Credit Corporation, Norwest Financial Inc.: Canadian Tire émet maintenant des cartes MasterCard en plus des siennes. De nombreux détaillants canadiens commencent à émettre des cartes bancaires.
Le sénateur Meighen: Mon observation est que moins d'entreprises émettent leur propre carte de crédit et qu'elles se tournent de plus en plus vers MasterCard ou VISA.
M. van Leeuwen: Trans Canada Credit prévoit aussi lancer une carte MasterCard en novembre.
Le sénateur Meighen: Avez-vous reçu une lettre du même genre du BSIF?
M. Scarfo: Oui.
M. Steve Wagner, conseil général adjoint, Norwest Financial Inc.: Elle provenait du ministère des Finances, mais oui, nous avons effectivement reçu une lettre semblable.
Le sénateur Meighen: Auriez-vous objection à remettre une copie de cette lettre au comité?
M. Wagner: Non. Nous vous en ferons parvenir une copie.
Le sénateur Meighen: Nous avons entendu ce matin des représentants de l'Association des banquiers canadiens. Je ne veux pas leur faire dire ce qu'ils n'ont pas dit, mais il me semble qu'un de leurs arguments était que si vous menez des activités bancaires -- et supposons que vous le faites, pour le plaisir de l'argument -- alors, pas plus vous que personne d'autre ne devriez pouvoir être sélectifs, choisir une activité bancaire en particulier et ne pas être assujettis à la réglementation relative aux banques étrangères, voire même aux banques en général. Répondez-vous simplement que la réglementation devrait se limiter à l'acceptation des dépôts et que les autres activités devraient rester en grande partie non réglementés?
M. Willey: Je pourrais m'exprimer dans des termes un peu plus larges. L'hypothèse de base est que nous avons décidé d'accepter des dépôts et d'avoir accès au système de paiements. L'idée que nous voudrions faire valoir est qu'il faudrait mettre l'accent sur l'objet de la réglementation. Autrement dit, que cherche-t-on à obtenir, grâce à la réglementation? Il faudrait ensuite adapter les règlements en conséquence. Dans ce cas-ci, nous sommes incapables de voir quel effet positif découlera de la réglementation. Les coûts augmenteront et il faudra une bureaucratie plus lourde. Bien des aspects ne semblent positifs pour personne. Nous n'arrivons pas à imaginer une justification positive de cette réglementation.
En ce qui concerne la sélection des activités, les succès de Capital One aux États-Unis dépendent surtout des changements technologiques fondamentaux et d'une transformation radicale des forces du marché. Capital One n'est pas seule à remporter des succès. Une demi-douzaine d'émetteurs de cartes de crédit qui nous ressemblent ont remporté eux aussi des succès semblables. Ils recherchent des créneaux très pointus. Ce que nous cherchons, c'est dégager les tendances sur le marché, voir les forces du marché et les devancer. Il est difficile d'imaginer qu'une justification valable de la réglementation consiste à aller à contre courant et à s'opposer aux forces du marché.
Le sénateur Meighen: Ai-je bien compris que vos négociations avec vos clients éventuels se font par publipostage direct?
M. Willey: C'est exact.
Le sénateur Meighen: Vous n'avez donc pas besoin d'une présence concrète au pays, n'est-ce pas? Vous pourriez faire tout cela à partir de l'étranger.
M. Willey: Le plan que nous avons proposé et qui a été approuvé par tous ceux que nous avons déjà mentionnés, consiste à sous-traiter toutes ces activités à des fournisseurs canadiens. Par exemple, en ce qui concerne l'administration des comptes, si vous téléphonez pour poser une question au sujet de votre compte après que le relevé a été imprimé et posté, Canada Trust s'en occupe. Ceux qui produisent le matériel destiné au publipostage sont des fournisseurs canadiens. Il y a des investissements importants au Canada. Des emplois sont créés indirectement, par l'entremise de Canada Trust. J'ai parlé de nos tests et de notre approche axée sur le marché. Nous avons l'intention d'effectuer des tests de ce genre. S'il nous paraît ensuite logique d'entrer en force sur le marché, alors ce serait le prolongement naturel de nos activités.
Le sénateur Meighen: D'où proviendraient vos envois?
M. Willey: D'ici. Il y a une certaine activité transfrontalière, en ce qui concerne notamment le traitement des données et l'impression. Le courrier entrerait dans le réseau postal canadien au Canada.
Le sénateur Hervieux-Payette: Je fais remarquer à mes collègues que vous nous avez fourni trois avis juridiques sur l'interprétation de la législation canadienne. Des lois presque identiques des deux côtés de la frontière nous causent souvent des ennuis. Votre définition des «services financiers» diffère de la nôtre. Pour mon collègue de chez Smith Lyons, il y a une définition d'«institution financière» à la page 4. Le paragraphe h) porte sur une institution étrangère.
Ce n'est peut-être pas la réponse à la lettre du ministère des Finances. Mais je ne sais pas où ils ont pris cette définition. Je voulais simplement attirer l'attention de mes collègues sur ce fait.
Ma question porte sur vos activités dans le domaine de l'émission de cartes de crédit aux États-Unis. J'avais l'habitude de recevoir des factures d'American Express qui s'accompagnaient d'une liste d'environ 200 objets que je pouvais acheter. Faites-vous aussi des ventes par publipostage direct?
M. Willey: Je sais de quoi vous parlez. Je recevais la même publicité.
Le sénateur Hervieux-Payette: On pouvait acheter presque n'importe quoi -- un bateau, une automobile ou un avion.
M. Willey: Nous offrons quelques produits supplémentaires à nos clients. Nous leur donnons aussi la possibilité de se désaffilier, à plusieurs reprises dans l'année. Contrairement à de nombreux marchands aux États-Unis, nous ne mettons pas notre liste à la disposition d'autres distributeurs. Nous essayons d'être sensibles aux intérêts des clients, qui ne veulent pas recevoir ce genre de publicité. Nous offrons nos produits à ceux qui aimeraient les recevoir.
Le sénateur Hervieux-Payette: Pourquoi offrez-vous des taux d'intérêt si généreux? Vous devez réaliser des profits ailleurs. Pas seulement grâce à la concurrence avec les banques. Si vous étiez obligés de fonctionner comme banque étrangère, serait-ce impossible parce que le rendement sur votre investissement ne serait pas assez élevé? Si vous étiez assujettis aux mêmes règles que les autres banques étrangères qui accordent des prêts et émettent des cartes de crédit, quelles seraient les conséquences pour votre société?
M. Willey: Notre plan d'affaires -- et la situation de Trans Canada diffère de la nôtre -- prévoit des marchés-tests. Pour pouvoir mener ces tests aisément, moins l'infrastructure fixe sur le marché est lourde, plus il est facile de mener aisément des tests prolongés. Ces tests s'échelonnent parfois sur cinq ans. Pour devenir une banque de l'Annexe II, nous aurions besoin d'au moins 10 millions de dollars en capital. Il faudrait faire toutes les déclarations exigées par la réglementation et en assumer tous les frais, notamment ceux d'un conseil d'administration. Il y a une foule d'exigences très sensées qui s'appliquent aux banques lorsqu'il y a un risque pour l'assurance-dépôts et un risque pour le système de paiements.
Pour nous, cela représente des dépenses importantes et nous incite moins à essayer quelque chose pendant cinq ans sans espoir immédiat de recouvrer notre mise et sans vraiment comprendre la logique de la politique publique.
Le sénateur Hervieux-Payette: Si je vous comprends bien, vous exigeriez un taux d'intérêt plus élevé ou vous ou laisseriez tomber.
M. Willey: Au bout du compte, nos bénéfices seraient plus bas ou nos prix, plus élevés. Je suppose qu'une base de coûts plus élevée sur l'un ou l'autre de nos marchés se traduirait un jour par une hausse de prix.
M. van Leeuwen: Le profil de nos clients est très différent de celui de la clientèle des banques. En 1978, nous faisions partie du groupe Trader's, et le Guaranty Trust était notre société de fiducie. Nous avons fait une expérience avec quatre succursales de Trans Canada Credit. Nous avons essayé de les transformer en une société de fiducie ou une banque. Nous avons finalement fermé ces succursales. Nous avons découvert, et cela ne m'a pas étonné, que nos clients sont des emprunteurs, pas des épargnants.
Il est question d'une entreprise qui réussit à servir un créneau et qu'on transforme en une banque. Lorsque les consommateurs canadiens pensent à une banque, ils pensent à des taux d'intérêt moins élevés. Si nous devenons une banque, nos taux seront élevés, cela ne fait aucun doute. Il sera intéressant de voir nos taux affichés sur un marché qui comparera tous nos services à ceux de la Banque Royale et de la Banque Toronto-Dominion. C'est presque impossible à imaginer. Je ne sais pas comment vous pouvez convaincre les clients que nous sommes une banque mais que nous fonctionnons comme une société de crédit.
Il faut tenir compte aussi de la structure des coûts liée à la conversion nécessaire pour répondre aux exigences en matière de déclaration et à toutes les exigences qui nous seront imposées et auxquelles nous ne sommes pas assujettis actuellement. Les règles du jeu étaient égales pour tous auparavant, et notre filiation n'y change rien. C'est un problème pour nous.
Le président: Je vais essayer de résumer, et n'hésitez pas à me corriger si je me trompe.
Monsieur van Leeuwen, vous exercez vos activités au Canada depuis 1940, depuis longtemps donc. Votre société mère n'a pas changé récemment.
M. van Leeuwen: En 1992, Norwest Financial a acheté notre société, après la faillite de Central Guaranty Trust.
Le président: Depuis 1992, vous appartenez à ce que j'appelle la portion non réglementée du secteur des services financiers en ce sens que vous n'êtes pas assujettis à la réglementation fédérale, pas plus que vous ne l'étiez quand vous étiez une filiale de Central Trust.
M. van Leeuwen: Exactement.
Le sénateur Angus: Quand Central Guaranty a fait faillite, votre filiale était encore une société en activité et était solvable.
M. Willey: La vente de l'entreprise a été lucrative, alors nous étions très rentables.
Le président: Il semble que le ministère ou le BSIF ou les deux font comme si les changements proposés avaient été adoptés. Voilà pourquoi nous aimerions avoir copie de vos lettres. Mais les changements proposés ont clairement un effet rétroactif. En un sens, ils renversent le statu quo. Pour reprendre vos termes, ils changent les règles du jeu pour vous mais pas pour vos principaux concurrents tels que Avco, Household ou Beneficial.
M. van Leeuwen: C'est exact.
Le président: Avco, Household et Beneficial comparaîtront immédiatement après vous et s'exprimeront certainement sur la question du financement sur le marché de détail. Cette question vous touche-t-elle vous aussi, ou êtes-vous à l'abri parce que votre société mère est une banque?
M. Wagner: Nous sommes aussi touchés actuellement par la question du financement sur le marché de détail.
Le président: Vous avez choisi d'insister sur l'autre problème.
M. Wagner: Oui.
Le président: Monsieur Willey, je veux comprendre clairement votre position. Vous vous êtes définis aux États-Unis comme une banque à buts limités. D'après ce que vous me dites, vous n'avez en réalité qu'un but, soit l'émission de cartes de crédit.
M. Willey: Oui.
Le président: C'est assez limité. Vous avez reçu toutes les autorisations gouvernementales en mars, ou au cours de l'année, pour lancer un nouveau type d'entreprise, conformément à la loi. On ne vous a jamais avertis, au cours de ce processus, que les autorisations que vous étiez sur le point de recevoir pourraient vous être retirées par la suite, parce que le cadre dans lequel vous alliez fonctionner risquait de changer radicalement.
M. Willey: C'est exact.
Le président: Ils vous ont dit, trois mois plus tard, après la publication du livre blanc, que le cadre avait effectivement changé et ils vous ont répété qu'ils agiraient comme si ces propositions étaient déjà adoptées.
M. Willey: C'est exact.
Le président: Nous recevrons copie d'une lettre qui le confirme.
De plus, votre but unique consiste à émettre des cartes de crédit à des particuliers à un taux d'intérêt nettement plus bas, selon vous, que les taux pratiqués par les autres émetteurs de cartes de crédit au Canada; pas simplement les banques, tous les émetteurs.
M. Willey: C'est exact.
Le président: Je voulais m'assurer d'avoir compris. Vous avez présenté vos arguments très clairement.
Le sénateur Stewart: Dans votre déclaration, vous avez affirmé que la loi américaine n'oblige pas Capital One à fonctionner comme une banque aux États-Unis, mais qu'il est logique pour vous de fonctionner ainsi dans ce pays.
Si je comprends bien, vous affirmez que vos activités aux États-Unis ne sont pas des opérations bancaires, techniquement, et que vos activités au Canada ne seraient pas des opérations bancaires non plus, n'est-ce pas?
M. Willey: En gros, je suis d'accord avec vous. Capital One Bank est effectivement une banque. Capital One Financial Corp., sa société de portefeuille, n'est pas considérée comme un holding bancaire aux fins de la réglementation. Nous ne sommes pas obligés de fonctionner comme une banque. C'est un peu l'héritage d'une situation commerciale antérieure.
En ce qui concerne les opérations bancaires nécessitant une réglementation, je dirais que, non, il ne s'agit pas d'opérations bancaires, parce je ne peux pas, en toute candeur, définir le risque que la réglementation viserait à atténuer ou à contrôler. Si l'on emploie le terme «bancaire» pour désigner des opérations qui ont besoin d'être réglementées, je dirais qu'il ne s'agit pas d'opérations bancaires.
Le sénateur Kolber: Au cours de nos audiences, nous ne cessons d'entendre le mot «sélection», comme s'il s'agissait d'une plaie d'Égypte. Nous devrions peut-être parler plutôt de «spécialisation». On ne critique pas celui qui vend uniquement des Mercedes Benz. Je pense qu'on a tendance à l'oublier un peu.
Le président: C'est considéré comme péjoratif, la plupart du temps.
Le sénateur Meighen: À cause de l'interfinancement.
Le sénateur Kolber: S'ils veulent seulement émettre des cartes de crédit, ce n'est pas être sélectifs, c'est un type d'activité commerciale.
Le président: Merci beaucoup, messieurs, d'être venus aujourd'hui.
M. Denis Savard est président du conseil de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes.
Veuillez procéder.
[Français]
M. Denis Savard, président du conseil de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes: Honorables sénateurs, l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec -- l'AIAPQ -- tient à remercier le comité sénatorial permanent des banques et du commerce, ainsi que le secrétaire d'État aux finances, de l'avoir invité à présenter ses commentaires concernant l'examen de 1997 de la législation régissant les institutions financières. Permettez-moi de vous présenter les personnes qui m'accompagnent. À ma gauche, Me Anne-Marie Beaudoin qui est conseillère principale à la direction générale de notre association. À ma droite, M. Alain Poirier qui est premier vice-président et courtier en assurance de personnes.
L'AIAPQ qui regroupe près de 13 000 agents et courtiers en assurance de personnes du Québec, a été formée en 1989. Notre association est le prolongement juridique d'une autre association qui existait depuis plus de 30 ans.
Nous ne sommes pas et nous ne représentons pas les intérêts socio-économiques de nos membres. Lors de sa constitution, par la loi 134, l'association s'est vue confier par le législateur une double mission, celle de protéger le public investisseur et épargnant, et, celle de développer et de contrôler la qualité des services professionnels offerts aux consommateurs par ses membres et d'assurer le respect d'une déontologie rigoureuse par chacun d'entre eux.
Au cours des dernières années, l'AIAPQ a établi sa réputation dans l'ensemble du Canada, en fixant des objectifs élevés de formation professionnelle et d'encadrement des personnes appelées à offrir des services professionnels d'assurance et de conseils financiers aux consommateurs.
Nous avons élaboré des contenus de formation très évolués et favorisé l'accroissement soutenu de la compétence chez nos membres en leur facilitant l'accès à des titres bien définis correspondant à des niveaux d'expertise soigneusement évalués, sanctionnés par les titres d'Assureur-vie certifié et d'Assureur-vie agréé.
L'Association conçoit et gère les mécanismes de perfectionnement qui permettent de parfaire la formation des diplômés et contribue à la définition et à la mise en place des programmes de formation continue, dispensés par le secteur public et par ses propres instances.
L'AIAPQ a participé aux différentes consultations qui ont précédé l'examen de 1997. Elle a donc déjà eu l'occasion de commenter l'héritage de la réforme de 1992, eu égard à la concentration et à la croissance des activités des institutions financières fédérales. C'est pourquoi nous serons très brefs sur ce point.
L'AIAPQ ne s'intéresse que de façon accessoire à la question du contrôle financier des institutions, pourvu que tous les gestes d'intermédiation soient posés par des personnes hautement et uniformément qualifiées.
Néanmoins, l'association apprécie la sagesse du gouvernement fédéral qui n'a pas favorisé l'entrée immédiate des banques dans le secteur de l'assurance et à choisi plutôt, comme enjeu de la réforme prévue en 1997, la consolidation du décloisonnement de la réforme de 1992 et l'ajustement des mesures de protection du public.
Dans le cadre de la présente consultation, l'association entend aborder uniquement 7 points: le premier, la protection des renseignements personnels; le deuxième, les ventes liées, le troisième, les chevauchements entre les réglementations fédérales et provinciales; le quatrième, l'obligation de passer par une filiale soit un cabinet d'agent; le cinquième, la capitalisation des sociétés mutuelles d'assurance; le sixième, le système de paiement; et, le septième, l'assurance crédit en cas de perte d'emplois.
Le premier point: «La protection des renseignements personnels».
De par la nature même des renseignements détenus par les institutions financières, les attentes du public concernant la réglementation des renseignements personnels sont nombreuses et exigeantes. Les mesures envisagées dans le livre blanc sont un pas dans la bonne direction mais devraient être complétées. La cueillette, la conservation, la communication et l'utilisation de ces renseignements personnels doivent être réglementées et surveillées d'une façon stricte et uniforme par un organisme indépendant des institutions mêmes.
Pour toutes les institution financières, la détention et l'utilisation des renseignements personnels constituent un actif important et deviennent un avantage concurrentiel, surtout à l'heure des inforoutes. Dans ce contexte, ces institutions sont, à notre avis, inaptes à assumer entièrement le contrôle et le suivi des mesures de protection de renseignements, sans être en perpétuel conflit d'intérêts. Bien que l'on puisse encourager une responsabilisation de l'institution à l'égard des plaintes provenant du public ayant trait aux renseignements personnels, nous croyons qu'il serait préférable pour le gouvernement de garder la responsabilité de veiller à l'application de ces règles.
Par ailleurs, nous estimons que le privilège confié aux institutions par le système de paiement et l'accès aux renseignements personnels qui en découlent, doivent être entièrement et totalement cloisonnés par rapport aux autres activités de l'institution et ce, sans exception. Par ceci, nous désirons déroger au principe qu'un individu peut, par consentement, dispenser une institution d'une partie ou de la totalité de ses obligations à l'égard des renseignements personnels. La transmission de renseignements personnels serait donc interdite de façon absolue.
Il nous apparaît également pertinent de vous soumettre le fait que les professionnels de l'intermédiation financière du Québec sont personnellement et individuellement assujettis à des obligations strictes concernant les renseignements personnels. Notre association et ses instances surveillent les agents et courtiers en assurance de personnes et vérifie la conformité de leur pratique à la réglementation en vigueur, entre autres, par des activités d'inspection professionnelle. C'est donc une garantie supplémentaire dont bénéficierait le public que de faire affaire avec un intermédiaire en assurance de personnes, exerçant par le truchement d'un cabinet d'agent, filiale d'une institution financière fédérale.
Le deuxième point: «Les ventes liées». Nous sommes de ceux qui croient que la nature particulière de la relation existant entre les consommateurs et leur institution financière est telle qu'ils sont particulièrement exposés à la coercition. C'est pourquoi nous pensons que les dispositions actuelles sont insuffisantes et nous aimerions participer à l'étude que vous proposez sur la nécessité de prendre des mesures plus énergiques.
Dans ce cadre, l'élaboration d'une réglementation adéquate sur les fonctions incompatibles pour un préposé d'institutions devrait être considérée.
À ce sujet, l'AIAPQ pourra apporter de façon plus détaillée l'éclairage spécifique de son dossier d'enquête spéciale portant sur l'assurance-vie et invalidité collective vendues par les institutions financières de façon concomitante avec un prêt hypothécaire que nous appelons communément: le Dossier noir de l'assurance hypothécaire dont nous avons copie ici devant nous.
Par ailleurs, nous aimerions également soumettre à votre attention le fait que l'offre d'une variété de produits financiers, surtout ceux issus traditionnellement d'un autre secteur d'activités dans la succursale d'une institution financière peut être l'objet d'une confusion pour le consommateur, surtout si un même préposé cumule d'autres fonctions auprès des clients. Nous sommes convaincus que, dans le cadre de vos efforts contre les ventes liées, le fait d'exiger l'utilisation d'une filiale cabinet d'agents, de maintenir une distinction claire des activités et de respecter les exigences de chaque juridiction pertinente reliée au secteur d'activités telle que l'assurance, les valeurs mobilières, sont des mesures efficaces qui doivent être maintenues voire même étendues. Étendues aux assurance-vie collectives actuellement autorisées dans les banques.
En effet, même dans le cadre de la vente de produits d'assurance liés au crédit, qui est autorisée en succursale, nous avions déjà exprimé dans notre mémoire intitulé: Abus, risques et tragédies découlant de la vente directe d'assurance de personnes, que nous vous avons soumis en juin 1995 au ministère des Finances du Canada, notre opposition voulant que seuls des intermédiaires en assurance de personnes qualifiés et autorisés devraient être habilités à offrir au public de tels produits.
Le Dossier noir de l'assurance hypothécaire, avec preuve à l'appui, démontre mieux encore que la réglementation et l'encadrement actuel ne sont pas adéquats. Le fait d'être référé à une personne qualifiée et certifiée, pour l'achat de ces produits d'assurance liés au crédit, représente beaucoup d'avantages pour le consommateur dont celui de limiter les situations propices aux ventes liées et de distinguer les deux transactions.
Nous tenons à vous assurer de notre disponibilité pour vos consultations futures, afin de contribuer à l'étude de mesures qui amélioreraient la protection des consommateurs dans leurs transactions avec les institutions financières. Le rapport de force entre les grandes institutions et l'individu consommateur est tellement inégal, que le gouvernement ne doit pas craindre de prendre des mesures énergiques pour prévenir les cas problèmes. De nombreux exemples témoignent du fait que les recours, lorsque une personne est lésée, sont inaccessibles, voire inexistants.
Le troisième point, maintenant: «Les chevauchements et les dédoublements entre les réglementations fédérales et provinciales». Depuis la réforme de 1992, les institutions fédérales de type bancaire ont été autorisées par l'entremise de filiales dûment autorisées, à entrer dans des secteurs d'activités tels que l'assurance. Ce qui est important, c'est que les règles de protection soient applicables à tous et à toutes les institutions financières qui choisissent d'offrir ce type de produits ou de services financiers, peu importe leur nature ou la juridiction de leur constitution.
En ce qui concerne l'intermédiation de marché et plus particulièrement, la distribution de produits d'assurance de personnes, la juridiction provinciale est établie et occupée par le gouvernement du Québec. Elle est d'ailleurs actuellement en révision suite au dépôt d'un rapport quinquennal.
Le quatrième point: «L'obligation de passer par une filiale». Nous avons insisté précédemment sur l'importance, pour la protection du public, de maintenir une division entre les activités de base des différents types d'institutions financières et, de cette façon, exiger l'utilisation d'une filiale cabinet d'agents, notamment en assurance de personnes.
Nous comprenons que le gouvernement n'entend pas recommander le retrait de cette exigence pour notre secteur d'activités. Cependant, nous préférons immédiatement préciser qu'un motif tel que la réduction des coûts d'exploitation ne pourrait le justifier.
Le cinquième point: «La capitalisation des sociétés mutuelles d'assurance». Il nous apparaît judicieux d'adopter des mesures pour faciliter l'accès au capital pour les mutuelles d'assurance, car ainsi celles qui le désirent pourront grandir et prospérer tout en conservant leurs caractéristiques fondamentales de mutuelles. Il serait plus que désolant d'assister à la disparition complète de cette catégorie d'institutions financières appartenant aux assurés, donc aux consommateurs.
Il ne faut pas, de cette façon, favoriser la démutualisation. Les mutuelles d'assurance font partie de l'histoire de l'assurance au Canada et répondent aux besoins des mutualistes qui sont des consommateurs avant tout.
Le sixième point: «Le système de paiement». C'est à bon escient que le gouvernement fédéral entreprend une vaste étude du système de paiement et que, dans l'intervalle il n'élargit pas les secteurs d'activités des institutions financières fédérales. Le consommateur doit être au c<#0139>ur de cet examen et ses droits et obligations à l'égard de tels services doivent être priorisés avant tout.
Il est évident, pour tous les intervenants financiers, que l'accès au système de paiement constitue un enjeu concurrentiel pour les institutions financières. Fortes de cet avantage indéniable, les banques souhaitent maintenant rivaliser aussi dans d'autres secteurs d'activités. Dans ce nouveau contexte, il est difficile de justifier le maintien de l'exclusivité de cette fonction aux institutions de dépôts.
Nous recommandons donc au gouvernement fédéral de donner accès au système de paiement aux institutions financières que sont les compagnies d'assurance. L'AIAPQ aimerait participer à toutes vos consultations sur ce sujet.
Le septième et dernier point: «L'assurance crédit en cas de perte d'emploi». Le projet propose, à titre de modification d'ordre technique, d'ajouter aux catégories d'assurance autorisées, l'assurance crédit en cas de perte d'emploi dans la branche d'assurance-vie.
L'AIAPQ a déjà exprimé au gouvernement fédéral notre position voulant que seuls des intermédiaires qualifiés et autorisés puissent offrir en toute sécurité au public des produits d'assurance.
Nous estimons que partant d'un concept d'assurance collective liée au crédit, l'offre de produits s'est détournée de sa sens initial; empruntant à la fois les caractéristiques d'un produit individuel et celles d'un produit collectif, mais toujours dans ce qui est le moins profitable aux consommateurs.
Le Dossier noir de l'assurance crédit hypothécaire de l'AIAPQ démontre bien que la réglementation et l'encadrement applicables à ces produits et aux individus qui les offrent ne sont pas adéquats. Il n'est donc pas prudent d'ajouter de nouvelles catégories d'assurance à celles déjà prévues. Au contraire, tenant compte du niveau de confiance que le consommateur leur accorde, il doit pouvoir compter sur le même service de qualité lorsqu'il acquiert un produit d'assurance dans une institution financière.
Le livre blanc fédéral indique la sagesse du gouvernement de limiter pour l'essentiel, l'examen de 1997 à la consolidation de la réforme de 1992, tout en initiant un groupe de travail sur l'avenir du secteur financier canadien au XXIe siècle.
Les questions d'intérêt public soulevées dans le livre blanc sont importantes et méritent réflexion. Il nous apparaît approprié de vous faire savoir que l'AIAPQ serait fier de contribuer à ce groupe de travail.
Le sénateur Meighen: Vous avez fait allusion, à plusieurs reprises, au groupe de travail que le ministre entend mettre sur pied -- espérons que cela se fera d'ici peu. Y a-t-il quelque chose qui a une urgence totale et capitale pour votre groupe et qui pourrait faire l'objet d'un changement dans les règlements, en attendant les changements en profondeur que pourrait proposer ce groupe de travail?
M. Savard: Le point le plus important, c'est d'établir que les mêmes règles du jeu soient appliquées pour tous, peu importe la façon dont l'assurance pourrait être distribuée. Actuellement, il se distribue de l'assurance collective dans les institutions financières, les institutions de dépôts et elles n'ont à respecter aucune règle du jeu dans la distribution de ces produits. Elles peuvent procéder à des remplacements de produits d'assurance détenus par des consommateurs et elles n'ont à satisfaire aucune règle de déontologie qui leur est applicable.
Ce que l'on souhaite c'est que, à l'égard de toute assurance collective distribuée dans les institutions financières actuellement, cela nécessite l'intervention d'un intermédiaire qualifié. Ce que l'on suggère, c'est d'utiliser l'entremise d'une filiale pour l'institution financière, c'est-à-dire un cabinet d'agents qui soit distinct de l'institution financière pour permettre aux consommateurs de voir qu'il y a deux transactions financières qui s'opèrent; une concrètement de l'acquisition d'un prêt ou d'une marge de crédit. Mais lorsqu'il s'agit de protéger par une assurance cet emprunt, que l'on s'adresse à une autre personne et qu'il n'y ait pas de possibilité de confusion ou que les ventes liées soient distinctes pour les consommateurs et qu'ils ne se sentent pas obligés de souscrire moralement l'assurance puisqu'un prêt vient de lui être consenti.
Nous avons expliqué de quelle façon laxiste s'opérait cette vente d'assurance par les préposés actuellement, dans les institutions de dépôts, parce qu'elles n'ont aucune compétence en assurance et, trop souvent, on a vu des cas qui se sont retrouvés devant les tribunaux. C'est ce qu'illustrait notre Dossier noir, le consommateur qui, se croyant assuré au moment où il arrive une réclamation en invalidité ou lors d'un décès, la succession se fasse dire qu'ils ont toujours payé les primes, mais qu'ils n'ont jamais été protégés puisqu'il y avait des conditions préexistantes. On a oublié de leur poser des questions sur leur santé, et si on l'avait fait de façon adéquate, on aurait, dès le départ, averti la personne qu'elle ne rencontrait pas les exigences de cette assurance. Donc, ils remboursent les primes dans le compte du client, et il doit continuer son hypothèque à la succession. Et comme cela a pris quatre, cinq ou six mois, pour donner le verdict du refus, le client est six mois en retard et doit rétablir les paiements sinon la maison ne lui appartiendra plus.
Des nombreux consommateurs se sont retrouvés dans des situations semblables et c'est une situation qui ne peut attendre plus longtemps. On doit corriger cette partie.
Le sénateur Meighen: Est-ce que l'on pourrait exiger ce recours à un cabinet indépendant par simple règlement?
M. Savard Oui.
Le sénateur Meighen: Ou si cela prendrait un changement législatif?
Mme Anne-Marie Beaudoin, conseillère principale à la direction générale de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes: Nous n'avons pas étudié à savoir s'il s'agissait d'un règlement ou d'une modification législative qui soit nécessaire comme telle. Nous n'avons pas d'opinion à donner au comité sénatorial, à savoir s'il vaut mieux utiliser une modification réglementaire ou législative.
Le sénateur Meighen Vous prétendez quand même qu'il s'agit d'un problème aigu et pressant?
Mme Beaudoin: Oui.
Le sénateur Meighen: Et, important?
Mme Beaudoin: Oui.
M. Savard: L'étendue du Dossier noir que l'on a déposé là-dessus montre que ce ne sont pas des cas isolés et que malheureusement, il y a trop de consommateurs qui se retrouvent dans cette situation. Nous avons fait l'inventaire de deux palais de justice sur les dossiers d'assurance hypothécaire. Les palais de justice de Québec et de Montréal démontrent plusieurs centaines de dossiers actuellement en litige.
Il est bien que sûr quand un consommateur entreprend des procédures, trois fois sur quatre, les tribunaux lui donnent raison, mais après avoir gagné en première instance, l'institution financière va en appel et cela peut prendre cinq, six, sept ans avant que le consommateur puisse sortir de cette situation problématique qui résulte du décès d'un conjoint, au moment où la personne n'a vraiment pas le goût d'entreprendre des procédures judiciaires.
Le sénateur Meighen: Prenons ce cas hypothétique: le consommateur arrive dans une institution financière et on le renvoie dans un cabinet et qu'on lui dise que le cabinet appartient à l'institution financière, mais ce sont des gens très qualifiés et ils vont vous donner la meilleure opinion possible? Est-ce que cela ferait votre affaire?
M. Savard: Oui. Au moins cela permettrait aux consommateurs de faire la distinction entre les deux transactions.
Le sénateur Meighen: C'est la divulgation qui compte?
M. Savard: Oui. C'est très important.
Le sénateur Meighen: En grosses lettres.
M. Savard: L'autre chose importante, il ne faudrait pas qu'il y ait communication des renseignements personnels entre le cabinet et l'institution financière. Comment une préposée qui vient d'avoir accès à l'ensemble des données financières d'un individu, juste en visionnant l'écran de son ordinateur, puisse devenir une intermédiaire de marché tout à fait indépendante de ce qu'elle sait ou connaît de la situation financière. Cela est trop dangereux. C'est pour cela que l'on veut scinder les deux opérations.
Le sénateur Meighen: À la page 7 de votre mémoire, vous dites:
La cueillette, la conservation, la communication et l'utilisation de ces renseignements personnels doivent être réglementées et surveillées de façon stricte et uniforme par un organisme indépendant des institutions mêmes.
À plusieurs reprises, le commissaire de la protection de la vie privée du Canada a comparu devant notre comité et nous a fait l'offre d'agir comme cette institution indépendante. Est-ce que cela répondrait en tout ou en partie à vos demandes? Et deuxièmement, au Québec la loi qui vise la protection des renseignements personnels à l'égard des institutions financières est très sévère, même peut-être plus sévère que la loi fédérale. Est-ce que vous réclamez que le gouvernement fédéral s'inspire du gouvernement provincial pour mettre en vigueur une telle loi?
M. Savard: Il y a deux aspects à votre question. Pour ce qui est de la surveillance et l'encadrement au niveau de la réglementation des institutions financières, on pense que l'offre qui vous est faite par le commissaire pourrait être intéressante. Pour ce qui est, par contre, de l'encadrement et de la surveillance des intermédiaires agents à l'intérieur des différents cabinets, on pense que cela doit être un organise professionnel qui voit à l'autoréglementation et à l'autodiscipline des professionnels agissant dans un cabinet à l'intérieur d'une institution financière ou dans un cabinet totalement indépendant.
Le sénateur Meighen: Et provincial?
M. Savard: Et provincial, effectivement. Pour ce qui est de la deuxième partie de votre question concernant la Loi 68, les institutions financières fédérales sont venues, à l'égard de la Loi 68, dire qu'elles ne se sentaient pas liées par la Loi 68 au Québec. Par contre, elles ont dit qu'elles allaient respecter l'esprit de la Loi 68. Mais, cela est nettement insuffisant. Il faudrait qu'il y ait l'équivalent des exigences de la Loi 68 au niveau fédéral.
Le sénateur Angus: D'après vous et votre collègue, est-ce que les problèmes qui sont exposés dans le Dossier noir existent à travers le Canada ou exclusivement au Québec?
M. Savard: Les problèmes sont le les mêmes partout à travers le Canada.
Le sénateur Angus: Malgré les diverses juridictions?
M. Savard: Malgré les diverses juridictions. Les produits d'assurance distribués dans les institutions financières nous semblent être les mêmes partout à travers le Canada, parce que l'on a voulu simplifier le fait de la souscription de ce produit. On ne fait pas de tarification ou l'on n'examine pas l'admissibilité des personnes au niveau de leur santé. Il n'y a pas de sélection des risques lors de l'acquisition. Cette sélection se fait à la réclamation par simple commodité. Les assureurs au Canada ne connaissent pas les clients dans les institutions financières. Ce n'est qu'à la réclamation qu'on les informe que ce client, pour lequel on a envoyé des primes sous une base mensuelle, l'assureur ne connaît pas ses clients. Ce n'est qu'à la réclamation qu'il procède à une analyse pour voir si ce client était admissible ou assurable.
Dans des cas où le montant de l'emprunt est supérieur à 100 000 $ ou 125 000 $, on fait l'examen immédiat. Comme la moyenne des prêts hypothécaires au Québec est d'environ 40 000 $, cela ne fait jamais l'objet d'une vérification à la souscription.
Le sénateur Angus: Est-ce que vous pouvez déposer une copie de ce Dossier noir?
M. Savard: Cela nous fera plaisir.
[Traduction]
Le sénateur Stewart: Je suppose que le Dossier noir contient des renseignements sur une série de litiges liés au problème que vous avez décrit, n'est-ce pas? Tous ces dossiers se concentrent dans une province, le Québec?
M. Savard: Oui.
Le sénateur Stewart: Vraiment? Mais vous soutenez que le même problème existe au Nouveau-Brunswick et en Ontario.
Comment avez-vous pris connaissance de ces cas? Parce qu'il y a eu des poursuites judiciaires?
[Français]
M. Savard: Comme nous sommes un organisme de protection du consommateur, fréquemment des consommateurs s'adressent à nous lorsqu'ils ont des problèmes au niveau de leur assurance. Initialement, le dossier nous est parvenu et nous avons, par la suite, fait des vérifications dans différentes institutions financières pour savoir comment se procédait cette souscription d'assurance. Nous avons vu même des préposés dans des institutions financières distribuer des pamphlets de compagnie d'assurance qui avaient fait faillite depuis plus de 2 ans et ils les présentaient comme étant l'assureur de leur régime collectif. Les informations qui étaient distribuées aux consommateurs était inadéquates et même, dans la façon de calculer les primes, certains préposés n'arrivaient pas, même dans deux succursales différentes d'une même institution financière, avec le même régime. Ils arrivaient à des calculs différents. Il n'y a aucune espèce d'uniformité d'une succursale à l'autre même si c'est le même assureur.
Par la suite, après avoir lancé l'enquête, nous avons vérifié auprès des tribunaux pour voir l'étendue de cette situation et dans deux palais de justice, Québec et Montréal, nous avons relevé plusieurs centaines de cas. En plus, nous savons, par une autre étude, que lorsque des consommateurs ont des problèmes avec des institutions financières, il n'y en a que 10 p. 100 qui entreprennent des recours. Cela nous inquiète davantage parce que cela donne une ampleur à la situation qui mérite que l'on s'y arrête très rapidement.
[Traduction]
Le sénateur Stewart: Les institutions financières impliquées étaient-elles souvent les grandes banques canadiennes?
[Français]
M. Savard: Il n'y avait pas nécessairement de différence entre les situations vécues dans les caisses populaires ou les grandes banques canadiennes. Nous retrouvons indifféremment, que ce soit les institutions financières, les grandes banques canadiennes ou les caisses populaires. Évidemment, au Québec, les caisses populaires détiennent à peu près 45 p. 100 du marché hypothécaire. Il est donc normal que nous retrouvions plus de dossiers litigieux dans ces caisses populaires, mais en fonction de la proportion, c'est tout à fait normal, on en retrouve autant dans les banques visitées.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup, monsieur Savard et merci aussi à vos collègues d'être venus nous donner votre point de vue aujourd'hui. Vous pourriez peut-être nous laisser un exemplaire de votre Dossier noir.
Nos prochains témoins représentent l'Institut canadien des actuaires. M. Panjer, le président, présentera la déclaration, mais il est accompagné de plusieurs collègues actuaires. Merci d'être venus témoigner aujourd'hui.
Mes collègues se rappelleront que votre organisation a témoigné devant nous à quelques reprises. Je me souviens d'une longue discussion que nous avons eue avec des membres de votre organisation au sujet de l'évaluation dynamique de la solvabilité, il y a environ un an.
Veuillez procéder.
M. Harry H. Panjer, président désigné, Institut canadien des actuaires: M'accompagnent aujourd'hui, de l'Institut canadien des actuaires, Mme Claudette Cantin, vice-présidente, responsable des questions relatives aux assurances IARD et membre du Groupe de travail sur la loi sur les assurances; et M. Morris Chambers, président du Groupe de travail sur la loi sur les assurances, qui a rédigé notre mémoire sur le livre blanc de juin 1996.
Notre réponse fait ressortir quelques aspects relatifs au rôle de l'actuaire. J'aimerais en indiquer quatre, puis M. Chambers, principal auteur du mémoire, les décrira brièvement aux membres du comité.
Les quatre principaux éléments de notre réponse se rapportent premièrement au rôle de consultation de l'actuaire; deuxièmement, au rôle de l'Institut canadien des actuaires dans les consultations relatives aux modifications législatives concernant les sociétés de secours mutuels; troisièmement, à certaines questions techniques concernant des aspects comme le remboursement anticipé de prêts hypothécaires, la définition de la réassurance, et les contrats de réassurance conclus avec des assureurs provinciaux; et quatrièmement, au caractère confidentiel des renseignements dans le cadre du processus disciplinaire de l'Institut qui régit les activités professionnelles des actuaires. Cette question pourrait s'appliquer à d'autres professions qui exercent des responsabilités en vertu de la loi. Nous mettrons l'accent sur nos propres responsabilités, en tant qu'actuaires.
M. Morris W. Chambers, président du Groupe de travail sur la loi sur les assurances, Institut canadien des actuaires: Une fois de plus, nous vous remercions de donner à l'Institut canadien des actuaires la possibilité de comparaître devant vous au sujet du livre blanc du ministère des Finances.
Notre mémoire n'est pas long et se limite aux aspects du livre blanc qui intéressent particulièrement les actuaires ou qui touchent à leur profession. Pour cette raison, la plus grande partie de notre mémoire porte sur des éléments de l'annexe B du livre blanc.
Je voudrais d'abord exprimer notre reconnaissance, car d'après ce que nous croyons savoir, plusieurs de nos suggestions antérieures seront intégrées aux modifications à la Loi sur les sociétés d'assurances qui seront déposées l'an prochain. Certaines, relativement mineures et techniques, n'ont pas été évoquées dans le livre blanc. Nous avons cependant hâte d'examiner leur libellé et d'exprimer notre point de vue à ce sujet.
Nous nous réjouissons que le livre blanc mentionne l'intention de simplifier la définition d'«actuaire» dans la loi, conformément aux suggestions que nous avions faites à ce sujet.
Dans deux cas, le livre blanc évoque l'intention des autorités de consulter les parties intéressées pour élaborer les modifications législatives pertinentes. Il s'agit tout d'abord des critères régissant l'exonération de certains transferts de propriété de l'agrément ministériel et ensuite des modifications aux dispositions actuelles de la loi concernant les sociétés de secours mutuels. L'ICA a exprimé le désir d'être considéré comme partie intéressée à ces consultations.
L'Institut croit qu'une opinion actuarielle officielle constitue un complément important à l'examen réglementaire des mesures proposées dans trois cas. Le premier touche à l'équité de la méthode employée pour affecter les revenus et les dépenses entre les assurés et les actionnaires, lorsque les sociétés d'assurances mutuelles émettent des actions. Le livre blanc a dégagé le besoin d'obtenir une opinion de l'actuaire dans ce cas, et l'Institut appuie cette position, qui est conforme à d'autres dispositions de la loi. De plus, l'Institut croit que des opinions actuarielles semblables devraient accompagner les demandes relatives à certains transferts de fonds des participants et les demandes de transfert des activités canadiennes d'entreprises étrangères.
Comme nous l'avons indiqué dans notre mémoire, nous appuyons la proposition du livre blanc relative au droit de remboursement anticipé de prêts hypothécaires. Nous recommandons toutefois que l'élaboration de la méthode de calcul de la pénalité normalisée tienne compte de la perte économique subie par le prêteur par suite du remboursement anticipé du prêt et notamment de la valeur actualisée de l'argent.
Enfin, j'aimerais apporter quelques précisions supplémentaires sur la proposition que nous faisons à la page 4 de notre mémoire, à la rubrique «Caractère confidentiel des renseignements».
Le livre blanc indique l'intention d'ajouter des dispositions législatives permettant au surintendant de divulguer des renseignements confidentiels aux organismes chargés de l'application des lois pendant une enquête. En vertu de la Loi de 1992 sur les sociétés d'assurances, l'actuaire désigné assume des responsabilités importantes à cet égard. Certaines de ces responsabilités sont imposées par la réglementation. Certains soutiennent d'ailleurs qu'en raison de la nature de la loi, dans certaines circonstances, l'actuaire désigné devient presque un agent de l'organisme chargé de l'application des lois.
L'Institut croit que ces dispositions ont été adoptées parce que les autorités chargées de l'application des lois et le législateur sont persuadés que l'ICA a adopté des règles de conduite professionnelle et des normes d'exercice de la profession qui justifient cette confiance. Mais pour que ces règles et ces normes aient du poids, il faut les appliquer. Conscient de ses responsabilités à cet égard, l'ICA a donc adopté un processus disciplinaire rigoureux afin de s'assurer que ses membres respectent ces normes et ces règles.
Ce processus disciplinaire est autant un mécanisme d'application des lois, dans le contexte des règles et des normes professionnelles, que les organismes chargés de l'application des lois en sont un dans le contexte de l'application des lois du pays. Afin que les actuaires puissent bien servir le public et être à la hauteur des attentes et des défis que soulèvent les responsabilités qui leur sont confiées, l'Institut demande donc que les dispositions envisagées puissent permettre au surintendant de divulguer des renseignements confidentiels à une équipe dûment constituée d'actuaires de l'Institut au cours d'une enquête sur la conduite professionnelle d'un membre de l'ICA, à l'égard des responsabilités professionnelles de cet actuaire en vertu de la loi.
J'espère que ces remarques font mieux comprendre les motifs qui nous poussent à faire cette proposition dans notre mémoire.
Vous avez reçu notre mémoire et nous serons ravis de répondre à vos questions.
Le sénateur Kolber: Je ne connais pas grand-chose à l'actuariat. La plupart des actuaires travaillent-ils pour des sociétés d'assurances ou à leur compte?
M. Chambers: Autrefois -- tout dépend évidemment de votre âge -- les sociétés d'assurance-vie étaient les principaux employeurs des actuaires. Dans un passé plus récent -- depuis une vingtaine d'années, disons -- l'emploi a été mieux réparti. Il y a un partage à peu près égal entre les actuaires-conseils et les actuaires qui travaillent pour des sociétés d'assurances. Ceux qui travaillent dans les sociétés d'assurances s'occupent d'assurances incendies, accidents ou risques divers. Les consultants offrent leurs services aux sociétés d'assurances ou aux caisses de retraite. Plus récemment encore, les actuaires ont commencé à participer davantage à des activités de placement et de gestion de bilan, et dans un sens plus large, de questions financières. Comme M. Panjer pourra le confirmer, un nombre important d'actuaires, quand ils se décrivent tout au moins, se considèrent comme des enseignants.
Le sénateur Kolber: Pourquoi donnez-vous votre opinion sur le remboursement anticipé des prêts hypothécaires?
M. Chambers: Parce qu'en assurance-vie, les sociétés d'assurances prennent des engagements à long terme, surtout à l'égard de l'émission de contrats de rentes viagères, par exemple. Afin de s'assurer de pouvoir remplir ces obligations, elles doivent bien investir les primes qu'elles perçoivent.
Le sénateur Kolber: C'est le problème de la société d'assurance-vie. Pouvez-vous obtenir actuellement un prêt hypothécaire résidentiel de plus de cinq ans?
M. Chambers: Non.
Le sénateur Kolber: Quel est le problème?
M. Chambers: La société d'assurance-vie doit connaître le risque et, s'il y a un danger supplémentaire de perdre de l'argent parce que la disposition relative au remboursement anticipé a été mal rédigée dans le contrat hypothécaire, elle doit en tenir compte dès le départ et cela fait monter les coûts pour ceux qui n'ont pas l'intention de rembourser leur prêt hypothécaire par anticipation.
Le sénateur Kolber: Mais les sociétés d'assurance-vie ne doivent-elles pas s'adapter et se financer en fonction de leur passif actuariel véritable? Si elles se financent ou vendent des rentes viagères -- et vous affirmez que les mouvements de l'actif et du passif doivent être appariés durant 25 ans -- elles peuvent certainement acheter des obligations d'État à long terme ou d'autres titres du genre.
M. Chambers: Et ne pas obtenir un taux d'intérêt concurrentiel?
Le sénateur Kolber: Peut-être, mais c'est le droit du gouvernement de vous pousser à agir ainsi.
M. Chambers: Mais les autres institutions qui vendent le même genre de produits ne sont pas assujetties à ces contraintes.
Le sénateur Kolber: Qu'entendez-vous par «contraintes»? Comment se financent-elles?
M. Chambers: Elles n'ont pas la même obligation de faire évaluer leur passif par un actuaire.
Le sénateur Kolber: Qu'entendez-vous par «évaluer»?
M. Chambers: Une société d'assurance-vie ou d'assurances IARD doit fournir une opinion de son actuaire que son passif est acceptable, compte tenu de sa situation et des risques que présentent l'actif et le passif. Aucune obligation de ce genre n'est imposée aux institutions de dépôt, par exemple, qui vendent des produits semblables.
Le sénateur Kolber: Vous m'avez perdu, mais je suppose que vous savez de quoi vous parlez.
Quand on remonte dans l'histoire, n'est-il pas vrai que le secteur immobilier en Amérique du Nord n'aurait pas existé sans les sociétés d'assurances?
M. Chambers: Non.
Le sénateur Kolber: Je veux dire l'immobilier tel qu'il existait autrefois. Comment aurait-on obtenu un prêt hypothécaire de 25 ans, si les gens n'avaient pas vendu de l'assurance-vie parce qu'ils savaient qu'ils obtiendraient les entrées de fonds constantes dont ils avaient besoin pour se protéger? Tout ce que nous avons fait dans le secteur immobilier, c'est mobiliser des effets de Woolworth's et d'autres entreprises en représentation de créances hypothécaires à 25 ans. Comment aurions-nous pu exister autrement?
M. Chambers: Je conviens que l'industrie de l'assurance-vie et les capacités hypothécaires à long terme en Amérique du Nord se sont développées de concert et se sont aidées mutuellement, mais je trouve inutile de supposer que l'une n'aurait pas pu exister sans l'autre.
Le sénateur Kolber: Vos arguments ne se retournent-ils pas contre vous? Vous affirmez avoir besoin de la certitude des prêts hypothécaires à long terme pour vous protéger contre les rentes viagères.
M. Chambers: Je n'ai pas affirmé que nous avons besoin de la certitude des prêts hypothécaires à long terme.
Le sénateur Kolber: Le papier à long terme et les obligations du gouvernement à long terme ne rapportent pas assez.
M. Chambers: Nous indiquons dans notre mémoire qu'en établissant une pénalité normalisée en cas de remboursement par anticipation, il faut tenir compte de la perte économique que subit le prêteur. Cette perte devrait être mesurée correctement afin de ne pas créer une pénalité excessive ou susceptible de faire monter les coûts pour les consommateurs du produit.
Le sénateur Kolber: Vous affirmez que si le gouvernement insiste, vous devrez accroître le coût des prêts hypothécaires.
M. Chambers: Cela pourrait bien arriver.
Le président: À la page 2 de votre mémoire, vous vous prononcez en faveur, ce qui n'est pas étonnant, de la recommandation de la page 35, soit une recommandation technique qui définit un actuaire comme un membre de votre association. Ceux qui reçoivent des pouvoirs monopolistiques en sont toujours ravis. Quelle était la définition auparavant?
À deux occasions au moins depuis les dix dernières années, l'Institut canadien des comptables agréés a demandé à notre comité de lui accorder des pouvoirs semblables au sujet de diverses dispositions contenues dans plusieurs lois, et nous avons toujours refusé. Qui perd au change si vous devenez officiellement le seul fournisseur de services actuariels?
M. Chambers: Cela ne change rien. L'Institut canadien des actuaires est l'organisation nationale des actuaires au Canada. Il est le seul organisme actuaire reconnu au Canada.
Le changement que nous avions proposé visait à maintenir la portée de la disposition actuelle. La loi prévoit que l'actuaire de la société d'assurances doit être «fellow» de l'Institut canadien des actuaires. Mais, par suite d'une erreur de rédaction, le libellé de la disposition faisait en sorte qu'on parvenait très indirectement à la conclusion qu'il s'agissait d'une exigence. Dans la loi, la définition était répétée trois ou quatre fois. Comme vous le constaterez dans le rapport Hoyt, on laisse entendre que certains éléments de la loi seront éliminés plus tard. Il est possible de les éliminer parce que la définition cruciale est ajoutée à l'article 2 et stipule qu'un actuaire est un membre de l'Institut canadien des actuaires. L'effet en ce qui concerne la personne pouvant faire le travail n'a pas changé d'un iota. C'est une simplification de la loi.
Le président: Il s'agit simplement d'un éclaircissement qui ne modifie le statut de personne.
M. Chambers: Exactement.
Le président: À la page suivante, vous répétez la proposition que vous nous avez faite il y a environ un an, selon laquelle, lorsqu'il existe déjà une réassurance sur un bloc de polices d'une société liquidée, celle-ci devrait être maintenue durant le processus de liquidation. Pouvez-vous apporter des précisions à ce sujet? Je vais vous expliquer pourquoi.
Des modifications à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité sont à l'étude à la Chambre des communes. Nous allons consacrer une grande partie des mois de novembre et décembre à cette question.
Même si la Loi sur les liquidations n'est pas directement ni expressément en cause, il serait utile, je crois, de comprendre le problème et de savoir si nous devons le régler au moyen des modifications proposées à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et à la Loi sur les associations coopératives de crédit.
M. Chambers: Je vais essayer. Cet aspect du mémoire n'est pas ma spécialité.
Essentiellement, le problème est que la réassurance repose à bien des égards sur une grande confiance, les attentes, le bouche à oreille et la parole d'honneur. Dans sa forme actuelle, ou de la façon dont la loi a été appliquée dans un cas en particulier, ne pas tenir compte des accords de réassurance ou les abroger rend la situation un peu chaotique dans le secteur de la réassurance au pays. L'avenir de la réassurance au pays est un peu menacé.
Le président: Il s'agit essentiellement d'un changement obligatoire de la part du réassureur. Vous déclarez que le réassureur ne peut pas se dérober. Savez-vous si ce changement peut être apporté par règlement ou s'il faut légiférer? Je sais que vous n'êtes pas avocat, mais j'ai pensé que vous auriez peut-être la réponse. Il serait utile que vous nous donniez une réponse dans les semaines qui viennent.
M. Chambers: Nous pouvons certainement vous répondre. Un de mes collègues qui a déjà témoigné devant votre comité et que vous connaissez peut certainement vous répondre et il le fera avec grand plaisir.
Le président: S'il faut légiférer, le changement doit-il être apporté à la Loi sur les liquidations ou pouvons-nous l'apporter en même temps que les autres modifications à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité cet automne? Je pose la question parce que je n'ai jamais vraiment compris où se situe la ligne de démarcation entre les deux.
M. Chambers: Je crains que vous ne vous engagiez sur le terrain du droit.
Le président: J'en suis conscient, mais pouvez-vous répondre à cette question en même temps?
M. Chambers: Évidemment.
Le président: Ces deux réponses nous seront utiles.
M. Chambers: Je pense que le problème peut être réglé par voie de règlement et non par une loi, mais il s'agit simplement d'une impression. Je réponds à brûle-pourpoint.
Le président: Nous demandons à vos avocats de nous aider à trouver la bonne voie.
J'ai une dernière remarque au sujet des renseignements confidentiels qui devraient être divulgués à votre comité de discipline. C'est agréable de voir un comité de discipline d'une profession qui s'ouvre pour s'assurer d'obtenir toute l'information nécessaire lorsqu'elle entreprend ce genre d'enquête disciplinaire. Je serais certainement en faveur d'une telle proposition.
M. Chambers: Le processus dont il est question est déjà confidentiel et le souci du législateur de protéger le caractère confidentiel des renseignements sera respecté dans le processus disciplinaire.
Le président: Merci d'avoir témoigné aujourd'hui. Nous vous reverrons lorsque nous nous pencherons sur le rapport du groupe de travail, et probablement avant. Si vous avez des observations au sujet des projets de loi, quand ils arriveront en janvier ou au début de février, nous espérons que vous nous les communiquerez à ce moment-là.
Nos prochains témoins, honorables sénateurs, représentent trois sociétés aux prises avec un problème assez semblable -- Beneficial Canada Inc., Services financiers Avco Canada et Household Financial Corporation.
Si je ne m'abuse, vous vous inquiétez tous les trois des changements proposés au financement sur le marché de détail. Norwest a choisi délibérément de vous laisser le champ libre.
Veuillez procéder.
[Français]
M. Jean Bédard, vice-président, avocat-conseil et secrétaire, Beneficial Canada: Monsieur le président, il me fait plaisir de vous présenter mes collègues des autres compagnies qui sont membres de l'Association canadienne des corporations financières. Madame Diane Wolfenden est directrice, communications et relations communautaires de Avco Financial Services Canada.
[Traduction]
Scott Furlonger est vice-président et contrôleur chez Avco. Terry Cretney, à ma gauche, est trésorier chez Household Financial Corporation.
Pour situer le contexte, nos trois entreprises sont membres de l'Association canadienne des corporations financières. Nous sommes très présentes au Canada depuis un certain temps déjà. Nous avons rassemblé quelques statistiques avant de venir. Household est au Canada depuis 1928; Beneficial, depuis 1934; et Avco, depuis 1954.
Je ne veux pas me faire le porte-parole des autres sociétés membres de notre association qui ne sont pas présentes aujourd'hui, mais je signale que nos trois sociétés comptent collectivement plus de 300 succursales au Canada et plus de 2 400 employés dans leurs bureaux canadiens. Nous sommes au Canada depuis longtemps et nous espérons que vous prendre en considération cette présence importante au pays. Nous avons aussi un actif de 5,5 milliards de dollars, et les membres de notre association servent environ 1,7 million de Canadiens.
[Français]
M. Bédard: Avant de commencer notre présentation, je voudrais mentionner qu'effectivement, nous nous sommes divisés la tâche entre les différents présentateurs et, de fait, certains d'entre nous vont faire la présentation sur différents points. Mais vu que nous sommes ici pour représenter des compagnies individuelles, il se peut que nous vous mentionnions un point donné que certains des points de vue reflètent plutôt le point de vue de notre propre compagnie.
[Traduction]
Je prierais M. Cretney de présenter le premier sujet, soit la définition des banques et des quasi-banques.
M. Terry Cretney, trésorier, Household Finance Corporation: Monsieur le président, j'aimerais remercier le comité de me permettre de me joindre à mes collègues de Beneficial et d'Avco pour présenter quelques brèves observations sur le livre blanc concernant les propositions du gouvernement fédéral à l'égard de la réglementation du secteur financier.
Household Finance et ses ancêtres oeuvrent dans le secteur des prêts à la consommation au Canada depuis plus de 65 ans. Household est une entreprise ayant un actif de 2 milliards de dollars, dont le siège social se trouve à North York, en Ontario. Elle a un centre de traitement à Montréal, au Québec, et 55 succursales dans les dix provinces. Household compte environ 700 employés au Canada et sert plus de 600 000 Canadiens.
Notre société mère est Household International Inc., une société publique américaine qui a un actif de 30 milliards de dollars américains. Household International est définie en vertu de la Loi sur les banques comme une banque étrangère principalement parce qu'elle possède une petite société d'épargne et de prêt et trois banques émettrices de cartes de crédit. Aucune de ces institutions n'accepte de dépôts. Par conséquent, l'une des préoccupations que soulève le livre blanc chez HFC est liée au régime d'accès des banques étrangères.
D'après l'interprétation que nous en faisons, le livre blanc propose deux modèles réglementaires. Le premier s'applique aux opérations canadiennes de banques étrangères, qui sont soumises à la réglementation bancaire dans leur pays d'origine. Les activités canadiennes de ces banques étrangères devraient être menées par l'entremise d'institutions soumises au régime réglementaire fédéral. Le deuxième modèle s'applique aux activités canadiennes des «quasi-banques», les institutions qui offrent des services financiers mais qui ne sont pas soumises à la réglementation bancaire dans leur pays d'origine. Les activités canadiennes des quasi-banques seraient soumises à une réglementation fédérale moins contraignante.
HFC appuie l'idée d'une distinction entre les banques et les quasi-banques et est heureuse de constater que le livre blanc souligne que les quasi-banques ne sont pas des banques. HFC s'inquiète toutefois que le livre blanc ne définisse pas clairement les critères qui détermineront le statut de banque ou de quasi-banque. Nous estimons qu'il serait utile de clarifier ce point dans la loi.
Si le statut des banques et des quasi-banques repose sur l'origine, alors HFC est fermement convaincue que les caractéristiques qui définissent les institutions comme des banques étrangères devraient comprendre ce qui correspond véritablement à des opérations bancaires commerciales -- grand réseau de succursales, acceptation de dépôts des particuliers et offre de produits tels que des comptes de chèques et des comptes d'épargne. Nous sommes d'avis que si cette clarté se retrouvait dans la définition des termes «banque étrangère» et «quasi-banque», la confusion serait réduite et des sociétés telles que Household International pourraient être définies, à juste titre, comme des quasi-banques.
Ainsi se terminent mes remarques. Je cède maintenant la parole à ma collègue d'Avco, qui vous parlera du financement sur le marché de détail.
Le président: Avant que Mme Wolfenden ne débute, puis-je vous demander de préciser en quoi les propositions du livre blanc modifient votre statut actuel?
M. Cretney: Nous espérons justement qu'elles ne le changent pas. Le livre blanc n'est pas clair sur ce qui constitue une banque étrangère. Nous pensons et espérons ne pas être une banque étrangère, mais nous n'en sommes pas absolument certains.
Notre société mère, Household International, n'est pas une banque, mais elle en possède. D'après notre interprétation du livre blanc, nous ne savons pas si nous serions considérés comme une banque étrangère ou non, parce que nous possédons quelques banques émettrices de cartes de crédit qui, comme je l'ai indiqué au début de ma déclaration, ont été créées par souci de commodité. Elles n'acceptent pas de dépôts des particuliers, alors, à bien des égards, elles ne sont clairement pas des banques.
Le président: À l'heure actuelle, vous faites partie de ce que j'appellerais le secteur non réglementé, en ce sens que vous n'êtes pas soumis à la réglementation applicable aux banques étrangères ni aux filiales d'une banque étrangère, n'est-ce pas?
M. Bédard: Il y a une définition technique de «banque étrangère» dans la Loi sur les banques.
Le sénateur Angus: Vous parlez de la Loi sur les banques actuelles, pas du livre blanc.
M. Bédard: Je parle effectivement de la Loi sur les banques. Mais si nous sommes ici à titre de «banques étrangères», alors il faut tenir compte de cette définition.
En fin de compte, cette définition stipule que si une société de portefeuille quelque part dans le monde possède un holding qui ressemble à une banque, marche comme une banque et parle comme une banque, alors, par définition, au Canada, elle est une banque étrangère, même si l'actif que représente cette partie des opérations est minime par rapport à l'actif total de la société. Nous faisons tous les trois face à cette situation.
Le président: Vous y faites face ou vous y êtes déjà?
M. Bédard: C'est la situation actuelle. Mais nous signalons au comité que le livre blanc propose désormais une distinction entre les banques réglementées et les quasi-banques. Si nous sommes considérés comme une quasi-banque, comme le propose le livre blanc, alors notre situation au Canada ne change pas. Mais le problème que M. Cretney a porté à l'attention du comité est que, quand on lit le livre blanc et qu'on connaît exactement la situation qui nous a amenés tous les trois à être considérés comme une banque étrangère en vertu de la Loi, techniquement parlant, le livre blanc ne dit pas clairement de quel côté de la clôture nous nous trouvons.
Le président: Selon la définition actuelle, vous êtes considérés tous les trois comme des filiales de banque étrangère.
M. Bédard: Nous sommes considérés comme des filiales non bancaires de banques étrangères.
Le président: Le problème que pose le livre blanc est qu'il prend cette catégorie de sociétés, dont vous faites partie, vous et bien d'autres, et la divise en deux groupes. Un groupe sera considéré, à certains égards, comme de vraies banques, et l'autre sera appelé «quasi-banques». Rien d'autre n'a changé.
M. Bédard: Exactement.
Le président: Votre problème est que si vos sociétés sont classées dans la catégorie des vraies banques, ce qui n'est pas certain d'après votre interprétation du livre blanc, alors vous n'êtes pas sur un pied d'égalité avec vos concurrents au Canada.
M. Bédard: Et nous aurions témoigné à 14 heures avec l'autre groupe de témoins.
Le président: Si vous faites partie des quasi-banques, le statu quo demeure.
M. Bédard: Vu sous cet angle, c'est exact.
Le président: Maintenant, je comprends parfaitement.
Le sénateur Meighen: Dans la loi actuelle, votre situation est très claire?
M. Bédard: Elle n'est pas claire parce qu'il y a beaucoup de non-dits. Les propositions du livre blanc accentuent la transparence, ce qui, en soi, est une bonne chose. Jusqu'ici, la loi reconnaît une société appelée «quasi-banque», qui n'est pas vraiment une banque mais qui fournit des services financiers.
Le sénateur Angus: Autrement dit, ces dispositions du livre blanc visent à clarifier les choses, mais elles n'y parviennent pas.
M. Bédard: Pour le moment, elles n'y parviennent pas, c'est évident. Il y a beaucoup de zones grises, ce qui ouvre la porte à un grand pouvoir discrétionnaire. Nous aimerions que ces aspects soient clarifiés.
Le président: Vous savez exactement où vous vous situez actuellement parce que vous êtes réglementés de cette façon depuis un certain temps. Le problème que pose la nouvelle proposition est que, si la situation de certaines institutions devient plus claire, la vôtre est ambiguë parce que vous vous trouvez à la limite.
À en juger par les remarques des autres membres de votre groupe, on dirait que vous demandez que les règles soient claires comme de l'eau de roche et que ne soyez pas à cheval sur la clôture.
M. Cretney: Que nous nous retrouvions du même côté qu'avant.
M. Bédard: Celui où nous sommes depuis 60 ou 70 ans.
Mme Diane Wolfenden, directrice, Communications et relations communautaires, Services financiers Avco Canada: Je traiterai maintenant des dispositions relatives au financement sur le marché de détail et de l'allégement du fardeau réglementaire des quasi-banques.
Par ses liens avec AFS Inc., notre société mère, et Textron Inc., celle qui nous chapeaute tous, Avco ne semble pas avoir de difficulté à se situer par rapport à la définition d'une quasi-banque. On dirait clairement que nous en serions une.
Avco Canada est contrôlée depuis 1964 par Avco Financial Services Inc., connue aussi sous le nom d'AFS Inc., de Costa Mesa, en Californie. AFS Inc. est une société internationale qui sert plus de 2 millions de consommateurs dans huit pays. AFS Inc. et sa soeur, Textron Financial Corporation, fournissent des prêts commerciaux et du crédit-bail à des entreprises aux États-Unis, à Hong Kong, en Australie et au Canada.
AFS Inc. célébrera son 70e anniversaire en 1997. AFS Inc. et Textron Financial sont des filiales de Textron Inc., de Providence, au Rhode Island. Textron est une société multinationale polyvalente, chef de file dans cinq grands secteurs: aéronautique, automobile, produits industriels, systèmes et pièces, et finance.
À la fin de 1995, Textron avait un actif de 8,6 milliards de dollars américains. Certaines sociétés appartenant à Textron et que vous connaissez peut-être comprennent Cessna, Bell Helicopter et Easy-Go Golf Cars.
Avco Canada possède un actif d'environ 1,3 milliard de dollars, en prêts à la consommation, prêts hypothécaires et contrats de vente à tempéraments. Nous n'acceptons pas de dépôts de nos clients, et notre actif est financé par les bénéfices non répartis et des emprunts sur les marchés financiers canadiens, mais nous avons un encours de prêts de plus de 1 milliard de dollars.
Nos emprunts prennent surtout la forme de billets à moyen terme et de papier commercial. Notre papier commercial est émis en coupures minimales d'environ 1 000 $. Nos billets à moyen terme sont libellés en dollars canadiens et américains et émis en coupures de 5 000 $. Nos conseillers financiers estiment qu'environ 50 p. 100 de nos titres sont achetés sur le marché de détail, par des particuliers qui investissent parfois aussi peu que le minimum de 5 000 $.
Le livre blanc contient une proposition relative au financement sur le marché de détail qui limiterait l'accès des banques étrangères à leurs marchés financiers. Nous croyons comprendre que ces restrictions seraient imposées en contrepartie d'un allégement du fardeau réglementaire des quasi-banques étrangères. Ainsi, lorsqu'une banque étrangère aurait été autorisée, en vertu de la Loi sur les banques, à s'implanter sur le marché canadien, elle n'aurait pas besoin d'autre agrément. Le régime actuel nous oblige à prendre des engagements auprès du BSIF afin d'obtenir son accord, notamment pour effectuer une acquisition au Canada. Si cette proposition est adoptée, nous ne serions plus tenus de prendre ces engagements, à condition que nos activités ne touchent pas au financement sur le marché de détail. En outre, tous les engagements actuels ne tiendraient plus, afin de niveler les règles du jeu avec les nouveaux arrivants sur le marché canadien.
Avco Canada appuie la proposition visant à alléger le fardeau réglementaire des quasi-banques étrangères, sauf la définition qui semble s'appliquer, selon nous, au financement sur le marché de détail.
D'après nous, la proposition relative au financement sur le marché de détail serait très coûteuse pour Avco Canada. Si nous comprenons bien, nous devrions émettre nos titres en émissions minimales de 200 000 $ et en coupures minimales de 100 000 $. Autrement dit, cette proposition fera grimper de 2 000 p. 100 la valeur minimale des coupures de nos billets à moyen terme. De plus, ces coupures ne pourraient plus être divisées à l'intention du marché de détail.
Cette proposition viserait à protéger à empêcher les petits investisseurs d'acheter des titres de quasi-banques étrangères lorsque la réglementation aura été assouplie. Les petits investisseurs ont été définis comme ceux qui achètent pour moins de 150 000 $ de titres.
Cette proposition aurait une incidence importante sur le coût du financement des activités d'Avco. Puisque 50 p. 100 du marché pour nos titres disparaîtrait, la prime que nous devons verser au-dessus du taux des obligations canadiennes devrait nécessairement augmenter.
En plus de ces coûts supplémentaires pour Avco Canada, nous ne voyons pas trop l'utilité de cette proposition. Les activités de financement sont déjà réglementées par les lois provinciales sur les valeurs mobilières, qui visent à protéger tous les investisseurs. Ces lois prévoient la publication de renseignements complets, exacts et véridiques dans un prospectus lorsque des titres sont émis, sous réserve des exceptions qui s'appliquent au papier commercial.
Ces lois prévoient aussi que les titres doivent être vendus par l'entremise de courtiers en valeurs mobilières, qui doivent connaître le client et répondre aux critères d'admissibilité. Cette proposition limiterait aussi les choix offerts aux particuliers. Elle rendrait les règles du jeu inégales, puisqu'un grand nombre d'entreprises commerciales canadiennes et étrangères et d'institutions financières canadiennes qui ne sont pas régies par la Loi sur les banques mèneraient les mêmes activités de financement que nous sans être réglementées; il en irait de même des activités de financement des banques canadiennes régies par la Loi sur les banques mais qui ne seraient pas visées par cette proposition.
En résumé, nous croyons que la proposition relative au financement sur le marché de détail contenue dans le livre blanc et visant à protéger les investisseurs est inutile, injuste pour certains investisseurs et qu'elle ne met pas tous les joueurs sur un pied d'égalité.
[Français]
Beneficial Canada est au Canada depuis 1934, nous avons plus de 100 succursales et bureaux à travers le Canada. Nous avons 700 employés répartis dans les 10 provinces du Canada et nous servons plus de 350 000 Canadiens. Nos actifs sont un peu plus de 900 millions de dollars, et comme l'a mentionné Mme Wolfenden dans le cas de AVCO, ces actifs sont également financés sur le marché des dettes publiques et Beneficial Canada est un emprunteur pour une somme au-delà de 700 millions $ sur les marchés des dettes publiques.
[Traduction]
Beneficial Canada fait partie de Beneficial Corporation, une société de services financiers dont l'actif dépasse 15 milliards de dollars américains. Elle est cotée à la Bourse de New York et compte plus de 1 000 succursales. Beneficial Corporation mène ses activités aux États-Unis, au Canada, au Royaume-Uni et en Allemagne et oeuvre aussi dans le secteur de l'assurance en Irlande. Le groupe d'entreprises Beneficial Canada oeuvre dans le domaine des prêts hypothécaires, des prêts aux particuliers et du financement des ventes, notamment l'émission de cartes de crédit de distributeur à des marchands et des détaillants au Canada.
Parmi les autres questions dont j'aimerais discuter avec le comité, signalons d'abord celle du système de paiements canadien. Nous savons que l'examen du système de paiements canadien a été retranché du livre blanc et confié à un comité. Nous voulons toutefois exprimer notre déception face à ce morcellement apparent de la réforme du système. Pour en revenir à notre examen antérieur des pouvoirs des banques et des quasi-banques, nous espérons encore que, lorsqu'on examinera le système de paiements canadien, les quasi-banques ne seront pas oubliées, parce que nous avons des inquiétudes à exprimer au sujet de la structure actuelle.
Ces inquiétudes se rapportent entre autres aux deux grands objectifs qui ont été fixés lorsque le système de paiements canadien a été mis en place, à la fin des années 70 et au début des années 80. Ce système visait évidemment à servir de système de compensation des dépôts et des chèques au Canada. Le système de paiements canadien devait aussi mettre en place un système bancaire électronique, ce qu'il a fait avec brio. D'ailleurs, je pense que le Canada possède maintenant l'un des systèmes bancaires électroniques les plus avancés au monde. Mais au cours de ce processus, les membres du système de paiements canadien en ont profité pour offrir non seulement des services de dépôt, mais aussi certains services de crédit. On peut désormais obtenir des avances en espèces sur sa carte de crédit dans un guichet automatique. C'est un accès au crédit; pas simplement un accès aux dépôts. De même, si vous avez une marge de crédit personnelle à la banque, vous pouvez tirer un chèque directement sur votre marge de crédit et celui-ci sera compensé dans le système de paiements comme s'il s'agissait d'un chèque tiré sur un compte de banque. Certaines banques offrent même la possibilité d'effectuer des retraits sur la marge de crédit au guichet automatique. Je soutiens qu'on se sert ainsi du système de paiements pour accorder du crédit ou donner accès à du crédit, plutôt que pour accepter les dépôts, compenser les chèques et fournir d'autres services liés aux dépôts.
Nous croyons que, dès qu'une catégorie d'institutions de crédit au Canada a accès au système de paiements et s'en sert pour offrir d'autres produits de crédit tandis que d'autres institutions de crédit sont exclues de ce système, les règles du jeu ne sont vraiment pas les mêmes pour tous. Nous voulons exprimer cette préoccupation et nous espérons qu'elle sera prise en considération lorsque le système de paiements sera examiné et que le rapport sera présenté au comité.
Nous voulons aussi aborder brièvement la question de la déclaration du coût du crédit, évoquée dans le livre blanc. Même si nous savons qu'elle sera examinée en dehors de l'examen de la Loi sur les banques, nous tenons tout de même à exprimer notre inquiétude à l'égard d'une évolution qui laisse présager une absence d'harmonisation réelle à l'avenir, même si on la qualifie d'harmonisation des renseignements sur le coût du crédit.
Pour les institutions de crédit qui ne sont pas des banques, le défi est de taille. Il faut comprendre qu'il existe au Canada un système de déclaration horizontale et verticale du coût du crédit à la consommation. Ainsi, des sociétés de prêt telles que les trois nôtres sont assujetties dans chaque province aux règles provinciales en matière de déclaration du coût du crédit. Mais une banque qui accorderait un prêt identique, du même montant et au même client de l'autre côté de la rue, serait assujettie aux règles fixées par la Loi sur les banques et ne serait donc pas tenue de déclarer le coût du crédit. On pourrait contester cette situation devant les tribunaux, mais personne n'est jamais allé jusqu'en Cour suprême. Les banques soutiennent habituellement qu'elles ne sont pas tenues d'observer les règles minutieuses des provinces en matière de déclaration du coût du crédit.
Déjà, les règles du jeu ne sont pas les mêmes pour tous, puisque deux concurrents sur le même marché, sur la même rue, ne sont pas assujettis aux mêmes règles concernant la déclaration du coût du crédit qui visent à protéger le consommateur.
Pour le moment, malheureusement, ce qui semble ressortir des discussions du groupe qui se penche sur l'harmonisation est que les paliers de gouvernement auront beaucoup à faire en plus du minimum qui semble avoir été fixé par le groupe d'harmonisation.
Le terme «palier de gouvernement» implique que le gouvernement fédéral pourra réglementer les banques à sa guise tandis que les provinces réglementeront les activités de prêt qui ne sont pas assujetties aux dispositions de la Loi sur les banques. Nous pourrions discuter des raisons pour lesquelles nous relevons de la Loi sur les banques à certains égards mais pas à d'autres, mais nous le ferons probablement un autre jour. Nous voulons cependant indiquer au comité que cette harmonisation devrait vraiment en être une. Nous espérons qu'on tiendra compte de cette remarque.
Le droit de rembourser un prêt hypothécaire par anticipation touche directement les sociétés membres de notre association. Dans le cas de Beneficial, par exemple, 45 p. 100 de notre actif au Canada est constitué de prêts hypothécaires. Même si nous comprenons les divers enjeux relatifs à la protection du consommateur et le fait que des prêts hypothécaires à prix abordables devraient être offerts aux Canadiens -- et nous sommes certainement d'accord avec cet objectif -- nous croyons aussi qu'il y a déjà beaucoup de concurrence sur ce marché et qu'il existe de nombreuses possibilités, notamment le remboursement anticipé des prêts hypothécaires.
Si le gouvernement légiférait sur le droit de rembourser des prêts hypothécaires par anticipation afin de modifier les dispositions actuelles de la Loi sur l'intérêt, nous pensons qu'il devrait tenir compte de l'indemnisation du prêteur.
Un dernier point au nom de Beneficial et non de l'industrie porte sur notre lutte contre l'interdiction prévue actuellement dans la Loi sur les banques qui empêche une société comme Beneficial de posséder en même temps une institution financière réglementée et une autre non réglementée. La Loi sur les banques prévoit certaines exceptions; nous n'en parlerons pas. Il existe toutefois un principe selon lequel une banque étrangère qui répond à la définition technique ne peut posséder à la fois une société de fiducie et une société de crédit qui exerceraient leurs activités côte à côte en même temps.
Nous n'avons jamais réussi à comprendre la justification de cette interdiction, malgré plusieurs conversations avec les autorités réglementaires. Nous pensons que l'évolution récente, en particulier l'intention d'un fonds commun de placement d'acheter Bayshore Trust, remet certainement ce principe en question, du point de vue canadien.
Si cette transaction est autorisée et permet donc à une institution non réglementée -- en l'occurrence un fonds commun de placement -- de prendre le contrôle d'une institution de dépôt dans le but déclaré d'obtenir accès au système de paiements canadien, nous devrions probablement réfléchir au problème de la propriété d'institutions financières réglementées et non réglementées, d'autant plus que le traitement national en vertu de l'ALÉNA et d'autres obligations du Canada en matière de commerce international soulèvent des préoccupations.
Voilà qui conclut notre exposé.
Le président: Madame Wolfenden, vous pourriez peut-être préciser un aspect particulier du financement sur le marché de détail. Confirmez-moi d'abord que j'ai bien noté vos chiffres. Vous avez déclaré qu'environ 50 p. 100 de votre financement actuel provient d'effets en coupures de 1 000 à 5 000 $.
Mme Wolfenden: Je voulais dire de 5 000 $ à 100 000 $. Les billets à moyen terme sont émis en coupures minimales de 5 000 $ et le papier commercial est émis en coupures minimales de 100 000 $.
Le président: Environ 50 p. 100 est inférieur à 100 000 $.
Mme Wolfenden: À l'heure actuelle, les effets peuvent être achetés et revendus aux particuliers en petits montants, qui peuvent être aussi peu élevé que 5 000 $.
Le président: D'après les propositions du livre blanc, ce ne sera plus possible à l'avenir.
Mme Wolfenden: C'est ce que nous croyons comprendre.
Le président: Vous devrez donc accroître la marge. Je suppose que vos activités seront moins lucratives ou que vous devrez majorer le taux d'intérêt exigé sur les prêts accordés à vos clients, n'est-ce pas?
Mme Wolfenden: Nos coûts augmenteraient, et nous devrions nous demander comment réagir. Je pense que vos conclusions sont justes.
Le président: Avez-vous estimé quelle serait la hausse des taux d'intérêt sur les prêts accordés à ceux qui empruntent chez vous?
Mme Wolfenden: Non, parce que nous n'avons pas pu déterminer exactement l'ampleur de la hausse des coûts.
Le président: Est-il question d'un dixième de 1 p. 100? Vous devez bien avoir une petite idée.
Mme Wolfenden: Nous nous engageons dans des analyses hautement hypothétiques. Je ne voudrais pas vous donner un chiffre qui se révélerait inexact.
Le président: La hausse serait-elle minime ou importante?
Mme Wolfenden: Nous pensons qu'elle serait importante.
Le président: Je suppose que vous parlez de la hausse du taux d'intérêt que devraient payer ceux qui empruntent chez vous.
Mme Wolfenden: La hausse des coûts serait importante. Il faudrait calculer les répercussions sur le coût des prêts à nos clients, ce que nous n'avons pas fait.
Le président: À l'heure actuelle, presque tous vos clients n'ont pas droit à du crédit bancaire.
Mme Wolfenden: Nous sommes dans la situation décrite par Trans Canada. Nous visons un créneau bien particulier. La plupart de nos clients n'ont pas accès à du crédit bancaire en raison de leurs circonstances particulières. Ils sont jeunes, ils présentent un risque élevé, ils ont des antécédents de crédit médiocres ou encore ils ont un emploi saisonnier, par exemple.
Le président: À votre avis, quelle est la justification du changement de politique proposé? Nous savons bien qui risque de perdre au change. Mais qui en profitera? Savez-vous pourquoi cette idée s'est retrouvée dans le livre blanc?
Mme Wolfenden: Je crois qu'on s'inquiète des consommateurs ou plutôt de la façon dont les titres sont émis, du fait que la ligne de démarcation est floue entre les dépôts au détail classiques et certains titres.
On cherche aussi à protéger le petit investisseur, celui dont les achats sont inférieurs à 150 000 $ et qui achète les titres de sociétés dont le fardeau réglementaire fédéral sera allégé par les propositions contenues dans le livre blanc.
Le président: Qui est ce «on»? Les autorités réglementaires, le ministre des Finances, les banques?
Mme Wolfenden: Le BSIF nous a exprimé cette préoccupation.
Le président: C'est une préoccupation des autorités réglementaires même si, comme vous l'avez déclaré je crois, vous émettez un billet de 100 000 $ et qu'il est divisé en 20 billets de 5 000 $, cet acte est assujetti à la réglementation provinciale sur les valeurs mobilières.
Mme Wolfenden: C'est exact. Nos billets à moyen terme sont émis par l'entremise d'un prospectus. Notre papier commercial ne nécessite pas de prospectus, en vertu des lois provinciales sur les valeurs mobilières. Il est vendu par des courtiers en valeurs mobilières à leurs clients du marché de détail, et ces courtiers doivent se conformer à toutes les lois et à tous les règlements qui se rapportent à leurs activités.
Le président: Malgré ce palier de réglementation, le BSIF craint que la personne qui achète le billet de 5 000 $, ne s'y connaisse pas trop et ait besoin d'aide ou de protection.
Mme Wolfenden: Exactement.
Le président: Aucune autre justification n'a été donnée.
M. Bédard: J'aimerais faire remarquer que nous ne sommes pas les seuls à vendre du papier commercial ou des billets à moyen terme sur le marché. Pour prendre des exemples hors du secteur des services financiers, des entreprises canadiennes comme Canadian Tire, Newcourt et BCE le font également.
Cette préoccupation est un grand problème sur le marché financier. Tenter de réglementer ces activités par l'entremise des banques étrangères, en vertu de la Loi sur les banques, est une solution très inefficace parce que seulement une partie de ceux qui émettent ces types d'effets seront visés. C'est ce qui nous inquiète.
Comme l'a indiqué Mme Wolfenden, toutes les sociétés qui émettent des effets de ce genre actuellement, qu'elles soient canadiennes ou étrangères, doivent observer les lois provinciales qui régissent les valeurs mobilières. Ou bien nous nous adressons aux gros investisseurs sur le marché hors bourse en émettant de grosses coupures ou bien, si nous voulons nous adresser aux investisseurs en général, nous devons émettre un prospectus. Nous serions alors tous assujettis aux exigences relatives à une déclaration continue et à toutes les autres obligations d'un émetteur public au Canada, notamment celle de déclarer nos salaires.
Le président: Pouvez-vous me donner une estimation approximative du pourcentage du marché des billets de 5 000 $ qui serait visé par les changements proposés par rapport au pourcentage du marché de BCE ou Canadian Tire, par exemple, qui ne le serait pas?
M. Bédard: D'après les chiffres qui nous ont été fournis par les courtiers en valeurs, les quasi-banques étrangères, qui ne comptent pas seulement les trois sociétés autour de cette table, occupent environ 50 p. 100 du marché.
Le président: Au plus, le changement proposé touche 50 p. 100 du marché.
M. Bédard: Oui.
Le président: Les autres 50 p. 100 continuent d'être soumis à des règles différentes.
M. Bédard: Il n'y a pas de règles.
Le président: Nous protégeons une moitié des petits investisseurs, mais pas l'autre moitié.
M. Bédard: Oui. En supposant que les lois provinciales actuelles ne les protègent pas suffisamment. C'est une hypothèse bien large, monsieur le président. Je pense que c'est chercher des problèmes où il n'y en a pas.
Le sénateur Stewart: La dernière remarque à propos des problèmes qui n'existent pas tombe à pic. A-t-il été démontré que le petit investisseur a besoin du genre de protection que donneraient les modifications législatives proposées? Est-il arrivé souvent que ces investisseurs perdent leur argent?
M. Cretney: Je crois que personne n'a perdu d'argent en investissant dans les billets à moyen terme ou le papier commercial des sociétés représentées ici. Je sais que certains ont perdu de l'argent déposé à la banque, mais je ne connais personne qui a perdu de l'argent en investissant dans nos sociétés.
Mme Wolfenden: Nous avons posé la question à nos courtiers en valeurs et ils nous ont donné la même réponse. Ils ne connaissent personne qui aurait perdu de l'argent.
Le sénateur Angus: Pour que tout soit clair, si on ne tenait pas compte de votre filiation, vous ne seriez pas réglementés.
M. Bédard: En effet.
Le sénateur Angus: Il y a d'autres sociétés de crédit, sans parler de toutes les BCE et Canadian Tire du monde, non réglementées, n'est-ce pas? Il y a quelques années, des entreprises comme Premier, Atlantic Acceptance ou Union Acceptance, faisaient-elles partie de ce groupe? C'étaient des sociétés à grand nombre d'actionnaires.
M. Bédard: Sénateur, j'avais 11 ans quand Atlantic Acceptance a fait faillite.
Le sénateur Angus: Vous n'avez pas lu le rapport?
Le président: Le sénateur Angus exerçait le droit à cette époque.
Le sénateur Angus: Y en a-t-il d'autres?
M. Bédard: Il y a certainement d'autres sociétés de crédit, si vous employez ce terme dans un sens large et incluez le crédit commercial. Newcourt est un exemple. Mais Canadian Tire Acceptance émet aussi des cartes de crédit MasterCard. Cette société ne s'occupe pas seulement du financement sur le marché de détail pour Canadian Tire. Si nous employons le terme dans un sens large, il existe d'autres sociétés de crédit canadiennes. Ce ne sont pas toutes des sociétés étrangères.
Le président: Si nous semblons un peu perplexes, c'est que nous essayons de comprendre les justifications. Il me semble que nous ne les avons pas trouvées, mais nous réglerons ce problème à notre façon.
Nous vous remercions beaucoup d'avoir pris le temps de venir nous expliquer le problème. Vos explications étaient extrêmement claires.
Notre prochain groupe de témoins a déjà comparu devant le comité. Nous entendrons l'Association canadienne des personnes retraitées, représentée par sa présidente, Mme Lillian Morgenthau. De One Voice -- The Canadian Senior Network, nous entendrons Robert Armstrong, du comité des enjeux, et Andrew Aitkens, directeur de la recherche.
Veuillez procéder.
Mme Lillian Morgenthau, présidente, Association canadienne des personnes retraitées: Au départ, nous devions comparaître à 11 h 30 ce matin, puis on a reporté notre témoignage à 16 h 30. Je ne sais pas s'il vaut mieux que nous servions d'amuse-gueule pour le repas du midi ou du soir, mais je suppose que nous allons nous en sortir quand même.
Le président: Merci beaucoup. Voulez-vous commencer?
Mme Morgenthau: Oui. Je vous ai fait parvenir un mémoire.
Premièrement, c'est agréable de voir quelques visages connus et d'autres dont je ne me souviens pas. Je m'appelle Lillian Morgenthau et je suis présidente de l'Association canadienne des personnes retraitées, l'ACPR.
L'ACPR est une organisation nationale sans but lucratif qui compte plus de 230 000 membres de plus de 50 ans, retraités ou non, dans toutes les régions du Canada. Nous ne recevons aucun financement gouvernemental, d'aucun palier de gouvernement, afin de maintenir notre impartialité et notre indépendance. Je suis ici à titre de porte-parole de nos membres et des Canadiens d'âge mûr qui sont tous des consommateurs dans le secteur financier. De fait, je représente le point de vue du consommateur en général sur les questions qui intéressent le comité. Je vous remercie de nous donner la possibilité de comparaître à nouveau devant vous.
Nous voulons discuter de plusieurs questions. La protection des renseignements personnels est un sujet dont nous avons traité dans notre mémoire précédent. Cette question occupe une place encore plus grande dans le mémoire d'aujourd'hui. Nous affirmons qu'il faut obtenir le consentement des consommateurs avant de se servir de renseignements personnels et privés à d'autres fins que celles qui sont prévues au départ. Il ne faut pas communiquer ces renseignements à des tiers.
Nous recevons sans cesse du courrier et nous accueillons une centaine de nouveaux membres par jour. Le taux de renouvellement des cotisations est d'environ 90 p. 100. Les lettres que nous recevons nous indiquent ce que pense vraiment la population canadienne.
Nos membres nous informent qu'ils reçoivent toutes sortes de lettres des banques et qu'ils savent que le courrier provient des banques par la façon dont il est adressé. Autrement dit, le nom indiqué sur l'enveloppe est celui qu'ils utilisent uniquement pour leurs opérations bancaires. Leur adresse est communiquée à des tiers et elle ne devrait pas l'être. Leur vie privée n'est pas respectée et on se moque du caractère confidentiel des renseignements qu'ils ont fournis.
Le sénateur Angus: Comment recrutez-vous vos membres? Quelles listes consultez-vous en douce?
Mme Morgenthau: C'est très simple. Nous ne faisons pas de publicité. Il s'agit simplement de bouche à oreille. Si vous avez plus de 50 ans et que vous ne faites pas partie de notre association, tant pis pour vous.
Le sénateur Angus: Pourquoi y a-t-il le mot «retraités» dans le nom de votre association?
Mme Morgenthau: Nous avons commis une erreur en prenant ce nom. Nous n'aurions pas dû. Nous nous adressons en réalité à tous ceux qui ont plus de 50 ans. Pour ceux qui n'ont pas encore cet âge, nous venons de créer une association à leur intention. Vous êtes évidemment trop jeune pour adhérer à notre association, alors nous présumons que vous adhérerez à celle-là.
Le sénateur Angus: Autrement dit, vous comptez sur le bouche à oreille. J'ai hâte d'entendre votre témoignage. Avez-vous des listes qui vous permettent de trouver ces personnes?
Mme Morgenthau: Nous comptons uniquement sur le bouche à oreille. Tous ceux qui deviennent membres de notre association en sont ravis. Nous avons un bulletin extraordinaire qui a remporté quatre prix internationaux. Nous l'expédions gratuitement à nos membres. La cotisation coûte 10 $ par année, pour le membre et son conjoint. J'espère donc que vous deviendrez tous membres.
Notre association appuie l'intention annoncée par l'honorable John Manley, ministre de l'Industrie, de déposer un projet de loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, qui doit inclure le secteur financier. Même si l'Association canadienne de normalisation, en collaboration avec l'industrie financière, a conçu un nouveau code type pour la protection des renseignements personnels, et que ce code a été adopté par l'industrie, il s'agit d'un code d'autoréglementation volontaire. Autrement dit, ceux qui ne veulent pas suivre ce code ne sont pas tenus de le faire. Nous vous disons: «Vous voilà. Vous n'êtes pas élus. Vous êtes ici. Prenons les mesures qui s'imposent et assurons-nous que, lorsque quelqu'un donne son nom, celui-ci n'est pas communiqué à n'importe qui.»
En 1995, le gouvernement fédéral a modifié les dispositions de la Loi sur la sécurité de la vieillesse relatives aux renseignements confidentiels. Il peut désormais fournir aux gouvernements provinciaux des renseignements personnels sur un bénéficiaire d'une pension de sécurité de la vieillesse. C'est ainsi que le gouvernement de l'Ontario a pu obtenir des renseignements qui ne le regardaient pas du tout.
En ce qui concerne le coût des services financiers, notre association appuie la proposition que le gouvernement collabore avec les banques, les sociétés de fiducie et les sociétés de prêt pour simplifier et améliorer la diffusion de renseignements sur les droits. Les consommateurs ont du mal à comparer les produits, à comparer des pommes avec des pommes. Notre association aimerait que des données comparatives simples sur les frais de service soient mises à la disposition des consommateurs. Dans cette perspective, nous appuyons les efforts du député Roger Gallaway en vue de créer un bureau de la protection du consommateur -- dont j'aimerais bien faire partie -- afin de fournir des renseignements comparatifs sur les taux des cartes de crédit et les frais de service des banques, ainsi que de mener des recherches et d'exercer des pressions au nom des consommateurs. Nous croyons cependant que cet organisme devrait comprendre des représentants des sociétés de fiducie et des sociétés de prêt, qu'il devrait être financé par les banques et les sociétés de prêt et qu'il devrait être indépendant du gouvernement et de l'industrie. En résumé, le bureau devrait être indépendant et s'autofinancer. Les banques doivent informer les consommateurs de son existence et indiquer comment en faire partie. L'adhésion doit être gratuite. On s'assurerait ainsi que les états financiers annuels des banques indiquent le pourcentage des revenus qui proviennent des frais de service.
Au sujet justement des frais de service, l'ACPR croit qu'ils devraient être réduits à mesure que les frais généraux diminuent par suite de réductions des effectifs et de l'automatisation croissante des opérations bancaires. Bien des personnes âgées ne veulent pas de services informatisés, parce qu'elles préfèrent s'adresser à un être en chair et en os. Elles aimeraient parler à quelqu'un. On ne peut pas parler à une machine.
Même John McCallum, économiste en chef de la Banque Royale du Canada, aurait déclaré récemment que les banques pourraient stimuler la création d'emplois en réduisant leurs profits.
La réduction des frais de service devrait s'appliquer tout particulièrement aux personnes âgées à faible revenu et à revenu moyen dont les revenus de placement ont été grandement amputés par la baisse des taux d'intérêt ou par la récupération des pensions. Ces deux facteurs ont été particulièrement douloureux pour les 46 p. 100 de personnes âgées qui, d'après Statistique Canada, ont un revenu annuel de moins de 20 000 $.
En ce qui concerne l'accès aux services financiers, nous appuyons la proposition que le gouvernement collabore avec les consommateurs, les groupes communautaires et les institutions financières pour élaborer et mettre en oeuvre des stratégies afin que les Canadiens à faible revenu aient davantage accès à ces services. Nous sommes conscients que l'industrie financière n'a pas de responsabilité sociale envers les Canadiens à faible revenu. Elle a surtout une responsabilité envers ses actionnaires. Mais l'industrie financière a tout intérêt à s'assurer que les Canadiens à faible revenu ont accès à ses services. Le nombre de Canadiens à faible revenu est assez élevé pour que les banques jugent utile de continuer à leur donner un bon service. Nous n'avons pas tous 500 000 $ à déposer à la banque. Beaucoup de ceux d'entre nous qui ont un revenu inférieur à 20 000 $ par année utilisent tout de même certains services bancaires. Nous ne devrions pas être tenus de payer les frais de service que les banques exigent actuellement.
En ce qui concerne la vente liée et la vente croisée de produits commercialisés actuellement par les institutions financières, ce problème devient de plus en plus grave pour les consommateurs à mesure que le pouvoir des banques augmente dans ce domaine. Les banques élargissent leurs horizons et se lancent dans d'autres activités financières en prenant le contrôle de maisons de courtage indépendantes. Ainsi, Midland Walwyn est l'une des trois maisons de courtage indépendantes qui existent encore actuellement. L'accès au secteur de l'assurance et au crédit-bail automobile entraînera un oligopole encore plus grand.
Si les banques continuent d'acheter des sociétés de fiducie, des maisons de courtage et des sociétés d'assurances, elles étendront leurs tentacules au point de dire au gouvernement quoi faire plutôt que l'inverse. Un conflit a déjà surgi. Nous avons l'impression qu'on oublie les intérêts du consommateur dans toutes ces fusions.
La concurrence sera certainement réduite, si ce n'est déjà fait. Quoi qu'il arrive, le pouvoir des banques grandira. Le pouvoir d'accorder du crédit et d'autoriser des prêts à sa guise, conjugué à la capacité d'investir l'argent des gens dans des comptes de placement ou des REÉR, permet aux banques d'abuser facilement de leur pouvoir de forcer les consommateurs à acheter leurs produits. Ce sont des ventes liées ou des ventes croisées. Ainsi, les banques pourraient forcer les consommateurs à transférer leurs comptes de placement à la maison de courtage qui leur appartient pour que la demande de prêt soit approuvée.
Si vous avez regardé la chaîne CPAC avant-hier, vous avez vu la présidente d'une grande entreprise de portes et fenêtres discuter précisément de cette question. Cette entreprise a un chiffre d'affaires de plus de 3 millions de dollars. Elle veut prendre de l'expansion. Cette dame est allée à la banque pour faire financer cette expansion. Elle ne demandait pas grand-chose par rapport à son actif. La banque a insisté pour que tous ses actifs soient donnés en garantie, ainsi que sa résidence personnelle. Les intérêts étaient plus élevés que la normale. C'était à une émission de CPAC. L'un des membres du comité, un homme d'affaires, a déclaré qu'il connaissait très bien le problème, puisqu'il l'avait vécu lui aussi.
L'Association des banquiers canadiens aurait déclaré que c'est un mythe. Ce n'est pas un mythe, c'est une réalité. Quand vous allez à la banque, dès que vous avez un peu d'argent dans votre compte, le caissier vous dit qu'il vaudrait mieux l'investir dans un fonds d'obligations, qui rapporterait davantage. Je ne me souviens pas d'être allée à une banque qui ne m'ait pas offert quelque chose.
La vente croisée devrait être interdite s'il existe un supermarché de la finance permettant d'obtenir à la banque des services d'assurances et de courtage en valeurs mobilières. Il devrait exister une concurrence. Il faudrait être libres. Si vous voulez emprunter pour acheter une voiture, vous ne devriez pas vous faire dire que vous devez acheter votre police d'assurance chez le courtier d'assurances de la banque. La liberté de choix doit exister. Il faut une réglementation très claire au sujet des petites entreprises. Si vous lisez les statistiques, vous savez que les petites entreprises sont celles qui créent des emplois actuellement.
J'ai une modification que je remettrai au greffier, pour qu'il l'ajoute à mon mémoire.
Quant au droit de rembourser un prêt hypothécaire par anticipation, les prêts hypothécaires sont accordés aux consommateurs. Le prêteur a le droit d'obtenir un rendement sur les fonds qu'il prête. Il devrait exister un équilibre. S'il reste un an avant l'échéance, on peut supposer que le prêt a déjà rapporté un peu. En cas de remboursement anticipé, il faudrait payer une pénalité, mais pas sur les cinq ans. La pénalité devrait peut-être représenter trois mois d'intérêt.
J'ai écrit dans le Toronto Star sur le marché immobilier mûr. J'ai une formation en immobilier. Quand les taux hypothécaires se situaient à 12, 14 ou 21 p. 100 et qu'ils montaient, il était impossible de se débarrasser de ces emprunts. Les propriétaires étaient coincés. De nombreuses banques refusaient le remboursement anticipé. Si vous vendiez votre maison, vous ne pouviez pas rembourser le prêt hypothécaire. Il fallait payer le même taux ou une pénalité d'un an ou six mois. Je l'ai vu de mes yeux. Trois mois d'intérêt suffisent amplement. On peut réinvestir son argent. Lorsque le pauvre type ne peut pas se débarrasser de son emprunt, ce n'est pas juste.
En ce qui concerne la réglementation des institutions financières, l'examen de la législation en cours met l'accent sur la fin de la réglementation fédérale applicable aux centrales provinciales de caisses de crédit. Notre association est en faveur de toute mesure visant à réduire et à éliminer le chevauchement et le dédoublement entre les réglementations fédérale et provinciales. Par ailleurs, nous croyons au maintien de normes nationales ainsi qu'à la surveillance et à l'application de la loi par l'entremise d'un système centralisé. Nous appuyons donc la création d'une commission nationale des valeurs mobilières afin de protéger les investisseurs et de maintenir des normes élevées ainsi que la confiance sur les marchés. Nous croyons qu'une réglementation et une surveillance rigoureuses du secteur financier doivent relever d'un organisme ne faisant pas partie du secteur. L'autoréglementation ne devrait pas être un choix.
Quant au régime des opérations entre apparentés, notre association appuie la mise en place de contrôles sur les opérations entre une institution financière et des personnes en mesure d'influencer ou de contrôler l'institution ou des améliorations aux contrôles existants. Nous convenons qu'il faut rationaliser le fonctionnement du comité de révision d'une institution financière.
Nous aimerions que se rétrécisse la gamme des apparentés possibles dans le secteur financier afin d'éviter qu'on puisse se renvoyer la balle. La responsabilité doit être attribuée directement aux principaux décideurs dans les institutions financières fédérales où des filiales se livrent à certaines opérations entre elles. Nous ne voulons pas que les pdg ou les vice-présidents déclarent ne pas avoir été mis au courant de la situation et obtiennent des promotions tandis qu'un pauvre subalterne se fait mettre à la porte. S'il n'est pas au courant, il aurait dû l'être. Je ne fais pas allusion au général Boyle.
En ce qui concerne l'obligation de passer par une filiale, notre association s'inquiète beaucoup de la proposition du gouvernement de permettre à des institutions financières de mener à l'interne des activités de traitement de l'information et de financement spécialisé plutôt que par l'entremise de filiales, afin de maintenir une division entre les activités de base des différents types d'institutions financières et de limiter les risques. Qu'entend-on par financement spécialisé? Est-ce une porte arrière ou pente savonneuse qui permet aux banques d'entrer directement dans d'autres secteurs financiers comme le courtage en valeurs mobilières, le crédit-bail automobile et l'assurance? Si tel est le cas, qu'on le dise ouvertement. Nous saurons ainsi ce qui se passe vraiment. Il ne faut pas qu'une réorientation stratégique aussi importante se fasse à la dérobée. Nous nous opposerions énergiquement à cette façon de procéder. Comme nous l'avons déjà indiqué, une telle évolution mènera à une concentration et à un oligopole accrus.
En ce qui concerne la réduction de la concurrence et des choix offerts aux consommateurs, l'exemple de la déréglementation des télécommunications montre la grande différence qui existe entre la théorie et la pratique dans la conjoncture économique actuelle. Le pouvoir financier se concentrera entre des mains de moins en moins nombreuses par suite des fusions. Les emplois diminueront davantage. Une telle évolution ne servirait ni les intérêts des consommateurs ni ceux des travailleurs. Elle irait à l'encontre de la politique du gouvernement qui vise à confier la création d'emplois au secteur privé.
Quant à la désaffiliation de l'assurance-dépôts -- et nous en avons discuté à une de nos réunions -- nous ne sommes pas d'accord. Nous aimerions que le montant assuré soit le même qu'aux États-Unis, soit 100 000 $. Je n'entrerai pas dans les détails parce que nous en avons déjà parlé et que nous n'avons pas beaucoup de temps. Ce n'est pas bien. Nous devrions avoir beaucoup de temps. Vous savez que j'ai besoin de beaucoup de temps quand je prends la parole.
En ce qui concerne les banques étrangères, nous reconnaissons que cette disposition est conforme à l'ALÉNA et à l'accord sur l'Organisation mondiale du commerce. Mais les banques étrangères qui fonctionnent au Canada comme des banques ou des quasi-banques doivent être réglementées. Même si l'arrivée de banques étrangères accentuera la concurrence, il y a toujours un danger que les banques étrangères n'avalent les banques canadiennes. Notre économie canadienne tomberait donc encore plus sous la mainmise d'intérêts étrangers. Par conséquent, il faudrait légiférer pour empêcher les banques étrangères d'acquérir une participation majoritaire dans les banques canadiennes, qui doivent appartenir aux Canadiens.
L'ACPR appuie les révisions proposées concernant la régie interne des institutions.
Le président: Je m'inquiète parce que vous parlez depuis 25 minutes et que nous devons encore entendre M. Armstrong. Nous voulons avoir le temps de vous poser quelques questions. Voulez-vous expliquer votre ajout sur les REÉR, puis nous en discuterons avec vous. C'est à la page 9 de votre mémoire.
Mme Morgenthau: À ce propos, vous et moi sentons les choses instinctivement, je parlerais même d'intuition féminine. Vous avez déclaré que le plafond de 20 p. 100 sur le contenu étranger des REÉR devrait être majoré, mais vous n'avez pas précisé à quel niveau il faudrait le porter. Il faut bien réfléchir avant de hausser le plafond. Si une hausse est permise, elle doit être limitée et contrôlée avec soin, parce qu'on crée un précédent et qu'on ouvre la porte à d'autres hausses. La hausse devrait être graduelle.
L'argent se moque des frontières. Il est investi là où il rapporte le plus. Si nous ne faisons pas attention, les Canadiens, qui sont mieux renseignés de nos jours et qui suivent l'évolution de la Bourse, ce qui se passe à Wall Street et ailleurs, découvriront qu'ils veulent investir leur argent ailleurs qu'au Canada. Le Canada devra prouver aux Canadiens qu'il vaut mieux investir au Canada. C'est tout ce que je dis. Nous ne sommes pas contre une hausse du plafond, mais nous nous inquiétons du niveau où il sera porté et des moyens que vous prendrez pour y parvenir.
M. Robert Armstrong, membre, comité des enjeux, One Voice -- The Canadian Seniors Network: Je fais partie du comité des enjeux, qui a la bénédiction du conseil d'administration. Je ne suis pas administrateur, mais il y a des administrateurs au sein du comité.
Normalement, j'aurais dû être accompagné d'Andrew Aitkens, que vous connaissez, mais il est malade et n'a pu venir aujourd'hui.
One Voice est le porte-parole des personnes âgées en ce qui concerne des dossiers divers comme les médicaments sur ordonnance, les médicaments brevetés, les médicaments génériques, et les abus dont sont victimes les personnes âgées dans les institutions financières ou les foyers. Nous nous intéressons au transport et à la sécurité. Nous nous intéressons à une foule de sujets. Nous avons été financés généreusement par la Fondation Samuel et Sadie Bronfman, mais contrairement à l'association de mon amie, nous ne semblons pas trouver de nouveaux membres aussi rapidement. Nous en profitons aujourd'hui pour indiquer que nous accueillons volontiers les nouveaux membres.
Le sénateur Angus: Quels sont les critères d'adhésion?
M. Armstrong: S'intéresser à son avenir.
Nous traiterons du chapitre 2 du livre blanc, sur le renforcement de la protection des consommateurs.
À bien des égards, la protection des renseignements personnels est une question philosophique. C'est un sentiment d'individualité, l'impression de vivre sa vie, par opposition à l'État, à ce qui est public. Nous parlons ici du rôle du secteur privé dans la protection des renseignements personnels. Nous appuyons les mesures envisagées. Si vous habitez Ottawa depuis assez longtemps, vous savez que la vie privée est une denrée bien rare.
Nous comprenons aussi que les personnes âgées renoncent en partie à leur vie privée dans leurs rapports avec les institutions financières. C'est donnant, donnant, et les personnes âgées y sont bien habituées, mais elles sont contrariées lorsque les renseignements personnels qu'elles ont fournis sont transmis à une autre institution avec laquelle elles ne veulent pas faire affaire. Pour l'instant, toutefois, ce n'est pas un problème majeur pour les personnes âgées.
C'est une question très politique, mais je suis le porte-parole de One Voice en ce qui concerne les questions politiques. Les personnes âgées s'inquiètent de la fragilité de notre pays et de nos institutions. C'est ce qui les préoccupe. Elles craignent beaucoup pour le Canada et son avenir. Elles aiment la stabilité, la prévisibilité et la sécurité et craignent le contraire. Le changement soudain les perturbe. En tant que groupe ou que catégorie de citoyens, elles pensent que le gouvernement lui-même s'est immiscé dans leur vie privée -- ironie du sort, n'est-ce pas? -- beaucoup plus que le secteur privé. Cette intrusion se manifeste par les politiques reliées directement à l'âge et au revenu. C'est une intrusion dans la vie privée des personnes âgées.
En ce qui concerne le coût des services financiers de base, nous donnons une note A- aux banques. Nous ne payons pas des frais de service de base très élevés. Je ne pourrais pas prétendre que ma banque me saigne à blanc. Ce n'est pas vrai. Elle me rappelle tous les mois combien j'économise. C'est intéressant, mais je dois reconnaître que je ne paie pas cher.
En ce qui concerne la disponibilité des services financiers de base, on nous a demandé de ne pas discuter des rigidités du marché et nous nous en abstiendrons. Mais les limites imposées à certaines institutions en ce qui concerne les rentes viagères devraient être examinées.
Quant aux services, nous aimerions élargir cette définition. Les personnes âgées font des opérations bancaires toute leur vie. La presse avait l'habitude de jouer un rôle important comme source d'information financière. La Gazette de Montréal, en particulier, publiait une rubrique de John Archer le troisième samedi du mois. Il s'agissait de questions et de réponses sur les rentes viagères et les FERR, mais cette rubrique n'existe plus et le journal ne publie plus les tables des rentes viagères et des FERR. Un service très utile est disparu.
Les banques essaient de nous renseigner sur leurs produits. En ce qui concerne les changements relatifs à l'âge, elles affirment que le changement le plus important par suite du dernier budget fédéral est le passage de 69 à 71 ans. Ils ont inventé une nouvelle histoire trois mois plus tard quand ils ont affirmé que nous commencerons à jouir du fruit de notre labeur deux ans plus tôt que prévu. Nous n'avons pas besoin qu'on dore la pilule. La première affirmation était juste. C'était un changement frappant, voire même saisissant.
Ce dont les personnes âgées ont besoin, c'est de conseils informés, à jour, sans préjugés et en toute franchise. Elles prennent des décisions plus rapidement que prévu, à cause de ce changement, mais je pense qu'il aurait fallu prendre ces décisions, tôt ou tard.
La complexité de tout ce domaine est évidente et elle nous frappe de plus en plus. Les exposés des témoins le démontrent éloquemment. J'ai beaucoup appris aujourd'hui et je vous en remercie.
De plus, la gamme des produits est complexe et les choix ne sont pas simples. Certaines décisions que doivent prendre les personnes âgées sont irréversibles -- pour ceux qui s'engagent dans la voie des rentes viagères, il va sans dire. La gamme des choix comprend notamment les certificats de placement garantis, les titres émis en représentation de créances hypothécaires, les obligations d'épargne du Canada, les FERR, les rentes viagères, les fonds communs de placement et les prêts hypothécaires inversés. Un problème est que les banques ont réduit considérablement leurs effectifs et qu'il y a moins de personnel pour donner aux personnes âgées les conseils dont elles ont besoin.
Je voudrais élargir le mandat du comité. Les parlementaires ne prennent pas le temps d'écouter les personnes âgées. Tout en respectant les droits de la Chambre des communes et sans vouloir bousculer leurs pouvoirs historiques -- j'ai rédigé un jour une thèse sur le comité permanent des comptes publics, lorsque M. McNaughton le présidait et qu'il a changé les règles -- parce que vous ne pouvez pas changer les mesures financières, vous pourriez trouver d'autres façons d'entendre les points de vue des personnes âgées sur les questions qui les intéressent. Vous pourriez au moins dire à certains d'entre nous de temps en temps que nos idées ne sont pas si mauvaises. Soyez vraiment la Chambre de réflexion que vous êtes censés être.
On a profité du budget pour apporter des modifications importantes au système de revenu de retraite, et les institutions financières mettent en oeuvre ces modifications. Voilà le lien. Les personnes âgées n'apportent aucune contribution réelle au processus. C'est plutôt à prendre ou à laisser et nous prenons plus souvent qu'autrement.
Notre comité fait parfois des téléconférences. La plupart des membres sont plus âgés que moi. Le refrain qui revient le plus souvent est qu'ils ne se sentent plus les bienvenus dans ce pays. Les personnes âgées sont déçues de ce qui arrive; elles sont sur leurs gardes et très méfiantes. Il y a lieu de corriger la situation, de chercher à retrouver ce qui s'est perdu récemment.
Monsieur le président, je sais à quel point vous et vos collègues êtes dévoués envers notre pays. Vous avez tous rendu de loyaux services à votre pays. Nous devons rétablir la confiance.
Le sénateur Angus: Je n'ai pas de questions précises, mais je suis assez touché par les remarques que vous avez faites tous les deux au sujet des moyens limités des personnes âgées. Si des organisations comme les vôtres n'existaient pas, la situation serait bien pire.
Avez-vous des remarques précises sur le livre blanc dont il est question aujourd'hui? Mon impression de ce livre blanc est assez négative. Avez-vous des observations précises?
M. Armstrong: La notion de disponibilité des services est trop étroite. Les personnes âgées ne sont pas nées d'hier. Nous avons des antécédents et nous voulons autre chose de ces institutions.
Le sénateur Angus: Comment? Proposez-vous que le gouvernement légifère sur l'accès?
M. Armstrong: Ils écoutent et écoutent encore. La persuasion morale existe, mais ils l'oublient. Vous pourriez leur dire qu'ils sont grassement payés et devraient réinvestir une partie des bénéfices.
Les mises à pied sont effarantes. La valeur des actions et les profits augmentent, mais il y a de moins en moins de gens pour nous donner le genre de conseils dont nous avons besoin.
Les témoignages d'aujourd'hui ont démontré à quel point la situation est complexe. La gamme des produits est extrêmement complexe. Il n'est pas donné à tout le monde de s'y retrouver facilement.
Je ne crois pas qu'il faille une législation à tous crins. Je n'y ai jamais cru. Voilà pourquoi je pense que la protection des renseignements personnels restera toujours une notion insaisissable, même si vous êtes sur la bonne voie. Si vous pouvez clarifier le problème, tant mieux. Pour les personnes âgées, ce n'est pas une question de vie ou de mort, même si mon amie n'est peut-être pas d'accord avec moi sur ce point.
Mme Morgenthau: Voici un livret de banque. Tout le monde en a un. En voyant ce livret, les banques se disent: «Cette dame paie des impôts, elle possède une maison. Bon sang! Ce type s'est acheté une automobile. Tiens, voilà un chèque pour un courtier en valeurs.» Qu'est-ce qui a permis aux banques de se mettre le nez là-dedans? Que font-elles des fonds que leur confient les déposants?
J'ai lu l'autre jour un article qui disait que les banques annulent pour 2 milliards de dollars de prêts à des pays incapables de rembourser. Les banques ne m'ont pas demandé si je voulais qu'elles prêtent cet argent. Maintenant, elles me demandent de rembourser.
Notre association croit que, lorsqu'un gouvernement agit de la sorte, nous avons notre mot à dire; mais lorsque c'est une banque, nous n'avons aucun pouvoir. Nous avons le choix entre cinq banques seulement et elles sont toutes à peu près du pareil au même. Les banques devraient sentir davantage qu'elles ont des responsabilités, qu'elles ne peuvent pas faire ce qui leur plaît.
Les banques se lamentent. Elles disent que si elles ne font pas ceci ou cela, toutes les banques du monde vont venir les avaler.
Les personnes âgées ne sont pas contre les banques. Elles ont toujours beaucoup de respect pour les banques. Mais qui a décidé que les banques devraient nous dire quoi faire avec notre argent? Elles ne sont pas les meilleurs conseillers du monde dans ce domaine. D'ailleurs, si vous prenez un directeur de succursale et l'envoyez travailler dans le monde des affaires, il échouera probablement 90 p. 100 du temps; or c'est lui qui contrôle notre argent et nous dit quoi en faire.
Je suis ravie que One Voice ait fait ressortir l'aspect humain, ce que ressentent les personnes âgées. Elles ont pris leurs jambes à leur cou. Elles sont non seulement effrayées, mais aussi confuses et malheureuses. Elles ont économisé toute leur vie afin de préparer leurs vieux jours. Peu importe la direction vers laquelle elles se tournent, cette sécurité n'existe plus.
Le sénateur Kolber: Quel est le rapport avec les banques?
Le sénateur Angus: Il faut voter conservateur, je suppose.
Mme Morgenthau: Conservateur? Pourquoi?
Le sénateur Angus: Et bien, pour trouver la sécurité.
Le sénateur Kolber: Vous envoyez beaucoup de messages contradictoires. Vous affirmez que les banques donnent de mauvais conseils et M. Armstrong déclare qu'elles n'en donnent pas assez.
M. Armstrong: Il n'y a pas de contradiction entre les deux.
Mme Morgenthau: Elles ne donnent pas assez de bons conseils.
Le sénateur Kolber: Cela me semble très contradictoire. Où avez-vous entendu dire que les banques annulaient pour 2 milliards de dollars de prêts étrangers?
Mme Morgenthau: Je pense avoir conservé cet article.
Le sénateur Kolber: J'aimerais bien le voir.
Mme Morgenthau: Je serai ravie de le photocopier et de vous l'envoyer. Que penser des milliards de dollars qu'elles ont perdus en Pologne et ailleurs? Ce qu'elles ont annulé, nous devons le rembourser.
Le sénateur Perrault: Monsieur le président, nous avons entendu deux exposés intéressants et utiles.
Madame Morgenthau, vous avez insisté sur la nécessité de protéger davantage les renseignements personnels et je pense que vous avez fait allusion à un incident, à une liste d'envoi d'une banque qui aurait, semble-t-il, servi à trouver des clients dans un autre secteur.
Mme Morgenthau: C'est exact.
Le sénateur Perrault: Si vous pouviez nous donner plus de précisions, je serais ravi d'en savoir davantage à ce sujet.
Mme Morgenthau: J'ai cette lettre au bureau. J'avais d'ailleurs pensé à l'apporter. Je devrai demander la permission du membre qui l'a écrite avant de vous la faire parvenir. Le déposant n'avait pas donné son accord.
Le sénateur Perrault: Lorsque les banques se présentent devant nous, elles nous disent qu'elles peuvent offrir une plus grande gamme de services tout en réduisant les coûts et les frais de service parce qu'elles essaient d'aider les personnes âgées et les autres clients. Vous n'êtes pas d'accord avec cet argument.
Mme Morgenthau: Non. Je ne pense pas qu'elles connaissent assez bien le domaine.
Le sénateur Perrault: Vous pensez qu'elles devraient se contenter de leur spécialité.
Mme Morgenthau: C'est exact. Les banques s'occupent d'un domaine très vaste. Si elles donnent des conseils, elles devraient avoir des conseillers qui savent de quoi ils parlent.
Le sénateur Perrault: Il y a une tendance mondiale vers les services bancaires électroniques. Des banques électroniques créées dans la plupart des grands pays du monde ont remporté de grands succès. Elles ont réussi en Hollande et en Grande-Bretagne. Il y en a quelques-unes au Canada. Vous affirmez que vos membres n'aiment pas se servir des guichets automatiques parce qu'ils veulent faire affaire avec quelqu'un.
Mme Morgenthau: Oui. Si vous posez la question à nos membres, ils vous diront qu'ils ne vont pas au guichet automatique. Ils n'y iront pas et moi non plus.
Le sénateur Perrault: Les banques électroniques prétendront qu'elles réduisent considérablement les frais de service parce que les frais généraux sont moins élevés. Y a-t-il un moyen de parvenir à un compromis entre les deux, autrement dit, de trouver une forme de services bancaires électroniques que vos membres apprécieraient?
Mme Morgenthau: Je fais remarquer humblement qu'il y a 7,1 millions de Canadiens de plus de 50 ans. De ce nombre, 3 millions ont plus de 65 ans. Il y a plus de 9 millions de «baby boomers». Avec le temps, ceux qui ne suivent pas l'évolution technologique diminueront.
Je peux dire que 3 millions de personnes aiment encore avoir un contact personnel.
Le sénateur Perrault: Les méthodes et systèmes bancaires traditionnels.
Mme Morgenthau: Oui. Très souvent, les personnes âgées n'ont de contacts personnels qu'avec le caissier ou la caissière à la banque. Beaucoup vivent seules. Leur seul lien avec le monde extérieur, c'est la personne qui leur sourit à la banque.
Le sénateur Perrault: Mais les effectifs sont de plus en plus réduits.
M. Armstrong: Il y a des mises à pied importantes.
Mme Morgenthau: Quand on entre à la banque de nos jours, on n'y connaît plus personne. Ils ne connaissent pas votre nom et ne savent pas qui vous êtes. Ils changent de directeur comme on change de chemise. Comment se fier à quelqu'un qui vous dit quoi faire de vos économies de toute une vie quand vous ne les connaissez pas vraiment depuis plus longtemps qu'une semaine ou deux?
Le sénateur Meighen: Je suis représentatif de ces personnes âgées qui sont confuses et inquiètes. En vous écoutant, je me suis dit que si j'étais un banquier futé, je mettrais sur pied un bureau à l'intention des personnes âgées. Je ne sais pas si ce serait possible dans toutes les succursales. J'aiderais les personnes âgées à trouver leur chemin dans ce labyrinthe. Je pensais que c'était une idée brillante et j'allais en parler au sénateur Kolber quand je vous ai entendue affirmer que vous ne voulez pas des conseils des banquiers parce qu'ils sont trop stupides.
Mme Morgenthau: Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas voulu dire. Mes enfants le font tout le temps. Je ne vous laisserai pas faire. Ce n'est pas ce que j'ai dit.
Le sénateur Meighen: Que voulez-vous? Que les banques ne disent rien ou qu'elles vous aident, en étant consciente qu'elles chercheront à défendre leurs propres intérêts?
M. Armstrong: Certaines banques ont un centre bancaire pour les aînés.
Le sénateur Meighen: Mme Morgenthau a déclaré qu'ils étaient stupides.
Mme Morgenthau: Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai affirmé que les gens qui donnent les conseils devraient être bien formés.
Quand j'ai pris la parole devant les membres de l'Association des banquiers canadiens, à leur demande, j'ai déclaré d'entrée de jeu que les banques n'aiment pas les personnes âgées. J'ai donné une liste de dix suggestions qui aideraient les banques à parler aux personnes âgées. L'une d'elles consistait à créer un bureau où les personnes âgées pourraient parler à un agent financier.
Il y a dans les banques des gens qui ont la formation voulue, mais vous ne les voyez pas quand vous parlez au caissier. Puis, quand vous voulez leur parler, ils sont au téléphone ou avec un client et il faut prendre un rendez-vous. Je ne dis pas qu'il n'y a pas de gens bien formés dans les banques. J'aimerais qu'ils soient plus nombreux et je serais ravie de voir un caissier qui s'occuperait de nous.
Le sénateur Kolber: Est-ce le mauvais endroit pour faire cette demande?
M. Armstrong: Non. Pourquoi?
Le sénateur Kolber: Les banques sont des entreprises commerciales. Elles essaient de réaliser des profits, je suppose. C'est ce que demandent leurs actionnaires. Ne devriez-vous pas faire ces suggestions aux banques?
Mme Morgenthau: Je l'ai fait.
M. Armstrong: C'est vrai.
La plus grande partie des fonds que les banques redistribuent proviennent des personnes âgées. Le monsieur des Maritimes qui a témoigné ce matin l'a confirmé de manière très éloquente.
Le sénateur Kolber: Comment pouvons-nous obliger les banques à...
M. Armstrong: Où vouliez-vous que nous allions? Proposez-nous un autre comité, alors.
Le président: Sénateur Kolber, je prends la défense du témoin pour rappeler que notre comité a toujours donné beaucoup de latitude aux témoins. Il nous est aussi arrivé souvent de prêter une oreille attentive aux points de vue des personnes âgées au fil des années.
Le sénateur Kolber: Je leur prête une oreille attentive, mais je ne pense pas qu'il soit efficace de venir témoigner devant nous.
Mme Morgenthau: Sénateurs, nous avons parlé de la réglementation. Vous vous penchez sur la réglementation et sur la façon de réglementer le secteur financier pour qu'il fonctionne bien au Canada. Nous avons traité de ce sujet. Mais je suis très contente que mon collègue ait abordé l'aspect humain. La réglementation touche la personne qui entre à la banque pour y déposer 10 $ ou 30 $ ou davantage, peu importe. Cette personne a droit à autant d'égards que celle qui vient déposer 100 000 $. C'est tout ce que nous disons.
Quand vous examinez la réglementation, faites-le d'un point de vue humain. Vous êtes les seuls vraiment en mesure de le faire, parce que nous ne vous élisons pas.
Le sénateur Stewart: Ces exposés étaient très utiles. Le sénateur Kolber affirme que les banques ont un rôle très spécialisé à jouer, et je suis d'accord avec lui. Mais quand je me rappelle la petite ville près de l'endroit où j'ai grandi, je peux dire que les banquiers locaux donnaient beaucoup de conseils très astucieux et fiables aux gens, notamment à des gens qui n'étaient pas vieux du tout.
Je suppose qu'à cause des changements technologiques, de la complexité accrue des opérations et de la mondialisation des activités financières, les banquiers locaux ne sont plus en mesure de fournir ce genre d'aide à leurs clients, âgés ou non.
Il se pourrait bien, monsieur le président, que ce problème mérite qu'on s'y intéresse et qu'il faille le régler d'une certaine façon, mais peut-être pas par des règlements ni par la législation bancaire. Quant à moi, j'ai besoin des conseils d'une personne fiable qui n'a pas un intérêt financier à défendre en me donnant ses conseils. La complexité de notre société est telle que ce genre de service pourrait bien s'imposer.
Mme Morgenthau: Bravo, sénateur Stewart.
Le président: Merci à nos témoins d'être venus comparaître aujourd'hui.
Nos derniers témoins représentent la Corporation financière Power.
Monsieur Burns, après nos discussions de la semaine dernière, je vous prierais d'insister sur le sujet dont il n'a pas encore été question jusqu'ici dans les témoignages. Il s'agit de l'obligation de passer par une filiale. On en parle à la page 22 du livre blanc. Les institutions financières ne seront plus tenues de passer par des filiales pour effectuer les activités de traitement des données. Elles pourront mener ces activités à l'interne. Si vous voulez bien examiner cette question aujourd'hui, nous pourrons peut-être trouver un autre moment pour revenir sur l'exposé exhaustif concernant la croissance des divers éléments du secteur financier canadien. Vous avez réduit cette information à deux ou trois graphiques qui, franchement, ne rendent pas justice au sujet.
M. Jim Burns, président, Corporation financière Power: Si les membres du comité se donnent la peine de lire notre mémoire, ils constateront que nous traitons de trois sujets seulement. Une partie du contenu de notre mémoire a déjà été abordée par les témoins précédents.
Le contrôle des données confidentielles et leur mouvement sont un seul et même problème. Il faut cependant tenir compte de trois facteurs qui définissent la réalité canadienne et qui sont probablement uniques au monde.
Les graphiques contenus dans le mémoire illustrent la part du marché des cinq ou six banques à charte du point de vue des produits à la consommation, soit l'actif et le passif des ménages. Ces chiffres sur la part du marché font ressortir la position très dominante des banques à charte, ce qui est tout à fait légal. Mais l'arrivée des banques dans d'autres domaines se traduit rapidement, comme le révèlent les graphiques, par une domination considérable des banques dans ces domaines. Il y a plusieurs raisons à cela.
Deuxièmement, il faut tenir compte du pouvoir économique de ces six institutions, illustré de manière très évidente par le fait que, durant quatre ou cinq ans, les bénéfices nets après impôt ont compté pour un peu plus de 50 p. 100 des bénéfices nets après impôts des 300 entreprises les plus rentables cotées à la Bourse de Toronto. Les banques ont obtenu ces résultats à une époque où leur part du marché boursier se situait à environ 15 p. 100. Ces deux facteurs illustrent donc la part du marché et le pouvoir économique. Quand on y ajoute la base d'information que les banques contrôlent désormais, en raison de la nature de leurs activités, on obtient une situation probablement unique au monde, un pouvoir d'oligopole qui nous paraît maintenant irréversible.
Si j'ai bien compris, le gouvernement propose d'établir une commission qui prendra environ un an pour examiner le marché financier canadien, à l'aube du nouvel âge. On peut se demander ce qui en ressortira. Je suis convaincu que cette commission tirera la conclusion que beaucoup de pouvoir se concentre chez un petit groupe.
Comment réagira-t-on ensuite? C'est une question intéressante, que la commission devra se poser si elle se soucie de la concurrence sur le marché.
Le sénateur Kolber: Avez-vous des suggestions à proposer?
M. Burns: Je suppose que ce n'est pas le rôle du comité pour le moment, mais je pense qu'il faudrait songer à ouvrir la porte aux institutions étrangères. Je ne crois pas qu'un groupe d'institutions nationales puisse être assez fort pour faire une différence. Je ne connais pas trop d'investisseurs qui, placés dans la même situation dans leur pays, seraient intéressés à investir massivement sans avoir bon espoir de réussir, parce qu'à moins de viser un créneau en particulier dans un domaine ou un autre, les jeux sont faits.
Le sénateur Meighen: Monsieur Burns, sommes-nous en train de comparer des pommes et des oranges? Vos graphiques indiquent que les banques occupent une position dominante et croissante sur le marché.
M. Burns: Oui.
Le sénateur Meighen: Les banques qui ont comparu devant nous aujourd'hui ont déclaré que leur part du marché diminue. Y a-t-il une différence parce que nous ne comparons pas la même chose ou le tableau est-il plus juste dans un cas que dans l'autre?
M. Burns: Le président nous a priés de ne pas traiter de ce sujet, alors je ne le ferai pas. Ces graphiques ont été établis par Bain and Company, qui je crois, font des évaluations du marché assez justes. Ils n'avaient aucun intérêt personnel à défendre. Nous leur avons seulement demandé de nous décrire la situation.
Nous voulions en réalité connaître la situation en 1984, puis en 1994-1995, afin de montrer ce qui s'était passé entre-temps, conscients que la plupart des Canadiens n'étaient pas très heureux du changement. Les courtiers en valeurs mobilières se sont effondrés; essentiellement, ils n'existent plus. Les sociétés de fiducie se sont effondrées; il n'en reste plus. Toutes ces activités ont changé. Il y a eu évidemment une croissance phénoménale, survenue en grande partie depuis quatre ans, plutôt que dix.
Le sénateur Meighen: Il s'agissait peut-être d'une comparaison des dépôts.
Le sénateur Angus: Non, les prêts hypothécaires et tout le reste sont inclus.
M. Burns: Comme tout le monde le sait, ils réalisent leurs profits grâce à l'écart par rapport aux dépôts des particuliers. La Banque Royale a probablement pour 60 milliards de dollars de dépôts des particuliers sur lesquels elle ne verse que 1 p. 100 d'intérêt, mais elle prête cette somme à 8 ou 9 p. 100.
Le sénateur Meighen: Plus les banques ont de dépôts, plus elles s'enrichissent.
M. Burns: Le 1er janvier, lorsque le président de la banque se lève, il a déjà fait une bonne année, parce que ces dépôts ne s'envolent pas. Ils en déplacent une partie vers le marché monétaire, mais essentiellement les dépôts restent à la banque.
Le sénateur Kolber: Ces chiffres sont-ils fiables? On nous dit que la marge bénéficiaire des banques canadiennes est de 100 points de base inférieure à celle des banques américaines.
M. Burns: Sans vouloir vous contredire, sénateur, je ne vois pas le rapport. Je ne connais pas la marge bénéficiaire des banques américaines. Elle est probablement 100 fois plus élevée, mais il n'y a pas seulement cinq banques qui contrôlent le secteur aux États-Unis, il y en a 1 020.
Le sénateur Kolber: Je ne vois pas le rapport là non plus.
M. Burns: Avec le fait que les banques font de l'argent?
Le sénateur Kolber: Vous êtes ici pour cogner sur les banques. Vous devez nous dire ce qu'il faudrait faire, à votre avis.
M. Burns: Le président m'a prévenu d'entrée de jeu de ne pas cogner sur les banques.
Le sénateur Kolber: Vous avez pourtant fait un beau travail en ce sens.
M. Burns: Je refuse de cogner sur les banques.
Le sénateur Kolber: On ne le dirait pas.
M. Burns: Tout ce que nous n'aimons pas des banques, c'est le fait que nous ne pouvons pas en acheter une. Il y a un plafond de 10 p. 100.
Le sénateur Kolber: Le chat sort du sac.
M. Burns: Si quelqu'un veut un conseil financier, la meilleure affaire au monde est probablement des actions d'une banque à charte canadienne. Lisez l'article de Fortune 500 que nous avons joint en annexe à notre mémoire. Considérez l'actif et la rentabilité. Elles disent peut-être qu'elles arrivent au 50e rang pour ce qui est de l'actif, mais regardez la rentabilité. Elles jouissent d'une position très protégée et elles savent en profiter. Depuis 25 ans, le gouvernement leur donne de plus en plus de pouvoirs. Elles en profitent. Je ne cogne pas dessus. Elles ne font rien que je ne ferais moi-même si j'étais à la tête d'une d'entre elles.
Le président: Je rappelle à mes collègues que la question de la redistribution des pouvoirs n'est pas traitée dans le livre blanc. Je préférerais donc que nous laissions tomber pour le moment.
Deuxièmement, comme l'a fait ressortir un de nos témoins aujourd'hui, il y a beaucoup de données contradictoires. Je ne conteste pas les données présentées par la Corporation financière Power, mais fais simplement remarquer -- et je le dis parce que je connais le domaine des statistiques et je sais qu'on peut s'en servir à toutes sortes de fins -- qu'il y a des données contradictoires au sujet de la part du marché relative de diverses institutions financières et de divers éléments du marché.
Conscient que la déclaration des témoins provoquerait légèrement mes collègues, je leur ai déclaré d'entrée de jeu que, puisque la redistribution des pouvoirs n'est pas traitée dans le livre blanc, je préférerais que nous en venions au sujet important, qui se rapporte directement au livre blanc.
M. Burns: En ce qui concerne l'accumulation de données et les renseignements personnels qui se trouvent un peu partout, notamment une liste d'abonnés à une revue, on peut se demander s'il devrait être permis de vendre ces listes. Je ne crois vraiment pas que cela constitue une grave menace pour l'humanité. Il faudrait peut-être l'interdire, mais cela se fait tous les jours, comme vous le savez. Les gens dressent des listes et les vendent.
Mais les banques ont accumulé des renseignements complets sur les gens ou sur les entreprises, surtout les petites entreprises qui sont vulnérables. Cette liste est très exhaustive, il ne manque rien. Je faisais remarquer à un collègue l'autre jour que tout ce qui manque ce sont des données sur la santé et il m'a répondu qu'elles existent bel et bien.
Les banques sont en train de mettre en place au Manitoba un système de compensation des chèques des médecins, par exemple; autrement dit, un système de gestion administrative du réseau de santé de la province. Il est évident que ces activités pourraient être très lucratives pour celui qui percevrait des frais d'administration. Je suis convaincu que le service sera très efficace et probablement moins cher que lorsque le gouvernement s'en occupait. Il n'en demeure pas moins que les banques ont accès à ce genre d'information.
Il faut se demander où se trouve l'information et qui y a accès. Nous avons essayé de faire ressortir ce que nous croyons être la racine profonde du problème: quelles activités sont menées à l'interne et lesquelles sont menées dans une filiale? Notre attention a été attirée par trois lignes à la page 23 qui se lisent comme suit:
Le gouvernement propose d'autoriser les institutions financières à mener à l'interne des activités de traitement de l'information et de financement spécialisé.
On pourrait lire cette phrase rapidement et ne pas y attacher trop d'importance. Je crois cependant qu'il y a une différence incroyable entre mener une activité dans une filiale indépendante et le faire à l'interne. Si l'activité est menée à l'interne, tout le monde y a accès; les données sont dans le système. Si l'activité est menée dans une filiale, vous savez qu'il est très facile d'interdire par règlement ou dans la loi les transferts de données entre la filiale et la société mère ou une autre filiale.
Le sénateur Kolber: Essayez-vous de nous faire croire que vous n'avez pas accès à l'information que possède votre filiale?
M. Burns: Power?
Le sénateur Kolber: Oui, Power.
M. Burns: Non. Il est tout à fait impossible pour qui que ce soit, et même pour moi le président, d'aller là-bas et d'obtenir des renseignements sur l'état de santé de quelqu'un. Ils ne vous donneraient pas cette information à vous non plus, pas plus que la société de fiducie. La société de fiducie ne donnerait à personne, y compris le pdg ou le président, l'état des comptes en fiducie.
Était-ce une obligation légale? Non, c'était une coutume. Je pense qu'au moins les grandes institutions la respectaient. Je suis convaincu que c'est la même chose chez Sun Life ou Manuvie ou ailleurs; ils ne vous donneraient pas ces renseignements. Certaines personnes devaient savoir, notamment les souscripteurs, mais à part eux, qui aurait eu accès à cette information?
S'il existe un régime d'assurance collective dont les assurés réclament souvent des primes d'assurance-invalidité, on le saurait en bloc, mais cela ne donnerait à personne le droit de trouver quel professeur ou quel employé demande des prestations, à tort ou à raison. On s'intéresse aux chiffres globaux parce qu'ils servent à déterminer les primes. Nous n'avons aucun droit de nous immiscer dans la vie personnelle des gens.
Faut-il en déduire que, lorsque les renseignements sont fournis à une autre institution, celle-ci commence à s'y fourrer le nez? Celui qui a une heure ou deux l'après-midi se met-il à fouiller dans les comptes? J'en doute.
Un article que j'ai trouvé intéressant a été publié dans le Vancouver Province le 31 mai dernier.
Le sénateur Perrault: C'est un bon article.
M. Burns: Ils affirment qu'ils ne feraient pas ce genre de chose sans permission. Je me demande alors, comment on fait pour obtenir la permission?
Le sénateur Perrault: C'est un article époustouflant.
M. Burns: Je trouverais intéressant et facile d'obtenir la permission parce que je dirais au sénateur Angus, qui viendrait demander un prêt et qui aurait plusieurs comptes à la banque: «Aimeriez-vous que nous vous communiquions en permanence des renseignements financiers pertinents que vous trouveriez utiles?» Le sénateur Angus, soucieux d'obtenir son prêt dirait oui ou, s'il tenait moins à obtenir le prêt, demanderait tout de même des précisions. Il donnerait carte blanche à ce genre d'activité.
C'était très théorique il y a 10 ou 15 ans, parce qu'il y avait une foule de renseignements disséminés à droite et à gauche. Comme vous le savez, en une microseconde on peut désormais tout rassembler et présenter l'information comme vous le voulez. On peut savoir où vous dépensez votre argent, par exemple. Les activités menées à l'interne dans les banques en sont un autre. Les banques contrôlent les systèmes de gestion de la paie.
Chez nous, j'ai demandé au personnel administratif de me donner une liste de tout ce que la banque demande et obtient pour gérer et payer nos employés. Il y avait trois pages sur à peu près tout ce que vous voudriez savoir. Les banques pouvaient établir une proposition de services collectifs à partir de cette information. Elles n'auraient même pas besoin de venir nous voir. Elles auraient absolument tout ce dont elles ont besoin et elles sauraient aussi exactement ce que vous versez à votre fournisseur actuel parce qu'elles compensent vos chèques.
Nous pouvons vous en envoyer des exemplaires si vous voulez. Nous n'inventons rien. Cela se passe chez nous. C'est ce que nous leur donnons pour qu'elles s'occupent de la paie -- toutes les retenues facultatives, les régimes d'épargne et les REÉR. Elles nous diraient que nous devons offrir ceci ou cela à nos employés. Je n'ai aucune objection à cela. Ils en ont besoin pour faire leur travail. Ce qui m'inquiète, c'est qu'elles peuvent utiliser cette information à d'autres fins.
Le président: Compte tenu du fait que la loi actuelle leur permet de l'obtenir et de s'en servir.
M. Burns: La paie peut se faire à l'interne.
Le président: Vous pensez que mener les activités à l'interne plutôt que dans une filiale accroît considérablement le risque que les données soient employées à mauvais escient. En êtes-vous convaincu parce qu'on peut fixer des règles différentes pour une filiale?
M. Burns: Absolument. Ce n'est pas aussi facile.
Le président: Nous avons publié un long rapport sur la protection des renseignements personnels, qui a entraîné certaines des modifications actuelles.
M. Burns: En ce qui concerne votre proposition de permettre aux banques d'entrer dans le domaine de l'assurance, nous avons déclaré à l'époque qu'elles devraient être assujetties aux mêmes règles que tout le monde. Par conséquent, la banque qui veut se lancer dans le domaine de l'assurance devrait le faire par l'entremise d'une filiale, pas directement chez elle. Il y a des raisons financières à cette façon de procéder, parce qu'on mélange de nombreux types d'éléments d'actif et de passif du fait que ce sont deux activités différentes.
C'est la même chose dans le domaine de l'assurance-accidents. Ils ne devraient jamais offrir des services d'assurance-invalidité à la banque. Ils devraient passer par une filiale, qui devrait être autonome, se financer et fonctionner comme tous les autres dans le domaine.
L'aspect clé des dispositions de 1992 était que le règlement interdisait le transfert de renseignements entre la filiale -- dans ce cas-ci, une filiale d'assurances -- et la banque ou une autre filiale de la banque. Autrement dit, si elles voulaient se lancer en assurance, ce qui allait à l'assurance devait y rester, point final.
Je ne suis pas étonné de l'empressement des banques à charte canadienne dans le domaine de l'assurance. C'est très inhabituel. Elles y tenaient tellement. En 1992, le gouvernement leur a permis de se lancer en assurance, mais à condition que les activités d'assurances soient menées dans une filiale et ne puissent être transférées.
Le sénateur Kolber: Et l'assurance ne pouvait être vendue dans les succursales.
M. Burns: Exactement. Je pense, sénateur, que vous avez visé juste en parlant de ventes dans les succursales. C'est l'euphémisme pour «à l'interne». À mon avis, que cela se fasse dans une succursale ou non n'a pas d'importance parce que les gens n'y vont pas pour acheter de l'assurance de toutes façons.
Le président: Vous avez été pdg de la Great-West, une grande société d'assurance-vie. Supposons qu'on vous ait obligé à un moment donné de faire le traitement de vos données dans une succursale plutôt qu'à l'interne. Oublions pour un instant le problème de commercialisation que vous avez soulevé. Aurait-il coûté plus cher, moins cher ou la même chose de mener ces activités dans une succursale plutôt qu'à l'interne?
M. Burns: Exactement la même chose. Mais le problème n'est pas où s'effectue le traitement des données. Ce qui importe, c'est l'utilisation des données qui se trouvent dans le système. Voilà le problème.
Le président: Je vais vous expliquer pourquoi je pose la question.
M. Burns: Je peux répondre à la question. Aux États-Unis, tout le traitement des données de notre société s'effectue dans une société distincte parce que nous vendons ce service à toutes sortes d'autres entreprises. Nous avons créé une filiale. Notre société est tout simplement un client de la filiale.
Le président: Je veux vous lire une phrase tirée du livre blanc que je ne comprends pas, étant donné votre réponse. Vous ne la comprendrez peut-être pas vous non plus. Je cite une phrase de la page 23.
Les institutions financières ont réclamé l'abolition de cette exigence [celle de créer des filiales] pour certaines activités de manière à réduire leurs coûts d'exploitation.
Ma question est la suivante: comment le passage d'une filiale à l'interne fait-il diminuer les coûts? Je vous pose la question parce que vous avez dirigé une grande institution financière.
M. Burns: J'aimerais bien savoir pourquoi ils disent cela.
Le président: C'est une énigme pour vous comme pour moi; il n'y a pas de réponse commerciale évidente.
M. Burns: C'est une énigme pour moi. Au Groupe Investors, nous avons transféré toutes nos opérations informatiques à ISM. Nous n'en faisons plus du tout.
L'important, c'est que, pour rien au monde, ISM utilisera les données autrement que pour les besoins du Groupe Investors. Elle n'en est pas propriétaire. Elle est propriétaire du système qui produit les statistiques, les relevés des clients et tout le reste, mais les données ne lui appartiennent pas. L'important, c'est qui contrôle les données et quelles sont les mesures prévues pour empêcher que les données aillent ailleurs.
Le président: Je comprends. Je suppose pour un instant qu'il y a une justification à la proposition du haut de la page 23 et que la justification donnée dans le livre blanc est que cela réduit les coûts d'exploitation. J'essaie de comprendre comment quelqu'un qui peut exploiter une institution financière peut comprendre d'où proviennent les économies. C'est ce que dit le livre blanc. Vous me dites que vous ne comprenez pas la justification vous non plus. Je sais qu'un problème en découle, selon vous.
M. Burns: Je pense que quelqu'un ouvre une porte sans être conscient de l'importance de ce geste. Ce n'est pas à moi de recommander aux sénateurs quoi faire, mais quelqu'un pourrait peut-être leur demander de venir vous donner des explications.
Le sénateur Perrault: C'est une bonne idée.
Le président: Si ce n'est de la porte ouverte, vous ne comprenez pas la justification, qui n'a rien à voir avec la porte ouverte, mais qui touche plutôt à une réduction des coûts.
Le sénateur Kolber: Ils utiliseront peut-être un système au lieu de deux. Je ne pense pas qu'ils aient fait une affirmation gratuite, sans savoir ce dont ils parlent.
M. Burns: J'essaierai de ramener tout cela à une observation bien simple. Quand il conçoit des règlements et des lois durant l'ère de l'informatique, le gouvernement devrait être très conscient des répercussions des activités menées à l'interne ou dans une succursale. Vous vous demanderez peut-être comment mettre fin à tout cela. Je vous ai indiqué que la façon la plus simple consiste à accorder la permission, mais en précisant bien que les activités doivent être menées à tel endroit, qu'il faut mettre en place un cordon de sécurité et qu'il est impossible de transférer l'information d'un endroit à l'autre. Vous savez tout aussi bien que moi que, tôt ou tard, ils mourront d'envie d'obtenir cette information. Si vous étiez un directeur du marketing, vous donneriez tout l'or du monde pour obtenir cette information.
Le sénateur Angus: Monsieur Burns, je n'arrive pas à comprendre toute cette question des données. J'essaie de comprendre depuis plus d'un an. Je lis tous les jours dans le Wall Street Journal et le Daily Telegraph de Londres ou le Financial Times des articles sur la dissémination de ces données, d'une façon ou d'une autre. Au bout du compte, est-ce vraiment important?
Le sénateur Kolber: Bonne question.
M. Burns: Je pense qu'au bout du compte c'est très important.
Le sénateur Angus: Tous les jeunes, y compris ma fille et votre petite-fille ont des modems et sont branchés sur Internet. Je pense que nous nous battons contre un cyclone.
M. Burns: Quand vous lisez le Wall Street Journal, vous devez faire attention. Ce qui est acceptable aux États-Unis ne l'est pas nécessairement au Canada. Comme nous avons tenté de le démontrer, notre marché est tout à fait différent du leur. Leur marché n'est pas dominé par cinq institutions établies à Toronto. Ils ont de grosses banques là-bas. Il y a la CityBank, mais qu'importe? La NationsBank a plus de clients. Si vous n'aimez pas la NationsBank, il y a 25 institutions différentes où vous pouvez aller. Il y a encore de grandes sociétés d'épargne et de prêt, des petites banques et des banques de taille moyenne. Il y a tant de possibilités qu'il est impensable qu'une de ces banques obtienne un jour un pouvoir de monopole ou d'oligopole.
Le sénateur Angus: Au début de la soirée, un sénateur est intervenu et vous avez déclaré que la solution consiste à laisser entrer les banques étrangères, qu'il y aura alors des solutions de rechange. Nous entendons parler de toutes ces institutions qui viennent chez nous: les quasi-banques, les banques étrangères, les banques de l'Annexe II, Newcourt Financial, Beneficial Finance, Household Finance. Elles ont toutes des produits qui paraissent assez inoffensifs. Je voulais le dire au témoin de l'ACPR. Il n'y a pas seulement cinq grandes banques.
M. Burns: En effet, sénateur. Nous avons 5 000 professionnels qui donnent des conseils aux Canadiens. On peut obtenir des conseils de nombreuses sources. Mais je pense que votre comité constatera que les banques canadiennes livrent une concurrence active à tous les points de vue, sauf sur le prix. Si vous voulez une concurrence réelle, il sera probablement question de concurrence des prix. Pour concurrencer les prix d'une institution aussi grosse, il faut être Tarzan.
Le sénateur Angus: Vous avez probablement raison, mais qu'arrivera-t-il si nous ouvrons la porte aux banques étrangères?
M. Burns: Ce ne sont peut-être pas des banques. Il s'agit peut-être d'autres types d'institutions. Je n'en sais rien. Je prends note de la déclaration du président d'une de ces banques, qui affirme qu'il est temps de se débarrasser de la règle du 10 p. 100.
Le sénateur Angus: J'ai pris note moi aussi.
M. Burns: Je pense qu'il le voudrait pour conclure un marché avec une banque étrangère. C'est mon intuition.
Le sénateur Angus: Vous avez peut-être raison.
M. Burns: Il ne peut pas conclure de marché s'il est impossible de vendre plus de 10 p. 100 des actions, parce que ce n'est pas intéressant.
Le sénateur Kolber: Par curiosité, je vais poser une question. Quel est le rendement sur les actions de la Great-West?
M. Burns: Il est plus élevé aux États-Unis qu'au Canada. Le rendement combiné était d'environ 17 p. 100 l'an dernier.
Le sénateur Kolber: C'est presque autant ou un peu plus que le rendement moyen des banques.
M. Burns: Nous accroissons nos activités qui comportent des droits.
Le sénateur Kolber: Personne ne critique vos profits.
M. Burns: Je ne critique pas les leurs. Je pense que c'est le genre de profit qu'elles devraient réaliser, vu leur taille. J'ai l'impression qu'elles font beaucoup plus d'argent que cela en réalité.
Le sénateur Kolber: Elles n'obtiennent qu'un rendement raisonnable des capitaux propres.
M. Burns: Ce n'est pas une question de rendement des capitaux propres, sénateur. C'est purement une question de taille. Si vous faites 1,8 milliard de dollars par année et que vous versez un dividende de 35 cents, il vous reste environ 700 millions de dollars par année. Si elles veulent agir ainsi, elles le peuvent. Elles continueront de le faire jusqu'à ce que tous les concurrents aient été éliminés. Je pense que c'est une simple question de taille sur un petit marché.
Le sénateur Kolber: Le Canada ne devrait-il pas être reconnaissant de posséder un système bancaire aussi fort?
M. Burns: Absolument. Nous avons un système bancaire formidable. Nous avons un meilleur système que les Américains, du point de vue des clients. En Georgie, il faut compter dix jours pour faire compenser un chèque, tandis qu'au Canada, c'est presque instantané.
Le sénateur Kolber: Nous sommes presque en danger, parce que si nous laissons le gouvernement intervenir plus qu'il ne faut, nous suivrons peut-être l'exemple de la France, où les faillites sont énormes, à cause de la participation du gouvernement.
M. Burns: Oui, mais si nous revenons à la protection des renseignements confidentiels, elle est en train de devenir un enjeu de taille parce que le transfert de l'information et sa manipulation sont très faciles. Nous ne nous en inquiétions pas auparavant, parce que s'il fallait chercher dans six millions de noms pour en trouver un, c'était trop compliqué. Mais maintenant, cette recherche se fait en un clin d'oeil. Cela donne un avantage énorme à celui qui possède cette information.
Le sénateur Kolber: C'est un grand outil de commercialisation, mais vous n'exploitez pas vraiment personne.
M. Burns: Je n'en sais rien. Je crois cependant que vous leur donnez la possibilité de le faire.
Le sénateur Kolber: Mais n'est-ce pas aux risques de l'acheteur? Si vous offrez quelque chose à quelqu'un, cette personne n'est pas obligée d'accepter.
M. Burns: Je ne pense pas que l'acheteur ait le choix.
Le sénateur Meighen: Voilà le problème, monsieur Burns. Il y a un risque de conséquences funestes et, en tant que société, nous essayons d'éviter ces conséquences funestes. Il vaudrait peut-être mieux concentrer notre attention sur ce qu'on fait de l'information plutôt que d'essayer d'empêcher la concentration de l'information, qui est peut-être inévitable.
M. Burns: Je n'aurais rien contre cela. Je pense que, quels que soient les règlements, ils doivent être équitables. Nous ne parlons pas simplement des banques, mais de tout le monde. Je suis d'accord. Dans nos sociétés, nous n'avons jamais eu de mal à imaginer qu'il fallait protéger l'information, parce que c'était déjà dans nos moeurs. Aimerions-nous avoir accès à l'information? À qui le dites-vous!
Le sénateur Meighen: C'est en réalité une question d'avantage concurrentiel que cela procure, les connaissances que peut en tirer celui qui possède cette information.
Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Burns et monsieur Johnson, d'être venus témoigner aujourd'hui.
La séance est levée.