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AEFA - Comité permanent

Affaires étrangères et commerce international

 


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Table des matières

CHAPITRE 5

AMÉLIORER L’ACCÈS AU MARCHÉ DE L’ASIE-PACIFIQUE EST-IL ENCORE UN MOYEN D’ACTION UTILE ?
A. Définition de l’APEC
B. Historique et réalisations de l’APEC
C. Importance du Sommet de Vancouver de 1997 et future orientation de l’APEC
1. La libéralisation du commerce et de l’investissement
2. La facilitation des affaires
3. Les nouvelles orientations de la coopération économique et technique
4. L’accession de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce


AMÉLIORER L’ACCÈS AU MARCHÉ DE L’ASIE-PACIFIQUE EST-IL ENCORE UN MOYEN D’ACTION UTILE?

« À de nombreux égards, l’APEC nous semble être une sorte d’organisation de facilitation et d’aide technique plutôt qu’une organisation purement consacrée à la libéralisation des échanges. »

(Professeur Michael Hart, Centre de droit et de politique commerciale, Université Carleton)

Dans son rapport provisoire de juin 1997, le Comité formulait des recommandations concernant la coopération économique Asie-Pacifique et destinées à faire avancer le programme de libéralisation du commerce et de l'investissement, en encourageant les membres de l'APEC à se donner des engagements à long terme pour réduire les obstacles au commerce et à l'investissement. À l'époque, nous étions d'avis qu'il était essentiel que le Canada, en tant que président de l'APEC en 1997, s'assure que les questions de base de l'APEC concernant la libéralisation du commerce et de l'investissement, la facilitation des affaires et la coopération économique et technique soient étudiées adéquatement. Autrement, l'APEC risquait de devenir une sorte de « parlotte » internationale sans utilité.

Bien sûr beaucoup de choses ont changé depuis la publication du rapport provisoire. Comme on l’a vu à la réunion des chefs de gouvernement de l’APEC à Kuala Lumpur en novembre 1998, la crise financière asiatique a obligé l’organisation à mettre en veilleuse ses projets de libéralisation accélérée du commerce dans un certain nombre de secteurs économiques importants. De l’avis général, si l’APEC a décidé d’assigner son programme de libéralisation du commerce à court terme à l’OMC, c’est en grande partie parce que le Japon a refusé d’abaisser ses droits de douane sur le poisson et les produits forestiers.

Le Comité croit qu’il s’agit là d’un recul, mais il estime néanmoins que L’APEC reste une organisation d’intérêt pour les décideurs canadiens. Même si on pense que les efforts en matière de libéralisation des échanges et des investissements piétineront ou seront pris en charge par l’OMC, L’APEC demeure un rempart contre les pressions protectionnistes qui se manifestent actuellement dans la région asiatique. En outre, des progrès sont toujours possibles dans d’autres dimensions clés de son mandat. Comme il ressort de ce chapitre, il importe, étant donné la crise, de faire des progrès dans ces domaines peut-être moins en vue mais tout de même importants.

 

A. Définition de l’APEC

L’APEC est devenue un forum intergouvernemental pour libéraliser le commerce et l'investissement, faciliter les affaires et stimuler la coopération économique et technique. L'APEC a évolué pour devenir une institution grâce à laquelle tous les membres peuvent améliorer leurs liens économiques et humains dans cette région. Elle joue également un rôle utile en encourageant les relations trans-Pacifique pour l'Amérique du Nord et en mettant à la disposition des « trois Chines » (Chine, Hong Kong et Taipeh) une importante tribune multilatérale où discuter de questions économiques et politiques. Dans le cas de la Chine et de Taïwan – Taïwan étant Taipeh pour l'APEC –, elle est devenue la seule voie officielle de consultation.

L'APEC regroupe les principaux pays de la région et, jusqu'à tout récemment, bon nombre des économies ayant la croissance la plus rapide au monde. Ces pays représentent depuis longtemps un élément de plus en plus important des relations commerciales canadiennes, soit la moitié des exportations canadiennes aux pays autres que les États-Unis et 11 des 25 grands marchés d'exportation du Canada. Les membres de l'APEC sont également devenus les principales sources de nouvelles technologies et d'investissement direct étranger au Canada.

Actuellement, l'APEC comprend les trois partenaires de l'ALÉNA (Canada, États-Unis, Mexique), le Chili, le Japon, les dix membres fondateurs de l'ANASE (Brunei, Malaisie, Indonésie, Philippines, Thaïlande et Singapour), les « trois Chines » (Chine, Hong Kong et Taipeh chinois), la Corée du Sud et l'Australasie (Australie, Nouvelle-Zélande et Papouasie-Nouvelle-Guinée), ainsi que les trois récents nouveaux membres, le Pérou, la Russie et le Viêt-nam.

Comme on le voit, l'organisation comprend un assez grand nombre d'économies, ayant dans plusieurs cas des caractéristiques communes. Toutefois, deux éléments communs ressortent  : premièrement, l'engagement à long terme de l'APEC envers la libéralisation et la facilitation du commerce et de l'investissement; deuxièmement, l'établissement de liens de coopération économique et technique visant à assurer une croissance économique soutenue.

Il ne faut pas confondre l'APEC avec des accords de libre-échange comme l'ALÉNA, qui découlent habituellement de négociations intenses. L'APEC offre plutôt une formule plus souple de libéralisation du commerce, les décisions étant prises par voie de consensus et volontairement. Toute libéralisation du commerce entreprise par les économies de l'APEC se fait en fonction de la nation la plus favorisée, ce qui signifie que tout avantage tiré de réductions tarifaires est offert à tous les membres de l'OMC. Ainsi, aucune muraille commerciale n’est érigée autour de la région.

Comme c'est le cas de toute organisation, l'APEC fait l’objet de critiques. Plusieurs sont sceptiques quant à la capacité de l'APEC d'entreprendre une libéralisation significative du commerce, soutenant que l'organisation est une tribune consultative relativement lente sans programme de négociation officielle. Telle est en tout cas la conclusion du document d'octobre 1997 préparé par le Centre de droit et politique commerciale (CDPC) pour notre Comité(82). L’argument principal de l'étude du CDPC est que « la participation à l'APEC n'a pas conduit à la libéralisation dans les pays membres sous la forme de réductions tarifaires importantes ni de règles de fond conduisant à l'élimination des barrières non tarifaires »(83). Par contre, l'APEC a été louangée comme tribune utile permettant à ses membres moins développés d’apprendre les rudiments nécessaires pour faciliter le commerce international. Ce n'est qu’une fois ces bases bien établies, estime-t-on, que la libéralisation du commerce pourrait éventuellement se produire.

D'autres soulignent « les coûts sociaux et environnementaux du libre mouvement des forces du marché. Ils (les critiques) mettent l'accent sur les inégalités régionales, les problèmes de droits de la personne, les pratiques d'emploi injustes et les droits des minorités ethniques et des peuples autochtones »(84).

Nonobstant les succès économiques de plusieurs pays de l'APEC, un certain nombre de défis que pose le développement devront être relevés si l'on veut que la région optimise pleinement son potentiel de croissance à long terme. Ces défis comprennent la réduction des obstacles tarifaires et non tarifaires au commerce, l'éclaircissement de la réglementation actuelle, l'harmonisation des normes réglementaires et des pratiques gouvernementales dans la région et l'amélioration du niveau actuel d'information sur les marchés. La tribune de l'APEC est conçue pour étudier ces questions et d'autres semblables.

D'un point de vue canadien, l'APEC est un outil qui nous permet de trouver des débouchés commerciaux à long terme sur ce marché étranger. En plus de potentiellement bénéficier du programme de libéralisation du commerce et de l'investissement de l'APEC, les entreprises canadiennes peuvent profiter des contacts établis avec d'autres cadres d'entreprise et gouvernementaux dans la région. Avec le temps, elles pourront aussi bénéficier d'une meilleure coopération économique et technique dans des domaines aussi divers que les télécommunications, le tourisme, le développement des ressources humaines, l'énergie et l'environnement.

Les entreprises canadiennes sont bien équipées pour répondre aux besoins d'infrastructure à long terme de la région. La croissance économique rapide qu’ont connue les économies de l'Asie-Pacifique avant 1997 a dépassé leur capacité de renouveler leur infrastructure, ce qui s’est traduit par l’encombrement des routes, des pannes d'électricité, un approvisionnement en eau insuffisant et une mauvaise gestion des déchets. Pour combler ces lacunes, les capitaux privés doivent être mobilisés, on doit réduire les obstacles à l'investissement direct étranger et une reprise économique durable doit être engagée dans l'Asie de l'Est.

Outre les liens économiques importants que l'adhésion à l'APEC peut offrir, la participation du Canada à l'organisation favorise la création de liens entre les Canadiens et les citoyens des autres pays membres. Les liens interculturels deviennent de plus en plus importants, comme le montrent la croissance récente de l'immigration au Canada et la présence accrue d'étudiants asiatiques chez nous. Un grand avantage de l'adhésion à l'APEC est qu'elle offre une tribune utile permettant au Canada de promouvoir ces liens humains importants.

 

B. Historique et réalisations de l’APEC

La création de l'APEC remonte à 1989, lorsqu'un petit groupe de dialogue officieux a été établi en réponse au souhait du premier ministre australien Bob Hawke de promouvoir la coopération dans une région où les pays sont de plus en plus interdépendants. L’inauguration officielle a eu lieu à la première conférence des ministres du Commerce tenue à Canberra en novembre 1989.

En 1991, les membres de l'APEC ont convenu officiellement de travailler à la libéralisation du commerce régional, à une meilleure coopération économique, au développement de l'investissement et au renforcement du système commercial multilatéral. On a également mis l’accent sur la reconnaissance officielle de la contribution essentielle du secteur privé au dynamisme des économies membres, de la nécessité d'une participation accrue du secteur privé aux activités de l'APEC et de la nécessité pour l'APEC de renforcer le rôle du secteur privé et d’adopter les principes du libre marché.

Les dirigeants se réunissent chaque année depuis 1993, toujours en novembre. Lors de la réunion inaugurale de 1993 près de Seattle, les chefs de gouvernement ont convenu de la nécessité de promouvoir une plus grande liberté de commerce et d'investissement dans l'APEC. Ils ont également reconnu la nécessité d'une meilleure interaction et d'une coopération accrue.

En novembre suivant à Bogor (Indonésie), les dirigeants de l'APEC se sont engagés à supprimer tous les obstacles au commerce et à l'investissement entre les pays membres. Deux échéances ont été établies, en fonction des différents niveaux de développement économique des pays membres : 2010 pour les pays industrialisés (qui représentent 85 p. 100 du commerce total dans la région) et 2020 pour les pays en développement. En outre, on a convenu a) que les pays industrialisés offriraient aux pays en développement de l'APEC des occasions de stimuler leur croissance économique et leur développement, et b) que les pays en développement s'efforceraient d'atteindre des taux de croissance économique supérieurs.

Lors de la réunion annuelle de l'APEC de 1995, tenue à Osaka, les dirigeants ont convenu de mettre en œuvre un programme d'action complet en deux volets pour atteindre les objectifs établis l'année précédente. Le premier volet établit un cadre de libéralisation du commerce et de l'investissement dans tous les secteurs économiques, visant à respecter l'échéancier convenu. Y sont précisés les objectifs et les nouvelles activités de l'APEC dans treize champs d'action, dont les tarifs, les barrières non tarifaires, le commerce des services, la libéralisation des régimes d'investissement, les normes et la conformité, les procédures douanières, les droits de propriété intellectuelle, la déréglementation, les règles d'origine, la médiation des différends, les visas commerciaux, la mise en œuvre de la ronde de l'Uruguay et la facilitation des affaires. À la réunion d'Osaka, les membres de l'APEC ont annoncé publiquement les premières actions prises par chacun pour libéraliser le commerce et les mouvements d'investissement. La deuxième partie du programme d'action porte spécifiquement sur la coopération économique et technique entre les membres de l'APEC. Des objectifs détaillés sont proposés pour la coopération dans des domaines comme l'énergie et le transport, l'infrastructure, les petites entreprises et les technologies agricoles.

Afin de respecter les échéances fixées pour l’élimination des barrières au commerce et à l'investissement et d’accroître la coopération économique et technique avec les autres pays, les dirigeants ont convenu à Osaka de mettre au point des plans d'action concrets en vue de la réunion de novembre 1996 à Manille. À la quatrième réunion des dirigeants, on s'est effectivement entendu sur les plans collectifs des membres et sur les 18 plans d'action individuels. Alors que ces derniers sont des propositions volontaires faites par les pays membres, les plans collectifs ont été acceptés par tous les membres dans le cadre du processus d'établissement du consensus au sein de l'APEC. Tous les plans sont officiellement résumés dans le Plan d'action de Manille pour l'APEC (PAMA)(85).

Par ce plan d'action, les dirigeants de l'APEC s’engagent à démanteler les barrières structurelles au commerce des produits et services et à libéraliser l'investissement. Ils se sont également engagés à réduire les coûts pour faire des affaires en s’efforçant d'uniformiser davantage les normes dans la région, en simplifiant l'obtention de visas pour les voyageurs d'affaires, en déterminant les meilleures façons de réformer la réglementation et de coopérer en matière de politique de concurrence, en simplifiant et en harmonisant les procédures douanières (d'ici 1998) et en s'efforçant d’instaurer un système douanier informatisé d'ici l'an 2000. Il a également été question de l’application efficace des droits de propriété intellectuelle. Il s'agit d'initiatives importantes et, éventuellement, chacune aura besoin de renforcement. Il est à noter que le PAMA contient surtout des engagements à court terme. Dans ce sens, le PAMA devrait être considéré comme faisant partie d'un processus évolutif d'examen et d'amélioration du plan.

En outre, les dirigeants ont adopté un cadre de principes de coopération économique et de développement, conçu essentiellement pour réduire les disparités économiques entre les pays de la région. C’est ainsi qu’ils ont établi six domaines prioritaires de renforcement de la coopération : investissement dans le capital humain, croissance durable, meilleure utilisation des nouvelles technologies, développement de petites et moyennes entreprises (PME), développement de l'infrastructure et établissement de marchés financiers efficaces. Ces initiatives devront être mises en œuvre en partenariat avec le secteur privé. Le manque relatif d'infrastructure et la nécessité de travailler à la croissance durable sont deux domaines qui ont fait l’objet d’un examen particulier à la réunion de Manille.

Également à Manille, les dirigeants ont tenu leur première réunion avec le Conseil consultatif commercial de l'APEC (CCCA). S’inspirant du premier rapport du CCCA sur l'expansion du commerce et de l'investissement(86), ils ont demandé aux ministres de relever cinq grands défis retenus par le CCCA :

  • faciliter le mouvement des professionnels du commerce;
  • assurer une meilleure protection de l'investissement;
  • veiller à ce que la planification des infrastructures intègre les points de vue des entreprises;
  • élaborer des politiques propices au développement de petites et moyennes entreprises;
  • encourager une participation accrue des entreprises à la coopération économique et technique.

 

C.Importance du Sommet de Vancouver de 1997 et future orientation de l’APEC

Le Canada a présidé le forum de l'APEC de 1997, qui chapeautait la réunion des dirigeants de l'APEC et la réunion annuelle des ministres des affaires étrangères et du commerce international. Cette rencontre, tenue à Vancouver en novembre, a attiré de nombreux dirigeants gouvernementaux et des chefs d’entreprise de toute la région de l'Asie-Pacifique.

Comme président de 1997, le Canada a été assez heureux dans ses tentatives d'améliorer l'accès au marché de l'APEC. Il l'a fait principalement de deux façons : par l’initiative dite de « libéralisation volontaire et rapide par secteur  », et par des initiatives pratiques axées sur la facilitation du commerce et de l'investissement dans toute la région.

 

1. La libéralisation du commerce et de l’investissement

« La conférence de l’APEC à Vancouver a été, à mon avis, un grand succès. [...] Les 18 économies membres de l’APEC se sont engagées à favoriser la libéralisation du commerce. Elles l’ont fait en adoptant non seulement des plans d’action individuels, mais en entreprenant la libéralisation volontaire des échanges dans 15 secteurs différents [...]. Nous estimons que les efforts de libéralisation du commerce progressent à un bon rythme .»

(L'honorable Alexander Downer, ministre des Affaires étrangères, Australie)

« En fait, nos partenaires asiatiques, dont certains connaissent actuellement des problèmes financiers, sont très engagés sur la voie de la libéralisation sectorielle, démontrant par là leur volonté de continuer à explorer et développer les propositions et à continuer sur cette voie, ce qui est à mon avis très positif. »

(John Klassen, directeur général, APEC, Affaires étrangères et Commerce international)

Dans son rapport provisoire, le Comité insistait sur la nécessité que l'APEC fasse porter son effort sur la réalisation de résultats concrets plutôt que sur l'établissement d'objectifs et de plans d'action. Le Comité était d'avis qu'il est d'une grande importance que la mise en œuvre des nouveaux plans d'action donne des résultat rapidement; autrement, le milieu des affaires pourra perdre confiance dans l’efficacité de l'APEC.

En réalité, lors des réunions des dirigeants et des ministres de l'APEC tenues à Vancouver en novembre 1997, il y a un mouvement dans la direction souhaité(87). Deux ans avant le plan initial de l'APEC, l'organisation a rendu publique sa décision de poursuivre la libéralisation volontaire et rapide du commerce dans 15 secteurs économiques vitaux. On a convenu que neuf de ces secteurs – poisson et produits du poisson, produits forestiers, énergie, produits chimiques, produits et services environnementaux, jouets, pierres précieuses et bijouterie, matériel et appareils médicaux, matériel de télécommunications – feraient l'objet d'une intervention rapide, les mesures de libéralisation du commerce devant être appliquées en 1999. Pour les six autres secteurs – graines oléagineuses et produits dérivés, produits alimentaires, fertilisants, caoutchouc naturel et synthétique, secteur de l'automobile, aviation civile – on a jugé qu'un travail préparatoire serait nécessaire tout au long de 1998 et que ce deuxième groupe de secteurs serait examiné à la réunion des dirigeants de l'APEC de 1998.

Notre rapport provisoire (juin 1997) insistait également sur l'importance pour le Canada d'obtenir une action dynamique de l'APEC pour faire avancer son propre programme de libéralisation du commerce. Trois secteurs d'une importance capitale pour le Canada – poisson et produits du poisson, bois et articles de bois, produits et services environnementaux - ont été retenus pour la liste de 1999, et un total de cinq secteurs (poisson et produits du poisson, bois et articles de bois, graines oléagineuses et produits dérivés, métaux non ferreux, produits électroniques) ont été déterminés comme des secteurs pour lesquels l'APEC pourrait servir de tribune où défendre le programme de réduction des tarifs à l'OMC. À Vancouver, les ministres de l'APEC ont exprimé leur volonté d'élargir la participation à ce plan volontaire à d'autres pays et peut-être d'intégrer éventuellement cette décision à l'action de l'OMC.

Il est regrettable que l’APEC ait décidé de transférer à l’OMC sa proposition de libéralisation volontaire du commerce. En revanche, les dirigeants de l’APEC réunis à Kuala Lumpur ont réaffirmé l’objectif à long terme de l’organisation, soit la création d’une zone de libre-échange en Asie Pacifique d’ici l’an 2020.

Si l'on veut atteindre les objectifs à long terme de libéralisation du commerce et de l'investissement, les plans d'action collectifs et individuels doivent être examinés et renforcés. Les hauts fonctionnaires doivent faire diligence pour comparer les engagements que les divers pays ont pris; ainsi, les « traînards » pourront être identifiés.

Le rapport provisoire faisait observer que les économies de l'APEC sont « toutes en bonne voie » d'atteindre l'objectif de Bogor de 2010/2020, et qu'elles ont même dépassé les engagements de l’Uruguay Round. Toutefois, il serait utile que des engagements à plus long terme que ceux des plans d'action soient éventuellement pris. Les membres du Comité sont conscients que l'établissement d'objectifs à moyen terme pourrait être utile pour éviter le problème éventuel de l’« accumulation », le gros des mesures de libéralisation étant prises dans les années précédant immédiatement les échéances annoncées.

L'APEC fait des progrès modestes à cet égard. Par exemple, les membres ont convenu de poursuivre le renforcement et l'amélioration des plans d'action individuels et d'établir un moyen efficace d’examiner et d’évaluer périodiquement leurs engagements. Pour maintenir l’élan vers la libéralisation du commerce et de l’investissement, et compte tenu que la capacité d’enrayer les pressions protectionnistes en Asie-Pacifique dépend, au moins partiellement, d’une action concrète, le Comité recommande :

Recommandation 8 :

Que le gouvernement du Canada continue d'encourager les membres de l'APEC à renforcer leurs engagements à libéraliser le commerce et l'investissement. Il y aurait lieu d’arrêter et d’annoncer le plus tôt possible des objectifs et des échéanciers à moyen pour toute nouvelle initiative de libéralisation prise dans le cadre des plans d’action individuels.

 

Le rapport provisoire soulignait également que si les réductions tarifaires auxquelles les membres de l'APEC se sont engagés dépassent généralement les engagements liés à la ronde de l'Uruguay(88), les progrès dans la réduction des barrières non tarifaires sont plus difficiles à évaluer. Plusieurs membres ont promis d'entreprendre une libéralisation graduelle dans ce domaine, sans indiquer les mesure précises qu’ils prendraient au-delà de leur engagement d’Osaka. Pour leur part, le Canada et les États-Unis ont précisé qu'ils mettraient en œuvre uniquement leurs engagements de la ronde de l'Uruguay. Le rapport demandait qu'un certain nombre de mesures soient prises, telles que a) la réduction et l'élimination des barrières non tarifaires de base, b) la diminution des recours aux barrières non tarifaires dans certains secteurs comme l'agriculture, et c) l'établissement d'un échéancier pour l'élimination des barrières non tarifaires(89).

Il est nécessaire d’agir davantage dans ce domaine. Il semble approprié que le Canada poursuive ses efforts pour tenter de persuader l'APEC de mieux définir ces barrières et d’établir des objectifs précis pour leur élimination.

Un autre point faible des plans d'action individuels annoncés à Manille concerne le démantèlement des barrières à l'investissement. Plusieurs membres continuent d'entraver le mouvement bilatéral de l'investissement direct étranger par l'utilisation de mécanismes de sélection et de permis, des taux d'imposition élevés, des subventions discriminatoires, des règlements sur le contenu local, pour n'en nommer que quelques-uns. Au sujet de ces obstacles, la Chambre de commerce du Canada estime que « la libéralisation des règles d'investissement doit être une priorité de premier plan. L'objectif à plus long terme des entreprises canadiennes demeure un régime d'investissement prévisible, basé sur des accords, et assorti d'une protection rigoureuse et de droits d'investissement intégrés dans un code d'investissement totalement transparent » (18 :9-10). Selon la Chambre de commerce, l’actuel code d'investissement de l'APEC, qui n’est pas contraignant, doit être renforcé. Pour justifier la nécessité de relâcher les restrictions à l'investissement, on a fait valoir qu'avec le commerce qui suit maintenant l'investissement, « il est dans les meilleurs intérêts des pays hôtes de l'Asie-Pacifique d'offrir un environnement réceptif à l'investissement direct étranger » (18 :10).

Les pays de l'Asie-Pacifique, en particulier, doivent reconnaître davantage l’important principe du traitement national contenu dans les propres principes d'investissement de l'APEC. En gros, selon ce principe, les pays hôtes ne traiteraient pas l'investissement étranger d'une manière différente de l'investissement d'origine nationale.

Si l'on veut respecter l'échéance de 2010 et 2020 dans le domaine de l'investissement, un engagement vis-à-vis la libéralisation sera nécessaire. Encore là, des objectifs seraient utiles. Le Comité recommande :

Recommandation 9 :

Que le gouvernement du Canada encourage les membres de l’APEC à s’engager à long terme à réduire les barrières non tarifaires et les tarifs. Le gouvernement fédéral devrait inciter l’APEC à établir des objectifs en vue de l’élimination des obstacles à l’investissement dans la région. Pour accroître l’investissement et la confiance des investisseurs dans la région de l’Asie-Pacifique, le gouvernement du Canada devrait poursuivre ses efforts pour amener l’APEC à renforcer son code d’investissement d’application volontaire.

 

2. La facilitation des affaires

« C'est peut-être dans le domaine de la facilitation du commerce que l’influence de l'APEC peut se faire le plus directement sentir. »

(John Klassen, directeur général, APEC, Affaires étrangères et Commerce international)

Il est important de distinguer entre l'élimination des obstacles à la libre circulation des biens et des services au-delà des frontières nationales (libéralisation du commerce et de l'investissement) et l'élimination des facteurs qui font qu’il est difficile ou coûteux de faire des affaires (facilitation des affaires). Avec toute l’attention qu’on accorde à la libéralisation du commerce, les fonctionnaires du MAECI qui sont venus témoigner ont à juste titre qualifié d’« enfant négligé » les efforts de l’APEC pour faciliter les affaires dans la région de l'Asie-Pacifique.

C’est la Chambre de commerce du Canada qui a fourni au Comité l’inventaire le plus complet des obstacles aux affaires. Voici les principaux points qui préoccupent la Chambre, qui se dégagent de sondages et de contacts directs avec des entreprises membres :

  • Une protection insuffisante de la propriété intellectuelle, par exemple pour les produits de marque, les procédés de fabrication et la musique. Les abus dans ce domaine limitent le développement technologique dans les pays hôtes;
  • L’instabilité des régimes réglementaires dans la région de l'Asie-Pacifique. Il y a un urgent besoin d’assouplir et de rationaliser le processus de réglementation ainsi que d'une application plus uniforme des règlements en matière de santé, de sécurité et d'environnement. Une plus grande harmonisation de ces normes dans toute la région serait également bénéfique. Comme la NOVA Corporation le suggère, la coordination de ces normes pourrait être entreprise par l'Organisation internationale de normalisation;
  • L’absence de codes douaniers communs. Il est urgent d’harmoniser les classifications tarifaires, de simplifier les bases de données électroniques sur les tarifs et de former les douaniers;
  • Les obstacles au déplacement et au mouvement des gens d’affaires dans la région. Des solutions comme l'ouverture de guichets de contrôle réservés aux gens d'affaires dans les ports d'entrée de l'APEC, l'établissement d'un visa commercial de l'APEC et l’assouplissement des conditions d’attribution des permis de travail temporaires ont été proposés par la Chambre.

Pour de répondre à ces préoccupations, ainsi qu’à d’autres, l'APEC s’emploie activement à établir un programme de facilitation des affaires, qui vise à rendre les affaires plus sûres et à réduire les coûts pour les entreprises et les consommateurs. Les dossiers suivants ont beaucoup avancé en 1997 :

  • L'adoption et la publication d'un plan de simplification des douanes d'ici l'an 2000 (A Blueprint for APEC Customs Modernization : Working with Business for a Faster, Better Border). Les efforts d’harmonisation et de simplification des procédures de dédouanement dans l'ensemble de la région de l'APEC devraient entraîner d'importantes économies pour les entreprises;
  • La préparation d'un guide des meilleures pratiques en matière de lois, de règlements et de règles et décisions administratives sur les douanes, ainsi qu'un abrégé des règles d'origine;
  • La diffusion sur Internet de la base de données des tarifs;
  • La diffusion d'un guide d'arbitrage et de règlement des différends dans les pays de l'APEC;
  • L'élaboration de principes de transparence non obligatoires dans les marchés publics;
  • La production de modèles d’ententes de reconnaissance réciproque pour les produits automobiles, les normes des véhicules routiers et les évaluations de la conformité des aliments et des produits alimentaires(90).

 

3.Les nouvelles orientations de la coopération économique et technique

La définition d'orientations communes pour le travail sur la coopération économique et technique de l'APEC a également été une priorité. En 1997, le Canada a été chargé de la mise en œuvre la décision de l'APEC de mettre l’accent sur six priorités pour ses activités de coopération économique et technique : développement des ressources humaines, efficacité des marchés financiers, développement de l'infrastructure, intégration des nouvelles technologies, développement durable et amélioration de la croissance des PME. À cette fin, le Canada avait l'intention de fournir aux groupes de travail chargés d'étudier la coopération économique et technique une orientation précise et plus structurée pour leurs travaux. Toutes les activités n'appartenant pas aux six priorités seraient éliminées immédiatement ou progressivement. Les critères de classement des projets proposés devraient être établis.

Assez tôt, il a été décidé que le Canada mettrait l'accent sur deux des six domaines horizontaux mentionnés : l'infrastructure (particulièrement les télécommunications, le transport et l'énergie) et le développement durable. Avant la crise financière, le développement de l'infrastructure s’était imposé comme le besoin économique le plus pressant de la région.

Le développement durable est un autre thème que le Canada a promu comme président de l'APEC. Un des grands objectifs adoptés est la réalisation de cités viables afin d'améliorer la qualité de vie des millions d’habitants urbains de la région. On a également étudié l'impact de la croissance économique et démographique rapide sur la consommation d'énergie, la demande de produits alimentaires et l'environnement. Le Canada étant chargé de coordonner ces efforts en 1997, un symposium d’universitaires, de dirigeants gouvernementaux et de chefs d’entreprise s'est réuni à Saskatoon en septembre pour donner suite à ce mandat. Les ministre de l’Énergie et de l’Environnement qui s’étaient réunis plus tôt en 1997 ont également examiné les liens entre ces divers éléments. Un rapport complet a été présenté aux dirigeants à Vancouver en novembre 1997.

À la lumière de l’expérience de la situation financière en Asie, il aurait peut-être été indiqué que le Canada s’attarde un peu à la nécessité d’améliorer les systèmes financiers et la réglementation financière de la région. Certes, l’APEC a lancé plusieurs initiatives conjointes destinées à développer les marchés de capitaux régionaux, mais il reste encore beaucoup à faire. Et l’APEC a désormais un rôle capital à jouer, celui d’intensifier sa coopération économique et technique dans le secteur des finances, afin de rendre plus efficaces les marchés de capitaux en Asie.

Enfin, l’APEC finance des projets utiles et des initiatives destinées à aider les institutions locales à s’améliorer (sur le plan de la gestion, par ex.) et à perfectionner les ressources humaines du pays. Par exemple, un des projets en cours porte sur les implications de la crise financière en Asie pour la société et le marché du travail. Le Comité s’inquiète toutefois de voir que les ressources consacrées à ces problèmes sont plutôt modestes. Nous estimons que, en plus d’insister comme d’habitude sur la libéralisation et la facilitation des affaires, le programme à long terme de l’APEC devrait aussi préconiser une intensification des efforts pour résoudre les problèmes liés à la gestion et au marché du travail. Le Comité recommande :

Recommandation 10 :

Que le gouvernement du Canada incite l’APEC à consacrer beaucoup plus de ressources financières importantes à ses efforts pour aider les pays membres à renforcer leurs institutions et à perfectionner leurs ressources humaines.

 

4. L’accession de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce

Un point important a été porté à l'attention du Comité, l'accession éventuelle de la Chine à l'OMC et la question de savoir si l'APEC peut être utile en influant sur la décision à cet égard. M. Wenguo Cai (associé de recherche, Centre de droit et de politique commerciale) a souligné que la présence de la Chine dans l'OMC contribuerait à son intégration dans le système commercial mondial. Il estime que son accession « consoliderait la réforme économique de la Chine et son passage à une économie de marché et diminuerait considérablement le potentiel de déstabilisation de l'économie mondiale, la Chine étant un pays immense. L'adhésion de la Chine à l'OMC la disposerait davantage à travailler avec la communauté internationale sur d'autres questions, comme l'environnement, la sécurité et les droits de la personne » (12 :5). Mme Margaret Huber (directrice générale, Bureau de l'Asie du Nord et du Pacifique, Affaires étrangères et Commerce international) a dit au Comité que l'APEC a été un mécanisme utile pour encourager la Chine à s’intégrer « complètement dans les institutions politiques et économiques mondiales et régionales » (14 :5). Par contre, le dossier de l'accession de la Chine n’avance pas vite.

Le Comité reconnaît l'importance croissante de la Chine dans l'Asie-Pacifique et l’avantage de voir la Chine accepter les règles et pratiques multilatérales. Toutefois, la Chine devra se conformer à certaines conditions fondamentales pour devenir membre de l'OMC. Lorsqu’elle en sera membre, elle devrait bénéficier de périodes de transition pour se conformer pleinement à d’autres conditions, dans les cas où l’OMC le fait déjà pour les pays en développement. Le Comité est d’avis que les pourparlers sur l'accession ne devraient pas faire partie du progranme officiel de l'APEC, mais qu'ils devraient se poursuivre de façon officieuse. Par conséquent, le Comité recommande :

Recommandation 11  :

Chaque fois que possible, que le Canada continue de s’entretenir avec les membres de l'APEC sur les façons de promouvoir une décision en faveur de l'accession de la Chine à l'OMC. Cette décision devrait dépendre de la mesure dans laquelle la Chine respecte les conditions d’admission.


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