Délibérations du comité sénatorial permanent
des
Privilèges, du Règlement et de la procédure
Fascicule 4 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 17 décembre 1997
Le comité sénatorial permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure se réunit aujourd'hui, à 11 heures, en conformité avec l'alinéa 86(1)f) du Règlement.
Le sénateur Shirley Maheu (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Chers collègues, je déclare la séance ouverte.
Je vous remercie beaucoup d'avoir répondu à la convocation dans de si brefs délais. J'ai convoqué la réunion parce que le sous-comité a besoin d'instructions. Après ce qui s'est passé hier au Sénat, qui a adopté une motion, j'estime qu'il faut que notre comité examine ses options. Il faudrait au moins y réfléchir durant la première partie de l'ajournement de Noël. Nous pourrions peut-être décider, dès notre retour, de ce que nous ferons.
Le document qui vous a été distribué décrit brièvement les règles d'assiduité suivies dans les assemblées législatives provinciales, règles que tous ne connaissent pas.
Le troisième point à l'ordre du jour est le rapport de M. Robertson au sujet des comités mixtes. J'en ai parlé avec M. Adams, qui a proposé une éventuelle entente avec la Chambre des communes en vue d'adopter une série de règles communes s'appliquant aux comités mixtes.
Le sénateur Robertson: En ce qui concerne la motion adoptée au Sénat hier, il nous est en réalité impossible de faire quoi que ce soit tant que nous ne saurons pas si le sénateur Thompson se présentera ici en février. Tel que je comprends la motion, notre comité ne sera saisi de la question que si le sénateur ne se présente pas en février. Entre temps, il faudra peut-être attendre d'être fixés. Notre ordre de renvoi ne prend effet, si je ne m'abuse, qu'à la reprise des travaux parlementaires.
La présidente: Vous avez tout à fait raison, sénateur Robertson. Je demande à mes collègues d'amorcer leur réflexion tout de suite parce qu'il se peut qu'à la mi-février, on nous demande de présenter un rapport au Sénat. Il faut commencer à y réfléchir dès maintenant. Toutefois, nous ne pouvons rien faire avant le 6 février.
Le sénateur Kelly: Si j'ai bien compris, il faut examiner cette question et voir où nous mène notre réflexion. Faut-il, madame la présidente, une fois que nous en avons fait le tour, communiquer avec vous ou avec M. O'Brien avant le mois de février pour voir si nous sommes prêts à passer à l'action? Je suis entièrement d'accord avec ce que vous nous proposez. Il faut que le comité assume la responsabilité de présenter une recommandation définitive qui pourrait être débattue en comité plénier.
Le cas du sénateur Thompson soulève une question beaucoup plus générale. J'espère que nous ne nous engagerons pas à redresser précipitamment une situation extrême qui est sans rapport avec la situation actuelle ou d'un passé récent au Sénat.
La présidente: Je suis d'accord. Je propose que M. O'Brien nous serve d'intermédiaire et qu'il prenne note de certaines observations.
[Français]
Le sénateur Corbin: Madame la présidente, j'apprécie qu'on ait rédigé un document sur l'assiduité dans les législatures provinciales. Serait-ce trop demander au personnel de nous rédiger un document sur la pratique des règles de l'assiduité à la mère des parlements, à Westminster et à la Chambre des communes, mais surtout à la Chambre des lords? Notre pratique, nos us, nos coutumes, nos règles, peuvent être constitutionnels. Si on a un problème d'interprétation avec les règles, on peut recourir à la pratique parlementaire de Westminster. J'aimerais avoir un document assez complet sur l'affaire.
Je ne considère pas qu'on doive s'en tenir à la pratique d'une législature subalterne au Parlement canadien, mais qu'on devrait plutôt s'inspirer de la pratique de longue date du Parlement britannique. Même si, à toutes fins pratiques, nous avons coupé nos liens avec le Parlement britannique, il est d'ores et déjà acquis qu'on peut toujours s'inspirer de la pratique à Westminster.
[Traduction]
La présidente: M. O'Brien a dit qu'il pourrait le faire. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire cependant de reculer très loin dans le temps. Le monde a changé, le Parlement a évolué, et...
Le sénateur Corbin: Je ne crois pas que vous ayez compris.
La présidente: Si, je vous ai parfaitement bien compris, sénateur Corbin.
Le sénateur Corbin: Il faudrait que vous mettiez de côté vos opinions personnelles et que vous teniez compte de la volonté du comité.
La présidente: Parfaitement. M. O'Brien le fera.
Le sénateur Milne: Je réfléchissais à la situation à Westminster et à la Chambre des lords où de nombreux lords qui ont hérité de leur titre n'ont jamais fait acte de présence. Toutefois, j'imagine qu'ils sont peu nombreux.
Le sénateur Corbin: C'est justement pourquoi j'en parle. Il existe une procédure pour régler ce genre de problème.
Le sénateur Milne: Vraiment?
Le sénateur Corbin: Oui. Je précise, brièvement, qu'au début de chaque session, le Grand chancelier envoie à tous les lords un document grâce auquel ils peuvent demander la permission de s'absenter pour la durée de la session ou de la législature, et il existe des dispositions pour traiter de ces cas. Je ne vois pas pourquoi une règle de cette nature ne pourrait pas s'appliquer au Canada. Il faut examiner la question sous toutes ses coutures, car même les séparatistes du Québec souscrivent au régime parlementaire britannique. Les règlements et les pratiques vieux de 700 ans doivent avoir du bon. Il nous appartient donc de voir ce qui se fait là-bas.
Le sénateur Kelly: Peut-on compter qu'une fois la recherche terminée, les documents nous seront envoyés?
La présidente: Bon! J'ai ici des notes destinées au sous-comité que je pourrais peut-être partager avec vous, notamment une des recommandations concernant l'absentéisme.
Le sénateur Pearson: Comme vous le savez -- vous en avez vous-même commandé un exemplaire -- , on a publié un livre sur la Chambre des lords cette année. Je dois dire qu'il ajoute une petite touche d'humour à un sujet sérieux. Je vous en conseille tous la lecture. Il fait l'historique anecdotique de la Chambre des Lords, un récit précis mais anecdotique, et révèle l'origine de certaines pratiques. On m'en a remis un exemplaire quand j'étais en Angleterre, en mars. Le sénateur Maheu en a commandé un de chez Smith's. Le livre, de John Wells, s'intitule House of Lords: An Anecdotal History. Il vous permettra de vous dérider un peu.
Le sénateur Rossiter: Combien coûte-t-il?
La présidente: Il se détaille 46 $.
Le sénateur Pearson: Je prêterai volontiers mon exemplaire à ceux qui aimeraient le lire. Il faudrait peut-être que la Bibliothèque du Parlement en obtienne deux ou trois exemplaires.
Le sénateur Corbin: Un peu d'humour ne peut pas nuire. Cela me ferait du bien. J'accepte d'avaler la pilule. Toutefois, pareil livre ne sera jamais cité à la Chambre des lords ou à Westminster, ce qui créerait un précédent. Après tout, il s'agit uniquement d'un best-seller.
La présidente: J'ai mentionné tout à l'heure les notes sur l'absentéisme présentées au sous-comité et une explication de la raison pour laquelle on propose l'ajout d'un article au Règlement du Sénat du Canada. Selon l'article 15 du Règlement de la Chambre des communes, vu les dispositions de la Loi sur le Parlement du Canada, tout député est tenu d'assister aux séances de la Chambre sauf s'il est occupé à d'autres activités et fonctions parlementaires ou à un engagement public ou officiel. On a proposé d'insérer une disposition analogue dans notre règlement. Elle ferait partie du processus d'assermentation.
Le sénateur Kelly: On suppose au départ que la nomination au Sénat est un emploi à temps plein.
Le sénateur Rossiter: Lorsqu'il siège!
Le sénateur Corbin: Est-ce qu'il s'agit d'une question pressante ou d'une question que vous souhaitez approfondir?
La présidente: Il faudra, en février, que nous l'approfondissions vraiment, et les changements au Règlement nous faciliterons peut-être la tâche, au besoin. Je m'en remets à votre jugement. Vous avez beaucoup plus d'expérience que moi. Le sénateur Grimard surtout a travaillé à la révision du Règlement pendant longtemps. Il faudra passer par là.
Le sénateur Corbin: Êtes-vous en train de nous dire que cela presse?
La présidente: Il n'y a pas le feu en la demeure durant la période des Fêtes, mais, en février, il faudra que nous fassions des suggestions au Sénat. Nous avons deux semaines, après la décision au sujet du sénateur Thompson, pour présenter un rapport au Sénat. C'est ce dont il a été convenu hier.
Le sénateur Kelly: Je n'apprécie pas, en toute franchise, que ce soit le Ottawa Citizen qui nous dise quoi faire au sujet du sénateur Thompson. Les situations de ce genre ne devraient pas être nombreuses. Il n'est pas correct que nous ayons l'impression de devoir régler la question à toute vapeur. Je ne dis pas qu'il faut se traîner les pieds, mais la seule chose qui me ferait paniquer et agir immédiatement après avoir réglé l'affaire Thompson serait que ce genre de situation soit courant et que nous soyons pris de court. Or, ce n'est pas le cas.
La présidente: Je crois que l'affaire Thompson est effectivement unique.
Le sénateur Kelly: Prenons le temps qu'il faut, plutôt que de nous plier à l'échéance fixée par le Ottawa Citizen.
La présidente: Le Sénat a adopté notre mandat hier. Il faut que le comité fasse rapport dans les deux semaines.
Le sénateur Kelly: Je n'en étais pas conscient.
La présidente: Nous avons deux semaines à partir du renvoi de la question au comité.
Le sénateur Corbin: Nous n'avons pas ce texte.
La présidente: La motion a été adoptée au Sénat hier.
Le sénateur Corbin: C'est un document de travail. Manifestement, il faudrait que nous l'ayons.
La présidente: Il le faudrait, effectivement. La motion figure dans le hansard, mais il faudrait effectivement que nous en ayons le texte.
Le sénateur Kelly: Je ferai donc une intervention au Sénat.
La présidente: Voici le texte de la motion:
Qu'il soit ordonné au sénateur Andrew Thompson de prendre place à son fauteuil au Sénat, lorsque les séances reprendront, en février 1998, après l'ajournement de Noël;
que, si le sénateur n'est pas présent, la question de son absence prolongée soit renvoyée au comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure, qui déterminera si cette absence constitue un outrage au Sénat;
Le sénateur Kelly: Notre mandat consiste à répondre à cette question.
La présidente: Le comité est obligé d'entreprendre une étude.
Le sénateur DeWare: Il faut faire rapport dans les deux semaines.
Par contre, madame la présidente, s'il faut décider si l'absence du sénateur Thompson est un outrage au Sénat, faut-il un document qui mentionne le fait? Comment le comité prendra-t-il sa décision une fois que la question lui aura été renvoyée?
Le sénateur Robertson: Si la question est renvoyée au comité, cela signifie que le Sénat a jugé qu'il y avait outrage. Il appartient alors au comité de décider des mesures à prendre à son égard.
Le sénateur Kelly: L'accusation est grave.
Le sénateur Robertson: Nous aurons besoin des services d'un conseiller juridique.
La présidente: Peut-on nous conseiller à ce sujet?
M. Gary O'Brien, greffier du comité: La dernière fois que le comité a été saisi d'une question de privilège, celle-ci concernait le sénateur Carney. Nous avons non seulement obtenu des conseils juridiques, mais également les conseils du spécialiste en droit parlementaire Joseph Maingot. Le comité pourrait peut-être nous autoriser à pressentir M. Maingot au cas où le sénateur Thompson n'obtempérerait pas.
Le sénateur Grimard: Il est très ferré. Il a aussi rédigé un ouvrage.
Le sénateur Robertson: Voilà une bonne idée. Je propose qu'on lui demande de se tenir à la disposition du comité au cas où celui-ci aurait besoin de ses services.
Le sénateur Corbin: Il se tiendrait à la disposition du comité.
Le sénateur Robertson: Oui.
Le sénateur Corbin: C'est un expert des questions de privilège.
La présidente: Plaît-il aux membres du comité de communiquer avec M. Maingot?
Des voix: D'accord!
Le sénateur Robertson: Faudra-t-il que le greffier du comité nous fournisse de la documentation à examiner pendant le congé des Fêtes? Il serait utile d'envoyer ces documents à nos bureaux qui pourraient alors nous les transmettre par télécopieur pour que nous ayons l'occasion d'en prendre connaissance et de réfléchir à cette question à tête reposée.
La présidente: Je suis d'accord.
Le sénateur Corbin: Le Parlement fédéral est le seul à avoir une Chambre haute au Canada. J'ai parlé de Westminster. D'autres chambres hautes au sein du Commonwealth britannique respectent la tradition de Westminster. Pourrions-nous inclure, dans notre examen de la situation, certains des plus anciens parlements établis selon la tradition de Westminster?
Nous innovons. Il faudrait, selon moi, être prudents, procéder avec soin et obtenir les meilleurs conseils possibles. Cela ne m'empêche pas de répéter ce que j'ai dit au Sénat l'autre jour, soit que je ne me fais pas l'avocat du diable, que je suis tout aussi préoccupé que les autres par cette situation. Toutefois, il faudrait garder l'esprit ouvert et procéder de manière très équitable, dans le respect des règles et des usages établis depuis si longtemps ici et ailleurs, sans quoi l'avenir pourrait nous réserver des surprises.
La présidente: Nous pouvons faire effectuer la recherche voulue. Je ne crois pas cependant qu'elle nous aidera dans le cas du sénateur Thompson. Il nous faut décider s'il commet un outrage ou pas. C'est la question à laquelle on nous demandera de répondre.
Le sénateur Corbin: L'Australie ou d'autres pays membres du Commonwealth ont peut-être eu à faire face à des situations analogues.
Le sénateur Robertson: Il sera intéressant de savoir ce que M. Maingot a à dire au sujet de la définition d'«outrage».
M. James Robertson, attaché de recherche, Bibliothèque du Parlement: M. Maingot vient de publier la deuxième édition de son ouvrage intitulé: Le privilège parlementaire au Canada, qui inclut un chapitre sur l'outrage au Parlement. Nous essaierons d'en obtenir un exemplaire ou, du moins, un résumé du chapitre pertinent.
Le sénateur Lewis: Le cas du sénateur Thompson soulève deux questions. Tout d'abord, commet-il un outrage parce qu'il est absent depuis si longtemps? Ensuite, estimera-t-on qu'il commet un outrage s'il ne se présente pas tel qu'ordonné? Il y a là deux questions distinctes.
La présidente: Honorables sénateurs, la motion se lit, en partie, comme suit:
que, si le comité est obligé d'entreprendre cette étude, il soit autorisé à étudier pour en faire rapport toute question liée à la présence aux séances du Sénat...
Notre ordre de renvoi a donc une portée plus large que le simple cas du sénateur Thompson.
Le sénateur Robertson: Pourriez-vous nous lire toute la motion?
La présidente: Je vous la lis:
Qu'il soit ordonné au sénateur Andrew Thompson de prendre place à son fauteuil au Sénat, lorsque les séances reprendront, en février 1998, après l'ajournement de Noël;
que, si le sénateur n'est pas présent, la question de son absence prolongée soit renvoyée au comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure, qui déterminera si cette absence constitue un outrage au Sénat;
que, si le comité est obligé d'entreprendre cette étude, il soit autorisé à étudier pour en faire rapport toute question liée à la présence aux séances du Sénat, plus particulièrement en ce qui concerne le sénateur Thompson; et
que le comité fasse rapport de ses conclusions et de ses éventuelles recommandations dans les deux semaines suivant le renvoi de la question.
Le sénateur Robertson: Il faudra que le personnel nous fournisse non seulement l'ordre de renvoi relatif à l'affaire du sénateur Carney, mais également tous les autres ordres de renvoi donnés au comité au fil des ans au sujet des outrages, afin de voir comment on s'y est pris. Ce serait utile.
Le sénateur Rossiter: Aux termes de la motion, le sénateur Thompson est prié de se présenter au Sénat dès la reprise des travaux en février, mais il faudra d'abord qu'il en ait été avisé. On peut supposer qu'il répondra. Cela pourrait s'éterniser. Il pourrait dire, par exemple: «Je serai là le 15 mai».
La présidente: Le comité décidera peut-être d'agir à ce moment-là.
Le sénateur Rossiter: Il n'y a pas d'échéance. Tout cela pourrait traîner jusqu'en 1999.
La présidente: Effectivement.
M. O'Brien: Il faudrait anticiper sa réponse à un ordre du Sénat et les raisons invoquées pour justifier son refus. Il faudrait alors décider si ces raisons constituent un outrage -- par exemple, s'il a rendez-vous avec un médecin quelque part. Il faudra en juger.
Il est difficile de juger de ce qui constitue un outrage.
Le sénateur Rossiter: C'est juste.
Le sénateur Petten: Le sénateur Thompson a tout fait de travers. Il faudrait qu'il se présente, mais il a un certificat médical expliquant son absence.
Le sénateur Lewis: C'est ce que nous supposons.
Le sénateur Petten: Supposons qu'il a un certificat du médecin. Comment cela joue-t-il dans l'équation?
Il faudrait peut-être que je pose la question à M. O'Brien.
La présidente: Je ne crois pas que la motion ait mentionné la question d'un certificat médical. Il n'a jamais été question d'un certificat médical dans toute cette histoire.
Le sénateur Petten: Devrait-il en être question?
La présidente: On ne nous a pas ordonné de vérifier l'existence d'un certificat médical ou ses raisons.
Le sénateur Petten: Quelqu'un a-t-il cherché à savoir si le sénateur Thompson avait un certificat médical? On ne me l'a jamais dit. J'aimerais simplement le savoir.
Je ne me porte pas à sa défense, je vous l'assure.
M. O'Brien: Le rapport du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration dit simplement que le comité prend acte des présences. Une recommandation a ensuite été faite pour que les ressources -- c'est-à-dire l'allocation versée pour son bureau -- soient retirées en raison de son absentéisme. Toutefois, on ne va pas plus loin.
Je ne crois pas que l'autre ordre du Sénat, qui a été proposé par le sénateur Kenny, avait un rapport quelconque avec les questions examinées par le comité de la régie interne.
Le sénateur Petten: Je ne parlais pas de la motion adoptée. Je posais la question, en quelque sorte, en vue d'obtenir des éclaircissements.
La présidente: Cette motion a été adoptée après le fait. Le rapport du comité de la régie interne a également été adopté par le Sénat.
Le sénateur Corbin: J'ai reçu copie de la décision d'hier et des motions du sénateur Kenny et du sénateur Nolin qui ont été adoptées. Au troisième paragraphe de la motion, en haut de la page 828 des Débats du Sénat, on peut lire:
que, si le comité est obligé d'entreprendre cette étude, il soit autorisé à [...]
Qu'entend-on par «si le comité est obligé d'entreprendre cette étude?»
La présidente: Cela signifie: «si le Sénat demande au comité d'entreprendre cette étude».
Le sénateur Milne: Cela fait référence à la mention, au paragraphe précédent.
Le sénateur Pearson: On fait peut-être allusion à l'éventualité qu'il se présentera au Sénat.
Le sénateur Corbin: Nous étudions une situation hypothétique ou un fait?
La présidente: La motion dit: «si le sénateur n'est pas présent».
Le sénateur Corbin: C'est ce qu'il nous faut prévoir?
La présidente: Jusqu'à un certain point, oui.
Le sénateur Corbin: En ce qui concerne la présentation d'un rapport, il n'y a pas de stricte obligation. La pratique au Sénat a toujours été, lorsqu'un comité estimait avoir besoin plus de temps, d'en faire la demande. Si jamais la motion nous est renvoyée -- et je ne suis pas opposé à l'idée de prévoir pareil cas, mais nous n'en sommes pas là encore --, soyons clair au sujet de ce que nous faisons à ce stade-ci. C'est tout ce que je demande.
La présidente: Je crois que nous sommes très conscients de ce que nous faisons.
Le sénateur DeWare: C'est tout un exploit qu'on nous demande d'accomplir. S'il faut faire rapport dans les deux semaines, il faudra auparavant examiner toutes les questions liées à la présence aux séances du Sénat.
Le sénateur Corbin: Nous n'avons cependant pas reçu l'ordre de renvoi.
Le sénateur Kelly: Vous pouvez interpréter cela de deux façons différentes. D'une part, on peut dire qu'il faut examiner la conduite du sénateur Thompson par rapport aux règles actuelles. C'est ce que le Sénat nous demande de faire, notamment de décider s'il enfreint une règle existante.
Le sénateur Robertson: Le paragraphe particulier auquel vous faites allusion s'applique. Tout ce que nous avons à faire, c'est d'en établir le lien avec l'affaire Thompson dans les deux semaines.
La présidente: La motion dit aussi qu'il faut faire rapport de toutes questions liées à la présence aux séances du Sénat, en plus du cas particulier du sénateur Thompson.
Le sénateur Robertson: Non. La motion précise: «plus particulièrement en ce qui concerne».
La présidente: Ne croyez-vous pas que cela signifie: «ainsi que de la manière dont cela concerne tout particulièrement»?
Le sénateur Rossiter: Il me semble que le Sénat pourrait nous donner un ordre de renvoi précis qui ne reprendrait pas forcément le libellé exact de la motion. On pourrait dire, par exemple: «En ce qui concerne le rapport sur l'affaire Thompson», et plus loin donner des précisions.
Le sénateur Corbin: Que dit le règlement au sujet des certificats médicaux? Comment se fait-il que cette question soit soulevée?
La présidente: J'ai posé la même question hier. Une de nos collègues qui avait une très mauvaise grippe a été priée par le greffier, après trois jours d'absence, de fournir un certificat du médecin. C'est ainsi que le sénateur s'est présentée au Sénat, toussant et crachotant. Elle était incapable de demeurer en place et elle répandait ses microbes.
Le sénateur Corbin: Vous parlez du sénateur Pépin, n'est-ce pas?
La présidente: Effectivement. Elle est ensuite retournée à la maison se coucher. On lui demandait de fournir, après une absence de trois jours, un certificat médical. J'ignore ce que vous en pensez, les autres, mais j'ai trouvé cela vraiment insultant. Nous avons tous vu à quel point elle était malade. Lorsque j'en ai touché mot au greffier, il m'a dit que c'était la pratique au Sénat. J'ignore à quand remonte cette pratique. C'était l'une des questions que je souhaitais poser au personnel -- savoir à quel moment il faut fournir un certificat médical.
D'autres sénateurs s'absentent durant la semaine qui précède la semaine d'ajournement et ils sont toujours grippés la semaine suivante. Ils ont donc été absents de deux semaines de travaux au Sénat. Pourtant, on ne leur a jamais demandé de certificat.
J'aimerais savoir pourquoi nous exigeons un certificat dans ce cas-là. Réagissons-nous, à nouveau, à ce que disent les journaux?
Le sénateur Kelly: Il faut invoquer la Charte devant les tribunaux à ce sujet.
Le sénateur Corbin: En temps et lieu, nous pourrions peut-être inviter le greffier à venir comme témoin nous expliquer tout le processus.
Le sénateur Robertson: Le greffier ne fait qu'obéir aux ordres du Sénat.
Le sénateur Corbin: Mais d'où vient que l'on procède ainsi? Il faut le savoir. Existe-t-il une règle à ce sujet ou pas? S'il y en a une, quelle est-t-elle et comment s'applique-t-elle à tous les sénateurs?
Le sénateur Robertson: Monsieur O'Brien, avez-vous ces renseignements?
M. O'Brien: Non.
Le sénateur Lewis: À mon arrivée au Sénat, on m'avait informé -- je ne crois pas que quiconque s'en soit inquiété à ce moment-là -- que, si j'étais malade pour une journée ou deux et que j'étais obligé de m'absenter, cela ne causait pas difficulté. Je n'avais qu'à dire que j'étais malade. Cependant, si l'absence se prolongeait plus de trois jours, il fallait fournir un certificat médical. Toutefois, je n'ai jamais vu de document faisant état de cette règle.
La présidente: J'ai demandé s'il existait une règle écrite à ce sujet.
Le sénateur Corbin: J'aimerais soulever un autre point, chers collègues. Je suis vous reconnaissant de votre patience.
Dans le cadre de notre examen de toute cette question, pourrons-nous discuter de la décision prise par le président hier? Je ne souhaite pas être accusé d'outrage à la présidence. J'ai accepté la décision, mais, s'il faut exercer notre mandat librement, j'aimerais certes savoir si nous pouvons citer des passages de la décision du président ou la mettre en question. J'aimerais être fixé à ce sujet. Cela enfreindrait-il le Règlement?
Je n'aimerais pas faire indirectement ce qui n'est pas autorisé directement, mais nous parlons de présences. Je serai très franc. Le dernier paragraphe de la décision, à la page 825 des Débats du Sénat, dit:
C'est précisément parce qu'il est essentiellement question [...]
Il est question ici du rapport Rompkey-Nolin. Son Honneur poursuit:
[...] de ressources dans le rapport, et non de présences, que j'en conclue qu'il ne s'agit pas d'une question de privilège.
C'est là le coeur de la question que l'on nous demande d'examiner, et je ne puis souscrire à cela.
La présidente: Aux termes du paragraphe 18(4) du Règlement:
Sauf dans les cas prévus à l'article 38(5) du Règlement, on peut en appeler au Sénat de toutes les décisions du président. Le Sénat se prononce alors sur ces appels sur-le-champ, sans débat.
Le sénateur Corbin: C'est effectivement ce que prévoit le règlement au Sénat, mais nous siégeons ici en tant que comité.
Le sénateur Robertson: Ce n'est pas l'endroit où contester la décision du président. Je ne crois pas que nous puissions le faire. Toutefois, nous pourrions certes examiner la règle sur laquelle se fonde Son Honneur pour prendre sa décision, sans le mentionner. Nous pouvons examiner cette règle pendant quelque temps et voir s'il y a lieu de la changer.
Une certaine confusion semble régner. La décision du président m'avait semblé bien fondée, mais je respecte aussi l'intervention du sénateur Corbin. L'une se fondait davantage sur les précédents et les règles, qui sont ambiguës à cet égard. Voici comment je propose de contourner le problème. Examinons la règle. Cela vous convient-il, sénateur Corbin?
Le sénateur Corbin: Je comprends ce que vous essayez de faire valoir. Néanmoins, l'article 19 du Règlement s'applique aux situations qui surviennent durant les séances du Sénat. Il n'y est pas question des séances de comité.
Toutefois, notre comité est spécial. Il est habilité à examiner tous les aspects, y compris les décisions. Nous ne pouvons pas l'éviter. J'espère seulement que, si nous le faisons avec une certaine ouverture d'esprit, celui qui soulèvera ce genre de question ne sera pas accusé d'outrage au Sénat, à la présidence, à ces décisions ou à quoi que ce soit d'autre.
La présidente: Plaît-il aux honorables sénateurs d'examiner la règle quand nous étudierons le Règlement?
Des voix: D'accord!
La présidente: J'aurais une autre question à poser à ceux d'entre vous qui faites partie de ce comité-ci depuis un bon bout de temps. Il existe un livre, intitulé: Compilation des lois, règles, rapports de comités et autres documents choisis relatifs aux sénateurs. Quelqu'un le connaît-il?
M. O'Brien: Il s'agit d'un document préparé par le personnel. On est en train d'en peaufiner la quatrième édition. Il s'agit davantage d'un document de travail. On est en train d'y travailler au Sénat. Il a été déposé officiellement hier, de sorte que l'on puisse le consulter. Il a été distribué à tous, dans les deux langues. Il s'agit davantage d'un document de référence qui a été mis à jour et qui sera distribué.
Le sénateur Rossiter: Ce document a été rédigé dans le cadre du dernier examen du Règlement.
La présidente: Il est daté d'avril 1994.
Le sénateur Corbin: Il en a été question au comité. Le sénateur Robertson se souviendra que nous nous étions tous mis d'accord pour qu'il soit déposé au Bureau. Il est à la disposition de ceux qui aimeraient obtenir des références concernant certaines questions. Nous avions également convenu que le document ne ferait pas autorité et qu'il ne serait pas cité. Il s'agit simplement d'un ouvrage de référence, sans statut officiel.
Le sénateur Robertson: C'est un ouvrage de référence qui regroupe ce qu'on trouve dans tous les autres documents au sujet du Règlement, ce qui nous évite de tous les consulter.
Le sénateur Corbin: C'est un moyen de nous faciliter la tâche.
La présidente: Faut-il l'examiner quand il sera distribué?
Le sénateur Robertson: Nous avons essayé de le faire, madame la présidente. J'espère que nous pourrons maintenant peut-être obtenir une plus grande réaction des caucus. Nous avons tenté de faire ce que vous suggérez, mais certains membres du caucus ne nous ont pas répondu.
La présidente: Avec votre permission, chers collègues, si nous en avons le temps, j'aimerais demander à M. Robertson de nous mettre brièvement au fait des discussions qui ont eu lieu au sujet des comités mixtes.
M. Robertson: À la dernière séance du comité, nous avons épluché les règles de procédure projetées pour les comités mixtes. Elles sont essentiellement acceptables. On a fait un certain nombre d'observations et proposé quelques changements sans grande importance que j'ai intégrés au présent document. Ils figurent en italiques dans le texte, précédés du mot «Sénat».
Le comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a étudié les règles proposées pour les comités mixtes mardi dernier. Il a dans l'ensemble accepté d'aller de l'avant et il était d'accord avec les nouvelles règles. Il a bien sûr apporté quelques petits changements ou ajouts de son cru. La plupart ont trait à la composition des comités et à la présentation de rapports en provenance de la Chambre, en somme à des questions vraiment internes. Le document inclut certaines règles s'appliquant au fonctionnement des comités mixtes, une fois qu'ils sont organisés, mais le reste des règles touchent au fonctionnement interne de chaque Chambre. On estime que, tant que la question ne touche que le Sénat, c'est à celui-ci qu'il appartient de prendre les décisions. Ce n'est pas à la Chambre des communes de lui dire comment se comporter ou pourquoi il faut qu'il le fasse.
La plupart des changements ne sont pas de nature draconienne. Le seul d'importance se trouve à la page 5 de la version anglaise, sous le titre «Voting». Le groupe de travail informel qui avait travaillé à ce document durant la législature précédente avait à l'origine proposé que les coprésidents aient le droit de voter lorsqu'ils président à une réunion, mais qu'ils ne puissent avoir la voix prépondérante. La règle du Sénat s'appliquerait. Par conséquent, le président aurait le droit de participer au vote concernant une motion et, si les voix sont partagées, la motion serait rejetée. À la Chambre des communes, le président ne peut pas se prononcer sur l'adoption d'une motion à moins que les voix ne soient partagées, auquel cas il a la voix prépondérante.
Le comité de la Chambre n'estimait pas opportun de conférer le droit de vote à l'un ou l'autre des coprésidents, qu'ils soient en train de présider ou pas. Les coprésidents auraient le droit de voter uniquement s'il y avait égalité des voix et, si leurs voix s'annulaient et que le partage des voix se maintenait, la motion serait réputée rejetée.
C'est une variante de la proposition existante. Nous pourrions rédiger deux versions du règlement qui vous sera présenté durant la nouvelle année et qui illustreraient l'alternative. Vous pourriez alors décider et, peut-être, persuader le comité de la Chambre de revenir sur sa décision. Peut-être aussi est-ce une question au sujet de laquelle les deux Chambres ne parviendront pas à s'entendre.
Le sénateur Robertson: Le personnel travaille à cette ébauche depuis quelque temps déjà. Il est bon d'apprendre qu'un rapprochement entre les deux Chambres est imminent à cet égard. Il conviendrait selon moi que notre comité se prononce sur les recommandations faites dans l'ébauche au plus tôt de sorte qu'un rapport puisse être présenté au Sénat et que les autres membres de nos caucus puissent l'étudier avant de décider si cette forme de coopération leur convient. À notre prochaine séance, si nul ne s'y oppose, nous pourrons peut-être l'approuver et l'envoyer au Sénat pour que les autres membres puissent l'examiner.
Je fais une proposition à cet effet.
M. Robertson: Durant l'ajournement de Noël, du personnel du Sénat, de la Chambre des communes et de la Bibliothèque du Parlement travailleront au libellé comme tel. Le texte sera prêt quand le Sénat reprendra ses travaux, en février.
À ce stade-là, ce sera une question simplement de faire en sorte que le projet de règlement corresponde à ces instructions. Les caucus pourront alors être consultés. Manifestement, à un certain moment donné, il faudra que les deux comités présentent un rapport à leur Chambre respective en vue de recommander l'adoption du règlement ou le dépose, après quoi les dirigeants pourront en discuter.
Le sénateur Corbin: De même que les sénateurs indépendants.
La présidente: Y a-t-il autre chose?
Le sénateur Robertson: J'aimerais soulever une autre question. Comme vous le savez, y compris le sénateur Lewis, j'aimerais attirer votre attention sur une autre question dont nous avons été saisis et faire approuver la formation d'un sous-comité qui pourra y travailler. Il avait été question, il y a quelques années, des personnes handicapées.
La présidente: Sénateur Robertson, j'aimerais que vous cessiez. Nous en avons discuté. J'en ai parlé au sénateur Stewart et j'en ai parlé au sénateur Doyle. J'ai demandé au greffier de nous faire une mise à jour.
Le sénateur Corbin: J'ignore de quoi vous parlez.
La présidente: Justement. Nous n'étions pas prêts à en saisir le comité jusqu'à ce que M. Bélisle nous remette un document nous permettant de faire le point.
Le sénateur Robertson: Je ne le savais pas. Lors de notre dernier entretien, nous avons discuté, vous et moi, de la possibilité d'en parler au président. Comme la nomination n'a pas eu lieu, nous ne l'avons pas fait. Le sénateur Doyle est venu m'en parler, il y a quelques mois. Il prend sa retraite au printemps. Il éprouve certaines difficultés à prendre la parole au Sénat; cela l'épuise. Par contre, il a encore beaucoup à contribuer.
Les personnes handicapées qui n'ont pas la possibilité de se faire entendre par les comités éprouvent les mêmes difficultés. Il n'y a pas, au Sénat, de personnes qui puissent parler au nom des 15,8 p. 100 de Canadiens qui sont handicapés. Le sénateur Doyle est vraiment convaincu de la nécessité d'agir.
Des discussions préliminaires ont eu lieu avec des personnes qui savent comment remédier à la situation, comme cela s'est déjà fait dans l'autre endroit. Nous accusons beaucoup de retard par rapport à la Chambre des communes à cet égard. Ce ne serait pas difficile de rendre le Sénat accessible à tous les genres de personnes handicapées. Il ne serait pas nécessaire de dépenser beaucoup d'argent au départ. Nous pourrions plutôt le faire graduellement, selon le groupe de personnes handicapées qui demande à être entendu.
Le mieux serait qu'un premier ministre, dans sa grande sagesse, nomme une personne handicapée.
Le sénateur Corbin: Il y a déjà eu un aveugle à la Chambre des communes.
Le sénateur Robertson: Oui. Une personne handicapée de la parole ou de la vue est député à Toronto, et il y en a une autre à Victoria. C'est justement ce dont il est question. J'espère qu'on n'y mettra pas trop de temps parce que le sénateur Doyle aimerait vraiment être le premier à en profiter.
Le sénateur Corbin: Il faudrait aussi répondre aux besoins du sénateur Doyle. Il faudrait modifier le Règlement de manière à permettre à une personne comme lui ou à un autre sénateur handicapé de lire peut-être le premier paragraphe de sa déclaration et de déposer le reste du texte qui figurerait dans le hansard. J'aimerais bien qu'on le fasse à un certain moment.
La présidente: Avant de saisir à nouveau le comité de cette question, nous avions prévu d'obtenir des renseignements sur ce qui s'était fait dans le passé. M. Bélisle a des documents qui auraient dû être prêts un peu plus tôt, mais manifestement, il n'a pas eu le temps de les préparer, sans quoi nous les aurions déjà reçus.
Je m'excuse, sénateur Robertson, vous êtes la seule que je n'ai pas appelée. Ce n'était pas délibéré. J'attends toujours les documents de M. Bélisle. Beaucoup de travail a été effectué à cet égard.
Le sénateur Robertson: La Chambre des communes nous devance nettement.
Le sénateur Lewis: À nouveau, tout est relatif.
La présidente: J'en parlerai à nouveau au greffier. Nous étions si préoccupés par la question à l'étude que nous nous sommes écartés du sujet.
Le sénateur Robertson: Il faudrait en reparler à notre prochaine réunion. Si nous ne le faisons pas, le sénateur Doyle aura peut-être déjà pris sa retraite sans que nous ayons eu la courtoisie de le laisser participer pleinement aux débats du Sénat.
Le sénateur Corbin: Je n'y vois pas de difficulté.
La séance est levée.