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COMM

Sous-comité des communications

 

Délibérations du sous-comité des
Communications

Fascicule 6 - Témoignages


OTTAWA, le lundi 25 septembre 2000

Le sous-comité des communications du comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui à 14 h 06 pour examiner les politiques pour le XXIe siècle concernant les technologies des communications, ses conséquences, la concurrence et l'impact pour les consommateurs.

Le sénateur Marie-P. Poulin (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente: Chers collègues, bienvenue à la septième séance de la première étape de notre étude. Aujourd'hui nous examinons la confiance qu'ont les Canadiens dans le commerce électronique. La phase 1 traite des moyens de brancher les Canadiens. Nous voulons examiner la convergence en train de se produire parmi les principaux secteurs de l'industrie des communications. Nous sommes en train d'examiner les progrès réalisés en ce qui concerne la protection des renseignements personnels sur Internet et la sécurité d'Internet, le commerce électronique et l'administration publique.

Nous savons que l'Internet est en train de créer le plus vaste marché du monde, accessible à tous n'importe où dans le monde. La valeur éventuelle de ce comptoir commercial mondial est énorme. Pour réussir à l'échelle internationale, les entreprises canadiennes doivent repenser et revoir la façon dont elles font des affaires.

Quelles sont les initiatives en matière de politique gouvernementale qui permettront de doter le Canada de l'environnement adéquat qui favorisera la réussite? Nous avons de nombreuses questions pour Mme Blank aujourd'hui. Par exemple, quelle est la valeur du commerce électronique mondial aujourd'hui? Quelle est la croissance prévue du chiffre d'affaires des entreprises canadiennes pratiquant le commerce électronique? Quelle est la réaction des entreprises envers le commerce électronique lorsqu'elles font affaire avec d'autres entreprises? Quels sont les obstacles au commerce électronique? Que peut-on faire pour encourager les Canadiens à s'adapter rapidement à ce site commercial que représente Internet et pour leur faciliter la tâche? Quels sont les biens et services qui semblent les plus intéressants pour divers consommateurs? Existe-t-il un modèle commercial? Est-il important d'être le premier?

Bienvenue, madame Blank.

Gale Blank, vice-présidente principale en logistique et chef de la Direction de l'information, Indigo: Honorables sénateurs, je tiens à vous remercier de m'avoir invitée pour prendre la parole au nom d'Indigo. J'aimerais apporter une petite correction. À Indigo, nous sommes simplement Indigo. Nous ne faisons pas la distinction entre les briques et les clics c'est-à-dire entre nos magasins et nos services en ligne. Nous exploitons un modèle intégré, dont nous parlerons plus tard.

Je vais vous présenter mon autobiographie en trois secondes. Je suis un détaillant. Je travaille dans le commerce de détail depuis 20 ans. J'ai commencé à l'âge d'un an à Loblaws et j'y ai passé 16 ans. J'ai passé un an et demi à Eaton dans le cadre d'une équipe de redressement qui n'a pas obtenu le succès escompté. Puis, je me suis jointe à Indigo. Donc je suis d'abord un détaillant, ensuite une technologue, et c'est le point de vue que j'ai tendance à apporter.

Indigo est une institution canadienne relativement nouvelle. Nous avons lancé notre premier supermagasin à titre de projet pilote à Burlington en Ontario. Par «supermagasin», nous voulons simplement dire qu'il est très grand -- 45 000 pieds carrés. Ce projet a très bien marché et d'ici la fin novembre, nous aurons 16 magasins un peu partout au Canada, mais aucun à Ottawa, malheureusement.

Notre entreprise est 100 p. 100 canadienne. Nous mettons l'accent sur notre identité et nos origines. Nous ne nous considérons pas comme un librairie mais comme un magasin à rayon culturel destiné aux amateurs de livres. Nous pourrons peut-être en parler à un autre moment, mais il s'agit d'une distinction que nous considérons très importante.

D'après chaque étude, nous dépassons notre concurrence -- que nous ne nommerons pas -- au niveau de l'ambiance, de la sélection et du service. Je vous ai laissé quelques photos pour vous donnez une idée de notre magasin.

La présidente: Je dois vous dire que je trouve très intéressant qu'au cours de mes cinq années au sein de comités au Sénat, c'est la première fois que nous recevons des photos qui accompagnent un exposé. Je tiens à vous remercier. Comme on dit, une image vaut mille mots.

Mme Blank: Si Heather Reisman, la présidente-directrice générale, était ici, vous comprendriez la raison d'être de ces photos, car l'ambiance, le décor et l'environnement sont de très importants éléments de notre entreprise, et je vous remercie de votre observation.

C'est ce que nous appelons les «briques» dans le commerce de détail. Tous les gens branchés parlent de briques et de clics, les briques étant les magasins et les clics étant l'Internet même. Nous avons lancé le commerce en ligne il y a un peu plus d'un an lorsque je me suis jointe à l'entreprise. Nous avons été les deuxièmes à le faire. Notre concurrent, Chapters, avait lancé son service en ligne depuis huit mois, et nous l'avons suivi. Nous avons lancé une campagne.

Le sénateur Finestone: Utilisez-vous le même fournisseur de service?

Mme Blank: Non, il n'y a absolument aucun partage ni aucune similitude. Nous avons lancé notre site à l'aide d'une énorme campagne, ce qui est conforme à la façon de procéder de toute entreprise point com qui entre sur le marché. La campagne avait pour slogan «Blue Your Mind», ce qui était une assez bonne trouvaille. Nous sommes partis de zéro et avons atteint plusieurs millions avant la fin de Noël, et nous estimons que la campagne a eu du succès.

Ici encore, j'ai inclus des photos. Vous pourriez vous-mêmes aller sur Internet pour vous en faire une idée.

Nous sommes en train de procéder à un nouveau lancement du site. Il est important de comprendre que lorsque nous avons lancé notre site il y a un an, il était différent de bien des sites qu'avaient visités la plupart des gens. Bien des gens nous ont dit, et je ne sais pas si les personnes ici présentes seraient d'accord avec eux, qu'il était plutôt féminin. Il ne renfermait pas beaucoup d'information mais présentait beaucoup de photos et il était discret. Nous trouvions que c'était très positif. Nous sommes en train de procéder à un nouveau lancement, et le site sera plus simple et plus net, avec beaucoup plus de blancs. La plupart des sites Internet bombardent les gens d'information, de photos, de machins et de trucs qui explosent et tournoient. Même s'il est amusant de concevoir de tels sites, ils n'ont pas beaucoup d'efficacité sur le plan des ventes et la plupart des consommateurs ne les aiment pas. C'est pourquoi nous avons redessiné notre site, après avoir commencé à comprendre l'ergonomie de ce nouveau médium. C'est un nouveau médium, et personne ne le comprend vraiment, mais nous savons que plus il est discret et moins il est agressant, plus les gens ont tendance à réagir, donc vous verrez un nouveau site Indigo à la mi-octobre, si nous arrivons à respecter nos délais. Il donnera l'impression d'être encore plus aéré, moins dense.

Si Heather était à mes côtés, elle vous dirait que l'objectif de ce site est d'aider les gens au Canada qui ont peur d'utiliser Internet de s'en servir. Nous voulons rendre l'utilisation conviviale et éliminer l'aspect technologique du site. Si vous songiez à l'utiliser mais étiez intimidé, vous pourriez vous sentir à l'aise. Nous allons aussi y ajouter des gens. Il y aura donc un numéro 1-800. Voilà une brève description du site même.

Vous n'avez pas posé la question, mais j'aimerais simplement mentionner qu'Indigo a été le premier commerçant canadien à faire du commerce mobile. Grâce à certains dispositifs, vous pouvez maintenant commander un livre par téléphone ou à l'aide d'un Palm Pilot. La prochaine vague technologique semble être l'utilisation du sans fil lancé par Indigo. Nous avons lancé ce service en avril. Nous n'avons pas de chiffre d'affaires. Je pense que nous avons cinq ou six transactions par mois, ce qui n'est pas grand-chose, mais nous sommes en train d'apprendre et nous occupons ce créneau. Je pense que ce sera un moyen qui s'avérera rentable avec le temps. Je vous ai montré ici certains des dispositifs que l'on peut utiliser pour faire du commerce mobile. Les deux appareils qui se trouvent dans le coin supérieur droit, qui ressemblent à des téléavertisseurs, sont des dispositifs RIM. Je suis sûre que vous avez entendu parler de Research in Motion, la grande entreprise canadienne installée à Waterloo. Il s'agit de téléavertisseurs BlackBerry et BlueBerry que vous pouvez utiliser pour commander des livres chez Indigo.

Je passerai maintenant à certaines des questions que vous avez posées, mais je n'ai peut-être pas toutes les réponses. La plupart des statistiques que j'ai pour vous proviennent du cabinet Forrester, spécialisé en recherche. Comme tout le monde fait appel à ses services, je soupçonne que vous le connaissez déjà.

Le premier schéma présente le décollage du commerce électronique dans le monde entier et indique les régions du monde qui seront les premières à décoller. Comme on pouvait s'y attendre, l'Amérique du Nord atteint sa masse critique au cours de l'an 2000 ou tout juste après et décollera la première dans le commerce électronique. Le Canada y occupe une petite part, mais l'Amérique du Nord englobe le Canada. Je peux dire que nous sommes en retard de 12 à 18 mois, et si l'Amérique du Nord décolle vers le milieu de l'an 2000, il faut sans doute envisager la fin de l'an 2001 pour le Canada.

Vous voyez que l'Europe occidentale, l'Asie du Pacifique et l'Amérique latine de même que toutes les autres régions du monde sont bien en retard. L'Afrique et le Moyen-Orient vont démarrer très lentement. Je suppose que c'est à cause des particularités des économies en Afrique et au Moyen-Orient. Et ce sont des régions très importantes. L'Amérique du Nord, en particulier les États-Unis suivis du Canada vont y arriver avant la plupart des pays d'Europe et, de toute évidence, avant le reste du monde.

Le sénateur Finestone: Arriver où?

Mme Blank: À une proportion de 50 à 60 p. 100 de l'économie qui passer par le commerce électronique.

Le schéma suivant indique la croissance du commerce électronique à l'échelle mondiale. La tendance est analogue. On voit que l'Amérique du Nord décolle bien avant tous les autres. Voici l'Asie du Pacifique et l'Europe occidentale.

À la page consacrée au commerce électronique et à la croissance en Amérique du Nord, on voit que les États-Unis ont la part du lion et que le Canada leur emboîte le pas. La plus forte croissance se situe entre 2002 et 2003.

La présidente: Je n'aime pas interrompre les exposés, mais dans la croissance du commerce électronique, pourriez-vous nous préciser la valeur financière indiquée dans la partie gauche du schéma? Est-ce 500 millions de dollars ou 500 milliards de dollars?

Mme Blank: Ce sont des milliards.

La présidente: Est-ce la même chose pour le commerce électronique à l'échelle mondiale?

Mme Blank: Oui, ce sont des milliards.

La présidente: Pour le monde entier?

Mme Blank: Excusez-moi, je n'étais pas à la bonne page. Ce sont des millions.

La présidente: La croissance du commerce électronique à l'échelle mondiale serait donc exprimée en millions?

Mme Blank: Oui, et c'est 3,5 millions. On atteint 7,5 milliards au point le plus élevé pour le commerce électronique en Amérique du Nord. C'est le maximum.

La présidente: C'est parce que nous n'avons pas les numéros de page.

Mme Blank: Ils étaient indiqués ici.

La présidente: À la page 12, c'est l'hyper-croissance du commerce électronique et son évolution dans le temps.

Mme Blank: C'est exact.

La présidente: Ensuite, page 13, c'est le commerce électronique à l'échelle mondiale, exprimé en millions.

Mme Blank: Avec un maximum de 7 milliards.

La présidente: Bien. La croissance du commerce électronique est indiquée à la page 14.

Mme Blank: En millions.

La présidente: Ce sont bien des millions?

Mme Blank: Oui, avec un maximum de 7,5 milliards. Si vous regardez ces deux éléments, ils commencent à s'additionner.

La présidente: Sur cette page-ci, consacrée à la croissance du commerce électronique, on voit à la page 14 que pour l'Amérique du Nord, le maximum est de 3,5 milliards de dollars.

Mme Blank: C'est exact.

La présidente: Merci.

Le sénateur Finestone: Vous dites que c'est actuellement 500 millions de dollars, n'est-ce pas?

La présidente: Oui.

Le sénateur Finestone: Cela me semble très peu. En réalité, on est déjà dans les milliards. Rien que pour le Canada, et sans parler de la situation aux États-Unis, cela se chiffre en milliards.

La présidente: Mme Blank vient de parler de 500 millions, et non pas de milliards. J'ai tenu à m'en assurer.

Le sénateur Finestone: Il ne peut s'agir de 500 milliards, ce serait trop élevé, mais le chiffre de 500 millions est erroné.

Le sénateur LeBreton: Si vous regardez deux pages plus loin, les chiffres sont exprimés en milliards. Pour l'an 2000, c'est 3 milliards. Par conséquent, pour en revenir à ce tableau, il est tout à fait vraisemblable que ce soit des millions, pour aboutir finalement à 3,5 milliards.

La présidente: Ce serait donc des milliards.

Le sénateur LeBreton: On commence avec des millions, et on fini évidemment avec des milliards.

La présidente: Madame Blank, nous ne voulons pas vous interrompre dans la présentation de vos tableaux.

Le sénateur Finestone: Je voulais cependant m'assurer de bien les comprendre.

Mme Blank: J'aurais dû mettre des dates sur ces tableaux, mais je ne l'ai pas fait. Pour certains d'entre eux, la situation commence à se modifier à mesure qu'on se rapproche des échéances. Les tableaux sur la croissance du commerce électronique à l'échelle mondiale sont plus récents que les tableaux sur les revenus du commerce électronique, en particulier aux États-Unis, qui correspondent à des prévisions faites il y a un ou deux ans. Ce qui me semble important, ce sont les comparaisons et les tendances, car je ne pense pas que l'on sache exactement à quoi s'en tenir. Dans un an ou deux, Statistique Canada connaîtra l'étendue de ces marchés.

De plus, à la page 15, si les pages étaient numérotées, les chiffres indiquant les recettes comprennent bon nombre des transactions commerciales entre entreprises.

La présidente: Vous parlez des recettes aux États-Unis, à la page 15?

Mme Blank: Oui, et il en va de même pour les recettes au Canada.

La présidente: D'accord.

Mme Blank: Je tâcherai de vous obtenir les dates qui y correspondent, car il est important de comprendre que toute projection n'est pas immuable.

La présidente: Pour simplifier les choses, pourriez-vous faire parvenir à la greffière une série de graphiques où l'on indique le montant des recettes ainsi que la date?

Mme Blank: Oui. Les dates sont importantes, car les projections ont changé. Les pentes de la courbe restent les mêmes, mais les valeurs absolues ont tendance à changer.

Le sénateur LeBreton: Quand on regarde les graphiques et les recettes réelles, et le marché canadien du commerce électronique également, on constate qu'il y a quand même le même type de courbes ascendantes.

Mme Blank: Les données vont dans le même sens, ce qui est probablement la considération la plus importante. La valeur absolue n'est pas aussi importante.

L'important, c'est que le Canada et les États-Unis sont les plus grands marchés du commerce électronique. Certes, le Canada suit les États-Unis, mais pas au même rythme de croissance. Je ne crois pas que cela soit une révélation. C'est une chance inouïe.

Je voudrais parler maintenant du commerce de détail, car son potentiel est énorme. À bien des égards, le commerce de détail est menacé, notamment dans l'industrie du livre où Amazon menace les entreprises canadiennes. Par conséquent, il est impératif que notre performance soit aussi bonne, sinon meilleure.

Selon une étude comparative Forrester entre les achats canadiens en direct et les achats américains, même si les Canadiens sont branchés, ils ne sont pas encore disposés à faire des achats en direct. En effet, 23 p. 100 des Canadiens utilisent l'Internet -- ce pourcentage est tiré de l'étude Forrester de mars 2000 -- et pourtant, à peine 20 p. 100 des Canadiens font des achats en direct, ce qui m'amène à poser la question suivante: Comment expliquer ce phénomène? Toujours selon les données Forrester de mars, on prévoit que les dépenses canadiennes en direct suivront la même pente, mais que les valeurs absolues seront différentes. Si on regarde les projections pour 2000, il y a à peine un an, on escomptait dépasser trois milliards de dollars, tandis que maintenant, on a dû réviser la projection à la baisse, soit 2,2 milliards de dollars en 2000. C'est donc 2,2 milliards de dollars de recettes provenant du commerce de détail. Le pourcentage de foyers canadiens faisant des achats en direct continuera de croître, et nous continuerons de tendre vers cette direction.

À la page suivante, on peut constater que les foyers américains achètent en direct plus que les foyers canadiens. Les catégories sont ventilées: de tous les acheteurs en direct, au Canada, 41 p. 100 achètent des livres, alors qu'aux États-Unis, ce chiffre est de 46 p. 100. L'achat de disques compacts, de films et de cassettes vidéo est de 36 p. 100 au Canada, alors qu'il est de 47 p. 100 aux États-Unis. Il n'est pas surprenant d'apprendre que l'achat de logiciels est sensiblement comparable dans les deux pays. En revanche, l'achat de vêtements et autres accessoires est nettement inégal. S'agissant des services, les écarts sont encore plus notables. En fait, notre secteur des services accuse un retard par rapport à ce que nous appelons les produits de consommation.

Une façon simple d'expliquer ce phénomène, c'est que nous n'avons pas beaucoup de détaillants canadiens dans ce segment de la vente en direct. La chaîne Chapters vient tout juste de lancer ses services en direct pour la vente de disques compacts, de films et de cassettes vidéo, de même que Sam the Record Man et HMV font du commerce électronique depuis à peine une année. C'est dire que les détaillants canadiens ont été jusque-là absents de la scène du commerce électronique. Quiconque a déjà acheté un disque compact des États-Unis saura que le prix final est très élevé compte tenu du taux de change, des taxes et des droits de douane.

Le sénateur LeBreton: Est-ce que la même chose s'appliquerait à des services comme les billets d'avion et les hôtels?

Mme Blank: Oui.

Le sénateur LeBreton: Les compagnies aériennes et les hôtels n'offrent-ils pas des services en direct comme c'est le cas aux États-Unis?

Mme Blank: Disons que s'ils offrent des services en direct, ils ne sont pas aussi efficaces qu'ils pourraient l'être.

Le sénateur Finestone: Diriez-vous que la différence entre le dollar canadien et le dollar américain influe grandement sur la décision d'une personne d'acheter un produit américain? C'est ce que les études de recherche montrent.

Mme Blank: Absolument.

Le sénateur Finestone: Les Canadiens achètent canadien. Ils savent ce que le fait d'acheter américain implique, compte tenu du taux de change, des frais de livraison et des droits de douane.

Le sénateur LeBreton: Cela n'a rien à voir avec ce graphique, car il s'agit simplement d'une comparaison entre le commerce électronique aux États-Unis et au Canada.

Mme Blank: Si j'achetais un produit chez Amazon, cet achat figurerait parmi les 41 p. 100, car je serais une Canadienne achetant un livre en direct. Bien des Canadiens achètent des livres, entre autres choses, notamment les produits qui sont uniques et difficiles à trouver. C'est là qu'Internet joue un rôle important. Les gens iront là où ils pourront trouver ce qu'ils veulent acheter.

Ceci étant dit, les gens sont en train de se rendre compte que cela leur revient cher car ils doivent payer un supplément du tiers du coût total. Bien des Canadiens qui ont déjà fait un achat de ce genre ne le feront plus. C'est pourquoi il appartient aux détaillants de faire quelque chose pour corriger la situation.

Dans cette analyse, on essaie de comprendre pourquoi les Canadiens ne font pas d'achats en direct. Il ressort de cette analyse que les Canadiens préféreraient acheter canadien pour 100 raisons, notamment le taux de change. De plus, on apprend que les Canadiens abandonnent leur chariot électronique pour différentes raisons, dont les coûts de livraison. Ainsi, il se peut que les acheteurs canadiens laissent tomber leur chariot électronique parce que le détaillant ne fait pas de livraison au Canada. De nombreux sites américains affichent sur leur page d'accueil un message indiquant qu'ils ne font pas de livraison au Canada, parce qu'ils ont reçu de nombreuses plaintes.

La majorité des clients mentionnés dans l'étude avaient fait leur plus récente acquisition en direct auprès d'un détaillant canadien. L'étude a révélé en outre que 43 p. 100 des Canadiens qui font leurs achats en direct ont dû acheter un article par voie traditionnelle, car le détaillant canadien en question n'avait pas de site Web.

L'essentiel est que les Canadiens veulent acheter des produits canadiens, que ce soit pour des raisons patriotiques ou autres, mais les détaillants canadiens ne sont pas là pour le servir.

Il est vrai que ces chiffres datent d'environ huit mois, mais j'ai lu récemment que l'on peut voir une tendance à la hausse chez les femmes et les personnes âgées. La moyenne d'âge des clients en direct est d'environ 40 ans. Ce sont pour la plupart des hommes vivant dans des grandes villes. Ils sont relativement aisés et ont un niveau d'instruction relativement élevé -- 43 p. 100 d'entre eux ont terminé leurs études collégiales --, et ils sont optimistes.

Voilà donc le profil de l'acheteur canadien sur Internet. Je dirais, cependant, que ce profil est en train de changer, notamment en ce qui a trait à l'âge et au sexe. En effet, les femmes commencent à acheter en direct. Je crois personnellement que l'on assistera à un revirement de tendance. Qu'importe le pourcentage dans le monde en briques, c'est sur Internet que ça clique. Là encore, étant donné que les personnes âgées ont un revenu disponible, et qu'elles ont une certaine curiosité par rapport aux choses intéressantes, je pense que l'on assistera à un engouement de leur part pour l'achat de livres et autres produits sur Internet.

Le graphique suivant est relativement nouveau. Il illustre la croissance de la technologie Internet sans fil. Je pense que ces technologies apporteront une autre révolution. Les spécialistes d'Internet parlent de temps Internet, où une année Internet équivaut à trois mois du calendrier civil. Les spécialistes de la technologie sans fil estiment, qu'une année sans fil équivaut à trois semaines. C'est à ce rythme rapide que vont les choses.

Les entreprises canadiennes comme 724 réalisent des choses remarquables et font figure de pionnier sur le marché. Vous allez voir, elles font des choses fascinantes.

Au cours des 12 derniers mois, le modèle économique canadien a changé. Les marchés financiers en ont assez des entreprises point com qui gaspillent de l'argent pour se consacrer à ce que nous appelons la «conquête de territoires». C'est pourquoi les gens qui veulent se lancer dans ce secteur doivent faire de l'argent selon le modèle de rentabilité. L'idée n'est pas d'attirer des clients mais de les fidéliser et de les rendre rentables après les avoir attirés. Cela n'a rien de nouveau pour ceux qui sont dans le secteur du commerce de détail. Ce n'est pas différent.

Il y a 18 mois, les acteurs du secteur des entreprises point com vous disaient que le commerce de détail sur Internet était un monde différent. Certes, le moyen est différent, mais les principes ne le sont pas. Il faut faire de l'argent, satisfaire ses clients et offrir un produit de valeur qui marche. S'il y avait ici des gens de Loblaws parmi nous, ils vous diraient la même chose. Voilà le principal défi à relever.

Au cours des quatre derniers mois, Indigo a pratiquement changé son site de fond en comble pour refléter cette nouvelle réalité. Nous avons dû nous imposer des compressions très difficiles. Nous avons également modifié notre stratégie d'établissement des prix. Nous ne facturons que les choses qui doivent être facturées.

À titre d'exemple, si vous avez acheté vos cadeaux de Noël chez Indigo l'an dernier, disons six ou sept livres, nous les avons emballés pour vous -- et nous les aurions très bien emballés, car j'étais là jusqu'à minuit l'année dernière --, et vous avez eu à payer 2 $ pour les six, et non pas 2 $ pour chacun.

La présidente: Les cadeaux en question ont-ils été livrés aux clients ou à l'acheteur?

Mme Blank: À l'un ou l'autre; c'était au choix. Moyennant 2 $, on pouvait emballer tous les livres individuellement, car c'était le prix qu'exigeait Amazon. Or, cette année, les choses ne se passeront pas ainsi.

Le modèle économique sur lequel on se basait était le suivant: Si le produit se vendait en magasin à 30 p. 100 de rabais, nous le vendions à 40 p. 100 de rabais. Parallèlement à cela, quelqu'un venait chercher le produit et l'emballer, et le tout coûtait moins cher. L'idée qui sous-tendait ce modèle était que tant qu'on n'avait pas besoin de garder des produits en stock, les coûts seraient inférieurs. N'importe quel détaillant sur Internet pourrait vous expliquer que les choses ne marchent plus de cette façon.

Nous avons changé nos principes économiques. Désormais, notre objectif est d'avoir une entreprise rentable. Cet objectif est intégré à nos activités principales; il n'en est pas distinct. Quand nous faisons de la publicité, elle est diffusée tant dans nos magasins que sur Internet.

Postes Canada est notre partenaire du «dernier mille». C'est un terme que vous entendrez souvent quand il sera question d'Internet. C'est justement au dernier mille que l'on gagne ou l'on perd un client. Ce n'est que Noël dernier que les gens ont commencé à comprendre ce principe. Il est facile de mettre sur pied un site captivant en utilisant des graphiques attrayants et en s'assurant d'avoir des stocks dans un entrepôt. On peut très bien livrer le produit. Or, le véritable défi, c'est de livrer la marchandise au client dans les délais convenus et en bonne condition.

L'infrastructure canadienne est en retard par rapport à celle des États-Unis, et ce, pour différentes raisons, dont la densité de la population. De plus, nous n'avons pas la même expérience de l'achat par catalogue que les Américains. De même, nous n'avons pas toujours accordé la priorité à la livraison de colis aux clients.

La seule entreprise canadienne qui l'a toujours fait, qui l'a toujours bien fait et qui continue de bien le faire sur Internet, c'est Sears, et elle l'a fait au moyen de ses dépôts. D'autres se sont inspirées de ce modèle. Nos amis de Postes Canada le font également, mais c'est le dernier mille qui constitue le véritable défi.

Au Canada, nous n'avons pas beaucoup de concurrence. Une bonne partie de notre territoire est desservie exclusivement par Postes Canada, car la population y est très éparse. Le service par Internet représente donc le dernier mille. Si l'on ne peut y réussir, c'est que le service est vain.

Les cartes de crédit sont monnaie courante sur Internet. Cela dit, bien des Canadiens hésitent beaucoup à donner leur numéro de carte de crédit sur Internet.

J'ai communiqué avec notre centre d'appel pour savoir combien de plaintes nous avons reçues, et la réponse a été: Très peu. Les gens qui se servent de leurs cartes de crédit ne se préoccupent pas beaucoup de la question. En 18 mois d'activité, nous n'avons pas entendu dire que quelqu'un s'est fait voler son numéro de carte de crédit à partir de notre site. Six mois après que nous nous sommes lancés dans le commerce électronique, soit il y a environ un an, nous avons cessé d'offrir au client la possibilité de passer sa commande par télécopieur. Auparavant, le client pouvait communiquer son numéro de carte de crédit par téléphone ou par télécopieur. Ainsi, les gens qui n'étaient pas disposés à divulguer leur numéro de carte de crédit sur Internet pouvaient nous joindre par téléphone ou par télécopieur.

Lorsque nous avons supprimé cette option, les responsables du marketing craignaient que nous allions perdre notre part du marché. Nous avons peut-être effectivement perdu 1 p. 100, ce qui m'amène à conclure que ceux qui sont disposés à utiliser Internet le feront, et que ceux qui ne le sont pas ne le feront pas. C'est très simple.

Nous faisons tout notre possible, et avec l'injection de grosses sommes d'argent, pour garantir l'utilisation sécuritaire des cartes de crédit. Nous allons bien au-delà de ce que font les stations service et les restaurants et pourtant, les gens ne se sentent pas plus à l'aise.

Puisqu'il existe des gens qui ne sont pas à l'aise, et cela les regarde, il nous incombe de créer d'autres moyens de transiger. Il faut concevoir des cartes de crédit en ligne, car l'utilisation de la carte de débit exige le recours à un NIP, ce qui la rend un peu plus sécuritaire. Il serait peut-être bon que les sénateurs signalent aux autorités bancaires l'intérêt de procéder ainsi. Pour ma part, j'ai donné quelques coups de téléphone, mais en vain.

Les compagnies de technologie s'emploient actuellement à concevoir un portefeuille électronique, ce qui serait épatant pour les jeunes en particulier. C'est un mécanisme qui permet de déposer un maximum de 100 $, si bien que vous ne risquez de perdre que 100 $. C'est un genre de carte à puce en ligne. La société Microsoft, le Conseil canadien du commerce de détail et d'autres y travaillent. C'est un autre type de moyen qui va mettre les gens plus à l'aise.

Le Canada s'en tire très bien pour ce qui est de l'accès à grande vitesse. Aujourd'hui, 2 p. 100 des Canadiens ont un accès à grande vitesse, ce qui est absolument nécessaire pour que cela fonctionne. La nature humaine est bizarre. Même si hier on avait l'impression que l'accès était rapide, ce ne sera pas le cas demain. La fibre est installée dans la plupart des villes canadiennes, ce qui est important car cela aidera.

L'accès à grande vitesse est le dernier élément sur ma liste, car je pense que c'est l'aspect le moins important. Aux États-Unis, où on fait des achats en ligne en quantité, l'accès à grande vitesse n'existe pas. Toutefois, c'est utile.

La présidente: Merci.

Le sénateur LeBreton: En matière de technologie, on parle de «briques» et de «clics», mais comment une société comme Indigo comble-t-elle l'écart entre ceux qui ont des connaissances en technologie et ceux qui la craignent? Y a-t-il une génération perdue? Y a-t-il moyen de combler l'écart ou doit-on se résigner à ce que les plus vieux se servent des briques et les plus jeunes des clics pour avoir accès à ce qu'offre Indigo?

Mme Blank: Nous venons de redessiner notre site et nous sommes très conscients des problèmes qu'éprouvent ceux qui ont peur de l'ordinateur. Je ne dirai pas que ce sont les plus vieux, car un grand nombre des personnes du troisième âge sont branchées. Ceux qui éprouvent le plus de craintes à l'égard de la technologie, ce sont ceux de la génération précédente qui, contrairement à leurs aînés qui ont appris avec leurs petits-enfants, n'ont pas eu le temps de faire de même.

Nous sommes très conscients du fait qu'il faut que ce soit sécuritaire, simple et incassable. Quand les premiers ordinateurs ont fait leur apparition, les gens avaient peur de les casser. Nous les concevons donc pour apaiser ces craintes, tant et si bien que, comme je l'ai dit, nous offrirons des points de contact en cas de difficulté.

Deuxièmement, les terminaux se trouveront dans nos magasins, et nous aurons du personnel sur place. Nous avons 60 000 livres dans nos magasins. Sur l'Internet, nous en avons 10 ou 20 fois plus. Si vous demandez un livre, nous allons vous guider pour vous aider à le trouver sur Internet. J'espère que cela sera utile.

Notre configuration tient énormément compte des clients d'Indigo qui n'ont pas de connaissances informatiques. Le client type d'Indigo, selon nous, n'est pas nécessairement très versé dans la technologie. Il s'agit de personnes qui s'intéressent à la culture, et nous savons très bien que certaines d'entre elles ne se sentent pas à l'aise avec ce qui est technologique.

Le sénateur LeBreton: Vous avez tout à fait raison de ne pas pointer du doigt les personnes du troisième âge. Ce sont les gens qui ont entre 50 et 65 ans qui ne sont pas à l'aise. Ils craignent d'appuyer sur le mauvais bouton et de devoir un million de dollars en fin de compte.

Je voudrais savoir comment vous abordez ce problème.

Mme Blank: Nous nous appuyons sur notre présentation et sur nos biens réels en magasin.

Le sénateur LeBreton: On pourrait aussi songer à simplifier le jargon.

Mme Blank: Comme Heather ne cesse de me dire: «Parle-moi en anglais.» Elle ne tolère pas le jargon.

Le sénateur LeBreton: Les gens sont toujours effrayés lorsqu'on parle de bits, d'octets et de méga-octets.

Le sénateur Finestone: J'ai trouvé vos propos très intéressants. Vous connaissez ce nouveau monde dans lequel vous vivez et où je ne fais qu'exister.

Vous avez dit, au sujet de la réfection de votre site Internet, que les jeunes plus particulièrement trouvent les sites Internet trop touffus, trop actifs et trop distrayants. Vous dites qu'une approche plus nette et plus féminine est préférable.

Cela dit, utilisez-vous des mouchards électroniques dans votre site?

Mme Blank: Oui.

Le sénateur Finestone: Dans quelle mesure informez-vous le public de la présence de ces mouchards?

Mme Blank: Je n'en sais rien.

Le sénateur Finestone: J'aimerais le savoir.

Mme Blank: Il faudrait que j'aille sur le site pour le vérifier.

Le sénateur Finestone: J'aimerais savoir également comment vous utilisez les renseignements que vous recueillez grâce à ces mouchards. Ces renseignements servent-ils uniquement aux transactions électroniques avec Indigo ou servent-ils également à la société? Protégez-vous ces renseignements? Si oui, comment? Créez-vous des dossiers sur les clients et vendez-vous ces renseignements?

Mme Blank: Ces renseignements sont strictement utilisés à l'interne. Jusqu'à présent, ils n'ont servi qu'à évaluer la croissance. Nous utilisons les mouchards électroniques pour voir combien d'acheteurs consultent les renseignements sur un livre en particulier. Nous ne savons pas l'identité de l'acheteur. Nous utilisons ces renseignements pour comprendre ce qui se fait. Ces renseignements sont tout aussi protégés que les renseignements que nous avons sur les cartes de crédit. Nous ne vendons ni ne partageons ces renseignements avec personne.

Le sénateur Finestone: Si j'ai bien compris ce que vous venez de dire, vous élaborez un profil du client, vous prenez connaissance de ses intérêts afin de cibler plus efficacement votre clientèle en envoyant des cartes de Noël, par exemple. À quelle fin utilisez-vous ce dossier?

Mme Blank: Nous utilisons nos mouchards électroniques pour comprendre comment la navigation se fait sur le site, pour savoir ce qui marche bien dans le site.

Nous n'utilisons pas les mouchards pour connaître les clients eux-mêmes. Si le sénateur Finestone, qui aime la cuisine chinoise et Martha Stewart, a des intérêts semblables à ceux de Gale Blank, nous pourrons dire alors à Gale Blank que les gens qui aiment la cuisine chinoise aiment également Martha Stewart, d'après nos données sur les achats. Cela n'a rien à voir avec les mouchards électroniques.

Le sénateur Finestone: Les renseignements sont donc confidentiels à l'interne?

Mme Blank: Oui.

Le sénateur Finestone: Dans un formatage protégé, et avec un demi-coupe-feu?

Mme Blank: Ce n'est pas un demi-coupe-feu, c'est un vrai coupe-feu.

Le sénateur Finestone: Il ne s'agit pas du tout d'un document public, donc?

Mme Blank: Non.

Le sénateur Finestone: Quel serveur utilisez-vous?

Mme Blank: C'est notre serveur à nous. Il est situé dans notre bureau.

Le sénateur Finestone: Quel serveur utilisez-vous pour Internet?

Mme Blank: C'est UUNet qui est notre fournisseur de service Internet.

Le sénateur Finestone: Savez-vous si UUNet dispose d'une structure à boîte noire qui surveille ce qui se fait sur le réseau?

Mme Blank: Non. Je ne sais pas vraiment de quoi vous parlez.

Le sénateur Finestone: Une boîte noire est un système électronique qui surveille qui fait quoi et quand. Tous les renseignements sont réunis et on peut à partir de ces renseignements créer des listes très intéressantes pour les vendre. Ces dispositifs permettent plus particulièrement de surveiller le gouvernement. C'est une question que je souhaite vous poser. Si vous ne connaissez pas la réponse, je vous prie de la trouver.

Mme Blank: Je n'en sais rien. Je vais m'informer. Je poserai la question à UUNet.

Le sénateur Finestone: C'est ce qu'on appelle une «boîte noire». On donne peut-être à ce dispositif d'autres noms techniques.

Mme Blank: À quoi peut servir cette boîte noire?

Le sénateur Finestone: Le gouvernement peut utiliser ces renseignements. Je voulais savoir ce que vous savez à ce sujet. Ces dispositifs pourraient aller à l'encontre de la protection de la vie privée sous le régime des lois canadiennes. Je crois savoir que les Britanniques viennent d'adopter une loi pour permettre que les renseignements soient recueillis de cette façon, et le gouvernement britannique dispose maintenant de tous ces renseignements.

Y a-t-il dans vos politiques sur la protection des renseignements personnels des lignes directrices qui s'adressent à vous et à ceux qui répondent au téléphone? Quelles lignes directrices avez-vous en place pour protéger les renseignements personnels de vos clients existants ou éventuels? Par exemple, vos clients savent-ils que vous recueillez et stockez des renseignements à l'aide de mouchards électroniques?

Mme Blank: Cette question est semblable à celle que vous avez posée tout à l'heure. Je ne connais pas la réponse. Je sais toutefois que, si on nous pose la question, nous disons certainement ce qu'il en est aux gens, car cela nous cause des problèmes techniques quand les gens désactivent les mouchards électroniques.

Le sénateur Finestone: Le public est fermement d'avis que, si vous voulez recueillir et stocker des renseignements concernant une personne, ces renseignements appartiennent à la personne et vous n'avez pas le droit de vous en servir à moins d'avoir obtenu son consentement.

Mme Blank: Tout à fait.

Le sénateur Finestone: D'après vous, comment la personne donne-t-elle son consentement?

Mme Blank: Quand la personne s'abonne, nous lui demandons de lire les documents concernant la protection des renseignements personnels. Dans ces documents, nous expliquons que les informations établissant son profil d'acheteur seront recueillies et protégées. Nous ne les vendrons pas, ni ne les revendrons ni ne les utiliserons; les mouchards électroniques sont autres choses cependant, et c'est pourquoi j'ai hésité.

Le sénateur Finestone: La personne conserve le droit de savoir ce que vous allez faire de l'information. Ai-je le droit de vous dire que vous ne pouvez pas vous servir d'aucune des informations me concernant et de clore mon dossier?

Mme Blank: Les utiliser dans quel sens?

Le sénateur Finestone: Mettons que j'ai visité votre site en vue de déterminer si j'achèterai certaines choses chez Indigo ou chez Amazon. Après avoir navigué, je décide que je vais acheter chez vous. Je veux pouvoir vous dire: «Écoutez, ce que je fais ne concerne que moi. Si je veux que vous établissiez mon profil et mes goûts en matière de lecture, je vous le ferai savoir, mais, tant et aussi longtemps que je ne l'aurai pas fait, je ne veux pas qu'il y ait quelque information que ce soit sur vos feuilles ou à n'importe quel endroit à l'intérieur de votre structure.» Pouviez-vous acquiescer à ma demande?

Mme Blank: Non. Ce que nous pouvons faire, c'est de ne pas vous envoyer d'information. La seule autre utilisation que nous faisons de l'information est de nous servir, non pas de vous comme personne, sénateur Finestone, mais bien de votre comportement pour prédire d'autres comportements.

Le sénateur Finestone: Mon comportement a peut-être trahi mon impatience. Vous devriez peut-être le soumettre par la même occasion à une évaluation psychologique.

Mme Blank: À l'heure actuelle, nous ne pouvons pas retirer d'information de la base de données pour faire une analyse de comportement.

Le sénateur Finestone: Pouvez-vous nous en dire un peu plus long sur la communication sans fil? D'après ce que j'en sais, la transmission par câble ou par fibre optique est beaucoup plus sûre que la transmission sans fil. Avez-vous réfléchi à cette question? Je pense bien ne pas tromper. La transmission sans fil est-elle plus sûre ou moins sûre que la transmission par câble? La première s'apparente à une station de radiodiffusion, mais pas l'autre.

Vous parliez de commerce par système mobile et du fait que la transmission sans fil est déjà bien amorcée. Je crois que vous avez raison: la transmission sans fil connaîtra une croissance exponentielle. Nous serons très étonnés de ce qui arrivera. C'est ce que vous avez dit. Pourquoi pensez-vous que la transmission sans fil va continuer à croître au même rythme qu'à l'heure actuelle? Quel nouveau défi cette croissance posera-t-elle pour le commerce, notamment le commerce de livres, de disques compacts et de tous les autres produits culturels qui sont sur le marché et dont certains disent qu'on les vole sur Internet?

Mme Blank: C'est là une question distincte. Pourquoi est-ce que je pense que la transmission sans fil va connaître une croissance sans précédent? C'est parce qu'elle est déjà omniprésente. La technologie a ceci de fascinant -- encore là, je vous fais part de mon opinion personnelle -- que, plus elle est omniprésente, plus elle croît rapidement. Nous parlons ici de transactions qui peuvent se faire au moyen du téléphone cellulaire ou du téléavertisseur que chacun porte sur soi. Je ne sais quel est le taux de pénétration de ces appareils en Amérique du Nord, mais je sais de façon certaine que presque tout le monde en a acheté un dans les 15 dernières années. Dès qu'on possède quelque chose, le marché va trouver le moyen de s'en servir pour vendre autres choses. Voilà pourquoi je crois cela. C'est très simple.

Les défis sont énormes, car l'appareil comme tel, parce qu'il est portable, est laid. Il faudra trouver le moyen de se servir de ce laideron pour vendre quelque chose, et ce sera tout un défi.

Indigo a acheté il n'y a pas très longtemps l'entreprise torontoise Cruickshank, qui vend des articles de jardinage par catalogue. J'imagine l'amateur de jardinage dehors dans sa cour en train de commander des articles du catalogue à l'aide de son téléphone mobile. C'est un appareil formidable pour commander ce qu'on veut.

De même, l'automobiliste pris dans la circulation, peut-être pas à Ottawa, mais sur la 401 dans les alentours de Toronto, qui a oublié d'acheter un cadeau à quelqu'un et qui a beaucoup de temps puisqu'il lui faudra au moins deux heures pour sortir du bouchon de circulation.

Beaucoup d'applications sont possibles. Le défi sera de s'en servir à bon escient. Comment faire pour vendre ce beau bouquet de fleurs sur ce petit écran moche? Mais RIM y travaille. Leurs appareils BlueBerry et BlackBerry sont de vrais petits bijoux.

Vous pouvez me dire si je fais faute route. Dans le monde de la communication mobile, le niveau de sécurité varie. Les banques ont des exigences très strictes. La Banque de Montréal a été la première à opter pour la transmission sans fil et elle a un niveau de sécurité imposant. Rogers, qui a aussi recours à la transmission sans fil pour certaines choses, a des niveaux de sécurité qui varient. Il y a divers types de sécurité qui sont prévus dans les protocoles de transmission sans fil. Il y a les systèmes très étanches, où tout est chiffré 40 millions de fois, et il y a aussi ceux qui sont moins étanches. Indigo a pris le parti que seul un système étanche est acceptable.

Le sénateur Finestone: C'est là une bonne nouvelle. Quelle conséquence y aura-t-il, d'après vous, à ce que les auteurs publient directement leurs livres, sans avoir recours à un éditeur? Je crois que c'est Stephen King qui a fait cela. Savez-vous quel succès il a eu en publiant son livre directement en ligne et en contournant ainsi l'éditeur et le distributeur?

Avez-vous eu des discussions à l'interne sur la possibilité qu'ont les auteurs indépendants de se servir d'Internet?

Mme Blank: Stephen King a eu beaucoup de succès, si le succès se mesure au nombre de demandes d'accès. A-t-il fait plus d'argent? J'en doute. Je ne pense pas qu'il ait fait plus d'argent, parce qu'il s'agit de Stephen King. Si c'était Gale Blank qui écrivait un roman et qui le publiait de cette façon, elle n'aurait pas le même succès, parce que les éditeurs jouent un rôle important dans le développement et la mise en marché des artistes. Je ne vois pas cela comme un moyen pour un artiste de talent de faire connaître ses oeuvres. Il aurait quand même besoin d'aide pour la mise en marché.

Il y a beaucoup de défis qui se posent, notamment pour les éditeurs canadiens. Je ne considère pas celui-là comme étant le premier.

La présidente: Vous avez parlé monnaie. Dans mes remarques préliminaires, j'ai dit que nous voulions nous pencher sur des questions d'orientation gouvernementale afin de nous assurer d'avoir un milieu propice au commerce électronique tant pour l'acheteur que pour le vendeur. Vous avez dit que vous essayez d'amener les banques à mettre au point un système étanche de débits électroniques, chose qu'elle n'avait pas encore réussi à faire. Recommandez-vous que les banques se fassent un devoir de mettre au point un système comme celui-là? Je trouve cela très intéressant.

Mme Blank: Quand nous faisons une transaction électronique avec une carte visa, nous utilisons le logiciel et l'infrastructure des banques. Elles ont mis au point le logiciel et les installations permettant d'effectuer de telles transactions avec la carte VISA, et elles devraient pouvoir en faire autant pour les transactions avec une carte de débit. Elles ont toutefois beaucoup de problèmes techniques à régler d'abord. Cela ne se fera pas tellement rapidement. Je crois que le portefeuille électronique fera son apparition bien avant que nous ayons les débits électroniques.

La présidente: Quelle leçon pouvons-nous tirer de la façon dont les choses se faisaient autrefois? Quand j'étais petite, ma mère m'envoyait prendre des choses pour elle chez l'épicier avec qui elle s'était entendue au préalable pour qu'il mette tout sur son compte. Indigo a-t-elle un modèle d'entreprise qui lui permettrait de me facturer les livres que j'achète par courrier électronique? Cela se fait-il? Est-ce commode? Existe-t-il un logiciel pour cela?

Mme Blank: Ma mère aussi avait l'habitude d'appeler l'épicier, mais elle le connaissait. Sur le plan technique, c'est possible. Le défi qui se pose est toutefois de trouver le moyen de faire échec à la fraude. Internet est omniprésent. Nous avons ce modèle que nous utilisons pour les ventes aux entreprises. Ainsi, nous pouvons envoyer une facture pour les comptes-clients que nous avons avec le gouvernement. La technologie existe.

Le défi qui se pose est de faire échec à la fraude sur Internet. Comme nous ne connaissons pas nos clients et que nous n'avons pas de rapport avec eux, nous ne pouvons pas pour le moment être aussi ouverts.

C'est une question, non pas de technologie mais de fraude. Il y a de la fraude sur Internet, mais elle n'est pas attribuable aux cartes de crédit volées. Elle est plutôt le fait d'étudiants d'université très intelligents qui ont trouvé le moyen de nous rendre la vie difficile.

La présidente: À propos des recherches sur les clients, vous nous avez dit qui sont les clients et quelles sont les tendances qui se dessinent. Avez-vous fait une analyse du facteur temps? Est-il vrai, par exemple, que moins une personne a de temps, plus elle est susceptible de recourir à Internet pour divers types d'achats, des achats personnels, des achats d'affaires ou encore des cadeaux? Avez-vous fait des recherches là-dessus?

Mme Blank: Non. On suppose que les personnes qui ont un revenu élevé ont moins de temps. Beaucoup d'études ont été faites qui montrent que les familles à deux revenus n'ont pas de temps.

La présidente: Qu'en est-il des produits de luxe?

Mme Blank: Je ne sais pas.

La présidente: N'a-t-on pas fait de recherche là-dessus?

Mme Blank: Indigo a l'intention de vendre beaucoup d'objets-cadeaux, mais je ne les qualifierais pas d'articles de luxe, même si ce ne sont pas des nécessités.

La présidente: Je voudrais revenir à ce que vous avez dit au sujet du rythme qui serait plus lent au Canada qu'aux États-Unis. Pourriez-vous nous expliquer quels sont les facteurs clés qui, d'après vous, expliquent ce rythme plus lent au Canada?

Mme Blank: Le premier facteur, c'est que nos détaillants ne sont pas en ligne. Cela coûte trop cher. Je ne peux que penser que c'est là la première difficulté. Je ne crois pas que ce soit parce que nous sommes moins prêts à prendre des risques. Je ne crois pas qu'il y ait moins de Canadiens qui soient prêts à naviguer, puisque nous sommes plus branchés que les Américains. Je crois qu'il n'y a tout simplement pas assez de choix sur Internet pour qu'ils se sentent à l'aise.

Si toutes les marques canadiennes avaient été sur Internet quand Amazon a été lancé, c'est-à-dire Loblaws, Eaton, Roots, Holt, Indigo et Chapters, je crois que la situation aurait été différente. Mais, il y a deux ans, il n'y avait personne qui était là.

La présidente: Que pourrait-on faire pour accroître le rythme auquel les détaillants canadiens offrent leurs services en ligne? Que recommanderiez-vous?

Mme Blank: Ce qui fait obstacle pour les gros détaillants canadiens -- et nous ne sommes certainement pas de ce nombre --, c'est le modèle. Le fait est qu'ils veulent faire de l'argent, et ils doivent trouver le moyen de réaliser cet objectif dans ce monde-là.

La présidente: Vous voulez parler du modèle d'entreprise?

Mme Blank: Oui. Certains d'entre eux ont cessé leur activité à cause de cela. Je ne sais pas si Roots est toujours en ligne. Il est vraiment très difficile de survivre sur Internet. Cela coûte très cher et il est difficile d'y faire de l'argent.

La présidente: J'ai trouvé intéressant de vous entendre dire dans vos remarques préliminaires qu'on en est encore vraiment au stade du développement. C'est un nouveau médium. C'est une nouvelle façon de faire des affaires et on en est encore très certainement au stade du développement.

Mme Blank: Oui. Le modèle qui a été élaboré, et qui est un modèle bon marché, a eu beaucoup de répercussions. Je crois que c'est ce qui nous a ralentis au Canada. Nous ne sommes pas assez gros. Nous ne sommes pas assez nombreux pour nous permettre de perdre de l'argent.

La présidente: Merci. Nous vous sommes reconnaissants pour vos observations et vos réponses.

Honorables sénateurs, le groupe suivant de témoins est de la Société canadienne des postes.

Je vous souhaite la bienvenue, messieurs. Puisque vous avez entendu les discussions que nous avons eues avec Mme Blank, vous savez sans doute que nous aurons probablement beaucoup de questions à vous poser à vous aussi. Nous serons donc heureux de vous entendre nous parler des projets que vous allez mettre sur pied dans le cadre de cette nouvelle révolution des communications qui offre à la Société canadienne des postes un monde plein de possibilités.

M. Gerard Power, vice-président, avocat général et secrétaire de la société, Société canadienne des postes: Sans vouloir passer trop de temps, honorables sénateurs, à vous expliquer ce qu'est la Société canadienne des postes, puisque nous avons tous une idée de ce qu'elle est et de ce qu'elle fait, je voudrais essayer de changer un peu la perception qu'on en a.

Le réseau des postes est fortement tributaire de la technologie. Nous nous servons depuis déjà longtemps de la technologie pour faire le tri du courrier à la Société canadienne des postes. Nous sommes un des chefs de file parmi les administrations postales pour ce qui est d'exploiter la technologie afin d'assurer à tous les Canadiens le meilleur service postal possible au plus bas prix possible.

Vous n'avez qu'à vous rendre dans d'autres pays pour constater que les tarifs postaux canadiens, pour le service tant national qu'international, sont parmi les plus bas au monde. Il n'y a qu'un pays de l'OCDE qui a des tarifs plus bas que les nôtres. Et ce n'est pas parce que nous avons les plus bas taux de rémunération des pays industrialisés, mais bien parce que nous mettons l'accent sur la technologie.

Notre raison d'être est de transmettre des informations, des biens et des messages d'un point du pays, non pas seulement à un autre point du pays, mais à n'importe quel endroit au monde. Cela nous a amenés à suivre les tendances en matière de commerce électronique et aussi à participer à ces tendances pour pouvoir répondre aux besoins de tous nos clients. Ce ne sont pas seulement les entreprises qui comptent sur nous pour leur service postal, mais aussi les particuliers chez qui nous faisons la livraison à domicile.

Un des principes fondamentaux qui guide notre activité est le caractère sacré du courrier. Nous ne voulons donc pas nous engager dans quelque entreprise que ce soit où l'intégrité du courrier pourrait être compromise. Bien entendu, dans le monde réel, la boîte aux lettres n'est pas à l'abri des malfaiteurs. Dans le monde électronique, on ne peut pas fermer toutes les portes de manière absolue. On peut toutefois s'employer à trouver les méthodes de sécurité les plus efficaces afin de protéger l'information de nos clients, quels qu'ils soient.

Le monde du commerce électronique a évolué rapidement pour nous avec l'avènement d'Internet. La Société canadienne des postes est un des grands consommateurs de biens de l'économie canadienne. Nous y contribuons pour environ 5 milliards de dollars d'achats, achats de main-d'oeuvre et achats de biens et services. Nous avons établi des liens commerciaux électroniques pour traiter avec nos principaux fournisseurs. Nous faisons des échanges de données informatisées, ce qu'on appelait autrefois «EDI». Ces EDI sont efficaces pour le commerce entre grandes entreprises. Il devient très coûteux toutefois d'assurer la communication avec la dernière tranche de 20 p. 100 de nos fournisseurs, qui, bien souvent, représentent 80 p. 100 des biens ou services que nous achetons, si bien que cette dernière tranche coûte bien souvent plus que la première. L'Internet s'avère pour nous un moyen efficace et peu coûteux, tant maintenant qu'à l'avenir, de traiter avec ces fournisseurs.

Le sénateur Finestone: Quel est le pourcentage dont vous avez parlé?

M. Power: Nous avons constaté que cette tranche de 20 p. 100 de nos fournisseurs représente 80 p. 100 de nos transactions, et c'est à ce chapitre que nous pouvons vraiment réaliser des économies. Au bout du compte, le coût des EDI est énorme quand il s'agit d'assurer le lien avec la dernière tranche de 20 p. 100 de nos fournisseurs, mais ces fournisseurs représentent 80 p. 100 de ce que nous achetons. L'Internet nous permet de combler cette lacune au moyen, non pas d'un lien EDI traditionnel, mais bien d'un lien comme le service EPOST que la Société des postes a lancé récemment pour la facturation électronique.

J'ai remarqué que vous vous intéressiez à l'évaluation du marché du commerce électronique. Je dois reconnaître qu'il est difficile d'en mesurer l'importance. Pour ce faire, nous nous fondons sur certains indicateurs. Nous évaluons l'état de l'économie américaine, nous nous fondons sur les résultats de certaines tables rondes de même que sur des articles du Globe and Mail, et nous nous sommes aussi reportés à l'étude de Forrester dont Mme Blank a parlé tout à l'heure.

Selon nous, le marché canadien représente 28 milliards de dollars, chiffre un peu différent de celui cité tout à l'heure. La question c'est la définition du marché et non pas sa taille. Nos chiffres sont peut-être les mêmes mais nous considérons le marché sous un angle différent. Dans ce chiffre de 28 milliards de dollars, nous n'incluons pas que le marché des particuliers et je crois que M. Hewitt pourra vous en dire un peu plus tout à l'heure. Il correspond à l'ensemble du commerce électronique et inclut par conséquent les échanges de données informatisées qui, par exemple, avec les fabricants d'automobiles, sont très importants. Les fabricants d'automobiles comme General Motors, Ford et Daimler Chrysler opèrent presque exclusivement par EDI pour leurs achats.

Le sénateur Finestone: Est-ce l'EDI qui est à l'origine du système juste à temps?

M. Power: Oui, l'approvisionnement juste à temps en est un des éléments. C'est un des facteurs qu'il a imposé mais il y a d'autres facteurs de l'EDI bien antérieurs au système juste à temps. L'objectif était de réduire les coûts de secrétariat, les coûts administratifs, le temps que faisait perdre cet échange de correspondance comparativement manuelle.

Le sénateur LeBreton: Donc, la différence entre les chiffres du dernier témoin et les vôtres tient au fait qu'ils se limitaient au commerce de détail alors que vos chiffres englobent l'ensemble du marché.

M. Power: Je ne peux parler de ses chiffres, mais c'est peut-être ce qui explique l'importance de la différence.

L'autre chiffre que nous citons dans notre étude sur cette question est que les commandes en ligne des compagnies canadiennes ne représentent que 0,2 p. 100 du total des ventes de détail aux consommateurs, donc un tout petit pourcentage du commerce de détail canadien.

Nous nous préparons pour le commerce de détail électronique en réorganisant nos ressources tant humaines que matérielles et en adaptant nos plans d'entreprise. Nous nous attendons à la croissance de ce commerce et nous espérons y participer. Nous croyons qu'un bon système postal facilitera la création d'un réseau qui pourra joindre tous les Canadiens et permettra aux Canadiens des zones rurales d'avoir accès à tout un éventail de biens et de services.

Nos travaux de recherche nous ont fait constater que les consommateurs canadiens désiraient des services fiables. Ils désirent aussi des produits vendus par des détaillants canadiens. Ils se méfient un peu des produits vendus par des détaillants étrangers. En partie à cause des problèmes de douanes, de taux de change. Ce problème peut être résolu. Il y a un service qui s'appelle borderfree.com, c'est une compagnie canadienne qui vous permettra de passer commande auprès d'un détaillant américain qui ne livre pas au Canada. Cette compagnie se chargera de régler les formalités de douanes pour le consommateur, calculera le taux de change et dira au consommateur avant qu'il ne place sa commande à combien se montera la facture, y compris le transport et la livraison à partir du point d'entrée canadien.

La solution à certain de ces problèmes existe, mais l'élément de confiance, savoir avec qui vous traitez, n'a pas encore été solutionné. Pouvoir s'adresser à un détaillant canadien, le connaître physiquement, donne une certaine confiance au consommateur. De la même manière, connaître le «détaillant électronique» canadien pose un problème aux Canadiens. On peut passer des heures sur des portails comme Yahoo et Alta Vista pour essayer de trouver les détaillants, mais seuls les détaillants qui paient sont affichés. Mais d'une manière générale, ce sont des détaillants électroniques américains.

La Société canadienne des postes a offert à un nombre de ses usagers des services de messagerie de colis la possibilité d'apparaître en cliquant sur le site Web de Postes Canada. D'autres expéditeurs peuvent en fait aussi offrir cette option et il est donc possible de trouver des détaillants canadiens.

Nous sommes conscients à Postes Canada de la nécessité de trouver des diplômés des universités canadiennes pouvant aider les entreprises canadiennes à participer à l'économie de l'Internet. Nous avons du mal à trouver et à recruter le personnel qualifié pour nous aider à progresser. Nous essayons de former notre propre personnel. Cependant, il nous faut accepter leurs qualifications. Nous essayons de recruter du nouveau personnel ayant ces qualifications mais c'est un marché très recherché. La tour voisine de notre siège social porte le nom d'Entrust Technologies et elle est remplie d'employés d'Entrust. Vous pouvez parier que chaque fois que nous formons un cryptographe à clé publique, ou que nous en recrutons un, il ne lui faut que quelques semaines pour savoir qu'on cherche des spécialistes à Entrust et qu'ils s'intéressent aux possibilités offertes. C'est ça le problème. Les offres dépassent la demande.

La protection des renseignements personnels qui sont véhiculés par l'Internet est notre priorité, car nous sommes un agent du gouvernement. Traditionnellement, Postes Canada a toujours été un instrument du gouvernement offrant des moyens sécurisés de transmission des renseignements. C'est le cas par exemple de nos déclarations de revenu que la majorité d'entre nous envoient par la poste. C'est le cas pour beaucoup d'autres informations gouvernementales que nous transmettons en toute sécurité.

Nous croyons que comme instrument du gouvernement, nous avons la responsabilité spéciale d'assurer la sécurité des renseignements de nos clients qui peuvent nous être transmis par l'Internet. Nous n'utilisons pas de mouchards électroniques sur notre site bien que nous vendions des timbres et quelques autres articles.

Dans l'anticipation d'une question possible sur ce que nous faisons pour assurer la sécurité des renseignements tout en ayant nos propres serveurs pour l'échange d'information, il nous faut également recourir à des tiers pour certains services. Nous insistons pour que certaines clauses de confidentialité soient strictement respectées. Nous insistons pour que soit respectée la Loi sur la protection des renseignements personnels, loi à laquelle Postes Canada est assujetti, afin que les renseignements qui nous arrivent ou qui sont détenus par nous soit directement soit par l'intermédiaire d'un agent, soient assujettis à toutes ces protections. Ils ne sont utilisés à aucune autre fin que celles pour lesquelles ils sont recueillis. Ils ne sont recueillis d'aucune autre personne que celles qui sont y associées, à moins qu'il y ait une raison valable. Généralement, c'est une raison de sécurité.

Je ne parle pas d'une raison de sécurité des renseignements en tant que telle, mais d'une raison d'enquête parce que nous avons un service d'enquête dans notre unité de sécurité. Nous ne divulguons pas ces renseignements à un tiers. Je suis certain que l'échange d'information peut être très séduisant pour d'autres, mais nous ne pensons pas que cela soit opportun pour une société où le niveau de confiance doit être le plus élevé.

S'agissant de certaines de nos compétences, il y a les questions relatives aux rôles des intermédiaires. Beaucoup d'entreprises se sont constituées en portails, essayant d'agir comme intermédiaires et c'est un rôle qui peut être joué. Je suppose qu'on pourrait qualifier d'intermédiaire notre site de magasinage canadien, mais ce serait une exagération. Les services postaux jouent un rôle d'intermédiaire en livrant les messages des entreprises à leurs consommateurs et des consommateurs aux entreprises. C'est une activité qui peut s'avérer très coûteuse à mettre sur pied et c'est la raison pour laquelle d'une manière générale il n'y a qu'une administration postale par pays.

Il n'y a pas d'obstacle juridique dans le monde électronique prévenant l'installation d'un site d'échange d'information de facturation. Il y a cependant un obstacle pécuniaire. Installer un site de facturation électronique avec toutes les garanties de sécurité coûte très cher. Il y a des gens aux États-Unis pour qui la dépense ne compte pas et qui peuvent le faire. Certaines grosses entreprises canadiennes ont installé des sites efficaces pour leurs propres clients mais d'une manière générale les entreprises canadiennes ne sont pas suffisamment grosses pour installer ce genre de service sans qu'il leur coûte trop cher.

En collaboration avec Cebra, division technologique de la Banque de Montréal, Postes Canada a créé une organisation intermédiaire du nom d'EPOST qui permet l'établissement d'une installation de facturation Internet à un coût relativement peu élevé. Elle permet de présenter les factures aux clients en toute sécurité en utilisant les supports de sécurité de l'Internet. Ce n'est pas un monopole pas plus que ce n'est du domaine exclusif de Postes Canada.

Ces services finiront par réduire une grande partie du volume qui est physiquement transmis par Postes Canada, mais ce qui est encore plus important du point de vue canadien, un site de facturation électronique canadien tel qu'EPOST dissipe des inquiétudes du public, à savoir que c'est un site canadien par opposition à un service américain comme CheckFree où les renseignements canadiens font un aller-retour au Sud avant d'apparaître sur l'Internet.

Dans ce domaine, j'ai un peu parlé d'EPOST. En réponse aux besoins de la clientèle, nous avons créé un service appelé PosteCS. Nous offrons un service de messagerie garanti en conjonction avec les services postaux des Américains et les postes françaises. Un service de messagerie garanti permet d'annexer des documents qui sont trop importants pour être livrés par les systèmes de courrier électronique traditionnels.

La plupart des systèmes de courriel n'accepteront pas d'annexes de plus de deux méga-octets. Cela peut sembler dérisoire aujourd'hui, mais un fichier MP3 où nombre de fichiers Adobe transmis aux mises au point avant impression, aux maquettes de texte publicitaire, et cetera sont beaucoup trop encombrants pour être déplacés par courriel. Toutefois, ils peuvent être envoyés par notre service PostesCS. Ce service offre également l'avantage de permettre de confirmer l'adresse immédiatement lors de l'envoi. Autrement dit, si l'adresse est fausse, le renvoi est immédiat et il n'est pas nécessaire d'attendre deux ou trois jours. Ce système confirme que la personne avec qui je fais affaire a effectivement reçu le message.

Ce site est protégé par le palier sécuritaire d'Internet, le HTTPS. Les messages sont également codés sur le serveur, de sorte que seul le destinataire peut les ouvrir. Il est possible d'obtenir un mot de passe pour se protéger, ce qui offre à nos clients la même sécurité que s'il s'agissait de l'un ou l'autre de nos services postaux.

Passons maintenant au cachet postal électronique. Jusqu'à tout dernièrement, nous comptions tous au Canada sur le cachet d'oblitération de la poste pour prouver que telle chose s'est produite à un moment donné, au point même parfois de poster à soi-même copie de l'invention que l'on a l'intention de faire breveter pour prouver qu'elle a été inventée tel ou tel jour. Nous avons donc entrepris de fournir cette information supplémentaire, en misant sur la confiance que les Canadiens avaient à l'égard de notre service postal.

Pourquoi la Société canadienne des postes s'est-elle implantée dans ce domaine? En fait, nous investissons dans les marchés électroniques depuis leur apparition. À partir des années 70, les services télégraphiques au Canada utilisaient la Société canadienne des postes pour assurer la livraison des télégraphes. Les bicyclettes ont disparu et la Société canadienne des postes s'est transformée en système de livraison. Télécommunications CNCP a ensuite installé des imprimantes dans nos services postaux, et les messages ont pu dès lors être imprimés au bureau de poste puis livrés par un facteur.

Lorsque le courrier électronique a démarré avec le service de facturation de Bell Canada, la Société canadienne des postes, de concert avec Bell, a décidé d'offrir «Envoy Post», qui permettait de faire imprimer à l'un ou l'autre de nos bureaux tout message envoyé par un utilisateur du système Envoy, puis de le faire livrer par notre système postal. Ces services ont disparu au fur et à mesure que la société évoluait, mais la Société canadienne des postes a elle aussi évolué en décidant d'offrir de nouveaux services électroniques.

Comme le signalait la témoin précédente, la Société canadienne des postes est un des grands vecteurs de livraison d'Indigo.ca. Nous sommes partenaires de livraison pour d'autres cyberacheteurs canadiens, surtout parce que nous sommes tentaculaires, surtout aussi parce que nous avons déjà ces services et surtout parce que nous connaissons notre pays. Nous habitons ici et nous avons des bureaux disséminés partout. Il est possible pour les Canadiens de se rendre dans 18 000 emplacements pour faire des envois postaux, pour acheter des timbres et pour acheter l'accès à nos services. Nous formons un réseau sans précédent et sans pareil.

Nous avons lancé des programmes pilotes pour fournir des kiosques Internet dans nos bureaux de poste à des endroits accessibles à tous les Canadiens. D'aucuns pourront se plaindre des heures de service de certains de nos bureaux de poste, mais c'est un défi à relever. À cause de nos partenariats avec le secteur privé, d'autres bureaux de poste à nous offrent de plus longues heures de service de façon à permettre un plus grand accès à nos services postaux aux Canadiens.

Pour les Canadiens, la confiance est un obstacle au commerce électronique. Ils veulent savoir avec qui ils font affaire. Personnellement, comme j'utilise fréquemment l'Internet pour faire des achats, je veux savoir avec qui je fais affaire. Si je fais affaire avec un détaillant établi, cela me donne une certaine confiance lorsque je passe une commande. Toutefois, lorsque je fais affaire avec un inconnu par le biais d'Internet, j'aime aller consulter son site Internet sur le Web pour savoir où il est situé, pour connaître son adresse de voirie. Autrement dit, s'il me faut aller frapper à la porte de mon fournisseur parce que je ne suis pas tout à fait satisfait des produits qu'il m'a envoyés, je veux savoir à quelle porte aller frapper.

Nos consommateurs cherchent une certaine sécurité qui puisse leur être fournie sans qu'ils soient obligés de se soumettre à la lecture rétinienne ou aux empreintes digitales, deux techniques qui sont aujourd'hui disponibles. On peut juger que c'est aller un peu loin que de scruter par balayage les yeux de quelqu'un. Toutefois, l'obligation de fournir un NIP, comme on le fait pour avoir accès à un site bancaire, combinée à l'utilisation d'un mot de passe, constitue un niveau de sécurité qui satisfait nos clients, lorsqu'ils s'inscrivent à notre site Web de poste électronique, par exemple. Une fois inscrits, nous leur faisons parvenir deux envois postaux distincts et matériels. Le premier leur donne leur numéro d'identification, et le deuxième leur envoie leur NIP ou leur mot de passe. Comme nous n'envoyons pas ces deux lettres le même jour, il est peu probable qu'un intrus parvienne à forcer la boîte aux lettres d'un client deux fois de suite. Ce genre de mesures accroît la confiance et la sécurité.

La Société canadienne des postes, de concert avec l'Association canadienne du marketing, anciennement l'Association canadienne du marketing direct, a participé à l'élaboration de la norme CSA de protection des renseignements personnels. Cette norme a été codifiée dans le projet de loi C-6 et établit les critères de base en vue de la protection de l'information sur le client, non seulement dans le commerce par Internet, mais aussi dans le commerce en général.

À titre de partie prenante dans les marchés électroniques et dans l'industrie du marketing direct, nous avons jugé que nous devions jouer un rôle dans le choix de cette norme. Puisque nous avons dû nous plier à la Loi sur la protection des renseignements personnels depuis son adoption, nous avons jugé que nous avions acquis une certaine compétence dans ce domaine et que nous pourrions aider à monter le marché du marketing direct au Canada pour qu'il gagne la confiance des consommateurs canadiens.

Le projet de loi C-6 constitue un pas important dans la bonne direction pour les Canadiens. Non seulement il prévoit de rendre encore plus sécuritaire la protection des renseignements personnels et de la vie privée, mais du point de vue des affaires, le projet de loi a également aidé à jeter les bases d'un échange d'informations avec les entreprises des pays membres de l'Union européenne. Faute de cette base, les entreprises canadiennes auraient été exclues de tout commerce avec les entreprises de l'Union européenne.

Les Canadiens veulent savoir quelles lois s'appliquent. La semaine dernière, le Parlement européen adoptait des mesures législatives destinées à résoudre des conflits de loi en faisant de la loi protégeant le consommateur celle qui s'applique. Cela représente tout un défi pour les gens d'affaires, mais peut-être pas autant pour les clients, qui ne songent pas au problème lorsqu'ils passent leur commande.

Passons maintenant à la page 9.

Le bureau de poste permet de trouver en un seul lieu beaucoup d'informations sur les services gouvernementaux. On peut y obtenir des formulaires gouvernementaux tels que les demandes de passeport, les formulaires d'impôt, et cetera. Mais si l'on regarde l'avenir, même si les Canadiens se branchent de plus en plus à l'univers électronique, il faut reconnaître que ce ne sont pas tous les Canadiens qui ont des ordinateurs personnels.

Ce pourrait être un défi intéressant que de brancher tous les foyers canadiens, mais ce n'est peut-être pas un défi que le Canada pourra relever dans la prochaine décennie.

La difficulté, c'est qu'au fur et à mesure que l'on offre un plus grand nombre de services par voie électronique, on risque aussi de limiter l'accès de certains Canadiens à ces services. Plutôt que de marginaliser ces derniers, nous croyons que de mettre à leur disposition le réseau des bureaux de poste est un moyen de permettre aux Canadiens non encore branchés chez eux de se brancher ailleurs.

Beaucoup de nos bureaux de poste sont aujourd'hui branchés à Internet, ce qui nous permet d'obtenir de l'information sur nos ventes au détail au point de vente même. Il est important pour nous de savoir combien de timbres nous avons vendus à un bureau de poste donné, car il nous faut savoir si nous devons faire parvenir à ce dernier un plus grand nombre de timbres ou pas.

Ce type de capacité d'échange, cette pierre angulaire, peut servir à offrir toute une gamme de services qui peuvent être élargis encore, comme l'illustre l'expérience des kiosques en cours actuellement. Ce service permettrait d'avoir accès à de l'information gouvernementale personnelle et individualisée. Ainsi, les demandes d'accès à des renseignements personnels pourraient être automatisées, et l'accès pourra devenir possible au kiosque même.

Le réseau des kiosques permettrait ainsi d'obtenir de l'information sur les services et les programmes gouvernementaux.

La Société canadienne des postes a toujours été un intermédiaire de confiance dans la prestation des services gouvernementaux et dans la prestation d'une foule d'interconnexions depuis plus de 100 ans. Notre compétence acquise dans le maintien de la sécurité des renseignements et dans la fourniture d'une infrastructure stable -- c'est-à-dire d'une infrastructure canadienne identifiée comme telle -- a des avantages et permet aux Canadiens qui pourraient être intéressés par le commerce électronique à avoir encore plus confiance.

Le sénateur Finestone: Je suis une fervente adepte de la Société canadienne des postes. J'ai toujours cru que s'il était possible de bien utiliser vos bureaux disséminés partout au Canada, les Canadiens en seraient plus heureux et se sentiraient plus en sécurité, à cause de votre bonne réputation. Vous avez vous-mêmes souligné à quel point la confiance est un aspect important de vos affaires.

Il ne fait aucun doute que les Canadiens veulent farouchement protéger leurs renseignements personnels. C'est ce qui distingue justement notre société démocratique de celle des Américains.

À propos du projet de loi C-6, j'ai constaté, lors de réunions avec des gens d'affaires, qu'ils se préoccupent passablement de la façon dont le projet de loi s'appliquera et de la façon dont ils devront adapter leurs sources d'information et leurs ressources. Êtes-vous certains d'avoir respecté tous les critères énumérés tels que l'aptitude à respecter les droits à la protection des renseignements personnels? Avez-vous défini vous-mêmes les normes que vous appliqueriez ou les caractéristiques que vous voudriez retenir dans la définition des droits à la protection des renseignements personnels?

M. Power: Pour l'instant, le projet de loi C-6 ne concerne pas Postes Canada. Nous relevons de la Loi fédérale sur la protection des renseignements personnels. Par conséquent, dans l'ensemble, les programmes qui ont été élaborés par le passé précèdent l'entrée en vigueur de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Une des tâches des gestionnaires de produits est de s'assurer que la Loi sur la protection des renseignements personnels est respectée.

Le sénateur Finestone: Avez-vous déjà été mentionnés dans les rapports du commissaire à la protection des renseignements personnels?

M. Power: Il est arrivé que M. Phillips nous mentionne dans ses rapports, et avant lui, John Grace dans les siens.

Lorsqu'un organisme compte 55 000 employés, il sera forcément mentionné de temps en temps. Toutefois, dans l'ensemble, il s'est agi de demandes d'accès de la part d'employés aux termes de la Loi sur la protection des renseignements personnels.

De temps en temps, Postes Canada est mentionné. Nous avons essayé d'aller au fond des choses, dans tous ces cas-là, qu'il s'agisse d'améliorer la sécurité du courrier, de mettre en place des mécanismes d'acheminement spécialisé pour des ministères mentionnés dans les rapports, ou encore d'instaurer des mécanismes de sécurité supplémentaires, comme des signatures supplémentaires, pour éviter que des informations personnelles de nature délicate ne tombent entre de mauvaises mains.

Le sénateur Finestone: Êtes-vous préoccupés par l'équation courrier papier-courrier électronique?

M. Power: Nous le sommes à de nombreux égards. M. McInenly souhaitera peut-être répondre à cette question lui aussi. Nous nous inquiétons de l'avenir du réseau postal si une proportion importante des messages sur papier deviennent des messages électroniques. Toutefois, nous ne voulons pas réagir comme des Luddites. C'est en partie la raison pour laquelle il est tellement important d'offrir des services supplémentaires. Les messages sur papier existeront toujours, pour des questions de confiance, ou encore parce que c'est le meilleur moyen d'envoyer un dessin d'enfant à une tante, à un oncle ou à un grand-parent. Nous continuerons à offrir ces services-là. C'est une obligation pour le Canada qui est membre de l'Union postale universelle.

Nous portons un intérêt tout particulier à la sécurité des messages et à ce qu'on attend de nous sur ce plan-là. Nous avons suivi de près les décisions des tribunaux à ce sujet. Jusqu'à présent, les tribunaux canadiens reconnaissent la nécessité d'assurer le caractère privé du courrier électronique, mais ils reconnaissent en même temps que cette sécurité est menacée de plusieurs façons.

Le sénateur Finestone: Est-ce que vous avez des systèmes de surveillance? Avez-vous des caméras vidéo dans les toilettes, ou bien allez-vous vérifier ce qui se passe dans les ordinateurs, le courrier électronique ou les fax de vos 55 000 employés?

M. Power: Nous avons un système de sécurité en milieu de travail. Depuis la fin des années 70, les caméras en circuit fermé ont toujours été une question délicate pour Postes Canada. Par conséquent, la plupart de nos caméras en circuit fermé sont situées à l'extérieur des immeubles pour prévenir les entrées par effraction.

Certains superviseurs sont là pour s'assurer que personne ne touche au courrier. Dans l'ensemble, les 55 000 employés de Postes Canada prennent cela très au sérieux.

Il y a toujours des gens qui abusent de leur position, mais lorsqu'on s'en aperçoit, des mesures sont prises conformément aux conventions collectives. En fait, ils sont immédiatement renvoyés.

Le sénateur Finestone: Est-ce que la surveillance électronique surveille le courrier acheminé dans le système? Est-ce qu'on limite l'accès du personnel à d'autres secteurs des édifices?

M. Peter McInenly, vice-président, Planification stratégique, Société canadienne des postes: Nous avons diverses méthodes pour assurer la sécurité; cela dépend des fonctions de chaque immeuble et du degré de risque. Comme M. Power l'a dit, en général, il y a un système de sécurité sur le périmètre de tous nos immeubles, mais cela ne continue pas à l'intérieur. Les télévisions en circuit fermé existent seulement à l'extérieur, elles ne servent pas à surveiller les gens, à moins qu'un problème précis ne surgisse pour justifier ce genre de surveillance, par exemple des vols, et dans ce cas, il nous arrive d'utiliser des appareils portatifs.

M. Dan Hewitt, directeur national, Services électroniques: Mes collègues font surtout allusion au courrier sous enveloppe. Dans le secteur où je travaille, nous recevons des informations sous forme électronique. Nous recevons de «véritables» informations, et non pas des enveloppes scellées. Nous distribuons ces informations dans tout le pays par voie électronique, nous l'imprimons sur le papier à lettre des gens, puis nous l'acheminons par courrier.

Dans ce secteur de l'entreprise, on accorde une importance majeure à la sécurité de l'information. Personne ne peut pénétrer dans une pièce sans passer sa carte magnétique dans un lecteur. Mon groupe travaille dans un secteur entièrement séparé, ici à Ottawa.

Je ne sais même pas si l'un de mes collègues qui sont ici pourrait pénétrer dans l'immeuble, sans parler des pièces où ils pourraient avoir accès à de véritables données et non à des enveloppes scellées.

Dans tout le secteur électronique, la sécurité est une préoccupation constante, et nous exigeons que les locaux où circulent des informations soient extrêmement sécuritaires.

Le sénateur Finestone: Êtes-vous certains que l'OCDE ou l'Union européenne considérerait que votre système de collecte et de distribution des données protège efficacement les renseignements personnels et est codé de manière à ne pas porter atteinte à la réputation des Canadiens, entre autres?

M. Hewitt: Je ne peux pas identifier les normes que vous citez.

Le sénateur Finestone: Je parle des normes internationales de l'Union européenne qui s'appliquent aux entreprises internationales et intranationales.

M. Hewitt: À plusieurs reprises, la GRC a examiné nos procédures pour s'assurer que nous traitions les renseignements du gouvernement fédéral de façon sécuritaire. La GRC a formulé certaines recommandations que nous avons ensuite appliquées. Nous acheminons des millions de courriers électroniques sans aucun problème.

La présidente: S'agit-il de PosteCS ou de l'affranchissement électronique, ou bien d'autre chose?

M. Hewitt: C'est un service différent. Nous avons ce que nous appelons le service numérique des documents, le courrier électronique ou le courrier publicitaire électronique.

Le sénateur Finestone: Monsieur Hewitt, je ne comprends pas très bien comment vous donnez suite à une demande d'information d'un service de police. Comment trouvez-vous le juste milieu entre la protection des renseignements privés d'un citoyen et la nécessité d'assurer la sécurité de la société? Avez-vous des règles ou des directives à ce sujet?

M. Hewitt: Il faut que je reçoive des instructions du bureau du président afin de répondre à une telle demande d'information.

M. McInenly: Depuis très longtemps, nous entretenons des relations étroites avec la GRC et d'autres services de police. Le moins qu'on puisse dire, c'est que ces relations ont été soit très satisfaisantes, soit difficiles. Dans nos relations avec les services policiers, nous respectons toujours la sainteté du courrier, les restrictions de la Loi sur les renseignements personnels ainsi que les limites de l'accès à l'information imposées par la GRC qui applique les décisions de la Cour fédérale.

Si la GRC a besoin de certains renseignements, elle peut faire une demande à la Cour fédérale, et lorsque nous recevons une telle ordonnance, nous coopérons toujours. Toutefois, il y a longtemps qu'on ne peut plus pénétrer dans l'immeuble et ramasser une lettre à moins, comme M. Power ne l'a dit, que quelqu'un ne commette un acte répréhensible, ce qui est toujours possible.

Pour nous, cela continue à être un problème important car dans le monde entier les organismes policiers poursuivent leur lutte contre le crime organisé, entre autres. C'est un domaine où nous sommes très vigilants, un domaine que nous jugeons particulièrement délicat.

Le sénateur Finestone: Cela me fait plaisir, car c'est tout à fait normal.

On parle beaucoup de la possibilité de faire des bureaux de poste, surtout dans les petites et moyennes communautés, une sorte de lieu de rencontre pour la grande famille canadienne. On dit qu'on devrait pouvoir obtenir des services bancaires, des communications interurbaines et des services de photocopies dans les bureaux de poste, et également des services de commutation et d'accès à l'Internet.

Est-ce que vous vous intéressez à de nouveaux domaines commerciaux en plus de ceux qui figurent à la page 5 de votre exposé? Les Canadiens ont été mécontents lorsqu'ils ont vu un grand nombre de services, en particulier les services bancaires dans les petites communautés, fermer leurs portes. Ce serait peut-être une solution.

M. Power: Nous avons commencé à ouvrir des agences bancaires sur une base expérimentale il y a environ sept ans.

Le sénateur Finestone: S'agit-il d'un accès à la Banque de Montréal ou à la Banque Royale, par exemple?

M. Power: Exactement. La banque d'épargne postale a cessé d'exister en 1968, bien que de nombreux autres pays aient conservé des institutions comparables. À l'époque, au Canada, le service n'était plus tellement utilisé car les banques avaient des réseaux extrêmement efficaces et étendus.

Le sénateur Finestone: C'est donc vous qui avez fermé ce service.

M. Power: Nous avons peut-être été les premiers à fermer quelque chose, mais nous l'avons fait à une époque où tous les autres secteurs étaient en pleine expansion, et en 1968 il ne semblait plus nécessaire pour le fédéral d'offrir un service bancaire postal.

Les choses ont changé, mais de nos jours la création d'une banque exige un investissement considérable, et pour cette raison nous avons choisi d'offrir un service d'agence. C'est notre personnel qui assure le service dans un endroit donné, mais l'infrastructure bancaire est celle de l'une des grandes banque ou quasi-banques.

Pour nous, ce modèle était préférable. En 1968, Interact ou les compensations électroniques n'existaient pas.

Le sénateur Finestone: Il pourrait y avoir un guichet automatique bancaire dans tous les bureaux de poste. Pourquoi n'est-ce pas le cas? Quand j'ai besoin des services d'une banque, j'aimerais pouvoir le faire avec une billetterie au bureau de poste.

D'une certaine façon, vous occupez une place para-gouvernementale, et c'est une obligation. Vous avez la réputation d'être un organisme axé sur les services. Où est André Ouellet? Dites-lui qu'à mon avis c'est ce qu'il devrait faire.

M. McInenly: Merci beaucoup, sénateur. Nous prenons note du message. Un élément intéressant du service postal, c'est qu'il suit traditionnellement un certain format. Dans d'autres pays, c'est tout à fait différent. À de nombreux égards, les divers services sont aussi différents que des empreintes digitales. Toutefois, dans notre réalité à nous, nous devons trouver un point d'équilibre entre les services qui ont leur place au «niveau gouvernemental» et ceux qui devraient être assurés par le secteur privé.

Nous tenons absolument à offrir toute une gamme de services; nous aimerions beaucoup pouvoir étendre la gamme des services dans tous nos comptoirs postaux. Toutefois, beaucoup de gens sont convaincus du contraire et pensent que si quelqu'un d'autre dans la communauté peut assurer ce type de service, nous ne devrions pas nous en occuper.

Le sénateur Finestone: Vous faites maintenant partie du secteur privé. Vous avez été privatisés.

M. McInenly: Nous n'avons pas été privatisés, nous sommes à mi-chemin entre les deux.

Le sénateur Finestone: Vous êtes une société d'État.

M. McInenly: Oui.

Le sénateur Finestone: Dans ce cas, je n'ai pas l'intention de vous privatiser.

M. McInenly: Ce point d'équilibre, c'est une chose que nous recherchons en permanence. En ce qui concerne l'avenir, nous nous interrogeons sur les meilleures solutions dans certaines communautés. M. Power a dit que nous offrions des services bancaires. Nous avons maintenant un nouveau projet pilote à Terre-Neuve dans des douzaines de localités où il n'y a pas actuellement de succursales bancaires. Nous avons l'intention d'offrir des services en collaboration avec une des grandes banques. Dans un avenir assez proche, nous pensons pouvoir nous entendre avec les banques et jouer un rôle plus important dans le domaine des services financiers, sans toutefois remplacer les banques, certainement pas.

L'important est toujours de trouver le point d'équilibre entre ce qui est possible, ce que nous préférerions faire et ce que l'ensemble de la communauté souhaite, les contribuables qui, après tout, financent grandement Postes Canada.

Le sénateur Finestone: Dans cette entreprise expérimentale à Terre-Neuve, est-ce que vous avez le droit de consentir des prêts, par exemple, aux petites entreprises?

M. McInenly: Ce n'est pas ce que nous faisons. Nous assurons les transactions courantes, par exemple l'accès aux fonds, et cetera. Toutefois, j'ajoute que c'est un début, et si l'expérience réussit, nous espérons qu'elle conduira à toutes sortes d'options pour l'avenir. Par le passé, nous avons eu de très bonnes relations avec de nombreuses banques.

Vous avez posé une question au sujet des guichets automatiques et des autres appareils de ce genre. Nous les avons mis à l'essai à différents endroits. C'est en tout cas une possibilité. Mais à l'heure actuelle, les banques décident des investissements qu'elles veulent faire dans cette technologie selon les localités. Nous sommes certes prêts à en installer davantage et nous l'avons fait dans certaines localités par le passé, à titre d'expérience. Nous sommes prêts à tout.

La présidente: Avez-vous dit, monsieur Power, que la Société canadienne des postes a 18 000 comptoirs postaux?

M. Power: Il y a 18 000 points de vente au détail.

La présidente: Vous les appelez des points de vente au détail?

M. Power: C'est exact.

La présidente: Pourquoi parlez-vous de vente au détail alors que votre nouveau secteur d'activité ressemble davantage à un comptoir de service qu'à de la simple vente au détail?

M. McInenly: Cela fait partie de notre terminologie, sénateur. Nous offrons un certain nombre de services, mais comme M. Power l'a fait remarquer, la nature de ces endroits, leur degré de raffinement, varient du plus simple, par exemple une boutique familiale où l'on vend des timbres, au plus raffiné, comme certaines de nos succursales et concessions.

La présidente: J'ai d'autres questions entièrement différentes à poser. La première s'adresse au vice-président de la planification stratégique. L'une des plus grandes difficultés que j'ai eues, ça a été de trouver l'adresse électronique de quelqu'un dont je n'avais pas la carte d'affaires.

La Société canadienne des postes -- et je suis d'accord avec vous, c'est une société canadienne fiable qui fait partie de notre histoire et de notre patrimoine -- a-t-elle envisagé d'élaborer un répertoire des adresses électroniques au Canada?

M. McInenly: Oui, mais dans le contexte d'un ouvrage encore plus étendu. Nous prévoyons notre avenir, un avenir dans lequel la Société canadienne des postes ne sera pas simplement un dépôt de toutes sortes de renseignements utiles auquel la population aura accès, mais aussi un avenir dans lequel nous pourrons, dans certains cas, établir des liens. Par exemple, nous pourrions savoir où vous vivez et où vous travaillez, ainsi que les numéros qui permettent de communiquer avec vous, par exemple, si vous avez une maison à la campagne, un téléphone cellulaire, et cetera. Nous sommes encore en train de concevoir comment nous pouvons utiliser ces renseignements, l'approche que nous prendrons, compte tenu du fait que nous sommes très sensibles aux questions de protection de la vie privée.

À vrai dire, je crois que la Société canadienne des postes pourrait être en mesure d'être un centre d'échanges d'information, qui fournirait des renseignements avec le consentement des gens, selon les mesures de protection actuelles.

Je vais vous en donner un exemple. Nous parlons de mettre sur pied un bureau de poste électronique, le premier de ce genre au monde et, à bien des égards, à la fine pointe du progrès. L'un des grands avantages d'un tel bureau, pour ceux qui s'y inscrivent, est qu'ils peuvent choisir ce qu'ils souhaitent recevoir ou non. Nous n'avons pas encore choisi d'exploiter un tel bureau parce que nous ne savons pas exactement comment nous pourrions procéder. Si vous voulez être mis au fait de certains nouveaux projets ou de certaines publications récentes, compte tenu des intérêts que vous avez exprimés, et si vous pouvez garantir la confidentialité pour ces renseignements, nous serions en mesure de vous fournir une liste de personnes ressources ou de fournir des renseignements aux gens que vous souhaiteriez entendre.

Nous pensons qu'il y a là un excellent débouché, et pas seulement pour la commercialisation d'un tel service et pour la souplesse qu'il offre aux consommateurs. Nous croyons qu'un tel projet offre également un grand degré d'efficacité car les gens cesseront d'envoyer des messages inutiles dans le système, des messages qui ne se rendront pas à leur destinataire, ce qui a en fait des répercussions économiques.

Nous réfléchissons à tout cela et nous avons une vision très claire de la façon dont la Société canadienne des postes peut, à l'avenir, devenir une sorte de «gestionnaire d'annuaire», si l'on veut.

La présidente: Si je vous ai bien compris, vous dites qu'un répertoire des adresses électroniques pourrait servir à envoyer du courrier ordurier?

M. McInenly: C'est exact. Nous nous préoccupons de tout document qui contient ce genre de renseignement. Cela ne touche pas seulement les adresses électroniques. Cela pourrait s'appliquer à tout le reste -- chaque numéro, chaque adresse postale. Nous nous inquiétons toujours des abus qui pourraient survenir si n'importe qui pouvait avoir accès à une telle base de données.

La présidente: Ma question suivante porte sur une observation de notre témoin précédent, au sujet de la rapidité. Elle a dit que, comparativement aux États-Unis, il faut beaucoup plus de temps aux entreprises de détail, aux fournisseurs de produits et de services et aux fournisseurs de commerce électronique du Canada pour qu'ils offrent leurs services en ligne.

On nous a dit entre autres au cours des derniers mois que lorsque les entreprises canadiennes veulent offrir leurs marchandises à des clients à l'étranger, l'expédition des marchandises pose un grand problème à cause de tout ce qui entoure le commerce international. Quelle fonction avez-vous dans ce domaine? Quels services offrez-vous aux détaillants pour contribuer à l'accélération de la mise en ligne des détaillants canadiens?

M. McInenly: Je vais essayer de répondre à cette question. Je sais que mes collègues ont également une opinion à ce sujet. En fait, les deux éléments du commerce électronique auxquels nous pensons le plus souvent portent sur la satisfaction optimale, c'est-à-dire la façon d'amener le produit à destination, et le service de retour. Comment peut-on le récupérer?

Si vous me permettez de m'écarter du sujet un instant, je dirais qu'au Canada, les détaillants ont été lents à pénétrer ce domaine, comme Mme Blank l'a fait remarquer. La Société canadienne des postes est la plus grande entreprise au Canada dans le domaine de la satisfaction optimale dans le commerce électronique. Nous offrons des services à un très grand nombre de détaillants. Nous avons vu leurs entreprises croître et progresser, mais elles diffèrent toutes les unes des autres.

Idéalement, les détaillants qui obtiennent de bons résultats sont ceux qui envoient de petits colis, faciles à transporter et moins susceptibles d'être retournés, comme c'est le cas des disques compacts, des vidéos, des livres et d'autres marchandises de ce genre.

Il en va tout autrement dans d'autres secteurs de la vente au détail, entre autres le vêtement. Les gens de chez Roots nous ont dit récemment qu'ils s'inquiétaient des difficultés qu'ils connaissent, que le commerce électronique est devenu une salle d'essayage virtuelle: les gens commandent la marchandise, l'essaient, constatent que cela ne va pas et retournent le tout -- c'est bien différent des livres et des vidéos.

La présidente: Cela doit être intéressant pour les gens des Postes.

M. McInenly: C'est une bonne source de revenu pour nous, mais ce n'est peut-être pas très économique pour eux. Un grand nombre de sociétés de commerce électronique ont fait faillite au cours des 12 à 15 derniers mois. Nous sommes prêts à collaborer avec des détaillants qui ont eu ce genre de problème. Lorsqu'ils ont fait leurs propres calculs de viabilité, ils ont fait certaines hypothèses au sujet du coût d'exploitation de leur entreprise. Ils ont éliminé certains coûts qu'ils estimaient superflus -- par exemple, la publicité. Ils n'ont pas fait de publicité. Mais comment peut-on savoir que quelqu'un offre un produit en ligne sans publicité? De plus en plus de gens annoncent leurs sites au moyen d'envois traditionnels par la poste, et c'est une aubaine pour nous. Mais cela représente pour eux une dépense supplémentaire importante et imprévue.

Il faut ajouter à cela le coût de l'interface avec le consommateur, et ces entreprises ne s'étaient pas rendu compte qu'elle serait nécessaire. En fait, au lieu de conclure toutes les transactions en ligne, elles ont dû mettre en place des services de lignes de discussion, de téléphonistes et de gens qui connaissent le produit pour combler les lacunes.

Je ne fais pas beaucoup d'achats en ligne. Aujourd'hui, quand je vais dans un magasin, je veux une satisfaction immédiate. Je vois un article et je peux le ramener chez moi. Quand on fait un achat en ligne, il faut parfois quelques jours ou quelques semaines pour l'obtenir. À Noël, l'an dernier, 12 p. 100 des Canadiens qui ont fait des achats en ligne n'ont jamais reçu le produit, et ce n'est pas parce qu'il a été perdu dans le système. Il ne leur a jamais été envoyé car il n'était pas disponible. Les sociétés qui offraient le produit ne disposaient pas du soutien logistique nécessaire. Par comparaison, ce pourcentage n'était que de 6 p. 100 aux États-Unis. Mais dans l'un ou l'autre cas, le pourcentage est bien trop élevé pour une entreprise qui veut réussir dans le commerce électronique.

Nous voulons être accessibles. Nous voulons offrir tout notre réseau à tous les détaillants, mais ils doivent prendre des décisions essentielles sur la façon dont ils veulent participer.

Par exemple, si une entreprise veut que ses produits puissent lui être renvoyés, est-il possible de le faire franc de port, simplement en les mettant dans une boîte aux lettres? Le produit retourne-t-il au point d'origine ou à la boutique de détail la plus près? Ces choix doivent être faits et il faut tenir compte des coûts que cela représente.

Depuis au moins dix ans, je suis l'évolution de l'achat de produits alimentaires en ligne. J'ai examiné les difficultés que cela posait, d'abord aux États-Unis, puis maintenant au Canada. Si vous entendez les représentants de Loblaws, ils vous présenteront un point de vue intéressant.

Les boulangers, les laitiers et les teinturiers ont cessé d'offrir les services à domicile comme quand nous étions jeunes, et il y a une raison à cela. J'ai travaillé dans ces secteurs quand j'étais étudiant en droit et j'ai vu les entreprises fermer leurs portes pour diverses raisons. C'est un problème économique intéressant.

Nous sommes prêts à mettre notre réseau à la disposition d'autant de gens que possible, mais nous ne pouvons pas nous permettre de le faire gratuitement.

La présidente: Offrez-vous des services de courtier, par exemple, pour les entreprises qui vendent à des consommateurs d'autres pays?

M. McInenly: Il faudrait que j'examine la question sous cet angle. Nous nous occupons d'une énorme quantité de courrier qui arrive au Canada. D'une façon générale, nos affaires internationales représentent entre 800 et 900 millions de dollars par année -- en revenus postaux. Une grande partie de cet argent, 65 p. 100, vient des échanges Nord-Sud, entre le Canada et les États-Unis.

Nous avons fait d'énormes efforts pour aider des sociétés comme L.L. Bean et d'autres et faciliter l'accès de leurs produits au Canada. Je m'occupais de ce secteur, il n'y a pas longtemps, et il y avait dans ce domaine des problèmes importants. Les taux de change sont un élément important. Lorsque les gens n'envoient rien, ils ne font pas non plus de publicité, et toutes ces autres choses qui rapportent des revenus.

La présidente: Ma troisième question porte sur un sujet entièrement différent. Trouvez-vous que le nombre total de vos employés a diminué en raison de l'accès aux nouvelles technologies?

M. McInenly: Non. Nous avons rationalisé nos services et réduit le nombre des employés à plein temps et à temps partiel dans notre organisation à partir de 1981, mais tout cela avait peu à voir avec les technologies informatiques dont nous parlons aujourd'hui.

Il est certain que la technologie informatique a des répercussions sur les emplois. Dans l'opinion en évolution que nous avons exprimée aujourd'hui -- et je dis «en évolution» parce que nous en apprenons tous les jours -- ce qui fait la grande différence, dans les entreprises qui font affaires au Canada, et peut-être même dans tout l'Occident, ce sont les connaissances de leurs employés.

Pour vous donner un exemple, chaque fois que nous changeons d'entrepreneur dans un circuit rural ou qu'un de nos livreurs de courrier est malade et que nous devons avoir recours à un suppléant, le service peut être grandement différent, pas simplement en ce qui a trait à la connaissance des rues et des numéros des maisons, mais pour toutes les autres choses que nos employés savent quant aux besoins des gens qui habitent leur région.

Grâce à la gestion de l'information, nos employés sont encore plus importants pour nous que nous l'avions jamais réalisé auparavant. Nous prévoyons que cela va continuer.

La présidente: J'ai un double intérêt dans cette question. Comme vous le savez, dans la première phase du cadre, nous examinons également la question de l'intendance. Puisque votre société est passée du statut d'organisme financé par le Trésor à celui d'organisme indépendant -- une société de la Couronne -- j'ai l'impression que vous avez abordé cette question de l'intendance en ce qui a trait aux nouvelles communications.

L'un de nos témoins a exprimé l'inquiétude suivante: compte tenu de la nouvelle technologie, nous devons examiner sérieusement la façon dont nous cotons nos employés de gestion. Autrement dit, nous avons établi les échelles salariales en fonction du nombre d'employés supervisés et de l'ampleur du budget à gérer, par exemple pour les vice-présidents, les directeurs généraux ou les directeurs. Je suis certaine que M. Hewitt essaie de mener son entreprise avec aussi peu d'employés que possible, mais on s'attend à autant de résultats de sa part que de la part d'une autre personne à votre niveau.

A-t-on réfléchi à cela dans la planification stratégique de l'intendance à la Société canadienne des postes?

M. McInenly: On y a réfléchi beaucoup et constamment.

Notre entreprise n'est pas si différente des autres. Je vais essayer de vous l'expliquer aussi objectivement que possible. Nous essayons d'équilibrer les coûts de nos services avec les recettes qu'ils nous rapportent. Si nous étions dans le secteur privé, nous constaterions que nos employés, nos syndicats, nos gestionnaires, notre conseil d'administration et nos actionnaires travailleraient tous vers un objectif commun: la survie économique de l'entreprise.

Lorsque c'est le gouvernement du Canada qui est actionnaire, l'équation est à peu près la même, à cela près que le gouvernement du Canada obtient la valeur économique à partir d'une assise beaucoup plus étendue. Nous ne parlons pas vraiment de dividendes mais plutôt d'endroits, d'accès, de nombre d'employés, et cetera.

Notre travail de gestionnaires à la Société canadienne des postes consiste à appliquer la politique du gouvernement et à équilibrer tout cela de façon à ce que nous ayons des revenus suffisants pour satisfaire les attentes légitimes de notre actionnaire. C'est notre travail à plein temps.

Nous avons été prudents dans l'approche que nous avons adoptée envers nos employés. Nous avons été prudents dans notre approche relativement à la présence physique, et cetera. Nous sommes également devenus prudents quant à l'image que nous projetons dans la société en général.

C'est ce que j'expliquais tout à l'heure au sénateur Finestone, au sujet de l'équilibre que nous essayons d'obtenir. Pour nous, c'est essentiel, et nous comprenons cela mieux que la plupart des gens au Canada.

Le sénateur Finestone: Pour répondre à votre question, madame la présidente, M. McInenly discutait de la relation entre les clients et le consommateur. Il y a des consommateurs des deux côtés de l'équation. Il faut satisfaire toutes les parties et faire preuve d'une grande prudence dans le traitement des renseignements qui sont recueillis.

Vous avez dit que vous aviez surveillé X, Y et Z pendant 10 ans; disons-le comme cela. Pendant que vous observez, vous obtenez des renseignements. Ces données pourraient-elles être mal utilisées? La propriété intellectuelle ou les documents de gestion pourraient-ils être volés? Est-on conscient de ce qu'il faut tenir compte du client, de ce que vous devez vous en soucier et le fait-on? M. Power semble l'avoir l'exprimé autrement, mais je me suis posée la question après avoir entendu vos remarques.

M. McInenly: Oui. Pour avoir une bonne stratégie, il faut avoir de bonnes données. Pour nous, ces bonnes données viennent surtout de deux sources. Nous pouvons examiner l'économie en général et nous interroger sur l'état du PIB, sur le nombre de maisons mises en chantier et le nombre de voitures qui sont fabriquées. Nous allons chercher ces renseignements.

Les renseignements que nous obtenons de nombreux intervenants sont également importants. Il s'agit du gouvernement du Canada, à titre d'actionnaire, du Conseil du Trésor et du ministère des Finances, à titre d'organisme de réglementation, de notre propre conseil d'administration, de nos clients, qui sont les seuls consommateurs avec lesquels nous sommes en rapport -- les grands détaillants et les principales institutions financières, et cetera. Il s'agit aussi de nos employés, des syndicats, des filiales et des cadres supérieurs. Ils sont tous des intervenants. Nous recueillons ce qu'ils nous disent au sujet de leurs problèmes et de leurs attentes et nous constituons à partir de tout cela une base de données. Nous essayons d'élaborer de bonnes stratégies qui tiennent compte, dans toute la mesure du possible, de la plupart de leurs intérêts et de leurs préoccupations.

Les choses évoluent rapidement. La rapidité de cette évolution nous touche à de nombreux égards. Vous avez dit tout à l'heure que lorsque les gens deviennent plus innovateurs, ils nous posent de nouvelles difficultés du point de vue de la sécurité.

Je répondrai à cela que nous faisons non seulement ce que la Société canadienne des postes fait depuis 100 ans, mais aussi ce que font d'autres administrations postales depuis des siècles: nous adoptons les nouvelles technologies et nous les adaptons aux besoins de nos clients. Quand on parle de sécurité, il ne s'agit pas d'utiliser des systèmes de chiffrement à 128 bits. Nous faisons de notre mieux pour le moment. Lorsqu'il y aura des progrès, nous les mettrons à profit.

Lorsque l'ICP, l'infrastructure à clés publiques, sera mise en place, nous ferons notre part, de nouveau du point de vue de M. Power, pour aider les consommateurs et les entreprises à savoir avec qui ils traitent.

Nous faisons de notre mieux, même s'il existe des limites à la rapidité avec laquelle nous pouvons nous adapter au progrès. Nous croyons que nous faisons du bon travail.

Le sénateur Finestone: Vous êtes une grande entreprise.

La présidente: Merci à nos témoins. Si nos attachés de recherche ont d'autres questions à poser, je suppose qu'ils peuvent communiquer avec vous, monsieur Power.

M. Power: Oui, bien sûr.

La séance est levée.


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