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Sous-comité de mise à jour de "De la vie et de la mort"

 

Délibérations du sous-comité de
mise à jour de «De la vie et de la mort»

Fascicule 7 - Témoignages


OTTAWA, le mardi 21 mars 2000

Le sous-comité de mise à jour de «De la vie et de la mort» du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui, à 10 h 02, en vue d'étudier les faits nouveaux survenus depuis le dépôt, en juin 1995, du rapport final du comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et l'aide au suicide intitulé: «De la vie et de la mort».

Le sénateur Sharon Carstairs (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente: Honorables sénateurs, aujourd'hui marque le septième jour des audiences tenues dans le cadre de notre mandat visant à mettre à jour les recommandations unanimes du rapport du comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et l'aide au suicide intitulé: «De la vie et de la mort».

Je vous rappelle, de même qu'aux témoins et à ceux qui suivent nos audiences, que le sous-comité ne reprend pas le débat sur l'aide au suicide et l'euthanasie. Il se concentre uniquement sur les parties du rapport où le comité initial avait des recommandations unanimes. Je vous demanderais de ne pas l'oublier.

Nous entendrons aujourd'hui deux groupes de témoins. Il s'agit de l'Association catholique canadienne de la santé et du Barreau du Québec. Bienvenu. Je rappelle à nos témoins qu'ils disposent d'au plus 15 minutes pour présenter leur exposé. Je vous laisse la parole.

[Français]

S<#0139>ur Annette Noël, vice-présidente, conseil d'administration, Association catholique de la santé: L'Association catholique canadienne de la santé est une association chrétienne nationale. Elle soutient des soins de santé dans la tradition de l'église catholique romaine. Elle est donc la voie nationale des soins de santé catholiques, capable de promouvoir la santé sous toutes les dimensions de la personne humaine, soit physique, émotionnelle, spirituelle et sociale. L'association encourage toute activité pour promouvoir le bien-être, la prévention et la guérison.

Parmi nos membres, nous comptons 8 associations provinciales, 34 membres propriétaires d'organismes de soins de santé, 127 hôpitaux et centres de soins de longue durée et d'hébergement, des professionnels de la santé, des organismes et des membres affiliés.

Plusieurs de nos hôpitaux et centres sont activement impliqués dans des soins en fin de vie et offrent des services en soins palliatifs. L'association a articulé des normes d'éthique en soins de fin de vie. Elles sont insérées dans un guide d'éthique à la santé publié par l'association. Nous avons des versions bilingues de ce chapitre des soins en fin de vie.

Nous avons déjà comparu en tant qu'association devant un comité spécial du Sénat en 1994 lorsque nous avons traité de l'euthanasie et du suicide assisté. Nous apprécions énormément cette opportunité de nous présenter devant ce comité du Sénat pour la mise à jour d'un thème qui nous est cher, la vie et la mort.

La science et la technologie modernes font en sorte que nous sommes mieux habilités pour guérir la maladie, soulager la souffrance et prolonger la vie. Cela est merveilleux. Cela implique de grandes questions éthiques, surtout en ce qui concerne des soins en fin de vie. C'est dans ces situations et face à de telles questions que l'association voit la nécessité de maintenir un équilibre entre deux obligations importantes.

D'une part, personne ne peut enlever la vie de façon intentionnelle à une autre personne. Par conséquent, l'euthanasie et le suicide assisté ne peuvent être considérées des options, car elles sont inacceptables. D'autre part, nous ne sommes pas obligés de maintenir des procédures qui prolongent inutilement la vie, des procédures qui imposeraient un fardeau à l'individu ou à la famille, sans aucun bénéfice de vie aux personnes.

Suite à ces considérations, je laisse maintenant la parole au docteur Latimer qui poursuivra cette réflexion.

[Traduction]

La docteure Elizabeth Latimer, professeure, département de médecine familiale, Université McMaster; témoin, Association catholique canadienne de la santé: Permettez-moi de dire d'emblée que c'est un honneur pour moi de venir vous rencontrer. J'ai eu le plaisir de témoigner devant vous en 1994 et j'ai le privilège aujourd'hui de représenter l'Association catholique canadienne de la santé.

Au nom de l'association et en mon nom propre, je tiens à vous féliciter de l'examen que vous faites de ces questions dans le cadre d'une mise à jour. Nous sommes très encouragés de ce que vous continuez de vous intéresser à ces questions et je vous demande de continuer à vous y intéresser à l'avenir.

Nous avons intitulé notre mémoire «Une question de chance?». Nous avons choisi ce titre pour illustrer le fait très important qu'à l'heure actuelle, les soins aux mourants, au Canada, sont dans une très grande mesure une question de chance. Nous aimerions vous en donner un exemple.

Dans le mémoire qui vous a été présenté, à la page 4, je vais commencer par vous donner les points saillants des soins offerts à une femme du nom de Mme J.H., âgée de 63 ans, qui souffre d'une maladie cardiaque en phase terminale au Canada. Cet exemple montre en quoi Mme J.H. est chanceuse dans les soins de fin de vie qui lui sont dispensés.

Je sais que vous aurez l'occasion de lire notre mémoire plus tard, mais en résumé, Mme J.H. reçoit des soins d'un cardiologue qui est capable de discuter avec elle, qui peut lui prescrire des médicaments pour ses problèmes respiratoires, ses problèmes de suffocation et ses problèmes cardiaques en phase terminale. Ce cardiologue l'aide à prendre des décisions. L'hôpital où elle reçoit des soins possède une équipe pluridisciplinaire de soins palliatifs qui participe à son traitement.

Mme J.H. continue d'avoir de la chance. Les services communautaires de soins à domicile de sa localité n'ont pas trop souffert des compressions budgétaires ni de la restructuration des soins de santé au Canada. En outre, sa collectivité accorde un degré de priorité élevé aux besoins en matière de soins palliatifs. Cela permet à Mme J.H. d'obtenir des services à domicile. Son médecin de famille a également reçu une formation en soins palliatifs et souhaite offrir ce genre de soins à ses patients à domicile.

Sa localité a également conçu et financé un programme interinstitutionnel de soins palliatifs qui permet d'offrir ces soins dans divers milieux. Cela permettra à Mme J.H. d'être admise dans une unité de soins palliatifs de fin de vie, si elle en a besoin. Grâce aux soins qu'elle peut recevoir à domicile, à un bon médecin de famille, à une sensibilisation générale de son milieu aux soins palliatifs et au financement d'une équipe de soins palliatifs qui peut aider son médecin de famille dans les soins à domicile, Mme J.H. peut retourner chez elle. Elle y demeure pendant trois semaines et reçoit d'excellents soins.

Lorsque ses problèmes respiratoires s'aggravent, et dans une maladie cardiaque en phase terminale, ces problèmes peuvent aller jusqu'à la suffocation, Mme J.H. devient agitée et commence à délirer. Elle doit être admise dans une unité de soins palliatifs. Cela lui est possible grâce aux dispositions qui ont été prises et à l'existence des installations nécessaires.

À la page 5, vous pouvez voir que les éléments de sa «chance» sont également liés à la nature de sa maladie. À l'heure actuelle, au Canada, les soins palliatifs sont très souvent associés aux cancéreux. Aux fins de notre mémoire, c'est à dessein que j'ai choisi le cas d'une dame souffrant d'une maladie cardiaque en phase terminale de façon à pouvoir répéter qu'un grand nombre de gens qui auraient besoin de soins palliatifs de fin de vie ne reçoivent pas ces soins parce qu'ils souffrent d'une autre maladie. Le principal médecin de l'équipe de soins de santé primaires de Mme J.H. était un cardiologue; elle a néanmoins reçu les soins de bon nombre de médecins sensibilisés aux soins palliatifs.

J'ai déjà parlé du lieu de traitement. Les localités ont besoin des installations nécessaires.

Les gens ne peuvent recevoir de soins palliatifs que s'il existe des programmes pour cela. Dans une vaste majorité de localités canadiennes, il n'existe pas de programmes et les soins nécessaires ne sont pas dispensés.

Mme J.H. reçoit des soins de médecins responsables qui continueront de s'occuper d'elle.

Nous continuons notre explication à la page 6 de notre mémoire, entre autres au numéro 3, où nous parlons de soins et de compétences en soins palliatifs qui peuvent être dispensés à domicile.

À la page 7, nous vous présentons un scénario complètement différent. Si nous éliminions les cinq éléments principaux, listés à la page 5, des soins dispensés à Mme J.H., le tableau serait entièrement différent. Le contrôle des symptômes serait inefficace et les soins seraient fractionnés. Par exemple, elle ne pourrait recevoir certains soins si elle n'avait pas des médecins et une équipe de soignants sensibilisés aux soins palliatifs. S'il n'existait pas d'unité de soins palliatifs, elle aurait probablement dû retourner aux urgences, ses symptômes n'auraient pas reçu de soulagement et elle serait probablement morte dans une salle d'urgence, dans un milieu contraire à ses besoins.

Passons maintenant à la page 8. On y trouve la liste de nos recommandations sous six rubriques, dont la première est intitulée Soins dispensés aux patients et à leur famille. Pour nous, c'est le principal problème au Canada. Nous y mentionnons un certain nombre d'arguments, y compris le fait que 75 p. 100 des Canadiens meurent encore dans des établissements, que les services ou bien n'existent pas, ou bien sont ridiculement sous-financés.

La restructuration et les compressions effectuées dans les hôpitaux de tout le Canada ont également provoqué une réduction des services de soins de santé -- des services qui au départ n'ont jamais été suffisamment financés. Ainsi, les chirurgiens et les autres services des hôpitaux seraient heureux de disposer d'autres outils pour pouvoir offrir aux patients requérant des soins palliatifs les services nécessaires dans un environnement adapté à leurs besoins.

Les programmes coordonnés sont encore trop rares. Aucune province canadienne n'a encore adopté de politique en matière de soins palliatifs ni ne finance de façon suffisante ce genre de soins. Comme nous l'indiquons, on dispense parfois des services partiels de soins palliatifs, mais ces soins sont insuffisants pour les patients.

Dans les mesures que nous recommandons, nous préconisons que le fédéral et les provinces élaborent une politique de services de soins palliatifs et avancent les fonds nécessaires à ces services. Nous croyons que toutes les localités du Canada, qu'elles soient urbaines ou rurales, devraient disposer de programmes de soins palliatifs. Nous croyons également que les normes de soins palliatifs que l'Association canadienne des soins palliatifs est en train d'élaborer devraient être adoptées et appuyées à tous les niveaux, depuis les ministères de la Santé jusqu'aux hôpitaux en passant par les établissements de soins communautaires et de longue durée.

Nous souhaitons également que ces normes soient une composante obligatoire du processus d'accréditation des hôpitaux au Canada. Nous souhaitons que soient supprimés les obstacles qui nuisent à des soins palliatifs de bonne qualité. Ces obstacles varient d'une collectivité à l'autre et d'un organisme à l'autre, mais grâce à la planification conjointe d'un programme, chaque centre doit identifier les obstacles qui empêchent d'offrir des soins efficaces.

Permettez-moi de passer maintenant à nos autres recommandations, à la rubrique Éducation. Les recommandations qui se trouvent dans notre mémoire sont également dans ces transparents. Comme on vous l'a dit, il existe 16 écoles de médecine au Canada. Une ou deux de ces écoles offrent une formation minimale en soins palliatifs. Les autres ne l'enseignent pas. Nous recommandons que tous les étudiants du domaine médical reçoivent des cours de soins palliatifs, lorsqu'ils étudient au premier cycle, et lorsqu'ils reçoivent leur formation en résidence. Un enseignement semblable devrait être dispensé aux infirmiers et infirmières et autres professionnels de la santé. C'est essentiel si l'on veut faire des progrès dans les soins de fin de vie au Canada.

Nous voudrions aussi que les principaux ordres des professions de la santé, à l'échelle tant nationale que provinciale, établissent une norme minimale de connaissances et de formation relative aux soins palliatifs de fin de vie à laquelle tous les stagiaires et tous les médecins en exercice devraient satisfaire.

En ce qui a trait à la recherche, nous vous invitons à lire ce que nous disons dans le mémoire. Je me contenterai de souligner que nous appuyons et préconisons la recherche qui, à notre avis, découle naturellement de programmes cliniques efficaces et complets. En outre, les organismes de financement ont besoin d'appui et d'encouragement pour ce qui est de financer la recherche dans ce domaine.

Notre position sur les directives préalables concernant les soins de santé se trouvent détaillées aussi dans notre mémoire. Ces directives sont importantes. Elles ne sont pas une garantie de soins de qualité, loin de là; leur principale contribution est peut-être d'encourager les malades à discuter avec leurs familles, même de façon informelle, de ce qu'

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