Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Droits de la personne
Fascicule 5 - Témoignages du 10 décembre 2001
OTTAWA, le lundi 10 décembre 2001
Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne se réunit aujourd'hui à 14 h 40 pour considérer un projet de rapport et pour étudier diverses questions ayant trait aux droits de la personne et examiner, entre autres choses, les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne.
Le sénateur A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Honorables sénateurs, je vous rappelle qu'aujourd'hui, c'est la Journée internationale des droits de l'homme. C'est le jour où nous devons nous rappeler de nos obligations internationales en vertu de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Je suis très heureuse que nous nous réunissions publiquement pour discuter d'un projet de rapport rédigé par le comité.
À l'intention de ceux et celles qui nous regardent à la télévision, le comité du Sénat auquel nous siégeons est nouveau, il a été établi en mars et c'est le premier comité chargé exclusivement de traiter des questions ayant trait aux droits de la personne. Notre première étude nous a conduits à faire un examen aussi vaste qu'approfondi de questions qui concernent les droits de la personne. Nous avons voulu présenter immédiatement des recommandations et cerner les questions qui nécessiteront une étude plus précise.
Plus tard, nous entendrons les représentantes des Commissions des droits de la personne du Manitoba et de la Saskatchewan.
Chers collègues, vous avez certainement reçu une version révisée du rapport dont nous avons discuté la semaine dernière. Les changements qui ont été apportés ne sont que des corrections mineures qui reflètent des observations qui m'ont été faites, et des révisions du texte dans les deux langues.
Jusqu'ici, aucun de ces changements n'est substantiel. Toutefois, nous avons aujourd'hui l'occasion de discuter de ce que nous souhaiterions ajouter au rapport.
Le rapport intègre la plupart des observations qui ont été faites. Il y a en outre un commentaire du sénateur Wilson qui pourrait être considéré comme substantiel, et le sénateur Finestone va peut-être aujourd'hui soulever certains points qui n'ont pas été portés à mon attention ni à celle du greffier ou de l'attaché de recherche.
Une de nos recommandations porte sur la personne qui sera, à titre opérationnel, le chef des délégations à la prochaine Commission des droits de l'homme des Nations unies. Habituellement, c'est le ministre des Affaires étrangères ou un ministre qui est le chef en titre de la délégation, et nous ne recommandons pas de modifier cela. Toutefois, nous recommandons que la personne qui sera, à titre opérationnel, le chef de la délégation ait le rang d'ambassadeur et soit un haut fonctionnaire qui aura le poids que donne la conscience de la responsabilité dont le gouvernement canadien le chargera.
Le sénateur Wilson a fait une observation qui, à mon avis, est très utile. Nous en avons discuté, même si nous ne savions pas réellement quelles sont les règles qui doivent s'appliquer. Elle a dit que l'on devrait prévoir une délégation de parlementaires où seront représentés les deux Chambres et tous les partis, et qui pourra participer à la Commission pendant un certain temps. Nous n'avons pas fait revenir les fonctionnaires pour déterminer quelle était exactement leur position à ce sujet. Étant donné que nous avons un nouveau ministre qui a eu beaucoup à faire, notamment avec le projet de loi C-36, c'est une recommandation très utile, mais je ne suis pas sûre que nous puissions l'étayer convenablement pour l'intégrer dans le rapport.
J'ai demandé au sénateur Wilson si elle acceptait que la présidente et la vice-présidente écrivent une lettre au ministre pour lui dire qu'à notre avis, il serait dans l'intérêt du Canada qu'une délégation représentant tous les partis soit impliquée dans les travaux de la Commission des droits de l'homme des Nations unies pendant un certain temps.
Pour les parlementaires, ce serait une excellente expérience éducative qui leur donnerait aussi l'occasion de rencontrer leurs homologues du monde entier. Il est important que le Canada fasse représenter son Parlement auprès de la Commission.
La prochaine Commission des droits de l'homme des Nations unies aura une grande importance étant donné les récents agissements terroristes. On y discutera des retombées de ce qui se passe en Afghanistan et des mesures prises dans de nombreux pays qui modifient la donne en ce qui concerne les droits de la personne.
Ainsi, donc, la Commission des droits de l'homme des Nations unies se penchera sur de nombreuses questions fondamentales. Non seulement est-il nécessaire de déléguer quelqu'un qui aura le rang d'ambassadeur, un point qu'a toujours fait valoir le sénateur Finestone, mais il faut également s'assurer que des parlementaires participent aux débats.
Avec l'accord du sénateur Wilson et compte tenu des observations que pourront faire les autres sénateurs, j'aimerais régler la question en envoyant une lettre au ministre pour lui transmettre notre suggestion. De cette façon, elle lui sera présentée directement. Il peut répondre et dire: «C'était ce que j'envisageais de toute façon» ou «Comment suggérez-vous de procéder?» Nous pourrions régler la chose de cette façon, plutôt que d'essayer de modifier le rapport maintenant.
Le sénateur Finestone: Je plaisante, mais je me demande si, dans la lettre au ministre, vous ne devriez pas dire: «Pourriez-vous d'abord consulter le whip?»
[Français]
Ce n'est pas un ministre qui dirige les travaux de la Chambre et les personnes en Chambre. C'est le «whip» et le leader en Chambre qui décident quand ils ont besoin de quelqu'un ou de quelque chose, parce qu'on doit soumettre certains projets de loi au vote, non?
[Traduction]
Je sais qu'à un moment donné, on envoyait des délégués pendant trois semaines, au cours d'une période où il ne devait pas se passer grand chose à la Chambre ou quand les gens n'étaient pas impliqués dans un processus législatif en marche. On ne peut pas suggérer que des députés s'absentent pendant longtemps lorsque la Chambre siège et qu'ils ont des responsabilités vis-à-vis leurs commettants dont ils doivent se décharger. Il faut que vous vous rendiez dans votre circonscription au moins une fois par semaine pour rencontrer vos électeurs. Il y a des gens qui vous ont appelé au téléphone et que vous devez rappeler. Il est important de se montrer efficace. Lorsque nos travaux n'entrent pas en conflit avec ceux des Nations unies, nous pourrions être efficaces, nous pourrions participer pendant une semaine à la fois à quelques mois d'intervalle.
Je ne vois pas comment on pourrait procéder autrement. C'est mon avis personnel. J'aurais été ravie d'avoir une telle possibilité, comme tout le monde ici, mais je ne sais pas dans quelle mesure c'est faisable.
Le sénateur Wilson: C'est très bien de vouloir consulter les whips, mais les indépendants sont automatiquement exclus de ce processus. C'est important. Nous avons été tellement exclus du processus, que dans ce cas, je refuse d'abandonner. Je parle sérieusement.
J'étais là-bas en juin dernier avec un député du NPD et un autre du Parti libéral. Nous ne sommes restés que quatre jours, mais l'expérience a été extrêmement utile pour moi, pour comprendre comment cela fonctionne. Il n'est pas nécessaire de rester longtemps, mais c'est essentiel. C'était il y a deux ans, lorsque le ministre était M. Axworthy. Je ne sais pas si M. Manley continue à faire ce genre de chose.
Je souhaiterais qu'on le presse de le faire. S'il y a une possibilité de présenter une recommandation ferme à l'avenir, nous ne devrions pas la laisser passer.
La présidente: Si nous soulevons la question dans une lettre, le ministre la recevra directement et il devra prendre des dispositions en conséquence. J'espère que nous aurons une réponse favorable. S'il s'avère nécessaire que le comité revienne sur la question plus tard, nous pouvons le faire, mais s'il y a quelque chose en marche, le ministère ou le ministre peuvent nous en aviser, étant donné que nous avons attiré leur attention sur ce point.
Le sénateur Wilson: Par exemple, il y a une semaine en mars pendant laquelle nous ne siégeons pas.
La présidente: Vous avez dit que vous souhaitez que les indépendants soient impliqués, quant au sénateur Finestone, elle souhaite que les whips interviennent. Nous pouvons dire dans notre lettre qu'il y a des gens bien informés et engagés que cela intéresse. Il y a un côté technique, et il faut avoir certains antécédents pour pouvoir suivre. Je peux comprendre pourquoi les quatre jours passés par le sénateur Wilson à la Commission ont été utiles, parce qu'elle avait les antécédents nécessaires. Le sénateur Finestone et de nombreux sénateurs, après avoir siégé au comité, seraient fort bien préparés, et la question de temps n'entrerait pas en ligne de compte. Ce serait une bonne chose si nous pouvions faire une lettre au ministre pour lui exposer ces idées.
Le sénateur Wilson: Attention, parce qu'habituellement, de telles lettres sont envoyées aux whips.
La présidente: Elle serait adressée au ministre Manley.
Le sénateur Wilson: Je vous demanderais de bien vouloir inclure les indépendants, en citant des noms, le cas échéant.
Le sénateur Beaudoin: Le sénateur Wilson a raison.
Le sénateur Finestone: Madame la présidente, c'est très bien à condition de ne pas dire «pendant de longues périodes». Si on parle d'une semaine complète à la fois, ou de quelque chose du genre, cela indique que l'on ne s'attend pas à ce que les délégués soient absents pendant trois mois.
À propos, il est intéressant de noter que dans le sommaire des recommandations, le premier point a trait à l'envoi d'une lettre au ministre Manley. C'est bien.
Le sénateur Joyal: Dans le sommaire des recommandations, à la page 3, troisième ligne, on dit qu'il est nécessaire de veiller à ce que l'on envoie auprès de la Commission une délégation canadienne de premier plan. Le mot «canadienne» pourrait couvrir les parlementaires, mais également les ONG ou les gouvernements provinciaux, et cetera. Le mot «canadienne» est général. Les membres du comité ont-ils l'intention de décrire plus précisément la délégation?
La présidente: Lorsque le rapport a été rédigé, nous avons dit que nous voulions une délégation canadienne de premier plan qui ne serait pas nécessairement composée uniquement de parlementaires et de bureaucrates. Le gouvernement devrait songer à inclure des représentants des ONG.
Le sénateur Joyal: L'expression «de premier plan», si j'en crois ce que vous-même avez déclaré, signifie que vous souhaitez une délégation comprenant des gens qui ont certains antécédents ou une certaine expérience dans le domaine des droits de la personne. Si vous nommez ou si vous choisissez des députés pour faire partie de la délégation, ce devrait être des parlementaires des deux Chambres, dont les antécédents démontrent un intérêt pour les droits de la personne, et non des gens dont le nom est inscrit sur la liste parce qu'ils souhaitent voyager.
Nous devrions définir ce que veut dire pour nous l'expression «de premier plan». Cela n'a pas de connotation quantitative et ne signifie pas «nombreuse», comme la délégation canadienne à Durban, l'été dernier. Apparemment, il y avait 350 personnes qui venaient de tous les milieux. Est-ce ce que vous voulez dire par «de premier plan?». On devrait préciser. Autrement, c'est tellement général qu'on peut l'interpréter comme on veut.
La présidente: Avez-vous un autre énoncé que nous pourrions intégrer à cet endroit?
Le sénateur Joyal: Comme vous l'avez dit, ce devrait être des gens qui ont été activement impliqués dans des dossiers concernant les droits de la personne. C'est facile à définir, et c'est ce que nous voulons. Je ne suis pas membre du comité, mais c'est ce que je déduis des interventions qui ont été faites lors des audiences.
La présidente: Est-ce que l'expression «bien informé des questions touchant les droits de la personne» répond à vos préoccupations?
Le sénateur Joyal: Je suggère d'utiliser les mots «actif et informé».
Le sénateur Wilson: Cet énoncé peut-il être modifié?
La présidente: Nous avions l'intention, dans la lettre, de suggérer que des parlementaires fassent partie de la délégation. Êtes-vous d'accord pour que nous procédions ainsi? Êtes-vous d'accord pour que la présidente et la vice-présidente soient chargées d'écrire cette lettre et de la transmettre?
Des voix: D'accord.
La présidente: Nous avons convenu d'incorporer les idées qui ont été exprimées jusqu'ici. C'était là le seul point substantiel qui n'avait pas été réglé et qui n'est pas mentionné dans notre rapport.
Le rapport a été rédigé compte tenu de deux choses. Premièrement, nous avons entendu un certain nombre de témoins dont le rôle est d'examiner et d'étudier les questions concernant les droits de la personne ainsi que les mécanismes connexes, ou qui s'intéressent de près à ces questions. Ils nous ont donné leur avis.
Deuxièmement, le rapport tient compte du fait que, malheureusement, nous allons perdre notre vice-présidente. Cela n'a rien à voir avec ses capacités, vu sa contribution certes magistrale, mais il y a une règle qui veut que les sénateurs prennent leur retraite à 75 ans. Nous pourrions arguer que c'est une règle qui met en cause les droits de la personne, mais bref, j'ai pensé qu'il serait approprié de publier notre rapport en temps opportun. Je voulais que ce soit fait avant le départ du sénateur Finestone. J'aimerais que ce principe soit acquis.
Le rapport se fonde sur les témoignages rassemblés par notre attaché de recherche et touche les domaines que nous avons pu étudier. Qu'est-ce que les témoins nous ont dit? De quoi avons-nous discuté nous-mêmes? Si vous jetez un coup d'oeil à la fin du rapport, vous verrez que les questions à examiner plus à fond y sont énumérées. Elles sont présentées de façon générale, même si elles ne sont peut-être pas énoncées comme certains d'entre nous l'auraient souhaité. Quoi qu'il en soit, c'est simplement pour signaler des questions qui nous préoccupent.
Page 31, on cite comme sujet à examiner plus à fond: le Canada et les organismes chargés de traités sur les droits de la personne. Cela touche tout le domaine de la contribution de la société canadienne à la préparation des nouveaux pactes que peut signer le gouvernement, la façon dont nous mesurons le rendement et les progrès du Canada en ce qui concerne les droits énoncés dans la convention, et la manière dont est élaborée la réponse du gouvernement aux rapports du Comité des Nations unies.
Tout le domaine de la préparation des rapports transmis aux organismes internationaux et des suites à donner a suscité beaucoup de discussions et un grand intérêt de la part de nos témoins et des divers sénateurs autour de la table. C'est une question que nous envisagerions volontiers d'examiner.
Autre question à approfondir: le Parlement et le processus de conclusion de traités, ce qui touche le système fédéral-provincial et l'autorité du pouvoir exécutif de signer et de ratifier des conventions. Pour certains témoins, nous souffrons de ce qu'ils ont appelé un «déficit démocratique», et nous ne savons pas grand-chose des traités que signe le gouvernement.
On nous demande d'examiner la législation habilitante, et peut-être que nous ne sommes pas bien équipés au Parlement ou à titre de citoyens pour le faire. En Australie, par exemple, on contacte le public, du moins les gens qui sont directement concernés, pour leur demander leur avis sur certains domaines et certains sujets lorsqu'on envisage de signer une convention. D'autre part, le Parlement a un rôle à jouer dans la mesure où il étudie les projets de loi et donne son avis au gouvernement, avant que ce dernier signe et ratifie quoi que ce soit.
Mais ce n'est là qu'un exemple des modifications récentes touchant des questions constitutionnelles. Plutôt que de dire que nous examinons certaines questions constitutionnelles - nous n'avons entendu aucun des témoins le dire - ce rôle devrait être attribué aux parlementaires et l'on devrait sensibiliser les ONG. Mais en premier, je vais passer les questions en revue.
Autre question à approfondir: la mise en oeuvre législative des instruments internationaux en matière de droits de la personne. Il s'agit de passer en revue les lois qui sont proposées pour s'assurer qu'elles sont conformes aux droits de la personne. Nous voulons nous assurer que les lois canadiennes s'inscrivent dans le cadre des mécanismes mis en place au Canada et de nos obligations internationales en matière de droits de la personne.
Ensuite vient la question des droits internationaux de la personne et du fédéralisme canadien, un sujet qui se passe d'explication.
Ensuite, il y a la question des traités sur les droits de la personne qui n'ont pas encore été signés ou ratifiés par le Canada. On nous a fait remarquer que le Canada n'avait pas encore signé ou ratifié certaines conventions. Peut-être existe-t-il des raisons convaincantes démontrant que le Canada ne devrait pas les signer ou devrait exprimer des réserves avant de les signer. C'est tout simplement que ni le Parlement ni la population ne peuvent intervenir pour modifier le statut de ces conventions. Parfois, on nous blâme à tort. Il serait bon de passer ces traités en revue, de faire une mise à jour et au moins, d'obtenir les avis les plus éclairés sur ceux qui n'ont pas encore été signés.
On a beaucoup discuté au comité de la participation du Canada à la Convention américaine relative aux droits de l'homme. Le Canada est devenu membre de l'OEA, mais n'a pas signé la Convention américaine relative aux droits de l'homme. Certains ont avancé l'idée que, pour aller jusqu'au bout de ses engagements, le Canada devrait signer la Convention. On a dit que nous pourrions alors avoir une influence salutaire sur bien d'autres nations et aider d'autres pays signataires, parce que nous sommes dotés de mécanismes plus avancés en matière de droits de la personne.
Enfin, une dernière question qui reste à approfondir est celle du droit à la vie privée. Je n'ai pas besoin d'en dire plus.
On peut trouver des détails sur toutes ces questions aussi bien dans notre rapport que dans les procès-verbaux de nos réunions qui donnent le compte rendu des témoignages que nous avons entendus.
Je peux vous assurer, chers collègues, que nous ne prendrons pas de décision aujourd'hui sur ces questions. Nous disons simplement qu'il s'agit de questions qui ont été portées à notre attention et qui peuvent faire l'objet d'une étude plus approfondie, et que nous pouvons les examiner, ainsi que d'autres, plus tard. Lorsque nous en aurons terminé avec l'étape qui est encours, nous nous pencherons sur ces questions pour déterminer si une étude plus approfondie est possible, nous élaborerons un plan d'action et nous le chiffrerons avant de faire quoi que ce soit. Ces questions seront à nouveau portées à l'attention du comité qui pourra choisir celles qu'il veut étudier, déterminer celles qui, à son avis, ne sont pas de son ressort et décider dans quel ordre il souhaite les analyser. Il s'agit des questions à approfondir.
Le sénateur Finestone: Je suis heureuse de lire les observations que vous avez faites dans le rapport. Je vous félicite, vous et vos collaborateurs. À l'évidence, cela représente de nombreuses heures de travail ardu et une organisation soutenue. Nous n'aurions jamais pu intégrer nos modifications si vous n'aviez pas su les exprimer de façon aussi succincte et organisée.
Même si j'ai quelques réserves à propos de l'importance de la date butoir que vous avez fixée, le 31 mars 2002, ce qui me préoccupe davantage, c'est le principe, la politique et le suivi. Je suis convaincue que notre comité devrait suivre de près les travaux du Comité permanent de hauts fonctionnaires sur les droits de la personne et de la table ronde des ministres. Je pense que dans le rapport, il est noté que les ministres ne se sont pas rencontrés depuis 13 ans.
La présidente: Nous avons recommandé une telle rencontre.
Le sénateur Finestone: Je sais. Le comité doit chercher des moyens de s'informer sur ce qui se passe au niveau de l'exécutif. Au niveau du pouvoir exécutif, il y a une table ronde ministérielle inefficace, qui ne se réunit pas pour discuter des problèmes que posent les droits de la personne à l'échelle nationale ou internationale. Les ministres ne donnent pas au Comité permanent de hauts fonctionnaires les réponses dont il a besoin pour remplir les obligations de notre gouvernement. Les ministres provinciaux chargés des droits de la personne ont été évincés. Par conséquent, nous n'avons aucun moyen de savoir ce que les bureaucrates font, ni comment ils élaborent leur rapport, et encore moins ce qu'ils mettent dans ce rapport.
Si les ministres ne se réunissent pas, comment savoir s'ils ont quelque chose à dire à propos des rapports qui sont transmis aux tribunaux internationaux des droits de la personne ou aux comités qui les exigent? Je pense que la section B devrait être un peu étoffée. Il faut qu'elle reflète l'idée que, au nom du Parlement, le comité doit être au courant de ce qui se passe. Il se pourrait que nous ne respections pas la date butoir de mars 2002. J'espère que ce ne sera pas le cas, mais c'est possible. Quoi qu'il en soit, nous avons formulé une recommandation indiquant dans quelle direction nous souhaitons que s'oriente ce comité et quelles devraient être les responsabilités du Comité permanent de fonctionnaires.
La présidente: Je vous remercie de vos commentaires sur le rapport. Cela n'a pas été facile. Vous comprenez, les ressources sont rares. Notre attaché de recherche et notre greffier, qui ont eu par ailleurs à faire face à d'autres urgences, et cetera., ont fait un travail phénoménal. Nous espérions que cela puisse être fait de façon plus ordonnée et opportune, mais ils étaient constamment sous pression, je pense. Je peux vous dire que M. Goetz et M. Heyde ont travaillé pendant les week-ends pour pouvoir préparer ce rapport. Je les en remercie.
Vous êtes passée directement à nos recommandations immédiates avant de parler de l'étude proprement dite. Je vais répondre aux préoccupations que vous avez exprimées et ensuite, je ferai la revue du rapport de façon plus méthodique.
Nous voulons nous assurer que les recommandations que nous formulons maintenant ne nécessitent pas une étude plus approfondie, ni des précisions, ou ne nous obligent pas à rappeler certains témoins. Y a-t-il certaines choses que nous pouvons dire dès maintenant? Vous parlez d'exercer une certaine surveillance. Je pense qu'il serait utile d'en discuter plus avant et d'étudier la chose de façon plus approfondie.
Lorsque les représentants du ministère ont comparu devant nous, j'ai soulevé la question des rapports en souffrance. Le Canada n'a pas respecté l'obligation de déposer un rapport dans certains délais. On nous a dit combien de rapports n'avaient pas été déposés à temps. À ce moment-là, si je me rappelle bien leur témoignage, les représentants du ministère ont dit espérer pouvoir rattraper leur retard d'ici au 31 décembre 2001. C'est dans deux semaines. Selon la bonne procédure en vigueur au Parlement, nous avons prolongé ce délai jusqu'au 31 mars. Cela leur donne un peu plus de temps pour faire le nécessaire.
À mon avis, ce que nous devrions faire, c'est voir s'ils ont respecté ces délais. Dans le cas contraire, nous les ferons revenir et nous leur demanderons pourquoi. À partir de là, nous devrions avoir une bonne idée de la surveillance qui est nécessaire. Cela pourrait entrer dans le cadre de nos travaux courants.
Plutôt que d'ajouter quelque chose maintenant et de sauter aux conclusions avant de savoir s'ils vont le faire, nous devrions mettre cela de côté pour y réfléchir davantage dans le cadre d'une autre étude, et ce sera une des questions que nous examinerons en priorité. C'est tout ce que nous pouvons leur demander à l'heure actuelle. Il faut que nos recommandations soient brèves et succinctes et que nous ayons le sentiment que nous pouvons les formuler sans que cela requière une étude plus approfondie.
Par exemple, je ne saurais quel conseil donner au gouvernement en ce qui concerne la surveillance savoir avoir approfondi la question et interrogé des spécialistes et des fonctionnaires du ministère pour qu'ils nous disent comment il faut s'y prendre.
Le sénateur Finestone: Je ne parlais pas du sommaire des recommandations. Je parlais du point B, à la page 42. C'est dans le texte concernant ce point B.
La présidente: Il s'agit des recommandations immédiates.
Le sénateur Finestone: Je vois. Où parle-t-on de l'avenir?
La présidente: Plus loin. Si vous jetez un coup d'oeil aux études prévues, il y en a une qui, si nous la faisons, couvrira ce dont vous avez parlé.
M. David Goetz, attaché de recherche, Bibliothèque du Parlement: La création d'un processus d'examen continu, portant notamment sur les rapports que doit présenter le Canada aux organes internationaux concernés, est une des questions à examiner plus à fond. Il s'agit de la recommandation A, qui est intitulée: Le Canada et les organismes chargés de traités sur les droits de la personne et dont le texte commence à la page 31. La recommandation immédiate confirme simplement, ou renforce, l'engagement pris par les fonctionnaires de transmettre les rapports qui doivent l'être en vertu de traités, mais qui sont en souffrance, d'ici, je crois, la fin de l'année fiscale. Cela confirme ce qu'ils ont promis.
Si nous décidons d'établir un comité de surveillance quelconque pour s'occuper de ces rapports en souffrance, cela pourrait avoir un effet sur leur date butoir. Il faudrait décider à quoi l'on veut donner la priorité.
Le sénateur Finestone: Selon moi, c'est infaisable parce que, si je me souviens bien, ils ont plus que leur part de rapports à déposer. Nous revenons en février; comment serait-il possible d'examiner ces rapports à temps pour qu'il y ait une certaine rétroaction et la possibilité d'apporter les changements que nous jugerions importants? Je présume qu'examiner un rapport requiert un certain travail. Je ne voyais ce travail de surveillance des responsabilités du Comité permanent que lorsque nous regrouperons les pièces du puzzle. C'est à ce moment-là que j'envisageais cela.
J'ai le sentiment que ce n'est pas ce que nous voulons dire dans cette seconde section, même s'il s'agit du Comité permanent, parce que l'on n'y parle ni de l'ACCCDP ni d'un processus, et je pense que nous devrions dire quelque chose à propos d'un processus. Peut-être s'agit-il seulement de réviser l'énoncé, mais j'aimerais y avoir le mot «processus».
M. Goetz: Vous voulez dire dans la recommandation B, à la page 42?
Le sénateur Finestone: Oui.
La présidente: Nous n'avions pas l'intention de développer ce qui concerne les questions à approfondir. Il s'agissait simplement de les signaler. Il faudra que nous fassions d'autres recommandations plus précises pour lancer des études plus approfondies. C'est à ce moment-là que nous prendrons en compte les commentaires que vous avez faits.
Le sénateur Finestone: Très bien. Merci.
Le sénateur Wilson: Il y a, aux pages 48 et 49, de fortes recommandations concernant l'action des gouvernements fédéral et provinciaux, dont nous pourrions nous occuper. Selon moi, ce rapport est provisoire. C'est un plan qui définit ce que nous espérons faire. Il y a beaucoup de cases à remplir. Cela nous permet de bâtir sur ce que nous avons déjà fait.
Lorsque le rapport m'a été transmis, j'ai récupéré tous les comptes rendus, je les ai relus et j'ai essayé de les passer au peigne fin. Je pense que tous les commentaires ont bien été saisis. Si nous considérons qu'il s'agit d'un plan qui définit ce que nous allons faire à l'avenir, c'est excellent.
La présidente: Certains d'entre vous m'ont transmis des rectifications qui ont été incluses. D'autres m'ont indiqué qu'essentiellement, ils approuvaient le rapport. Je sais que le sénateur Finestone n'a pas eu le temps d'en faire la revue.
Je propose que nous discutions des sections qui nous engagent, c'est-à-dire les recommandations dont le sommaire se trouve à la page 3. L'autre partie du rapport traite des études possibles, et cela n'a pas besoin d'être aussi peaufiné parce que nous allons faire d'autres recommandations plus précises et, à ce moment-là, nous pourrons en travailler davantage la formulation. Comme l'a dit le sénateur Wilson, c'est un processus continu. Nous cherchons un consensus à propos des recommandations immédiates qui commencent à la page 3. Je vous propose de les passer en revue et de nous assurer qu'elles disent bien ce que nous voulons dire.
Il y aura quelques corrections à l'énoncé que le sénateur Finestone souhaite voir incluses. Elles sont acceptables et amélioreront notre texte. Je suggère que le comité donne à la présidente et à la vice-présidente la responsabilité d'apporter d'autres révisions au rapport. Si quelqu'un souhaite changer certains mots ou ajouter une nuance, la présidente et la vice-présidente peuvent s'en charger avant que le rapport soit finalisé.
Nous avons déjà apporté un changement à la première recommandation qui se trouve à la page 3 et nous avons noté que nous insérerons quelque chose d'autre à la place de l'expression «de premier plan». Nous voulons dire: «Une délégation canadienne composée de personnes actives et informées qui possèdent des antécédents et une expérience solides en matière de droits de la personne.»
Est-ce que tout le monde est d'accord pour apporter cette modification? Il va falloir corriger l'énoncé, car la recommandation portait à l'origine sur la nomination d'une personne du rang d'ambassadeur.
Le sénateur Beaudoin: Nous ne voulons plus qu'il en soit ainsi?
La présidente: Si, mais nous voulons inclure une phrase exprimant les souhaits du sénateur Joyal. Nous voulons préciser que cela s'applique également à l'ambassadeur. Il va falloir que nous corrigions l'énoncé.
Quelqu'un propose-t-il d'autres modifications à la première recommandation?
Au paragraphe 2, le comité recommande que le gouvernement du Canada, en collaboration avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, prenne les mesures nécessaires pour assurer que tous les rapports en souffrance du Canada soient remis, d'ici le 31 mars 2002, aux divers organismes chargés des traités internationaux sur les droits de la personne.
Nous avons déjà un peu discuté de la question. Les représentants du ministère ont dit qu'ils veilleraient à ce que tous ces rapports en souffrance soient transmis à qui de droit d'ici le 31 décembre 2001. Nous disons le 31 mars 2002. Nous leur donnons une période de grâce de 90 jours pour nous assurer qu'ils rempliront leurs obligations, comme ils ont dit qu'ils allaient le faire. C'est également une façon de signaler qu'à nos yeux, ces rapports sont très importants et que la réputation du Canada, en ce qui a trait au respect de ses obligations, risque d'être entachée s'ils ne sont pas remis en temps opportun.
Le sénateur Beaudoin: Je vois que les territoires sont toujours mentionnés. Sont-ils toujours concernés? Est-ce que les trois territoires font un rapport?
La présidente: Oui. Vous vous demandez pourquoi, dans un système fédéral-provincial, nous mentionnons les territoires. Nous ne réinterprétons pas le terme «bicaméral». Il existe un processus qui doit être suivi pour intégrer les rapports, et il inclut les rapports des territoires, des provinces et du gouvernement fédéral. Le rapport qui est transmis aux Nations unies se fonde sur les trois, et c'est parce que les territoires constituent des unités administratives uniques et détiennent une partie de la responsabilité déléguée. C'est de cette façon que c'est organisé.
Les territoires sont représentés au sein de l'ACCCDP, l'Association canadienne des Commissions et Conseils des droits de la personne. Ils sont reconnus à titre d'unité administrative.
Le sénateur Beaudoin: Ils ne jouissent cependant de pouvoirs délégués que dans ce domaine.
La présidente: C'est ainsi que cela a été organisé. Remettez-vous en question le fait que les territoires...
Le sénateur Beaudoin: Je ne remets rien en question. Je veux juste savoir. Les territoires existent uniquement en vertu de pouvoirs délégués. Ils peuvent légiférer uniquement dans la mesure où ce pouvoir leur a été donné par le Parlement du Canada.
Le sénateur Kinsella: En vertu de ce pouvoir délégué, ils ont promulgué, par exemple, la Yukon Human Rights Act.
Le sénateur Beaudoin: C'est uniquement au niveau fédéral que nous avons un système bicaméral.
La présidente: Oui. J'ai demandé à notre attaché de recherche de relire le rapport pour s'assurer que nous ne disons rien à propos des territoires qui aille à l'encontre de la légalité de notre système fédéral. Il s'agit, en l'occurrence, du fonctionnement d'un processus administratif dans lequel ils sont inclus, comme nous l'avons noté.
Le sénateur Beaudoin: Même s'ils n'ont pas le pouvoir légal nécessaire?
Le sénateur Kinsella: Leur ministre de la Justice est responsable des droits de la personne. Il ou elle participe aux conférences des ministres fédéral, provinciaux et territoriaux chargés des droits de la personne, mais il n'y en a pas eu beaucoup.
La présidente: L'attaché de recherche me rappelle qu'il y a un volet territorial dans tous les rapports qui sont déposés. Nous n'inventons rien et nous n'utilisons pas une formulation qu'eux-mêmes n'utilisent pas. Nous indiquons simplement le processus qui est suivi, et il s'agit d'un processus administratif, pas d'une catégorisation juridique.
Le sénateur Taylor: J'ai relu les rapports et les procès-verbaux des réunions auxquelles je n'ai pas pu assister. Il me semble que nous accordons beaucoup d'importance à nos traités internationaux. C'est typiquement canadien. Nous ne voyons jamais la poutre dans notre oeil, mais toujours la paille dans celle de notre voisin. Il n'y a, dans les recommandations, que très peu de choses sur les mesures que nous pouvons prendre au Canada, à l'exception des recommandations 7 et 8.
Je ne sais pas trop où s'intègrent les gouvernements autochtones. Ils tombent entre le champ de compétence du gouvernement fédéral et celui des gouvernements provinciaux. Si nous avons des problèmes en ce qui concerne les droits de la personne, c'est bien vis-à-vis les Autochtones. Ils sont tenus à l'écart.
Les Autochtones ont une forme de gouvernement que nous reconnaissons plus ou moins. Si nous avons des problèmes à l'avenir, en toute probabilité, ce sera à ce propos.
Dans ce rapport, on parle du gouvernement fédéral et de ses homologues aux niveaux territorial et provincial, ainsi que des fonctions de nature exécutive et législative. Je ne vois aucune référence aux gouvernements autochtones.
La présidente: Cette recommandation n'émane pas d'une analyse exhaustive dont l'objet est de déterminer si le processus en place est adéquat. Nous le ferons dans l'une de nos études ultérieures.
Pour le moment, nous ne faisons aucun commentaire sur la structure du gouvernement. Nous disons que le gouvernement a choisi un certain mécanisme pour faire rapport, mais qu'il n'a pas transmis les rapports requis. Que ce mécanisme soit adéquat ou non, ce n'est pas ce que nous cherchons à souligner. Nous nous intéresserons à la question plus tard, dans une autre étude, où nous pourrons prendre en compte vos commentaires comme ils le méritent.
Seriez-vous d'accord si nous mentionnions quelque part que nous ne faisons pas de commentaire sur le mécanisme en place à l'heure actuelle, ni sur le fait qu'il n'est peut-être pas adéquat parce qu'il n'inclut pas les Autochtones? Nous disons simplement que les rapports requis n'ont pas été transmis. C'est la seule chose que nous pouvons dire maintenant, sans avoir poussé notre étude plus loin.
Le sénateur Taylor: Depuis 1996, le gouvernement fédéral a changé les dispositions dérogatoires s'appliquant aux droits issus de traités dans tous les accords et chaque fois, on en rajoute un peu plus. Il semble que la majorité blanche érode lentement les droits des Autochtones.
J'aimerais mieux que l'on mentionne les Autochtones. Nous avons un certain culot de vouloir remettre au pas le Guatemala ou le Pérou, alors que nous ferions mieux de balayer devant notre porte.
La présidente: Très juste. Les sujets que nous avons énumérés dans le rapport ne sont pas les seuls que nous pouvons étudier. Vous avez fait un commentaire judicieux. Pouvez-vous réfléchir à ce que nous pourrions étudier en ce qui concerne les Autochtones? Vous avez parlé des récentes clauses dérogatoires.
Le sénateur Taylor: Depuis 1996, pendant un certain temps, les clauses dérogatoires reprenaient l'article 25, mais maintenant, elles sont différentes. J'ai parlé à un avocat qui m'a dit qu'elles sont différentes parce qu'il y a davantage de droits parlementaires.
Le système parlementaire est excellent, mais il n'est pas bon pour les minorités. Nous dégradons petit à petit les droits parlementaires dont cet avocat a parlé. Cela me préoccupe.
La présidente: C'est quelque chose qu'il nous faut étudier de façon plus approfondie. Le comité n'a pas suffisamment d'information pour aller plus loin.
Vous avez également fait observer que les recommandations semblent porter davantage sur nos obligations internationales que sur les mesures nationales. Les recommandations 4, 5, 6, 7 et 8 sont plus focalisées sur ce qui se passe ici plutôt qu'à l'étranger.
Par ailleurs, le gouvernement vient juste de recevoir une étude exhaustive effectuée par le juge La Forest sur la Commission des droits de la personne et ses mécanismes. Si nous avions fait une analyse semblable, nous aurions abordé un sujet qui a déjà été couvert. Nous ne voulions pas refaire un travail qui est exhaustif et de grande envergure.
Le sénateur Finestone: Il serait peut-être utile de jeter un coup d'oeil à ces recommandations.
La présidente: Oui, nous voulons voir si le gouvernement va prendre des mesures de suivi.
Le sénateur Beaudoin: J'appuie votre suggestion, voyons où est la vérité. Le fait que les territoires soient inclus et fassent des rapports ne change rien en ce qui concerne l'institution et le droit constitutionnel. On devrait l'indiquer.
La présidente: On devrait l'indiquer dans une note en bas de page.
Le sénateur Beaudoin: Les droits des Autochtones ont fait l'objet de nombreuses décisions de la Cour suprême. Leurs droits sont collectifs, alors que les nôtres sont individuels. C'est une distinction que nous devrions étudier.
Le sénateur Finestone: Je suis fatiguée d'entendre dire que nos droits sont seulement des droits individuels. Les droits collectifs sont inclus sous la rubrique qui traite du patrimoine multiculturel. Il y a un article sur les femmes.
Le sénateur Beaudoin: L'égalité des femmes est pleinement reconnue.
Le sénateur Taylor: Cela n'affecte les femmes qu'à titre individuel. On ne peut pas intenter une poursuite au nom des femmes, en général.
Le sénateur Finestone: Nous avons obtenu la parité salariale.
Le sénateur Kinsella: Où en sommes-nous?
La présidente: Nous sommes en train d'avoir une discussion très intéressante. Un peu d'ordre, s'il vous plaît. Je tiens à rappeler aux membres du comité que nous essayons de faire diligence pour en arriver à une conclusion à propos de ce rapport. Nous avons des délais à respecter, aussi bien aujourd'hui qu'en janvier, lorsque le sénateur Finestone va prendre sa retraite. J'aimerais que l'on en finisse aujourd'hui en ce qui concerne le rapport. Nous avons noté ces observations mais, essentiellement, nous appuyons la résolution.
Nous pouvons passer à la recommandation suivante. Le comité recommande que le gouvernement du Canada donne à la Commission canadienne des droits de la personne, avec les ressources suffisantes, la tâche de mener une analyse de l'impact sur les droits de la personne des nouvelles mesures de sécurité et de lutte antiterroriste.
Chers collègues, lorsque la présidente de la Commission a comparu devant nous, elle a indiqué qu'en plus de s'occuper des plaintes, elle avait pour mission d'effectuer des études et d'entreprendre des activités éducatives. À cause des récentes coupures, il y a eu peu d'analyses ou d'études de caractère éducatif. Elle a précisé que son rôle n'était pas d'examiner des textes législatifs particuliers, mais de réfléchir et d'analyser l'impact que peuvent avoir, sur les droits de la personne au Canada, l'évolution de la société et de ses besoins, et l'émergence de questions d'actualité comme le terrorisme, ainsi que le trafic de drogue et de personnes.
Même si, à son avis, cette fonction fait partie intégrante du rôle qui lui a été confié, elle n'a pu lui réserver ces dernières années la place qu'elle devrait avoir, parce qu'elle n'a pas les ressources nécessaires et parce que le gros de ses activités concerne les plaintes. Nous recommandons de redonner à la Commission des droits de la personne son rôle traditionnel et initial, ainsi que la possibilité de s'engager dans des activités à caractère éducatif et de s'intéresser, notamment, à l'impact sur les droits de la personne des tendances que l'on peut noter actuellement au sein de notre société et qui ont été intensifiées par les nouvelles mesures de sécurité et de lutte antiterroriste.
Le sénateur Finestone: Voilà une très bonne mission, non seulement en ce qui concerne le projet de loi C-36, mais également tout le dossier de la drogue. Il y a toutes les questions que vous avez mentionnées. Nous devons vérifier notre mandat législatif et nous assurer que les projets de loi ou les lois que nous promulguons témoignent d'un certain équilibre. Je suggère donc que nous ajoutions un membre de phrase qui se lirait un peu comme suit: «Vérifier que l'objectif d'équilibre est atteint.»
On a indiqué que la responsabilité du gouvernement se situait au plan des finances et des orientations. Nous devons trouver un juste milieu dans notre société, de façon à instaurer des mesures qui, tout en étant justes, ne nous amènent pas à mettre notre nez dans les affaires des autres. Je sais que c'est sur ce point que les discussions ont été les plus vives, comme par exemple en ce qui concerne le projet de loi C-36 et toute la question du terrorisme.
Comment définit-on un terroriste? Les Nations unies ont demandé à chaque pays de définir ce qu'il entend par «terroriste». Ni le terrorisme ni les terroristes ne sont définis dans la législation des Nations unies que nous sommes en train d'inclure et d'intégrer dans notre propre législation. L'entreprise s'est avérée plutôt singulière. Sir Jacob - son nom de famille m'échappe - a donné une réponse très intéressante lorsqu'il a défendu la législation des Nations unies où l'on ne définit pas les terroristes. Tout dépend de votre propre perspective législative et historique. C'est là où entre en ligne de compte le concept d'«équilibre».
La présidente: Suggérez-vous d'ajouter quelque chose comme «en accordant à l'équilibre par rapport aux droits de la personne la considération qui lui est due?»
Le sénateur Finestone: Tant et aussi longtemps que le mot «équilibre» apparaît ici, parce qu'il faut reconnaître que ces droits sont émoussés par le projet de loi sur le terrorisme. La population n'a pas de réserves à propos de ce que nous faisons à cet égard, sauf dans certains cas. Si la présidente de la Commission obtient les fonds et le mandat nécessaires et que les professionnels qui la secondent s'attaquent à cette tâche, ils ont besoin d'un critère. Quel est-il? Il sera différent selon les cas. Devrait-on autoriser dix personnes à cultiver de la marijuana parce qu'elles souffrent d'une maladie incurable et que cela les soulage, ou devrait-on autoriser tout le monde à fumer de la marijuana? Ce sont des questions d'éthique, des questions de morale, mais elles ont un certain poids. Il s'agit d'équilibre, je pense que c'est le mot juste. Vous pouvez énoncer cela comme vous voulez.
Le sénateur Wilson: Lorsque ces recommandations seront transmises, allez-vous inclure le paragraphe qui précède? Il le faut. On y parle d'équilibre. C'est à la page 43.
La présidente: Effectivement. Nous disons en fait que dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, on parle du droit à la sécurité, du droit à la vie, du droit à la liberté, du droit à l'application régulière de la loi, du droit de ne pas être arrêté de façon arbitraire, et cetera. Le problème, c'est d'équilibrer l'importance de ces droits. Je constate que le sénateur Finestone souhaite que cela soit exprimé dans la recommandation.
Le sénateur Wilson: Allons-nous transmettre le paragraphe qui précède ou allons-nous seulement déposer la recommandation de trois lignes?
La présidente: Nous allons transmettre le rapport.
Le sénateur Finestone: Il faut que ce soit là, pour cela saute aux yeux. Peut-être qu'alors les gens liront ce qui précède pour savoir ce dont nous parlons.
Le sénateur Wilson: Peut-être pourrait-on mettre la phrase qui porte sur ce sujet dans le paragraphe précédent en caractères gras. C'est la même chose pour toutes les recommandations. Nous n'allons pas toutes les réécrire pour inclure ce qui est déjà dans le préambule.
La présidente: Puis-je essayer d'amener le sénateur Wilson et le sénateur Finestone à un compromis?
Le sénateur Wilson: Je n'ai pas d'objection, je veux juste parler de l'approche, en général. Il me semble que nous ajoutons des choses qui sont déjà dans le préambule.
La présidente: Si nous faisons à propos de cette recommandation ce qu'indique le sénateur Wilson, le sénateur Finestone suggère-t-elle que, lorsque nous la transmettrons au gouvernement du Canada, nous soulignions particulièrement le point qu'elle a soulevé et qui est traité dans le paragraphe précédent?
Le sénateur Finestone: Oui.
La présidente: Merci. C'est noté aux fins du compte rendu.
Le sénateur Finestone: Madame la présidente, nous recevons des dizaines de documents et que faisons-nous? Nous regardons qui siégeait au comité et ensuite, nous lisons les recommandations. Nous ne lisons pas le document en entier. C'est la raison pour laquelle il est important que cette phrase soit incluse ici.
Le sénateur Joyal: Nous pourrions ajouter le membre de phrase suivant à la fin de la recommandation 3: «et d'aider le Parlement à procéder à l'examen prévu, notamment en ce qui concerne le projet de loi C-36.»
Comme vous le savez, madame la présidente, j'ai soulevé la question la semaine dernière à la réunion du comité spécial, et je l'ai également soulevée ici lorsque la présidente de la Commission des droits de la personne a comparu devant nous. Il est important de pouvoir compter sur une entité qui pourra faire, en toute indépendance, les analyses et les évaluations que le Parlement devra consulter lorsqu'il examinera le projet de loi, à la fin de la période de trois ans prévue par la disposition de temporisation.
Une des principales critiques dont le projet de loi a fait l'objet tient au fait que l'on accorde trop d'importance aux données quantitatives et pas assez aux données qualitatives. S'il y a bien un agent du Parlement qui a la capacité de se prononcer sur les données qualitatives, c'est-à-dire sur la façon dont les droits de la personne sont respectés en général, c'est la présidente de la Commission. Ce mécanisme pourrait être un moyen de mettre en lumière le rôle de la présidente.
La présidente: J'ai écarté cette possibilité parce que le projet de loi C-36 est encore à l'étude. J'espère bien que la troisième lecture produira une version du projet de loi plus achevée que celle qui nous a été transmise. La recommandation qui nous occupe a été élaborée pour que puisse être entreprise une analyse de l'impact sur les droits de la personne de toutes les nouvelles mesures de sécurité et de lutte antiterroriste, ce qui recouvre des choses comme le trafic des personnes, la pornographie juvénile et le tourisme sexuel. Ces analyses d'impact étaient censées être plus générales et ne pas être axées sur un seul projet de loi.
Voilà où nous en sommes aujourd'hui. Ce que nous voulons, c'est redonner à la Commission des droits de la personne la capacité de faire ce genre d'analyse d'une façon plus constructive et plus régulière.
Je vais mettre cartes sur table. J'espère que des amendements seront apportés au projet de loi C-36. Sinon, il sera toujours temps que le comité ajoute cela à la liste des questions à approfondir. La Commission des droits de la personne pourrait faire un travail utile pour nous, mais il faudrait que nous lui donnions les instructions appropriées, plutôt que d'essayer d'inclure ici ce sur quoi portent les travaux d'un autre comité et que d'autres sénateurs n'ont pas eu la possibilité d'étudier.
J'hésite entre deux options. La première est de retarder la publication de tout le rapport pour trancher cette question. J'ai une raison convaincante de vouloir en finir, mais cela ne veut pas dire que je rejette votre proposition. Je pourrais même l'appuyer.
Le sénateur Joyal: Je veux que ma position en la matière soit enregistrée au compte rendu, parce que nous n'avons pas vidé la question. Ma position, que j'exposerai plus tard cette semaine devant une autre instance, est que dans l'évaluation du principe de l'équilibre, entrent en ligne de compte les limites que vous imposez aux droits, mais aussi le mécanisme qui est mis en place pour contrôler ces limites. Le projet de loi a été analysé sur cette base. Quand vous introduisez la notion d'équilibre, vous définissez toujours quelque chose par comparaison à une autre. Il s'agit de faire l'équilibre entre les deux. Comment définir cet équilibre? Je pense qu'un élément essentiel de cette définition réside dans l'évaluation des institutions qui ont été mises en place pour contrôler l'impact des limites aux droits de la personne contenues dans un texte législatif particulier.
Il y a une autre instance devant laquelle je pourrai intervenir cette semaine, mais la question est très importante en ce qui concerne le rôle futur de la Commission. Je peux reporter ma suggestion, mais je veux que cela soit enregistré au compte rendu.
La présidente: Une fois cela fait, je pourrai le noter, le greffier aussi, et nous serons ainsi assurés de revenir sur le sujet. En fait, cela peut justifier une étude distincte.
Le sénateur Kinsella: La recommandation 3 pousse à l'extrême la capacité de la Commission canadienne des droits de la personne, ainsi que son mandat. Nous repoussons au maximum les limites de ce qu'elle est capable de faire et de ce que son mandat l'autorise actuellement à faire.
Je suis d'accord avec le sénateur Joyal en ce qui concerne le projet de loi C-36. Nous traversons une période difficile de l'histoire du Canada. C'est comme pendant la Deuxième Guerre mondiale quand l'émotion que cela a provoquée et tout le reste nous ont poussés à mettre en veilleuse les droits de la personne. Demandez aux témoins de Jehovah qui sont au Canada, ils vous diront combien l'opinion publique leur était défavorable.
Lorsque survient une crise, le gouvernement a tendance à ne pas instaurer suffisamment de mécanismes pour protéger les libertés civiles. C'est en partie parce que l'opinion publique ne pousse pas les autorités à agir ainsi. Les sondages leur disent que c'est ce que les gens veulent. Ils veulent plus de pouvoirs, même si cela signifie limiter les libertés civiles. Tel est le paradoxe auquel nous sommes confrontés.
Ceux d'entre nous qui se demandent si les mécanismes dont nous sommes dotés sont adéquats sont gravement préoccupés par les risques que présentent les mesures stipulées dans le projet de loi C-36, ainsi que d'autres actions qui sont envisagées. Ce n'est pas seulement une question d'équilibre, même si elle se pose, mais aussi des risques que présente l'application de ces mesures. Pour ma part, je préférerais que l'on fasse appel à l'ombudsman plutôt qu'à la Commission des droits de la personne.
En dépit de l'image que leur donne leur nom, les commissions des droits de la personne ne sont rien de plus que des organismes anti-discrimination. Leur création procède des lois sur l'équité en matière d'emploi et de logement. Elles ne sont pas concernées par les droits de la personne qui sont stipulés dans les chartes et dans les conventions internationales. En l'occurrence, dans la recommandation 3, nous repoussons probablement à l'extrême les limites de leurs pouvoirs et de leur mandat.
Si le comité veut faire une réelle contribution au cours des prochains mois, il faudra qu'en dehors du contexte des mesures qu'étudie actuellement le Parlement, nous voyions si nous pouvons instaurer un mécanisme de protection général, dans la ligne de ce qu'a suggéré le sénateur Joyal.
Le sénateur Wilson: Nous avons eu une longue discussion précisément sur ce sujet avec les représentants de la Commission canadienne des droits de la personne. Ils veulent aller au-delà d'une action anti-discrimination, parce que c'est l'image que les gens ont de la Commission. Elle n'a pas les ressources voulues pour mettre en place le cadre dont elle aurait besoin. Il faudra s'en occuper.
En ce qui concerne l'intervention du sénateur Joyal, elle porte sur les nouvelles mesures de sécurité et de lutte antiterroriste, et non sur la tâche qui consiste à analyser l'impact de toutes les mesures, quelles qu'elles soient. Ce dont il parle est très précis. C'est la raison pour laquelle je me demande si l'on devrait le mentionner? Il s'agit uniquement des nouvelles mesures de sécurité et de lutte antiterroriste, le sujet du projet de loi C-36. C'est très précis.
La présidente: C'est peut-être un problème d'énoncé. Ces quelques dernières années, il y a eu de nouveaux développements. À la fin de la guerre froide, la sécurité a été redéfinie de façon à ne pas la limiter à la sécurité militaire, mais à lui donner une définition beaucoup plus large. Ensuite, ces dernières années, aussi bien les Nations Unies que le Canada ont commencé également à définir la sécurité de façon beaucoup plus large. Nous en sommes venus à utiliser l'expression «sécurité humaine» et nous nous sommes intéressés à la sécurité environnementale, à la sécurité des enfants, à la sécurité des migrants, et cetera. Il n'était pas prévu de cibler cette recommandation sur les nouvelles mesures de sécurité et de lutte antiterroriste, mais je vois pourquoi nous nous y intéressons: c'est parce que le projet de loi nous préoccupe.
Le sénateur Wilson: Peut-être pourrions-nous modifier l'énoncé.
La présidente: Oui, nous devrions. Nous avons parlé, lors d'une réunion, du terrorisme contre les migrants. La présidente de la Commission a déclaré, si je me rappelle bien son témoignage, que toute une série de textes législatifs portant sur des questions de sécurité semblent avoir eu un impact dans certains des autres domaines qui concernent les droits de la personne. Elle a mentionné notamment la Loi sur l'immigration. Il s'agissait de faire une analyse de l'impact sur les droits de la personne des nouvelles mesures de sécurité et de lutte antiterroriste. Nous devons préciser que la recommandation ne se limite pas à cela, et qu'il est aussi important d'analyser toutes les questions et toutes les tendances en ce sens.
Ce que vous avez dit est extrêmement important. Le projet de loi C-36, le nouveau projet de loi axé sur la lutte antiterroriste, est un texte législatif important. Certes, depuis huit ans et demi que je siège au Sénat, c'est le texte législatif le plus important que nous avons eu à étudier. Par conséquent, une fois que la Chambre en aura terminé l'étude, les mesures suggérées par le sénateur Kinsella et le sénateur Joyal pourraient fort bien être très valables. Elles pourraient déboucher sur une étude qui aurait préséance sur toutes les autres. Il faut traiter la question de cette façon.
J'ai besoin du consensus du comité pour m'assurer qu'il n'y a pas de malentendu. Il s'agit d'analyser toute la série de nouvelles mesures de sécurité et de lutte antiterroriste, sans se limiter à celles qui sont stipulées dans le projet de loi C-36.
Le sénateur Finestone: Pardonnez-moi d'insister, mais vu l'observation qu'a faite le sénateur Kinsella, je vous fais remarquer que nous avons recommandé qu'il y ait un ombudsman parlementaire. Ces comptes rendus nous aideront à l'avenir, et nous devrions lire la loi qui concerne la Commission canadienne des droits de la personne pour nous assurer que la mission que nous lui confions entre bien dans le champ de ses compétences. Sinon, nous devrions revenir sur le projet de loi C-36 et lire les arguments que nous avons fait valoir à propos de la création d'un poste d'ombudsman.
Par exemple, nous avons réagi de façon extrême au cours de la Deuxième Guerre mondiale. Nous avons fait abstraction des droits dont jouissaient nos concitoyens d'origine japonaise, la communauté ukrainienne, chinoise, italienne et allemande, ainsi que des obligations que nous avions envers eux à titre de Canadiens. Nous les avons affublés d'étiquettes et nous nous sommes conduits d'une manière qui n'était ni juste ni honorable. La Commission canadienne des droits de la personne ne peut rien faire à cela.
Si nous avions un ombudsman parlementaire, peut-être serait-ce un recours. Il est sans doute utile de garder cela à l'esprit, de centrer la recommandation sur le projet de loi C-36 et de ne pas en élargir trop l'application, comme nous venons juste de le suggérer. J'ai des idées très arrêtées sur la question de la marijuana et du travail des enfants. Soyons clairs en ce qui concerne la notion d'équilibre dont j'ai parlé au début, et nous verrons comment les choses vont évoluer.
La présidente: Selon les bonnes pratiques parlementaires, le projet de loi C-36 en est au stade du rapport. Il sera transmis à la Chambre, et il ne serait pas convenable que nous fassions des commentaires dans notre rapport, avant que le processus ait été mené à bien. Cela fait, les membres qui souhaitent que le comité joue un rôle peuvent revenir sur le sujet. N'écartons rien de ce que nous devrions étudier. Peut-être cela devrait-il être tous les moyens grâce auxquels on pourrait effectuer une analyse de l'impact ou de l'équilibre, par le biais de ce comité, d'un ombudsman ou de la Commission des droits de la personne.
Ne limitons pas notre champ d'action. Nous allons voir ce qui arrive au projet de loi C-36, parce qu'à propos de ce projet de loi, je ne désespère pas de persuader certains de mes collègues.
J'espère que le processus parlementaire restera intact. J'espère que les sénateurs continueront d'écouter mes discours, comme j'écoute les leurs, et qui sait quels amendements seront proposés. En vertu des bonnes pratiques parlementaires, nous ne pouvons pas voter. Le projet de loi C-36 est fait accompli. Nous avons fait valoir la nécessité d'un certain contrôle une fois que ce texte sera loi.
J'encourage les membres du comité à réfléchir à ce que nous devrions étudier en la matière. J'ai noté la suggestion du sénateur Joyal, et elle mérite notre attention. Une fois que nous aurons fini ce rapport, les jeux seront faits, parce que la prochaine étape commencera. Dans le rapport, nous avons signalé certains domaines auxquels il faut s'intéresser, et il peut y en avoir d'autres. Nous avons absolument le droit de formuler le cadre de référence de la prochaine étude de la façon dont nous le souhaitons.
Nous allons maintenant passer à la recommandation 4 qui, je l'espère, ne posera pas de problème. Elle se lit comme suit:
Le comité recommande que le gouvernement du Canada rédige et dépose au Parlement des modifications à la Loi canadienne sur les droits de la personne de façon à ajouter la condition sociale comme motif de discrimination prohibée.
On dit que le comité recommande et non qu'il prie instamment, parce que le Sénat a adopté un projet de loi sur la condition sociale. Le Sénat a déjà indiqué au Parlement qu'il souhaitait une loi en la matière. Nous recommandons ici au gouvernement de prendre une mesure que le Sénat a déjà préconisée.
La recommandation 5 se lit comme suit:
Le comité recommande que le gouvernement du Canada réponde au rapport de 2000 du Comité de révision de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Dans sa réponse, le gouvernement devrait traiter de ce qui suit:
a) L'ajout de références précises aux grands instruments internationaux sur les droits de la personne dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.La présidente de la Commission et d'autres témoins nous ont fait remarquer que l'on ne faisait aucune mention des instruments internationaux sur les droits de la personne dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, ce qui, selon eux, nous empêche de remplir ce qui serait, en matière de droits de la personne, un mandat en bonne et due forme.
La recommandation 5 comporte un deuxième alinéa qui se lit comme suit:
b) La nécessité de consacrer plus de ressources aux mandats de la Commission canadienne des droits de la personne concernant la promotion et l'éducation, ainsi que l'examen des lois et des politiques proposées.
Le comité recommande en outre que le gouvernement du Canada, peut-être par l'intermédiaire de la Commission du droit du Canada en consultation avec l'ACCCDP, prenne des mesures pour élaborer un code modèle en matière de droits de la personne à soumettre à l'étude de toutes les administrations canadiennes.
Je ne pense pas qu'il y ait quelque dissension que ce soit à propos de cette recommandation. La première partie de l'alinéa 5b) de la recommandation a suscité tout un débat.
La recommandation 6 se lit comme suit:
Le comité recommande que le gouvernement du Canada voie à ce que les instruments internationaux relatifs aux droits de la personne auxquels le Canada est partie, ainsi que tout mécanisme de plainte, soient réunis et mis à la portée de tous les Canadiens grâce à Internet, et que des mesures soient prises pour informer les Canadiens de ces renseignements.
Je pense que nous sommes tous d'accord. J'ai eu l'occasion de rencontrer les membres du Comité des droits de la personne et des affaires publiques de Lettonie qui est impliqué dans un projet semblable. Ils m'ont indiqué que partout en Europe, on estime que la façon dont les gens pourront mieux connaître et comprendre leurs droits, c'est par le biais de l'Internet. Il faut que nous rattrapions notre retard par rapport à d'autres pays à cet égard.
La recommandation 7 se lit comme suit:
Le comité recommande que le gouvernement du Canada entreprenne des consultations auprès des représentants compétents des gouvernements provinciaux et territoriaux en vue de mieux utiliser et appuyer le travail de l'ACCCDP.
J'espère que tous les membres du comité reconnaissent que l'ACCCDP joue un rôle très utile au Canada en regroupant sous une même enseigne les commissions des droits de la personne. Étant donné que l'on n'a pas accordé assez d'attention au travail très utile que fait l'association, et qu'elle ne bénéficie pas du soutien financier voulu pour poursuivre son activité, nous voulions signaler cela immédiatement, car c'est un problème que peuvent régler facilement les gouvernements provinciaux et territoriaux ainsi que le gouvernement fédéral.
Enfin, la recommandation 8 se lit comme suit:
Le comité recommande que le gouvernement du Canada prenne les mesures nécessaires pour rétablir la coutume de réunions régulières entre les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux chargés des droits de la personne. Ces réunions devraient avoir lieu au moins une fois tous les trois ans.
Le sénateur Finestone souhaitait que nous instaurions un processus tout à fait différent, et c'est noté dans l'étude. Toutefois, les fonctionnaires du ministère nous ont dit que c'était eux qui avaient la responsabilité d'assurer le suivi des traités internationaux et de préparer les rapports. Ils nous ont dit que les ministres ne se sont pas réunis depuis 12 ou 13 ans. Manifestement, les ministres ont consulté leurs collaborateurs, mais il est très important que les ministres discutent entre eux. Pour le bien de ceux qui oeuvrent dans ce secteur et dans l'intérêt public, il faut que nous incitions les responsables politiques à se réimpliquer dans le dossier. Ce n'est qu'un début, et il reste beaucoup à faire.
Telles sont les recommandations. Chers collègues, certains d'entre vous veulent-ils ajouter ou supprimer quelque chose?
Le sénateur Joyal: À propos de la recommandation 4, vu que nous parlons d'apporter des modifications à la loi et que nous avons soulevé la question du rapport La Forest, serait-il approprié d'ajouter à la fin: «et réponde au cours de la présente session parlementaire au rapport La Forest sur la nécessité de modifier la loi»?
Le sénateur Taylor: Très bien.
Le sénateur Joyal: Au cours de nos réunions, le rapport La Forest a été mentionné en de nombreuses occasions. Nous savons que ce rapport contient toute une série de recommandations dont l'objet est de mettre la loi à niveau.
La présidente: La recommandation 4 porte sur la condition sociale, et les paragraphes qui la précèdent ne portent que sur ce sujet. Peut-être devrait-on mentionner le rapport La Forest dans la cinquième recommandation.
Le sénateur Joyal: Si vous voulez ajouter quelque chose à ce propos dans cette recommandation là, je n'ai aucune objection. C'est important. Il s'agit d'un rapport approfondi rédigé par un juge de la Cour suprême en retraite qui tire des conclusions très importantes sur les modifications à apporter à la loi. Nous avons entendu la présidente de la Commission dire qu'elle ne savait pas quelles actions sont menées. Il est important que nous demandions au gouvernement de répondre au rapport La Forest. Même si nous n'avons pas étudié chacune des recommandations formulées dans ce rapport, c'est un important document que le comité devrait examiner et dont il devrait discuter.
La présidente: Il est plus logique d'inclure cette mention dans la recommandation 5, parce que la quatrième ne porte que sur la condition sociale. L'autre traite d'un certain nombre d'examens. Il serait logique d'inclure cette mention ici, si tout le monde est d'accord.
Des voix: D'accord.
La présidente: Quelqu'un a-t-il d'autres changements à proposer?
Je sais que le sénateur Finestone souhaite apporter quelques corrections qui ont trait au ton de l'énoncé. J'ai l'intention d'en discuter avec elle lorsqu'elle sera disponible. Pour le moment, il y a des affaires d'État plus importantes dont elle doit s'occuper.
Vu l'extrême importance d'une rencontre avec Kofi Annan et avec Colin Powel, il n'est pas question de la déranger.
Le sénateur Finestone, M. Goetz et moi-même pouvons nous réunir pour apporter des corrections au texte à minuit ou quand nous voulons. Je suis disponible et je peux vous assurer que, eux aussi, ils étaient disponibles pratiquement 24 heures sur 24 lorsqu'il s'agissait de rédiger ce document.
Avec votre consentement, chers collègues, je propose que nous adoptions le rapport, avec les modifications dont nous avons discuté, et que nous autorisions la présidente et la vice-présidente à apporter, ensemble, des corrections mineures qui n'affectent pas le fond du texte.
Des voix: D'accord.
Le sénateur Beaudoin: Cette autorisation touche tout, sauf le fond du texte.
La présidente: C'est exact, le contenu fondamental.
Le sénateur Beaudoin: Je voulais juste être sûr.
La présidente: Tout à fait. Nous allons incorporer les observations sur le fond qui ont été faites aujourd'hui. Nous allons apporter des corrections mineures au texte. Cela fait, nous pourrons, je l'espère, faire imprimer le rapport.
Nous refléterons les observations qui ont trait au fond du texte ainsi que la question de l'équilibre. Nous apporterons les corrections nécessaires. Étant donné que le texte a d'abord été rédigé en anglais, nous avons eu recours au sénateur Beaudoin, à mes attachés de recherche et à un réviseur professionnel francophone pour nous assurer que la version française est de bonne facture.
Comme nous avons dû faire diligence, il se peut qu'il y ait quelques nuances grammaticales qui manquent dans le texte anglais ainsi que dans le texte français, mais nous avons sacrifié une certaine finesse de la facture du rapport pour pouvoir le publier. Nous sommes plus préoccupés par le fond que par le style en l'occurrence.
Comme toutes nos réunions sont publiques, je tiens maintenant à remercier officiellement le sénateur Finestone. La création de ce comité a pris du temps. Beaucoup de gens ont demandé que l'on établisse un comité des droits de la personne chargé du genre d'études que nous avons commencé à faire. Le comité n'aurait pas été créé si le sénateur Finestone ne s'était pas montrée aussi persévérante. Elle a fait ses armes à la Chambre des communes et au Sénat, et elle a acquis ainsi tellement d'entregent qu'elle sait quelles ficelles tirer et quand elle peut jouer d'opiniâtreté. Elle sait quand n'accepter aucun refus. C'est vraiment grâce à elle que le Comité des droits de la personne existe. Tous les sénateurs devraient lui en être extrêmement reconnaissants.
Le sénateur Finestone a toujours défendu l'idée que les parlementaires avaient des responsabilités vis-à-vis des droits de la personne. Elle l'a fait au sein de l'Union interparlementaire, du PJA et de ce comité, et de bien d'autres façons. Je pense que sa contribution est unique. Nous sommes nombreux à nous préoccuper des droits de la personne et nous avons différentes perspectives, mais le sénateur Finestone a toujours présenté le dossier des droits de la personne dans la perspective d'une parlementaire. Cela vaut la peine d'être mentionné, et j'espère que nous ne perdrons pas cela de vue.
Madame le sénateur, je vous remercie de nous avoir donné l'élan nécessaire pour mener à bien nos travaux. Je sais que même lorsque le jour de votre retraite arrivera, vous continuerez à vous intéresser à nos travaux et à nous donner de bons conseils. J'espère que nous serons dignes de votre confiance. Tous mes voeux vous accompagnent pour mener à bien toute nouvelle entreprise dont vous vous chargerez pour défendre la cause des droits de la personne.
Le sénateur Finestone: Je vous remercie.
La présidente: Chers collègues, nous passons maintenant à la deuxième partie de notre séance d'aujourd'hui, au cours de laquelle nous allons entendre deux témoins. Je les invite maintenant à se joindre à nous.
Nous revenons à notre ordre de renvoi qui prévoit l'étude de diverses questions ayant trait aux droits de la personne et l'examen, entre autres choses, des mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne.
Nous accueillons aujourd'hui Mme Donna Scott, commissaire en chef et directrice de la Commission des droits de la personne de la Saskatchewan et Mme Janet Baldwin, présidente de la Commission des droits de la personne du Manitoba.
Mme Donna Scott, commissaire en chef et directrice, Commission des droits de la personne de la Saskatchewan: Je me réjouis tout particulièrement de pouvoir marquer de cette manière ce 10 décembre, la Journée des droits de l'homme. Nous sommes très fiers de la contribution de ce comité, présidé par le sénateur Andreychuck, vu qu'elle vient de la Saskatchewan et que nous la considérons comme une des nôtres.
La Saskatchewan a une riche tradition en matière de défense de la justice sociale et des droits de la personne. En 1947, un an avant que les Nations unies proclament la Déclaration universelle des droits de l'homme, la Saskatchewan avait adopté la première loi générale sur les droits de la personne en Amérique du Nord, la Saskatchewan Bill of Rights Act. Cette mesure législative reconnaissait à chaque individu plusieurs droits et libertés fondamentaux, et cette déclaration des droits continue de figurer dans le Saskatchewan Human Rights Code.
Depuis cette époque, la Saskatchewan a poursuivi l'élaboration d'une législation axée sur les droits et mis en place la Commission des droits de la personne en 1972.
Le Code des droits de la personne de la Saskatchewan protège plusieurs droits et libertés, comme les autres législations sur les droits de la personne, interdit les actes discriminatoires dans plusieurs secteurs de la vie publique à partir de plusieurs motifs explicités. Notre Commission protège et fait la promotion des droits de la personne de diverses façons à travers le règlement de griefs, à travers l'approbation de programmes spéciaux, à travers l'éducation du public et à travers l'octroi d'exemptions.
En ce qui concerne le règlement de griefs, nous entrons actuellement dans une époque à la fois passionnante et historique de l'évolution de la Commission de la Saskatchewan. En novembre, plusieurs amendements ont été apportés au Code qui ont changé considérablement la façon dont nous réglerons les plaintes se rapportant aux droits de la personne. Ces amendements annulent un certain nombre de conditions assez strictes et simplifient la procédure, apportant ainsi à la Commission la flexibilité voulue pour adapter les procédures en fonction des types de grief et pour adopter celles qui sont les plus appropriées.
Ces changements étaient nécessaires pour faire face à la complexité grandissante des plaintes concernant les droits de la personne. Quand notre Code a été adopté, il y a plus de 20 ans, le but était de créer un système susceptible de parer efficacement aux actes de discrimination intentionnelle et flagrante. Nous sommes de plus en plus confrontés à des plaintes systémiques ou à des plaintes qui impliquent des concepts plus complexes, comme l'obligation d'accommodement. Il était nécessaire que nous actualisions notre système à la lumière des réalités contemporaines, et je crois que c'est ce que nous avons réussi à faire.
Les amendements ont également permis la mise en place, pour la première fois en Saskatchewan, d'un comité du tribunal des droits de la personne indépendant, auquel les requérants peuvent avoir directement accès dans certaines circonstances. Il s'agit d'une spécificité de notre législation qui ne se retrouve pas, je pense, dans beaucoup d'autres provinces canadiennes. Grâce à cette nouvelle flexibilité, la Commission espère faire une plus grande place à la médiation et aux autres techniques de résolution des plaintes.
Un autre moyen par lequel la Commission défend les droits de la personne est l'approbation de programmes spéciaux, ce qu'elle a été en mesure de faire depuis que le Code a été adopté en 1979. Traditionnellement, la Commission a approuvé des initiatives axées sur l'équité dans les domaines de l'emploi et de l'éducation. Nous pensons que la Saskatchewan est un cas à part à cet égard.
J'ai décrit ces deux systèmes dans notre mémoire. Toutefois, il me paraît important de noter quelques points. En ce qui concerne l'équité en matière d'emploi par exemple, il n'existe pas de législation rendant obligatoire l'équité en emploi en Saskatchewan; cependant, la Commission a approuvé et supervisé des programmes volontaires d'équité en matière d'emploi depuis 1980. La Commission supervise actuellement 35 employeurs pour lesquels travaillent plus de 42 000 personnes. Le programme d'équité en matière d'emploi de la Commission se concentre sur quatre groupes cibles. Les femmes, les peuples autochtones, les minorités visibles et les personnes handicapées sont des groupes qui n'ont traditionnellement pas eu accès à l'emploi et aux promotions.
Le deuxième secteur pour lequel la Commission approuve des programmes est l'équité en matière d'éducation, un programme qui, je pense, est spécifique à la Saskatchewan. La Commission a lancé un programme d'équité en matière d'éducation pour les Autochtones scolarisés, du jardin d'enfant à la 12e année, en 1985, à la suite de recherches qui montraient que jusqu'à 90 p. 100 des élèves autochtones abandonnaient l'école avant d'avoir terminé leur 12e année. Il était manifeste que les enfants autochtones ne tiraient pas les mêmes avantages du secteur scolaire que leurs camarades de classe non autochtones.
La Commission a demandé aux conseils scolaires qui avaient à l'époque un nombre important d'élèves autochtones de mettre en place des programmes d'équité en matière d'éducation en vertu de l'article 47 de notre Code. Ces plans étaient centrés sur les cinq secteurs suivants: le programme d'enseignement, les politiques et pratiques scolaires, la participation des parents, la formation interculturelle des enseignants et les efforts pour accroître le nombre d'enseignants autochtones. Ces plans ont évolué, et un grand nombre comprennent aujourd'hui la mise en place de politiques antiracistes ou anti-discriminatoires, la formation de tout le personnel et des procédures pour régler les cas de discrimination.
La Commission supervise actuellement 17 plans qui ont été approuvés dans les 12 divisions scolaires désignées et qui s'appliquent à environ 76 000 élèves dont 21 p. 100 sont d'ascendance autochtone. La Commission approuve et supervise également des plans d'équité en matière d'éducation au niveau postsecondaire. Bien que la plupart des plans d'équité en matière d'éducation s'adressent uniquement aux étudiants autochtones, certains programmes ont des objectifs plus vastes, comme celui qui est ciblé sur les étudiantes en mathématiques ou celui qu'un collège applique et qui vise les quatre groupes cibles.
La Commission collabore actuellement avec plusieurs partenaires du secteur de l'éducation, notamment notre ministère provincial de l'Éducation, des commissaires scolaires, des administrateurs, des enseignants et des instituts pédagogiques dans les universités, afin de développer l'équité dans le domaine de l'éducation et de parvenir à un système éducatif universel, un système qui offre des chances égales à tous les étudiants, notamment les étudiants pauvres, les gais et les lesbiennes, et les étudiants handicapés.
Une autre façon dont la Commission fait la promotion des droits de la personne est à travers les programmes d'éducation publique. Un des défis auxquels font face bien des commissions des droits de la personne, y compris celle de la Saskatchewan, est de parvenir à équilibrer les ressources entre les programmes de règlement des griefs, d'éducation du public et autres. Bien que l'éducation en matière de droits de la personne soit considérée comme un moyen proactif et préventif de protéger ces droits, l'urgence de donner suite sans délai aux plaintes relatives aux droits de la personne requiert la plupart de nos ressources. Nous espérons que, grâce à notre nouvelle procédure de traitement des plaintes, la Commission sera en mesure de mieux répartir les ressources entre les programmes et les services qu'elle assure.
Une des stratégies efficaces d'éducation du public aux droits de la personne est de développer des partenariats avec le secteur de l'éducation, et j'ai mentionné dans mon mémoire divers moyens à travers lesquels nous y sommes parvenus. J'aimerais souligner notre initiative en matière de droits de la personne sur les lieux de travail, qui donne de très bons résultats. Ces séminaires sont destinés aux employeurs, aux gens d'affaires, aux employés et aux syndicats, et concernent plusieurs problèmes en matière de droits de la personne liés aux lieux de travail. Nous avons noté une réaction très positive de la part du milieu des affaires.
Un des plus grands problèmes en matière de droits de la personne dans notre province est le traitement accordé à nos peuples autochtones. Nous nous efforçons d'établir plus de contacts avec la communauté autochtone. Un racisme à la fois pernicieux et généralisé continue d'exister à l'égard des peuples autochtones dans notre province. De récents incidents malheureux et très publicisés impliquant le corps policier et la communauté autochtone de Saskatoon sont l'illustration des profondes divisions qui existent entre certaines de nos institutions les plus respectées et la communauté autochtone.
Les peuples autochtones du nord de la Saskatchewan font aussi face à des problèmes particuliers au sujet de leurs droits. Approximativement 81 p. 100 des résidents du nord de la Saskatchewan sont d'ascendance autochtone. Nous avons commencé à établir des contacts avec les membres de la communauté autochtone de différentes manières.
J'ai eu l'occasion de voyager avec le médiateur provincial et le protecteur des enfants dans le nord de la Saskatchewan, où j'ai visité plusieurs localités et rencontré leurs habitants. Les résidents du nord ont formulé des préoccupations liées à leurs droits économiques, sociaux et humains. L'absence de logements adéquats et abordables, le manque d'accès aux services médicaux et l'insuffisance des moyens éducatifs pour répondre aux besoins particuliers des enfants qui habitent dans les localités éloignées figurent au nombre des préoccupations évoquées. La Commission planifie actuellement une stratégie à long terme visant une meilleure desserte des habitants du nord.
Nous tentons également de nous rapprocher de la communauté autochtone en organisant des cercles de discussion inspirés du processus spirituel autochtone axé sur la guérison, afin d'offrir une procédure culturellement plus pertinente pour solutionner les griefs concernant les droits de la personne.
Nous collaborons actuellement avec la Commission canadienne des droits de la personne, l'association de vulgarisation juridique de la Saskatchewan et des centres d'amitié autochtones de la Saskatchewan pour produire une publication axée sur les droits à l'intention des Autochtones qui habitent des centres urbains.
Une de nos préoccupations est le nombre de jeunes qui souffrent du syndrome d'intoxication foetale à l'alcool et des effets de l'alcoolisme foetal et qui se retrouvent dans un système de justice pénale qui manque de réponses appropriées à l'égard de leur handicap. Un juge d'une cour provinciale nous a demandé de nous intéresser à ce problème.
Compte tenu des données démographiques de notre province, nous devons continuer de développer une stratégie pour contrer le racisme et la discrimination dont sont victimes les peuples autochtones de notre province.
Un autre défi pour la Commission de la Saskatchewan et les autres commissions est le manque de moyens pour s'attaquer adéquatement au problème de la pauvreté. La pauvreté est de plus en plus reconnue comme une question relevant des droits de la personne, et on constate un soutien grandissant à l'égard de la protection des droits humains des pauvres. Un moyen de mieux protéger les pauvres de la discrimination serait d'inclure la condition sociale au nombre des motifs de discrimination prohibés par la loi.
Cette notion a bénéficié du soutien du Comité des Nations Unies, du Sénat, dans le projet de loi S-11, et de l'ACCCDP, et d'autres provinces ont adopté des résolutions en ce sens.
Le Code de la Saskatchewan protège les particuliers contre la discrimination fondée sur la perception d'une assistance publique. Par assistance publique, il faut entendre l'aide définie dans la législation sur l'aide sociale provinciale. Bien que cela puisse être considéré comme un pas dans la bonne direction, la Commission juge ce motif trop étroit pour surmonter la discrimination dont font l'objet les pauvres qui travaillent ou les personnes qui bénéficient d'une forme d'assistance publique autre que l'aide sociale. La Commission va poursuivre sa collaboration avec l'ACCCDP dans le but de faire pression pour obtenir une modification législative à cet égard. Toutefois, une plus grande sensibilisation à cette forme de discrimination est nécessaire avant que la condition sociale soit incluse en tant que motif de discrimination prohibé.
Je voudrais maintenant parler du rapport entre le droit international en matière de droits de la personne, et le droit et la pratique au niveau provincial en Saskatchewan. Le Code de la Saskatchewan autorise la Commission à promouvoir la reconnaissance de la dignité inhérente de tous les êtres humains et de l'égalité de leurs droits inaliénables. C'est pourquoi la Commission peut promouvoir - et elle le fait effectivement - les droits de la personne sur le plan international à travers des initiatives d'éducation publique, dont j'ai donné quelques exemples dans notre document.
Toutefois, il est plus difficile de faire respecter ces droits internationaux s'ils ne sont pas spécifiquement énoncés dans le Code. Bien qu'ils ne soient pas spécifiquement exécutoires, les instruments internationaux ont été des outils didactiques essentiels en Saskatchewan. Nous citons dans notre document l'exemple de la décision rendue en 1985 par notre cour d'appel dans l'affaire Huck c. Canadian Odeon Theatres. Dans ce jugement, la cour d'appel reconnaissait que les objectifs sociaux que l'assemblée législative considérait utile de poursuivre à travers la législation relative aux droits de la personne sont inextricablement liés à la participation de la Saskatchewan à la promotion des droits de la personne au niveau international, et elle appuyait foncièrement le recours aux instruments internationaux pour appuyer les arguments présentés dans les affaires relatives aux droits de la personne.
Je voudrais dire deux mots à propos des rapports que le Canada présente aux comités des Nations Unies dans le cadre de ses obligations en vertu des traités internationaux.
On demande régulièrement à la Commission de la Saskatchewan de fournir une rétro-information au rédacteur du rapport de la Saskatchewan qui est intégré au rapport du Canada. Tout en étant reconnaissants de l'occasion qui nous est ainsi offerte, nous pensons qu'il y a une meilleure façon pour les commissions de fournir de l'information aux comités des Nations Unies. Cela pourrait se faire par l'intermédiaire d'un organisme tel que l'ACCCDP.
Comme vous le savez, les comités des Nations Unies reçoivent des rapports des gouvernements. Je crois que les rapports du Canada sont coordonnés par le Comité permanent de hauts fonctionnaires sur les droits de la personne. Les comités des Nations Unies se montrent également de plus en plus accueillants à l'égard des informations fournies par des sociétés et des ONG.
Toutefois, une pièce manque, la Commission canadienne des droits de la personne. Les commissions sont en première ligne et traitent constamment de questions relatives aux droits de la personne. Nous avons besoin d'un véhicule pour transmettre les opinions de la Commission et faire savoir si le Canada, et par voie de conséquence les provinces, satisfont à leurs obligations découlant des instruments internationaux.
La Commission de la Saskatchewan a également eu le privilège de participer à certaines activités internationales touchant les droits de la personne. Tout récemment, c'était la Conférence mondiale contre le racisme organisée par les Nations unies. J'ai eu la chance d'assister aux réunions préparatoires à Genève en mai dernier, à titre de représentante de l'ACCCDP, parrainée par Patrimoine canadien. En outre, l'un des membres de notre commission a pu assister à la conférence mondiale à Durban.
Il y a plusieurs façons dont le gouvernement fédéral et les parlementaires peuvent appuyer les travaux des commissions des droits de la personne. Premièrement, beaucoup d'entre elles se débattent avec les difficiles problèmes auxquels font face les peuples autochtones du Canada. Je suggère qu'une amélioration de la condition des peuples autochtones en général, peut-être par la mise en oeuvre des recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones, faciliterait certainement le travail des commissions.
Deuxièmement, le gouvernement fédéral pourrait donner l'exemple à ses homologues provinciaux en incluant la condition sociale parmi les motifs de discrimination prohibés par la Loi canadienne sur les droits de la personne.
Troisièmement, le gouvernement fédéral pourrait poursuivre le dialogue sur le racisme entrepris en préparation de la Conférence mondiale contre le racisme organisée par les Nations unies. Les commissions des droits de la personne, les ONG et le gouvernement ont participé ensemble à la recherche de solutions au problème du racisme qui sévit à travers le monde. Ce dialogue doit se poursuivre de manière à ce que l'on puisse utiliser la conférence de Durban comme un tremplin pour développer un plan d'action national et lutter contre le racisme ici, au Canada. Nous exhortons le gouvernement fédéral à donner suite à la discussion qui a eu lieu plus tôt cette année à Durban.
Quatrièmement, le Parlement et les ministères fédéraux concernés pourraient reconnaître et soutenir l'ACCCDP comme porte-parole national unifié sur les questions relatives aux droits de la personne. Ce soutien pourrait prendre la forme d'un renforcement du rôle de l'ACCCDP dans le processus de présentation des rapports aux comités des Nations unies.
Le Parlement fédéral pourrait aussi appuyer les commissions des droits de la personne en formulant un critère garantissant leur indépendance par rapport au gouvernement. Les Principes de Paris établissent qu'une caractéristique fondamentale d'une institution nationale chargée des droits de la personne est son indépendance à l'égard de l'exécutif.
La plupart des commissions canadiennes des droits de la personne relèvent d'un gouvernement par l'intermédiaire d'un ministère de tutelle. Ainsi, la Commission de la Saskatchewan présente ses rapports par l'entremise du ministère de la Justice. Bien que nous bénéficions généralement du soutien de notre ministère et que nous n'ayons pas fait l'objet d'interventions de la part du gouvernement depuis ma nomination, je crois qu'il serait plus approprié que les commissions des droits de la personne fassent rapport directement à l'assemblée législative, comme c'est le cas pour le médiateur ou le vérificateur provincial.
Enfin, une planification stratégique nationale et provinciale en matière de droits de la personne et un dialogue permanent sur les obligations internationales du Canada sont nécessaires au niveau ministériel. Nous croyons savoir que les ministres responsables des droits de la personne ne se sont pas réunis depuis 1988. La Commission de la Saskatchewan a présenté, à la réunion de travail de l'ACCCDP tenue en 1999 à Montréal, une résolution qui a été adoptée à l'unanimité et où l'on demandait que les ministres responsables des droits de la personne se réunissent régulièrement et que des représentants de l'ACCCDP aient la possibilité de les rencontrer dans le cadre de telles réunions. J'encourage le gouvernement fédéral à organiser régulièrement des réunions des ministres fédéral, provinciaux et territoriaux chargés des droits de la personne.
Il est clair qu'un grand nombre de gens vulnérables dans notre province continuent d'être menacés d'exclusion et de discrimination. La Commission ne peut pas lutter contre la discrimination isolément. Le défi, pour tous les membres de notre communauté et pour le gouvernement, est de collaborer pour créer une société plus juste et plus intégrée, une société libre des préjugés et qui offre les mêmes privilèges à tous ses membres.
Mme Janet Baldwin, présidente, Commission des droits de la personne du Manitoba: Contrairement à ma collègue de la Saskatchewan et à la plupart des présidents que vous avez entendus, je ne suis qu'une présidente à temps partiel.
La Commission du Manitoba administre le Code des droits de la personne du Manitoba, lequel s'inspire expressément de la Déclaration universelle des droits de l'homme ainsi que de la recommandation relative à la Charte que vous avez formulée à l'égard de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Comme un grand nombre de témoins vous l'ont déclaré, on trouve malheureusement au Canada une pléthore de régimes en ce qui concerne les droits de la personne.
Je me félicite que le Manitoba ait l'une des législations les plus étendues en matière de droits de la personne, laquelle recouvre, parmi les motifs explicités, l'orientation sexuelle, la source de revenu, les convictions politiques et l'âge, et comprend une disposition particulière sur le défaut d'adaptation raisonnable. Tous les défenseurs des droits de la personne sont de plus en plus conscients de l'interdépendance des multiples motifs de discrimination.
Mais, comme toutes les commissions provinciales, même s'il y des choses que nous pouvons faire, il y en a aussi que nous ne pouvons pas faire à cause du cadre fédéral dans lequel nous fonctionnons. Nous sommes limités aux affaires provinciales. Comme la plupart des commissions provinciales des droits de la personne, nous sommes cantonnés aux secteurs de l'emploi, du logement, des services et des contrats offerts au public.
Une question qui nous préoccupe particulièrement, en matière de compétences, est notre position très ambiguë à l'égard des Autochtones. Nous nous apercevons que les Autochtones sont souvent victimes d'un hiatus juridique entre la législation provinciale sur les droits de la personne, la Commission fédérale des droits de la personne et la Loi sur les Indiens. Il s'agit d'un domaine où le Parlement pourrait apporter certaines clarifications.
Toutefois, les petites commissions peuvent avoir sur la législation et les principes relatifs aux droits de la personne au Canada des effets exponentiellement supérieurs. À noter à cet égard un grand nombre de grands arrêts, notamment à propos de la grossesse et du harcèlement sexuel, qui ont eu leur origine dans des plaintes formulées par notre commission.
Cette dernière a été particulièrement active dans la promotion des droits des partenaires de même sexe. Nous sommes déçus de voir que le Manitoba n'est pas allé aussi loin que d'autres dans la modification de sa législation pour se conformer à la décision dans l'affaire M. c. H. J'aimerais saisir cette occasion pour encourager le Parlement à modifier la Loi sur le mariage afin d'autoriser les mariages entre partenaires de même sexe.
Notre mandat, comme celui de toutes les commissions provinciales de droits de la personne, est triple. Nos principales ressources doivent être utilisées pour le règlement des griefs, mais nous avons des mandats tout aussi importants dans les domaines de l'éducation et de la promotion des droits de la personne.
En ce qui concerne la résolution des plaintes, nous soulignons en particulier dans notre document les diverses options que nous avons essayé d'élaborer pour accélérer et accroître l'efficacité du processus, notamment la conciliation et la médiation. Nous avons mis au point un très efficace programme de prévention des plaintes, qui fait que un sur cinq des cas se trouve réglé dans les 30 jours. Nous proposons une médiation à tous les stades du processus.
Au niveau de la résolution des plaintes, nous faisons l'impossible pour tenir compte de nos obligations internationales aussi bien que nationales en matière de droits de la personne. Je fais référence dans mon document à plusieurs affaires.
Notre Conseil des commissaires a été saisi du cas d'un enfant atteint du VIH auquel son conseil scolaire refusait l'accès au système d'éducation publique. Notre réflexion s'est largement inspirée de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant. Nous avons récemment rendu une décision qui se référait à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, et nous avons, comme les autres provinces, incité le Procureur général à intervenir dans des causes largement médiatisées comme celle de Koegstra, de Zundel et de John Ross Taylor, qui ont également mis à contribution les conventions internationales. Tout récemment, nous avons dû intervenir, à titre de membres de l'ACCCDP, au niveau de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Gosselin qui concernait la condition sociale. Il s'agit d'une affaire qui touche de nombreux arguments découlant du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
En ce qui concerne l'éducation, les activités de sensibilisation et les partenariats avec d'autres organismes, je me concentre là aussi sur trois domaines. Tout d'abord, nous organisons des séminaires qui portent sur l'emploi et qui s'adressent principalement aux employeurs, en partant du principe que le respect des droits de la personne représente une bonne pratique dans le monde des affaires et fonctionne sur la base d'un système de recouvrement des coûts. Par ailleurs, nous avons lancé plusieurs initiatives pour améliorer l'action sociale auprès des Autochtones, notamment dans les régions éloignées du nord du Manitoba. Nous avons un agent autochtone qui se déplace en permanence dans les régions éloignées et qui enregistre les plaintes, en plus d'administrer certains programmes éducatifs. Nous avons des agents auxiliaires à Le Pas et à Brandon.
Récemment, nos activités éducatives ont visé plus particulièrement le système scolaire. La semaine dernière, nous avons organisé une importante conférence pour les jeunes qui fréquentent des établissements secondaires, particulièrement les élèves autochtones et ceux qui viennent du Nord. Nous avons filmé une partie de cette conférence et nous diffuserons l'enregistrement sur notre site Web dans un format interactif, qui semble inciter les jeunes à s'impliquer à notre époque. Nous espérons qu'ils en arriveront ainsi à s'intéresser aux droits de la personne. Nous organisons de nombreuses présentations dans les écoles et progressons vers un modèle plus durable de formation des formateurs en matière de droits de la personne, au plan national ou international, au sein du système scolaire.
Un autre aspect de notre mandat est la promotion proactive des droits de la personne auprès des gouvernements, notamment auprès de nos autorités provinciales, et auprès de groupes d'experts dans les médias. J'en fournis quelques exemples dans mon document. Nous avons notamment, immédiatement après la tragédie du 11 septembre, diffusé un communiqué et mené diverses activités médiatiques. Nous essayons constamment d'être attentifs aux réactions qui découlent des attentats du 11 septembre. Nous avons recommandé à notre gouvernement de s'assurer que toute législation, notamment la législation en matière de sécurité, soit soumise non seulement à une analyse d'impact sur la Charte, mais également sur les droits de la personne. Nous avons offert nos services, toutes limitées que puissent être nos ressources, à notre gouvernement pour collaborer à ce type d'analyse.
Dans le cadre de la collaboration avec les médias, nous sommes limités, étant donné que nous devons toujours être perçus comme une commission impartiale. C'est un autre cas où l'ACCCDP, en tant qu'organisme national, peut jouer le rôle de porte-parole moral des commissions des droits de la personne de tout le Canada. L'ACCCDP a diffusé un communiqué de presse peu après les événements du 11 septembre.
Il y a trois défis dont je voudrais maintenant parler. Le premier est notre législation. Nous sommes parfaitement conscients de la nécessité d'inclure la condition sociale dans notre législation. On y trouve la source de revenu, mais cela ne nous permet pas de faire face, de façon générale, à toutes les questions relatives à la pauvreté et aux problèmes des sans-abri. Nous avions déjà soumis une proposition législative à notre gouvernement, inspirée du document de l'ACCCDP et du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Nous avons bon espoir que notre gouvernement pourrait être l'un des rares gouvernements provinciaux à adopter cette modification.
Notre législation pose un autre problème, qui a été mentionné devant ce comité: la question de la primauté. Notre Code est officiellement censé primer les autres textes provinciaux. Toutefois, cela n'est pas aussi évident qu'on pourrait le penser. Il y a certains aspects de la législation et de la déontologie judiciaire auxquels nous ne pouvons pas toucher en dépit de cette primauté du Code.
Je dois aussi mentionner la question de l'indépendance. Sur ce plan, notre situation est plus enviable que celle de certaines autres commissions des droits de la personne, du moins en théorie. Ainsi, les membres de la Commission sont nommés pour trois ans. Ces nominations sont échelonnées, et les titulaires ne peuvent pas être démis de leurs fonctions avant que leur mandat ait expiré, excepté pour une raison valable, que je n'espère pas leur donner. En revanche, il y a des problèmes d'indépendance. Contrairement à la Commission canadienne, mais comme dans le cas de la plupart des commissions provinciales, nous faisons rapport par l'intermédiaire d'un ministre. Notre indépendance serait améliorée si nous pouvions faire rapport directement à l'assemblée législative, comme dans le cas du médiateur.
Nous avons également un problème d'indépendance au niveau de notre conseiller juridique. À l'heure actuelle, c'est un employé du ministre de la Justice, ce qui est parfait, car il est excellent. En outre, cela économise de l'argent, mais la situation devient vraiment problématique du fait que de plus en plus de cas impliquant le gouvernement sont soumis à la commission.
De nos jours, les coupures ont un plus fort impact sur les petites commissions comme la nôtre. Il y a beaucoup de choses que nous ne pouvons pas faire car notre budget est limité et décroissant. Nous ne pouvons pas traiter correctement les problèmes systémiques. Nous ne pouvons pas faire des recherches appropriées ni mener des consultations publiques dans le but d'élaborer des politiques proactives et préventives dans le domaine de la lutte contre la discrimination et des droits de la personne.
J'aimerais insister sur le rôle de toutes les commissions et de l'ACCCDP en ce qui concerne les obligations internationales du Canada. Comme l'a déclaré Mme Scott, nous aimerions que l'ACCCDP soit un organisme impartial. Pas comme le Comité permanent, qui est un organisme gouvernemental; ni non plus comme les ONG, des organisations complètement non gouvernementales, mais plutôt un organe impartial dont l'expérience et l'expertise pourraient s'avérer extrêmement utiles à la révision de la législation et contribuer au respect des obligations en matière de présentation de rapports dans le cadre de nos instruments internationaux. Le problème, comme vous l'avez déjà reconnu dans votre projet de rapport, est que l'ACCCDP ne dispose pas des ressources suffisantes pour agir ainsi. Il y a quelques semaines, un de vos témoins a suggéré un partenariat entre l'ACCCDP et un centre d'excellence dans une université. C'est une excellente idée. Nous avons tenté, à l'ACCCDP, de la creuser à quelques reprises. Nous en avons notamment discuté avec le Centre de recherche et d'enseignement sur les droits de la personne de l'Université d'Ottawa, et une autre fois, avec l'Université de l'Alberta. Dans les deux cas, nous n'avons pas pu donner suite faute de ressources, mais non par manque de détermination.
La présidente: Merci de votre exposé. Vous relevez, aussi bien en Saskatchewan qu'au Manitoba, de l'assemblée législative?
Mme Baldwin: Non, nous relevons du ministre. Autant que je sache, la seule commission territoriale sur les droits de la personne qui fait rapport directement est celle des Territoires du Nord-Ouest. Toutes les autres relèvent d'un ministre.
Le sénateur Finestone: Vous avez toutes les deux présenté des rapports très intéressants où vous faites état de problèmes communs. Voyons si je comprends la relation. En dehors des Territoires du Nord-Ouest, le président est nommé par le gouverneur en conseil, par le premier ministre ou un premier ministre provincial. Vous relevez de votre ministre, non de l'assemblée. Votre rapport est-il rendu public?
Mme Baldwin: Au Manitoba, notre rapport est public. Il est déposé à l'assemblée, mais n'y est pas nécessairement discuté. Nous organisons un grand nombre d'activités médiatiques au moment de la publication de notre rapport annuel.
Le sénateur Finestone: Un rapport déposé à l'assemblée législative est un rapport public et sujet à des commentaires par les députés de l'assemblée, c'est bien cela?
Mme Baldwin: Tout à fait.
Le sénateur Finestone: Est-il transmis à un comité?
Mme Baldwin: Non.
Mme Scott: La situation est similaire en Saskatchewan. Nous relevons de l'assemblée législative par l'intermédiaire du ministre. Notre rapport annuel est déposé à l'assemblée législative au sens où tous les membres de l'assemblée en reçoivent copie, mais il n'est jamais discuté en comité ou dans l'enceinte de l'assemblée.
Le sénateur Finestone: Quelles relations avez-vous, avez-vous eues ou espérez-vous avoir avec le comité de coordination qui prépare les réponses aux instances internationales?
Mme Scott: Il y a plusieurs années, la Commission de la Saskatchewan siégeait comme représentant officiel au Comité permanent. Cela a changé avant que je devienne présidente. Un haut fonctionnaire du ministère de la Justice représente la Saskatchewan au Comité permanent.
J'ai toujours été autorisée à assister à ces réunions à titre d'observateur. Jeudi, j'assisterai, comme représentante officielle du gouvernement de notre province, à la réunion du Comité permanent ici, à Ottawa. Normalement, ce n'est pas le cas.
Le sénateur Finestone: Parlerez-vous sous votre casquette de présidente de la Commission?
Mme Scott: La situation sera un peu délicate à cause de notre indépendance. J'y serai à titre de présidente de la Commission des droits de la personne, en remplacement du fonctionnaire qui participe habituellement. Je pourrai m'exprimer sur cette base.
Le sénateur Finestone: Quelle est la relation entre le ministre des Affaires intergouvernementales, M. Stéphane Dion, et le Comité permanent ou votre Commission des droits de la personne?
Mme Scott: En tout cas, il n'a aucune relation avec notre Commission. Nous avons aussi un ministre provincial des Affaires intergouvernementales, mais nous avons très peu de contacts avec ce ministre. J'ignore quelle est la relation du ministre Dion avec le Comité permanent.
Le sénateur Finestone: Comment pourrait-on exploiter le temps et l'expérience de nos présidents des commissions d'un bout à l'autre du Canada pour que cela ait un véritable impact sur la promotion des droits de la personne? Comment pouvons-nous nous assurer que nous disposons d'un moyen d'intervention adéquat dans chaque province, compte tenu des différentes personnalités et perspectives régionales? Y parvient-on mieux à travers le Comité permanent de bureaucrates ou grâce aux personnes nommées par le Gouverneur en conseil qui siègent aux commissions? A-t-on besoin d'une collaboration et d'une interaction effectives entre tous les niveaux? Je voudrais savoir où se situe le ministre Dion dans ce tableau?
Mme Baldwin: Ce serait au niveau du ministère du Patrimoine canadien.
Le sénateur Finestone: Ce n'est peut-être pas le bon endroit. Au ministère des Affaires intergouvernementales, on doit envisager tout ce qui est susceptible de rendre les tâches de la vie quotidienne acceptables et tolérables, dans le respect de la diversité. La diversité, me dites-vous, relève du ministère du Patrimoine canadien. Je suppose que ce n'est pas si mal que ça.
La présidente: Leur demandez-vous si cela serait approprié? Personne n'a jamais soulevé la question auparavant.
Le sénateur Finestone: Je sais.
La présidente: J'espère que vous ne pensez pas que l'on va modifier le rapport une autre fois.
Le sénateur Finestone: Non.
La présidente: Vous dites que le ministre et ses responsabilités devraient être pris en compte dans cette structure. Limiter les choses à la ministre du Patrimoine n'est peut-être plus approprié à l'heure actuelle?
Le sénateur Finestone: J'aimerais poursuivre dans cette perspective.
Peu importe quel est le ministre qui s'en occupe, du moment que cela fonctionne. Le système est en panne depuis 13 ans du côté des ministres. Votre Commission a été rangée, de façon fort inefficace, dans la catégorie des ONG, particulièrement lorsque vous êtes allés à Durban. De quoi avez-vous besoin pour régler le problème?
Vous avez toutes les deux déposé d'excellents rapports, et je note qu'ils se complètent très bien. Comment pensez-vous que l'on pourrait régler cela, particulièrement vu vos expériences?
Mme Scott: C'est une question difficile. Nous essayons de la régler à l'ACCCDP. Quelle notre relation avec le Comité permanent? Comment peut-on avoir une relation régulère? Nos travaux ont un intérêt direct pour le Comité permanent. Ce sont des bureaucrates, et ils soumettent des rapports au comité des Nations Unies.
Notre approche à l'égard de ces problèmes est plus indépendante. Notre perspective est différente. Bien que nous fonctionnions indépendamment des activités gouvernementales, la communication est nécessaire entre l'ACCCDP et le Comité permanent. Je ne suis pas certaine que le Comité permanent serait d'accord. Il y a un comité qui travaille depuis l'année dernière à l'élaboration d'une position concernant la participation régulière des commissions des droits de la personne au Comité permanent.
Un dialogue soutenu est nécessaire, mais les commissions, et l'ACCCDP en particulier, doivent préserver leur statut indépendant par rapport au Comité permanent.
Le sénateur Finestone: Madame Baldwin, le Code du Manitoba ne limite pas la protection des droits de la personne sur la base de l'âge. Je trouve cela très intéressant au moment où j'arrive à l'âge de la retraite. Je pourrais peut-être conserver mon siège si je déménageais au Manitoba. J'aimerais savoir ce que cette disposition implique.
Le sénateur Joyal: Vous devez vous reporter à l'article 1 de la Charte.
Le sénateur Finestone: Je reviendrai à ma question plus tard.
Mme Baldwin: En ce qui concerne la retraite obligatoire, notre Code est semblable à plusieurs des codes provinciaux des droits de la personne qui permettent aux assemblées législatives de s'y soustraire. La province a récemment adopté une loi qui permet aux universités du Manitoba de négocier la retraite obligatoire en disant explicitement que cette loi a préséance sur le Code des droits de la personne. Bien que la retraite obligatoire aille à l'encontre de notre Code des droits de la personne, on peut y déroger si cela est explicitement demandé par l'assemblée législative.
Le sénateur Finestone: Insistent-ils sur un moratoire de cinq ans et y reviennent-ils ensuite en vertu de l'article 33?
Mme Baldwin: Oui, plus ou moins.
Le sénateur Beaudoin: Madame Baldwin, vous avez parlé de «primauté». C'est un terme que l'on utilise dans de nombreux domaines. De quoi s'agit-il exactement? Quelles sont les limites? La primauté peut signifier beaucoup de choses. Que vouliez-vous dire exactement?
Mme Baldwin: Effectivement, c'est une question très complexe, comme j'ai pu m'en rendre compte quand je suis arrivée à la Commission des droits de la personne. Je présumais que, du fait que la loi stipulait que notre Code primait la législation provinciale, cette disposition signifiait bien ce qu'elle disait, mais je me suis rapidement rendu compte que ce n'était pas le cas.
L'assemblée législative peut prévoir une disposition légale explicite, comme une clause dérogatoire, afin de se soustraire au Code des droits de la personne. Pour des raisons politiques, l'assemblée législative agit rarement de la sorte, mais elle l'a fait dans le cas des universités qui négociaient une retraite obligatoire.
Par ailleurs, le gouvernement s'est toujours opposé à ce que nous nous occupions de cas qui concernent une loi provinciale. Notre position est que, lorsqu'il s'agit d'une mesure administrative en vertu d'une loi, la Commission est compétente dans la mesure où cela relève d'un de ses domaines d'action. Lorsqu'il s'agit simplement d'une question afférente à loi, même si cela peut être manifestement discriminatoire à première vue, nous n'avons pas compétence, et nous ne prévalons pas non plus sur les juges, comme nous avons pu le constater il n'y a pas longtemps, dans le cadre d'une affaire soumise à la Commission canadienne des droits de la personne.
Pour vous donner un exemple récent, la Commission a été saisie d'une plainte à propos de l'ancienne Loi sur l'obligation alimentaire - avant qu'elle soit modifiée pour se conformer à la décision relative à l'affaire M. c. H., rendue en Ontario en 1998 - une loi qui était discriminatoire à l'égard des partenaires mariés et des partenaires hétérosexuels en union libre. Elle est manifestement discriminatoire, et pourtant on nous a dit que nous n'avions pas compétence en la matière car il s'agit d'une loi plutôt que d'une mesure administrative. Par conséquent, la primauté ne signifie pas tout ce que l'on pourrait croire, et notre législation a besoin d'être clarifiée et renforcée à cet égard.
Le sénateur Beaudoin: Pour qu'il y ait primauté, il faut une loi qui est considérée comme jouissant de la primauté par les tribunaux. On peut indiquer clairement dans la loi qu'elle a primauté, et que rien d'autre qu'une clause dérogatoire ne serait susceptible de l'annuler.
Dans le domaine des droits de la personne, il y a la Charte canadienne des droits et des libertés. Il est facile de parler de primauté en l'occurrence, car il s'agit de la constitution du Canada, à laquelle vous devez vous conformer. Toutefois, dans certaines lois provinciales sur les droits de la personne, c'est peut-être une question de quasi-constitutionnalité ou peut-être une question de primauté. Dans votre province du Manitoba, je suppose que c'est une loi quasi constitutionnelle qui prévaut sur tous les autres secteurs de la législation de la province.
Mme Baldwin: C'était cela l'idée, et c'est stipulé à l'article 58 de notre Code, intitulé «Primauté du Code». L'article se lit comme suit:
Sauf disposition contraire prévue expressément dans le présent Code ou dans toute autre loi de la Législature, les droits et obligations fondamentaux du présent Code priment sur ceux de toute autre loi de la Législature, que cette loi soit édictée avant ou après celui-ci.
Même si l'énoncé semble clair, son application a été très limitée par notre cour d'appel au Manitoba.
Le sénateur Beaudoin: A-t-on logé un appel à la Cour suprême du Canada?
Mme Baldwin: Effectivement. Quoique, le cas particulier qui me vient à l'esprit, qui était une demande en vertu de la Loi sur les accidents mortels, ne se soit pas rendu à la Cour suprême du Canada. Il s'agissait d'une des dispositions d'une loi qui était manifestement discriminatoire, mais il a été considéré que nous n'avions pas la compétence voulue pour deux raisons. Premièrement, parce qu'il n'y avait pas de mesure administrative, c'était la Loi sur les accidents mortels qui offrait une cause d'action. Deuxièmement, parce que les services de logement et les contrats ne relèvent pas de nos domaines de compétence. Il y avait deux raisons pour nous exclure, et c'est pourquoi il n'y a pas eu d'appel auprès de la Cour suprême du Canada. La primauté ne prime pas autant qu'on pourrait le croire.
Le sénateur Beaudoin: Il faut que vous régliez ce problème car il est fondamental.
Mme Baldwin: Tout à fait.
Le sénateur Beaudoin: Le Code prime-t-il ou non?
Mme Baldwin: Ce n'est pas le cas à l'heure actuelle.
Le sénateur Beaudoin: Que faire, concrètement?
Mme Baldwin: Concrètement, il va probablement falloir que cela soit clarifié par voie législative. Cela pourrait prendre la forme d'une modification.
Le sénateur Beaudoin: C'est le moins que l'on puisse faire. C'est la première fois que j'entends cela. Lorsque nous perdons une cause à la cour d'appel, nous nous adressons à la Cour suprême. C'est ce que dicte le droit constitutionnel.
La présidente: C'est toujours là le problème. Si vous avez du temps et de l'argent, vous pouvez le faire.
Le sénateur Beaudoin: La constitution prime. Je vous suggère d'aller à la cour d'appel un de ces jours.
Mme Baldwin: Il y avait d'autres sujets en cause dans cette affaire.
Le sénateur Beaudoin: Il ne s'agissait pas seulement de la modification?
Mme Baldwin: Il aurait pu être problématique de pousser les choses plus loin parce que cela ne tombait pas dans le champ de nos compétences. Des modifications seraient préférables.
Le sénateur Wilson: Je suis ravie que vous ayez recours aux pactes internationaux dans le contexte où vous opérez et dans le cadre de vos délibérations. Vous dites qu'il faudrait sensibiliser bien davantage le public avant que l'on puisse véritablement intégrer la condition sociale dans notre législation. Avez-vous jamais eu recours aux conclusions du Comité des droits de l'homme de l'ONU à propos du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, où l'on dit beaucoup de choses sur les Autochtones et les pauvres? Trouvez-vous que c'est un document éducatif utile?
Mme Scott: Ces observations sont utiles à la présidente et au personnel de la Commission des droits de la personne. Toutefois, nous souhaiterions qu'elles soient plus utiles aux législateurs. Alors même que nous exerçons des pressions pour que la loi soit modifiée et que l'on y mentionne la condition sociale, bien des gens ne comprennent pas qui vise cette protection. J'ai eu quelques réactions de la part de législateurs qui se demandaient ce que cela signifie, comment cela est défini, ce que cela signifie dans une province comme la Saskatchewan où nous avons une industrie rurale qui lutte pour survivre, s'il s'agit d'une protection proactive ou simplement d'une mesure pour lutter contre la discrimination sur cette base.
Il y a beaucoup d'idées fausses qui circulent à propos de ce que signifie la protection au motif de la condition sociale. Jusqu'à ce que nous ayons éliminé ces idées fausses et que les gens soient plus conscients du problème que cette protection est censée régler, elle ne sera pas intégrée à nos codes.
Le sénateur Wilson: Vos agents s'occupent d'éducation publique.
Mme Scott: Oui, c'est exact.
Le sénateur Wilson: Ne sont-ils pas capables de faire comprendre ce dont il s'agit aux législateurs et à la population? S'ils n'y parviennent pas, c'est une perte de ressources importante.
Mme Scott: C'est un défi pour nous parce que nous n'avons pas toujours les ressources qu'il faudrait consacrer à l'éducation publique. Nous essayons de promouvoir ces droits et de sensibiliser toujours davantage la population à ce sujet, mais il reste beaucoup à faire en ce domaine.
Le sénateur Wilson: J'ai passé au Manitoba plus de temps que n'importe où ailleurs. Peut-être ne le savez-vous pas, mais il y a un Comité sénatorial sur les peuples autochtones qui se penche sur la situation des Autochtones en milieu urbain. Vous avez mentionné qu'une bonne partie de vos activités concernent le nord. Cependant, si j'en crois mes souvenirs de Winnipeg et ce je peux y voir lorsque je m'y rends maintenant en visite, il y a beaucoup d'Autochtones qui déambulent le long de la rue Principale qui est pour eux un lieu de rencontre. Quelle priorité accordez-vous aux jeunes des Premières nations qui vivent en milieu urbain? Quelles plaintes entendez-vous à cet égard, et quels sont les principaux problèmes qui se posent?
Mme Baldwin: Voilà une excellente question. Il est vrai que la première initiative que nous avons prise a été d'envoyer un agent autochtone dans le nord. Ce programme a été couronné de succès, et nous venons juste d'embaucher un autre agent autochtone pour mener en quelque sorte des activités de rayonnement à Winnipeg et dans les banlieues, ce qui n'implique pas autant de voyages. La conférence de jeunes que nous avons organisée il y a une semaine était principalement destinée aux élèves autochtones de toute la province, y compris des écoles de Winnipeg, et en particulier des écoles où l'on compte un grand nombre d'élèves autochtones. Beaucoup de nos initiatives à caractère éducatif sont ciblées sur les Autochtones à l'heure actuelle. Le vice-président de ma Commission est lui-même autochtone et tout à fait décidé à ce que nous soyons proactifs dans ce domaine.
J'ai l'impression que oui, le racisme envers les Autochtones est à la base de certains incidents portés à l'attention de la Commission, même si l'interdépendance des motifs entre aussi en ligne de compte. Nombre de ces plaintes entreraient très bien sous la rubrique de la condition sociale.
Le sénateur Wilson: Elles entreraient bien également sous la rubrique du logement.
Mme Baldwin: Oui, et sous celle des services d'emploi et de bien d'autres encore.
Le sénateur Taylor: Vous dites que vous n'avez pas à répondre devant l'assemblée législative, et pourtant, c'est à l'assemblée législative que vous transmettez votre rapport. Le signez-vous ou est-ce le ministre qui le signe?
Mme Baldwin: Nous le donnons au ministre qui le signe.
Le sénateur Taylor: A-t-il le pouvoir de ne pas le déposer s'il le souhaite?
Mme Baldwin: Oui.
Le sénateur Taylor: Est-ce la même chose en Saskatchewan?
Mme Scott: C'est différent en Saskatchewan. Nous donnons notre rapport au ministre. Nous le signons et nous le transmettons au ministre, mais nous le déposons au Bureau du Président. C'est un nouveau processus.
Le sénateur Taylor: Vous êtes responsable devant l'assemblée législative. Si le rapport est déposé au Bureau du Président, il devrait être rendu public.
Je suis heureux de constater que vous oeuvrez au sein de la communauté autochtone. Je suis relativement nouveau au comité. Comme je le disais tout à l'heure, je trouve regrettable que nous essayions de remettre les choses en place à travers le monde, mais pas chez nous. Je pense que nous allons examiner cette question de plus près, et votre mémoire s'avère certainement utile à cet égard.
Même si certains problèmes individuels se posent en ce qui concerne les Autochtones, c'est principalement un problème de groupe. Dans le passé, la discrimination contre les groupes a souvent été résolue en imposant des quotas, comme dans le domaine de l'emploi. Par exemple, il y a plusieurs années, je dirigeais une entreprise de construction en Italie. Parmi les gens que j'embauchais, il fallait qu'une personne sur 12 ait une déficience physique. Il y avait aussi la question des droits des femmes qui était résolue de la même façon, c'est-à-dire qu'un certain pourcentage des employés devait être des femmes. Comment les quotas pourraient-ils permettre d'intégrer davantage les Autochtones dans la société au Manitoba et en Saskatchewan?
Je crois que le Manitoba et la Saskatchewan sont deux des provinces les plus progressistes sur le plan des droits de la personne, et pourtant, ce sont les provinces les plus rétrogrades si l'on en juge par le nombre d'Autochtones qui sont en prison ou qui cherchent du travail. Il semble qu'en l'occurrence, vous alliez dans deux directions opposées, et je me demande ce qui se passe. Avez-vous songé à imposer des quotas?
Mme Scott: Pendant plusieurs années, en Saskatchewan, nous avons approuvé et contrôlé l'application de plans d'équité en matière d'emploi instaurés volontairement par certains employeurs. Un grand nombre d'employeurs, y compris le gouvernement provincial et certains ministères et sociétés d'État se sont volontairement adressés à la Commission et ont demandé à participer à la promotion de l'équité en matière d'emploi. Les Autochtones sont un des quatre groupes désignés dans ce plan d'équité en matière d'emploi. Si nous voulons avoir en Saskatchewan une population active représentative, elle devrait comprendre idéalement au moins 12 à 13 p. 100 de personnes d'ascendance autochtone.
Nous n'en sommes pas encore là. Nous avons fait des progrès, mais il y a encore beaucoup à faire en ce qui concerne le nombre d'Autochtones dans les effectifs des employeurs qui appuient l'équité en matière d'emploi. Nous faisons des progrès, et la Commission est impliquée dans cette initiative depuis déjà un certain nombre d'années.
Je ne peux pas parler au nom de notre ministère des Affaires intergouvernementales et autochtones, mais il a lancé un plan de développement de l'emploi autochtone qui est mis en oeuvre en étroite collaboration avec de grands employeurs de notre province, dans le but d'intégrer davantage d'Autochtones dans la population active. Nous reconnaissons que l'éducation et l'emploi sont deux secteurs clés si nous voulons assurer l'avenir de notre population autochtone.
Le sénateur Taylor: Croyez-vous aux quotas?
Mme Scott: Les employeurs qui décident d'appliquer un plan d'équité en matière d'emploi établissent des objectifs à atteindre dans x nombre d'années. Parmi ces objectifs, ils peuvent fixer le nombre d'Autochtones qu'ils souhaitent intégrer dans leur effectif. Nous n'aimons pas utiliser le mot «quota», nous parlons plutôt de cibles ou d'objectifs, mais c'est la même idée.
Mme Baldwin: Nous avons pris des mesures, qui n'ont peut-être pas une portée aussi grande que celles de la Saskatchewan, mais qui permettent de mettre en place des programmes spéciaux à l'intention de tous les groupes qui ont pu être désavantagés par le passé. Un employeur peut établir un programme spécial ou un programme de promotion sociale du type qui lui paraît le plus approprié.
Par le passé, tous les programmes spéciaux devaient être validés par la Commission des droits de la personne. Ce n'est plus le cas actuellement. Les employeurs sont autorisés et encouragés à établir ces programmes, et ils ne s'adressent à nous que par défaut, si quelqu'un formule une plainte contre ces programmes. Cela s'est révélé plus efficace que d'avoir à suivre un processus bureaucratique avant même de pouvoir établir le programme. Nous collaborons avec les employeurs et nous les encourageons à mettre en place ce type de programme.
J'aimerais faire une autre observation à propos des deux dernières questions qui ont été posées sur les droits des Autochtones. Il y a une chose qui préoccupe beaucoup notre Commission, notamment notre vice-président, c'est la situation des droits des Autochtones dans les réserves, où nous n'avons pas compétence pour agir. Nous essayons de collaborer avec les chefs autochtones dans les réserves pour protéger les droits de la personne et élaborer des systèmes adaptés à leur culture.
La présidente: Des mesures très progressistes ont été prises en Saskatchewan et au Manitoba. Peut-être que les résultats ne sont pas encore visibles. Toutefois, il faut se rappeler que la population de la Saskatchewan n'a pas beaucoup augmenté ni diminué. Cela fait longtemps que la population de la Saskatchewan est d'environ un million de personnes, alors que dans ce contexte, il y a une poussée de la population autochtone. Cette population augmente, et peut-être est-ce là la raison pour laquelle nous sommes mis sur la sellette plus souvent que les autres provinces. Il serait injuste de dire qu'il se passe quelque chose de particulier au Manitoba et en Saskatchewan qui est la cause de cette différence. Je suis convaincue que c'est la même chose ailleurs, par exemple, en Colombie-Britannique, en Ontario et en Nouvelle-Écosse. Ce n'est pas aussi visible dans ces provinces, parce que le pourcentage de la population autochtone n'est pas aussi élevé.
Le sénateur Poy: Dans votre rapport, madame Scott, vous dites que le racisme perdure dans votre province. On nous a mentionné plusieurs fois que des Autochtones avaient été abandonnés dans le froid par la police. Dans quelle mesure la Commission peut-elle intervenir dans ces cas-là?
Mme Scott: C'est délicat. Nous pouvons agir si les victimes déposent une plainte. Nous pouvons parler publiquement, de façon générale, des problèmes que rencontre la communauté autochtone. À la suite de ces incidents, nous avons collaboré avec plusieurs autres groupes de notre ville pour organiser, le 21 mars, un cercle de guérison, afin d'essayer de nous attaquer à ces problèmes d'une façon qui permettrait de sensibiliser davantage la population et d'aplanir certains des différends entre la police, d'autres institutions et la communauté autochtone. Cette initiative a été couronnée de succès.
C'est difficile. Il faut faire attention. Si nous prenons position publiquement en faveur d'un groupe ou d'un autre, et que quelqu'un nous demande d'enquêter sur une plainte, notre impartialité peut être mise en doute.
Nous voulons défendre les droits de la personne, mais nous devons être conscients de la nécessité de préserver notre impartialité à titre d'organisme chargé d'enquêter sur les plaintes.
Le sénateur Poy: Organisez-vous un cercle de guérison le 21 mars tous les ans?
Mme Scott: Chaque année, nous organisons plusieurs manifestations dans les collectivités. À cause des événements récents qui se sont passés à Saskatoon, nous avons collaboré avec plusieurs autres organismes pour organiser un cercle de guérison le 21 mars.
Le sénateur Poy: Est-ce que la police appuie ces manifestations?
Mme Scott: La police était représentée dans le cercle de guérison.
Le sénateur Poy: Madame Baldwin, vous avez dit que vous étiez en faveur du mariage homosexuel. Est-ce votre opinion personnelle ou celle de la Commission du Manitoba?
Mme Baldwin: Les deux.
Le sénateur Poy: Est-ce une position officielle?
Mme Baldwin: Nous avons pris position officiellement. Nous avons fait une présentation devant la commission d'examen à propos de toute une série de droits, y compris le droit au mariage homosexuel. Nous avons écrit au ministre récemment, après que la Colombie-Britannique ait rejeté l'idée du mariage homosexuel. Nous avons écrit à notre ministre pour lui dire qu'il se devait d'intervenir dans cette affaire, au moins au niveau de la Cour suprême. S'il ne le fait pas, nous le ferons.
Le sénateur Poy: Y a-t-il eu des mariages homosexuels au Manitoba?
Mme Baldwin: À l'heure actuelle, ce n'est pas possible. La question du mariage pose un problème de compétence très complexe que l'affaire de la Colombie-Britannique n'a fait qu'amplifier. Les provinces s'en tirent toujours en disant que cela relève du gouvernement fédéral. Dans l'affaire de la Colombie-Britannique, on a maintenu que cela n'entrait pas dans le champ de compétence du gouvernement fédéral, mais que c'était une question constitutionnelle. Il va falloir que quelqu'un, quelque part, tire les choses au clair.
J'ai été heureuse de voir que vendredi dernier, le Québec a avalisé, en partie, le concept de l'union civile. Nous avons également recommandé une telle mesure à notre gouvernement provincial, parce que cela entre dans le champ de ses compétences. Même si ce n'est pas totalement satisfaisant, ce serait un grand pas dans la direction de l'égalité pour les homosexuels.
Le sénateur Poy: Est-ce que l'union civile est différente du mariage homosexuel?
Mme Baldwin: Cela dépend de la façon dont vous définissez «union civile». Au Vermont, c'est pratiquement la même chose que le mariage. Je n'ai pas vu le projet de loi du Québec, mais d'après ce que j'ai appris des médias, ce n'est pas exactement l'équivalent du mariage. Quoi qu'il en soit, c'est certainement mieux que de n'avoir rien du tout, comme au Manitoba à l'heure actuelle.
Le sénateur Joyal: Vous ne pouvez pas vous prononcer sur une législation proposée par vos gouvernements respectifs si vous concluez que cette législation est contraire aux dispositions de vos lois provinciales sur les droits de la personne; c'est exact, n'est-ce pas?
Mme Baldwin: Nous pouvons faire des observations à notre gouvernement provincial, et nous le faisons. Nous aimerions faire plus si nous en avions la possibilité. Tout ce que nous pouvons faire, c'est présenter des recommandations. Comme toujours, notre action est limitée par la rareté de nos ressources. Notre comité d'examen de la législation a déjà à peine le temps de s'occuper de la législation et des politiques qui nous concernent directement. Nous aimerions beaucoup être chargés de l'examen de la législation.
Le sénateur Joyal: Madame Baldwin, pouvez-vous être appelée à témoigner à titre de spécialiste par un comité qui étudie un certain texte législatif et donner votre opinion sur la conformité d'un projet de loi avec votre législation provinciale sur les droits de la personne?
Mme Baldwin: Nous le pouvons. Nous avons le sentiment que l'on ne fait pas appel à nous autant qu'on le devrait. C'est plutôt nous qui nous imposons.
Nous avons présenté des observations au comité à propos du projet de loi C-36 qui a entraîné la modification de certaines lois provinciales.
Mme Scott: En Saskatchewan, nous pouvons faire des observations lorsqu'un texte législatif viole notre Code des droits de la personne. En outre, la Commission peut porter plainte en son propre nom, même si elle n'a pas été saisie elle-même d'une plainte individuelle. En vertu de notre Code, si le gouvernement propose d'appliquer des dispositions législatives qui le violent, nous avons le pouvoir de porter plainte contre le gouvernement. Cela n'arrive pas souvent. Lorsque le gouvernement de la Saskatchewan adopte un texte législatif qui viole clairement le Code, nous pouvons contester ces dispositions et les faire annuler.
Pour revenir à la question de la primauté, s'il est stipulé précisément dans un texte législatif qu'il prévaut sur le Code des droits de la personne, nous n'avons pas la possibilité de contester ni de remettre en question cette législation. Toutefois, à moins que cela ne soit stipulé expressément, nous pouvons contester et faire annuler un texte législatif s'il viole le Code des droits de la personne, et nous l'avons fait.
Même si on ne nous le demande pas souvent, on nous a consultés de temps en temps à propos d'un nouveau texte législatif, par exemple, à propos de la définition de «conjoint de même sexe». Toutefois, en ce qui concerne les projets de loi qui ont l'air neutres, mais qui peuvent avoir un impact discriminatoire, nous ne sommes pas consultés. Nous n'intervenons que plus tard, lorsque nous sommes saisis d'une plainte.
Le sénateur Joyal: Selon le rapport publié vendredi dernier au Québec sur la récente proposition relative aux droits de la personne, l'union civile ne donne pas les mêmes droits en ce qui concerne l'adoption et la responsabilité des enfants que si elle avait été reconnue comme étant pleinement équivalente au mariage.
Est-ce que l'une ou l'autre de vos Commissions a dirigé une étude portant sur la situation particulière des Autochtones, par exemple, pour faire une comparaison du statut accordé aux Autochtones vivant dans des réserves en vertu, d'une part, des lois provinciales et, d'autre part, de la Charte canadienne des droits et libertés? C'est un des sujets dont nous avons vivement débattu. Nous avons constitutionnalisé la Charte canadienne des droits et libertés et son application aux Autochtones, en référence à l'article 35. La Cour suprême a tempéré les droits des Autochtones et leur a reconnu d'autres droits ayant trait à leur statut, lesquels sont différents, dans certains cas, des droits reconnus aux Canadiens non autochtones. Au fil des ans, la question des droits des femmes autochtones a pris de l'importance et cela pose toujours problème dans les réserves.
La Saskatchewan et le Manitoba ont une population autochtone importante. Est-ce que l'un ou l'autre de vos gouvernements a fait des études sur la différence d'application, aux niveaux provincial et fédéral, de la Charte des droits et de la Loi canadienne sur les droits de la personne aux Autochtones de vos provinces?
Mme Scott: La Saskatchewan n'a pas entrepris de recherche ni d'étude de ce type. La question de notre compétence dans les réserves, dans des circonstances particulières, s'est posée à l'occasion d'une plainte qui est actuellement en cours d'examen par les tribunaux. La cour d'appel a été saisie et s'est prononcée en faveur de notre compétence à traiter une telle plainte. Nous nous sommes déclarés compétents à entendre le cas et nous avons pris les dispositions voulues. La Cour du Banc de la Reine et la cour d'appel nous ont appuyés. Nous attendons maintenant de voir si la Cour suprême nous déclarera compétents en la matière. Nous nous sommes déclarés compétents dans certaines situations, et les tribunaux examinent actuellement le bien-fondé de cette décision. Il serait utile d'entreprendre certaines recherches et certaines études en ce domaine pour essayer de régler la question, parce qu'à l'heure actuelle, ce n'est pas très clair.
Le sénateur Joyal: La condition sociale est citée dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Cela a déjà fait l'objet d'une interprétation de la part des tribunaux. Les paramètres de la définition de ce que recouvre la condition sociale sont suffisants pour nous permettre d'aller de l'avant et de reconnaître que ce ne doit pas être un motif de discrimination. Alors même qu'au Canada on discute de la pauvreté des enfants et du niveau de pauvreté en général, la prohibition de ce motif de discrimination touche manifestement un droit qui commence à être reconnu, et devrait faire partie des priorités des autorités provinciales.
Mme Scott: Je suis tout à fait d'accord. Nous avons utilisé l'interprétation qui a été donnée au Québec pour mettre en lumière ce que l'on entend par «condition sociale», et faire valoir notre position auprès de notre assemblée législative et l'inciter à inclure ce motif.
C'est vrai, la pauvreté des enfants et la pauvreté en général sont des sujets de préoccupation. Parfois, il est difficile de faire le lien avec les droits de la personne. Certains ne considèrent pas qu'il s'agit d'un problème relatif à ces droits. Il faut donc que nous nous efforcions d'éduquer et d'informer les gens à ce sujet. Les initiatives qui ont été prises au Québec ont été très utiles, et nous en avons tiré de grands enseignements.
Le sénateur Joyal: Ma dernière question portait sur l'administration de la justice et l'autorité de la police en vertu de la Loi sur les droits de la personne, mais j'en parlerai un autre jour.
Le sénateur Cochrane: Cela fait à peu près un an que sont entrées en vigueur les nouvelles dispositions sur le congé parental, celles qui autorisent un congé prolongé d'un an. Avez-vous noté depuis une différence en ce qui concerne la fréquence des plaintes à ce sujet?
Mme Scott: Nous n'avons pas vraiment constaté de changement. Ce qui nous surprend, c'est que nous recevons toujours des plaintes de femmes qui sont tombées enceintes et qui ont été congédiées, purement et simplement. Même si cela fait longtemps que l'on a établi le principe voulant que les femmes enceintes peuvent conserver leur emploi et bénéficier d'arrangements spéciaux, nous recevons encore de nombreuses plaintes à ce sujet. En ce qui concerne la prolongation du congé de maternité, nous n'avons pas constaté que cela a eu un impact sur le nombre de plaintes que nous recevons.
Mme Baldwin: Cela n'a pas eu d'impact direct, même si nous avons reçu récemment de nombreuses plaintes qui seront entendues par un tribunal et qui concernent des travailleurs à temps partiel et leur droit aux prestations de maternité et au congé parental, des avantages qui ne leur sont souvent pas accordés dans les conventions collectives. C'est un des dossiers dont nous nous occupons à l'heure actuelle.
La présidente: Je vous remercie toutes deux du travail que vous accomplissez en faveur des droits de la personne et du témoignage que vous nous avez présenté. Il y a de nombreux domaines que nous devons explorer, et nous ferons certainement appel à vous pour avoir un avis d'expert. Je vous remercie d'avoir accepté notre invitation à comparaître ce 10 décembre, un jour particulièrement important pour nous.
La séance est levée.