Délibérations du comité sénatorial permanent des
affaires étrangères
Fascicule 4 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 12 mai 2004
Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères, auquel a été renvoyé le projet de loi C-9, Loi modifiant la Loi sur les brevets et la Loi sur les aliments et drogues, se réunit aujourd'hui à 15 h 10 pour étudier le projet de loi.
Le sénateur Peter A. Stollery (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Honorables sénateurs, la séance est ouverte. Je vous rappelle que nous étudions le projet de loi C-9, Loi modifiant la Loi sur les brevets et la Loi sur les aliments et drogues. Voici comment nous allons procéder. L'honorable Bill Graham est parmi nous et c'est lui qui entamera la discussion. Il sera suivi, après son départ, de l'honorable Lucienne Robillard.
Nous recevons également des représentants d'Industrie Canada, de Santé Canada, du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international ainsi que de l'ACDI. Je ne vais pas vous présenter tout le monde, car cela prendrait sans doute trop de temps. Les fonctionnaires sont ici pour répondre aux questions que les sénateurs voudront leur poser.
Lorsque Mme Robillard aura terminé, nous entendrons les représentants des compagnies de recherche pharmaceutiques du Canada avec qui nous récapitulerons le tout. Nous avons également le représentant de l'Association canadienne du médicament générique, que je vous présenterai quand nous en serons là, si tout le monde est d'accord.
Comme je sais que le ministre n'a que peu de temps devant lui, je n'en dirai pas plus. Si le comité est d'accord, je vais lui demander de faire sa déclaration.
L'honorable Bill Graham, ministre des Affaires étrangères: Honorables sénateurs, je vous demande de m'excuser de mon retard, mais la période des questions semble être particulièrement animée ces jours-ci. Je m'explique mal l'ambiance qui règne à la Chambre, mais elle est électrisante.
Il est certain que nous nous penchons aujourd'hui, honorables sénateurs, sur une question reliée à une crise sanitaire mondiale et que, selon notre célèbre ami Stephen Lewis, c'est la façon dont nous y répondrons qui définira notre génération. Le VIH/sida dévaste une grande partie du continent africain et menace la stabilité économique et sociale de million de gens. Chaque jour, 8 000 hommes, femmes et enfants africains meurent du sida et 14 000 autres personnes contractent le virus. Des régions d'Asie, des Caraïbes et d'Europe de l'Est risquent également d'être touchées par une grave épidémie de VIH/sida.
Ce fléau s'ajoute aux ravages d'autres maladies infectieuses comme la tuberculose et le paludisme, des menaces qui ont été éliminées depuis longtemps dans le monde industrialisé. Prises ensembles, ces maladies qui déciment des populations entières rendent le développement impossible et condamnent à la pauvreté des générations d'êtres humains. Nous avons donc l'obligation collective de combattre ces épidémies, par simple humanité et pour assurer, à long terme, la sécurité des Africains et des autres populations, y compris les Canadiens.
Malgré l'attention portée, à l'échelle mondiale, sur la menace que le terrorisme fait peser sur la sécurité des États, nous ne devons pas négliger la sécurité humaine et les problèmes qui menacent les droits, la sécurité et la vie des gens. Tout autant que la terrible réalité des conflits et des violations des droits de la personne, le fléau que représentent ces maladies fait peser une menace considérable sur la sécurité des Africains, tant au niveau personnel que national. En fait, comme l'a dit Kofi Annan, dans certaines régions du monde en développement, le sida est l'équivalent d'une arme de destruction massive.
Dans certains pays d'Afrique, le taux d'infection est passé au-dessus des 30 p. 100 chez les adultes et l'espérance de vie est tombée en dessous de 40 ans. Le sida produira jusqu'à 20 millions d'orphelins sur le continent d'ici 2010. Qui va les nourrir et les élever? Les enseignants et les travailleurs de la santé sont malades et mourants. Qui va éduquer et soigner la prochaine génération? Les forces policières et militaires africaines sont décimées. Qui pourra préserver la paix et la sécurité et à quelles conséquences faut-il s'attendre pour la sécurité des Canadiens et du reste du monde lorsque l'instabilité créée par ces crises africaines atteindra nos propres frontières, comme elle le fera inévitablement?
[Français]
En septembre dernier, j'ai pris l'engagement, au nom du Canada, d'agir pour résoudre ces questions alors que j'ai parlé à la session spéciale de l'Assemblée générale de l'ONU consacrée au VIH/sida. Avec cette législation, le Canada remplit cet engagement de façon bien tangible. Comme vous le savez, au sommet du G8 à Kananaskis, nous avons fait du VIH/sida un élément central d'un programme d'action pour le développement de l'Afrique. Depuis, nous continuons à coopérer avec nos collègues du G8 pour mettre en œuvre le NEPAD et le plan d'action pour l'Afrique. Nous engageons aussi des ressources appréciables par le biais de l'ACDI dans des projets bilatéraux ou multilatéraux comme le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.
En juin, ma collègue, la ministre Carroll, présidera l'assemblée annuelle du principal organe de l'ONU chargé du VIH/sida. À la fin du mois, j'assisterai au Mali à une conférence ministérielle du réseau de la sécurité humaine, pour discuter du VIH/sida et d'autres enjeux de la sécurité humaine.
Le plus récent exemple de l'engagement du Canada, en faveur de la santé publique dans les pays en développement, est sa contribution de 100 millions de dollars, annoncée par le premier ministre avant-hier, à l'Organisation mondiale de la santé qui vise à faire traiter pour le sida 3 millions de personnes d'ici 2005. Par ce don, le Canada devient le donateur le plus généreux à ce fonds.
En outre, nous allons doubler, comme l'ont indiqué le premier ministre, le ministre responsable de la Coopération internationale et Bono, l'engagement du Canada à l'égard du Fonds mondial de la lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme pour porter notre contribution à 70 millions de dollars environ à compter de 2006.
[Traduction]
Bien entendu, au-delà de ces contributions financières, d'autres formes de leadership sont nécessaires à l'échelle mondiale. Je crois que le Canada se conduit vraiment en chef de file mondial en demandant aux parlementaires d'adopter la première loi du genre au monde, un modèle pour les autres pays.
En août dernier, l'Organisation mondiale du commerce a pris une mesure décisive en autorisant l'exportation de médicaments génériques vers les pays en développement pour soigner des maladies comme le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme. C'était une étape cruciale. Toutefois, comme il s'agissait d'une dérogation à des règles internationales, l'OMC a laissé les États membres décider de l'appliquer ou non. Quelques semaines plus tard, le Canada a annoncé son intention de modifier sa loi sur les brevets pour appliquer la décision de l'OMC. Moins de 10 mois plus tard, nous sommes sur le point de donner suite à l'engagement pris par le Canada et Jean Chrétien en adoptant une loi qui fera du Canada le premier pays à mettre en œuvre la décision de l'OMC.
Monsieur le président, je dois dire que le processus législatif était plus complexe que nous ne l'avions prévu, mais nous étions déterminés à aller jusqu'au bout. Nous avons consulté intensivement les fabricants de médicaments brevetés et génériques ainsi que les ONG qui travaillent avec les gens et les États du monde en développement. Nous avons maintenant un projet de loi que nous pouvons fièrement arborer en disant que le Canada a tenu sa promesse. Lorsqu'il sera adopté, les fabricants canadiens de médicaments génériques pourront demander des licences pour produire et exporter des médicaments essentiels vers les pays en développement.
Je n'entrerai pas aujourd'hui dans les détails de cette mesure étant donné que, comme vous l'avez dit monsieur le président, il y a un certain nombre de fonctionnaires qui pourront vous en parler. Il y a toutefois un détail technique sur lequel je voudrais attirer votre attention, honorables sénateurs.
Comme vous vous en souviendrez, le paragraphe 21.18(2) du projet de loi prévoit l'établissement d'un comité consultatif qui fera des recommandations quant aux médicaments qui pourront être exportés aux termes de la loi. Suite à un oubli, le projet de loi que vous avez sous les yeux ne prévoit pas la participation des sénateurs à l'évaluation des candidatures à ce comité. Vous avez toutefois reçu une lettre de l'honorable Lucienne Robillard, ministre de l'Industrie, qui s'engage à rectifier cette erreur en proposant une modification à la loi à la première occasion. Je vous présente mes excuses pour cette omission. J'espère que cette promesse répondra à vos objections légitimes à cet égard et que vous nous permettrez d'adopter le projet de loi au cours de cette session et de réparer cette omission grâce à un amendement ultérieur.
Je tiens également à souligner les répercussions que ce projet de loi aura. Ces répercussions ne se limiteront pas aux vies qui seront sauvées grâce aux médicaments génériques de fabrication canadienne. En étant le premier pays au monde à adopter une telle mesure, nous montrons aux autres pays fabriquant des médicaments qu'ils peuvent, et doivent, suivre rapidement notre exemple en exportant leurs médicaments vers les populations dans le besoin. Je crois que cet encouragement assurera une réponse vraiment mondiale à une crise sanitaire mondiale.
Les Canadiens devraient être fiers de ce que nous accomplissons ici aujourd'hui, honorables sénateurs. Bien entendu, il faut faire plus pour promouvoir la santé et protéger la sécurité des populations mondiales. La communauté internationale doit s'unir pour prendre un grand nombre d'autres initiatives.
C'est toutefois une mesure vraiment importante et d'une grande portée que vous examinez aujourd'hui. La rapidité avec laquelle ce projet de loi franchit les étapes de notre système législatif montre la sincérité de l'engagement du Canada à tenir les promesses qu'il a faites à l'Afrique et au monde en développement.
Je vous remercie de contribuer à cette réalisation historique. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Le sénateur Keon: Merci pour votre déclaration, monsieur le ministre. J'appuie entièrement ce projet de loi. Mes questions ne visent aucunement à entraver son adoption. Je voudrais toutefois soulever les questions importantes que cette mesure va susciter. Vous êtes sans doute la personne la mieux placée pour y répondre.
Il ne fait aucun doute que le détournement de médicaments est un problème énorme associé à la mise en œuvre de ce programme. Il fait également très peu de doute que la contrefaçon va poser un sérieux problème.
Néanmoins, le problème le plus grave de tous résultera de la mise en œuvre d'un programme qui vise à traiter des dizaines de milliers, ou même des millions de personnes atteintes du sida. Cela va faire d'une population de patients en phase aiguë ayant une très courte espérance de vie, une population de malades chroniques ayant une très longue espérance de vie et qui pourront toujours transmettre la maladie. Par conséquent, ce programme bien intentionné pourrait se révéler catastrophique. Je soulève la question parce que cette initiative doit être associée à un programme de prévention de la transmission du sida. Nous allons augmenter le bassin de population porteur du sida et capable de transmettre la maladie.
Je vous pose la question suivante: Votre gouvernement va-t-il entreprendre immédiatement, par les voies compétentes, un programme de prévention du sida dans les régions où les médicaments seront mis à la disposition de la population?
M. Graham: Merci, sénateur Keon. Ce sont là deux bonnes questions.
Vous avez sans doute vu les garanties que prévoit le projet de loi C-9 pour éviter le détournement de médicaments. Il aborde certainement la question. Il se peut qu'il soit nécessaire d'améliorer les dispositions à cet égard en prenant d'autres règlements. Les rédacteurs du projet de loi étaient conscients du problème et tout le monde espère que nous l'avons résolu.
La deuxième question que vous avez soulevée nous préoccupe également. Dans ma circonscription du centre-ville de Toronto-Centre—Rosedale, nous avons appris depuis longtemps, comme d'autres régions urbaines, que pour faire face au VIH/sida il fallait informer les gens sur les pratiques sexuelles sans risque et les modes de transmission de la maladie. C'est un sujet dont on a beaucoup parlé au Canada. Comme vous le savez, nous mettons des médicaments à la disposition des Canadiens. Dans le monde occidental, les gens ne meurent plus du VIH/sida. Même si on ne les guérit pas entièrement, on leur donne la possibilité de mener une vie productive.
Pour ce qui est des risques de transmission, je ne pense pas que nous puissions, pour cette raison, refuser les mêmes possibilités aux populations d'Afrique ou des autres pays. Comme je l'ai dit, cette crise engendre d'autres problèmes énormes: il n'y a plus de policiers; il n'y a plus d'enseignants; il n'y a plus de médecins. Il y a des millions d'orphelins en Afrique. Bientôt, il n'y aura même plus de travailleurs agricoles. Des populations entières sont décimées. Voilà l'autre aspect à considérer.
Oui, il nous faut des programmes pour informer les gens des pratiques sexuelles sûres. C'est un élément important des activités de l'ACDI. L'ACDI a de nombreux programmes qui s'adressent aux femmes et aux populations vulnérables pour leur enseigner ces pratiques. Nous travaillons en ce sens avec les gouvernements des pays touchés. Les tabous sociaux posent un sérieux problème dans certains pays.
Honorables sénateurs, j'ai passé beaucoup de temps avec les dirigeants d'Afrique et des autres pays touchés par le VIH/sida. Même un pays comme la Russie — qui refusait de reconnaître l'existence du sida il y a dix ans — prend des mesures énergiques pour éduquer sa population. Il y a eu un changement d'attitude radical comme on peut le voir en Uganda. Cela doit faire partie du processus. Je suis d'accord avec vous.
Le sénateur Graham: Je félicite moi aussi le gouvernement pour cette initiative. Les Canadiens peuvent être fiers de ce qui va être accompli grâce à cette mesure. Pourriez-vous nous dire pourquoi les conditions d'admissibilité ne sont pas les mêmes pour les pays de l'OMC et ceux qui n'en font pas partie?
M. Graham: Nous avons étendu l'application du projet de loi à tous les pays moins développés. Comme vous vous en souviendrez, comme il s'agissait d'une décision de l'OMC, ce sont les membres de l'OMC qui y ont donné suite au départ. Nous avons étendu cette initiative à la totalité des pays moins développés.
Le président: Qu'ils soient membres ou non de l'OMC?
M. Graham: En effet.
Le sénateur Kinsella: Je suis d'accord avec le sénateur Keon. L'opposition au Sénat appuie le projet de loi. C'est une excellente initiative.
Vous avez mentionné une lettre de votre collègue, Mme Robillard. Le président peut-il nous dire si cette lettre a déjà été déposée?
Le président: Pas encore, parce que nous attendons Mme Robillard dans quelques minutes. Je pensais que nous pourrions lui faire la courtoisie de la laisser me remettre cette lettre.
Le sénateur Kinsella: Monsieur le ministre, lundi soir, nous avons laissé entendre au Sénat que l'opposition serait prête à adopter le projet de loi immédiatement si, du côté du gouvernement, on acceptait d'apporter l'amendement sur lequel vous avez attiré notre attention et que le gouvernement appuie. Malheureusement, votre collègue, le leader du gouvernement au Sénat, n'a pas donné son accord.
Pensez-vous que si nous apportons cet amendement demain, nous pourrons le faire adopter par la Chambre des communes avant que vous ne partiez?
M. Graham: Je ne peux pas parler au nom du leader à la Chambre, sénateur Kinsella. Je comprends ce que vous dites. Je peux comprendre pourquoi le leader au Sénat n'a pas accepté de procéder ainsi. C'est à cause des exigences de la Chambre des communes et de ses procédures.
Je n'en suis pas certain. Je ne peux pas vous garantir ici aujourd'hui que nous pourrions faire adopter cet amendement d'ici vendredi. Vous conviendrez tous, j'en suis sûr, qu'il est très important d'adopter ce projet de loi maintenant.
Je vous demande respectueusement d'écouter ce que le ministre de l'Industrie veut vous expliquer à ce sujet. J'espère que cela vous satisfera. Nous pourrons ensuite adopter un amendement dès que possible.
Le sénateur Kinsella: Dans le projet de loi et dans votre déclaration, vous avez parlé de l'engagement que le Canada avait pris envers l'Afrique. Cet engagement a-t-il été précisé et exprimé par écrit? Y a-t-il un document contenant tous les détails de l'engagement que le Canada a pris envers l'Afrique et dont ce projet de loi n'est qu'un des éléments?
À la page 1 du projet de loi, on peut lire que cette mesure a pour objet «de donner effet à l'engagement du Canada et de Jean Chrétien envers l'Afrique...» Pourquoi cette distinction? Y a-t-il une différence entre l'engagement pris par la population canadienne, le premier ministre du Canada et un engagement pris par Jean Chrétien? C'est ce que dit le projet de loi. Je n'ai encore jamais vu de projet de loi dont le titre mentionne le nom d'une personne entre parenthèses. Je ne me lancerai pas dans une discussion quant à savoir s'il aurait mieux valu mettre le nom de Stephen Lewis que celui de l'ancien premier ministre ou même le nom de Bono, car je pense que notre engagement envers l'Afrique est d'une importance cruciale, comme vous l'avez expliqué. Néanmoins, il serait intéressant de savoir s'il existe un document précisant tous les détails de l'engagement dont cette mesure fait partie.
M. Graham: Je vous promets de vous fournir ce document s'il existe. Je vais demander aux fonctionnaires de se renseigner. Je dois toutefois dire que, comme vous le savez, on a modifié le libellé initial de l'article que vous mentionnez pour ajouter le mot «Canada» en plus du nom de l'ancien premier ministre.
L'ancien premier ministre a pris un engagement envers l'Afrique au Sommet du G-8 à Kananaskis. Cet engagement a également été pris à la Conférence de Monterrey lorsque nous avons promis d'augmenter notre aide d'environ 8 p. 100 par an pendant une certaine période et de consacrer la moitié de cette somme à l'Afrique. Par conséquent, l'engagement envers l'Afrique est davantage un engagement politique qu'un document précis. Cet engagement se retrouve aussi dans des initiatives comme le nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique, NEPAD, dont j'ai parlé, l'augmentation de l'aide à l'Afrique, les garanties, les différents engagements concernant le VIH/sida et d'autres initiatives. Il ne s'agit pas d'un document unique; c'est une façon d'exprimer une série d'initiatives visant à permettre à l'Afrique de redevenir une entité viable au sein de laquelle les gens pourront exploiter leur plein potentiel.
Le président: Sénateurs, si vous le permettez, je constate que Mme Robillard est arrivée et je sais que M. Graham doit partir. Je tiens à le remercier d'être venu.
Je vais également distribuer aux membres du comité la lettre que Mme Robillard a adressée à la présidence, car je crois que le moment est venu de le faire. Je tiens à souhaiter, au nom du comité, une cordiale bienvenue à Mme Robillard, comme nous l'avons fait pour M. Graham.
[Français]
L'honorable Lucienne Robillard, ministre de l'Industrie: C'est avec un très grand plaisir que je comparais devant vous cet après-midi.
[Traduction]
Je me réjouis d'être avec vous pour discuter de ce projet de loi important. Une fois adopté, ce projet de loi sera une mesure dont tous les Canadiens pourront être fiers. J'ai l'intention d'être brève afin de laisser du temps pour les questions.
Mon collègue, le ministre des Affaires étrangères, était ici et je ne vous parlerai donc pas des répercussions internationales.
[Français]
Ce texte de loi fait suite à une décision de l'Organisation mondiale du commerce de déroger à certaines dispositions de l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce. La décision vise à permettre, à certaines conditions, l'exportation de versions homologuées de médicaments brevetés à des pays membre de l'OMC qui sont incapables de fabriquer les leurs.
Je dois vous souligner que l'OMC n'oblige pas ses membres à prendre une mesure particulière. Personne n'a jamais dit que le Canada devrait mettre la main à la pâte, cependant, notre conscience collective — je dirais nos valeurs canadiennes — nous impose de le faire. Il s'agit d'un impératif moral et d'un besoin pressant d'agir et d'agir vite. Nous espérons vraiment que le leadership du Canada va servir d'exemple à d'autres pays dans le monde.
Le projet de loi C-9 repose sur l'équilibre des différents intérêts. D'une part, il y a les grands objectifs humanitaires qui consistent à faciliter l'acheminement de produits pharmaceutiques vitaux vers les pays en développement. D'autre part, nous devons toujours protéger l'intégrité de notre régime, de la propriété intellectuelle, et veiller à ce que nos obligations internationales sur ce plan soient respectées.
Il aurait été impossible d'élaborer cette législation sans la bonne volonté, les compétences et l'engagement d'une vaste gamme d'intervenants. Je tiens à vous souligner que, depuis le début, les fabricants de médicaments et de produits pharmaceutiques brevetés et génériques se sont fait les ardents champions de ce projet. De la même façon, des organismes non gouvernementaux ont contribué de façon appréciable pour s'assurer que ce qui était proposé en théorie fonctionnera bel et bien dans la pratique.
[Traduction]
Je sais que les membres du comité sont tous au courant des principales dispositions de ce projet de loi, mais j'aimerais insister brièvement sur certains des amendements que nous avons adoptés à la suite de l'examen approfondi qui a été effectué à l'autre endroit.
Nous avons réussi à améliorer énormément cette mesure tout en préservant un juste équilibre. La principale modification a été notre décision d'abandonner le droit dit de premier refus. Cette disposition aurait permis aux détenteurs de brevets d'éviter l'octroi d'une licence s'ils étaient prêts à fournir eux-mêmes les médicaments nécessaires aux mêmes conditions. Les parties prenantes, et surtout l'industrie des médicaments génériques, nous ont dit que ce n'était pas une bonne chose. Nous avons donc agi.
Aux termes de notre nouvelle proposition, les fabricants de médicaments génériques n'auront plus à avertir le détenteur du brevet avant de signer un contrat d'approvisionnement avec un pays importateur admissible. Néanmoins, conformément à nos obligations internationales, ces compagnies devront toujours demander une licence volontaire au détenteur du brevet avant de demander une licence obligatoire.
Pour favoriser un juste équilibre, nous avons également décidé d'inclure une clause de bonne foi pour s'assurer que les compagnies qui utilisent ce régime respecteront le caractère humanitaire de notre initiative. Cette clause limite le prix maximum d'un médicament générique à 25 p. 100 du prix moyen au Canada du médicament breveté ou bien au prix de revient, plus une marge bénéficiaire de 15 p. 100. Certains se sont plaints que la limitation des profits dissuaderait les fabricants de médicaments génériques de participer à cette initiative. Je n'y crois pas. Premièrement, ces conditions sont très équitables. Mais surtout, cette initiative ne devrait pas servir à faire de gros bénéfices, mais à sauver des vies.
D'autres éléments du projet de loi restent à peu près inchangés. Par exemple, nous avons maintenu une série de contrôles visant à faire en sorte que les médicaments ne soient pas détournés à des fins commerciales. D'autre part, le projet de loi contient toujours une liste de produits préautorisés pour traiter le VIH/sida, la tuberculose, le paludisme et d'autres épidémies. Cette liste s'inspire de la liste des médicaments essentiels de l'Organisation mondiale de la santé. Cette liste servira de guide pour l'exportation des médicaments les plus efficaces, les plus sûrs et les plus rentables répondant aux besoins prioritaires du système de soins de santé. Les médicaments qui doivent figurer sur la liste ont fait l'objet d'énormément de discussions à l'autre endroit. Je peux assurer aux membres du comité que l'établissement de cette liste a été mûrement réfléchi. Je dois signaler que divers amendements ont été adoptés pour inclure des médicaments qui, au départ, n'étaient pas sur la liste.
Toutefois, cette liste n'est pas immuable. Il faut qu'elle puisse répondre aux besoins futurs des pays importateurs. Pour cette raison, il y a, dans le projet de loi, des dispositions permettant d'ajouter d'autres produits si nécessaire. Un comité consultatif composé de divers experts et praticiens de la santé sera constitué pour faire des recommandations au gouvernement à ce sujet.
Comme mon collègue, le ministre des Affaires étrangères, l'a souligné, suite à un oubli, le projet de loi ne prévoit pas la participation des sénateurs à l'évaluation des candidats qui feront partie de ce comité. Je vous présente mes excuses pour cette omission. Comme je l'ai indiqué dans ma lettre au sénateur Stollery, j'ai l'intention de la réparer.
J'espère toutefois que vous voudrez bien commencer par adopter le projet de loi, après quoi nous pourrons réparer cet oubli en apportant les modifications nécessaires à la Loi sur les brevets à la première occasion.
[Français]
Il est à noter également que nous avons prévu une clause de réexamen du projet de loi d'une période de deux ans. Cette clause nous permettra de remédier aux éventuelles lacunes de la loi après sa mise en application.
[Traduction]
Comme vous le savez, le projet de loi a été appuyé à l'unanimité à la Chambre des communes, ce qui est rare. Cela en dit long sur la noblesse de ses objectifs et ce qu'il peut faire pour alléger les souffrances dans le monde. Une occasion historique s'offre à nous. Je vous demande votre appui pour faire avancer rapidement cette initiative.
Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions. Mes collaborateurs et les fonctionnaires des cinq ministères qui participent à ce projet m'accompagnent.
Le sénateur Di Nino: Vous êtes la bienvenue, madame la ministre. J'ai deux questions que je vais vous poser en même temps. J'aimerais que vous répondiez aux deux.
Tout d'abord, je crains que cet empiétement sur les brevets ne se limite pas à cette occasion particulière. J'aimerais que vous nous précisiez quels sont les mécanismes mis en place pour limiter la portée de cet empiétement afin qu'il ne se reproduise pas.
Ma deuxième question concerne l'inclusion de pays comme le Liechtenstein et les Émirats arabes unis. Ce sont sans doute deux des pays les plus riches au monde. Si j'ai bien compris, pourquoi bénéficient-ils de cette exemption alors qu'ils devraient pouvoir acheter des médicaments brevetés au moins aussi facilement que les Canadiens?
Mme Robillard: Je vais répondre à votre première question concernant l'empiétement sur les brevets.
[Français]
Dans le projet de loi, vous allez trouver vraiment des articles très précis, en particulier l'article 21.04, qui essaient de contrôler complètement cette façon de faire. J'aimerais peut être que mes fonctionnaires ajoutent à ma réponse parce que c'était une des préoccupations soulignées par l'industrie.
Une des difficultés que nous avons eues de mettre en application cette décision est que lorsqu'on lit cette décision, parfois elle manque de clarté. On doit interpréter cette décision et en même temps continuer à respecter nos obligations internationales en matière de brevet. C'est là que la discussion s'est faite et je pense que dans la loi, on a ce qu'il faut pour essayer de contrecarrer.
M. Éric Dagenais, directeur, Direction des politiques des brevets, Industrie Canada: À l'article 21.04 de la loi, il est clair qu'une autorisation pour fabriquer un médicament ne peut être accordée qu'à quelqu'un qui vise à vendre, à exporter un médicament vers les pays mentionnés à l'annexe 2, 3 ou 4. Si le pays ne figure pas à l'annexe, on ne peut pas obtenir d'autorisation pour fabriquer ce médicament. Cela doit être exporté et, ensuite, il y a une série d'obligations, entre autres, le pays importateur doit avoir notifié l'OMC et avoir démontré qu'il a une incapacité manufacturière, ainsi de suite.
Il y a des balises prévues dans la loi qui préviennent toute autre utilisation d'un brevet, par exemple, pour vendre au Canada ou ailleurs dans d'autres pays développés.
Mme Robillard: Nous avons la liste des pays.
M. Dagenais: Oui, la liste des pays que nous avons a été inspirée de la décision de l'OMC. L'OMC avait certaines mesures mises en place pour les pays les moins avancés, ils sont sur l'annexe 2. D'autres pays membres de l'OMC ont pris la décision de n'utiliser cette décision que dans des situations d'urgence ou d'autres cas d'extrême urgence, ils sont à l'annexe 4. Tous les autres membres de l'OMC, qui n'ont pas dit qu'ils l'utiliseraient que de façon restreinte, sont inclus à l'annexe 3.
Le Liechtenstein est là parce qu'il est membre de l'OMC. Ce pays n'a pas choisi d'indiquer au président du conseil qu'il allait s'en servir d'une façon limitée. Nous mettons en œuvre la décision.
[Traduction]
Le sénateur Di Nino: Je ne suis sans doute pas convaincu par la réponse que vous avez donnée à ma deuxième question. Il s'agit de deux pays extrêmement riches et je ne pense pas qu'ils aient besoin de l'aide du Canada. Je ne crois pas que nous devrions les inclure. De toute évidence, nous aurions pu nous en rendre compte et prévoir dans la loi une disposition pour exclure les pays qui n'entrent pas dans la définition de pays moins développés.
Je trouve ridicule que les Canadiens modifient la protection qu'accorde la Loi sur les brevets pour que nous puissions envoyer certains médicaments aux Émirats arabes unis. C'est un pays extrêmement riche. Je ne pense pas que ce soit une réponse satisfaisante, monsieur le président.
[Français]
Le sénateur Lynch-Staunton: Comme l'a mentionné le sénateur Kinsella tout à l'heure à votre collègue, le ministre des Affaires étrangères, le Parti conservateur au Sénat appuie ce projet de loi sans réserve, comme l'ont fait nos collègues à la Chambre des communes.
[Traduction]
Vous vous aventurez en territoire inconnu. Je suis certain qu'il y aura de nombreuses difficultés en cous de route, mais j'espère qu'avec le plein appui des fabricants de médicaments génériques et des compagnies pharmaceutiques, nous pourrons atteindre cet objectif et donner un bon départ à cette initiative. Encore une fois, nous serons des chefs de file dans le domaine de l'aide internationale.
[Français]
Je voudrais revenir sur un point, qui a l'air un peu anodin, au sujet de cet amendement que vous seriez prête à proposer pour permettre au Sénat d'être sur le même pied d'égalité que la Chambre des communes concernant l'évaluation de candidats pour le comité aviseur.
[Traduction]
Le leader du gouvernement au Sénat nous a dit cette semaine que la Chambre des communes serait dans l'impossibilité d'adopter ce projet de loi d'ici la fin de la semaine. Toutefois, selon votre calendrier, vous êtes ici jusqu'au 24 juin. Sera-t-il possible d'étudier un amendement après votre retour après le congé de la fête de Victoria?
Mme Robillard: Tout d'abord, je vous remercie d'appuyer le projet de loi. Deuxièmement, je ne crée pas de précédent en demandant l'appui du Sénat pour adopter rapidement cette mesure et jouer un rôle de chef de file sur la scène internationale.
On m'a dit que certaines erreurs avaient été commises dans d'autres projets de loi par le passé. D'autres ministres se sont engagés à apporter des modifications. Je pense notamment au projet de loi sur le tabac.
[Français]
Cela a été le cas aussi avec le projet de loi sur les limites des circonscriptions électorales. Le leader de la Chambre, dans les deux occasions, et les ministres ont pris un engagement formel, à la première occasion, de modifier ces projets de loi. Dans les deux cas que je vous cite, cela a été fait. Nous avons apporté les changements nécessaires.
Malheureusement, cela s'est passé à l'étape des amendements au comité de la Chambre des communes. C'est un oubli qui n'était pas mal intentionné, et c'est dans ce contexte que je vous demande votre collaboration.
Le sénateur Lynch-Staunton: J'accepte volontiers le fait que ce soit un oubli qui peut très bien se corriger, mais j'aimerais savoir si la correction peut être faite avant l'ajournement de l'été de la Chambre des communes, le 24 juin?
Mme Robillard: Nous voudrions adopter cette législation au plus vite, c'est pourquoi je vous demande votre collaboration.
Le sénateur Lynch-Staunton: Oui, mais quand seriez-vous prête à présenter l'amendement?
Mme Robillard: À la première occasion.
Le sénateur Lynch-Staunton: Qui serait à votre retour de la relâche de la semaine prochaine?
Mme Robillard: Lorsque cela sera possible.
[Traduction]
Le sénateur Morin: Docteur Peterson, je sais que vous êtes chargé de l'homologation des médicaments à Santé Canada. Ma question concerne l'homologation des médicaments génériques dans le cadre de cette loi. Ce projet de loi aura-t-il des répercussions sur le délai requis pour homologuer les produits canadiens qui est maintenant passé, je crois, de 670 jours à 638 jours? S'il faut approuver un certain nombre de médicaments, une soixantaine je crois, quelles répercussions cela aura-t-il sur les délais d'homologation?
Le Dr Robert Peterson, directeur général, Direction des produits thérapeutiques, Direction générale des produits de santé et des aliments, Santé Canada: Merci. Le processus d'homologation des médicaments génériques repose sur une présentation abrégée de drogues nouvelles qui se réfère aux produits brevetés déjà approuvés. Le processus d'homologation du produit breveté, qui peut durer 600 jours, a déjà eu lieu et nous utilisons donc un mécanisme différent pour examiner la présentation du médicament générique.
Dans ce cas-ci, après en avoir discuté avec le Conseil du Trésor et le ministère, nous avons pris des dispositions pour être certains de disposer de fonds spéciaux pour l'examen des produits qui nous seront soumis dans le cadre de ce programme humanitaire. Une fois que nous aurons terminé le travail concernant ce projet de loi, nous avons l'intention de rencontrer les représentants des génériques pour estimer ce que sera notre charge de travail au cours de la première année, de la deuxième année, et ainsi de suite, et d'utiliser ces fonds supplémentaires pour mettre en place les ressources nécessaires.
Le sénateur Morin: Allez-vous approuver ces produits plus rapidement que les autres produits génériques?
Le Dr Peterson: Le délai que nous visons actuellement pour l'homologation des produits génériques est de 180 jours. Le délai d'approbation dépend de la liste d'attente, car un très grand nombre de produits génériques sont destinés au marché canadien. Si nous disposons de fonds supplémentaires et d'un processus différent, nous ne nous attendons pas à ce que l'examen de ces demandes se fasse autrement que pour les produits destinés au marché canadien. Ils se trouveront toutefois dans une file d'attente différente. C'est du moins ce que nous envisageons pour le moment.
Le sénateur Morin: Les frais exigés seront-ils moins élevés que pour les autres produits?
Le Dr Peterson: Pour le moment, nous n'envisageons pas d'exiger des frais pour ce programme humanitaire.
Le sénateur Morin: L'homologation d'un produit générique dans le cadre de cette loi restera-t-elle en vigueur lorsque le médicament générique en question sera finalement vendu sur le marché canadien?
Le Dr Peterson: Oui. Les médicaments de ce programme feront l'objet du même examen, du même processus d'homologation et des mêmes formalités de présentation que les médicaments génériques destinés au marché canadien. À l'exception des marques distinctives requises pour éviter un détournement potentiel, le processus d'homologation sera pratiquement le même que si le médicament devait être mis en marché au Canada. Quand le fabricant de médicaments génériques aura réglé la question du brevet pour le Canada, il se sera déjà acquitté des formalités d'homologation, du moins en grande partie, en participant à ce programme.
Le sénateur Morin: Le fabricant de médicaments génériques n'aura donc pas à payer les frais pour que son produit se retrouve sur le marché canadien étant donné que presque tout se sera passé en dehors de ce marché et que le médicament sera déjà presque entièrement approuvé. Il y a un certain avantage à soumettre un médicament pour l'exportation s'il doit être vendu plus tard sur le marché canadien.
Le Dr Peterson: Il y aura certainement un grain de temps, car les études nécessaires, le travail de R et D du produit pharmaceutique auront déjà eu lieu. Nous pourrons tenir compte de tout cela dans le cadre de notre processus d'homologation du médicament pour le marché national et cela représentera des économies considérables.
Pour ce qui est des frais exigés, lorsqu'un produit est destiné au marché canadien, ce n'est pas la même chose que pour un programme humanitaire. Il y a en effet la question des droits de licence, des licences d'établissement et des droits de licence de produits, et il faudra aussi examiner de plus près quel devra être le processus d'homologation pour la mise en marché de ces produits au Canada. Je ne peux pas vous promettre que, dans ces circonstances, l'exemption des droits sera complète, mais il y aura des économies importantes du fait que le produit aura d'abord suivi ce processus.
Le sénateur Corbin: Je voudrais faire suite, et peut-être élucider, la question que le sénateur Di Nino a posée au sujet d'un pays comme le Liechtenstein. Je fais une distinction entre l'inscription de ce pays dans une des annexes et la demande qu'il pourrait nous adresser effectivement.
Procédera-t-on à une évaluation des moyens, à un niveau quelconque, pour évaluer la capacité de payer des pays afin d'éviter qu'ils abusent de ce programme humanitaire?
Mme Robillard: Notre réponse n'était peut-être pas assez précise. Le sénateur Di Nino a également cité l'exemple des Émirats arabes unis, qui sont inscrits à l'annexe 4. Pour avoir accès à ces médicaments, les pays inscrits à l'annexe 4 doivent d'abord adresser un avis d'intention à l'OMC. Ensuite, ils doivent prouver qu'ils n'ont pas de capacité de fabrication à l'intérieur de leurs frontières. Troisièmement, ils doivent prouver qu'ils sont dans une situation d'urgence. Cela s'applique à tous les pays inscrits à l'annexe 4 et c'est pourquoi je crois important de le préciser.
M. Dagenais pourrait peut-être vous expliquer les conditions concernant l'annexe 3.
M. Dagenais: Les deux premières conditions s'appliquent également à l'annexe 3. Si le pays est inscrit à l'annexe 3, il n'a pas à démontrer qu'il se trouve dans une situation d'urgence. Il lui suffit d'aviser l'OMC de son intention de se prévaloir de l'exemption. Il doit donc indiquer quel produit il désire importer et en quelle quantité. Il doit également certifier que sa capacité de fabrication est insuffisante ou trop limitée pour ce produit.
Si le Canada a émis une licence obligatoire, nous informerons le conseil des Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, ou ADPIC, à Genève, que nous avons émis une licence. Cet avis sera communiqué aux autres membres de l'OMC et pourrait être inscrit à l'ordre du jour de la prochaine réunion du conseil des ADPIC. Les membres de l'OMC pourraient questionner le Liechtenstein ou les Émirats arabes unis, par exemple, sur leur utilisation de cette dérogation si d'autres membres estimaient qu'elle n'était pas conforme à l'esprit de la décision de l'OMC.
Le sénateur Di Nino: Ce programme visait certainement à fournir des médicaments aux pays qui ne peuvent pas en acheter sur le marché parce qu'ils n'ont pas le financement nécessaire. Ils n'ont pas d'argent. Ces deux pays — et peut- être d'autres — ont les ressources financières nécessaires pour pouvoir les acheter sur le marché libre. Pourquoi les inclure dans un programme de cette nature? C'est la question que je pose.
Mme Robillard: Je ne sais pas si mes fonctionnaires voudront ajouter quelque chose, mais nous ne pouvons pas décider nous-mêmes de soustraire un pays ou un autre de la liste. Nous devons respecter la décision de l'OMC.
Le président: Madame la ministre, je vous remercie infiniment de nous donner de votre temps.
Je crois que nous avons maintenant d'autres témoins. Sénateur Corbin, vous vouliez dire quelque chose?
Le sénateur Corbin: Pourquoi ne pas vérifier si nos collègues n'ont pas d'autres questions à poser aux fonctionnaires du ministère étant donné qu'ils se trouvent déjà à la table.
Le président: C'est une bonne question. Permettez-moi un petit retour en arrière. Quelqu'un a-t-il d'autres questions à poser aux fonctionnaires?
Le sénateur Day: Je vérifie sur la liste qui se trouve ici. Y a-t-il quelqu'un qui représente le commissaire aux brevets et qui pourrait nous parler, ou est-ce prévu pour plus tard?
M. Dagenais: Nous pouvons en parler, mais il y a aussi des représentants.
Le sénateur Day: Laissez-moi seulement poser ma question.
Si je comprends bien ce projet de loi, lorsqu'une compagnie pharmaceutique demande l'autorisation de fabriquer un médicament et demande une licence obligatoire, tout cela passe par le Bureau des brevets et le commissaire aux brevets, n'est-ce pas?
Le président: Il y a un M. Clark ici, n'est-ce pas?
M. Doug Clark, chef de projet principal, Direction des politiques des brevets, Industrie Canada: Je suis là, mais je travaille à Industrie Canada.
Le sénateur Day: Le commissaire aux brevets peut déterminer les droits à payer pour le processus de demande.
M. Clark: Oui.
Le sénateur Day: Quels sont les contrôles en place pour que cela ne devienne pas un obstacle?
Deuxièmement, comment éviter que le propriétaire du brevet, qui détient un brevet dans un pays où le produit doit être exporté, fasse respecter ses droits dans ce pays pour éviter la vente de son produit? Dans le cas d'une licence volontaire, nous pourrions parler de l'épuisement des droits, mais je ne suis pas certain que ce principe s'applique à une licence obligatoire. Pourriez-vous me dire ce que vous en pensez?
M. Dagenais: Pour ce qui est de votre deuxième question, l'article 21.04 du projet de loi précise que quiconque demande une licence obligatoire doit certifier qu'aucun brevet ou aucune licence obligatoire n'a été émis ou n'est sur le point d'être émis dans le pays importateur.
Le sénateur Day: Dans le pays qui reçoit le médicament?
M. Dagenais: Cela protège la propriété intellectuelle des deux côtés.
M. Ramlall, de l'Office de la propriété intellectuelle du Canada, est ici et pourrait peut-être répondre à votre question concernant les frais. Je signale seulement que l'OPIC recouvre entièrement ses coûts et exige donc des frais pour l'administration des licences.
M. Vishva Ramlall, agent principal en matière de politique, Direction des stratégies organisationnelles, Bureau de la propriété intellectuelle du Canada, Industrie Canada: Au Bureau de la propriété intellectuelle du Canada, nous étudions la question en collaboration avec nos collègues d'Industrie Canada pour déterminer quels seront les frais pour l'administration de ce régime. Ce travail est en cours.
Le sénateur Day: Vous n'avez encore aucune idée du résultat?
M. Dagenais: Pour vous donner une idée de l'avant-projet de règlement qui a accompagnait le projet de loi précédent, lorsqu'il y avait un droit de renouvellement, il y avait un avis d'intention, une demande et des frais de retrait. Les droits se situaient autour de 400 $ pour l'avis d'intention, 400 $ pour la demande et 200 $ pour le renouvellement. L'avis d'intention a été supprimé. Cela peut changer légèrement le montant des droits. Ces frais tenaient compte du caractère humanitaire de cette initiative.
Le sénateur Milne: Je serai brève et sans doute assez pinailleuse.
Docteur Peterson, comment épelez-vous «cyclosporine»?
Le président: C'était une question?
Le sénateur Milne: C'est une question. J'ai l'impression que ce mot est mal orthographié dans l'annexe, monsieur.
Le Dr Peterson: Vous voulez sans doute parler des deux façons de l'orthographier, avec ou sans un «e» au bout.
Le sénateur Milne: Non, à l'annexe, page 20, ce mot est orthographié «ciclosporin». «Ciclosporin» en anglais et en français, «ciclosporine» J'ai toujours pensé que ce mot s'écrivait avec un «y».
Le Dr Peterson: C'est ce que je croyais également, sénateur.
Le sénateur Graham: Si je pose cette question maintenant, monsieur le président, c'est parce qu'elle concerne les témoins qui vont comparaître tout à l'heure. Je veux parler de l'Association canadienne du médicament générique.
Le président: Ils vont venir.
Le sénateur Graham: Ma question n'est pas pour eux.
Le président: Posez-la, alors.
Le sénateur Graham: Je vous explique seulement ce qu'il en est, monsieur le président. Soyez patient.
Dans quel but le gouvernement modifie-t-il le libellé du sous-amendement 21.04(2)f)? Cela va-t-il limiter la capacité des ONG d'acheter des médicaments pour les pays en développement?
Le président: À qui cette question s'adresse-t-elle?
Le sénateur Graham: À qui voudra y répondre. La question a été soulevée par l'Association canadienne du médicament générique et je voudrais la réponse du gouvernement.
M. Dagenais: Au départ, le projet de loi tel qu'il a été de nouveau déposé le 12 février, et lorsqu'il a été déposé en novembre, parlait seulement de «mandataire». Il y était question d'un gouvernement ou de son mandataire. Les ONG nous ont dit qu'elles préféreraient que nous changions ce libellé parce qu'elles ne se considéraient pas comme les «mandataires» du gouvernement importateur.
Après avoir consulté les parties prenantes, nous avons accepté de remplacer le mot «mandataire» par les mots «personnes ou entités» afin de mieux refléter le rôle et la nature des relations entre les ONG et les gouvernements importateurs.
Les membres du comité ont décidé d'adopter l'expression «ou de la personne ou de l'entité permise par le gouvernement du pays importateur». Ces mots ont été ajoutés — ce n'est qu'une supposition étant donné qu'il ne s'agit pas d'un amendement du gouvernement — parce que la décision de l'OMC mentionne les différentes mesures qu'un pays importateur doit prendre pour pouvoir se prévaloir de cette dérogation. Une organisation non gouvernementale qui travaille en Afrique subsaharienne ne peut pas importer un médicament à moins que le pays importateur ne prenne un certain nombre de mesures. En fait, l'ONG devrait travailler en collaboration avec le gouvernement en question. Le pays importateur doit aviser l'OMC de ses intentions. Il doit certifier qu'il n'a pas une capacité de fabrication suffisante. Certains pays importateurs doivent certifier qu'ils se trouvent dans une situation d'urgence. Ce n'est pas une ONG qui peut remplir ces formalités. Le pays importateur doit, dans les cas où il y a des brevets, émettre une licence obligatoire. Il doit donc participer pleinement à cette initiative. Dans le cas contraire, une ONG ne peut pas importer de médicaments. À mon avis, cela reflète la décision de l'OMC voulant qu'un gouvernement membre qui bénéficie de cette exemption doit participer au processus.
D'autre part, un pays pourrait prendre les mesures requises et dire: «Nous voulons importer un million de pilules de cyclosporine». Quelqu'un pourrait alors demander quelle ONG est autorisée à les importer. Oxfam ou Vision mondiale pourrait se présenter à l'OPIC en disant qu'elle veut importer le million de pilules dont le gouvernement du Botswana a besoin. Le commissaire aux brevets ne saurait pas quoi faire. Il saurait qu'un certain pays est censé importer un million de pilules, mais qu'il y a trois ONG qui affirment vouloir importer un million de pilules dans ce pays. À qui va-t-il accorder la licence obligatoire? Ce sont les raisons qui ont convaincu les membres du comité.
Le sénateur Graham: l'Association canadienne du médicament générique fait valoir, dans son mémoire, que ce sous- amendement à l'alinéa 21.04(2)f), va à l'encontre de l'amendement initial du gouvernement. Vous n'êtes pas d'accord, n'est-ce pas?
M. Dagenais: L'intention — peut être implicite — de l'amendement du gouvernement a toujours été que la «personne ou entité» agisse en collaboration avec le gouvernement importateur tout simplement parce qu'elle ne pourrait le faire à elle seule. Le gouvernement importateur a certaines mesures à prendre. Rien n'est possible sans cette coopération.
Le président: Merci beaucoup. Je pense que nous avons bien exploré le sujet. Je remercie les fonctionnaires au nom des membres du comité. Je voudrais maintenant accueillir les témoins suivants qui représentent les compagnies de recherche pharmaceutique du Canada. Je vois qu'ils sont trois.
[Français]
M. Jean-François Leprince, président, Aventis Pharmaceutique, président du comité de la propriété intellectuelle de Rx&D, Les compagnies de recherche pharmaceutique du Canada: Au nom des compagnies de recherche pharmaceutique du Canada, appelées communément Rx&D, je vous remercie de nous recevoir ici aujourd'hui. Rx&D appuie l'adoption du projet de loi dans sa forme actuelle. Nous faisons notre part. Rx&D s'est montrée proactive en montrant un soutien constant aux fonctionnaires et parlementaires chargés d'élaborer ce projet de loi d'une importance capitale. Nous avons offert non seulement notre vaste expérience de la prestation de médicaments, mais aussi de la prestation de soins aux pays en voie de développement.
En Afrique seulement, nos compagnies membres apportent leur soutien dans tous les pays, comme vous pouvez le constater sur la carte que nous avons jointe à l'annexe B de notre présentation. Est-ce suffisant? Probablement que non, mais il y a plusieurs enjeux dans les pays en voie de développement qui empêchent les patients d'avoir accès à des soins de santé sans parler des médicaments.
Pendant plus de dix ans, j'ai moi-même oeuvré et j'ai été à même de constater les souffrances des patients africains. En effet, mon rôle de responsable de l'Afrique et du Proche et du Moyen-Orient m'a amené à prendre part à des programmes visant à fournir des médicaments aux patients africains. Mon expérience personnelle m'a appris combien ces médicaments sont indispensables tout comme l'infrastructure et la formation qui en permettent la distribution et l'administration adéquate. Nous croyons que ce projet de loi C-9 est un point de départ, mais il reste encore beaucoup à faire.
[Traduction]
M. Terry McCool, vice-président, Affaires corporatives, Eli Lilly Canada Inc., vice-président du comité de la propriété intellectuelle de Rx&D, Les compagnies de recherche pharmaceutique du Canada: Les compagnies membres de Rx&D appuient le projet de loi C-9 dans sa forme actuelle, et croient qu'il a été rédigé dans un langage traduisant l'objectif de la décision de l'OMC tant en ce qui concerne l'amendement que le texte. Rx&D surveillera, au cours des deux prochaines années, l'évolution du projet de loi.
Nous sommes préoccupés par l'absence de surveillance exercée par un organisme désigné relativement aux décisions prises sur la base des circonstances propres aux demandes de licences obligatoires. Aucune décision n'est réellement prise par le commissaire des brevets concernant l'octroi d'une licence. Une simple liste de vérification suffit. Le projet de loi C-9 donne lieu essentiellement à un processus administratif qui ne tient pas compte des circonstances propres aux demandes de licences avant que celles-ci soient octroyées. Nous espérons que les règlements tiendront compte de nos préoccupations à l'égard du détournement des produits.
Certaines ONG nous ont également fait part de leur désir de pouvoir conclure un accord directement auprès des fournisseurs. Rx&D est, et a toujours été d'avis, que les ONG devraient pouvoir conclure un accord visant la fourniture de produits aux pays dans le besoin. Cependant, il est important qu'elles le fassent, au titre de la décision de l'OMC, avec l'autorisation du gouvernement du pays importateur. Le projet de loi indique que l'acheteur peut être une personne ou une entité du gouvernement, ou une personne ou une entité ayant obtenu l'autorisation du gouvernement du pays importateur d'agir comme tel. Nous sommes favorables à cette disposition.
Ce sont les pays qui devront se défendre eux-mêmes devant le Conseil des ADPIC ou le Canada par des voies diplomatiques si des éléments du projet de loi ne sont pas respectés. Leur participation est, par conséquent, très importante. Notre expérience sur place nous permet également d'affirmer que les plus grandes réussites surviennent lorsque les administrations locales y participent et contribuent à l'amélioration des soins de santé. Nous croyons aussi, dans le cadre du projet de loi C-9, que les mesures anti-détournement peuvent être renforcées dans le cadre du processus de réglementation, sans que des modifications législatives ne soient apportées.
Outre la manière dont les taux de redevance sont établis, les règlements devraient prévoir l'examen de l'innocuité et de l'efficacité des produits exportés sans nuire à l'approbation des produits destinés au marché intérieur; que l'adoption de mesures anti-détournement, telles que l'apparence des produits exportés, soit différente de celle du produit original, soit le marquage et l'étiquetage, de manière à ce que ces produits se distinguent clairement du produit original; ainsi que la non-réimportation des produits au Canada vendus ici, nuisant au régime de protection de la propriété intellectuelle du Canada.
Malheureusement, la réalité est la suivante: certains médicaments expédiés aux pays en développement sont détournés de façon illégale dans des pays développés et n'atteignent jamais les patients dans le besoin. Le projet de loi C-9 doit favoriser la mise sur pied d'un système ouvert, transparent et permettant autant que possible d'éviter le détournement de médicaments. Un suivi proactif des médicaments exportés, des inspections préalables à leur exportation et des mesures efficaces visant à en contrer le détournement doivent être mis en place.
Il importe également de mettre en place des paramètres pour que le projet de loi conserve sa vocation humanitaire et que les contrats visant la reproduction de médicaments brevetés aux fins d'exportation ne soient pas exploités à des fins commerciales. Le fait est que la demande de médicaments dans les pays en développement est trop forte pour qu'un seul groupe puisse parvenir à y répondre. Nos compagnies membres continueront de participer activement aux programmes d'aide dont elles sont les instigatrices. Nous appuyons le projet de loi C-9 dans sa forme actuelle.
[Français]
M. Leprince: Nous continuerons de mettre en œuvre les programmes d'aide, mais nous croyons également que notre rôle auprès des pays en voie de développement se traduit par la découverte de médicaments contre les maladies graves comme le VIH/sida. Nous sommes fiers des compagnies qui travaillent à mettre au point des vaccins dont certains sont actuellement soumis à des essais cliniques, et nous avons foi en leur succès. Notre objectif est de poursuivre les travaux de recherche visant à découvrir la prochaine génération de médicaments qui permettra de combattre les maladies affligeant les patients dans le monde entier.
Je voudrais souligner, en terminant, que favoriser l'accès à des médicaments abordables n'est qu'une étape de la prestation de soins aux pays en voie de développement. Nous appuyons le premier ministre qui a annoncé une contribution de 100 millions de dollars dans un nouveau programme de l'Organisation mondiale de la santé, visant à traiter trois millions de sidéens d'ici la fin de 2005, communément appelé «trois x cinq». Mais cet engagement du Canada met en lumière l'urgence de trouver des solutions aux enjeux que sont l'accès à des médecins, des diagnostics adéquats et la mise en place d'une infrastructure viable.
Je vous remercie. Nous sommes ici pour répondre à vos questions.
[Traduction]
Le sénateur Kinsella: N'est-il pas vrai que vos compagnies membres ont toutes sortes de programmes différents qui ont permis de donner des médicaments à des pays du tiers monde au fil des ans? Je crois avoir lu quelque part — je ne me souviens plus où — que GlaxoSmithKline donnait non seulement des millions de dollars en médicaments, mais a mis en place un programme de réduction des prix pour les médicaments en question. Pourriez-vous nous expliquer cela afin que nous sachions clairement ce qu'ont fait vos compagnies membres?
M. Leprince: Je ne m'étendrai pas trop sur les programmes de réduction des prix. Je ne les connais pas très bien. J'attirerai simplement votre attention sur la carte qui se trouve en annexe. C'est une jolie carte, mais les réalités qu'elle traduit ne sont pas si jolies.
Les couleurs différentes représentent tous les traitements actuellement offerts par les compagnies de recherche pharmaceutiques pour traiter ce que j'appellerais des «maladies du monde en développement». Comme vous pouvez le voir, l'Afrique est entièrement colorée, à part une exception que j'ai constatée seulement quelques minutes avant de venir, et qui correspond au centre du Mozambique. C'est un pays que vous ne connaissez peut-être pas, mais que je connais et je peux vous dire que nous allons y remédier.
Cela dit, l'ensemble des grandes compagnies de recherche pharmaceutique poursuit actuellement au moins 25 programmes en Afrique. Ces programmes ont pour but de donner des médicaments ou d'en vendre à un prix très abordable. Mais surtout, ces programmes visent à former des médecins pour le dépistage des maladies et surtout, pour le suivi des traitements.
Je vais vous donner un exemple. C'est un exemple que je connais bien et qui concerne Aventis Pharmaceutical. Nous jouons un rôle très important dans le traitement de la tuberculose. Tout le monde parle du sida, mais la tuberculose est un fléau au moins comparable au sida en Afrique. Selon l'Organisation mondiale de la santé, un milliard de gens de plus pourrait contracter cette maladie au cours des 20 prochaines années. Comme d'habitude, 80 p. 100 des tuberculeux se trouvent dans seulement 22 pays. Sur ces 22 pays, il y a l'Afrique du Sud. L'OMS et la Fondation Mandela ont mis sur pied un programme baptisé «DOTS» qui signifie «Directly Observed Therapy Short-course». Ce programme vise à faire en sorte que les malades soient dépistés, qu'ils reçoivent le traitement approprié et qu'ils soient suivis. Si nous pouvions le faire pour tous les tuberculeux de la planète, que nous avons des chances d'atteindre dans une proportion de 90 p. 100, nous pourrions éradiquer la maladie. Les données pour l'Afrique du Sud montrent qu'à l'heure actuelle moins de 30 p. 100 des malades bénéficient d'un dépistage ou d'un traitement.
Nous fournissons des médicaments, mais le plus important est l'engagement de 15 millions de dollars sur cinq ans qui doivent servir à former des bénévoles et des professionnels de la santé, et assurer l'uniformité des traitements ainsi que le suivi.
Le sénateur Di Nino: J'examine la carte sur laquelle vous avez attiré notre attention. C'est une situation horrible. Il est donc compréhensible que nous appuyions tous ce projet de loi. Je ne pense pas qu'un seul sénateur — et certainement pas un seul député — ne soit pas prêt à appuyer cette mesure.
Toutefois, le projet de loi soulève certaines questions et présente des faiblesses. Nous essayons de les mettre en lumière afin de pouvoir corriger ces faiblesses en temps voulu et être conscients des difficultés. Mon collègue, le sénateur Keon, a très bien su les mettre en lumière. Nous devrions surtout nous préoccuper du problème du détournement de médicaments et des conséquences que cela peut avoir.
J'ai deux questions à vous poser. Premièrement, étiez-vous là quand j'ai interrogé les fonctionnaires au sujet des abus potentiels? J'en ai parlé dans un autre rapport en disant que c'était un premier empiétement. Êtes-vous convaincu que cet empiétement sur les brevets se limitera à cette situation particulière, pour cet usage particulier? Cela n'ouvre-t-il pas la porte à des abus? Les fonctionnaires disent que la loi est assez claire à ce sujet. En êtes-vous satisfait?
Mme Adrienne Blanchard, avocate générale, Gowling, Lafleur and Henderson, Les compagnies de recherche pharmaceutique du Canada: Les fonctionnaires ont dit que l'article 21.04 accorde un droit limité, ce qui est vrai. Aucun article précis du projet de loi ne porte sur l'épuisement des droits de brevet, mais nous croyons qu'un grand nombre de ces questions pourraient être réglées grâce à une réglementation pour faire en sorte qu'il n'y ait pas de détournement de produits qui seront revendus au Canada.
Nous croyons possible de résoudre un bon nombre de ces questions au moyen du règlement d'application étant donné qu'il s'agit d'un droit de brevet limité, qui est accordé sous la forme d'une licence limitée aux fabricants de médicaments génériques afin qu'ils puissent fabriquer ces produits pour les exporter vers les pays en question.
Le sénateur Di Nino: N'oubliez pas non plus qu'une révision est prévue au bout de deux ans. Cela vous laissera le temps de vous faire une opinion. J'apprécierais que vous nous en fassiez part, car nous aurons de nouveau à nous pencher sur cette mesure.
En supposant que nous obtenions les pouvoirs que nous ont promis les deux ministres, le Sénat aura un rôle à jouer dans la nomination au comité consultatif. Avez-vous une suggestion à nous faire à ce sujet? Quelles devraient être les qualifications des membres de ce comité consultatif?
M. McCool: Pour constituer un comité d'experts, il faut réunir des gens qui connaissent bien la maladie que le médicament doit traiter. S'il s'agit du sida, il y a au Canada un certain nombre de gens qui soignent les sidéens et qui connaissent les traitements actuels et à venir. Ils pourraient prendre les décisions dans ce domaine. S'il s'agissait du paludisme ou de la tuberculose, vous pourriez faire appel à des spécialistes des maladies infectieuses. Je crois que des représentants de Santé Canada devraient faire partie de ce genre de comité parce qu'ils savent quels sont les médicaments sur le point d'être homologués et leurs indications. Il serait souhaitable d'avoir à la fois des gens de l'extérieur et des gens du gouvernement.
Le sénateur Di Nino: Je suis d'accord avec vous. C'est sans doute ce qu'il faudrait faire.
Que faites-vous des experts du système de distribution qui pourraient veiller à ce geste de générosité du Canada — et nous l'espérons, d'autres pays — rejoint les bonnes personnes, au bon endroit? Pensez-vous qu'ils devraient jouer un rôle également au sein de ce comité consultatif?
M. McCool: Nous ne pensons pas qu'ils aient un rôle à jouer. Si vous constituez un comité d'experts, leur expertise devrait être centrée sur les médicaments. Le problème que vous avez soulevé suscite toutefois nos inquiétudes. Comment amener les médicaments jusqu'aux patients sans se heurter à divers obstacles gouvernementaux dans le pays de destination ou sans que le médicament ne soit détourné avant d'arriver dans un centre de soins? Nous sommes très inquiets.
Cela fait partie des questions qui devront être réglées au moyen des 100 millions de dollars que le gouvernement a annoncé cette semaine pour créer l'infrastructure, le réseau de distribution et des cliniques. Il faut mettre un système en place pour que ces médicaments arrivent jusqu'aux patients, sans quoi cela ne marchera jamais.
Le sénateur Morin: Ce matin, le gouvernement a annoncé 75 millions de plus pour le programme mondial de lutte contre le sida.
[Français]
Ma première question a déjà été posée par le sénateur Kinsella. Je pense que vous avez raison d'attirer notre attention sur cette carte qui montre l'importance du problème en Afrique et la liste des programmes qui sont réalisés par les compagnies de recherche pharmaceutique. Je n'y reviendrai pas. Vous avez été très éloquent tantôt.
[Traduction]
J'ai quelques questions à poser à M. McCool, si vous le voulez bien. Je viens de recevoir un document concernant le projet de loi C-9. On y fait valoir que les compagnies qui fabriquent des produits brevetés, comme les vôtres, sont très chicanières. L'article 21.17 ouvre la porte à des batailles judiciaires qui pourraient aller à l'encontre des objectifs de cette mesure. Ce document propose un certain nombre d'amendements. L'un d'eux consiste à supprimer ce nouvel article. Que répondez-vous à cela?
M. McCool: Nous avons dit, dès le début, qu'il faudrait que le gouvernement exerce une supervision pour s'assurer que ces médicaments servent à des fins humanitaires et non pas commerciales. Non, nous ne recommandons pas de supprimer cet article.
Si c'est vraiment destiné aux pays les moins développés du monde, les prix des médicaments génériques devront être extrêmement bas pour pouvoir concurrencer ceux des produits génériques déjà vendus dans ces pays. Il me semble peu probable que ce seuil soit dépassé. Nous continuons à soutenir l'intention du gouvernement qui est de veiller à ce que ces médicaments servent à des fins non commerciales.
Le sénateur Morin: M. Dagenais, d'Industrie Canada, a parlé de la permission du gouvernement. Il nous a convaincus que c'était un amendement nécessaire.
Le projet de loi prévoit une licence obligatoire d'une durée de deux ans, plus un renouvellement automatique. Cela donne quatre années au total. Pourquoi ne pas supprimer cette limite et autoriser des contrats à long terme qui seraient avantageux pour les organismes d'aide?
M. McCool: Le Canada est le premier pays à adopter cette loi. Il faut des freins et des contrepoids. S'il n'y a aucune limitation, en cas de problèmes, vous ferez plus de tort que de bien. À notre avis, quatre ans constituent une durée satisfaisante. Cela veut dire que vous devrez présenter une nouvelle demande de licence obligatoire. Ce ne devrait pas être un gros problème.
Le sénateur Morin: Auparavant, il y avait des redevances fixes de 2 p. 100. Cela a été changé dans la nouvelle version du projet de loi et les redevances sont plus flexibles. On recommande ici de rétablir les redevances maximums à un taux fixe de 2 p. 100. Que pensez-vous de cette recommandation?
M. McCool: Un taux fixe irait à l'encontre de l'accord sur les ADPIC. Le taux de redevances devrait être approuvé licence par licence et se baser sur la valeur du contrat dans le pays importateur. Par conséquent, ce taux pourrait être très faible dans les pays moins développés, mais un peu plus élevé dans des pays comme le Liechtenstein et les Émirats arabes unis. Il ne devrait pas être fixe. Nous sommes donc d'accord pour enlever le taux de la loi et l'inscrire plutôt dans le règlement. Les fonctionnaires travaillent à une formule pour l'établissement du taux de redevances, qui sera équitable et assez bas.
Le sénateur Morin: Vous dites que vous ne vous attendez pas à des poursuites en justice sur cette question. Il y aura une formule. Enfin, comme vous le savez, l'annexe 1 énumère un certain nombre de médicaments. Il s'agit surtout des médicaments essentiels désignés par l'Organisation mondiale de la santé.
On recommande d'éliminer l'annexe 1, autrement dit, d'autoriser tous les médicaments et d'autoriser de nouvelles associations à doses fixes pour le traitement du sida. Je sais qu'il y en a un certain nombre en vente et qui sont, je crois, incluses dans la liste. Toutefois, si j'ai bien compris, il y aurait de nouvelles associations à doses fixes pour le sida. Seriez-vous d'accord sur ce dernier point?
M. McCool: Pour ce qui est de la première question, une liste de médicaments aide à s'assurer que les médicaments s'attaquent aux maladies que la loi vise à traiter dans les pays moins développés, à savoir le sida, le paludisme et la tuberculose. Si c'est étendu à tous les médicaments et toutes les maladies, personne ne sait où cela ira. Toutefois, si le problème se pose vraiment en Afrique subsaharienne, commençons par remédier à la situation là-bas.
Pour ce qui est des doses fixes, certaines sont approuvées par Santé Canada et mises en marché. Elles pourront faire l'objet d'une licence obligatoire et elles se retrouveront sur la liste. D'autres associations à doses fixes ne sont pas approuvées. Les tests n'ont pas été faits et il serait risqué de commencer à autoriser l'exportation de médicaments que nous ne sommes peut-être pas prêts à autoriser dans notre propre pays.
Le sénateur Morin: Voulez-vous dire que nous devrions autoriser l'exportation vers l'Afrique de médicaments essentiels et non pas de médicaments qui cherchent à améliorer le style de vie?
M. McCool: Ce genre de médicaments n'existe pas.
Le sénateur Morin: Certaines personnes ne seront pas d'accord avec vous.
Le sénateur Keon: M. Leprince et M. McCool ont laissé entendre que l'exportation de médicaments était associée à un certain programme. Je suppose que c'est pour protéger votre propre réputation, mais c'est quand même louable.
Le problème que pose ce projet de loi — et je l'ai déjà dit au ministre tout à l'heure — est qu'il s'agit d'un effort isolé pour faire face à un problème vraiment effroyable. Cela ne fait aucun doute, mais c'est un effort isolé pour combattre une maladie avec de nombreux médicaments, sans y joindre d'autres programmes sanitaires. Surtout en ce qui concerne le sida, la situation mondiale pourrait largement s'aggraver, car à moins d'associer un programme de soins de santé à cette initiative, les programmes de prévention nécessaires et autres mesures dont nous bénéficions ici, au Canada, vont manquer. Un malade recevra des médicaments contre le VIH et vivra 25 ans de plus pendant lesquels il continuera de propager la maladie.
Vous avez maintenant les structures nécessaires en place pour faire les choses comme il faut. Vous ne le faites que pour une infime fraction de la population, mais vous le faites bien. Seriez-vous prêt à offrir votre programme à l'Organisation mondiale de la santé — je sais que vous travaillez déjà avec elle — de façon plus énergique et à coopérer à cette initiative afin que chaque fois que des médicaments contre le sida seront distribués, ils soient associés à un programme de prévention? Cela ne s'applique pas au paludisme ou à la tuberculose, mais au sida et c'est un programme formidable. Quel travail faites-vous avec l'Organisation mondiale de la santé pour améliorer ces efforts?
M. McCool: Nous travaillons beaucoup avec l'Organisation mondiale de la santé, mais surtout, nous travaillons avec nos partenaires sur le terrain. Ces partenariats aident à faire en sorte que les patients reçoivent les traitements appropriés et continuent de les suivre. Une bonne partie des efforts consistent à rejoindre les malades pour qu'ils débutent leur traitement. Il y a une très grave pénurie de personnel sanitaire en Afrique subsaharienne, ce qui limite ce que l'on peut faire.
Je sais qu'on s'est fixé l'objectif louable de traiter 3 millions de personnes d'ici 2005. Ce sera toutefois extrêmement difficile à moins que le Canada et d'autres fonds mondiaux ne dépensent des milliards de dollars pour régler le problème d'infrastructure afin que ces médicaments soient bien utilisés. Ce que je crains le plus, c'est qu'en distribuant des médicaments sans le suivi nécessaire, le virus devienne plus résistant et que le problème devienne plus grave et plus difficile à traiter.
Je ne suis pas entièrement convaincu qu'il y ait actuellement une pénurie de médicaments en Afrique subsaharienne. Il y a un manque d'infrastructure et de travailleurs de la santé publique, de même que toutes sortes d'autres problèmes qu'il faut résoudre si nous voulons augmenter l'approvisionnement en médicaments dans ces régions. À l'heure actuelle, grâce aux partenariats qui se trouvent sur place, aux fabricants de produits génériques qui sont sur le terrain et qui viennent d'autres pays, l'approvisionnement a augmenté et est largement suffisant. Ce qui me préoccupe, c'est comment nous allons résoudre les autres problèmes et non pas comment nous allons augmenter l'approvisionnement en médicaments.
Le sénateur Keon: Quoi qu'il en soit, vous associez votre approvisionnement en médicaments à l'infrastructure nécessaire afin de ne pas nuire à votre réputation. Comment pouvez-vous faciliter cette initiative en associant la fourniture de médicaments à l'infrastructure appropriée? C'est la question que je vous pose.
M. Leprince: Sénateur Keon, je vous ai entendu dire tout à l'heure que lorsqu'on commence à traiter une maladie comme le sida, le fait qu'on passe d'une situation de soins aigus à une situation de soins chroniques présente certains risques, et vous avez raison. En fait, ce risque est dû au manque de suivi du traitement. Pour des maladies comme le sida ou la tuberculose, c'est la source de résistance.
Pour répondre à votre question, les compagnies de recherche pharmaceutique travaillent généralement en collaboration étroite avec l'OMS parce que cet organisme est là pour valider le régime thérapeutique que nous voulons appliquer à une maladie. Sur le terrain, nous travaillons en collaboration étroite avec les ONG. Je pourrais vous citer de nombreux exemples de ces «accords tripartites». Ce sont des accords entre l'OMS, qui est chargée d'approuver le type de traitement, la compagnie pharmaceutique, qui fournit les médicaments ainsi que les programmes d'éducation et de formation nécessaires et l'ONG chargée de la mise en œuvre du programme. Ce genre de triangle fonctionne généralement bien parce que les compagnies pharmaceutiques ne peuvent pas tout faire à elles seules.
Le sénateur Mahovlich: Selon la carte que vous avez présentée, environ le tiers de l'Afrique n'est pas coloré en orange, qui représente le VIH/sida. Comment se fait-il qu'il n'y ait pas de sida dans ces régions? Les gens sont mieux sensibilisés?
M. Leprince: Ce n'est pas ce que la couleur indique. Les couleurs de la carte correspondent aux programmes actuellement en place. S'il n'y a pas de couleur, cela veut dire qu'il n'y a aucun programme dans la région. Dans certains cas, il se peut qu'il y ait un programme contre le sida dans une région qui n'est pas colorée en orange. Nous voulions toutefois indiquer les programmes pour d'autres maladies graves qui sévissent en Afrique et qui ne sont peut- être pas aussi visibles ou connues que le sida. Par exemple, la maladie du sommeil est très grave en Afrique, de même que la tuberculose. Le sida est une véritable catastrophe, mais c'est l'arbre qui masque la forêt. Cette carte cherche à montrer que le sida existe effectivement en Afrique, mais que malheureusement il y a aussi d'autres maladies graves qui nécessitent la même attention.
Le sénateur Graham: Combien de compagnies représentez-vous aujourd'hui?
M. Leprince: Nous représentons 62 compagnies pharmaceutiques et biopharmaceutiques du Canada qui sont actuellement membres de Rx&D.
Le sénateur Graham: Monsieur le président, le témoin pourrait-il nous fournir une liste complète de ces compagnies?
Le président: Je suis sûr que le témoin se fera un plaisir de nous donner la liste des compagnies qu'il représente.
M. Leprince: Nous allons le faire.
Le président: Si le comité est d'accord, je vais vous remercier infiniment d'être venus témoigner. Vous en avez sans doute assez de comparaître devant des comités, mais votre témoignage a été très apprécié. Nous vous remercions pour ces renseignements.
Il nous reste un témoin à entendre. Ensuite, si vous êtes d'accord, nous pourrions nous pencher sur le projet de loi proprement dit.
Monsieur Keon, vous avez certainement témoigné à plusieurs reprises devant le comité de la Chambre des communes sur cette mesure. Si vous voulez bien nous faire un bref exposé, nous vous poserons ensuite quelques questions.
M. Jim Keon, président, Association canadienne du médicament générique: Je me réjouis de pouvoir faire connaître les opinions de notre industrie sur le projet de loi C-9. Je commencerai par l'objectif de cette mesure, qui est la mise en œuvre d'un accord que le Canada a signé à l'Organisation mondiale du commerce, en août dernier, et qui visait à mettre davantage de médicaments, à un prix plus bas, à la disposition des pays pauvres qui n'ont pas la capacité de les fabriquer eux-mêmes.
Il est vrai que les fabricants de produits brevetés ont des programmes en Afrique et ailleurs, mais il est vrai également que la communauté internationale, y compris le Canada, considère qu'il n'y a pas suffisamment de médicaments à des prix que ces pays peuvent payer. Le but de ce projet de loi est d'augmenter le nombre de compagnies pharmaceutiques qui fabriquent ces médicaments grâce à une concurrence accrue, afin de faire baisser les prix et de les rendre plus abordables.
Le Canada a annoncé aujourd'hui l'octroi d'un montant d'argent pour le Fonds mondial. Nous disposons de sommes d'argent impressionnantes pour acheter des médicaments, surtout contre le VIH/sida. Néanmoins, la communauté internationale ne veut pas payer les prix occidentaux des médicaments brevetés. Elle veut des produits offerts par des fabricants de médicaments génériques à des prix plus bas. Tel est le but de ce projet de loi, et il est important de ne pas le perdre de vue.
D'autre part, cette mesure fait suite à un accord qui a été négocié il y a deux ou trois ans. C'est le résultat de l'accord de Doha conclu en 2001. La plupart des questions qui ont été abordées ici en ce qui concerne le détournement, la liste de produits, et cetera, ont été négociées dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce. Des décisions ont été prises et encore une fois, le Canada y a souscrit.
Dans les grandes lignes, nous estimons que le Canada aurait dû mettre en œuvre l'accord de l'OMC, tel quel, sans autres restrictions. Pour en revenir à l'objectif général de cette mesure, qui est d'accroître la quantité et l'approvisionnement de ces médicaments, notre secteur soutient le projet de loi. Pour qu'il soit efficace il faut, bien entendu, que les fabricants de médicaments génériques fabriquent des médicaments et les offrent à la communauté internationale.
Nous soutenons cette mesure. Toutefois, nous avons signalé six domaines dans lesquels ce projet de loi nous paraît défectueux. Je n'entrerai pas dans les détails étant donné qu'ils figurent dans notre mémoire, mais je vais souligner des problèmes potentiels que nous voyons en vous expliquant pourquoi, à notre avis, cette mesure ne sera pas aussi efficace qu'elle aurait pu l'être.
Premièrement, le projet de loi invite les brevetés à aller devant la Cour fédérale pour contester le caractère humanitaire d'un contrat. Les brevetés nous ont amenés devant les tribunaux plus de 325 fois au cours de la dernière décennie au sujet de la réglementation des brevets en vigueur au Canada. Ils ont traîné devant les tribunaux des personnages aussi illustres que Nelson Mandela. Je ne suis pas vraiment très rassuré d'entendre dire aujourd'hui qu'il n'y aura probablement pas beaucoup de litiges. Nous nous attendons à ce qu'il y en ait.
Deuxièmement, un certain nombre d'organisations non gouvernementales ont exigé le droit d'acheter ces médicaments et d'en faire la distribution. C'est l'amendement que le gouvernement avait proposé. Le comité de la Chambre a ensuite remplacé cette disposition par l'obligation d'obtenir l'autorisation du gouvernement pour obtenir une licence et le droit d'exporter les médicaments vers un pays en développement.
Troisièmement, les licences sont émises pour deux ans et ne peuvent être renouvelées qu'une seule fois. Nos fabricants recherchent la sécurité à long terme. Nous parlons de médicaments qui sont brevetés au Canada. Un grand nombre des médicaments contre le VIH/sida seront encore brevetés pendant dix ans au Canada. Vous demandez à des compagnies de mettre au point des produits destinés à un marché d'exportation limité. Elles ne pourront pas les vendre au Canada, aux États-Unis ou en Europe avant de nombreuses années.
Depuis le début, nous avons fait valoir que nous voudrions un processus clair, simple et sûr. Plus vous le compliquez, plus il peut être contesté devant les tribunaux et créer des incertitudes en ce qui concerne le taux des redevances ou la durée du contrat et moins les compagnies seront prêtes à investir dans la fabrication de ces produits.
La quatrième question est celle du taux des redevances. Comme je l'ai dit, elles avaient été plafonnées à 2 p. 100. Elles seront maintenant fixées dans le règlement d'application. Les fonctionnaires nous ont assuré que ce règlement serait approprié, mais comme nous ne l'avons pas encore vu, cela continue de nous inquiéter.
Pour ce qui est de la liste des médicaments, l'accord de l'OMC ne limitait pas le type de médicaments qui pouvaient être offerts à ces pays. Si un pays est dans une situation d'urgence et a besoin de médicaments, l'accord de l'OMC l'autorise à les demander. Le Canada a décidé, de son propre chef, de limiter ces médicaments à une certaine liste. Nous pensons que cette restriction n'est pas nécessaire.
Enfin, comme d'autres, nous voudrions que le gouvernement du Canada participe à cette initiative. Contrairement à certaines des grandes compagnies multinationales qui fabriquent des médicaments brevetés, la plupart des génériques canadiens n'ont pas de représentants sur le terrain en Afrique. Nous n'avons pas les ressources voulues pour fournir des services de soutien, et cetera. Nous espérons vivement que le gouvernement du Canada participera activement à tout ce processus, qu'il travaillera avec nos compagnies, qu'il leur dira où sont les besoins, qu'il collaborera avec les organismes internationaux et essaiera de mettre en marché les médicaments les plus concurrentiels. Nous l'incitons à s'orienter dans cette voie.
Cela dit, nous appuyons le projet de loi. Nous n'avons pas du tout essayé de le ralentir. Nous estimons nécessaire d'attirer l'attention sur plusieurs faiblesses qui risquent de diminuer la quantité de médicaments qui seront fabriqués dans le cadre de ce nouveau système.
Le sénateur Morin: Je vous remercie de votre exposé, monsieur Keon. Comme vous l'avez souligné, la contribution et la coopération des fabricants de produits génériques sont essentielles pour ce programme. Comme vous le savez, les génériques de l'Inde et du Pakistan ont joué un rôle actif dans ce domaine depuis déjà un certain temps. Récemment, la Fondation Clinton et la Banque mondiale ont signé un contrat avec l'Inde et exportent maintenant des médicaments génériques de l'Inde vers l'Afrique.
Quelle concurrence cela représente-t-il pour nos produits canadiens? Vous connaissez la situation mieux que moi. Cela va-t-il se répercuter sur notre propre programme?
M. Keon: Je ne sais pas, mais il est certain que les fabricants canadiens de médicaments génériques examinent ces contrats pour voir quels sont les prix négociés par rapport à leurs propres prix de revient. Ils veulent déterminer s'ils peuvent être concurrentiels. Je crois que les décisions seront prises médicament par médicament. Ils vont devoir étudier l'importance actuelle de l'approvisionnement. Si les prix sont trop bas, cela les dissuadera de fabriquer le produit.
Le sénateur Morin: Le processus d'homologation est-il le même dans ces pays qu'au Canada? Je veux parler du processus d'homologation de Santé Canada. Quel est-il en Inde, au Brésil et dans ces pays?
M. Keon: À bien des égards, ces pays ont un processus d'homologation beaucoup moins rigoureux que le Canada. Comme vous le savez, le projet de loi exige qu'un médicament générique soit approuvé par Santé Canada selon les normes canadiennes avant de pouvoir faire l'objet d'une licence d'exportation. Ce sera un autre facteur.
L'Association canadienne du médicament générique fait partie d'une alliance internationale. La semaine dernière, nous avons rencontré les représentants de l'Organisation mondiale de la santé. Ils s'intéressent de très près à ces nouvelles associations médicamenteuses à doses fixes. L'OMS a approuvé des produits de compagnies indiennes comme Cipla et Ranbaxy Pharmaceuticals. Ces produits à doses fixes sont approuvés par l'OMS et sont maintenant vendus dans plusieurs pays d'Afrique. Le projet de loi ne donnera pas accès à un grand nombre de ces médicaments.
La concurrence, notamment avec les compagnies indiennes, mais aussi avec les compagnies brésiliennes pose de nombreux problèmes.
Le sénateur Morin: A-t-on fait de bonnes études cliniques des nouveaux médicaments à doses multiples? N'oublions pas que nous ne les avons pas au Canada. Ils ne sont pas sur le marché canadien, mais ils sont vendus par l'Inde et le Pakistan. Ont-ils été étudiés et évalués soigneusement dans ces pays avant d'être exportés vers l'Afrique? Dans le cas contraire, je m'étonne que l'Organisation mondiale de la santé les ait autorisés.
M. Keon: L'Organisation mondiale de la santé a mis au point un protocole pour l'examen de ces médicaments. Les médicaments génériques sont approuvés comme l'équivalent d'un produit breveté. En général, on fait des études cliniques pour démontrer que le produit est absorbé par l'organisme au même rythme, dans le même délai et avec la même concentration. L'OMS a établi des protocoles pour permettre aux fabricants de soumettre des données comparant leurs produits aux divers médicaments brevetés et démontrer qu'ils sont équivalents et efficaces. L'Organisation mondiale de la santé a donné sa bénédiction à ces produits.
Le sénateur Di Nino: Si nous nous penchons sur cette question c'est évidemment parce qu'on l'impression, la conviction, que les médicaments visant à traiter ces maladies, surtout le VIH/sida, ne sont pas offerts à ces pays en quantité suffisante, n'est-ce pas?
M. Keon: Le but de ce projet de loi est effectivement d'augmenter l'approvisionnement en médicaments.
Le sénateur Di Nino: Même s'il y a des compagnies — vous venez de nous parler du Pakistan et de l'Inde — qui produisent ces médicaments, il y a quand même une pénurie, n'est-ce pas?
M. Keon: L'Organisation mondiale de la santé croit qu'il y a une pénurie de ces médicaments. Comme on l'a dit, l'OMS a mis sur pied un programme pour traiter 3 millions de personnes d'ici 2005. Elle invite les fabricants de produits génériques du monde entier à participer à la fabrication de ces médicaments.
Le sénateur Di Nino: Une fois ce projet de loi adopté, les compagnies que vous représentez pourront produire à cette fin une certaine quantité de médicaments à inscrire sur la liste. Cela va-il répondre à la majeure partie des besoins de l'Afrique? À quel pourcentage des besoins pensez-vous que notre pays pourrait répondre une fois que vous serez en mesure de produire à pleine capacité?
M. Keon: Ce projet de loi n'est pas une solution à court terme. Nous n'exporterons pas de médicaments dans les trois mois à venir. Premièrement, la loi n'entrera en vigueur qu'une fois que les règlements auront été adoptés. Je crois que c'est prévu pour cet automne.
Il faut de 18 mois à deux ans pour mettre au point un médicament générique. Il faut se procurer les substances chimiques nécessaires, établir la formulation et terminer les tests cliniques avant de soumettre le tout à Santé Canada. Si Santé Canada vous fait des difficultés, il faut les régler. Il faut faire tout cela et obtenir l'approbation de Santé Canada avant de pouvoir offrir son produit sur le marché international.
Notre industrie cherche à mettre en place l'organisation nécessaire pour qu'avec le temps, nos compagnies puissent participer à cette initiative et nous avons au Canada certains des meilleurs fabricants de médicaments génériques au monde.
À court terme, vous ne pouvez pas vous attendre à ce que des contrats d'approvisionnement en médicaments génériques soient conclus au cours des quelques mois à venir. Ce sont des produits brevetés au Canada; nos compagnies ne les fabriquent pas actuellement. Il faudra du temps pour réunir les ressources nécessaires, mettre ces médicaments au point et les faire homologuer. Il s'écoulera un certain temps avant que le Canada ne joue un rôle important.
Le sénateur Di Nino: Dois-je également comprendre que, même après, vous devrez concurrencer le reste du monde?
M. Keon: Tout à fait. Et c'est normal. L'accord de l'OMC s'applique à 110 pays ou plus. Comme je l'ai dit, son but est de fournir des médicaments de bonne qualité au meilleur prix. Si nos compagnies peuvent soutenir la concurrence et fournir ces produits, ce sera formidable; dans le cas contraire, je suppose que ce sera les autres fabricants.
Le sénateur Di Nino: En théorie, nous pourrions nous lancer dans toute cette entreprise sans pouvoir fournir une bonne partie des médicaments nécessaires à cause de la différence de coût entre le Canada et l'Inde ou d'autres pays.
M. Keon: Le projet de loi est important pour deux raisons. Une des raisons pour lesquelles le Canada est le premier à agir est que nous avons une importante industrie du médicament générique. Le Canada a donc la possibilité de fournir ces produits. Deuxièmement, il est important que les autres pays adoptent le même type de loi. Le Canada le fait. Je crois que l'Union européenne va adopter des règlements cet automne pour nous emboîter le pas. J'espère que les pays du monde entier adopteront une loi semblable. Le projet de loi canadien est un modèle qui incitera les autres pays à faire la même chose. C'est également important.
Le sénateur Morin: La qualité de notre système d'homologation des médicaments — et le Dr Peterson est dans la salle — est également un facteur qui pourrait améliorer les chances du Canada.
M. Keon: Les médicaments canadiens sont réputés comme des produits de haute qualité dans le monde entier. Nous vendons nos médicaments génériques dans une centaine de pays. C'est un de nos atouts; le produit vient du Canada. Nous voyons souvent que, dans l'Internet, des gens essaient de faire passer leurs produits pour des produits canadiens.
Le sénateur Di Nino: Les témoins précédents, qui représentaient les autres compagnies pharmaceutiques, nous ont dit qu'un grand nombre de programmes en vigueur dans ces pays offrent certains services ainsi que des médicaments à prix réduit. Les membres de votre organisation participent-ils également à des programmes de réduction des prix dans ces pays ou dans d'autres? Ce projet de loi vise à offrir certains médicaments et services que les compagnies de recherche pharmaceutique semblent déjà fournir. Avez-vous des programmes de ce genre?
M. Keon: La plupart de nos compagnies ne sont pas établies dans les pays africains. Voilà pourquoi nous avons beaucoup insisté pour que le gouvernement permette au maximum la participation d'organismes internationaux comme l'Organisation mondiale de la santé, l'ONUsida ainsi que les ONG importantes comme Oxfam et Médecins sans frontières. Nos compagnies se spécialisent dans la fabrication et la fourniture de médicaments de bonne qualité et à prix concurrentiel. C'est sur ce plan que nous envisageons notre principal rôle. Nous ne pensons pas — du moins au départ — que les génériques seront en première ligne pour soigner les gens sur le terrain. Non.
Le sénateur Di Nino: Si vous voulez le faire, rien ne vous en empêche. Vous pouvez aller offrir des programmes dans certains de ces pays.
M. Keon: Oui. La différence entre les génériques et les brevetés est que, dans l'ensemble, nos compagnies ont des plus petits moyens et n'ont pas les ressources internationales dont disposent certaines de ces compagnies pharmaceutiques. C'est une des raisons pour lesquelles les fabricants de médicaments génériques indiens peuvent vendre leurs produits 10 fois ou 20 fois moins cher que les médicaments brevetés. Il y a des limites à cela.
N'oubliez pas que ce projet de loi est une mesure humanitaire et que vous demandez à des entreprises commerciales de fabriquer ces produits. Elles voient également les choses sous cet angle. Elles doivent veiller à ne pas s'aventurer sur un terrain trop incertain. J'en reviens à ce que j'ai dit tout à l'heure au sujet du risque de litiges, et cetera. Les marges bénéficiaires sur ces produits sont très faibles. Nous ne voulons pas nous lancer dans des batailles avec les fabricants de médicaments brevetés.
Le sénateur Di Nino: Les grandes compagnies qui fabriquent des médicaments génériques sont-elles publiques ou privées? Peut-on obtenir des renseignements financiers sur ces entreprises comme c'est le cas pour les brevetés?
M. Keon: J'ai un comité exécutif composé de sept compagnies pharmaceutiques. Cinq d'entre elles appartiennent maintenant à des intérêts étrangers. Certaines sont cotées en bourse. Teva, qui possède maintenant Novopharm, est cotée en bourse. Vous pouvez obtenir ses rapports annuels et tous les renseignements la concernant. Deux des grands fabricants de médicaments génériques du Canada, Apotex et Pharmascience, sont toujours des sociétés privées.
Néanmoins, que ces sociétés soient publiques ou privées, elles ne veulent pas devoir justifier tous leurs coûts devant les tribunaux pour prouver que leur contrat est humanitaire et non pas commercial. Au fil des ans, les brevetés ont très bien résisté et n'ont jamais eu à ouvrir leurs livres pour justifier leurs prix. Les génériques n'ont pas envie non plus de le faire devant les tribunaux.
Le président: Si le comité est d'accord, je voudrais proposer l'étude article par article après la comparution de ce témoin. Je vais toutefois donner la parole au sénateur Graham.
Le sénateur Graham: Monsieur Keon, vous étiez dans la salle quand j'ai soulevé la question de l'alinéa 21.04(2)f) avec les représentants du gouvernement. J'ai lu votre mémoire. Vous y laissez entendre que ce sous-amendement va à l'encontre de l'amendement du gouvernement. De toute évidence, vous croyez que le nouveau sous-amendement va empêcher les ONG d'acheter des médicaments pour les pays en développement. Avez-vous été satisfait de la réponse des fonctionnaires?
M. Keon: Quand le gouvernement a présenté ses amendements à la Chambre des communes, il a renoncé à exiger un lien avec un pays importateur. Apparemment, il estimait ces dispositions suffisantes.
Je répondrais que, depuis le début, nous souhaitons nous associer avec les principales ONG, surtout Médecins sans frontières et Oxfam. Nous savons qu'elles auraient aimé avoir le droit et la possibilité d'acheter ces médicaments sans restrictions. Nous sommes pour et je le maintiens. Il serait préférable, et plus probable dans certaines circonstances de conclure d'importants contrats à long terme avec ces organisations plutôt qu'avec les gouvernements de certains pays pauvres.
Le sénateur Graham: À votre avis, le sous-amendement nuit aux efforts que vous souhaitez?
M. Keon: En effet. C'est le message que nous voudrions transmettre. Nous croyons que le projet de loi présente des défauts qui risquent d'empêcher de produire d'importantes quantités de ces médicaments au Canada. Oui.
Le sénateur Graham: Monsieur le président, je voudrais demander à ce témoin de nous donner la liste des compagnies qu'il représente.
Le président: Merci beaucoup. Je suis sûr que le témoin se fera un plaisir de vous donner cette liste.
Le sénateur Corbin, le parrain du projet de loi, a une question à poser, après quoi nous remercierons le témoin et nous passerons à l'étude article par article.
Le sénateur Corbin: Je pose des questions seulement si c'est nécessaire.
Monsieur Keon, en ce qui concerne la divulgation de vos prix de revient, si vous devez aller devant les tribunaux, ces renseignements ne seront pas rendus publics. Ils seront remis au juge en toute confidentialité. Par conséquent, vos droits seront protégés et cette disposition du projet de loi devrait mettre fin à vos inquiétudes, n'est-ce pas?
M. Keon: C'est une nouvelle disposition du projet de loi. Nous n'en sommes pas entièrement certains. Le projet de loi semble dire que si votre coût dépasse 25 p. 100 du prix en vigueur au Canada, vous devrez le justifier. Nous trouvons insultant que nous ayons à fournir des explications et à ouvrir nos livres pour justifier nos coûts. Comment le tribunal va-t-il prendre sa décision? Qui va examiner nos livres?
Le sénateur Corbin: Ces renseignements sont remis personnellement au juge. Personne d'autre ne les voit.
M. Keon: Peut-être.
Le sénateur Corbin: Si c'est nécessaire.
M. Keon: Si nécessaire, mais qui va nous traîner pour cela devant la Cour fédérale? Ce sera seulement le breveté.
Le président: Je voudrais remercier le témoin au nom du comité.
Nous allons passer à l'étude article par article du projet de loi C-9. Êtes-vous d'accord?
Des voix: D'accord.
Le président: Je vais suivre ma liste.
L'examen du titre est-il reporté?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
L'article 1 est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
L'article 2 est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
L'article 3 est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
L'article 4 est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
L'annexe 1 est-elle adoptée?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
L'annexe 2 est-elle adoptée?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
L'annexe 3 est-elle adoptée?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
L'annexe 4 est-elle adoptée?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
Le titre est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
Êtes-vous d'accord pour adopter ce projet de loi sans amendement?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
Êtes-vous d'accord pour que je fasse rapport du projet de loi à la prochaine séance de la Chambre?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
Le sénateur Corbin: Pouvons-nous convenir qu'en votre absence, si vous devez vous absenter, le vice-président déposera le rapport en votre nom?
Des voix: D'accord.
Le président: Je remercie tout le monde.
La séance est levée.