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APPA - Comité permanent

Peuples autochtones


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES PEUPLES AUTOCHTONES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mardi 25 octobre 2022

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd’hui, à 9 h 4 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier les responsabilités constitutionnelles, politiques et juridiques et les obligations découlant des traités du gouvernement fédéral envers les Premières Nations, les Inuits et les Métis et tout autre sujet concernant les peuples autochtones.

Le sénateur Brian Francis (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, j’aimerais commencer par reconnaître que nous sommes réunis aujourd’hui sur le territoire traditionnel et non cédé du peuple algonquin anishinabe, dont la présence ici remonte à des temps immémoriaux. Je suis le sénateur micmac Brian Francis, d’Epekwitk, aussi connue sous le nom d’Île-du-Prince-Édouard, et je suis président du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones. Avant de commencer notre réunion, j’aimerais demander aux membres du comité de se présenter en indiquant leur nom et leur province ou territoire.

Le sénateur Arnot : Bonjour. Je suis David Arnot, de la Saskatchewan.

La sénatrice Hartling : Bonjour. Je suis Nancy Hartling, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Bonjour. Je suis la sénatrice Sandra Lovelace Nicholas, du Nouveau-Brunswick, sur le territoire wolastoq.

Le sénateur Christmas : Bonjour tout le monde. Je suis le sénateur Daniel Christmas, de la Nouvelle-Écosse, de la Première Nation de Membertou.

La sénatrice Coyle : Bonjour tout le monde. Je vais ajouter à la présence micmaque de la côte Est. Je suis Mary Coyle, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Tannas : Je suis le sénateur Scott Tannas, de l’Alberta.

Le président : Bonjour tout le monde. Je vous remercie de vous joindre à nous aujourd’hui. J’aimerais demander aux témoins qui se joignent à nous à distance de garder leur microphone en sourdine en tout temps, à moins qu’on leur donne la parole. Si vous éprouvez des difficultés techniques, veuillez nous le signaler dans la discussion sur Zoom. Je tiens également à rappeler à tous que l’écran de Zoom ne doit pas être copié, enregistré ou photographié. Toutefois, les délibérations officielles peuvent être partagées par l’entremise du site Web du Sénat.

Aujourd’hui, nous sommes ici pour poursuivre notre étude sur la mise en œuvre fédérale de la Loi sur le cannabis en ce qui concerne les peuples autochtones sur le territoire qui est maintenant connu comme le Canada.

Nous entendrons deux groupes de témoins au cours de la réunion d’aujourd’hui. J’aimerais maintenant vous présenter les témoins du premier groupe. Nous accueillons donc Edward Lennard Busch, directeur général de l’Association des chefs de police des Premières Nations, Rob Monteforte, sergent-détective, Groupe de la lutte anti-drogue, Service de police des Six Nations et Jeff Laforte, sergent chef du Service de police des Premières Nations de File Hills.

Chaque témoin fera une déclaration préliminaire d’environ cinq minutes. Nous passerons ensuite à une série de questions d’environ cinq minutes par sénateur. Comme nous disposons d’un temps limité, je demanderais à chacun de faire des interventions aussi brèves et précises que possible. Pour éviter d’interrompre un intervenant ou de lui couper la parole, j’indiquerai aux témoins ou aux sénateurs quand il leur restera une minute sur le temps qui leur est imparti. Dans le cas où les témoins ne peuvent pas fournir une réponse complète à une question, je leur demanderais d’envoyer une réponse écrite à la greffière avant le vendredi 4 novembre 2022.

Edward Lennard Busch, directeur général, Association des chefs de police des Premières Nations : Je vous salue de l’Alberta. Comme on l’a déjà dit, je suis le directeur général de l’Association des chefs de police des Premières Nations…

Le président : Je suis désolé, monsieur Busch, mais je dois vous interrompre, car nous avons des problèmes de son ici. Nous vous reviendrons sous peu. La qualité du son pose problème et nous ne pouvons pas poursuivre les délibérations, car les interprètes ne sont pas en mesure d’interpréter vos paroles.

Malheureusement, en raison de problèmes techniques, nous ne serons pas en mesure d’entendre la déclaration de M. Busch. Je vous présente toutes mes excuses. Nous entendrons maintenant la déclaration préliminaire de M. Monteforte.

Rob Monteforte, sergent-détective, Groupe de la lutte anti-drogue, Service de police des Six Nations : Bonjour tout le monde. Je m’appelle Rob Monteforte et je suis sergent-détective dans le Groupe de la lutte anti-drogue du Service de police des Six Nations. Je fais partie de ce groupe depuis trois ans.

Le dernier mandat que nous avons eu à traiter dans le cadre de la Loi sur le cannabis remonte à l’année dernière, à peu près à l’été. Dans l’ensemble, nous n’avons pas eu de difficulté à obtenir des mandats relatifs à la Loi sur le cannabis et à les exécuter. Parmi les problèmes auxquels nous faisons face dans notre collectivité, mentionnons le fait que nous avons environ 30 magasins de cannabis illicites sur l’ensemble du territoire. À la suite de la promulgation de la Loi sur le cannabis, notre conseil de bande a formé la Commission du cannabis des Six Nations. Lorsque cette commission du cannabis a mis en œuvre sa propre loi sur le contrôle du cannabis, puisqu’il y avait un certain retard, plusieurs dispensaires de cannabis ont été ouverts. Nous les avons assujettis à la loi, ce qui a provoqué des réactions importantes dans la collectivité et a donné lieu à des manifestations.

Dans l’ensemble, nous ne recevons pas beaucoup de plaintes au sujet des magasins de cannabis dans la collectivité. Notre unité antidrogue ne compte que trois personnes pour tout le territoire des Six Nations, et nous consacrons la majeure partie de notre temps au trafic du fentanyl, de sorte que nous avons rarement le temps de nous occuper des questions relatives à la Loi sur le cannabis. Si nous recevons des renseignements selon lesquels un dispensaire vend d’autres substances illicites, nous examinerons la situation et nous appliquerons la loi. Mais pour le moment, en raison de nos effectifs limités et, comme je l’ai dit, des problèmes liés au fentanyl dans la réserve, nous n’avons traité aucune question liée à la Loi sur le cannabis depuis l’année dernière.

D’après mon expérience de la procédure judiciaire dans le cadre de la Loi sur le cannabis, personne n’est condamné à une peine de prison et l’amende infligée varie de 1 000 à 5 000 $. Un grand nombre des dispensaires font ce montant en une seule journée. La majorité des dispensaires ouvrent le même jour ou le lendemain de l’exécution d’un mandat de perquisition dans leurs locaux.

Nous en sommes donc là. En qui concerne l’application de la loi, nous ne voyons aucune mesure concrète du côté des tribunaux. En ce qui concerne nos ressources, nous n’avons tout simplement pas le temps, en ce moment, de passer une semaine à faire de la surveillance et à exécuter un mandat de perquisition, de traiter ensuite les éléments de preuve et d’aller au tribunal pour tenter d’obtenir l’imposition d’une amende.

Le président : Je vous remercie, monsieur Monteforte. Nous devions entendre M. Laforte, mais il n’est pas avec nous pour le moment. Nous allons donc passer aux questions.

Mais avant, j’aimerais demander aux membres du comité qui sont dans la salle de s’abstenir de s’approcher trop près de leur microphone ou de retirer leur écouteur s’ils le font. Cela permettra d’éviter toute rétroaction sonore qui pourrait avoir un impact négatif sur le personnel du comité dans la salle. Nous passons maintenant aux questions.

Le sénateur Tannas : Je vous remercie beaucoup d’être ici aujourd’hui. Vous avez indiqué qu’il y avait 30 magasins ouverts dans la réserve. Avez-vous une estimation du pourcentage de personnes qui viennent de l’extérieur de la réserve pour acheter de la marijuana dans ces magasins comparativement aux clients qui viennent de la réserve?

M. Monteforte : Au cours des observations effectuées lors de nos activités de surveillance, nous avons constaté qu’un plus grand nombre de personnes non autochtones venaient acheter du cannabis dans les magasins situés à la périphérie de la réserve, c’est-à-dire plus près d’une ville où d’autres agglomérations. Par contre, certains des magasins situés au cœur de la réserve ont plutôt un plus grand nombre de clients qui viennent de la communauté.

Tout le monde aime prendre le chemin le plus court. Ils peuvent aller dans ces magasins, acheter le produit et repartir, comme dans les stations-services et les tabagies. Tout le monde aime s’arrêter au premier magasin sur la route et repartir avec ses achats. Nous n’observons pas beaucoup d’allées et venues dans les magasins qui sont situés au centre de la réserve.

Le sénateur Tannas : Je vous remercie.

Le sénateur Christmas : Je vous remercie beaucoup, monsieur Monteforte. À votre avis, le cannabis représente-t-il un problème important dans la communauté des Six Nations? Les choses ont-elles changé depuis la promulgation de la Loi sur le cannabis en 2017?

M. Monteforte : Je ne considère pas du tout qu’il s’agit d’un problème important. Comme je l’ai dit, nous recevons très peu de plaintes à ce sujet. De temps en temps, nous recevons un appel au sujet d’une odeur, mais dans l’ensemble, notre plus gros problème en ce moment, c’est la présence du fentanyl dans la réserve. Nous ne nous intéressons même pas au cannabis, sauf si nous apprenons que certains magasins vendent d’autres substances illicites. On n’a signalé aucune surdose causée par des produits achetés dans ces magasins.

Le problème auquel nous faisons face est plutôt lié à la façon dont les produits sont présentés. Dans un magasin de cannabis visé par la loi situé à l’extérieur de la réserve, cela fonctionne comme pour les cigarettes, c’est-à-dire que l’emballage des jujubes, par exemple, sera neutre. Par contre, dans la réserve, les jujubes au cannabis peuvent porter la mention Skittles ou Smarties. Un enfant peut voir cela et, s’il ne sait pas lire, il peut facilement en consommer. C’est donc une préoccupation. Heureusement, cela ne s’est pas encore produit. Le seul problème que je vois ici est donc lié à l’emballage. C’est un problème auquel nous faisons face, mais c’est le seul.

Le sénateur Christmas : Depuis la promulgation de la Loi sur le cannabis, y a-t-il eu des crimes associés à cette loi? Est-il possible que ces 30 magasins illégaux soient une porte d’entrée pour d’autres drogues?

M. Monteforte : Je dirais que c’est certain. Chaque fois qu’il est question de cannabis, il y a un risque qu’il soit lié au crime organisé, mais encore une fois, il n’y a pas eu de cas de ce genre à notre connaissance. Nous avons eu des problèmes avec des personnes non autochtones de la région du Grand Toronto qui ont ouvert un dispensaire. Quand cela arrive, nous exécutons un mandat de perquisition dans le dispensaire et dans ce cas, les gens concernés ne sont pas revenus. Nous l’avons vu. Ils essaient d’entrer sur le territoire et d’ouvrir des boutiques sur les propriétés des gens, mais ce n’est pas vraiment un problème pour le moment.

Il y a quelques dispensaires qui ont été l’objet de vol à main armée, mais pas plus que les tabagies.

Le sénateur Christmas : Y a-t-il des problèmes ou des difficultés dans les interactions avec les personnes intoxiquées ou aux facultés affaiblies par le cannabis? Avez-vous la formation ou l’équipement nécessaires pour le détecter?

M. Monteforte : Nous avons des agents qui ont reçu une formation à ce sujet. Si nous procédons à un contrôle routier ou que nous pensons qu’une personne conduit un véhicule avec les facultés affaiblies, la Police provinciale de l’Ontario nous aidera à effectuer des tests de sobriété sur le terrain. Je sais que quelques accusations ont été portées, mais ce n’est pas si fréquent, nous n’avons pas intercepté beaucoup de personnes intoxiquées au cannabis en public ou aux prises avec des hallucinations, par exemple. Nous ne voyons rien de tel.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Merci d’être là aujourd’hui. Vous affirmez que ces magasins sont illégaux, mais contribuent-ils positivement à l’économie des communautés?

M. Monteforte : Comme je l’ai déjà dit, le conseil de bande élu applique sa propre réglementation, donc s’il y a des magasins qui présentent une demande au conseil de bande pour ouvrir un dispensaire, nous savons d’où viennent les produits. Dans les autres magasins qu’on qualifie d’illicites, nous n’avons aucune idée de l’endroit où les produits sont fabriqués.

J’ai vu que certains dispensaires font des dons dans le temps des Fêtes et d’autres choses du genre. Dans les autres magasins, que je qualifie d’illicites, nous n’avons aucune idée de l’origine des produits ni des ingrédients qu’ils contiennent, alors que dans les dispensaires approuvés par le conseil élu, nous savons où les produits sont fabriqués, et si quelqu’un avait un problème avec un produit acheté dans un tel dispensaire, nous saurions où aller pour faire des vérifications.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Croyez-vous que la province devrait s’impliquer dans le contrôle des magasins établis dans l’une de ces communautés?

M. Monteforte : J’aime la façon dont notre conseil de bande procède. Dans la réserve, je sais que beaucoup d’Autochtones ne se sentent pas très à l’aise de traiter avec le gouvernement de l’Ontario. Comme nous avons nos propres dispensaires dans la réserve, c’est assez unique de pouvoir présenter une demande au conseil et de n’en décider qu’entre nous, dans la réserve. Je comprends que certaines personnes puissent avoir de la difficulté à traiter directement avec le gouvernement de l’Ontario. C’était un problème ici lorsqu’il y avait des descentes dans les dispensaires parce que la Loi sur le cannabis venait d’entrer en vigueur et que tout le monde considérait que c’était légal. Je pense que le délai qu’il y a eu le temps que le conseil de bande mette en place sa propre autoréglementation a évité les divisions au sein de la communauté à ce sujet. J’espère que cela répond à votre question. Je pense qu’ils préfèrent traiter avec nous, dans la réserve, plutôt qu’avec le gouvernement lui-même.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Merci.

Le président : Monsieur Monteforte, avez-vous remarqué une hausse de la consommation chez les jeunes n’ayant pas l’âge minimal prescrit depuis l’entrée en vigueur de la Loi sur le cannabis? Cette consommation provient-elle surtout d’achats illicites effectués par des adultes ou du marché illicite?

M. Monteforte : Encore une fois, il n’y a pas plus de consommation de marijuana que d’habitude chez les adolescents. Je peux vous dire que dans les équipes sportives locales et dans les lieux de rencontre locaux, je n’en vois pas trop souvent, et peu d’incidents sont signalés, bien que le cannabis soit plus facilement accessible maintenant en raison de tous les dispensaires qui ont ouvert. Nous ne constatons pas d’augmentation dans les signalements. Je vis moi-même dans la communauté, et ce n’est pas ce que je vois au quotidien.

La sénatrice Hartling : Merci aux témoins d’être ici. Je leur en suis très reconnaissante. Vous semblez être une personne très occupée et avoir beaucoup à faire, surtout avec le fentanyl, qui reste un enjeu très grave. Il y a beaucoup de choses qui se passent.

Votre rôle est probablement très complexe. Comment la légalisation du cannabis a-t-elle modifié votre rôle? De même, avez-vous constaté des difficultés dans la communauté? Je sais que vous n’avez probablement pas le temps de tout analyser, mais pouvez-vous nous en parler un peu, s’il vous plaît? Merci.

M. Monteforte : Le Groupe de la lutte anti-drogue joue un rôle unique ici. Chaque fois qu’il y a une overdose, nous enquêtons. C’est un énorme problème avec les médicaments sur ordonnance, la cocaïne et le fentanyl, et il y a un certain nombre d’overdoses. Pour nous, consacrer du temps au cannabis avec une équipe de trois personnes, ce n’est pas réaliste et ce n’est pas une bonne utilisation de notre temps. Lorsque nous découvrons qu’un dispensaire peut vendre d’autres substances illicites, des pilules, de la cocaïne ou du fentanyl, ou que nous entendons des rumeurs en ce sens, nous effectuons des perquisitions. Nous en avons fait une dans un dispensaire où nous pensions qu’il y avait du trafic illégal et nous y avons trouvé des résidus de cocaïne et des balances. C’est vraiment unique à notre situation.

La sénatrice Hartling : Avez-vous des recommandations à nous faire ou à faire au gouvernement à ce sujet?

M. Monteforte : Oui. Nous faisons beaucoup de perquisitions pour une équipe de trois personnes, comparativement aux services plus importants. Nous en faisons toutes les deux semaines. Il y a beaucoup de vendeurs de drogue ici. Nous manquons de financement dans la réserve, et je suis sûr que c’est la même chose dans d’autres communautés autochtones. Je sais que beaucoup d’autres équipes de lutte antidrogue comptent 6, 8 ou 10 hommes. Nous faisons beaucoup avec très peu, mais c’est notre communauté, nous vivons ici et nous devons le faire.

La sénatrice Hartling : Je vous remercie de votre bon travail.

La sénatrice Coyle : Merci beaucoup, sergent-détective Monteforte. C’est fantastique d’entendre votre témoignage ici, et nous vous remercions d’avoir pris le temps de vous absenter de ce travail primordial que vous faites. Je pense que nous vous entendons tous dire que vous devez concentrer vos efforts sur les problèmes très graves du fentanyl et des autres drogues qui vous préoccupent, sur les overdoses et les graves préjudices qu’elles causent dans la communauté.

Nous essayons justement de creuser la question des préjudices. L’un des objectifs de la Loi sur le cannabis était d’ailleurs la réduction des méfaits, et non l’aggravation des préjudices subis dans les communautés. Depuis l’entrée en vigueur de la loi, avez-vous l’impression de faire des constats directement liés au cannabis qui vous porteraient à dire qu’il y a plus ou moins de méfaits ou de préjudices? J’aimerais vous entendre à ce propos.

Un moment donné, certains croyaient qu’il y a des gens qui auraient consommé davantage d’alcool avant, qui pourraient changer leurs habitudes et se mettre à consommer plus de cannabis, ce qui pourrait avoir un effet atténuant, en particulier sur les gestes violents, la violence conjugale et ce genre de choses. Est-ce ce que vous observez dans votre communauté?

M. Monteforte : Non, il n’y a pas vraiment eu de changement depuis l’entrée en vigueur de la Loi sur le cannabis. Pour nous, il y a encore beaucoup d’incidents liés à l’alcool. Nous voyons des gens qui peuvent avoir consommé de l’alcool et du cannabis, mais ce n’est pas nécessairement mentionné dans les rapports qui sont portés à notre attention ou ce n’est pas ce que les agents observent sur les lieux.

Le seul véritable problème que nous rencontrons concerne l’emballage, la façon dont le produit est présenté dans les dispensaires, parce qu’il semble vraiment destiné aux jeunes, les produits ressemblent à des Skittles et à des Smarties. Ils vendent des céréales qui ressemblent à des Frosted Flakes et que quelqu’un qui n’a pas vu le symbole de THC ou pris le temps de lire l’étiquette pourrait consommer par inadvertance. C’est la crainte que nous avons, mais nous n’avons pas eu de cas de ce genre et nous n’avons pas observé de grands changements depuis l’entrée en vigueur de la Loi sur le cannabis dans notre communauté, outre l’apparition d’un grand nombre de dispensaires, mais les gens y voient une occasion de gagner leur vie et c’est ce qui se passe.

Le président : Comment le niveau de financement consenti à votre service de police influence-t-il votre aptitude à retenir le personnel?

M. Monteforte : C’est fou. Nous devrions être financés pour une unité de six à huit personnes. Dans n’importe quel service de police, il y a des personnes en congé de longue durée, il y a des blessures, des personnes peuvent affectées à d’autres enquêtes en lien avec les pensionnats. Je sais que nous avons trois ou quatre agents en congé en ce moment. Il serait extraordinaire de disposer de fonds pour gérer tout cela.

Je sais qu’il existe des équipes spécialisées pour s’occuper du cannabis. La Police provinciale de l’Ontario a une véritable équipe chargée du cannabis. Avec le financement dont nous disposons et notre équipe de trois personnes, ce n’est tout simplement pas possible. Nous aimerions bien avoir accès à cela à l’avenir. Nous sommes en pourparlers actuellement pour agrandir notre équipe et obtenir des fonds en conséquence. C’est nécessaire parce que des gens de la région du Grand Toronto et d’ailleurs viennent s’installer dans la réserve pour y vendre des drogues illicites. C’est sans arrêt ici.

Le président : Merci de tout cela.

Le temps alloué à ce groupe est maintenant écoulé. Je tiens à remercier M. Busch et M. Monteforte de s’être joints à nous aujourd’hui. Je m’excuse encore une fois auprès de M. Busch pour les problèmes de son, nous l’inviterons à nous soumettre également quelque chose par écrit.

Pour la prochaine heure, nous souhaitons la bienvenue à Me Drew Lafond, président de l’Association du Barreau autochtone, et à Me Sara Mainville, associée au cabinet JFK Law LLP.

Chaque témoin pourra faire une déclaration préliminaire d’environ cinq minutes. Nous tiendrons ensuite une séance de questions et réponses d’environ cinq minutes par sénateur.

Comme notre temps est limité, je demande à chacun de faire des interventions aussi précises et brèves que possible. Pour éviter d’interrompre qui que ce soit ou de couper la parole à quelqu’un, je vous ferai signe quand il restera une minute.

Dans l’éventualité où les témoins ne seraient pas en mesure de répondre entièrement à une question, je leur demanderai d’envoyer une réponse écrite à la greffière avant le vendredi 4 novembre 2022.

J’invite maintenant Me Drew Lafond à nous présenter son exposé.

Me Drew Lafond, président, Association du Barreau autochtone : Je salue tous les membres du Comité. Je vous remercie de votre invitation. [Mots prononcés dans une langue autochtone] Je suis ici aujourd’hui en ma qualité de président de l’Association du Barreau autochtone du Canada. Nous sommes une organisation à but non lucratif qui représente les avocats, les juges, les professeurs et les étudiants autochtones de l’ensemble du Canada.

Je me joins à vous aujourd’hui depuis le territoire des Salish du littoral et je me sens vraiment privilégié de pouvoir m’exprimer sur cette question aujourd’hui.

Dans son rapport daté de mai 2018 sur le projet de loi C-45...

Le président : Je m’excuse de vous interrompre. Malheureusement, je dois suspendre la séance. Il y a des problèmes de son.

(La séance est suspendue.)

(La séance reprend.)

Le président : Maître Lafond, je tiens à vous présenter mes excuses. J’ai le regret de vous dire que l’interprétation n’est pas possible en raison de la qualité insuffisante du son. Par conséquent, nous ne pouvons pas entendre votre témoignage.

Sachez que votre témoignage est très précieux pour le comité. Pour que vous puissiez quand même participer à cette étude, je vous invite à soumettre vos déclarations préliminaires et toute autre information pertinente par écrit d’ici le 4 novembre 2022. Notre greffière communiquera avec vous après la réunion d’aujourd’hui pour vous indiquer la marche à suivre. Encore une fois, je vous présente mes excuses les plus sincères pour ce désagrément et je vous remercie beaucoup d’avoir pris le temps de vous joindre à nous aujourd’hui.

Sur ce, j’aimerais inviter maître Sara Mainville à nous présenter son exposé.

Me Sara Mainville, associée, JFK Law LLP : Merci. [Mots prononcés dans une langue autochtone]

JFK Law LLP est un cabinet d’avocats autochtone d’envergure nationale. Je travaille depuis notre nouveau bureau de Toronto. Nous avons également des bureaux à Vancouver et à Victoria.

Je travaille avec les Premières Nations depuis que j’ai commencé à exercer le droit privé en 2005, y compris avec ma propre Première Nation, Couchiching, qui a maintenant un commerce de vente au détail de cannabis autorisé par la Première Nation et en pleine expansion, qui appartient à un entrepreneur prospère, père d’une jeune famille de six, qui a obtenu son permis en bonne et due forme. Ce magasin s’appelle The High Council, soit THC.

Ma Première Nation réglemente l’approvisionnement et l’éventail de produits que peut offrir ce magasin sous le régime de son permis pour vendre du cannabis en toute légalité. J’ai travaillé dans les situations les plus difficiles et les plus prometteuses. Parmi mes clients, on compte la grande Première Nation de Membertou, avec laquelle j’adore travailler; ainsi que les Mohawks de la baie de Quinte, que j’ai aidés à rédiger une loi provisoire sur le cannabis avant la légalisation du 17 octobre 2018, puis une loi plus robuste sur le cannabis à l’issue d’un processus de consultation communautaire de 16 mois qui a culminé avec un référendum en novembre 2019. Bien que la communauté ait voté pour la réglementation, il était clair qu’il y avait des gens motivés par des intérêts économiques qui ne voulaient être réglementés par personne dans ce processus. Là est le problème, et c’est une occasion perdue.

Voyez-vous, à Tyendinaga, la Loi sur les Indiens ne procure à personne un sentiment de protection ou de sécurité. Elle n’est pas cohérente non plus avec le processus législatif traditionnel des Haudenosaunee. Pour eux, la Loi sur les Indiens et la Loi sur le cannabis sont ancrées dans le colonialisme. J’ai travaillé de 2016 à 2019 à des moratoires et à des interdictions de magasins de cannabis sans permis dans les réserves, selon le soi-disant modèle des dispensaires médicaux de Vancouver. J’ai aidé à conseiller les conseils de bandes sur les résolutions visant à restreindre la vente de cannabis dans les réserves, ainsi qu’à obtenir des permis provinciaux et fédéraux pour des projets de magasins de cannabis appartenant à la communauté. Je suis une ancienne cheffe de la Première Nation de Couchiching. Je suis très consciente du manque de viabilité économique et sociale au sein de la Première Nation, et je comprends parfaitement pourquoi les marchés gris sont si attrayants pour les entrepreneurs des Premières Nations.

Le fédéralisme coopératif est un cadre potentiellement progressiste pour la réforme du cannabis en 2023. Nous pouvons voir comment l’autonomie gouvernementale autochtone est reconnue et comment les compétences sont gérées dans le cadre de l’ancien projet de loi C-92 sur la protection de l’enfance et l’autonomie gouvernementale, de la loi sur les biens immobiliers matrimoniaux, ou même dans le cadre des processus du Conseil de gestion financière, qui vise à renforcer les capacités afin de trouver des solutions aux maux causés par la Loi sur les Indiens ou toute autre loi fédérale adoptée sans égard aux compétences des Premières Nations dans les réformes législatives fédérales.

Vous ne serez pas surpris d’apprendre qu’un représentant d’un service de police provincial a déclaré à l’un de mes clients, lors d’une vidéoconférence à laquelle je participais, qu’il était difficile de faire appliquer la Loi sur le cannabis dans les réserves. Ce haut gradé de la police a déclaré : « C’est comme un jeu de Whac-A-Mole. On en ferme un, et trois autres ouvrent. » Les services de police des Premières Nations et les structures de gouvernance des Premières Nations dans le Sud du Canada manquent cruellement de ressources. Il est donc très difficile de faire appliquer une loi fédérale ou même provinciale dans un marché gris où abondent les gens à la recherche de produits non taxés, non réglementés et moins chers, comme le tabac et le cannabis, qui sont lourdement taxés autrement.

S’il y a une chose que nous avons apprise, nous étant ceux qui fournissent des services juridiques généraux aux gouvernements des Premières Nations, c’est que la non-application de la loi crée un terrain propice aux activités du marché gris. Je ne veux pas stéréotyper les Premières Nations. C’est la dernière chose que je veux faire. Si nous avions les outils nécessaires, les gouvernements des Premières Nations pourraient être des modèles de communautés productives, responsables et économiquement durables. La promesse de la ruée vers le cannabis a été exagérée, c’est certain, mais les promesses d’équité et de débouchés économiques faites en 2018 et en 2022 ne s’adressaient assurément pas aux peuples autochtones en général et aux Premières Nations en particulier.

Un grand nombre de régimes de réglementation du cannabis renferment des politiques sur l’équité sociale, notamment dans les États de la Californie et de l’Oregon. Les titulaires d’une licence d’accélérateur peuvent aider les candidats à l’équité sociale à acquérir les connaissances et les capacités techniques requises pour exploiter un site autorisé en Californie et aider ces candidats à participer à l’industrie. Il faudrait essayer d’imaginer de quelle manière ces candidats à l’équité sociale au Canada pourraient retourner avec ces compétences dans leur territoire des Premières Nations.

Nous savons que les cultivateurs personnels qui approvisionnent le marché gris sont issus du régime de réglementation sur le cannabis médical. Bon nombre de ces producteurs fournissent des produits de plus grande qualité et à moindre coût aux magasins autorisés se trouvant dans les réserves des Premières Nations. C’est le cas surtout en Alberta, en Saskatchewan et en Colombie-Britannique, mais aussi dans les territoires des Premières Nations en Ontario et en Nouvelle-Écosse. N’oublions pas les racines du cannabis. Le groupe BC Bud Co et les producteurs partout au Canada fournissent du cannabis récréatif sécuritaire aux adultes respectueux des lois qui étaient au fait des propriétés thérapeutiques du cannabis bien avant que les entreprises de haute technologie et les entreprises énergétiques se ruent avant tout le monde pour aller chercher un chèque, ou la promesse d’un chèque, à la fin de 2018. J’ai de nombreux clients qui voudraient exploiter des installations de culture et de transformation du cannabis, mais qui ne possèdent ni les investissements ni la capacité nécessaires pour entrer dans un marché hyper réglementé. En fait, les fournisseurs qui sont les mieux placés pour servir le marché sont les cultivateurs personnels et les autres entités issues du modèle de Vancouver des dispensaires médicaux.

Conformément au modèle de délégation de vente au détail et de distribution prévu dans la Loi sur le cannabis, les membres des Premières Nations peuvent acheter légalement des quantités en vrac de cannabis auprès de cultivateurs personnels de cannabis autorisés. En fait, il existe des cultivateurs personnels autorisés qui adhèrent à des normes solides de qualité, de santé et de sécurité auprès de qui les Premières Nations pourraient s’approvisionner.

Les cultivateurs personnels de cannabis autorisés peuvent aider les Premières Nations à mener des activités autorisées hors du marché gris et loin des groupes illicites qui voient les réserves des Premières Nations comme des enclaves où les forces de l’ordre ne vont pas ou n’osent pas appliquer la loi. Comme avocate, je ne conseille à personne de faire des affaires dans le marché gris. Je ne veux pas que mes clients des Premières Nations frayent dans ce milieu. Le manque de services offerts à ces entités commerciales constitue sans conteste une pierre d’achoppement. À l’instar du racisme environnemental dans le passé, certaines activités autorisées dans les réserves ont des conséquences durables sur les Premières Nations, autant sur le plan social que juridique.

Ce que j’appelle le racisme fondé sur les compétences a été signalé bien avant le 17 octobre 2018. La légalisation des jeux de hasard a été obtenue chez nous il n’y a pas si longtemps. Même un chercheur novice en politiques se rendrait compte du long et difficile périple que les Premières Nations en Ontario, en Saskatchewan, au Manitoba et ailleurs au Canada ont dû entreprendre, elles qui poursuivent leurs efforts pour assurer l’équité et la reconnaissance de leurs compétences sur les jeux de hasard.

Un gros cadeau qui continue à rapporter est la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire R. c. Pamajewon, rendue en 1996, qui fait valoir la règle de droit voulant qu’on ne puisse présenter de revendications générales d’autonomie gouvernementale. Cette décision nous empêche aujourd’hui de créer des systèmes légitimes et légaux.

Il y a des approches plus efficaces. Le projet de loi C-92 n’est pas parfait, mais c’est un exemple de mesure adéquate. Par ailleurs, d’autres discussions sur les compétences ont lieu à différentes tables un peu partout au Canada et avec les provinces enclines à le faire. Que le sort des Premières Nations dépende du bon vouloir des provinces est un problème au Canada, car cela crée des iniquités entre les différentes régions au pays. Les Premières Nations sont les seules à assumer ce problème.

Il faut chercher à faire reconnaître le savoir autochtone. Nous voulons obtenir des accords négociés sous forme d’un accord de coordination. Les aînés de ma communauté emploient une longue paraphrase : ils parlent d’harmonisation de l’administration des compétences distinctes. Nous obtiendrions ainsi l’autonomie gouvernementale par nous et pour nous.

Nos lois et notre souveraineté diffèrent des lois et de la souveraineté canadiennes. Le rôle du droit dans la société anishinaabe réside plutôt dans l’enseignement et la transmission des connaissances que dans l’application de la loi et les amendes. Le plus important, c’est de poursuivre cette quête au fil des mandats législatifs. Ce que dit la loi et ce que fait la loi sont deux choses importantes pour les peuples autochtones. Meegwetch.

Le président : Merci, madame Mainville. Les sénateurs peuvent maintenant poser leurs questions.

Le sénateur Christmas : Merci beaucoup de votre témoignage intéressant et pertinent.

Maître Mainville, j’aimerais que vous expliquiez l’expression « racisme fondé sur les compétences », que vous avez employée. Pensez-vous que la Loi sur le cannabis véhicule ce type de racisme?

Me Mainville : J’ai été témoin de ce type de racisme dans le cadre de ma pratique du droit. Les Premières Nations ne disposent pas des ressources nécessaires pour mener des négociations sur les compétences avec le gouvernement fédéral. Une des provinces les plus progressistes, l’Ontario, avait initialement l’article 44 de sa Loi sur les licences liées au cannabis et l’article 26 de sa Loi sur le contrôle du cannabis. Ces dispositions ont favorisé les négociations entre certains de mes clients et le gouvernement au pouvoir à l’époque. Ces négociations étaient par ailleurs très coûteuses et s’inscrivaient dans le processus, lui aussi très coûteux, de l’exercice des compétences.

Un des clients que j’ai mentionné, la bande des Mohawks de la baie de Quinte, s’est plié au processus de consultation de 16 mois, même s’il ne possédait pas vraiment les outils nécessaires. La bande comptait de nombreux détracteurs qui faisaient beaucoup d’argent dans le marché gris du cannabis et qui répandaient de la mésinformation pour essayer de faire croire que le conseil de bande voulait établir une sorte de loi qui allait créer beaucoup d’incertitudes, surtout à l’égard de la Loi sur les Indiens. Ce processus très laborieux et coûteux s’est soldé par une occasion manquée, puisque cette communauté comptant au moins trois douzaines de magasins de cannabis dans le marché gris n’est toujours pas assujettie à une loi applicable. Je pense que ce n’est pas de la fabulation que de dire que certains de ces magasins sont alimentés par le crime organisé.

Le sénateur Christmas : La mise sur pied d’un cadre légal de production et de vente au détail de cannabis pour les communautés autochtones au Canada serait passablement ardue. Quelqu’un avait fait observer, au tout début de notre étude du projet de loi en 2017-2018, que cette mesure ne prévoyait pas de compétences pour les communautés autochtones sur le plan de l’autonomie gouvernementale. Si vous pouviez revenir en 2017-2018 et ajouter des dispositions à la Loi sur le cannabis sur les compétences et la gouvernance des Autochtones sur les produits du cannabis, que recommanderiez-vous? Comment pourrions-nous créer un cadre légal pour les communautés autochtones?

Me Mainville : Cette innovation est toute récente, mais l’article 69, qui énonce que les gouvernements provinciaux peuvent autoriser la vente et la distribution de cannabis récréatif, exige aussi que ces mêmes provinces respectent les objectifs de la Loi sur le cannabis. Un de ces objectifs aurait pu être la participation des Autochtones. Si cet objectif avait existé à l’époque, les régimes provinciaux seraient allés plus loin que l’Ontario et que la Colombie-Britannique et son article 144. J’ai assisté et participé aux négociations de certains de ces accords. Or, ceux-ci contiennent très peu de dispositions sur les compétences des Premières Nations. J’ai assisté au protocole d’entente de Kahnawake avec Santé Canada. Cet accord renferme des clauses sur l’échange d’informations et d’expertise et sur certains transferts de capacités, mais rien sur le partage ou la reconnaissance des compétences.

Le sénateur Christmas : Merci beaucoup, maître Mainville.

Le sénateur Arnot : Je vais poursuivre la conversation entamée par le sénateur Christmas et le témoin, seulement pour obtenir des clarifications. Merci, maître Mainville.

Je vais faire une observation. L’honneur de la Couronne est une norme très élevée. Or, il me semble que cette norme élevée n’est pas respectée dans le cadre des relations entre les gouvernements fédéral, provinciaux et des Premières Nations. Vous avez parlé du racisme fondé sur les compétences. Le comité a entendu des témoignages qui ont fait état de cette forme de racisme systémique qui perdure depuis longtemps et qui fait en sorte que les compétences des Premières Nations ne sont pas reconnues comme il se doit. Peut-être le comité devrait-il souligner que ce racisme systémique flagrant est bien vivant et mentionner que cela constitue un des obstacles à la reconnaissance appropriée des compétences des Premières Nations en plus d’affecter bon nombre de dossiers outre celui du cannabis.

Selon moi, le gouvernement doit exercer un leadership en nommant le problème et en faisant de la place aux compétences des Premières Nations entre la Couronne provinciale et la Couronne fédérale. J’aimerais que vous nous disiez ce que nous pourrions intégrer à ce rapport pour accélérer le processus et convaincre le gouvernement fédéral de faire preuve de plus de leadership. Je pense en fait que vous venez de répondre partiellement à ma question, mais tout ce que vous pourriez ajouter serait très utile. Merci.

Me Mainville : La recette qui permettra d’atteindre ces objectifs comporte plusieurs ingrédients, notamment la prise en compte des idées des divers groupes autochtones. Je pense à mes clients de la Colombie-Britannique, qui poussent un gouvernement provincial, déjà bien disposé, à en faire plus. À mon avis, certaines bonnes idées qui ont été mises de l’avant sur les compétences pourraient se concrétiser si le gouvernement fédéral y met du sien.

Ensuite, il y a les juristes qui conseillent les gouvernements. J’ai participé à plusieurs réformes législatives au fil des ans. Lors de la réforme de la Loi sur l’évaluation d’impact, j’ai constaté que personne au gouvernement ne croit aux compétences inhérentes des Premières Nations. Le ministère de la Justice devrait compter plus de juristes qui adhèrent à ce principe. Certes, il y a eu des progrès, mais des décisions doivent être prises. Comme les avocats adhèrent à différentes écoles de pensée au Canada, il faut en tenir compte en choisissant ceux qui conseilleront le gouvernement de la Couronne lors de négociations sur les réformes législatives. Je suis convaincue qu’un certain nombre de ceux qui croient aux compétences inhérentes ont conseillé le gouvernement du Canada lorsque la loi sur les services à l’enfance — l’ancien projet de loi C-92 — a été adoptée. Les conditions qui ont permis ce dénouement font partie des ingrédients dont je vous parlais.

Finalement, en règle générale, les perspectives économiques se sont considérablement amoindries pour les Premières Nations dans des domaines comme les infrastructures. D’ici à ce que le racisme systémique envers les communautés des Premières Nations soit entièrement éradiqué, les marchés gris continueront d’exercer leur attraction et des individus continueront de contourner la loi afin de profiter de plus grands débouchés économiques. C’est un fléau qui nous affecte tous.

Le sénateur Arnot : Merci.

La sénatrice Coyle : Merci beaucoup, maître Mainville. Votre témoignage nous a beaucoup éclairés. Vos observations sont très pertinentes pour notre étude.

Comme vous le savez, le gouvernement a fait appel à un groupe d’experts indépendants pour examiner la Loi sur le cannabis. Nous voulons analyser avec vous aujourd’hui les répercussions, positives ou négatives, de même que, comme vous l’avez si bien relevé, les occasions que nous avons saisies ou que nous avons laissé filer pour les communautés. Vous avez parlé de l’importance des compétences et des coûts énormes que doivent assumer les communautés des Premières Nations pour revendiquer les leurs. La première version de la Loi sur le cannabis ne prévoyait pas de coopération avec les communautés autochtones et n’établissait pas d’objectif en matière de création d’occasions d’affaires avec ces communautés. Or, vous avez parlé de capacités et de quelques mesures très intéressantes qui ont été prises en Californie et en Oregon sur le développement des capacités des nouveaux venus dans l’industrie.

À votre avis, quels sont les éléments auxquels nous devrions absolument porter attention lors de l’examen législatif quinquennal qui s’en vient? Si vous vous adressiez au groupe d’experts, là, tout de suite, quels éléments leur diriez-vous d’améliorer? La loi n’est pas parfaite. En fait, elle renferme beaucoup de lacunes. Que pouvons-nous faire à ce stade afin d’améliorer les choses pour la suite?

Me Mainville : Il me faudrait quelques jours et l’aide de deux ou trois associés pour bien répondre à vos questions.

Il y a en effet beaucoup à faire. D’abord, le cannabis devrait être considéré comme un produit pharmaceutique, surtout pour le marché des Premières Nations et l’accès des Premières Nations au marché. Je pense que la loi a dressé des obstacles — je pense aux normes sur la culture et la transformation du cannabis récréatif — pour les personnes qui souhaitent entrer dans l’industrie.

Honnêtement, je pense que les gens — je ne sais pas si « connaisseurs de cannabis » est le bon terme pour les désigner — vont vous dire qu’ils délaissent Toronto pour aller plutôt à Alderville ou à Tyendinaga parce qu’ils préfèrent de beaucoup les produits vendus à ces endroits. C’est comme en Oregon ou en Californie. Le cannabis est un produit agricole qui est consommé comme une plante, et non pas comme un produit pharmaceutique. C’est pour cette raison que les relations des Premières Nations avec le gouvernement se sont assombries en Colombie-Britannique, mais qu’elles se sont renforcées en Nouvelle-Écosse.

Une des choses dont nous devons parler est la légitimation et la légalisation du transport de ce produit agricole à partir de sources d’approvisionnement de qualité jusqu’aux Premières Nations. Nous devons légitimer ce marché, qui n’a rien à voir avec le marché de la production, de la culture et de la transformation du cannabis mis sur pied par Santé Canada. Ces deux marchés sont très différents.

Je demanderais au groupe d’experts d’aller voir les gens de Seven Leaf pour leur demander comment ils sont parvenus à naviguer avec succès dans le système de Santé Canada. Ce producteur de cannabis a consacré beaucoup de temps et d’efforts pour se conformer aux règles. Il se limite aux marchés des Premières Nations et tente de créer des canaux d’approvisionnement pour ces marchés, car il ne réussit pas, selon moi, à répondre aux demandes de propositions. Je ne suis pas absolument certaine de ce que je dis, mais j’aimerais beaucoup que les membres du groupe d’experts leur parlent, à eux et à certains de mes clients.

Je mentionne toujours la grande Première Nation de Membertou. Les membres de cette communauté font du bon travail. Ils vont adopter une loi sur le cannabis au début de l’an prochain. Ils mènent des consultations et des discussions en bonne et due forme. Leur approche économique est toujours très visionnaire, et ils ne vont pas se tromper. Ce serait bien si le groupe d’experts allait leur parler.

Je suis toujours réticente à parler en mon nom, car je représente des clients, mais je vous ai dit ce qu’ils m’ont appris — et j’en ai appris énormément.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Merci beaucoup.

Je suis surtout préoccupée au sujet des gens qui vivent dans les communautés. Bon nombre d’entre eux vivent de l’aide sociale. Ils n’ont pas de véhicule. Ils sont coincés dans leur communauté. Combien une licence peut-elle leur coûter?

Me Mainville : Le processus d’attribution de licence a été établi en fonction des profits qu’allait faire l’industrie du cannabis selon les prévisions de 2017 ou de 2018. Un de mes anciens clients, qui possède un magasin de cannabis dans sa réserve, détient une licence au titre des lois de l’Ontario.

Nous avons réalisé quelques percées avec le gouvernement de l’Ontario, notamment un rabais sur le prix de gros pour le magasin pour lui permettre de concurrencer les magasins autorisés à proximité des Premières Nations. Toutefois, le processus demeure très coûteux. Les frais s’élèvent à 25 000 $ seulement pour la licence. Le projet entier a coûté environ un demi-million de dollars.

Contrairement à Toronto ou dans d’autres municipalités, les magasins dans cette réserve doivent avoir pignon sur rue. Cette exigence ne s’applique pas aux Premières Nations en Ontario et dans d’autres provinces. Il n’y a pas toujours d’infrastructures. Les projets s’élèvent à un demi-million de dollars seulement pour ouvrir un magasin de détail.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Merci de votre réponse.

La sénatrice Hartling : Merci, maître Mainville, pour votre formidable présentation. J’aimerais pouvoir passer une journée entière avec vous. Vos connaissances et votre passion sont inspirantes, mais je suis certaine que vous devez ressentir beaucoup de frustration parfois, car vous savez et comprenez très bien comment tout cela devrait se dérouler.

J’ai aimé certaines des choses que vous avez dites. Vous avez dit que le cannabis devrait être un produit agricole, ce qui cadre avec la façon dont les Premières Nations travaillent avec la nature. J’aime beaucoup cette idée.

Vous avez aussi parlé de politiques d’équité sociale. Pourriez-vous nous parler de ces politiques et nous expliquer comment, selon vous, cela pourrait fonctionner au Canada?

Me Mainville : La première innovation dont j’ai parlé est de faire de la participation des Autochtones ou de la participation des Autochtones et des Noirs l’un des cinq principaux objectifs de la politique canadienne sur la légalisation du cannabis, car ce sont des groupes de la société qui ont été les plus touchés par la criminalisation du cannabis dans le passé.

Il y a divers exemples de réformes de la légalisation. L’État de New York examine des réformes précises visant notamment à faciliter les investissements en actions dans l’industrie du cannabis qu’elle légalise. La Californie a d’intéressantes innovations, à mon avis, qui fonctionnent bien et qui favorisent la participation des populations marginalisées au commerce du cannabis. Je pense que c’est utile.

J’aime bien le programme que j’ai mentionné dans mon exposé, car je pense qu’il démystifie la culture du cannabis en exigeant que certains titulaires de licence acceptent d’être jumelés à des demandeurs d’équité sociale qui veulent mener ce type d’activités et leur permettent d’apprendre dans des installations homologuées par Santé Canada.

Il existe diverses idées qui fonctionnent. Nous n’avons même pas regardé ce qui se fait dans d’autres pays qui envisagent la légalisation, notamment en Amérique du Sud et dans les Caraïbes. Il y a des réformes très intéressantes.

Je pense qu’une des leçons que tout le monde aura retenues de l’expérience du cannabis au Canada est qu’une multitude de gens pourront passer à l’avant de la file sans forcément être à leur place dans le domaine. Je pense aux grandes entreprises qui, depuis 2018, ont ouvert puis fermé leurs portes. Il est à se demander si ce qui était encouragé à l’époque dans la politique du cannabis n’était pas une erreur, au détriment de l’équité sociale.

La sénatrice Hartling : Merci. Je pense que votre recommandation est qu’ils examinent certains de ces programmes lors de l’examen plus général afin de comprendre, peut-être, ce qui pourrait mieux fonctionner ici au Canada.

Avez-vous des renseignements sur la situation au Nouveau-Brunswick, où j’habite? Je me demande simplement si vous avez des renseignements à ce sujet.

Me Mainville : Je n’ai pas vraiment examiné la situation, outre le fait qu’un client potentiel portait intérêt à la vente de commerces et envisageait d’en acquérir.

En mon sens, toutes ces approches sont des essais de mises en marché. Certaines fonctionnent, d’autres non, et certaines approches sont des essais de mise en marché extrêmement coûteux.

J’ai souvent vu, notamment, qu’on faisait appel à des gens qui étaient auparavant dans le marché gris ou le marché noir, qui s’y connaissent et qui savent ce qui se vend. Ils savent ce qui fonctionne. C’est d’ailleurs l’une des principales conclusions que j’ai tirées de tout ce processus : les cultivateurs de cannabis à des fins personnelles de la Colombie-Britannique et d’autres régions dans diverses provinces — surtout dans le sud du pays — représentent une remarquable source de renseignements sur les catégories d’acheteurs, les produits qu’ils achètent, ce qui fonctionne et le genre d’informations dont ils ont besoin. Mes clients qui s’associent à ces personnes tendent à avoir du succès. Il y a un approvisionnement stable dans les collectivités des Premières Nations. Ce sont de bons produits qui se vendent bien.

La sénatrice Hartling : Je vous remercie beaucoup. Continuez votre bon travail.

Me Mainville : Meegwetch.

Le président : Maître Mainville, en quoi le modèle de délégation de pouvoirs de la Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis peut-il éclairer l’examen législatif de la Loi sur le cannabis?

Me Mainville : La reconnaissance de la compétence, à l’article 18, a été utile. Cela dit, mon cabinet participe à la contestation de la province de Québec devant la Cour suprême.

Le plus important est d’inciter les provinces à dialoguer avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis sur les questions de compétence. Nous pouvons examiner des modèles très réussis comme la Saskatchewan Indian Gaming Authority, qui peut servir de modèle.

Me Drew Lafond n’est malheureusement pas ici pour témoigner devant vous. Un des principaux points qu’il a soulevés était que ses clients se faisaient dire qu’ils n’ont pas la capacité de réglementer, car c’est trop difficile. Puis, il a appris qu’en fait, la réglementation en Saskatchewan relevait de trois personnes. Il s’est dit que cela ne devait pas être si difficile, puisque trois personnes assuraient la gestion pour l’ensemble de la province.

Voilà le genre d’expériences et de modèles concrets qu’on peut tirer du secteur du jeu et du secteur de la protection de l’enfance. Je pense qu’il s’agit d’un domaine d’étude important et riche qui évolue en temps réel au Canada.

Le sénateur Christmas : Merci encore, maître Mainville. Je suis heureux que vous ayez mentionné la communauté de Membertou. Avant mon arrivée au Sénat, j’ai travaillé pour cette communauté pendant de nombreuses années.

Vous avez tout à fait raison. La communauté a tenu un référendum sur la question des magasins de vente au détail de cannabis dans la communauté. Parmi les options proposées, la communauté a choisi la voie de l’autoréglementation de la vente au détail de cannabis. Il y a encore un marché important, sans doute, étant donné que la collectivité de Membertou est une collectivité autochtone urbaine au sein d’une grande zone urbaine. Je pense que la volonté de la communauté à s’autoréglementer est la voie à suivre.

Vous avez raison, la communauté s’est engagée à élaborer une loi appropriée. Je vous remercie de votre aide à cet égard.

Je veux aborder la question d’un autre angle. Quels seraient les avantages, pour le Canada, les provinces et les Premières Nations, de la mise en place d’un cadre juridique propre aux Premières Nations en matière de cannabis?

Me Mainville : Je pense qu’il y aurait un triple avantage. Premièrement, autoriser un tel degré d’intégration des Premières Nations et favoriser l’élément que sont les cultivateurs personnels — qui, bien franchement, détestent tout simplement le cannabis autorisé par Santé Canada — permettrait véritablement d’enrayer la vente de cannabis sur le marché noir. Produire le cannabis et assurer l’approvisionnement par l’intermédiaire d’une source légitime sous l’égide des gouvernements des Premières Nations est un partenariat qui fonctionne déjà, mais ce partenariat permettra sans aucun doute d’endiguer le marché noir. Il s’agit du même type de cannabis qu’on peut uniquement trouver sur le marché gris ou le marché noir. Le connaisseur de cannabis ne voit pas ce niveau de qualité ou de satisfaction ailleurs.

L’autre aspect est le développement économique. Je crois avoir mentionné une fois ou deux le manque de possibilités économiques chez les Premières Nations. Je sais que plusieurs d’entre elles ont la chance d’être dans des centres urbains, où le marché est plus important, mais beaucoup d’autres n’ont pas cette chance et doivent faire leurs propres choix de marché en fonction du manque d’occasions.

Cela créerait des débouchés, surtout pour les Premières Nations de taille moyenne qui desservent de plus petits bassins de population, par exemple 20 000 à 25 000 personnes. Dans ma communauté, près de Fort Frances, en Ontario, il y a un entrepreneur du domaine du cannabis qui réussit très bien. Si je ne me trompe pas, il a embauché 11 personnes. Il fait vivre sa jeune famille de six personnes. Il donne des renseignements très importants aux autres magasins de cannabis. Il a une source d’approvisionnement stable et de qualité, qu’il partage avec d’autres entrepreneurs.

Cela favorisera plus de développement économique et permettra de diffuser de meilleures informations sur le cannabis lui-même et la consommation du cannabis. Cela permettra également d’établir des partenariats qui, à mon avis, seront très fructueux avec les cultivateurs personnels du marché gris qui veulent fournir du cannabis légal et qui ne se concentrent pas nécessairement — comme beaucoup d’entre eux — sur des activités plus graves comme le blanchiment d’argent provenant de crimes liés à la drogue.

C’est d’ailleurs une des choses qui m’effraient par rapport à ces activités. Les guichets automatiques à l’intérieur de ces magasins de cannabis servent un peu au blanchiment d’argent, ce qu’on ne devrait pas permettre.

Tout cela pour dire que si nous étions autorisés à le faire, nous pourrions atteindre de façon plus ciblée les objectifs de Santé Canada prévus dans la Loi sur le cannabis. Encore une fois, nous répétons sans cesse ces coûteux essais de mise en marché, et cette solution est beaucoup plus économique. Nous savons que cela a fonctionné, là où cela a été autorisé. Il existe de meilleurs modèles, et nous pouvons tous en tirer des leçons.

Le sénateur Christmas : Merci, maître Mainville. Merci beaucoup pour votre témoignage d’aujourd’hui. Il nous est très précieux. Je vous remercie de l’excellent travail que vous faites.

Me Mainville : Meegwetch.

Le président : Maître Mainville, proposeriez-vous des modifications précises à la Loi sur le cannabis pour régler les problèmes actuels de compétence?

Me Mainville : Je pense que la Loi sur le cannabis offre des possibilités de réglementation qui répondraient aux besoins de la diversité des intérêts. Il y a, de toute évidence, un intérêt à assurer l’application de la loi pour contrer les activités non autorisées liées au cannabis. Parallèlement, on note aussi un intérêt marqué pour donner aux administrations la compétence d’octroyer des licences pour l’activité commerciale liée au cannabis. Je ne suis pas en mesure de proposer un ou deux articles qui permettraient de faire ces deux choses, mais je dirais que les Autochtones du Canada pourraient créer, en partenariat, un règlement leur donnant les outils nécessaires pour l’octroi de permis pour les activités commerciales liées au cannabis afin de pouvoir fournir de bons produits aux consommateurs partout au Canada en toute légitimité.

Le président : Je vous remercie.

La sénatrice Coyle : Pour donner suite à la question de notre président, maître Mainville, s’il devait y avoir des recommandations sur des modifications à la Loi sur le cannabis, vous avez parlé de réglementation, et c’est un bon aspect sur lequel nous devrions nous concentrer et que nous avons souvent tendance à négliger. Je vous remercie d’avoir attiré notre attention là-dessus.

Je ne l’exprimerai probablement pas de façon très éloquente, mais vous avez mentionné que si les possibilités pour les Autochtones avaient été clairement énoncées comme étant l’un des objectifs fondamentaux de la Loi sur le cannabis, les choses se seraient passées différemment et, en particulier, il y aurait eu plus d’orientation et d’incitation à la coopération concernant les relations en matière de compétences avec les provinces.

Selon vous, étant donné l’examen législatif à venir, serait-il également recommandé de revenir aux principes fondamentaux des objectifs de la Loi sur le cannabis?

Me Mainville : Manifestement, cela aurait été plus efficace si on l’avait fait d’entrée de jeu, avant que les provinces ne créent leurs propres régimes. Toutefois, je ne vois pas pourquoi, dans un contexte de fédéralisme coopératif, cet amendement n’inciterait pas les gouvernements provinciaux à se demander s’ils peuvent atteindre cet objectif ou non, pour autant qu’on le considère véritablement comme un objectif législatif et, par conséquent, comme une exigence.

Nous savons, en raison de la contestation du projet de loi C-92 et du renvoi du projet de loi C-92 par le Québec, que les provinces n’aiment pas nécessairement se faire dire quoi faire, dans certains cas. Toutefois, je pense que dans ce cas-ci, tous les gouvernements de la Couronne devraient voir l’importance d’atteindre l’objectif de la participation autochtone, compte tenu en particulier du manque de débouchés économiques pour les Premières Nations en général. Oui, je pense que cela fonctionnerait. Je pense que cela aurait mieux fonctionné si cela avait été fait dès le début.

Le président : Le temps imparti à ce groupe de témoins est maintenant écoulé. Je tiens à remercier Me Mainville et Me Lafond de leur présence aujourd’hui.

Chers collègues, je vous rappelle que notre dernière réunion sur ce sujet aura lieu demain, mercredi 26 octobre, à 18 h 45.

(La séance est levée.)

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