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APPA - Comité permanent

Peuples autochtones


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES PEUPLES AUTOCHTONES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mardi 16 avril 2024

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd’hui, à 9 heures (HE), avec vidéoconférence, pour étudier la mise en œuvre de la Loi sur la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones de 2021 par le Canada et les Premières Nations, les Inuits et les Métis.

Le sénateur David Arnot (vice-président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le vice-président : Je tiens d’abord à souligner que les terres sur lesquelles nous sommes rassemblés aujourd’hui font partie du territoire traditionnel ancestral et non cédé de la nation algonquine anishinabe, et qu’elles abritent maintenant de nombreux autres peuples des Premières Nations, des Métis et des Inuits de l’île de la Tortue.

Je suis le sénateur David Arnot, de la Saskatchewan. Je suis vice-président du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones.

J’inviterais maintenant les membres du comité à se présenter en indiquant leur nom et leur province ou territoire.

Le sénateur McNair : Bonjour. John McNair, du Nouveau-Brunswick. Ravi de vous rencontrer.

La sénatrice Hartling : Nancy Hartling, de Mi’kma’ki, également du Nouveau-Brunswick. Ravie de vous voir.

La sénatrice Sorensen : Karen Sorensen, Alberta, parc national Banff, territoire du Traité no 7.

La sénatrice White : [Mots prononcés dans une langue autochtone]. Je m’appelle Judy. Je viens de Terre-Neuve-et-Labrador.

La sénatrice Coyle : Mary Coyle, d’Antigonish, en Nouvelle-Écosse, dans le Mi’kma’ki.

Le vice-président : Merci, honorables sénateurs et sénatrices.

Aujourd’hui, nous poursuivons notre nouvelle étude sur la mise en œuvre de la Loi sur la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones de 2021 par le Canada et les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Le comité entendra des témoins afin d’affiner le sujet de son étude.

J’aimerais maintenant présenter nos témoins d’aujourd’hui. De l’Inuit Tapiriit Kanatami, nous accueillons Natan Obed, président, et Will David, directeur des affaires juridiques.

Et de l’Assemblée des Premières Nations, nous recevons Terry Teegee, chef régional, Colombie-Britannique, et Lara Koerner-Yeo, associée, JFK Law LLP.

Je remercie les témoins d’être parmi nous aujourd’hui. Je les invite à faire une déclaration d’environ cinq minutes, et nous passerons ensuite à une période de questions et réponses avec les sénateurs.

Je cède maintenant la parole à M. Obed pour ses remarques liminaires. Merci.

Natan Obed, président, Inuit Tapiriit Kanatami : Merci, monsieur le président, et [mots prononcés dans une langue autochtone]. Bonjour à tous. C’est toujours agréable d’être ici, au Sénat, avec vous tous, surtout pour parler d’une question aussi importante que celle de la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, ou DNUDPA, au Canada.

L’Inuit Tapiriit Kanatami, ou ITK, a salué l’adoption de la Loi sur la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones de 2021, ou LDNU, comme un exemple positif de loi fédérale élaborée conjointement avec les Inuits et d’autres peuples autochtones. Dès la publication en 2017 de notre énoncé de position intitulé Mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones au Canada, nous avons demandé au gouvernement fédéral de mettre en œuvre les droits inscrits dans la DNUDPA au moyen d’une loi fédérale.

La DNUDPA énonce les droits fondamentaux des Inuits, contrairement à la politique du gouvernement. Trop souvent, les gouvernements fédéraux successifs ont considéré les droits de la personne et les droits issus de traités des Inuits comme des objectifs politiques discrétionnaires plutôt que comme des obligations juridiques contraignantes. C’est pourquoi l’ITK a présenté, durant l’élaboration de la loi, des dispositions qui auraient considérablement modifié sa portée en établissant une commission et un tribunal des droits de la personne des Autochtones. Ces efforts se sont révélés infructueux, mais le plan d’action national et la loi proprement dite énoncent des engagements quant à certaines activités de suivi visant à faire en sorte que les droits des Autochtones soient traités comme des droits légaux.

Comme le craignaient les Inuits, la mise en œuvre de la loi a donné lieu à de graves difficultés. La plupart de ces difficultés sont liées aux processus internes du gouvernement ainsi qu’à la nature discrétionnaire du processus d’élaboration des politiques lui-même. Par exemple, le processus d’élaboration du plan d’action qui a suivi l’adoption de la loi a été difficile, car chaque ministère fédéral était libre de déterminer à quelles mesures du plan d’action il était disposé à donner suite et, dans bien des cas, de définir la formulation des mesures finales elles-mêmes.

Près de trois ans après que la loi a reçu la sanction royale, nous sommes alarmés par les problèmes fondamentaux qui continuent d’entraver la mise en œuvre de la loi et du plan d’action connexe. Par exemple, nous sommes particulièrement préoccupés par le fait que l’expression « en consultation et en collaboration » n’a jamais été définie. Il semble que les Inuits et le gouvernement fédéral aient des interprétations différentes de ce que signifie l’obligation légale de consulter et de coopérer.

Par conséquent, certains ministères fédéraux appliquent unilatéralement ces termes à des initiatives qui, de notre point de vue, ne sont pas différentes de toute autre forme d’engagement fédéral. Un tribunal offrirait le précieux avantage de clarifier le sens de l’expression « en consultation et en collaboration » pour toutes les parties.

Les Inuits sont particulièrement préoccupés par la façon dont l’article 5 de la loi est interprété par les ministères fédéraux. L’article 5 oblige le gouvernement fédéral à prendre, en consultation et en collaboration avec les peuples autochtones, toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les lois fédérales soient compatibles avec la DNUDPA.

L’ITK a cherché à faire inclure dans le plan d’action des mesures qui correspondent à chaque droit prévu par la déclaration des Nations unies, qui contribuent à leur mise en œuvre et qui pourraient contribuer à la mise en œuvre de l’article 5 de la loi en partenariat avec les Inuits. Ces mesures exigeraient des changements importants au statu quo que le Parlement envisageait, à notre avis, lorsqu’il a adopté la loi. Cependant, à la connaissance de l’ITK, le seul travail effectué relativement à l’article 5 est l’élaboration d’un document d’orientation interne ordonnant aux fonctionnaires fédéraux de procéder à l’examen de nouvelles mesures législatives sans la participation réelle des Inuits. Selon l’ITK, cela témoigne d’une interprétation édulcorée de l’obligation de consultation et de collaboration approuvée par le Parlement.

La mise en œuvre du plan d’action national se déroule actuellement de façon improvisée et désorganisée, et elle est largement tributaire de décisions personnelles de ministres et de hauts fonctionnaires fédéraux. Par exemple, quelques ministères font activement la promotion de certains engagements formulés dans le plan d’action, mais ils sont peu nombreux. La plupart des ministères insistent sur le fait qu’ils doivent obtenir des autorisations supplémentaires de la part d’organismes centraux afin de procéder à la mise en œuvre. L’existence de la loi et du plan d’action national n’est pas suffisante pour mettre en œuvre les droits des Inuits.

Par exemple, le ministère du Patrimoine canadien hésite à s’engager à élaborer une loi sur le rapatriement, même s’il s’agit de l’une des lacunes législatives les plus importantes et les plus évidentes pour ce qui est de l’harmonisation avec la DNUDPA. Dans le même ordre d’idées, le ministère de la Justice a mentionné que l’absence de pouvoirs constituait un obstacle à l’élaboration d’un mécanisme permettant d’évaluer l’harmonisation avec la déclaration conformément à l’article 5.

Malgré ces défis, l’ITK garde bon espoir que, utilisée efficacement, la LDNU peut servir de mécanisme efficace pour la mise en œuvre de nos droits de la personne et l’amélioration de la prospérité de notre peuple. Par exemple, nous avons cherché à faire inclure dans le plan d’action des mesures visant à combler les lacunes législatives en matière de rapatriement et d’immigration des Autochtones, entre autres, et nous croyons que cela contribuerait à l’intégration des articles 36 et 12 de la DNUDPA dans le droit interne.

L’ITK reconnaît que l’inclusion d’une section propre aux Inuits dans le plan d’action national et l’existence de mesures donnant suite à la mise en œuvre de la déclaration propre aux Inuits sont des mesures positives. À l’échelle internationale, la LDNU pourrait également servir de modèle à d’autres États cherchant à intégrer les droits de la personne des Autochtones dans leur droit interne. Cependant, les problèmes qui caractérisent la mise en œuvre doivent d’abord être réglés.

Nous demeurons déterminés à travailler en collaboration avec d’autres peuples autochtones et des partenaires fédéraux en vue de trouver des solutions aux défis que j’ai mentionnés aujourd’hui.

Nakummek.

Le vice-président : Merci, monsieur Obed.

J’invite Terry Teegee, le chef régional de la Colombie-Britannique représentant l’Assemblée des Premières Nations, ou l’APN, de faire une déclaration préliminaire au nom de cette organisation.

Terry Teegee, chef régional, Colombie-Britannique, Assemblée des Premières Nations : Merci, monsieur le président. [Mots prononcés dans une langue autochtone].

Tout d’abord, je tiens à souligner que je vous parle depuis le territoire du peuple des Lenapes, ici à New York. Je participe actuellement à la 23e session de l’Instance permanente des Nations unies sur les questions autochtones.

Je m’appelle Terry Teegee. Je suis le chef régional de l’Assemblée des Premières Nations de la Colombie-Britannique, le titulaire du portefeuille de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et le président du comité des chefs sur la mise en œuvre de la Loi sur la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones de 2021.

Je vous remercie de m’avoir invité à comparaître devant vous aujourd’hui au nom de l’Assemblée des Premières Nations.

L’APN est une organisation nationale qui défend les droits inhérents et issus de traités des Premières Nations ainsi que les droits, les titres et les compétences autochtones. Elle continue de préconiser la mise en œuvre intégrale de la DNUDPA au Canada au moyen d’approches dirigées par les Premières Nations.

Le plan d’action du Canada pour la mise en œuvre de la LDNU n’est rien d’autre que cela : le plan d’action du Canada. De plus, nous reconnaissons qu’il s’agit d’une première étape imparfaite, mais prometteuse. Si la mise en œuvre se fait en partenariat avec les Premières Nations, elle constituera une réelle occasion de s’attaquer aux effets historiques et persistants de la colonisation sur les peuples des Premières Nations. Toutefois, pour assurer la réussite de la mise en œuvre, il faudra examiner et réviser complètement les pratiques fédérales en matière d’élaboration conjointe et de mise en œuvre conjointe. À notre connaissance, aucun cadre à l’appui d’une telle évolution n’a encore été élaboré.

Par exemple, tout au long du processus d’élaboration du plan d’action, les Premières Nations ont soulevé de nombreuses préoccupations quant à l’absence de possibilités de participer à ce travail. Les Premières Nations n’ont pas reçu le financement nécessaire pour participer pleinement à l’élaboration du plan d’action national, et aucun organisme décisionnel n’a été créé afin de permettre aux Premières Nations de surveiller son élaboration. Ces omissions continuent d’avoir une incidence sur la mise en œuvre du plan d’action national.

Par conséquent, l’Assemblée des Premières Nations ont présenté un certain nombre de résolutions, y compris la résolution 20/2023, qui exhorte le Canada à apporter des modifications à son plan d’action conjointement avec les Premières Nations afin de combler ses lacunes. Tout cela fait ressortir la nécessité de veiller à ce que le plan d’action soit régulièrement examiné et révisé, de concert avec les Premières Nations, pour faire en sorte que les priorités et les intérêts des Premières Nations orientent l’élaboration et la mise en œuvre continues du plan d’action.

La mise en œuvre de la DNUDPA est une priorité essentielle pour améliorer le bien-être des Premières Nations et respecter nos droits fondamentaux, ainsi qu’assurer la réussite de la mise en œuvre de la LDNU. Les Premières Nations doivent diriger le processus, de sorte que leurs voix soient entendues et qu’elles orientent la mise en œuvre. La pleine participation des Premières Nations à l’élaboration conjointe et à l’examen du texte législatif, ainsi qu’à la mise en œuvre conjointe du plan d’action de la LDNU, est un élément essentiel des normes internationales en matière de droits de la personne relatives au consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.

À coup sûr, l’absence de mandats gouvernementaux a une incidence sur tout.

L’Assemblée des Premières Nations de la Colombie-Britannique, ou APNCB, est membre du Conseil des leaders des Premières Nations, qui a conclu avec le ministre de la Justice un protocole d’entente bilatéral en vue d’entreprendre l’élaboration d’un plan de travail à l’appui de la mise en œuvre conjointe du plan d’action. Nous avons commencé à travailler à la mise en œuvre de la DNUDPA à cette table et ailleurs, et nous constatons déjà des lacunes, soit l’absence de mandats précis du gouvernement du Canada, l’absence d’un engagement et d’un cadre pangouvernementaux quant à la participation obligatoire des Premières Nations à la mise en œuvre des mesures du plan d’action, ainsi que le peu d’empressement à déployer des efforts de coordination pour s’assurer que les priorités des Premières Nations orientent la mise en œuvre des mesures du plan d’action.

Nous savons que le plan d’action national n’énonce pas toutes les priorités nécessaires pour faire en sorte que le gouvernement fédéral respecte pleinement la déclaration. Dans certains domaines où le gouvernement du Canada a déjà le mandat d’aller de l’avant, il est difficile d’obtenir des ministères des renseignements concrets sur la mise en œuvre. On ne sait pas trop non plus comment les ministères prévoient de faire participer les Premières Nations à la codirection des travaux requis sur la façon dont ils ont adapté leurs principes de mobilisation afin de mieux refléter les normes et les principes en matière de droits de la personne figurant dans la déclaration des Nations unies, y compris la façon dont les droits de la personne des Premières Nations en matière de consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause seront reconnus dans le cadre de l’ensemble des efforts ministériels de mise en œuvre.

Dans d’autres domaines, où le gouvernement n’a pas encore de mandat, les discussions semblent toutes être au point mort, et il n’est pas possible d’obliger les collectivités ou les organisations des Premières Nations à tenir des tables multiples et indépendantes avec chaque ministère pour s’assurer que leurs voix orientent le processus de mise en œuvre. Cette situation limite considérablement le changement transformateur que les Premières Nations recherchent par la mise en œuvre de la déclaration des Nations unies.

La mise en œuvre de cette déclaration est une obligation morale et juridique du Canada. Tout processus de mise en œuvre doit, en soi, être conforme aux normes de la déclaration des Nations unies, ce qui exige un investissement initial dans les capacités. De nombreux articles de la déclaration énoncent les obligations positives du Canada relativement à l’appui de ce processus, tout comme le libellé de la LDNUDPA et de la Constitution du Canada.

En ce qui concerne les approches pangouvernementales, comme nous l’avons souligné lors de réunions précédentes avec le gouvernement fédéral, l’élaboration conjointe nécessaire d’une approche pangouvernementale globale pour la mise en œuvre de la LDNUDPA est une solution possible à l’actuel effort de mise en œuvre improvisé et incohérent qui a un effet préoccupant sur l’immense capacité technique des Premières Nations, et il en résulte un engagement insuffisant et une violation de nos droits à un consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.

Un tel cadre est essentiel à la réussite de la mise en œuvre de la LDNUDPA. Il doit guider les efforts déployés par tous les ministères fédéraux pour harmoniser leurs politiques, leurs règlements et leurs pratiques avec la déclaration des Nations unies. Ce cadre pourrait tirer parti des leçons tirées de la mise en œuvre de la Loi sur la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, en Colombie-Britannique, qui est appuyée par un secrétariat indépendant, le Declaration Act Secretariat, chargé non seulement de coordonner les efforts de mise en œuvre du gouvernement dans l’ensemble des ministères provinciaux, mais aussi de sensibiliser les bureaucrates provinciaux aux normes de la déclaration des Nations unies et d’assurer la liaison avec les communautés et les organisations des Premières Nations.

Chaque ministère fédéral doit être coordonné par un organisme indépendant cogéré ou conseillé par des Autochtones afin qu’ils travaillent ensemble et coordonnent leurs efforts pour s’assurer que les travaux progressent et que l’on ne crée pas de redondance ou de fardeau indu pour les Premières Nations.

Le plan d’action prévoit 181 mesures, et presque tous les ministères dirigent indépendamment ou conjointement au moins une des mesures prioritaires. Nous devons nous assurer qu’ils collaborent tous avec les Premières Nations pour mettre en œuvre la LDNUDPA et qu’ils adoptent une approche pangouvernementale et coordonnée à l’égard de ces efforts.

Certes, le financement et les ressources sont un volet crucial de la mise en œuvre. Pour que ce travail se fasse d’une manière qui appuie vraiment les Premières Nations à court et à long terme, il faut leur fournir directement un financement et des ressources adéquats. Sans ce financement, il est impossible d’atteindre les normes des droits de la personne en matière de consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause. À maintes reprises, nous avons constaté un financement inconstant, ce qui crée des obstacles importants à la participation significative des Premières Nations à des initiatives essentielles. Le fait de travailler de façon proactive à la mise en œuvre de la déclaration peut nous permettre de réaliser des économies. De 2015 à 2018, les coûts annuels moyens des litiges fédéraux contre les Premières Nations se sont élevés à 23,97 millions de dollars, et ce chiffre a augmenté au cours des dernières années.

Une réduction importante de ces coûts annuels et une réorientation de ces ressources pourraient plutôt servir à la négociation, à l’élaboration conjointe et à la mise en œuvre de la déclaration des Nations unies. Cette solution entraînera une amélioration des déterminants sociaux de la santé et du bien-être des Premières Nations, ainsi qu’une plus grande certitude à l’égard des investissements aux fins du développement économique.

Il est essentiel que le gouvernement du Canada s’engage à financer les efforts de mise en œuvre et agisse comme un véritable partenaire dans le processus de réconciliation. La déclaration des Nations unies est le cadre de la réconciliation. Nous devons réfléchir attentivement à la façon dont nous pouvons nous en servir afin d’apporter des changements significatifs pour les Premières Nations de l’ensemble du Canada. Nous avons la responsabilité d’assurer un avenir équitable à tous. Merci, Mahsi’cho.

Le vice-président : Merci, chef Teegee. Nous allons maintenant passer aux questions des sénateurs.

La sénatrice Sorensen : Je remercie tous nos témoins de leur présence. C’est évidemment frustrant pour nous d’entendre les témoignages. Je ne peux pas imaginer le niveau de frustration au quotidien. Je vais commencer par poser une question au président Obed, mais je veux aussi adresser au comité une observation sur le commentaire concernant la consultation.

Nous ne semblons pas savoir en quoi consiste la consultation ni à notre niveau ni à celui-ci. Je ne sais pas ce que le comité peut faire à ce sujet, mais, à un moment donné, il faudra qu’il y ait un modèle pour définir le sens de la consultation. Je suis certaine que cette définition change d’un endroit à un autre du pays, selon la situation.

Encore une fois, d’après votre témoignage, je ne suis pas très optimiste quant à la réponse à ma question, mais je voulais vous en poser une au sujet de la mesure de suivi liée à la revitalisation, au maintien, à la protection et à la promotion de l’inuktitut, qui concerne la nécessité d’offrir des services fédéraux dans cette langue sur le territoire des Inuits, en commençant par le Nunavut.

Je ne sais pas si vous avez des statistiques ou des données sur les services fédéraux en inuktitut ou dans quelle mesure les ministères fédéraux offrent actuellement des services dans cette langue. Y a-t-il des ministères qui ont fait des progrès importants à ce chapitre?

M. Obed : Je vous remercie de poser la question. Tout d’abord, en ce qui concerne le terme « consultation », il y a des termes traditionnels qui se sont rendus jusque dans les décisions de la Cour suprême, avec lesquels nous sommes à l’aise à certains égards, mais il y a de nouveaux termes que le gouvernement fédéral utilise dans l’élaboration des politiques et parfois dans ses messages aux Canadiens, comme « élaboration conjointe ». Nous avons collaboré avec le gouvernement du Canada pour créer des principes d’élaboration conjointe.

La mise en œuvre de ces principes est un défi constant, mais le terme « coopération » l’est aussi. Il y a de nouveaux termes très chargés qui ne sont pas clairement définis et qui nous posent de réels problèmes lorsque notre interprétation du sens de la coopération est très différente.

La sénatrice Sorensen : Merci.

M. Obed : Concernant l’inuktitut, nous savons que Patrimoine Canada a mené un projet pilote avec Nunavut Tunngavik Incorporated relativement à un certain niveau d’application de l’inuktitut au Nunavut. Toutefois, le manque de vigueur de la Loi sur les langues autochtones nous cause encore beaucoup de difficultés. Au début du mandat du gouvernement actuel, on a jugé qu’il s’agissait d’un grand pas en avant pour les langues autochtones. En fin de compte, nous espérions une disposition portant précisément sur les Inuits. Nous espérions que l’inuktitut obtiendrait le statut de langue officielle dans l’Inuit Nunangat — dans la patrie géopolitique des Inuits —, mais cet espoir ne s’est pas concrétisé. À ce jour, le gouvernement fédéral n’a toujours pas l’obligation d’offrir des services fédéraux en inuktitut sur notre territoire, même s’il s’agit d’une langue officielle du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest.

L’énorme problème qui en découle tient au fait que les gens ne peuvent pas compter, disons, sur la prestation de soins de santé ou sur un accès à tout autre service fédéral dans notre langue. C’est une langue majoritaire dans l’Inuit Nunangat, surtout au Nunavik et au Nunavut. Au Nunavik, selon les données du recensement, près de 100 % de la population affirme pouvoir parler et comprendre l’inuktitut. Au Nunavut, le pourcentage se situe — je crois — dans les soixante-dix ou peut-être les quatre-vingts. Les chiffres fluctuent un peu. Mais il s’agit de populations majoritairement inuites dans les territoires, et puis d’une majorité de locuteurs d’une langue autochtone… où le gouvernement fédéral n’a reconnu aucune obligation de fournir des services dans notre langue.

Imaginez s’il y avait dans tout autre territoire ou province une majorité de la population qui parlait majoritairement une langue et que le gouvernement fédéral n’avait aucunement l’obligation d’offrir des services dans le cadre de la moindre tâche administrative qu’il y effectue... Cela n’arriverait tout simplement pas ailleurs au pays.

La sénatrice Sorensen : Alors, cet appel à l’action figurant dans la DNUDPA ne fait même pas l’objet de discussions à l’heure actuelle.

M. Obed : Nous avons travaillé avec le gouvernement fédéral afin d’établir les coûts qu’il faudrait engager pour mettre en œuvre les droits liés à la DNUDPA pour les Inuits. Je crois qu’on en est arrivé à un milliard de dollars sur 10 ans. Nous avons ensuite inclus ce montant dans un mémoire prébudgétaire. Nous n’avons pas reçu un sou. Nous n’avons reçu aucun espoir que le travail que nous avons fait avec le gouvernement fédéral, qui nous a pris plus d’un an, sera mis en œuvre ou financé. Pour l’instant, nous n’avons aucun espoir à cet égard.

La sénatrice Sorensen : Merci.

J’ai une autre question à poser au chef Teegee. Je veux aborder de nouveau votre témoignage sur l’approche pangouvernementale. Encore une fois, j’entends dire dans toutes sortes de réunions — avec diverses industries et autres — que, de toute évidence, on a désespérément besoin d’une approche pangouvernementale à l’égard de la déclaration. Je ne travaille pas au gouvernement. Je ne suis pas ministre. Je ne sais pas pourquoi il est si difficile de rassembler les ministères, même en petits groupes à la fois. Cependant, cela semble l’être. Mais je pense que c’est crucial et qu’on a besoin d’une approche pangouvernementale, sur ce sujet en particulier.

La section du plan d’action portant sur les droits civils et politiques préconise l’abrogation éventuelle de la Loi sur les Indiens ainsi que l’élaboration conjointe de solutions de rechange facultatives à l’inscription et à l’adhésion sous le régime de cette loi. Je suis vraiment curieux au sujet de la Loi sur les Indiens et de vos objectifs à cet égard. A-t-on fait des progrès pour ce qui est de permettre aux Premières Nations d’établir leurs propres règles en matière de citoyenneté?

M. Teegee : Je vous remercie de poser cette question, madame la sénatrice. Certes, l’article 35 de la Loi sur les Indiens préoccupe de nombreuses Premières Nations du pays depuis un certain temps. Toutefois, avant de déterminer ce qui remplacera cet article, il faudra établir une véritable définition du terme « élaboration conjointe ». Comme l’a dit mon collègue, le président Obed, l’ensemble du gouvernement doit comprendre la signification de ce terme et le fait qu’il ne s’agit pas d’une simple consultation.

Il est vraiment difficile de comprendre comment fonctionne le gouvernement, surtout compte tenu des initiatives qui émanent de différents ministères. Par exemple, l’Agence des services frontaliers du Canada a amorcé la mise en œuvre de la loi sur la déclaration des Nations unies, ou la LDNUDPA, et ce, sans avoir établi le moindre partenariat avec les Premières Nations. C’est un exemple parmi tant d’autres de la mise en œuvre de la LDNUDPA.

Pour revenir à l’une de vos questions initiales, avant que l’on procède à un remplacement ou à quoi que ce soit d’autre relativement à l’article 35, il faudra établir de vraies définitions des termes « consultation » et « élaboration conjointe » en vue de ce qui remplacera cet article.

De plus, en ce qui a trait à la LDNUDPA, il faut qu’il y ait une définition claire de ce qu’on entend par « consultation », mais aussi par « élaboration conjointe ». On a besoin d’une approche pangouvernementale parce que le fait que différents ministères font une chose constitue une mise en œuvre très improvisée de cette loi, et cette façon de faire ne convient pas aux Premières Nations et n’aide pas la situation. Voilà pourquoi nous demandons que les Premières Nations disposent de plus de ressources pour participer à la mise en œuvre de la LDNUDPA.

Par exemple, cela fait cinq ans que nous travaillons à la mise en œuvre du projet de loi 41, la Loi sur la Déclaration des Nations unies sur le droit des peuples autochtones. Le gouvernement provincial a fourni 200 millions de dollars aux Premières Nations pour qu’elles participent à l’élaboration conjointe des lois qui s’harmonisent avec la déclaration en soi, ici, en Colombie-Britannique. Cela vous donne une idée des ressources nécessaires, surtout à l’égard de la tenue d’une discussion nationale sur la mise en œuvre de la LDNUDPA.

Merci.

La sénatrice Sorensen : Je vous remercie, chef.

La sénatrice Coyle : Je remercie nos témoins d’être des nôtres en personne et à l’écran. Je suis heureuse de vous revoir, chef. Comme l’a dit ma collègue, la sénatrice Sorensen, il est décevant d’entendre ce témoignage éclairant, même s’il est très utile et opportun d’entendre ce que vous avez à dire. Comme elle l’a mentionné, ce que nous allons faire, en tant que comité, à part écouter votre témoignage, c’est en discuter entre nous, quoique vous aurez peut-être des suggestions à nous faire.

Vous avez tous les deux parlé de la langue, qui est très importante. C’est l’essence… ce que signifient les termes « coopération », « consultation » et « élaboration conjointe ». Il y a des années, j’ai travaillé en Indonésie. Le gouvernement déformait le verbe « participer » dans la langue indonésienne. Il en avait fait un verbe transitif, de sorte que les gens étaient « participés ». Il est vraiment dangereux de « participer » les gens… d’affirmer qu’il y a des consultations. Ce qu’il nous faut, c’est un sens et du mordant pour que l’on puisse s’en tenir à la signification réelle de ces termes. Je suis très intéressée par ce que vous aviez à dire.

Monsieur le président Obed, vous avez évoqué la possibilité que le tribunal contribue à la définition. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? Ensuite, j’aurai d’autres questions à poser.

M. Obed : On en revient au gouvernement du Canada qui, à New York, en 2016, a changé son fusil d’épaule concernant la déclaration des Nations unies. À ce moment-là, la ministre responsable, l’ancienne ministre Bennett, avait dit que les peuples autochtones du Canada jouissaient désormais d’un large éventail de droits.

Nous ne serons plus devant les tribunaux. Nous allons être en pleine mise en œuvre de nos droits existants.

Immédiatement, de notre point de vue, les Inuits ont pensé que c’était une merveilleuse réalité. Ce n’est pas celle que nous avons maintenant. Comment pouvons-nous passer de notre véritable réalité au Canada à cette réalité éclairée où nos droits sont mis en œuvre? Ensuite, il y a les recours et les mesures de réparation pour tous les cas où l’on s’écarte de la mise en œuvre de nos droits. C’est là que nous est venue l’idée d’un tribunal des droits de la personne indépendant. Nous avons présenté cette position au gouvernement du Canada en 2017. Nous avons ensuite ajouté un addenda en 2018 ou 2019. Nous n’avons pas réussi à faire inscrire ce tribunal explicitement dans la loi, mais elle contient une disposition qui permet l’élaboration de dispositions relatives aux recours et aux mesures de réparation, et celle-ci était fondée sur nos revendications au Ralliement national des Métis. C’est aussi ce que les Métis préconisaient fortement.

Mais, en ce qui concerne l’influence positive que cette disposition pourrait avoir sur cette réalité, je vais demander à Will David de vous donner des précisions sur ses tenants et aboutissants.

Will David, directeur des Affaires juridiques, Inuit Tapiriit Kanatami : L’une des principales visions et préoccupations qu’ont eues les membres d’ITK lorsque le projet de loi a été adopté au début de la mise en œuvre et même en cours de négociation concernait la signification de certains des termes et la possibilité que la tendance à consulter et à coopérer puisse signifier que le gouvernement comprend ce que les peuples autochtones ont déclaré comme positions et qu’il en tient compte, puis qu’il continue sur la voie du statu quo.

Ce serait extrêmement utile étant donné qu’ITK a des opinions sur la consultation et la coopération. Je suis certain que l’APN en a aussi. Le gouvernement du Canada est d’avis qu’un organisme indépendant doit étoffer les règles du jeu et fournir une certitude à cet égard à toutes les parties, pas seulement quant à la loi, mais aussi à la façon dont la déclaration s’applique à l’intérieur du pays, afin que nous puissions réellement faire avancer le travail qui a une incidence sur les peuples autochtones et les Canadiens relativement à tous les éléments de la déclaration, plutôt que nous fonctionnions dans ce climat d’incertitude concernant ce que nous faisons et que nous débattions constamment du processus, ce qui n’est pas la situation, actuellement, dans tous les cas de mise en œuvre de la déclaration, mais une grande partie du discours sur la mise en œuvre porte essentiellement sur le processus.

La sénatrice Coyle : Merci. Chef Teegee, si vous me le permettez, vous avez dit que le plan d’action du Canada n’est rien d’autre que cela : celui du Canada. Je pense que nous entendons des préoccupations au sujet de la mise en œuvre improvisée. J’ai entendu quelqu’un employer l’adjectif « désorganisée ».

Vous avez parlé de l’importance d’investir dans la capacité des Premières Nations de participer de façon significative à la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones afin que celle-ci se fasse d’une manière qui soit conforme au principe de ce qu’est vraiment la DNUDPA. Je prends cela très à cœur.

Je suis curieuse de savoir si vous pourriez nous en dire un peu plus — et vous en avez déjà pas mal parlé — sur cette expérience que vous avez en Colombie-Britannique, du fait que votre propre province a une longueur d’avance. Y a-t-il autre chose que vous aimeriez nous dire au sujet de votre expérience en Colombie-Britannique, que vous trouvez positif et qui pourrait être transposé dans les relations fédérales dont nous parlons maintenant?

M. Teegee : Comme vous le savez, de nombreuses déclarations ont été faites par des tribunaux de la Colombie-Britannique, notamment dans les affaires Taku Tlingit, Haïda, Sparrow… le 26 juin 2014, dans l’arrêt Tsilhqot’in — la déclaration et le titre — et, en 1997, ma parenté, dans l’affaire Delgamuukw-Gisday’wa, laquelle portait sur les peuples autochtones qui se gouvernent eux-mêmes.

Le problème tient au fait que, sur une chose, c’est très positif en Colombie-Britannique, et, comme nous n’avons pas de tribunal pour tenir la province responsable, nous avons au sein de l’Assemblée législative un secrétariat qui est dirigé par notre sous-ministre autochtone, une femme des Premières Nations qui, à bien des égards, réussit à tenir la province de la Colombie-Britannique et ses ministères responsables.

La responsabilisation est très importante, qu’il s’agisse d’un tribunal, comme mon collègue l’a dit, ou de quelque chose de semblable, comme un secrétariat, pour s’assurer qu’un grand nombre des lois sont conformes à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.

La Colombie-Britannique a été un partenaire disposé à examiner bon nombre de ces questions, mais l’un des problèmes est lié à la bureaucratie. Les centaines ou les milliers de bureaucrates qui siègent à l’Assemblée législative doivent savoir et comprendre ce que la DNUDPA signifie pour les peuples autochtones. C’est vraiment nécessaire.

En tant que Premières Nations, nous devrions faire les choses plus publiquement, car nous avons récemment rencontré un problème avec les modifications à la Land Act visant à nous reconnaître en tant que décideurs sur le territoire. C’est une leçon que nous avons apprise. Ce qui est positif, c’est que nous pourrons en sortir mieux préparés relativement aux modifications qui peuvent être apportées.

Récemment, la Land Act a été modifiée de manière à reconnaître les Premières Nations qui détiennent des terres en fief simple comme étant des collectivités des Premières Nations. C’est un petit pas dans la bonne direction.

Mais plus récemment, au cours de la dernière semaine… la reconnaissance du titre haïda est une importante initiative que le gouvernement fédéral examinera peut-être. En réalité, elle est le fruit de la Déclaration des Nations unies et de la reconnaissance du fait que les Haïdas n’ont jamais cédé leur territoire, qu’ils sont les propriétaires légitimes de leurs terres à Haida Gwaii, et la Colombie-Britannique reconnaît enfin qu’ils ont un titre de propriété.

On en revient vraiment au partenariat entre les Haïdas et le gouvernement provincial. Par ailleurs, l’initiative fait partie de la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies au moyen de nombreux articles qui reconnaissent que les Premières Nations ont la capacité de se gouverner elles-mêmes. Il est certain que cette mesure visant à reconnaître les Haïdas comme étant les propriétaires légitimes de leur territoire est un pas dans la bonne direction. Je crois que le gouvernement fédéral fera de même, très bientôt, espérons-le.

Le retrait de la compétence en matière de protection de l’enfance est une autre mesure positive. À de nombreux égards, ce n’est pas que le projet de loi C-15. Le projet de loi C-92 reconnaît que les Premières Nations peuvent prendre en charge la protection de l’enfance en Colombie-Britannique, et le projet de loi C-91 prévoit un certain financement.

Vous avez parlé des langues. On dénombre plus de 60 langues autochtones dans les territoires des Premières Nations partout au Canada. Environ 35 viennent de la Colombie-Britannique. Deux années se sont écoulées depuis que les Nations unies ont reconnu la décennie des langues autochtones, mais nous observons une réduction du financement accordé à tous les peuples autochtones du pays. Pourtant, nous célébrons les langues autochtones. Le financement accordé par Patrimoine Canada aux Premières Nations, aux Inuits et aux Métis dans l’ensemble du pays a vraiment diminué. Nous préférerions qu’il augmente en cette période de reconnaissance de la décennie des langues autochtones. Je vous remercie, madame la sénatrice.

La sénatrice Coyle : Merci.

La sénatrice White : Je remercie les témoins de ce matin de nous avoir fait part de leurs connaissances et de leur sagesse.

Ma question s’adresse au président Obed. Ce matin, vous avez mentionné le rapatriement. Je suis vraiment curieuse à ce sujet. En février, le sous-ministre adjoint Charles Slowey, de Patrimoine canadien, a comparu devant le comité. Il a déclaré que des discussions préliminaires avaient commencé à donner suite au plan d’action et aux mesures relativement au rapatriement et à la rematuration.

Je suis curieuse de savoir ce que sont ces discussions préliminaires et si les responsables d’ITK ont désigné des artéfacts culturels particuliers ou d’autres choses qui pourraient devoir être rapatriés? Avez-vous eu du succès auprès des musées et des établissements qui détiennent ces artefacts? Merci.

M. Obed : Ici, au pays, nous avons eu tout récemment des conversations avec, disons, le Musée canadien de l’histoire et le Musée canadien de la guerre au sujet du rapatriement. Une grande partie de notre travail de rapatriement a eu lieu aux États-Unis ou en Europe. Au titre de la Native American Graves Protection and Repatriation Act — ou, en français, la loi sur la protection et le rapatriement des tombes d’Autochtones américains —, les États-Unis ont pris des mesures très positives dans certains musées ou établissements qui identifient les restes humains inuits et en interagissant ensuite avec… dans bien des cas, jusqu’à présent, c’était le Nunatsiavut, dans le Nord du Labrador. Mais nous constatons la réalité positive d’une loi qui exige que nos restes humains nous soient rendus pour qu’on les inhume convenablement. Dans notre pays, elle n’existe pas. Nous avons même eu des cas où des personnes ont envoyé des restes humains inuits par la poste à nos bureaux, puis nous avons communiqué avec les autorités compétentes, la Police provinciale de l’Ontario. Mais c’est la réalité de notre pays. Nos ossements ont été recueillis. Nos cimetières ont été pillés pendant des centaines d’années. Nos ossements sont partout dans le monde. Nous sommes maintenant dans une situation où nous disposons des ressources nécessaires et comprenons de mieux en mieux où se trouvent ces objets, et nous voulons qu’ils nous soient rendus.

Au Canada, il est impératif que nous ayons un fondement législatif pour rendre hommage aux personnes qui ne sont pas mortes avec honneur. Cela semble être une chose très élémentaire, mais le gouvernement fédéral n’a actuellement aucun pouvoir législatif lui permettant d’appliquer ces dispositions; toutefois, il est impératif que les Inuits voient à combler ce vide législatif pour la mise en œuvre de leurs droits existants.

Nous avons eu du succès auprès des établissements qui rapatrient des restes. Il y a aussi des objets d’importance culturelle pour les Inuits qui, à notre avis, n’ont pas été pris de bonne foi et que nous aimerions voir restitués. Il y a ensuite un nombre incalculable d’autres objets qui ne sont pas documentés, et il nous faudra des décennies pour les recenser.

Le kayak que le Vatican a en sa possession est une chose que la plupart des Canadiens connaissent peut-être, et nous sommes toujours en pourparlers avec les Musées du Vatican pour voir à ce qu’il soit rapatrié dans la région inuvialuite des Territoires du Nord-Ouest.

La sénatrice Hartling : Tout d’abord, je tiens à remercier les témoins. Chef Teegee, je vous remercie de votre leadership en Colombie-Britannique et des connaissances que vous apportez. Il est intéressant que vous parliez de Haida Gwaii; nous sommes en train d’étudier ce projet de loi, et nous espérons qu’il sera adopté bientôt, cette semaine. Je vous en remercie.

Monsieur le président Obed, je vous suis beaucoup à la CBC et partout où vous prenez la parole. Vous êtes très bien informé, et je vous en suis reconnaissante, ainsi que de votre bon leadership.

Toutefois, je suis contrariée lorsque nous entendons tout cela encore une fois… il semble certainement y avoir une lacune, comme vous l’avez mentionné. Mais, la question des langues… je vis dans une province bilingue, et on ne tolère pas que les gens ne puissent pas recevoir leurs services dans leur langue, alors je suis tout à fait d’accord avec vous. Je pense qu’il doit être prioritaire que l’on puisse obtenir ces services dans la langue de son choix.

Du point de vue de notre comité, il est difficile de savoir quelle direction prendre à partir de maintenant. Avez-vous des suggestions d’aspects, de questions, de témoins ou de personnes sur lesquels nous pourrions nous appuyer pour approfondir nos connaissances? L’un des problèmes pour les Canadiens tient au fait qu’ils ne savent pas certaines choses. La fin de semaine dernière, j’ai participé à un exercice des couvertures au Nouveau-Brunswick, et 50 personnes sont venues me dire : « Nous n’avons jamais appris cela à l’école. »

Alors il s’agit certainement d’une lacune au chapitre de l’éducation en général. Pouvez-vous nous donner une idée de ce que nous pourrions faire et de la façon dont nous pourrions tirer parti de nos connaissances pour aller plus loin, être des alliés et vous soutenir? Merci.

M. Obed : À cet endroit-ci, au Sénat, j’ai grandement apprécié les conversations que nous avons pu avoir en comité sur une foule de projets de loi différents ou simplement sur divers sujets de discussion. Nos interventions visent en grande partie à énoncer nos positions, mais aussi à vous mettre en garde concernant la façon dont ces enjeux sont présentés par le gouvernement fédéral et les ministères qui y travaillent. Quel que soit le gouvernement au pouvoir, on use de raccourcis pour tenter de décrire le monde d’une façon qui ne représente pas la réalité, et cette approche est appliquée à la mise en œuvre des lois et à la création de politiques ou de programmes. Mais, en ce qui concerne les Inuits et les autres peuples autochtones, il semble qu’ils vivent encore à une époque où… je vais prendre l’exemple de la langue. Il s’agit d’une interprétation catégoriquement différente de l’obligation qu’a le gouvernement du Canada de veiller à ce que, disons, l’inuktitut jouisse des droits qui lui reviennent en tant que langue autochtone au pays, de la façon dont le même gouvernement envisage ses obligations envers le français ou l’anglais.

Quelle que soit l’hyperbole que le gouvernement utilise pour parler de l’amour qu’éprouvent les Canadiens à l’égard des langues autochtones, rien de tout cela n’a d’importance si on n’établit pas les fondements législatifs et les pouvoirs appropriés dans le cadre des programmes et des politiques pour veiller à ce que les Inuits puissent s’adresser en inuktitut aux fonctionnaires du gouvernement du Canada relativement à la prestation de soins de santé.

C’est la même chose en ce qui concerne la prestation des soins de santé en général, c’est-à-dire la disposition du gouvernement à accepter des résultats médiocres pour les Premières Nations, les Inuits et les Métis du pays dans des domaines stratégiques clés, des résultats clés en matière de santé, de bien-être, d’espérance de vie et de statut socioéconomique. Ce ne sont pas des résultats fortuits. Il s’agit de systèmes entiers qui génèrent le genre de libellés qui permettent au gouvernement de mener à bien ces types de processus sans vraiment résoudre les crises.

Si le comité peut nous aider à contrer la tendance du gouvernement à adoucir les aspects épineux et à ne pas vraiment atteindre l’objectif énoncé, ce sera très important pour nous, parce que nous avons souvent l’impression que nous essayons d’utiliser la logique, mais qu’elle ne fonctionne pas dans ce milieu pour les Autochtones du pays.

M. Teegee : Si vous me le permettez, vous soulevez une question très importante au sujet de l’éducation. L’histoire est écrite par les personnes qui tiennent la plume. Il est certain que l’histoire autochtone doit être comprise au sein du pays, car il existe littéralement 60 langues autochtones différentes et de nombreux groupes diversifiés de la Colombie-Britannique et d’ailleurs au Canada. Je pense que sur ces territoires traditionnels, il faut expliquer qu’il y a sur place des gens qui se gouvernent eux-mêmes depuis des temps immémoriaux. Et la terrible histoire de ce que nous avons vécu en termes d’actes génocidaires commis pendant plus de 100 ans de pensionnats, il faut l’enseigner à l’école. En outre, le fait que nous soyons ici depuis tout ce temps et que nous ayons nos propres gouvernements et nos propres façons de savoir et d’être en tant que peuples autochtones doit être enseigné dans les écoles et les établissements, où je crois que ce sera mieux compris au sein de la société.

Celle-ci doit comprendre pourquoi il est si important d’avoir de bonnes relations avec les peuples des Premières Nations du pays et de savoir sur quel territoire on se trouve et peut-être de mieux comprendre, en réalité, afin de créer une meilleure relation avec eux sur leurs territoires traditionnels, comme dans les centres urbains. Comme vous l’avez dit, personne ne connaît la signification d’une cérémonie des couvertures. Il faut l’enseigner sur les territoires respectifs où se tiennent ces cérémonies.

Il est très important que le système d’éducation sache et comprenne que nos langues existent depuis beaucoup plus longtemps que peut-être même la langue anglaise. Je pense qu’il faut enseigner dans les établissements, pas seulement dans les écoles, mais aussi dans les collèges et les universités, les relations avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis du pays pour mieux comprendre où nous allons et pourquoi il est important que la DNUDPA soit inscrite dans la loi afin que l’on reconnaisse que les Premières Nations font l’objet d’actes génocidaires et que c’est le cas depuis de très nombreuses années.

Quand on y pense, la colonisation des Amériques équivalait au génocide de nos peuples autochtones, ici en Amérique du Nord et en Afrique. Après les doctrines de la découverte et de terra nullius et après l’adoption des bulles pontificales par le pape, beaucoup de gens de ces pays sont venus dans les Amériques, qu’il s’agisse des Espagnols, des Portugais, des Français ou des Britanniques. Il est entendu que, sur une période de 500 ans, la colonisation a vraiment eu un effet préjudiciable non seulement sur les peuples autochtones des Amériques, mais aussi sur l’Afrique.

Merci.

Le vice-président : Merci. Ces discussions sont vraiment instructives pour nous.

Comme c’est ma prérogative en tant que vice-président, je vais me donner la possibilité de poser une question.

Vous ne pourrez pas y répondre aujourd’hui, mais vous voudrez peut-être y réfléchir. Je pense à la consultation, à l’élaboration conjointe et à la coopération. Avez-vous des définitions, des modèles préférés de pratiques exemplaires — je sais que le modèle provincial de la Colombie-Britannique pourrait faire partie d’un exemple — ou quelque chose que vous voudriez soumettre à l’étude du comité? Je crois que, s’il y a des pratiques exemplaires, cela aiderait les analystes.

Vous faites l’objet de consultations depuis longtemps. Évidemment, elles n’ont pas très bien fonctionné. Si nous en savons davantage sur ce que vous aimeriez voir, nous pourrons peut-être en tenir compte dans un rapport, ou ces connaissances pourront éclairer notre étude. Je voudrais le mentionner.

De plus, en ce qui concerne la conformité des lois fédérales avec la DNUDPA et tout processus d’élaboration conjointe des lois… qu’en pensez-vous? Je sais que vous avez parlé, chef, du cadre que vous avez en tête. Quels types d’outils d’évaluation pourraient être mis au point afin d’orienter le processus?

Or, j’ai dit que, pour aborder cette seule question sur laquelle j’aimerais vraiment que vous vous concentriez — parce que je pense que quelque chose par écrit répondrait peut-être à la première partie de ma question, mais, dans le plan d’action relatif à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, il y a l’article 19, la notion de création d’un :

[…] mécanisme indépendant relatif au suivi, à la surveillance, aux recours ou aux mesures de réparation des droits des autochtones ou des mécanismes dont la fonction serait de permettre aux peuples autochtones d’avoir accès à des procédures justes et équitables pour le règlement des différends et des conflits et de prendre rapidement des décisions à ce sujet, ainsi que de disposer de recours efficaces en cas d’atteinte ou de violation de leurs droits individuels et collectifs.

Il semble que ce soit l’un des aspects les plus importants et les plus fondamentaux sur lesquels il faille se concentrer, parce que l’article prévoit l’établissement d’un organisme indépendant qui a du pouvoir, qui a du mordant, quelque chose de différent du Conseil national de réconciliation.

Avez-vous des réflexions au sujet de ce projet? Vous avez participé à l’élaboration de cette idée, qui présente un vaste potentiel. Elle pourrait même répondre aux questions : qu’est-ce que la consultation? Comment fonctionne-t-elle? Qu’est-ce que l’élaboration conjointe et la coopération?

Concernant ce mécanisme particulier, j’ai posé une question semblable aux représentants du ministère de la Justice lorsqu’ils sont venus comparaître, parce qu’il devrait s’agir d’une priorité pour ce qui est de tenir le gouvernement responsable.

Toute réflexion ou tout commentaire que vous pourriez avoir à ce sujet serait très utile. J’aimerais que les représentants d’ITK et de l’APN se penchent sur cette question, si possible.

Il y aura ensuite la dernière question pour la sénatrice Coyle.

Monsieur Obed, voulez-vous commencer?

M. Obed : Merci.

Pour clarifier notre position sur le Conseil national de réconciliation, nous n’appuyons pas le projet de loi tel qu’il a été rédigé. Le concept en soi est positif. Nous croyons que toute institution dans le monde qui se fait la championne de la réconciliation est un pas dans la bonne direction. Il est vraiment dangereux de donner à cet organisme le pouvoir de faire rapport au Parlement alors qu’il n’a aucun pouvoir et qu’il n’est pas une institution détentrice de droits, surtout si l’on tient compte de l’utilisation dans le passé d’institutions détentrices de droits autochtones par rapport à d’autres organismes. Voilà la situation dans laquelle nous ne voulons pas nous trouver relativement à la mise en œuvre de la DNUDPA.

En ce qui concerne l’article 19 du plan d’action, les responsables d’ITK ont travaillé en étroite collaboration avec le gouvernement du Canada pour modifier la loi de manière à y inclure la capacité de travailler sur cet article.

La prémisse centrale consistant à se demander à quoi sert un droit sans recours ni mesures de réparation est vraiment la question que nous devrions tous nous poser relativement à la mise en œuvre de la DNUDPA. Comme nous avons 150 ans d’expérience à constater que les mécanismes de droits de la personne et les mécanismes fédéraux n’ont pas été en mesure de défendre adéquatement nos droits existants, nous avions l’impression que la capacité de mettre sur pied un organisme spécialisé qui se concentrerait sur la prise de décisions et fournirait clairement une orientation relativement à la mise en œuvre de nos droits dans les domaines où il y a une lacune ou une violation serait extrêmement utile pour la mise en œuvre de la DNUDPA au pays, et, d’un point de vue logique, cette capacité est l’un des importants chaînons manquants, si c’est ce que le gouvernement souhaite faire.

Le problème, c’est que nous ne voyons tout simplement pas la fin des conversations théoriques sur ce dont il pourrait s’agir.

Monsieur David, voulez-vous ajouter quelque chose au sujet de la situation actuelle?

M. David : Pour diverses raisons, les discussions sur le suivi de la mesure 19 du plan d’action ont été vraiment limitées. Vous pouvez consulter notre exposé de position intitulé Establishing an Indigenous Human Rights Commission and Tribunal — ce qui signifie, en français, « établir un tribunal et une commission des droits de la personne autochtones » —, puis le libellé de la mesure prioritaire pour constater avec quelle minutie ce libellé a été négocié.

Comme le chef régional Teegee l’a souligné, l’un des problèmes cernés par le gouvernement dans le cadre d’un grand nombre de mesures prioritaires, y compris la mesure 19 du plan d’action, c’est l’absence de mandat pour aller de l’avant. Ce qui figure dans le plan d’action est bien formulé, mais le libellé ne semble pas aborder suffisamment le mandat requis pour prendre la mesure.

Le vice-président : Monsieur Teegee ou madame Koerner-Yeo, avez-vous des commentaires à formuler sur ces questions?

M. Teegee : Certainement. Je pense qu’il s’agit d’une question très importante et fondamentale quant au fait que même ce processus ne respecte pas la DNUDPA au chapitre du consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause. Je pense que cela s’applique au libellé du projet de loi en tant que tel, ainsi qu’aux mesures du plan d’action lui-même, dont bon nombre — je le dis à l’intention de mes collègues autochtones ici présents — avaient peut-être déjà été élaborées sans que les Premières Nations n’aient été consultées en bonne et due forme.

Je pense que nous avons fait de notre mieux avec ce dont nous disposions en ce qui concerne ce projet de loi préfabriqué, si vous voulez, et peut-être le plan d’action. Néanmoins, la mesure 19 du plan d’action est très importante pour ce qui est de veiller à ce que ces ministères rendent des comptes et qu’ils disposent de mandats adéquats, particulièrement quant à certaines de ces réunions où il est difficile de savoir quel type de mandat a été confié au sous-ministre adjoint ou au sous-ministre pour ce qui est d’entendre et de faire valoir nos préoccupations relatives à la mise en œuvre de la DNUDPA.

Selon moi, qu’il s’agisse d’un tribunal — une bonne idée qui a été proposée plus tôt relativement à la mise en œuvre — ou de ce dont nous disposons en Colombie-Britannique — à savoir un secrétariat — pour faire en sorte que ces ministères rendent des comptes au Parlement, ces deux recommandations se prêteraient probablement bien à la mise en œuvre des mesures du plan d’action et de la LDNU.

De plus, il s’agit vraiment de comprendre pourquoi il est si important que cela fasse partie des communications avec le personnel ou les fonctionnaires, car selon notre expérience — et je pense que cela ne s’applique pas seulement à la Colombie-Britannique —, il est très difficile de changer l’appareil et la culture d’un gouvernement colonial de l’extérieur.

Nous devons trouver un moyen d’élaborer un plan quant à la façon dont nous pouvons changer cela en fonction des besoins des Premières Nations et des peuples autochtones du pays et de l’importance de mettre en œuvre la DNUDPA sur le plan législatif.

En fin de compte, cette question et d’autres de ce genre m’ont été posées au cours des dernières semaines, et la réalité ici en Colombie-Britannique, et peut-être ailleurs, c’est que nous nous retrouvons devant les tribunaux. Bien souvent, nous nous retrouvons devant un tribunal où le juge tranche en notre faveur, mais ce n’est pas l’endroit pour établir cette relation et faire en sorte que nos besoins soient entendus et que des décisions sont prises ensemble. Je pense que c’est ce que nous essayons d’éviter.

Le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause est nécessaire dans le cadre de tout processus avec les différentes Premières Nations au Canada. La prise de décisions doit se faire en collaboration, et comme l’a conclu récemment un tribunal dans le cas de référence au Québec, il est bon de voir que la Cour suprême reconnaît enfin les dispositions de la DNUDPA, qu’elle mentionne la DNUDPA dans son intégralité et qu’elle reconnaît que les Premières Nations ont la capacité de se gouverner elles-mêmes.

Il est vraiment important que cela soit largement diffusé au sein du gouvernement et qu’il y ait une véritable communication avec le gouvernement et la société en général au sujet des raisons pour lesquelles il est très important de se réconcilier avec les peuples autochtones de ce pays. Merci.

Le vice-président : Merci beaucoup.

La sénatrice Coyle : J’essaie d’assimiler cela. Chef, vous venez de parler de ces barrières, des barrières politiques, des barrières bureaucratiques, des barrières liées à la culture bureaucratique et des barrières de l’ignorance dans l’ensemble de la société canadienne.

En fin de compte, pour notre part, lorsque nous parlons d’une approche pangouvernementale, ne devrions-nous pas parler avec le premier ministre plutôt qu’avec le ministre des Relations Couronne-Autochtones? C’est notre premier ministre qui a dit que, pour son gouvernement, qui gouverne actuellement le Canada, la relation la plus importante est celle avec les peuples autochtones et, par conséquent, avec les gouvernements autochtones, n’est-ce pas?

Dans chaque lettre de mandat ministériel, il y a une ligne au sujet de ces relations, n’est-ce pas? Maintenant que la DNUDPA est en place, un jalon a été posé, et des comptes doivent être rendus.

Je me demande s’il ne devrait pas y avoir une sorte de dialogue entre cet organisme et le premier ministre sur ce qu’il faudrait faire pour mettre en marche l’initiative politique pangouvernementale et l’initiative bureaucratique pangouvernementale de manière à faire avancer ce dossier. Qu’en pensez-vous?

M. Obed : La relation entre les Inuits et la Couronne est très productive grâce au Comité de partenariat entre les Inuits et la Couronne. Le premier ministre participe à l’une de nos réunions chaque année. Deux autres fois par année, de cinq à sept de ses collègues du Cabinet y représentent le gouvernement. Le ministre Anandasangaree copréside ce comité avec moi, et le premier ministre le fait une fois par année.

Ces mécanismes évolutifs ont été mis en place et font en sorte que le premier ministre participe activement au processus de réconciliation.

Certaines des difficultés sont liées à des points faibles au sein du Cabinet ou du personnel des ministères. Vous pouvez attaquer cela de bien des façons. Vous pouvez attaquer ce programme de réconciliation en le rejetant ouvertement, puis en mettant vos collègues du Cabinet ou de votre ministère au défi de vous tenir responsable de ne pas avoir fait le travail de mise en œuvre.

Le travail peut être recatégorisé comme étant agréable à avoir, mais impossible à accomplir. Ainsi, vous pouvez invoquer le manque d’argent, le manque de temps et le manque de ressources. Vous minimisez les problèmes en expliquant que vous aimeriez faire quelque chose, mais que vous ne le pouvez pas, ou vous les ignorez simplement en disant que cela relève de Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada, ou RCAANC, ou de Services aux Autochtones Canada. Historiquement, chaque fois qu’il est question des Autochtones, le ministre dit simplement : « Eh bien, adressez-vous au ministre des Relations Couronne-Autochtones. Adressez-vous à Services aux Autochtones. » Nous en sommes aux premiers jours de l’approche pangouvernementale.

Le premier ministre, le Conseil privé, le Cabinet du premier ministre et tout le personnel associé doivent vraiment jouer un rôle de surveillance exceptionnel en ce qui concerne les autres domaines prioritaires qui les occupent, et je comprends à quel point cela est difficile au fil du temps, compte tenu de tout ce qui se passe dans le monde, mais, comme vous l’avez mentionné, le premier ministre a parlé explicitement de l’importance qu’il accorde à cette relation particulière et de la nature de ses ambitions.

Au bout du compte, il incombe au chef du parti au pouvoir de veiller à ce que ce mandat soit exécuté, et nous nous retrouvons encore à sensibiliser les ministres, les sous-ministres et les sous-ministres adjoints à l’égard de leurs obligations par rapport à ce que le gouvernement a promis, que ce soit par le truchement de textes législatifs, de politiques, de programmes ou du processus de partenariat entre les Inuits et la Couronne, et c’est assez épuisant. Il n’y a que 70 personnes au sein de l’ITK, et un seul moi, et nous interagissons avec plus de 30 ministères dans le cadre du programme de réconciliation. Cela peut être très difficile.

Le vice-président : Merci beaucoup. Chef Teegee, voulez-vous faire un commentaire?

M. Teegee : Bien sûr. Je pense que le premier ministre doit jouer un rôle actif dans cette relation, si c’est vraiment la relation la plus importante. De plus, je ne sais pas comment il prend ses décisions. Plus récemment, en août, il y a eu un remaniement ministériel. Malheureusement, nous avons dû établir une nouvelle relation avec le ministre Virani après avoir noué de bonnes relations avec l’ancien ministre Lametti. Le ministre Miller a appris de son plein gré la langue mohawk. Il était le ministre de RCAANC, et nous avons établi de bonnes relations avec lui. Nous devons maintenant établir un certain lien de confiance et des relations avec le ministre Anandasangaree, le ministre Virani et d’autres ministres.

C’est sa prérogative de former son propre Cabinet, mais en même temps, il dirige non seulement le Cabinet, mais aussi le pays, Il doit donc jouer un rôle actif dans la relation avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis.

Il est vraiment important qu’il nous considère comme une priorité, et si je peux me permettre des suggestions à l’intention du premier ministre, je dirais que nous avons une relation semblable à celle que les Inuits ont parfois avec le premier ministre et son Cabinet par l’entremise des ministres clés, mais que, si cela doit être une priorité, peut-être que cela devrait occuper une place de choix dans son ordre du jour; et peut-être que, si c’est une priorité pour lui, plus de ressources devraient être affectées à la mise en œuvre de la déclaration proprement dite ainsi qu’au renforcement des capacités des Premières Nations.

En outre, il est vraiment nécessaire de disposer d’une approche pangouvernementale afin d’élaborer une stratégie sur la façon de régler bon nombre des problèmes qui affligent les Premières Nations. Nous sommes toujours aux prises avec des problèmes liés à l’eau potable. La crise de l’itinérance et du logement est majeure, et nous avons fait savoir que l’Assemblée des Premières Nations et l’APNCB reconnaissent qu’il s’agit d’une crise des droits de la personne.

De nombreuses Premières Nations du pays sont aux prises avec la crise des opioïdes. En fait, en 2016, il a été jugé qu’il s’agissait d’une situation d’urgence et d’une crise en Colombie-Britannique. Malheureusement, les Premières Nations figurent au sommet de bon nombre de ces statistiques. Nous affichons le plus grand nombre de décès. Nous avons traversé une pandémie il y a quelques années, et les Premières Nations affichaient les taux les plus élevés d’infection et de décès.

Pour ce qui est de la justice et du maintien de l’ordre, nous affichons toujours les taux de décès en détention les plus élevés. Nos taux d’incarcération sont encore extrêmement élevés. En ce qui concerne les femmes autochtones, le taux est de 90 % en Saskatchewan.

Bon nombre de ces questions doivent être traitées de façon adéquate, et il doit être un chef de file dans ces discussions avec les peuples autochtones du pays. S’il est vraiment convaincu que cette relation est la plus importante, alors qu’il le montre, et qu’il agisse comme un chef de file dans ces discussions.

L’une des solutions est la LDNU. Merci.

Le vice-président : Merci, chef. Merci à tous les témoins. C’est tout le temps dont nous disposions pour ce groupe, et je remercie les témoins de leur présence parmi nous aujourd’hui. C’était très instructif. Je remercie les sénateurs et les sénatrices de leurs questions.

Si vous souhaitez formuler des observations par suite de cette réunion — je m’adresse à tous les témoins —, veuillez les envoyer par courriel à notre greffière. Nous vous serions très reconnaissants de nous communiquer par écrit tout ce que vous aimeriez ajouter aux propos que vous avez tenus ici aujourd’hui. Merci.

Notre prochain groupe est composé d’un seul témoin, à savoir Nancy Etok, présidente de Pauktuutit Inuit Women of Canada. Merci beaucoup de vous joindre à nous aujourd’hui pour nous aider par votre témoignage. Madame Etok, nous vous demandons de faire une déclaration préliminaire d’environ cinq minutes, et je demanderai ensuite aux sénateurs de vous poser quelques questions et d’engager la discussion.

Je vous remercie d’être des nôtres, et je vous invite maintenant à présenter vos observations.

Nancy Etok, présidente, Pauktuutit Inuit Women of Canada : Ullaakkut, monsieur le président, membres du comité, invités et membres du personnel. [Mots prononcés dans une langue autochtone]. Merci. Je suis actuellement à New York pour participer à l’Instance permanente des Nations unies sur les questions autochtones.

Pauktuutit est l’organisation nationale qui représente les femmes, les filles et les personnes de diverses identités de genre inuites, peu importe où elles vivent au Canada. Qu’une Inuite vive dans l’une des quatre régions de l’Inuit Nunangat ou dans un centre urbain, notre organisation répondra à ses besoins, qu’ils aient trait à la santé, à la violence, à la prévention de la violence, à la justice, au développement économique, au leadership, à l’équité ou à l’autodétermination.

Peu de progrès ont été réalisés au chapitre du logement, des taux de violence entre partenaires intimes, des refuges et du retrait des enfants. Il est indéniable que l’accès à un logement sûr et adéquat est essentiel pour lutter contre la violence fondée sur le sexe et assurer un accès et une participation équitables à la vie communautaire, et il s’agit d’un obstacle majeur à la préservation de la culture et de la communauté.

Nous sommes également aux prises avec un problème exacerbé par le fait que nos familles ont été déchirées par le retrait des enfants, et 19 % des Inuits ont déclaré être sous la responsabilité du gouvernement avant l’âge de 15 ans. C’est un chiffre effarant, compte tenu du fait que seulement 1,3 % des non-Autochtones ont été pris en charge par le gouvernement.

Cette surreprésentation des enfants inuits pris en charge au Canada est une forme d’assimilation et n’est qu’une facette de l’injustice historique que la DNUDPA et le plan d’action du gouvernement sont censés corriger. Les femmes et les communautés inuites ont le droit inhérent de prendre soin de leurs enfants, de leurs jeunes et de leurs familles. Pour remédier à ces injustices et ces problèmes cruciaux, il faut combler les besoins les plus pressants des femmes et des filles inuites, notamment en offrant des logements sûrs, abordables et adéquats, y compris des refuges d’urgence pour les femmes et les familles inuites; en mettant fin aux pratiques de profilage racial par la police et en rétablissant les systèmes de justice inuits; en éliminant la violence familiale par l’accès à un logement, à la sécurité du revenu, à des services de santé et à des infrastructures de base; et en assurant la pérennité des pratiques culturelles et liées à la terre inuites qui améliorent la sécurité alimentaire et donnent accès à la guérison.

Pour remédier aux inégalités et aux injustices systémiques que subissent les femmes inuites, il est essentiel que le gouvernement du Canada investisse dans les peuples autochtones, leur souveraineté et leur bien-être. La DNUDPA offre la possibilité d’un changement de paradigme au sein du gouvernement du Canada et une occasion d’assumer la réalité du colonialisme. Le gouvernement du Canada doit faire d’importants investissements à long terme dans les communautés autochtones. Ce travail devrait constituer la plus haute priorité pour le Canada dans l’avenir, mais seulement si nous veillons à ce que la mise en œuvre respecte des dispositions comme le premier paragraphe de l’article 22, qui reconnaît les besoins spéciaux des femmes, et le second paragraphe de l’article 22, qui prévoit la protection des femmes et des enfants autochtones contre toutes les formes de violence.

La LDNU énonce expressément que la mise en œuvre de la déclaration doit comporter des mesures visant à lutter contre les injustices, à combattre les préjugés et à éliminer toute forme de violence, de racisme et de discrimination, notamment le racisme et la discrimination systémiques, auxquels se heurtent les peuples autochtones, y compris les femmes et les enfants autochtones ainsi que les Autochtones de diverses identités de genre. Votre approche à l’égard de cette loi doit refléter les aspirations et l’esprit de la DNUDPA, et lancer l’initiative de décolonisation effective des lois au Canada.

Le leadership des Inuits dans la mise en œuvre de la DNUDPA est intégré à la déclaration elle-même. Cependant, il est important pour nous d’insister sur le fait que la voix des femmes inuites doit faire partie de ce processus. Pour que la mise en œuvre de la LDNU donne des résultats significatifs, le Canada doit faire appel à des défenseures des droits des femmes inuites, à des représentantes des femmes inuites ainsi qu’à des organisations et à des communautés de femmes inuites pour qu’elles agissent en tant qu’expertes et qu’elles veillent à ce que les processus de consultation ne soient pas des exercices de pure forme, inefficaces et contre-productifs.

La LDNU doit respecter et appliquer l’interprétation la plus large de la DNUDPA afin de s’assurer que les priorités et les intérêts coloniaux — que la déclaration est censée restreindre — ne puissent pas primer sur le progrès et le changement ni les entraver. Sans investissement, les résultats prévus par la DNUDPA ne se concrétiseront pas. Le gouvernement du Canada doit accorder la priorité à l’investissement dans la mise en œuvre de la DNUDPA, non seulement dans le contexte de la législation, des droits et des services inuits, mais à l’échelle de tous les ministères fédéraux.

Je suis impatiente de discuter plus en détail de tout cela avec chacun des membres du comité.

Nakurmiik.

Le vice-président : Merci beaucoup, madame Etok, de votre déclaration préliminaire. Je vais inviter mes collègues sénateurs à poser des questions, s’ils le souhaitent.

La sénatrice Hartling : Nancy, je m’appelle aussi Nancy. Nous avons donc quelque chose en commun, c’est bien. Par ailleurs, au cours de ma carrière au Sénat, j’ai travaillé auprès de femmes sur des questions relatives à la violence, aux agressions sexuelles et à d’autres problèmes de ce genre, alors je sais à quel point tout cela touche profondément les femmes et leurs familles.

Vous avez soulevé de très bons points. Je vois que l’article 6 de la DNUDPA est un appel à changer tout cela, mais vous dites qu’il ne s’est pas passé grand-chose. Quelles mesures devraient être prises dans l’immédiat? Je sais qu’il y a de nombreux problèmes allant du logement à la sécurité alimentaire en passant par toutes sortes de choses de ce genre, mais quels sont les défis? J’imagine que certains d’entre eux sont attribuables au fait que cela se passe dans des régions éloignées, mais pouvez-vous nous en dire un peu plus sur certaines choses auxquelles le comité devrait prêter attention?

Merci.

Mme Etok : Je voulais commencer par dire que lorsque j’ai vu votre nom, je me suis dit : « C’est un très beau nom. »

Il y a beaucoup de changements dont le gouvernement ne s’occupe pas assez. Comme vous l’avez dit, beaucoup de choses doivent changer, comme la situation du logement. Si nous pouvons faire en sorte que des logements soient offerts, cela apportera beaucoup de bonnes solutions aux familles dans le besoin. En l’absence d’un refuge sûr, bien d’autres choses ne peuvent pas changer. Nous constatons une pénurie de refuges et de logements. Lorsque vous disposez d’un lieu sûr, vous pouvez vous attaquer aux autres problèmes auxquels vous faites face.

Je dirais que c’est l’une des choses importantes, mais comme je l’ai mentionné, il y en a beaucoup.

La sénatrice Hartling : Au Nouveau-Brunswick, j’ai visité Elsipogtog, l’une des communautés autochtones. On y a mis en œuvre un plan dans le cadre duquel les femmes ont pu apprendre des métiers, et elles construisent des maisons dans la communauté, avec l’appui du gouvernement.

Parfois, lorsqu’on attend longtemps, c’est très difficile. C’est à ce moment-là que les femmes ne quittent pas la situation. En ce qui concerne les refuges, est-ce un autre problème? Est-ce que les femmes ont des endroits où aller dans vos communautés?

Mme Etok : Comme je l’ai mentionné, nous représentons quatre régions. Chaque région a des besoins différents. Ce que nous avons à gérer est énorme, et il n’y a jamais de financement. Même si des femmes voulaient construire des refuges, nous aurions besoin de financement pour que cela se concrétise.

Les besoins de chaque région sont absolument différents. Il est donc très compliqué de donner une réponse uniforme à cette question, car nous nous occupons de tous les problèmes touchant les femmes inuites au Canada.

Le financement est toujours un problème, selon la région, alors il m’est vraiment difficile de donner une réponse précise.

La sénatrice Hartling : J’imagine, madame Etok, que cela doit parfois vous décourager. Il est difficile de continuer quand on voit ces lacunes. Comment composez-vous avec cela?

Mme Etok : Ma grand-mère m’a élevée, alors je reviens toujours à mon principe de base : « Ne pas lâcher ». Je dois toujours me rappeler que mes ancêtres ont survécu aux conditions les plus difficiles sans rien, et je crois fermement que cela m’a été transmis. Je dois constamment me rappeler que, malgré tout ce qui m’arrive, nous avons survécu aux conditions les plus difficiles, et nous pouvons survivre à cela.

Cependant, nous devons trouver des façons de travailler ensemble de manière à pouvoir fournir aux régions inuites ce dont elles ont besoin. Nous allons continuer.

La sénatrice Hartling : Nous soutiendrons tout ce que nous pouvons soutenir. Merci.

Mme Etok : Merci.

La sénatrice Sorensen : Bienvenue, madame Etok. Je crois comprendre qu’en 2022, votre organisation a lancé un cadre d’analyse comparative entre les sexes plus propre aux Inuits. Pourriez-vous nous en parler un peu?

Mme Etok : Je n’ai pas toutes les réponses au sujet de ce programme, mais je vous fournirai très volontiers un mémoire écrit. Je veux m’assurer de communiquer des renseignements exacts. Comme je ne les ai pas sous la main, je me ferai un plaisir de vous transmettre un mémoire écrit à ce sujet.

La sénatrice Sorensen : Très bien, ce serait formidable.

J’ai une question complémentaire. Au plus haut niveau, lorsqu’on examine le plan d’action, croyez-vous qu’il accorde suffisamment d’importance aux défis particuliers dont vous parlez? Je comprends que les résultats du plan sont peut-être peu impressionnants à ce stade-ci, mais pensez-vous que le plan lui‑même accorde suffisamment d’importance à vos préoccupations?

Mme Etok : Comme je l’ai mentionné, il y a encore beaucoup de travail à faire. Nous avons accompli un énorme travail, mais il reste encore beaucoup à faire. À cette fin, il faudrait qu’ils s’assoient avec nous et qu’ils nous écoutent parler des réalités avec lesquelles nous devons composer afin que nous puissions combler l’écart en ce qui concerne les réalités qui sont les nôtres et les problèmes avec lesquels nous sommes aux prises. Nous devrons nous asseoir pour faire en sorte de combler ce gouffre.

Je pense que la tenue d’une discussion serait l’unique moyen de me convaincre que nous sommes sur la même longueur d’onde à ce moment-ci, car nous avons parfois l’impression de ne pas voir la situation de la même façon. Cette discussion sera plus satisfaisante en ce qui me concerne.

La sénatrice Sorensen : Merci beaucoup. Je comprends cela.

Le vice-président : Merci, madame Etok. J’ai quelques questions à vous poser.

Pauktuutit a toujours été très actif au sein de forums internationaux comme l’Instance permanente des Nations unies sur les questions autochtones. Vous êtes de nouveau à New York aujourd’hui pour y participer. À vos yeux, comment les activités de défense des intérêts à l’échelle internationale auxquelles vous et votre organisation vous adonnez depuis longtemps évoluent-t-elle à la lumière de ce que le Canada tente de faire avec la Loi sur la DNUDPA? Pensez-vous que cela vous aide effectivement à régler les problèmes auxquels vous faites face?

Mme Etok : Merci de votre question, monsieur le président. Je suis relativement nouvelle dans mes fonctions, mais la voix des femmes inuites est absolument cruciale pour la mobilisation partout dans le monde, qu’il s’agisse de femmes inuites ou de n’importe quelles femmes autochtones. Si nous commençons à parler la même langue, cela ne fera que nous renforcer. Être présentes à l’international et établir des liens avec d’autres femmes autochtones, cela constitue du renforcement. Oui, merci de cette question.

Le vice-président : Sur quels programmes précis vous concentrez-vous dans le cadre de votre présidence? Sur quelles initiatives Pauktuutit doit-elle mettre l’accent pour promouvoir le bien-être et les droits des femmes inuites partout au Canada?

Mme Etok : Je vous remercie de cette question. Comme je l’ai mentionné plus tôt, nous faisons connaître les besoins en matière de santé, de lutte contre la violence, de prévention de la violence, de justice, de développement économique, de leadership, d’équité et d’autodétermination. Cela dit, si vous voulez des renseignements plus précis à ce sujet — comme je l’ai dit, je suis relativement nouvelle dans mes fonctions —, je serai heureuse de vous transmettre un mémoire écrit afin que vous puissiez obtenir toute l’information sur le travail que nous faisons à Pauktuutit et mieux le comprendre.

Le vice-président : Oui, nous vous en serions très reconnaissants, car cela permettra à nos analystes et aux sénateurs qui ne sont pas ici aujourd’hui de mieux comprendre certains de ces problèmes. Merci.

Y a-t-il d’autres questions pour Mme Etok?

Comme il n’y en a pas, je tiens à vous remercier, madame Etok, de nous avoir consacré du temps aujourd’hui. De toute évidence, vous avez un horaire très chargé, mais la voix de Pauktuutit Inuit Women of Canada est très importante pour le travail que nous faisons, pour la compréhension des problèmes avec lesquels vous êtes aux prises et pour nous permettre de mieux soutenir ce que vous essayez de faire. Merci de votre présence parmi nous aujourd’hui et de votre aide dans le cadre de nos travaux.

(La séance est levée.)

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