Aller au contenu
APPA - Comité permanent

Peuples autochtones


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES PEUPLES AUTOCHTONES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mardi 24 septembre 2024

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd’hui, à 9 heures (HE), avec vidéoconférence, pour étudier les responsabilités constitutionnelles, politiques et juridiques et les obligations découlant des traités du gouvernement fédéral envers les Premières Nations, les Inuits et les Métis et tout autre sujet concernant les peuples autochtones; et, à huis clos, pour l’étude d’un projet d’ordre du jour.

Le sénateur Brian Francis (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Avant de commencer, j’aimerais demander à tous les sénateurs et aux autres participants en personne de consulter les cartes sur la table pour s’informer des lignes directrices sur la prévention des incidents de rétroaction auditive. Assurez-vous de garder vos écouteurs loin de tous les microphones en tout temps. Lorsque vous ne les utilisez pas, déposez-les sur l’autocollant placé sur la table à cette fin. Je vous remercie tous de votre collaboration.

Je voudrais commencer par souligner que les terres sur lesquelles nous nous réunissons se trouvent sur le territoire traditionnel, ancestral et non cédé de la nation algonquine Anishinabe et que de nombreux autres peuples des Premières Nations, des Métis et des Inuits de l’ensemble de l’île de la Tortue y vivent maintenant.

Je suis le sénateur mi’kmaq Brian Francis d’Epekwitk, aussi connue sous le nom d’Île-du-Prince-Édouard, et je suis le président du Comité des peuples autochtones. Je vais maintenant demander aux membres du comité ici présents de se présenter en se nommant et en précisant leur province ou territoire.

Le sénateur Prosper : Paul Prosper, Mi’kma’ki, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Hartling : Bonjour. Sénatrice Nancy Hartling, du territoire non cédé du peuple mi’kmaq du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur McNair : Bonjour. John McNair, du Nouveau-Brunswick, également des terres non cédées du peuple mi’kmaq.

Le sénateur Arnot : Bonjour à tous. David Arnot, de la Saskatchewan. Je vis sur le territoire visé par le Traité no 6.

La sénatrice Sorensen : Karen Sorensen, de l’Alberta, parc national Banff, territoire du Traité no 7.

La sénatrice Audette : [Mots prononcés en innu-aimun] Michèle Audette, Innue du Québec.

La sénatrice White : Kwe. Judy White, de Ktaqmkuk, mieux connue sous le nom de Terre-Neuve-et-Labrador.

La sénatrice Greenwood : Margo Greenwood, de la Colombie-Britannique, originaire du territoire visé par le Traité no 6.

La sénatrice Coyle : Bonjour. Je m’appelle Mary Coyle, d’Antigonish, en Nouvelle-Écosse, Mi’kma’ki.

Le président : Merci à tous.

Avant de commencer la réunion, j’aimerais faire une brève annonce.

À la suite d’une demande du Groupe de travail des sénateurs autochtones, on a ajouté à l’intention des sénateurs une nouvelle option au site Web public du Sénat, ainsi qu’à la bannière de diffusion des réunions des comités et des séances du Sénat. Plus précisément, tous les sénateurs, autochtones et non autochtones, ont maintenant la possibilité de reconnaître un territoire traditionnel, à côté de leur province ou territoire d’origine, ce qui est un signe de reconnaissance et de respect de la relation spéciale des peuples autochtones avec la terre. Nous pouvons également ajouter des langues autochtones compatibles avec l’alphabet latin, y compris l’équivalent de « l’honorable ». Par exemple, dans le mien, vous verrez maintenant « Epekwitk, Mi’kma’ki » à côté d’« Île-du-Prince-Édouard ». Vous verrez aussi « Kepmite’Imut » à côté de mon titre officiel. Il s’agit d’une étape modeste, mais importante, vers le renforcement de notre engagement institutionnel à l’égard de l’inclusion et de la réconciliation. J’espère que d’autres sénateurs utiliseront cette option au cours des prochains mois. Les changements ont été approuvés par le comité directeur du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration. Je remercie la Direction des services d’information et la Direction des communications, de la télédiffusion et des publications de les avoir rendus possibles.

Aujourd’hui, nous poursuivons notre étude de l’efficacité du Cadre canadien des droits de la personne relativement à la promotion et à la protection des droits des peuples autochtones. Plus précisément, nous nous demandons si les mécanismes existants pourraient être améliorés ou s’il en faut de nouveaux, notamment des mécanismes propres aux Autochtones.

Je voudrais maintenant vous présenter notre première témoin de ce matin, Mme Jennifer Moore Rattray, ancienne représentante spéciale de la ministre des Relations Couronne-Autochtones – Appel à la justice 1.7. Merci de vous joindre à nous et bienvenue à nouveau, madame Moore Rattray. Vous vous souviendrez certainement du fait que Mme Moore Rattray a comparu devant le comité en avril 2023. À titre de représentante spéciale du ministre des Relations Couronne-Autochtones, elle a été chargée de formuler, en consultation avec des survivants, des membres de la famille, des partenaires et des organisations, des recommandations sur la mise en œuvre de l’Appel à la justice 1.7 et de la création d’un poste d’ombudsman national des droits de la personne des Autochtones. Le comité a décidé de l’accueillir à nouveau afin qu’elle lui donne un aperçu des recommandations du rapport final de l’appel à la justice 1.7 qui a été publié en juin dernier.

Notre témoin fera une déclaration préliminaire d’environ cinq minutes, qui sera suivie d’une période de questions et réponses avec les sénateurs. J’invite maintenant Mme Moore Rattray à faire sa déclaration préliminaire.

Jennifer Moore Rattray, ancienne représentante spéciale du ministre des Relations Couronne-Autochtones – Appel à la justice 1.7, à titre personnel : Tansi, aniin, good morning et bonjour.

[Mots prononcés en cri]

Je suis fière d’être membre de la nation crie de Peepeekisis, même si la famille de ma mère est originaire de Bunibonibee, aussi connue sous le nom nations cries d’Oxford House, de Norway House et de Fisher River, dans ce qui est aujourd’hui le Manitoba. J’ai le privilège de vivre à Winnipeg, sur le territoire visé par le Traité no 1, où vivent également les Métis de la rivière Rouge.

Je tiens à saluer les ancêtres, en cette belle journée, et je suis reconnaissante d’être en visite sur le territoire traditionnel, ancestral et non cédé de la Nation Algonquine Anishinabe.

Je tiens à vous remercier de l’invitation à vous rencontrer de nouveau et de votre engagement à utiliser votre voix collective pour mettre fin à l’épidémie nationale de violence faite aux femmes, aux filles et aux personnes bispirituelles et ayant diverses identités de genre autochtones.

La première fois que nous nous sommes rencontrés, je commençais mon mandat à titre de représentante spéciale du ministre. On m’avait demandé d’adresser au ministre des Relations Couronne-Autochtones des recommandations et des conseils indépendants sur la mise en œuvre de l’appel à la justice 1.7 du rapport final de l’Enquête nationale, qui porte sur l’établissement d’un poste d’ombudsman national des droits des Autochtones et des droits de la personne. J’ai été honorée de faire ce travail.

Les réunions et les engagements ont commencé en avril 2023, et, au cours des neuf mois suivants, j’ai eu la chance de rencontrer plus de 600 personnes qui ont pris le temps de me parler — certaines à plusieurs occasions — et, en tout, plus de 125 organisations et gouvernements différents, dont des organisations autochtones nationales et régionales, ainsi qu’un certain nombre d’entités de responsabilisation gouvernementale et de ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables des femmes, des filles et des personnes bispirituelles+ autochtones disparues et assassinées.

Les réunions et les engagements initiaux ont été suivis de séances de validation — très importantes — avec les gouvernements et les organisations des Premières Nations, des Inuits et des Métis qui visaient à faire évoluer les recommandations élaborées conjointement. Toutes les idées présentées dans le rapport proviennent des avis et des conseils des familles et des survivants, ainsi que des dirigeants et des citoyens des Premières Nations, inuits et métis, qui ont partagé leur temps précieux et ont communiqué leurs vérités et leurs attentes à l’égard de la responsabilisation et du changement.

Plus tôt cette année, on a présenté un rapport final, qui contient un certain nombre de recommandations, notamment que le bureau de l’ombudsman soit de portée nationale et régionale et qu’il adopte une approche qui respecte les distinctions entre les Premières Nations, les Inuits et les Métis, et concernant : l’importance d’établir des bases solides, y compris un passage sur la compétence et la production de rapports; un processus de sélection des ombudsmans; un mandat, des responsabilités, des pouvoirs et de l’indépendance; la gouvernance et l’affectation des ressources; l’embauche et la dotation en personnel; la transparence et la production de rapports; l’échelonnement pour assurer le succès, ce qui est tout à fait essentiel; et un plan de mise en œuvre; y compris un projet de cadre législatif qui a été présenté afin d’accélérer le processus.

Comme les données et les engagements l’ont montré clairement, une nouvelle institution des droits de la personne propre aux Autochtones est nécessaire pour promouvoir le respect des droits des Premières Nations, des Inuits et des Métis, et plus particulièrement des femmes, des filles et des personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queer, en questionnement, intersexuées et asexuelles plus autochtones, sans égard à l’endroit où ces personnes habitent et à leur statut.

La création d’un nouveau mécanisme de responsabilisation sous la forme d’un ombudsman des droits des Autochtones et de la personne est une occasion de commencer à s’attaquer aux iniquités dans les programmes et les services gouvernementaux qui mènent à des violations des droits des Autochtones et de la personne, et plus encore.

La différence entre les frais de déplacement du Programme des services de santé non assurés administré par Services aux Autochtones Canada et les taux payés par d’autres ministères fédéraux, comme Anciens Combattants Canada, est un exemple parmi des centaines. Comment peut-on justifier cette différence? La différence sur le plan des normes de prestation de services qui existe depuis des années est un autre exemple. Il faut 10 jours pour obtenir un passeport, mais des mois pour renouveler ou remplacer un certificat sécurisé de statut d’Indien, et il n’est pas rare que l’on attende neuf mois ou plus pour obtenir une nouvelle carte de statut. Cette carte donne accès aux services de santé non assurés, entre autres avantages, et il s’agit d’un droit issu de traités, quoiqu’une version considérablement limitée de ce que nos ancêtres avaient négocié.

La responsabilisation, l’égalité réelle, le changement systémique et la justice réparatrice sont des principes qui peuvent être intégrés dans le travail des ombudsmans et de leurs bureaux, qui est dirigé par des Autochtones et culturellement sécuritaire et qui tient compte des traumatismes. La reddition de comptes est importante. J’espère que nous sommes tous d’accord là-dessus.

Les provinces et la plupart des territoires sont dotés de bureaux d’ombudsman où les citoyens peuvent signaler leurs préoccupations au sujet de tout programme, service ou ministère provincial ou territorial. De nombreuses villes et grandes institutions comme les universités et les hôpitaux disposent également de vastes bureaux d’ombudsman où il est possible de soulever des problèmes et des préoccupations d’ordre général, mais pas le gouvernement fédéral, le plus important ordre de gouvernement au Canada et celui qui a la responsabilité la plus directe à l’égard des peuples autochtones.

Nous avons une occasion qui se présente de commencer à tracer une nouvelle voie pour le Canada, renforcée par un fondement sur les droits des Autochtones et de la personne, avec l’équité et l’égalité réelle pour tous.

Mon rapport se termine par un rappel exprimé par un participant aux consultations au sujet de la nature fragile de la confiance et des attentes relatives à l’Appel à la justice 1.7 : « Il ne s’agit pas d’avoir une foi profonde, mais de nourrir de grands espoirs ». Honorons ces espoirs, et affairons-nous à concrétiser l’Appel à la justice 1.7.

En tant qu’ancienne sous-ministre adjointe provinciale, je sais que la création d’un nouveau bureau ne sera pas facile d’un point de vue technique, mais on peut y arriver si on en a la volonté. En fait, c’est un petit élément gérable de ce qui doit être fait, et il aura des résultats très positifs.

Ekosani, chi-migwetch, thank you et merci. Je serai heureuse de répondre à vos questions.

Le président : Merci, madame Moore Rattray. Nous allons maintenant passer aux questions des sénateurs. Je vais céder la parole à mon vice-président, le sénateur Arnot, pour la première question.

Le sénateur Arnot : Merci beaucoup, madame Moore Rattray, et je vous remercie pour votre rapport qui est incroyablement bien ficelé. J’apprécie vraiment la grande portée des recommandations de votre rapport, qui suscite une réaction sans précédent à la discrimination, à l’iniquité et à l’égalité dont ont fait l’objet les peuples autochtones du Canada. Vous avez abordé une des questions, et je pense qu’il y a beaucoup d’espoir. C’est certain.

Comment conseilleriez-vous à un nouvel ombudsman de négocier avec les provinces et les territoires pour assurer le succès de ce modèle? Comme vous le dites, l’appel à la justice 1,7 a apporté la lumière. Je me demande ce que vous en pensez, étant donné qu’il semble que la Commission canadienne des droits de la personne et les commissions des droits de la personne des provinces et des territoires n’aient vraiment pas réussi à atteindre leur objectif. Comment envisagez-vous ces négociations? Il me semble que c’est un défi, et vous en avez parlé. Quel genre de conseils donneriez-vous à l’ombudsman dans ce nouveau modèle à propos de cet enjeu?

Mme Moore Rattray : Je vous remercie infiniment de votre excellente question. Je pense qu’il s’agit vraiment de l’un des éléments essentiels. On peut y aller en douceur ou procéder à la dure.

En ce qui concerne les compétences générales, tout est une question de relations — c’est toujours le cas… de relations respectueuses avec ses collègues. Que l’on soit un ombudsman autochtone national ou l’un des 13 ombudsmans autochtones régionaux, cela se résume toujours au fait d’avoir une relation respectueuse.

En outre, c’est assez clair lorsque quelque chose relève de la compétence fédérale et qu’un problème se pose relativement à un programme ou à un service fédéral ou qu’il relève d’une province ou d’un territoire. Je pense qu’il y a une différence assez naturelle entre les champs de responsabilité.

Cela dit, tout comme les bureaux des vérificateurs généraux aux échelons national, provincial et territorial sont en relation et mènent parfois des enquêtes conjointes, ce pourrait bien être le cas. Mais je crois vraiment qu’il s’agit toujours d’avoir des conversations respectueuses et claires et de comprendre ce qui relève de la compétence de l’ombudsman par rapport à ce qui relève de celle d’un ombudsman provincial ou territorial.

Le sénateur Arnot : Merci beaucoup.

Mme Moore Rattray : Merci.

La sénatrice White : Je vous remercie de votre exposé et du bon travail que vous faites. Je vous en suis très reconnaissante.

Pour faire suite à la question du sénateur Arnot, dans le modèle proposé, vous recommandez que les gouvernements provinciaux et territoriaux adoptent des lois afin que l’ombudsman et les commissaires aux droits de la personne actuels soient touchés d’une manière cohérente. Qu’arrivera-t-il si une province ou un territoire n’adopte pas de loi qui lui permettra de collaborer de cette manière? Voici une façon facile de poser la question : croyez-vous que ce modèle puisse provoquer des conflits de compétence?

Mme Moore Rattray : J’ai été avisée et conseillée par de nombreuses personnes beaucoup plus sages que moi qui m’ont fait part de leur expertise dans cette aventure pour éviter les embrouilles en matière de compétence dans la mesure du possible. En tant que Canadiens, nous en sommes tous conscients lorsque ces situations se produisent, et nous ne voulons pas qu’il s’en produise d’autres.

La façon dont le modèle a été établi est que, si une province ou un territoire ne voulait pas adopter une loi pour faciliter la collaboration entre les deux, il peut tout de même fonctionner. C’était vraiment essentiel et très important. Les postes d’ombudsman, qui sont entièrement du ressort du gouvernement fédéral, peuvent être créés et exister à la fois aux échelons national et régional parce qu’ils travailleraient tous dans des domaines relevant de la compétence fédérale. J’imagine qu’un ombudsman régional d’une province ou d’un territoire collaborera de diverses façons avec son homologue provincial et territorial à l’échelon provincial. Idéalement, ils auraient la capacité de travailler en étroite collaboration, mais, si ce n’était pas le cas, il y aurait toujours ces relations respectueuses. C’est mieux avec une loi commune ou avec une certaine législation, mais ce n’est pas nécessaire. On peut s’en passer.

La sénatrice White : Merci.

Je songe à une collectivité éloignée comme celle où je vivrais. De quels mécanismes disposerions-nous ou comment composerions-nous avec cette réalité pour assurer un accès équitable?

Mme Moore Rattray : C’est une excellente question, et elle a été soulevée à maintes reprises, lors de visites virtuelles ou en personne auxquelles j’ai participé partout au pays. C’était vraiment l’un des éléments clés. Ce n’est pas tout le monde qui vit dans un grand centre urbain; tout le monde n’est pas tenu d’y vivre ni ne veut y vivre. L’un des éléments dont je parle ici, c’est la nécessité que le personnel des bureaux régionaux soit doté d’une unité mobile, essentiellement, qui se déplacerait constamment à l’intérieur d’une province ou d’un territoire pour sensibiliser les gens au sujet des droits des Autochtones et des droits de la personne, mais aussi pour effectuer un tri, avoir ces conversations et soutenir les gens. C’est vraiment important. En particulier, les femmes autochtones des régions rurales et éloignées du Canada ont insisté pour que cette exigence figure par écrit, alors c’est le cas.

[Français]

La sénatrice Audette : Merci du fond du cœur pour votre présentation.

[Traduction]

Je tiens à vous remercier, Mme Moore Rattray, du travail que vous avez fait. Je remercie les sénateurs d’avoir accepté de mener une étude sur l’appel à la justice concernant les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Je remercie le ministre d’avoir proposé cette motion et certains collègues ici présents dans la salle.

[Français]

Merci beaucoup. Comme vous le savez, madame Moore Rattray, au Canada, il y a des nations dont la deuxième langue est le français ou l’anglais. Ce sont des langues coloniales qui ont été imposées.

Je me demande si vous avez réfléchi à l’idée de créer une loi fédérale qui assurerait à une personne d’être servie minimalement dans les deux langues officielles, et bien sûr, idéalement, dans les langues autochtones. Au Québec plus particulièrement, c’est important de s’assurer que la personne qui fournit ces services est bilingue ou trilingue.

J’aimerais que vous nous disiez si on peut être assuré qu’il y aura au fédéral une représentation officielle des gens qui ne parlent pas anglais comme première ou deuxième langue.

Ensuite, pouvez-vous nous dire à quel moment vous avez déposé le rapport?

On n’a pas eu beaucoup d’écho au sujet de cette grande nouvelle. On a vu ça dans un site Web. Je veux comprendre pourquoi une nouvelle si importante est passée inaperçue. C’est seulement mon opinion.

Je vous remercie.

[Traduction]

Mme Moore Rattray : Ce sont deux très bonnes questions.

En ce qui concerne les langues, on m’a dit à maintes reprises, partout où je suis allée, qu’il fallait offrir des services dans nos langues. Il y a tellement de membres de nos peuples qui, en particulier dans les régions rurales et éloignées, ne parlent ni l’anglais ni le français. C’est en fait l’une des raisons pour lesquelles les gens ont dit que nous avons vraiment besoin de bureaux régionaux également, et, dans ces bureaux régionaux, nous avons besoin de personnes qui parlent nos langues afin que les gens puissent recevoir des services dans la langue qu’ils veulent et dans laquelle ils ont besoin de recevoir les services. C’était vraiment important. Il a fallu un peu de temps pour que l’on effectue diverses traductions du rapport, mais je tenais vraiment à ce que ce soit fait, et le ministère a été merveilleux en trouvant d’excellents traducteurs compétents et en étant capable de faire en sorte que ces traductions soient réalisées. J’en suis vraiment reconnaissante. Les langues sont très importantes.

Le rapport a d’abord été présenté en janvier, mais en sachant que, à l’occasion de la deuxième table ronde nationale, à la fin de février je crois, d’autres commentaires pourraient être formulés. En ce qui concerne ces autres commentaires, deux points supplémentaires ont été soulevés. L’un d’eux était vraiment excellent. Un jeune a dit : « Vous parlez des aînés et des gardiens du savoir. Nous devons veiller à ce que les jeunes jouent un rôle plus important. » Bien entendu, il y a tellement d’excellentes idées… cet élément figurait dans le rapport, mais il n’était pas suffisamment étoffé, alors j’ai été en mesure de le renforcer. Un autre petit élément important a également été porté à mon attention. Ensuite, cela a été fait, puis on a procédé à la traduction française parce que, malheureusement, je suis assez unilingue. Nous l’avons donc traduit en français et dans les autres langues par la suite. Merci.

La sénatrice Audette : Merci beaucoup.

La sénatrice Coyle : Je me réjouis d’être de retour avec tout le monde cet automne. Je suis vraiment reconnaissante que vous nous guidiez dans cette affaire très importante. Vous savez à quel point c’est important pour nous tous, et nous vous remercions sincèrement de votre travail. Je m’accroche à ces appels à la justice. Nous devons simplement nous en tenir à cela. J’ai l’impression que nous faisons des progrès. Je m’excuse de ne pas avoir encore lu le rapport, mais j’ai une idée de ce qu’il contient.

Pour nos besoins, il serait bon de savoir deux choses. Premièrement, au vu de la création du poste d’ombudsman et de toute la description que vous nous avez fournie, ainsi qu’au tribunal, à quel niveau se situeraient les pouvoirs d’application de la loi, selon vous? Nous savons que l’appel à la justice mentionnait deux choses : l’ombudsman aurait le pouvoir de recevoir des plaintes et, je présume, de les traiter. Que signifie le traitement de ces plaintes et jusqu’à quel niveau? Quels autres niveaux de coopération seront nécessaires pour que ce pouvoir d’application de la loi, si on veut, donne des résultats? La deuxième partie de la question concerne le fait de vraiment évaluer les services gouvernementaux en profondeur. C’est vraiment un facteur d’équité, dont vous avez donné des exemples ici. Quels sont les pouvoirs d’application de la loi à l’égard de ces deux éléments, et quel équilibre prévoyez-vous entre les deux… le réactif par rapport au proactif? Comment ce projet sera-t-il entrepris?

Mme Moore Rattray : Ce sont d’excellentes questions. Je veux m’assurer d’y répondre à toutes.

La sénatrice Coyle : Oui, je suis désolée; il y en a beaucoup.

Mme Moore Rattray : Non, je vous remercie infiniment. Ce sont des questions très réfléchies.

En ce qui concerne la question du réactif par rapport au proactif, tous les représentants des bureaux d’ombudsman à qui j’ai parlé dans tout le pays et de tous les autres organismes de responsabilisation ont mentionné la nécessité de disposer de ressources supplémentaires pour pouvoir être proactifs et réactifs. Parfois, les représentants de divers organismes de responsabilisation affirmaient que, lorsqu’un problème revenait sans cesse dans plusieurs régions du pays, par exemple, ou d’une diversité de façons à l’intérieur d’une province ou d’un territoire, il était considéré comme un problème plus vaste. À ce moment‑là, on procéderait à une enquête plus poussée.

Tout est une question de ressources, et, dans certains cas, les bureaux d’ombudsman de partout au pays et d’autres organismes de responsabilisation disposent de suffisamment de ressources pour être proactifs, mais, dans d’autres cas, ils arrivent à peine à répondre à la demande. Je pense que c’est pourquoi il y a parfois, à l’échelle du pays, des délais d’attente de un an et qui vont parfois jusqu’à deux ans lorsqu’il s’agit pour les commissions des droits de la personne d’intervenir et d’indiquer si une demande sera reçue ou non. C’est vraiment la cause de ces longs délais d’attente.

Certains des renseignements contenus dans le rapport faisaient état de la nécessité de disposer de ressources adéquates pour que les gens n’aient pas à vivre une autre expérience frustrante. J’imagine — et c’est pourquoi j’ai proposé une approche progressive — qu’il y aura un afflux important au début, parce qu’il est question d’un certain nombre de problèmes qui préoccupent les gens depuis longtemps. Il est vraiment important que l’on puisse gérer ces attentes et accélérer le processus de façon appropriée.

En ce qui concerne l’application de la loi, dans la partie des recommandations qui porte sur les responsabilités, les pouvoirs et l’indépendance de l’ombudsman, il est question d’enchâsser les pouvoirs dans la loi, y compris ceux d’agir de sa propre initiative et de mener des enquêtes. Ils sont tellement importants.

Pour répondre à votre question sur l’application de la loi, les ombudsmans doivent avoir de solides pouvoirs d’application de la loi afin de contraindre des témoins à comparaître et d’exiger la production de documents ou de dossiers, notamment en érigeant en infraction l’entrave et en infligeant des sanctions en cas de non-conformité. Les ombudsmans doivent avoir le pouvoir de rendre compte au public d’éventuelles situations où l’on ne donnerait pas suite aux recommandations. Une fois le tribunal établi… partout où je suis allée, tout le monde a dit : « D’accord, c’est la première partie, n’est-ce pas? Quand la deuxième partie commencera-t-elle? » Les gens ont lu leurs appels à la justice et savent que le tribunal est la deuxième partie de l’appel à la justice 1.7. Alors, une fois que le tribunal sera établi, l’ombudsman pourrait, à sa discrétion, demander l’application de la loi par l’intermédiaire de celui-ci.

Une autre chose que j’ai apprise rapidement lors de mes conversations avec les bureaux des ombudsmans de tout le Canada, c’est que, près de la moitié du temps, les choses peuvent être résolues de façon informelle très rapidement dans un délai de 30, 45 ou 90 jours parce que les gens ne savent peut-être tout simplement pas où aller ou parce qu’un ministère a peut-être besoin qu’on insiste ou qu’on le presse un peu plus pour pouvoir trouver une solution. Nous espérons que ce sera le cas et que seuls les problèmes qui ne peuvent pas être réglés en temps opportun par les ombudsmans passeront éventuellement à l’étape du tribunal, s’il y a lieu.

Le dernier point que je veux soulever rapidement, c’est que j’espère vraiment que nous pourrons continuer de travailler sur les 231 appels à la justice, mais la SRC a effectué un examen approfondi de la situation l’an dernier et a constaté que seulement 2 des 231 appels à la justice avaient été réalisés ou concrétisés et que plus de la moitié n’avaient même pas encore commencé à être mis en œuvre. Alors, il y a du travail à faire. Merci.

La sénatrice Sorensen : Je vous remercie de votre présence. Je suis heureuse de vous revoir.

Vous avez effleuré ce sujet dans votre déclaration préliminaire, mais ma question est la suivante : les tribunaux fédéraux et provinciaux des droits de la personne peuvent-ils servir d’exemples, de modèles ou de documents de travail pour faire avancer les choses? J’aimerais surtout que vous me donniez des exemples ou que vous me disiez pourquoi ce n’est pas le cas, au lieu de… mais, s’il y a une possibilité, je serais curieuse de savoir si c’est possible.

Mme Moore Rattray : Je veux m’assurer de bien comprendre votre question. Les commissions provinciales et territoriales des droits de la personne existantes peuvent-elles être utilisées pour faire ce travail au lieu de, ou en complément de…

La sénatrice Sorensen : Je suppose que ce serait en complément ou comme point de départ ou document de travail.

Mme Moore Rattray : Je militerais toujours en faveur — et je pense que ce serait aussi le cas des gens à qui j’ai parlé — d’une augmentation du nombre d’endroits où l’on peut s’adresser pour régler les questions de droits de la personne. Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles les Autochtones, les Premières Nations, les Inuits et les Métis trouvent certains de ces autres mécanismes frustrants, et peut-être aussi d’autres Canadiens, à cause des délais d’attente. Il y a des gens formidables qui travaillent dans ces bureaux d’ombudsman et au sein d’autres organismes de responsabilisation partout au Canada, mais je pense que le manque de ressources présente souvent un véritable défi. En plus des ressources, il y a les longs délais d’attente.

Si on est dans une collectivité rurale ou éloignée et que l’on essaye de téléphoner à quelqu’un, de joindre quelqu’un ou de parler à quelqu’un, on se retrouve dans un monde surréel où on appelle et le temps d’attente est interminable. Je sais que, lorsque nos gens appellent aux bureaux des cartes de statut pour obtenir une mise à jour au sujet de leur carte de statut, ils peuvent attendre pendant trois ou quatre heures. Si on se trouve dans une collectivité, qu’on a un téléphone cellulaire et qu’on paye pour les minutes d’utilisation du réseau cellulaire, c’est tout simplement impossible.

Pour revenir au véritable objet principal de votre question, je crois qu’ils continueraient d’être complémentaires, mais j’estime qu’il y a beaucoup d’éléments là-dedans en ce qui concerne la façon précise dont fonctionnerait ce bureau, son fonctionnement et la façon dont il traiterait les gens qui se présentent, ouvert en soirée, ouvert les fins de semaine… Toutes les composantes humaines que nous voulons tous ou dont nous avons tous besoin dépendent de la façon dont fonctionnerait ce bureau. Je pense que les deux sont nécessaires.

La sénatrice Sorensen : Merci beaucoup.

Le président : J’ai une question pour vous, madame Moore Rattray.

Soit dit en passant, en réaction à ce qui a été dit sur les cartes de statut, j’attends moi-même une carte de remplacement depuis plus de six mois. J’ai perdu ma carte lorsque j’étais en Allemagne, et je n’en ai toujours reçu aucune même si j’ai présenté une demande il y a six mois. Il y a certainement place à l’amélioration.

Toujours au sujet de votre rapport, pourriez-vous nous parler de la façon dont l’ombudsman national des droits des Autochtones et des droits de la personne collaborerait avec les actuels agents du Parlement qui ont une compétence commune? Que recommande le rapport quant aux mesures à prendre pour s’assurer que cet organisme bénéficie d’un financement adéquat et permanent?

Mme Moore Rattray : Ce sont deux très bonnes questions.

Comment collaboreraient-ils? Il y a actuellement des chevauchements au sein des entités de responsabilisation fédérales et provinciales, de sorte qu’il y a très peu de chevauchement avec ce qui est proposé ici, je crois. Les relations seraient empreintes de respect.

Je vais vous donner un exemple. Il y a très peu de bureaux d’ombudsman fédéraux dont la portée est très restreinte. L’un d’eux est celui de l’ombudsman fédéral des victimes d’actes criminels. Vous pouvez vous adresser à lui uniquement si vous avez été victime d’un crime dans des circonstances très précises. Il y a un ombudsman des anciens combattants, mais vous pouvez vous adresser à lui uniquement si vous êtes un ancien combattant. Ce serait donc une question de choix. C’est l’une des recommandations contenues là-dedans. C’est l’une des choses que les gens ont dites partout au pays. Ils ne veulent pas qu’on leur dise à qui s’adresser. Si j’étais une ancienne combattante, par exemple, je pourrais m’adresser à l’ombudsman des anciens combattants si mon problème concernait Anciens Combattants Canada. Si le problème n’était pas réglé, je pourrais m’adresser à l’ombudsman national des droits des Autochtones et des droits de la personne, ou commencer par m’adresser à l’ombudsman national des droits des Autochtones et des droits de la personne, puis m’adresser à l’ombudsman des anciens combattants, au besoin. Dans de rares occasions, il pourrait y avoir des chevauchements, et dans un tel cas, ce serait vraiment une question de choix. Les experts au sein du bureau de l’ombudsman, qui s’occuperaient de recevoir les plaintes et de discuter des problèmes, conseilleraient assurément les gens quant aux autres endroits auxquels il pourrait être plus indiqué dans leur cas de s’adresser dans un premier temps. Cela se produit tous les jours partout au Canada lorsqu’il s’agit de compétences provinciales et fédérales, par exemple. Je peux m’adresser à l’ombudsman d’un hôpital de mon territoire, à Winnipeg, au Manitoba, ou encore à l’ombudsman provincial. Il y a déjà de petits chevauchements, mais je pense que le modèle fondé sur le choix est vraiment important.

Le président : En ce qui concerne le financement, comment feriez-vous pour faire en sorte qu’il soit adéquat et permanent?

Mme Moore Rattray : J’aborde très délibérément la question du financement dans ce rapport parce que je crois que c’est très important. D’après ce que j’ai entendu des bureaux des ombudsmans de partout au pays, certains d’entre eux ont vraiment de la difficulté à s’acquitter de leur mandat en temps opportun en raison de leur financement. Je m’exprime en termes forts au sujet du financement, de la façon dont il serait géré et de son caractère indépendant, car, bien sûr, personne d’entre nous ne voudrait, en tant que Canadien, qu’un bureau voit son budget réduit du fait qu’il soulève des questions qui pourraient mettre le gouvernement mal à l’aise.

Le président : Merci.

Le sénateur Tannas : Je vous remercie de votre présence et de tout votre travail.

J’avais deux questions. L’une d’entre elles est probablement bête, mais je vais la poser quand même. Je l’ai déjà posée. Avez‑vous une idée de la raison pour laquelle une carte de statut doit être renouvelée? Je ne renouvelle pas mon certificat de naissance ni ma carte d’assurance sociale. Je ne comprends pas la nécessité du renouvellement, en fait. Un passeport est un privilège, mais une carte de statut n’est pas un privilège, c’est un droit. Avez‑vous, au cours de vos déplacements, découvert une véritable raison logique qui explique cela?

Mme Moore Rattray : C’est une très bonne question. J’en ai assez souvent entendu parler dans le cadre de mes déplacements. Les gens disent parfois en plaisantant, mais seulement à moitié : « Je ne suis plus un Indien puisque ma carte a expiré », en quelque sorte.

C’est un très bon point. Concrètement, le fait qu’elle soit utilisée comme pièce d’identité avec photo explique cela. La partie photo de la carte finit par expirer, car, bien sûr, la photo qui figure sur votre carte de statut pourrait avoir été prise lorsque vous aviez deux ans, et vous aurez évidemment l’air très différent lorsque vous aurez 58 ans, comme moi. C’est le fait qu’elle serve de pièce d’identité avec photo qui explique qu’il soit vraiment nécessaire de renouveler la carte, mais vous avez tout à fait raison. Le statut lui-même devrait être immuable et perpétuel, et seule la partie photo devrait être renouvelée. C’est un très bon point.

Le sénateur Tannas : Vous avez présenté le rapport au ministre au début de l’année. Était-ce en janvier ou en février? En janvier. Il faut une loi. À juste titre, vous avez parlé d’élaboration conjointe. À votre connaissance, cela se fait-il actuellement?

Mme Moore Rattray : Je ne le sais pas. J’ai présenté un projet de cadre législatif comme point de départ. Il a été rédigé par des avocats des Premières Nations et des Métis, puis révisé par quelqu’un à la retraite qui a été rédacteur législatif fédéral pendant 30 ans. Je crois donc que la qualité est assez bonne. C’était censé être un point de départ et, bien sûr, l’élaboration conjointe entrerait alors vraiment en jeu. Parfois, dans le cas d’une loi, il est utile d’avoir quelque chose qui fait réagir et évoluer les gens.

Le sénateur Tannas : Cela nous ramène à la question de la foi et de l’espoir. Il est peu probable que cela figure au programme législatif du gouvernement actuel. Est-il juste de dire cela?

Mme Moore Rattray : Je vis d’espoir.

Le sénateur Tannas : Merci beaucoup.

La sénatrice Hartling : Je suis heureuse d’être de retour. Merci de votre présence, madame Moore Rattray. Le fait de vous recevoir est une excellente façon de commencer nos séances. Je crois aussi en l’espoir, alors il est bon d’entendre comment les choses progressent.

On dirait qu’il y a eu une écoute attentive pendant ce processus. C’est important, car il s’agit parfois de belles paroles et d’enquêtes, mais vous et votre équipe semblez avoir écouté très attentivement. Je m’en réjouis vraiment.

Nous avons beaucoup parlé ici des jeunes, bien sûr, mais je pense aux aînés, aux connaissances qu’ils possèdent et à l’influence qu’ils peuvent avoir à long terme. L’une des questions visait à obtenir de plus amples détails sur le fonctionnement concret des 14 conseils de gouvernance et des cercles consultatifs des aînés et des gardiens du savoir, sur leur modèle de gouvernance et de consultation. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? Il est important de ne pas se contenter de dire que, oui, nous mobiliserons les aînés. Quelle sera leur incidence sur le processus et sur les travaux relatifs à ce modèle de gouvernance?

Mme Moore Rattray : Certainement. Merci beaucoup de cette excellente question.

Pour ce qui est de l’équipe, elle était composée de moi-même, alors j’ai vraiment entendu chaque personne. Ce ne sont pas des collaborateurs qui sont allés écouter les gens et qui ont présenté cela; c’est moi qui ai travaillé à temps partiel l’an dernier avec l’aide d’une assistante à mi-temps. Je lui serai toujours reconnaissante de son travail de coordination des réunions et de son excellente prise de notes, je le dis simplement aux fins du compte rendu.

Il y a deux entités de gouvernance. Il y a d’abord les comités de sélection, qui sont vraiment essentiels parce qu’ils doivent être composés de représentants des Premières Nations, des Inuits et des Métis, de citadins et d’habitants des régions rurales et éloignées. C’est un point très important.

Les cercles consultatifs des aînés et des gardiens du savoir sont censés être un endroit auquel les ombudsmans peuvent s’adresser. Il y a les quatre ombudsmans nationaux des droits des Autochtones et des droits de la personne, puis un pour chaque province et territoire. Il y a des cercles consultatifs régionaux des aînés et des gardiens du savoir, ainsi qu’un cercle consultatif national des aînés et des gardiens du savoir. Il s’agirait d’entités auxquelles un ombudsman pourrait s’adresser pour obtenir des conseils et de l’orientation. Nous ne savons pas tout. Personne ne sait tout. C’est bien d’avoir quelqu’un à qui on peut s’adresser ou dont on se rappelle l’existence si on commence à avoir besoin de soutien pour ce travail vraiment difficile.

Les aînés et les gardiens du savoir ont toujours été des gens réellement essentiels dans notre monde et nos sociétés. En veillant à leur faire une place officielle au sein de la structure, nous pouvons réellement nous assurer que cette structure non autochtone — une structure suédoise qui date de 200 ans — fonctionne et marche vraiment dans les deux mondes, et qu’elle oblige le gouvernement fédéral, ainsi que ses programmes et services, à rendre des comptes. C’est aussi une façon de faire les choses différemment pour les peuples autochtones.

J’espère avoir répondu à votre question. Merci.

La sénatrice Hartling : Merci. S’il y a quelque chose que le comité peut faire pour faire avancer les choses… Je parle au nom de tous, mais je pense que nous sommes tous d’accord pour dire que nous appuierions assurément cela. Merci.

Le sénateur Prosper : Merci beaucoup de votre témoignage et d’avoir entrepris ce travail très important.

Dans votre témoignage de tout à l’heure, je crois que vous avez insisté sur la responsabilisation et sur le fait que ce mécanisme doit vraiment être présent dans l’ensemble du processus. Je crois que vous en avez parlé deux fois. Je pense que le sénateur Tannas en a fait mention plus tôt, de même que la sénatrice Hartling, en ce qui concerne... Vous avez dit : « Il ne s’agit pas d’avoir une foi profonde, mais de nourrir de grands espoirs. »

Au cours de ce processus qui a réuni environ 600 personnes — mais sûrement davantage — de 125 gouvernements des Premières Nations, des Inuits et des Métis, vous avez entendu beaucoup de choses. J’imagine que, dans l’ensemble, lorsque vous dites : « Il ne s’agit pas d’avoir une foi profonde, mais de nourrir de grands espoirs »... Je me demande si vous pourriez nous en dire un peu plus à ce sujet. Comme il a été mentionné, il y a eu de l’écoute attentive.

J’ai une seconde question, mais j’attendrai que vous ayez répondu à celle-ci avant de la poser. Merci.

Mme Moore Rattray : Merci beaucoup de cette excellente question.

C’était un véritable acte de confiance de la part des gens que de donner de leur temps malgré leurs journées et leurs vies extrêmement chargées. Nous connaissons tous les statistiques. Nous sommes tous au fait des crises qui sévissent dans bon nombre de nos communautés et de nos nations. Ainsi, que les gens prennent deux heures ou deux heures et demie de leur temps pour se réunir et discuter représentait une véritable responsabilité.

Au début des réunions, ils disaient très clairement : « Je vous rencontre parce que j’ai la certitude que vous ferez une utilisation responsable de ce que je vais vous dire. Pendant que je suis ici pour vous faire part de choses importantes, je ne suis pas en train de servir les membres de ma communauté. C’est dire à quel point c’est important pour moi. Vous devez donc mener cela à bien et faire tout votre possible pour que les gens de cette grande ville » — c’est-à-dire Ottawa et Gatineau, la région de la capitale nationale, où ils ne sont peut-être jamais allés — « ces gens très importants... Vous devez assumer la responsabilité personnelle de leur faire part de cela et de veiller à ce qu’ils vous entendent et à ce que cela aille de l’avant, car c’est d’une importance cruciale. »

Voilà ce qui est vraiment impérieux. C’est ce que je garde présent à l’esprit : le caractère urgent. Nous parlons vraiment de vies humaines ici. Nous parlons de ce qui se passe lorsque les services et les programmes ne sont pas offerts. Lorsque des violations des droits de la personne sont commises, il arrive que des gens meurent. J’avais toujours cela en tête. Ce sont des choses qu’on m’a fait comprendre, réunion après réunion. J’espère que cela nous donnera tous un petit élan supplémentaire.

Le sénateur Prosper : Certainement. Merci de nous en avoir fait part.

Ensuite, nous parlons d’une loi habilitante. Vous avez parlé tout à l’heure d’un projet de cadre législatif qui servirait de fondement sur lequel d’autres parties pourraient s’appuyer et qu’elles pourraient utiliser. C’est un exercice très diligent. Mais pour revenir à l’accent mis sur la responsabilité, vous avez dit qu’il faut des « pouvoirs d’agir de sa propre initiative », ce qui, à mon avis, laisse entendre des choses qui ont beaucoup de pouvoir et de substance, ainsi qu’un lien avec un tribunal qui est en mesure de donner suite aux recommandations ou aux conclusions. Estimez-vous qu’un tribunal soit un élément nécessaire pour que la responsabilisation se concrétise? Merci.

Mme Moore Rattray : Merci.

Comme certains aînés et gardiens du savoir l’ont décrit, le tribunal représente les dents. Les bureaux de l’ombudsman peuvent représenter le sourire, mais si aucun changement n’est apporté là où c’est nécessaire, les tribunaux représentent les dents. Ils peuvent accorder des dommages-intérêts, par exemple, et les finances peuvent en faire partie. Bien sûr, les gouvernements ont tendance à prêter attention lorsque de l’argent est en jeu. Je pense donc qu’un tribunal est vraiment important.

Quant à savoir à quoi cela ressemble, le travail n’a pas encore été fait dans ce domaine. Toutefois, je ne crois pas que nous devrions attendre d’avoir un tribunal, qu’un tribunal soit créé, avant de mettre en place des bureaux d’ombudsman dans la région de la capitale nationale et des bureaux régionaux partout au Canada. C’est vraiment important, parce que ces bureaux peuvent apporter tellement de bonnes choses et tellement de changements positifs.

C’est certainement mieux avec les deux. Je pense que c’est la raison pour laquelle l’appel à la justice 1.7 a été aussi bien rédigé et réalisé. Là encore, l’appel à la justice 1.7 et tous les appels à la justice sont issus de la vérité des membres de la famille et des survivants… des milliers d’entre eux partout au pays. C’est ce qu’ils voulaient et ce dont ils avaient besoin, alors nous devons essayer de respecter cela.

Le sénateur Prosper : Je vous remercie.

La sénatrice Greenwood : Je suis heureuse de retrouver tout le monde. Cela faisait longtemps.

En lisant certains documents, j’ai été très impressionnée par l’ampleur du mandat. D’autres groupes nous ont parlé de l’ampleur du travail et de la demande. J’ai aussi pensé — et vous en avez parlé ce matin — aux partenariats avec d’autres groupes de défense des droits de la personne au pays. Cela fait suite à certaines des questions précédentes.

J’ai deux questions à poser. Tout d’abord, j’aimerais vraiment comprendre comment vous envisagez l’évolution de ces relations. Bien sûr, la première concerne d’autres groupes de défense des droits de la personne dans les provinces et les territoires et à l’échelle fédérale. Un nouveau conseil national de réconciliation va être mis en place. Comment envisagez-vous votre collaboration? Il y aura des chevauchements, et je ne voudrais pas que ce groupe soit englouti par l’ampleur du travail alors qu’il existe un certain nombre de partenariats qui pourraient vous être utiles. C’est ce que je propose, et j’aimerais que vous nous en disiez davantage à ce sujet.

J’ai une deuxième question. Voulez-vous que je pose la question maintenant?

Mme Moore Rattray : Je vais répondre à cette question en premier, si vous me le permettez, parce que vous avez posé une question très complexe. C’est une très bonne question, mais elle est complexe.

La sénatrice Greenwood : Oui.

Mme Moore Rattray : Je vais revenir à ce que j’ai dit plus tôt. Il s’agit de relations. Les bureaux des ombudsmans, qu’il s’agisse des rares bureaux des ombudsmans fédéraux dont la portée est très limitée, se réunissent, communiquent et travaillent déjà ensemble. Je crois qu’il y en a cinq ou six. La même chose se produit partout au pays avec les bureaux des ombudsmans provinciaux et territoriaux. Un groupe — qui en fait a été incroyablement utile dans le cadre de ce processus — se réunit et discute, et dans les provinces et les territoires, bien sûr, des organisations semblables collaborent, discutent et établissent des relations. Je pense que, de façon informelle, cela se fera certainement.

Si le besoin était comblé maintenant avec les mécanismes existants, je ne pense pas que nous aurions les statistiques que nous avons. Je ne pense pas que, dans mon territoire, l’écart entre l’espérance de vie des membres de Premières Nations et celle de tous les autres habitants serait de 11 ans, et de plus en plus grand, ni que l’écart entre l’espérance de vie des membres de Premières Nations et celle de tous les autres habitants de la province de l’Alberta serait de 18,5 ans. Il y a des lacunes sur le plan de l’éducation, de l’emploi, et cetera, comme nous le savons tous… trop d’incarcérations, pas assez de policiers, maintien de l’ordre excessif, selon le problème. Je crois que si les choses fonctionnaient bien… mais ce n’est pas le cas. C’est pourquoi il est si important d’avoir ces bureaux.

Les responsables de l’accueil au bureau national et dans les bureaux régionaux seront en mesure d’aider les gens s’il existe un meilleur endroit où ils peuvent aller. Si une personne se présente et que la question relève de la compétence provinciale ou territoriale, elle sera aiguillée chaleureusement vers des personnes bienveillantes au sein des bureaux des ombudsmans provinciaux et territoriaux. En fait, il n’y a pas beaucoup de dédoublement, et je pense que les gens collaboreront.

Vous avez posé une question au sujet des commissions des droits de la personne. Cela peut prendre jusqu’à un an, voire plus, pour répondre aux plaintes des personnes. Si vous avez un problème urgent, il faut qu’il soit réglé dans un délai plus court qu’un an ou deux. J’estime que les commissions ont tout à fait leur place. Elles sont vraiment importantes lorsqu’il s’agit de problèmes plus vastes, mais si vous êtes en mesure de régler un problème dans les 30, 45 ou 90 jours, pourquoi ne pas le faire? S’il faut ensuite passer à un échelon supérieur ou, à un moment donné, à une commission des droits de la personne, la personne aura bien sûr le choix de le faire.

J’espère avoir répondu à votre question.

La sénatrice Greenwood : Oui. Je m’inquiète simplement de l’ampleur du rôle du bureau. Je ne voudrais pas qu’ils soient submergés par les problèmes.

Ma deuxième question porte sur l’élaboration conjointe. Vous avez parlé d’une approche progressive concernant les mesures législatives élaborées conjointement, de la création d’un poste d’ombudsman national et, six mois plus tard, de la nomination d’ombudsmans provinciaux et territoriaux. Pensez-vous que ce délai est encore réaliste?

Mme Moore Rattray : Je pense que nous sommes peut-être un peu en retard, mais des gens intelligents qui déploient beaucoup d’énergie et d’efforts peuvent rattraper leur retard. J’avais proposé un échéancier de mise en œuvre. Nous avons peut-être dépassé un peu le temps prévu, mais il est toujours possible de présenter un projet de loi, d’embaucher des gens et d’ouvrir des bureaux; cependant, nous avons peut-être six mois de retard par rapport à mon plan de mise en œuvre. Mais ce n’est pas grave. Les choses évoluent. Je pense que ce qui est important, c’est que cela se fasse et que nous nous fassions tous entendre si nous pensons que c’est important. Je crois que c’est très fondamental pour changer la trajectoire des peuples autochtones au Canada. Si nous sommes satisfaits du statu quo, nous n’avons pas besoin de le faire. Si nous ne sommes pas satisfaits du statu quo, si nous reconnaissons qu’il y a un problème, un enjeu et une crise, très franchement, nous devons agir. Le temps presse, et il faut agir.

La sénatrice Greenwood : Merci.

Le président : Madame Moore Rattray, je vais poser la dernière question. Selon le modèle parlementaire, le Parlement du Canada jouerait un rôle dans la nomination des ombudsmans nationaux et régionaux. Pourquoi a-t-on proposé ce modèle?

Mme Moore Rattray : Selon le modèle qui a été proposé, les personnes seraient choisies par les peuples autochtones. Il s’agit d’une entité créée par les peuples autochtones pour les peuples autochtones, mais en ce qui concerne les quatre ombudsmans nationaux des droits des Autochtones et des droits de la personne, quatre noms seraient proposés, et le gouvernement du Canada les approuverait. Ce n’est pas le gouvernement du Canada qui choisit; ce sont les peuples autochtones qui disent : « Voici les quatre personnes que nous choisissons. » C’est la même chose pour ce qui est des 13 ombudsmans régionaux des droits des Autochtones et des droits de la personne. Comme il s’agit d’une entité du gouvernement du Canada, une approbation officielle est requise, mais il n’y aurait pas de choix. Ce serait les quatre que nous proposons ou, dans le cas des régions, les 13 que nous proposons.

Le président : Je vous remercie.

Il nous reste quatre minutes si quelqu’un a une question très brève à poser. Comme personne ne lève la main, le temps de parole de cette témoin est écoulé. Je la remercie encore une fois d’être parmi nous aujourd’hui. Si vous souhaitez présenter d’autres mémoires, veuillez les transmettre par courriel à notre greffier, Sébastien, dans les sept jours.

J’aimerais maintenant présenter nos prochaines témoins. De Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada, nous accueillons Valerie Gideon, sous-ministre, et Krista Apse, directrice générale, Secrétariat des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées. Bienvenue à vous deux.

Mme Gideon fera une déclaration préliminaire d’environ cinq minutes, qui sera suivie d’une période de questions et réponses avec les sénateurs. J’invite maintenant Mme Gideon à faire sa déclaration préliminaire.

Valerie Gideon, sous-ministre, Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada : Kwe Kwe, Ullukkut, Tansi. Bonjour.

Tout d’abord, je tiens à souligner que nous sommes aujourd’hui sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinaabeg.

Monsieur le président, honorables membres du comité, merci de me donner cette occasion de prendre la parole. Je suis heureuse de me trouver de nouveau avec vous.

J’aimerais aussi remercier l’ancienne représentante spéciale du ministre de son travail. Le rapport de Mme Moore Rattray est convaincant et exhaustif. Il met l’accent sur le besoin d’agir et prendre ses responsabilités concernant l’application de l’appel à la justice 1.7, et surtout la création du poste d’ombudsman des droits des Autochtones et de la personne.

Il faut reconnaître que la mise sur pied d’un nouveau processus de responsabilisation pourrait nécessiter des autorisations stratégiques, législatives ou financières supplémentaires. Un examen complet est en cours, et on continue de discuter avec nos partenaires pour connaître leurs points de vue.

J’aimerais donner aux membres du comité une mise au point sur les efforts déployés par le gouvernement, en collaboration avec des partenaires autochtones, en vue d’exécuter les programmes et d’établir des mesures de soutien pour mettre fin à la violence faite aux femmes, aux filles, aux personnes bispirituelles et aux personnes de diverses identités de genre autochtones.

[Français]

Depuis 2021, chaque 3 juin, le gouvernement publie une mise à jour annuelle sur le travail qu’il a fait dans le cadre des engagements prévus dans la voie fédérale concernant les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones disparues et assassinées.

Cette année, le rapport indique qu’on a fait des progrès par rapport au plan d’action national et aux 231 appels à la justice de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées en travaillant avec des partenaires autochtones pour aider à mettre fin à la crise. La mise à jour montre que des investissements ciblés ont été faits et qu’ils ont, à ce jour, fait avancer environ les trois quarts des appels à la justice.

[Traduction]

On parle notamment de 47 projets de refuges d’urgence et de logements de transition ayant permis de créer 380 unités au sein des communautés urbaines des Premières Nations, des Inuits, des Métis et des Autochtones partout au Canada.

[Français]

Nous avons également aidé les communautés autochtones à réaliser 52 projets qui visent à améliorer la sécurité et le bien‑être communautaires, comme le Red Eagle Lodge de Saskatoon. Cet espace culturellement sûr offre des services et des programmes aux femmes, aux filles, aux personnes bispirituelles et aux personnes autochtones de diverses identités de genre afin de les aider à guérir d’un traumatisme ou d’une dépendance.

De plus, du financement supplémentaire pour fournir une connexion Internet fiable à plus de 3 000 foyers autochtones permettra de donner plus d’outils aux femmes, aux filles, aux personnes bispirituelles et aux personnes autochtones de diverses identités de genre, ainsi qu’un meilleur accès à de l’aide en cas de danger.

[Traduction]

Plus tôt cette année, dans le cadre du budget de 2024, on a accordé 1,3 million de dollars sur trois ans à partir de 2024-2025 pour l’élaboration avec des partenaires autochtones d’un système d’alerte régionale « Robe rouge ». Ce système pourrait nous aider à ramener chez elles saines et sauves les femmes, les filles, les personnes bispirituelles ou les personnes de diverses identités de genre autochtones qui sont portées disparues. Cette initiative était parmi les sujets de discussion prioritaires de la deuxième Table ronde nationale autochtone-fédérale provinciale-territoriale sur les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQI+ autochtones disparues et assassinées, qui a eu lieu en février. Cette rencontre a réuni plus de 230 participants qui représentaient des organismes autochtones, des gouvernements provinciaux ou territoriaux et le gouvernement fédéral. La table ronde a donné lieu à des échanges productifs sur le système d’alerte « Robe rouge », mais aussi sur les recommandations de Mme Moore Rattray concernant l’ombudsman des droits des Autochtones et de la personne, de même que sur les approches provinciales et territoriales en matière de supervision et de surveillance de la mise en œuvre des appels à la justice.

Je suis heureuse de vous dire qu’on a commencé à planifier la troisième table ronde, qui aura lieu au début de 2025 et devrait mener à d’autres avancements.

[Français]

Monsieur le président, nous savons qu’il reste encore beaucoup de travail à faire pour mettre fin à cette crise nationale. Le gouvernement du Canada travaille avec des partenaires autochtones et communautaires, ainsi qu’avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, pour répondre aux appels à la justice et pour présenter des programmes, des politiques et des lois qui aideront à mettre un terme à la violence faite aux femmes, aux filles et aux personnes bispirituelles autochtones.

Nous ne sortirons de cette crise que le jour où toutes les femmes, les filles, les personnes bispirituelles et les personnes autochtones de diverses identités de genre au Canada seront en sécurité, valorisées et à l’abri de la violence.

Meegwetch. Qujannamiik. Marsee. Merci.

[Traduction]

Le président : Merci, madame Gideon, de votre déclaration préliminaire. Nous allons maintenant passer aux questions des sénateurs.

La sénatrice White : Merci, madame Gideon.

J’ai quelques questions, mais j’aimerais d’abord que vous nous parliez davantage des pouvoirs d’application du bureau de l’ombudsman. Quels sont-ils, et comment peuvent-ils s’appliquer?

Mme Gideon : C’est une excellente question.

La plupart des ombudsmans fédéraux n’ont pas ce pouvoir. Pour nous, il s’agira d’un nouvel examen de la façon dont nous pourrions structurer ce pouvoir chez les ombudsmans ou d’une nouvelle façon de nous assurer qu’il existe un chemin praticable qui permettrait d’accélérer la mise en place d’un mécanisme d’application. Nous reconnaissons l’importance de la responsabilisation et des résultats. C’est ce que les gens veulent.

Il y a également un lien avec l’appel à la justice 1.10, qui consiste à mettre en place un organisme de surveillance pour les appels à la justice. C’est distinct de l’appel à la justice 1.7. Nous avons fait du travail à cet égard. Une entreprise autochtone, Innovation 7, a rencontré un certain nombre de représentants autochtones de partout au pays en vue de proposer des modèles possibles pour le suivi de l’appel à la justice 1,10. Dans ce contexte, ils se sont penchés sur la nécessité d’un mécanisme législatif, sur le type de définitions concernant les distinctions et sur une approche plus inclusive. Ils se sont demandé s’il faudrait avoir un organisme provisoire pendant qu’on examine la possibilité de mettre en œuvre quelque chose qui serait plus permanent et qui pourrait être lié à la mesure du Plan d’action de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies, le numéro 19, qui porte sur les mécanismes de responsabilisation en matière de droits des Autochtones et de la personne. Il y a différents aspects à cela, qui pourraient même prendre la forme d’un tribunal. Cette initiative est dirigée par le ministère de la Justice. L’appel à la justice 1.10 permettrait également de recevoir des plaintes et de faire enquête. Il y a donc des pouvoirs semblables à ceux qui sont envisagés dans le cadre de l’appel à la justice 1.7. Pour conclure, Mme Moore Rattray reconnaît dans son rapport le lien potentiel qui pourrait être fait entre un bureau national de l’ombudsman et le suivi de l’appel à la justice 1.10.

Ce sont des complexités au sein du système fédéral pour lesquelles nous procédons actuellement à une analyse stratégique plus approfondie de concert avec nos autres collègues fédéraux en vue de tenter de déterminer ce qui pourrait être le mécanisme le plus approprié, le plus rapide, mais aussi le plus clair, afin que nous n’ajoutions pas de complexité à un système qui en est déjà pourvu.

La sénatrice White : Merci. Vous avez répondu à ma deuxième question sans même que je la pose, alors je vous remercie.

Le sénateur Tannas : Merci d’être ici, madame la sous‑ministre.

J’ai posé une question à la témoin précédente au sujet du programme d’élaboration conjointe, des consultations et du moment où nous pourrions voir un projet de loi, compte tenu du travail que la représentante ministérielle a fait, du beau travail, pour que tout cela soit fait. Il ne semble pas se passer grand‑chose. Pouvez-vous confirmer que c’est le cas? Vous avez mentionné indirectement la poursuite des conversations, mais il ne s’agit pas d’élaboration conjointe. En sommes-nous là à l’heure actuelle, c’est-à-dire nulle part?

Mme Gideon : Lorsque nous avons reçu le rapport, nous avions la responsabilité de veiller à ce qu’il soit largement communiqué à nos principaux partenaires. Nous l’avons également communiqué au groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur les femmes et filles autochtones disparues et assassinées, ou FFADA. Nous avons un comité directeur fédéral sur les FFADA où nous avons eu des conversations au sujet du rapport. Notre ministre a également écrit à l’Assemblée des Premières Nations, ou l’APN, à l’Inuit Tapiriit Kanatami, au Ralliement national des Métis et aux membres du forum intergouvernemental des dirigeants, qui sont des représentants de gouvernements visés par des traités modernes, ainsi qu’au Cercle national des familles et des survivantes afin de leur communiquer le rapport. Nous avons commencé à recevoir des commentaires de la part de nos partenaires à cet égard.

Nous avons préparé une analyse stratégique qui nous permet de prodiguer des conseils aux ministres. Les pouvoirs dont nous disposons actuellement nous obligeraient à retourner auprès des ministres afin d’obtenir un mandat pour l’élaboration conjointe des mesures législatives, en particulier. Lorsque nous élaborerons conjointement un projet de loi, nous demanderons des instructions de rédaction. Nous nous réunirons avec des partenaires autochtones et nous nous pencherons sur sa rédaction. Nous ne nous présenterions pas avec un projet de cadre législatif.

Je ne conteste pas ce que Mme Moore Rattray a dit quant au fait qu’il est parfois utile de faire bouger quelque chose. Elle a tenu de vastes consultations; cela ne se compare donc pas aux bureaucrates fédéraux qui préparent un document dans une salle et qui le déposent. Nous en sommes conscients. Ce serait une option que nous proposerions aux ministres.

Le sénateur Tannas : D’accord, merci.

Je suis fraîchement sorti des réunions du Comité de l’énergie et de l’environnement, où la consultation est devenue un enjeu important en ce qui concerne le projet de loi C-49, les Accords atlantiques.

Mme Gideon : Oui.

Le sénateur Tannas : Je vais profiter de votre présence pour vous demander quel est votre degré de satisfaction quant à la manière dont l’information est communiquée lorsque vous menez des consultations, lorsqu’il y a un projet de loi, et cetera. Quand on y pense, beaucoup de petites collectivités, dont certaines ne sont pas plus grandes que de nombreux villages, qui sont toutes dispersées, n’ont pas nécessairement la capacité de trier des centaines de courriers et de déterminer lesquels sont importants et lesquels ne le sont pas. Êtes-vous convaincue que le processus de consultation est adéquat? Je crains que cela ne se poursuive indéfiniment. Nous nous heurtons à ces situations où… et nous sommes sur le point d’avoir un projet d’élaboration conjointe. Pourriez-vous nous parler de cela et de votre expérience, ainsi que de ce que vous faites, le cas échéant — faire des feuilles roses ou quelque chose qui indique que c’est vraiment important et qu’on doit réagir — n’importe quoi? Pouvez-vous nous en parler?

Mme Gideon : Je serai aussi brève que possible.

Il existe un cadre fédéral de consultation et d’accommodement. Il est ancien. Nous avons reçu du financement et le mandat de le réformer et de le mettre à jour avec nos partenaires autochtones. Ce travail est en cours, et nous y avons beaucoup participé. Nous avons réussi à susciter beaucoup d’intérêt.

Nous disposons également de fonds et nous avons la capacité d’aider les partenaires des Premières Nations, des Inuits et des Métis qui veulent élaborer leurs propres protocoles de consultation adaptés à leur collectivité ou à leur nation. Un certain nombre de ces protocoles ont d’ailleurs été conclus.

Qu’il s’agisse du gouvernement fédéral, de l’industrie privée ou des gouvernements provinciaux, il est vraiment utile de savoir à quel moment on veut avoir une discussion qui portera sur la consultation avec cette nation en particulier. Ils ont élaboré un protocole qui précise le processus ou les attentes.

Le sénateur Tannas : Ce n’était pas le cas en Nouvelle-Écosse. A-t-il été suivi dans le cas du projet de loi C-49?

Mme Gideon : Je n’ai pas la réponse, sénateur, mais je peux certainement vérifier.

Nous avons également une équipe qui fournit des conseils aux gens qui s’engagent dans cet espace de consultation. Nos collègues du ministère de la Justice peuvent également nous aider lorsque nous avons des questions très complexes qui exigent leur évaluation en vue d’établir si une chose répond ou non au critère de l’obligation de consulter. Ils ont la capacité de nous fournir cette évaluation.

L’autre élément qui est également très utile, c’est que grâce aux mécanismes bilatéraux permanents avec l’APN, les Inuits et les Métis, nous avons travaillé sur les principes d’élaboration conjointe. Ils ont été approuvés par les Inuits et les Métis, et nous avons réalisé des progrès considérables avec l’APN. Cela va au-delà de l’aspect consultatif — il s’agit en fait d’élaboration conjointe —, mais cela fournit des indications très claires aux fonctionnaires fédéraux sur ce qui constitue ou non une élaboration conjointe avec ces peuples autochtones particuliers.

Ce ne sont là que quelques exemples, sénateur. Cependant, je comprends votre point de vue. Même en ce qui concerne des projets de loi pour lesquels nous avons dit avoir mené de vastes consultations, il arrivera toujours que certains chefs me disent qu’ils ne sont pas d’accord, et je respecte cela. Il s’agit alors de savoir si nous pouvons créer un espace éthique où nous pouvons avoir des discussions, où je ne présume pas qu’ils sont d’accord — je reconnais qu’ils ne le sont pas —, mais où nous pouvons trouver des façons de nous y retrouver afin d’en arriver à un résultat qu’ils jugent satisfaisant.

Le sénateur Tannas : Merci.

La sénatrice Coyle : Je souhaite de nouveau la bienvenue à nos témoins. Merci d’être parmi nous.

Je vais revenir sur ce qui a déjà été demandé et sur certains de vos propos. Cette consultation très importante vient d’avoir lieu par l’entremise de la représentante spéciale du ministre. Les gens ont participé à l’établissement de ce poste important d’ombudsman et de ce à quoi il devrait ressembler, de ce qu’il devrait faire et de ses priorités, et ainsi de suite. Vous l’avez maintenant. Vous aurez une autre table ronde au début de l’année prochaine, en 2025. Pourriez-vous nous dire quand pensez-vous que nous aurons — nous sommes un organe législatif — un projet de loi entre nos mains à examiner, ou quand le Parlement aura un projet de loi, dépendamment de la Chambre à laquelle vous déciderez de le présenter? Quand estimez-vous que nous aurons ce projet de loi qui nous permettra de commencer à faire avancer les choses de façon concrète? Que doit-il se passer pour qu’on arrive à cette étape?

Mme Gideon : Je ne peux pas vous donner une estimation du temps que cela prendra, car cela ne relève pas de mon pouvoir décisionnel, sénatrice. Je pense que le processus en ce qui nous concerne consiste à fournir des conseils stratégiques aux ministres et à leur permettre de prendre une décision quant à la façon dont ils souhaitent faire avancer les choses. Nous avons absolument besoin d’une autorisation au Cabinet pour mettre en œuvre les merveilleuses idées et les modèles qui ont été proposés ici.

L’une des choses que Mme Moore Rattray a également dites, je crois, c’est qu’il pourrait y avoir des mesures intérimaires prises en vue de tenter de montrer les progrès réalisés au fur et à mesure que nous avançons dans le processus. Même en ce qui concerne le projet de loi du Conseil national de réconciliation qui, à notre avis, était relativement simple, il a fallu un certain temps pour qu’il franchisse toutes les étapes du processus parlementaire. Je suis heureuse de signaler que, vendredi, il y a eu un appel pour la nomination de membres du conseil d’administration ou du conseil, de sorte que nous en sommes à l’étape de la mise en œuvre, mais cela a pris plus de temps que nous l’avions prévu. C’est un exemple récent de cette situation particulière. Nous savons que ce ne sont pas tous les partenaires qui se sont prononcés en faveur du projet de loi; nous n’avons donc pas été en mesure d’obtenir un consensus en ce qui concerne les peuples autochtones. Il est important de le savoir dans ce contexte. Nous devons respecter le fait que nous pourrions également rencontrer ce problème.

Pour ce faire, nous avons besoin d’une autorité politique et d’une source de financement qui nous permettent de mettre en œuvre ce genre de travail. Nous disposons de certaines ressources qui sont décrites dans le rapport de la représentante spéciale du ministre et qui nous permettent d’élaborer le processus, mais nous n’avons pas de ressources pour mettre en œuvre le modèle qui existe, alors cela fera partie du processus.

La sénatrice Coyle : Oui. Je sais que cela prend du temps. Je comprends cela. Je m’intéressais davantage à votre côté plutôt qu’à notre côté puis à votre côté de nouveau. Nous sommes au milieu du processus législatif. Vous vous occupez du début, de la mise en œuvre, et nous nous contentons de l’étudier et, espérons‑le, de l’adopter ou de l’améliorer et de l’adopter, au besoin.

Il y a tellement de choses. Ces appels à la justice font partie de ce sur quoi vous travaillez, et vous travaillez sur ces appels à l’action, et il y a beaucoup d’autres choses aussi. J’essaie de me faire une idée, dans le grand ordre des choses — dont bon nombre sont lourdes et complexes et exigent de l’argent, du temps, des ressources et de l’attention —, comment un rapport comme celui-ci… Mme Moore Rattray était représentante spéciale du ministre. Pour moi, cela dénote le degré de priorité accordé à ce travail particulier. J’espère qu’une fois que cet élément important de contribution aura été intégré aux prochaines étapes, le travail ne s’éternisera pas. C’est ce que je veux dire. Je veux simplement comprendre comment on va lui donner vie en plus des mécanismes existants. Il y aura une table ronde, et cela pourrait faire avancer certaines choses, mais que se passera-t-il d’autre pour faire avancer les choses?

Mme Gideon : Encore une fois, nous sommes très heureuses d’assister à votre première réunion, mais c’est la première semaine que je passe avec les ministres à la Chambre, et le fait que nous puissions nous assoir et discuter avec eux de ce que vous dites exactement, sénatrice…

La sénatrice Coyle : Nous vous poserons la question plus tard.

Mme Gideon : … c’est-à-dire « quelles sont vos priorités pour l’automne? Comment progressez-vous? » Tout dépend, bien sûr, du temps dont nous disposons pour les ministres et tous leurs comités du Cabinet ainsi que pour tous les autres éléments. Je n’essaie pas de trouver des excuses, j’essaie simplement de parler de l’aspect pratique du fait que nous sommes au début de la session d’automne.

Pour ce qui est des priorités du ministère, en tant que sous‑ministre, je peux dire que les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées sont une priorité absolue. Je peux dire que les appels à la justice 1,7 et 1,10 sont nos priorités au sein de l’équipe des FFADA2E+. Nous avons une équipe dédiée à ce travail. C’est modeste, c’est ambitieux, mais c’est le travail sur lequel nous nous sommes concentrés.

Nous reconnaissons qu’il y a encore beaucoup de besoins en matière de programmes, de services et de soutien, et que les autres ministères doivent continuer de faire tout ce qu’ils peuvent pour harmoniser leurs programmes et services afin de mieux répondre aux appels à la justice, et c’est le rôle de défense et de coordination que nous jouons.

Du point de vue de Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada, nous comprenons l’importance d’une plus grande transparence en ce qui concerne la responsabilité et les appels à la justice. C’est pourquoi nous envisageons également de diffuser l’information d’une façon différente du simple rapport annuel de la Voie fédérale. Nous voulons faire un suivi plus transparent des progrès réalisés dans le cadre des appels à la justice. Mme Moore Rattray a fait référence au rapport de la SRC, et c’est ce à quoi les gens font référence. Bien entendu, nous ne sommes pas d’accord avec l’évaluation des progrès réalisée par la SRC. Nous croyons que la grande majorité des appels à la justice auxquels le gouvernement fédéral participe ont progressé. Nous dirions également que la plupart d’entre eux ne seront jamais terminés et qu’ils ne sont pas rédigés de manière à ce qu’on puisse dire qu’on en a terminé. Il s’agit d’un parcours intergénérationnel de transformation et de changement systémique visant à éliminer la violence, le racisme et la discrimination, et il s’agira d’une question de justice sociétale permanente à laquelle nous continuerons de faire face. Le gouvernement ne peut pas cesser le travail dans ce domaine. Il devra se poursuivre pour toutes les générations à venir.

[Français]

La sénatrice Audette : Merci beaucoup pour votre courage, madame Gideon, en tant que femme mi’kmaq qui travaille de l’intérieur pour participer à des changements, et merci de nous annoncer de tristes nouvelles quand les choses ne se font pas avec l’appui nécessaire des Premiers Peuples.

Je souligne la présence de la cheffe Érica Beaudin, de la Première Nation de Cowessess, qui est ici avec nous et qui est aussi une alliée de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées.

Ma mère est une Innue. Elle parle l’innu-aimun tous les jours. On lui a appris le français dans les pensionnats. Il y a plusieurs nations dans la province de Québec où le français est imposé. En 2024, on continue de soutenir des organisations ou des nominations comme le commissaire aux langues autochtones, qui ne parle pas du tout le français, mais qui parle sa langue autochtone et l’anglais. Il n’y a aucun service en français, ou alors c’est difficile d’en obtenir. Par chance que des gens se mobilisent.

Un cercle national destiné aux familles qui ont perdu un être cher et qui est basé à Winnipeg se déroule uniquement en anglais. Il s’agit de financement fédéral. Ce sont des appels à la justice, des appels que des gens ont faits depuis des décennies. Il y a une barrière systémique linguistique qui existe et que je ne peux plus accepter. Je suis transparente : je pose toujours les mêmes questions dans tous les comités auxquels je participe. Comment peut-on éliminer ces barrières? Comment peut-on faire vibrer le Cercle national des familles et des survivantes dans le reste du Canada, dont le Québec fait partie?

Lorsqu’on parle du rapport de Mme Moore Rattray, comment s’assurer que les voix dont l’anglais n’est pas la première ou la deuxième langue seront entendues à l’intérieur et à tous les niveaux?

Je ne siège au Sénat que depuis trois ans, mais je sais que lorsqu’on approche d’une élection fédérale, le programme administratif et les programmes importants pour les familles vont ralentir. Comment le Sénat peut-il faire des recommandations pour dire qu’il y a un enjeu — il y a un changement politique et peut-être qu’il y aura des élections — et comment peut-il s’assurer que l’administration puisse poursuivre les travaux? Cela me préoccupe énormément. On le sait, on l’entend derrière les rideaux, derrière les murs. L’important, ce sera les priorités des partis politiques des deux Chambres ou des membres des caucus dans les deux Chambres, mais les familles ne devraient pas être affectées par cela.

D’après votre expérience, avez-vous vu des choses qui ont survécu, peu importe s’il y a des élections qui s’en viennent ou si l’on tient des élections?

Mme Gideon : Je vais répondre à la première question. Madame la sénatrice, je suis tout à fait d’accord avec vous pour dire qu’il faut s’assurer d’avoir de l’accessibilité au service de l’ombuds en français, dans les langues autochtones et en anglais, comme on l’a indiqué. Je crois que le rapport de Mme Moore Rattray comporte beaucoup d’inclusivités. Avoir un aspect régional, par exemple, nous permettra de nous assurer que même si on n’a pas la capacité au bureau national pour toutes les langues autochtones, on devrait avoir une capacité dans les langues autochtones locales, si on progresse avec des bureaux régionaux. C’est pour cela que ça a été recommandé.

Il faut essayer de trouver une façon de reconnaître la diversité des peuples autochtones, des familles autochtones, des communautés autochtones et s’assurer de créer un environnement où ils vont se sentir sécurisés. Ce serait un prérequis que les familles qui veulent parler en français et s’exprimer en français aient la capacité de le faire dans les services offerts par l’ombuds. On n’a pas encore développé de mécanisme. On ne sait pas si ce sera un agent du Parlement qui aura cette obligation, conformément à la Loi sur les langues officielles. Ce sont des choses qu’on devra évaluer. Le service d’ombuds s’adresse au public. Je crois que c’est quelque chose qu’on voudra prioriser. Il est certain que lors de votre étude et dans votre rapport, si vous voulez mettre l’accent sur l’importance de cet élément, ce sera bienvenu.

Pour ce qui est de la période des élections fédérales, pour la bureaucratie et la fonction publique il y a des limites aux choses que l’on peut faire, particulièrement les choses qui sont publiques. Selon mon expérience, cela ne nous empêche pas de continuer de faire des analyses de politiques sur des recommandations, particulièrement des choses qui ont été appuyées par les partenaires autochtones. Ce sont des gouvernements, comme vous le savez très bien. Quand les gouvernements autochtones donnent un mandat pour réaliser certaines actions, on essaie de travailler dans le cadre d’un mandat qui nous a été donné par ces gouvernements et de le faire respectueusement. Bien sûr, on ne peut pas engager le prochain gouvernement, mais si on peut continuer de travailler à la mise en œuvre pour aider les gouvernements autochtones, c’est de cette façon que j’essaierais de naviguer durant cette période. J’espère que cette réponse vous aide.

La sénatrice Audette : Ça me rassure, merci.

[Traduction]

Le président : Il nous reste du temps pour une ou deux autres questions, si quelqu’un souhaite en poser. Comme personne ne lève la main, le temps de parole de ce groupe de témoins est écoulé. Encore une fois, je vous remercie toutes les deux de vous être jointes à nous aujourd’hui. Si vous souhaitez présenter d’autres mémoires, veuillez les transmettre par courriel à notre greffier, Sébastien Payet, dans les sept jours.

Nous allons maintenant suspendre brièvement la séance afin de nous permettre de passer à huis clos quelques instants.

(La séance se poursuit à huis clos.)

Haut de page