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Déclaration du sénateur Murray Sinclair et de la sénatrice Kim Pate

L’occasion du 10e anniversaire du dépôt de la plainte relative aux droits de la personne portant sur la discrimination à l’encontre des enfants des Premières Nations

24 février 2017


L’honorable Sénatrice Kim Pate :

Cette année marque le 150e anniversaire de la Confédération canadienne, mais il importe également de rappeler qu’elle marque également 150 ans d’application de politiques de colonisation et d’assimilation au Canada.
 
Plus de 10 ans se sont écoulés depuis que la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada a déposé sa plainte devant le Tribunal canadien des droits de la personne. Dans sa décision marquante, rendue il y a à peine plus d’un an, le Tribunal a statué que le gouvernement fédéral avait assujetti à la discrimination raciale au moins 163 000 enfants des Premières Nations et leurs familles en leur fournissant des services d’aide sociale à l’enfance incomplets et inéquitables.
 
En janvier 2016, le Tribunal canadien des droits de la personne a ordonné au gouvernement fédéral de faire en sorte que les enfants des Premières Nations aient accès aux mêmes services publics que ceux offerts aux autres enfants au Canada, et de mettre fin à la discrimination contre les enfants des Premières Nations.
 
Malheureusement, le Canada ne s’est pas conformé à ces ordres. Dit simplement, le gouvernement fait faux bond aux enfants des Premières Nations en n’adoptant pas les mesures voulues pour améliorer leurs conditions de vie. La question se pose : pourquoi ces enfants devraient-ils attendre la tenue d’autres études et consultations avant de recevoir le traitement équitable qu’ils méritent?
 
Dans son rapport définitif, la Commission de vérité et de réconciliation formule 94 appels à l’action réclamant la fin de la discrimination pour rendre la réconciliation possible au Canada. Les cinq premiers appels portent expressément sur les iniquités dont les enfants autochtones sont victimes dans le système d’aide sociale à l’enfance. Il est navrant de constater que plus d’enfants autochtones ont aujourd’hui besoin de ce système qu’il n’y en avait sous le contrôle de l’État au faîte du système des pensionnats indiens.
 
Le 14 février dernier, 72 activités officielles se sont déroulées au Canada dans le cadre de la journée « Ayez un cœur », durant laquelle plus de 700 enfants autochtones et non autochtones se sont réunis devant le Parlement pour exhorter le gouvernement fédéral à faire les bons choix. Les enfants ont chanté et ils ont lu des poèmes demandant au premier ministre, au gouvernement fédéral et à tous les Canadiens de faire preuve de compassion envers les enfants des Premières Nations et de leur accorder le traitement équitable qu’ils méritent.
 
Les enfants ne sont peut-être pas des experts des politiques, mais ils s’y connaissent parfaitement en l’équité.
 
La triste réalité est ainsi : les organismes de services à l’enfance et à la famille dans les réserves indiennes reçoivent moins de fonds que le Canada n’en accorde aux organismes provinciaux qui s’occupent des enfants autochtones en dehors des réserves, et les écoles dans les réserves reçoivent moins de fonds que le Canada n’en verse aux commissions et conseils scolaires provinciaux pour éduquer les enfants autochtones à l’extérieur des réserves. En fait, la plupart des collectivités des Premières Nations n’ont même pas accès à de l’eau potable propre, le plus fondamental des besoins de l’être humain.
 
Nous ne voulons pas que les enfants des Premières Nations grandissent dans un pays où leur vie est moins précieuse que celle d’autres enfants canadiens. Les enfants des Premières Nations méritent d’avoir les mêmes chances que les autres enfants canadiens.
 
Aujourd’hui, nous évoquons le souvenir des enfants qui ne sont pas revenus des pensionnats indiens; nous nous faisons les porte-parole des enfants qui reçoivent actuellement des soins et des survivants de la rafle des années 1960; nous pensons aux jeunes des collectivités du Nord qui se sont suicidés et aux familles des femmes et des filles qui ont été portées disparues ou qui ont été assassinées; et nous ajoutons nos voix à celles des jeunes, des hommes et des femmes qui sont actuellement en prison.
 
Des changements systémiques s’imposent – dès maintenant – dans ce pays. Ces changements commencent par chacun de nous, Canadiennes et Canadiens, et le gouvernement fédéral.
 
Nous ne pouvons permettre que les enfants des Premières Nations continuent à souffrir dans ce pays aux mains de l’État. Le Canada sait ce qu’il doit faire. La Commission canadienne des droits de la personne et le Parlement canadien le lui ont dit. Des mesures concrètes s’imposent sur-le-champ.

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