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La Loi sur la citoyenneté

Projet de loi modificatif—Messages des Communes—Adoption de la motion visant à adopter les amendements des Communes et à renoncer à l'amendement du Sénat

15 juin 2017


L’honorable Sénatrice Raymonde Gagné :

Honorables sénateurs, je prends acte du message de la Chambre des communes au sujet des amendements apportés par le Sénat au projet de loi C-6. Ce projet de loi a été enrichi par le débat qui a eu lieu au Sénat, et je félicite la marraine du projet de loi, la sénatrice Omidvar, pour son travail infatigable à cet égard. Félicitations!

La Chambre des communes a choisi de rejeter l'amendement proposé par la sénatrice Griffin quant à l'âge auquel une personne serait exemptée de l'exigence de démontrer une connaissance de l'une des deux langues officielles du Canada. Là où le projet de loi C-6 diminuait l'âge de l'exemption de 65 à 55 ans, l'amendement de la sénatrice Griffin proposait plutôt une réduction à 60 ans.

Les motifs humanitaires qui ont motivé cette réduction à 55 ans sont compréhensibles et peuvent même être qualifiés de nobles. Je les comprends et j'accepte la volonté de l'autre endroit.

Par contre, pour les raisons humanitaires tout aussi importantes qui m'avaient incitée à appuyer l'amendement de la sénatrice Griffin à l'étape de la troisième lecture, j'exhorte le gouvernement à ne pas sous-estimer le rôle que joue la langue dans l'intégration des nouveaux arrivants au Canada.

Ce n'est pas l'intention du projet de loi C-6 qui me préoccupe, mais les conséquences inattendues qui peuvent en résulter. Comme la récompense de la citoyenneté n'est plus liée à l'apprentissage de la langue pour des milliers de nouveaux arrivants, il faut nécessairement redoubler d'ardeur afin de les rejoindre et de les encourager à apprendre une de nos deux langues officielles. Les ressources seront-elles à la hauteur, ou verra-t-on, avec une diminution de la demande, une diminution équivalente des ressources offertes?

Chers collègues, nous devrons jouer un rôle accru en matière de supervision et de suivi auprès du gouvernement afin de nous assurer que ce relâchement législatif ne l'encouragera pas à couper dans la formation linguistique des nouveaux arrivants.

Pensons aux difficultés que peuvent vivre les nouveaux arrivants qui n'ont pas l'occasion d'apprendre l'anglais ou le français. Nombre d'entre eux, dans les grandes villes surtout, peuvent bénéficier de la présence de leur communauté culturelle, des personnes avec lesquelles ils peuvent interagir dans leur langue maternelle. En dehors des centres urbains, par contre, le risque d'isolement est réel. De plus, la recherche d'un emploi, ne serait-ce qu'un emploi à temps partiel, est difficile, sinon quasi impossible.

La situation est encore plus complexe dans le domaine de la santé. Une personne qui ne peut communiquer en français ou en anglais vit une vulnérabilité additionnelle, qui s'ajoute à celle que lui cause son état de santé.

Cet isolement et cette vulnérabilité ont aussi un immense coût social. Il va sans dire que, dans un pays bilingue comme le nôtre, où l'accès à des services de soins de santé en français demeure toujours un enjeu de taille dans plusieurs provinces, il est inconcevable qu'on ne puisse déployer suffisamment de ressources pour assurer l'accès généralisé à des soins dans d'autres langues. Il y a donc lieu de redoubler d'ardeur en investissant en faveur de l'intégration linguistique de tous les nouveaux arrivants dès leur arrivée au pays.

Honorables sénateurs, il faudra surveiller et analyser l'impact de cette modification sur la capacité des nouveaux arrivants âgés de plus de 55 ans d'apprendre l'une de nos deux langues officielles. Si une diminution importante de cette capacité en résulte, c'est aussi bien la dualité linguistique de notre pays que l'intégration réussie des nouveaux arrivants qui en souffriront. L'intégration, ne l'oublions pas, va bien au-delà de l'obtention de la citoyenneté.

J'appuie l'esprit d'ouverture et d'accueil qui sous-tend le projet de loi C-6, et je voterai en faveur du message que nous a transmis l'autre endroit. Je souhaite, par contre, que le gouvernement s'engage, dans la mise en œuvre de la loi, à aller au-delà des symboles et à élaborer un réel programme d'intégration linguistique pour tous et toutes. Voilà ce qui permettra de démontrer que nous tenons, comme Canadiennes et Canadiens, à l'accueil et à l'intégration réussie de nos nouveaux concitoyens. Merci beaucoup.

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