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L’alerte Silver

Interpellation—Suite du débat

11 mai 2018


L’honorable Sénatrice Kim Pate :

Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui pour parler d’une situation qui touche plus de 700 000 Canadiens et leur famille, dont la mienne. En fait, j’aimerais dédier mon discours à ma mère, à mon père et à mes sœurs, plus particulièrement Tracy, qui, avec mon père, s’occupe en grande partie des soins prodigués à ma mère, qui s’éloigne petit à petit de nous.

Aucune famille n’est à l’abri des ravages de la démence et de la maladie d’Alzheimer. On s’attend à ce que le nombre de personnes atteintes double au cours des 15 prochaines années en raison du vieillissement de la population. Il est urgent d’assurer une coordination nationale pour s’attaquer à ce problème.

Je remercie la sénatrice Wallin de son rôle moteur dans la promotion du système d’alerte Silver. Elle reconnaît qu’il est urgent d’élaborer une stratégie pour accélérer la recherche d’aînés portés disparus qui souffrent de problèmes d’ordre cognitif. Plusieurs d’entre nous connaissent trop bien la peur aiguë ressentie lorsqu’un proche souffrant de troubles cognitifs part tout seul et s’égare complètement.

Créer et mettre en place un programme national destiné aux personnes vulnérables portées disparues pourrait sauver des vies. Bien que certaines régions aient entrepris de se doter d’un programme d’alerte Silver, le gouvernement du Canada doit offrir une coordination et un soutien à l’échelon fédéral pour que le potentiel de ce programme soit exploité au maximum.

En 2011, le gouvernement de l’Ontario a annoncé qu’il avait l’intention de mettre en place un système provincial d’alerte Silver, mais aucun progrès n’a encore été réalisé à ce chapitre. En 2017, l’Alberta et le Manitoba ont adopté des projets de loi pour créer des systèmes d’alerte Silver.

La Colombie-Britannique a un programme d’alerte Silver géré par des citoyens dans le cadre duquel des particuliers font fonctionner un système d’alertes au public. Le groupe a été formé parce que :

Même si bien des gens atteints de démence et d’autisme meurent dans les rues du Grand Vancouver et d’ailleurs en Colombie-Britannique, le gouvernement a choisi de ne pas mettre en place ce service. [Ils] ont donc décidé de le faire [eux-mêmes].

Honorables sénateurs, partout au pays, des familles sont touchées par des problèmes de santé et de santé mentale. En fait, une pétition électronique sur le site web de la Chambre des communes, parrainée par le député du Parti libéral Bob Bratina et lancée par la députée provinciale libérale Sohia Aggelonitis, est ouverte à la signature de tous les citoyens canadiens. Elle demande au gouvernement d’élaborer une stratégie nationale d’alerte Silver pour toutes les provinces et les territoires du Canada.

L’alerte Silver est un pas dans la bonne direction, mais elle doit être soutenue par d’autres mesures améliorant la qualité de vie des gens qui souffrent de troubles cognitifs et les soins qui sont offerts ceux-ci. Le fait d’accroître la sensibilisation du public à la santé et à la santé mentale est un bon début, mais il ne faut pas oublier les services sociaux et éducatifs. Investir dans des villages conçus pour répondre aux besoins précis des personnes atteintes de démence est une mesure que peut prendre le Canada pour aider les adultes vulnérables de la société.

Le premier « village » a été créé aux Pays-Bas. Dans la petite municipalité de Weesp se trouve un centre de soutien fonctionnel appelé Hogeweyk. Il s’agit d’un village autonome doté d’un unique point d’entrée et de sortie. Des soins y sont dispensés jour et nuit par du personnel infirmier gériatrique et des soignants habillés en « villageois », autrement dit, comme vous et moi.

Les employés des divers commerces du village sont formés dans les soins aux personnes souffrant de démence. L’environnement favorise une baisse de l’agitation et des comportements agressifs. On s’attend à ce que cela réduise le recours à des médicaments puissants pour les résidants. Ce village hollandais est un modèle pour le reste de la planète.

L’Allemagne, la Suisse et le Royaume-Uni ont étudié le modèle d’Hogeweyk et ont proposé des plans pour construire leurs propres villages adaptés aux personnes atteintes de démence.

Les États-Unis travaillent sur un concept de programme de jour fondé sur la thérapie de la réminiscence afin de stimuler de façon positive le retour des souvenirs.

Le premier village du Canada est en construction à Langley, en Colombie-Britannique. Les travaux devraient être terminés d’ici le printemps prochain. Elroy Jespersen, le maître d’œuvre de ce projet, voulait que les patients atteints de démence se sentent aussi libres et autonomes que leurs semblables en bonne santé. Ce projet est financé par le secteur privé, mais les promoteurs espèrent que le gouvernement finira par couvrir une partie des coûts pour les résidants. J’espère que des services plus universels seront accessibles aux personnes dont les ressources sont limitées ou qui vivent dans des régions éloignées ou des contextes culturels différents.

C’est pourquoi, même s’il est impossible de remplacer la bienveillance, la bonté et la compassion dont peut faire preuve un être humain, un appui à l’innovation dans le domaine de la robotique, qui est en croissance au Canada, pourrait permettre d’améliorer les soins prodigués aux personnes atteintes de déficience cognitive.

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a étudié le vaste éventail d’applications de la robotique et de l’intelligence artificielle dans les soins de santé, et a présenté son rapport en octobre de l'année dernière.

Ce rapport décrit comment il est possible d’utiliser des robots d’assistance pour prendre soin des personnes âgées. Par exemple, Goldie Nejat, directrice de l’Institut de robotique et de mécatronique à l’Université de Toronto et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les robots dans la société, a parlé de ses travaux sur le recours aux robots afin de réduire le fardeau des soignants et d’offrir des soins uniques aux patients.

Honorables sénateurs, comme la population canadienne est vieillissante, la démence et d’autres déficiences cognitives vont constituer un problème de plus en plus important. C’est pourquoi je suis heureuse d’appuyer la sénatrice Wallin et de collaborer avec d’autres sénateurs afin qu’il soit possible d’offrir des soins et une vie de qualité à l’ensemble des Canadiens.

Meegwetch, merci.

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