Déclarations de sénateurs
L’attestation exigée pour les emplois d’été
22 mars 2018
L’honorable Sénatrice Pamela Wallin :
Honorables sénateurs, au cours des dernières semaines, j’ai reçu des dizaines de courriels et de témoignages personnels de la part de personnes craignant que leurs droits garantis par la Constitution ne soient violés. Ceux qui adressent une demande de subvention au programme Emplois d’été Canada pour l’année 2018 doivent signer une attestation disant que les emplois et le mandat de leur organisation respectent ce que l’on considère au Canada comme des droits de la personne, y compris les droits en matière de procréation. Les gens craignent à raison que, pour recevoir du financement destiné à d’importantes activités communautaires, ils ne soient obligés de renoncer à l’exercice de la liberté de croyance qui est inscrite dans la Constitution. Ils seraient privés de leur liberté de ne pas être du même avis que le gouvernement en matière de religion et de politique sociale ainsi que sur des questions de conscience.
S’ils veulent embaucher un étudiant, ils n’ont plus que deux choix désagréables : mentir dans le formulaire ou signer une attestation malgré leur désaccord. Tout cela, uniquement pour embaucher un étudiant pendant l’été.
Dans son entreprise de promotion de la vision personnelle et politique à laquelle il adhère, le gouvernement a oublié un élément essentiel : les Canadiens bénéficient de la liberté d’expression, de croyance et d’opinion que leur garantit la Charte. Autant une personne a l’obligation de respecter la loi, autant la Constitution lui donne le droit d’exprimer son opposition à cette loi.
Depuis que j’ai 17 ans, je milite pour la liberté de choix des femmes. J’ai ouvert le premier centre pour femmes à l’Université de Regina, il y a longtemps. Toutefois, la liberté de choix implique justement qu’on laisse les gens libres. Il ne me revient pas de choisir les droits garantis par la Charte et la Constitution qui doivent être respectés. Je n’insiste pas pour que les gens soient d’accord avec moi quand il s’agit de faire entendre leurs objections au Sénat. Je peux ne pas souscrire à une croyance tout en défendant le droit des autres d’y adhérer.
La vaste majorité des demandeurs ne participent pas à des activités politiques. Ce genre d’activités est certainement loin des préoccupations des musées, des centres communautaires et des organismes qui offrent des camps d’été. Qu’un demandeur soit pour ou contre l’avortement ne devrait pas être un critère qui entre en ligne de compte lorsqu’on doit décider de lui accorder ou non une subvention pour créer des emplois dans le domaine du canotage ou de la natation.
Voici ce que disait une des lettres que j’ai reçues :
Pour certains de ces enfants, la semaine qu’ils passent au camp sera la seule expérience positive de tout leur été.
On y lit également ceci :
Selon moi, cette attestation va à l’encontre de notre liberté de religion et de notre liberté d’expression, alors que notre pays s’est justement bâti sur ces deux valeurs.
En punissant les organismes qui ne demandent rien d’autre que d’offrir un emploi d’été valorisant et de l’expérience professionnelle de grande valeur aux jeunes, on nuit à l’excellent travail qu’ils font pour la collectivité. Comme l’a dit la chroniqueuse du Star, Chantal Hébert :
En fait, les efforts que déploie le gouvernement pour forcer l’électorat à adopter la même vision policée de la société que lui risquent fort d’avoir exactement le résultat contraire.
Dans sa forme actuelle, c’est exactement ce que fera cette attestation : elle produira exactement le résultat contraire à ce qui en était attendu.