Projet de loi sur la modernisation des transports
Projet de loi modificatif—Message des Communes—Motion d’adoption des amendements des Communes et de renonciation aux amendements du Sénat—Ajournement du débat
7 mai 2018
L’honorable Sénatrice Pamela Wallin :
Honorables sénateurs, je m’associe aux expressions de préoccupations grandissantes au sujet du message que la Chambre des communes nous a envoyé la semaine dernière concernant les amendements du Sénat au projet de loi C-49.
Les sénateurs ont proposé des amendements logiques au projet de loi du gouvernement visant à modifier la Loi sur les transports. La liste était longue, mais nous avions mis de l’eau dans notre vin. Malheureusement, il semble que le gouvernement n’est pas aussi ouvert.
Comme je l’ai déjà dit, je suis surtout préoccupée par les dispositions concernant le transport du grain. La lenteur du processus, qui se traduit par de l’imprévisibilité, à défaut d’autre chose, a aggravé la situation des producteurs de grain de l’Ouest canadien, qui était déjà difficile. Les producteurs sont incapables d’acheminer leur grain jusqu’aux marchés, et, évidemment, cela s’explique en partie par la décision du gouvernement d’inclure des dispositions relatives au transport du grain dans un projet de loi omnibus, avec d’autres questions non connexes.
À cause de cela, il y a un risque que la crise de 2013-2014, lors de laquelle 5 milliards de dollars ont été arrachés à l’économie de l’Ouest canadien, se répète. La crainte d’une nouvelle crise s’est nettement accentuée la semaine dernière lorsqu’un fabricant d’engrais, Nutrien, a déclaré qu’il allait mettre temporairement à pied jusqu’à 1 300 travailleurs à deux mines de potasse. L’entreprise invoque les retards du transport dans le réseau ferroviaire et la possibilité d’une grève au Canadien Pacifique.
Le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe, a fait écho à la frustration de ceux qui ont subi deux épisodes de retards en quatre ans tout en étant confrontés à la possibilité qu’il n’y ait pas d’expansion du pipeline Trans Mountain.
Comme les honorables sénateurs peuvent l’imaginer, les gens dans ma province sont impatients et veulent désespérément que le gouvernement fédéral intervienne, et le gouvernement les déçoit. Il avait la possibilité de le faire par voie de décret. Le gouvernement a eu la possibilité de prolonger la période indiquée dans la disposition de temporisation dans un projet de loi adopté au cours de la dernière législature. La Loi sur le transport ferroviaire équitable pour les producteurs de grain comportait un article permettant aux ministres d’émettre des décrets et de prolonger les dispositions pendant un an.
Je sais que le nouveau gouvernement, lorsqu’il a été élu, les a prolongées une fois, mais, devant l’éventualité d’une autre crise, il a plutôt choisi de présenter un projet de loi omnibus sur les transports, faisant fi des appels lancés par les agriculteurs pour qu’il prolonge les dispositions.
En réalité, les agriculteurs avaient besoin que le gouvernement intervienne il y a des mois. Nous sommes maintenant aux prises avec le fait que le gouvernement a rejeté plusieurs amendements sensés, même s’il en a accepté quelques-uns qui seront utiles.
Je ne m’étendrai pas sur les amendements concernent la déclaration des droits des passagers des lignes aériennes. Cette question est réglée, mais je suis préoccupée par le fait que, dans le présent projet de loi, les décisions en la matière soient beaucoup laissées à la discrétion du ministre. Le rôle constitutionnel que nous assumons comme sénateurs — tout comme la durée et la continuité de notre mandat, indépendant des changements de gouvernement — nous donne la possibilité d’apporter une perspective à long terme au débat.
Il s’agit d’un aspect essentiel de notre démocratie parlementaire. Je constate une érosion de nos organismes indépendants — comme l’Office des transports du Canada — qui s’est produite au fil des années. Cela ne se limite pas au gouvernement, mais c’est dommage que cela arrive, car nous ne voudrions pas voir les Canadiens perdre confiance dans ces organismes ni voir ces derniers politisés.
Ces questions sont importantes, mais je tiens à répéter que les producteurs de grain de ma province sont au cœur de mes préoccupations. Comme je l’ai déjà dit à plusieurs reprises dans cette enceinte, les agriculteurs ont besoin que le gouvernement prenne des mesures et les aide à acheminer leurs céréales jusqu’aux marchés. C’est la seule façon.
Je déplore le traitement réservé au projet de loi. Il est décevant d’entendre les ministres accuser les sénateurs de prendre trop de temps pour l’étudier et en débattre, alors que c’est le gouvernement qui a décidé de présenter une mesure omnibus, qui a nécessité des amendements. Voilà qui explique que la tâche ait pris plus de temps que ce que le gouvernement aurait préféré.
Au Sénat, notre travail est de faire un second examen objectif. C’est notre responsabilité d’étudier les projets de loi dont nous sommes saisis et, lorsque ceux-ci prennent la forme d’un texte compliqué, nos travaux prennent plus de temps.
Étant donné la liste d’amendements rejetés, même si nous conservons nos droits constitutionnels en tant qu’institution complémentaire de la Chambre des communes, je crois que nous finirons probablement par nous incliner devant le gouvernement. Il s’agit d’une mauvaise politique et d’un projet de loi imparfait, mais, dans l’intérêt de nos agriculteurs, il est essentiel d’agir.
Je demande au gouvernement de s’atteler à la tâche d’appuyer les agriculteurs de l’Ouest et d’assurer le transport du grain.
Merci.