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Projet de loi sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants au Canada

Deuxième lecture--Suite du débat

20 septembre 2023


Chers collègues, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer le projet de loi C-35, Loi relative à l’apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada. J’encourage mes honorables collègues à faire preuve de diligence et d’empressement pour que ce projet de loi soit renvoyé au comité le plus tôt possible.

Sénatrice Moodie, je vous remercie de l’historique et de l’aperçu détaillés et exhaustifs de la promesse et de la vision du projet de loi C-35.

Je viens d’assister à la séance d’information technique sur le projet de loi C-35; elle a été très instructive et a présenté les différents partenariats, y compris les tables rondes nationales et régionales de partenariat d’éducation préscolaire et de garde d’enfants autochtones, ainsi que les partenariats provinciaux et territoriaux qui nous ont conduits jusqu’à aujourd’hui.

Le projet de loi inscrit dans la loi un cadre pour un système national d’éducation préscolaire et de garde d’enfants. Il prévoit également la création d’un conseil consultatif national qui est nécessaire pour maintenir des pratiques exemplaires fondées sur des données probantes et des travaux de recherche, rendre compte des progrès réalisés vers l’atteinte de ces objectifs et, plus important encore, corriger le tir au besoin.

Le projet de loi est audacieux et tourné vers l’avenir et il montre que le Canada accorde de l’importance aux enfants, aux familles et aux femmes à qui incombe souvent, mais pas toujours, la responsabilité d’élever les enfants. Il porte sur la réalité d’aujourd’hui et celle de demain. Il vise à aider les familles à trouver un bon équilibre entre le travail et la vie personnelle.

Chers collègues, je m’adresse à vous aujourd’hui en tant que mère, grand-mère, pédiatre et maintenant sénatrice.

Il y a plus de 30 ans, j’étais résidente en pédiatrie et j’ai pu constater que l’absence de services de garde facilement accessibles et abordables avait une incidence considérable. La situation aurait été très différente si des services de garde avaient été offerts dans mon établissement ou à proximité. De nombreux parents de mes patients ont du mal à trouver des services de garde abordables et de qualité qui leur permettraient de gagner un revenu ou de suivre une formation qui améliorerait leur potentiel de revenu ainsi que la trajectoire du développement et de la santé de leur enfant.

Mes observations porteront sur deux domaines principaux : le coût économique de l’absence d’un cadre national de services d’éducation préscolaire et de garde d’enfants et les répercussions sur la santé et l’éducation de l’absence d’un tel cadre.

Dans son rapport intitulé Apprentissage et garde des jeunes enfants au Canada : d’où partons-nous, où allons-nous?, l’Institut de recherche en politiques publiques fait le constat suivant :

[...] les frais de garde ont continué d’augmenter au fil du temps et les progrès d’une province et d’un territoire à l’autre sont mitigés en ce qui concerne le ratio personnel-enfants, les salaires des éducatrices [...]

Selon le rapport du Centre canadien de politiques alternatives intitulé En évolution : les frais de garde d’enfants au Canada en 2019, le coût moyen pour un poupon à Toronto s’élevait à 1 774 $. Au Québec, heureusement, le coût moyen était de 179 $. Au Manitoba, il s’agissait d’un tarif fixe provincial de 651 $ par mois. C’est important. Voici ce qu’on pouvait lire dans la conclusion du rapport : « [...] les frais de garde moins élevés au Canada sont le résultat des politiques publiques et non des pressions exercées par le marché. »

Des analyses sur les effets qu’ont au Québec les services de garde abordables sur la participation des femmes au marché du travail et le produit intérieur brut présentent des résultats très positifs. Cela signifie qu’il est sensé, sur le plan économique, de faciliter le retour des mères sur le marché du travail.

Mon deuxième point de discussion porte sur l’incidence de la garde des jeunes enfants sur leur développement et l’atténuation des conséquences de la pauvreté et de l’adversité dès le jeune âge. Bien entendu, il doit s’agir de services de garderie de grande qualité qui respectent les besoins des divers enfants et des circonstances de leur famille, ainsi que de services aux Autochtones et de services pertinents sur le plan culturel.

Ma mère était enseignante et, en tant que jeune mère, elle pouvait m’amener à l’école avec elle lorsque j’avais deux ans. Honorables collègues, on peut dire que j’ai commencé à fréquenter l’école officiellement dès l’âge de deux ans, et maintenant, à cette étape de ma vie, j’entre dans une nouvelle école. Ce qu’il faut surtout retenir, c’est que j’ai bénéficié d’un bon départ dans la vie, et que cela explique en grande partie pourquoi je suis devenue médecin et pourquoi j’ai eu l’honneur d’être nommée au Sénat.

Nous savons que les enfants qui sont exposés à un environnement enrichissant arrivent à l’école avec un vocabulaire beaucoup plus riche que les enfants qui ont connu des difficultés en bas âge. Offrir des services de garde et d’éducation préscolaire de grande qualité, c’est investir dans la prévention d’une foule de facteurs qui peuvent mener à des problèmes de santé pouvant durer toute une vie, comme le diabète, les maladies du cœur et les problèmes de santé mentale, ainsi qu’à un faible niveau de scolarité.

On pourrait dire qu’il s’agit en quelque sorte d’une police d’assurance contre les écueils de la vie qui favorise la résilience et la prospérité pour tous.

L’Institut de recherche en politiques publiques a fait plusieurs recommandations. J’aimerais souligner plus particulièrement celle‑ci : « Développer rapidement les services de garde d’enfants publics et à but non lucratif. » On peut le faire « en incitant les municipalités, collèges et commissions scolaires à élargir leur offre ».

J’ajouterais à cela les grandes institutions et les employeurs.

De nombreux parents m’ont parlé des longues distances à parcourir et des réveils à 5 heures du matin pour les enfants parce qu’ils doivent les amener à une garderie éloignée en raison du manque de places au service de garde de l’école de leur enfant. Le même phénomène se répète en fin de journée. Bon nombre de ces enfants présentent des troubles de comportement en raison du manque de sommeil. Est-il nécessaire d’en dire plus?

En terminant, chers collègues, comme le disait hier la sénatrice Moodie dans son discours :

La pandémie a donné lieu à une nouvelle vague de militantisme de la part des parents, des familles, des spécialistes des services de garde, des syndicats, des universitaires et des économistes, tous réclamant des services de garde de qualité, abordables, accessibles et inclusifs, soutenant qu’ils sont essentiels pour annuler les effets néfastes de la pandémie et bâtir une société pour tous.

Il s’agit d’un investissement dans les enfants et les familles du Canada. C’est un investissement dans l’avenir du pays.

Je vous exhorte, honorables sénateurs, à exercer votre second examen objectif avec toute la diligence nécessaire et avec une certaine célérité afin que le projet de loi soit renvoyé au comité le plus tôt possible. Les enfants, les familles et tous les Canadiens comptent sur nous.

Merci. Meegwetch.

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