PÉRIODE DES QUESTIONS — Le cabinet du premier ministre
SNC-Lavalin
18 mars 2019
Merci, Votre Honneur. Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.
Depuis la dernière séance du Sénat, le Comité de la justice de la Chambre des communes a entendu le témoignage de l’ex-secrétaire principal du premier ministre, Gerald Butts, au sujet du scandale SNC-Lavalin. Il a aussi reçu une deuxième fois l’ancien greffier du Conseil privé, Michael Wernick, ainsi que la sous-ministre de la Justice, Nathalie Drouin.
Le premier ministre a quant à lui organisé une conférence de presse, prétendument pour faire acte de contrition. Or, la contrition était totalement absente de ses propos, et il ne s’est jamais excusé.
La semaine dernière, les libéraux ont coupé court aux travaux du Comité de la justice afin d’éviter que Mme Wilson-Raybould ne soit convoquée une seconde fois pour compléter son premier témoignage.
Voici ma question : pourquoi le gouvernement refuse-t-il à Mme Wilson-Raybould l’occasion de dire tout ce qu’elle a à dire? Qu’essaie-t-il de cacher?
Encore une fois, je remercie l’honorable sénateur de sa question et je lui souhaite la bienvenue à la télévision en direct pour la période des questions.
Comme le sait le sénateur, le gouvernement a accordé une autorisation sans précédent à l’ancienne ministre de la Justice et procureure générale pour qu’elle puisse parler pleinement et en détail de cette question. Elle a été en mesure de le faire pendant plus de quatre heures lors de son témoignage devant le comité de l’autre endroit.
En ce qui a trait au travail du comité en question, comme le sait l’honorable sénateur, celui-ci poursuit ses travaux et se réunira d’ailleurs dès demain. Je fais confiance à la compétence de l’autre endroit pour s’occuper comme il convient de ses affaires.
Je vous remercie de votre réponse.
Les Canadiens se posent encore des questions sur ce qui se passe. L’ex-procureure générale veut parler de ce qui s’est produit après son départ du ministère de la Justice et sa démission du Cabinet, mais on l’en empêche. La semaine dernière, les membres libéraux du comité ont mis fin à la réunion après moins de 30 minutes de séance. Visiblement, ils ne voulaient pas que toute l’histoire se sache. Je crois que tout cela rend une étude sur cette affaire de la part du Sénat encore plus souhaitable. Qu’en pensez-vous, sénateur Harder? Les événements des deux dernières semaines vous ont-ils fait réfléchir et incité à revoir votre position? Allez-vous maintenant appuyer notre motion sans amendement, ou êtes-vous toujours d’avis que vos collègues dans cette Chambre jouent les inquisiteurs amateurs?
L’honorable sénateur intervient sur une motion que nous espérons aborder plus tard dans la journée. À l’instar de tous les autres sénateurs, il sait que la motion du sénateur Smith proposera des mesures ici, au Sénat, comme la création possible d’un comité et la convocation de témoins. La motion contient un amendement que j’ai proposé pour l’examen du Sénat.
Comme je l’ai dit pendant mon intervention, je rappelle à tous les sénateurs que c’est le Sénat qui décidera s’il entreprendra ou non une telle enquête et qui en choisira les modalités, le cas échéant. Je persiste à croire que les travaux du comité de l’autre endroit et du commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique sont importants et appropriés dans le contexte de la question dont nous discutons.
Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Sénateur Harder, tout d’abord, il y a eu la ministre Jody Wilson-Raybould, puis Jane Philpott, puis Mme Caesar-Chavannes. Il est devenu très évident que le premier ministre Trudeau n’est pas un bon chef et qu’il ne sait pas comment écouter ou créer un climat de confiance. Pourtant, il continue de demander aux Canadiens de le croire sur parole. Maintenant, il souhaite que les Canadiens trouvent un certain réconfort dans le fait qu’il va demander conseil à des experts au sujet du pétrin dans lequel il se trouve. Pourtant, il s’est mis dans ce pétrin parce qu’il a refusé d’écouter l’avis de son ancienne experte, la ministre de la Justice, lorsqu’elle a choisi une autre voie que celle qu’il préconisait.
Sénateur Harder, comment les Canadiens sont-ils censés faire confiance à un premier ministre qui affirme qu’il sollicitera des conseils d’experts alors qu’il a démontré à de nombreuses reprises qu’il n’écoute pas et qu’il n’assume pas ses responsabilités lorsque les choses vont mal?
Il va sans dire que je conteste le préambule de l’honorable sénateur. Si ses propos recelaient une question, j’y répondrai en disant que le premier ministre n’a jamais dicté à l’ancienne ministre une façon particulière d’utiliser son jugement. Aucune loi n’a été enfreinte et il n’y a eu aucun comportement inapproprié.
Je rappelle qu’un comité de l’autre endroit examine cette affaire. Il a entendu un certain nombre de témoins, dont l’ancienne ministre de la Justice et procureure générale, de même que l’actuel ministre de la Justice et procureur général. Par ailleurs, ce dossier est aussi soumis à l’examen du commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique de l’autre endroit. Celui-ci a la compétence requise pour intervenir, une compétence semblable à celle d’un juge d’une cour supérieure. Par conséquent, tous les éléments pertinents aux fins de la prise de décision pourront être examinés.
Je laisserai donc à ces instances le soin de rendre une décision à propos des enjeux que soulève l’honorable sénateur.
Pour ce qui est de la confiance demandée aux Canadiens, je dirais qu’elle s’exprime chaque jour à même le travail du gouvernement. J’attends avec impatience le dépôt du budget de demain puisque, pour la quatrième fois depuis le début de son mandat, le gouvernement pourra montrer aux Canadiens comment les gestes qu’il pose contribuent à sa performance économique.
On parle de déficit après déficit. Sénateur Harder, comme vous le savez, le premier ministre a qualifié le scandale de SNC-Lavalin de simple malentendu causé par l’érosion de la confiance dans son cabinet. Cet argument semble aussi crédible que de dire qu’une allégation de tripotage relève uniquement d’une différence de point de vue.
Le fait est que le Comité de la justice de la Chambre des communes ne fera pas toute la lumière sur cette question parce que les libéraux y sont majoritaires. Le commissaire à l’éthique ne fera pas toute la lumière sur cette question parce qu’en plus d’être en congé de maladie, les allégations dépassent la portée de son mandat. Si une organisation est en mesure d’obtenir les réponses que veulent les Canadiens, c’est le Sénat du Canada. Pourtant, sénateur Harder, vous vous y opposez.
Ferez-vous ce qui s’impose, monsieur le leader, en retirant votre amendement à la motion no 435 et en demandant à tous les sénateurs de vous appuyer pour permettre au Sénat d’inviter Mme Wilson-Raybould à témoigner devant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles?
Hélas, monsieur le sénateur, je ne me sens ni le tempérament ni la disposition pour indiquer à quiconque comment voter au Sénat, contrairement à d’autres personnes. Je dirai simplement que je ne retirerai pas la motion. J’espère que nous pourrons en débattre ce soir et, si le Sénat le veut, que nous pourrons la mettre aux voix.
Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Tous les Canadiens sont en mesure de constater que votre premier ministre tente par tous les moyens de cacher la vérité au sujet de son intervention inappropriée et probablement illégale auprès de l’ex-procureure générale, Jody Wilson-Raybould, dans le dossier de SNC-Lavalin.
Les manœuvres libérales dans le but d’empêcher Mme Wilson-Raybould d’apporter des éclaircissements devant le Comité de la justice sont inacceptables, indignes, et font en sorte que les membres de ce comité devront rendre une décision avec seulement une partie de la vérité. De plus, le premier ministre et son personnel consulteront des avocats indépendants pour les aider dans leur camouflage, tout cela aux frais des contribuables canadiens.
Monsieur le leader, pouvez-vous confirmer le fait qu’on cherche, une fois de plus, à nous cacher la vérité? Surtout, pouvez-vous justifier cette dépense en honoraires d’avocats?
Je pense que le sénateur sait que toutes les mesures appropriées ont été prises pour que la question puisse être étudiée au comité approprié de l’autre endroit, que les mesures appropriées ont été prises par le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique. Ce dernier est en congé de maladie, mais son bureau étudie activement la question. Il est entièrement approprié que les personnes concernées reçoivent de l’aide pour le témoignage qu’elles pourraient être tenues de présenter.
Le leader peut-il nous dire si la GRC a contacté le premier ministre ou des membres de son bureau au sujet des interventions qui ont été faites auprès de l’ex-procureure générale?
Je ne suis pas au courant de cela.
Honorables collègues, ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat, le sénateur Harder. Le cabinet du premier ministre a annoncé que l’ancienne ministre libérale Anne McLellan a été embauchée pour évaluer une structure qui est en place depuis la Confédération, soit celle d’avoir une seule et même personne comme ministre de la Justice et procureur général du Canada. Je crois que vous conviendrez, sénateur Harder, qu’il n’appartient pas à un premier ministre, quel qu’il soit, de vérifier cela, et que ce n’est certainement pas le travail d’un conseiller du cabinet du premier ministre. Cette décision appartient au Parlement.
Le gouvernement parle sans cesse de la confiance dans nos institutions. Pourtant, il continue de faire preuve de mépris à leur égard, en particulier à l’égard du Parlement. Sommes-nous censés croire que, parce le premier ministre est, encore une fois, incapable de respecter la structure établie — et fonctionnelle — depuis plus de 150 ans, nous devrions tout changer parce que cela ne concorde pas avec son discours?
Sénateur Harder, comment se fait-il que le premier ministre estime que nos institutions et notre système doivent changer pour s’adapter à ses besoins et non l’inverse? Pourquoi le premier ministre se pense-t-il supérieur à la Constitution et aux institutions canadiennes?
Je le répète, le discours de l’honorable sénateur et son préambule sont incendiaires et — je le dis bien franchement — inexacts.
Comme n’importe quel premier ministre, le premier ministre du Canada a le devoir et l’obligation de mettre sur pied un ministère sous la forme et selon le mandat qu’il souhaite. Ces mandats et ces ministères amènent souvent le Parlement à adopter des lois relativement à divers rouages du gouvernement.
Le premier ministre attend d’Anne McLellan qu’elle lui donne son avis d’expert sur la question de savoir si la configuration du rouage gouvernemental actuel, dans laquelle les deux postes sont combinés, est toujours appropriée.
L’honorable sénateur prétend être expert des systèmes parlementaires de type britannique. Il saura donc que dans certains de ces systèmes, les deux postes sont distincts, ce qui présente des avantages et des inconvénients qu’il y a lieu de soupeser soigneusement, autrement que par un simple griffonnage au dos d’une enveloppe. C’est donc l’étude que le premier ministre a lancée.
Quels sont les liens appropriés entre les employés — fonctionnaires et personnel politique — dans leurs relations avec le procureur général? Tous ces éléments font partie d’une étude très importante qui sera menée par une ancienne procureure générale, ministre de la Justice et vice-première ministre du Canada très respectée.
Monsieur le leader du gouvernement, vous avez tout à fait raison. Il appartient au Comité de la justice de la Chambre des communes, au Comité de la justice du Sénat et aux deux Chambres du Parlement de déterminer ces choses — et non à un employé du cabinet du premier ministre ou à un quelconque conseiller.
La conseillère spéciale du premier ministre analysera également les procédures opérationnelles au sein du cabinet du premier ministre et du Cabinet des ministres ainsi que le rôle des fonctionnaires et du personnel politique dans les échanges avec le procureur général du Canada. C’est ce que dit le communiqué du cabinet du premier ministre.
Si, après plus de trois ans, le premier ministre Justin Trudeau a besoin d’une conseillère spéciale pour lui expliquer que l’indépendance du système judiciaire est un élément essentiel de notre démocratie, qu’aucun premier ministre, pas même Justin Trudeau, n’a le droit d’intervenir dans une enquête judiciaire criminelle ni de donner des directives ou des conseils au ministère de la Justice, ce premier ministre n’aurait peut-être pas dû briguer la fonction de premier ministre s’il n’était pas prêt à l’occuper.
Permettez-moi de vous poser une question, sénateur Harder : si le premier ministre n’est pas apte à diriger son propre cabinet et le Cabinet des ministres, pourquoi les Canadiens devraient-ils croire qu’il est apte à diriger le pays?
Je fais fi encore une fois du préambule et de l’hyperbole. Bien sûr, je ne citerai pas le juge Vaillancourt. Je vais laisser cela à d’autres sénateurs.
Je dirai simplement que le premier ministre fait preuve de vigilance afin que le gouvernement continue de se concentrer pleinement sur des relations correctes et appropriées entre le procureur général, le ministre de la Justice et l’ensemble du ministère dans l’appareil gouvernemental.
Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Les Canadiens ont le droit de connaître la vérité.
Les accusations de fraude et de corruption portées contre SNC-Lavalin remontent à 2000 et 2011. Les affaires sont maintenant devant les tribunaux canadiens et ont progressé à des stades différents.
De plus, en 2015, des sanctions ont été imposées à l’entreprise pour avoir effectué des paiements illégaux au Groupe de la Banque africaine de développement.
En 2016, cette affaire a été examinée par la commission Charbonneau.
SNC-Lavalin a également été réprimandée pour avoir versé des centaines de milliers de dollars en contributions illégales au Parti libéral.
De plus, on s’en souvient, en 2013, la Banque mondiale a annoncé la radiation de SNC-Lavalin pendant 10 ans.
En décembre 2015, moins de deux mois après l’arrivée au pouvoir des libéraux, SNC a signé une entente administrative avec le gouvernement Trudeau lui permettant de présenter des soumissions et d’obtenir des contrats malgré les accusations criminelles toujours en suspens.
Le premier ministre a perdu deux ministres, son secrétaire principal et maintenant le greffier du Conseil privé. Quand le premier ministre commencera-t-il réellement à assumer la responsabilité du scandale?
Je ne vais pas m’attarder sur toutes les exagérations contenues dans le préambule à la question; je dirai simplement que le premier ministre n’a jamais eu peur d’assumer la responsabilité de cette affaire, ni lorsqu’elle a éclaté ni face aux questions formulées et aux nouvelles parues dans les dernières semaines. Les mesures qu’il a prises, annoncées aujourd’hui, témoignent de son engagement continu à le faire.
Le premier ministre Trudeau a dit à maintes reprises qu’il se bat continuellement pour protéger les emplois canadiens, surtout ceux de SNC-Lavalin, au nombre d’environ 9 000, selon lui.
Sénateur Harder, Northern Gateway aurait pu créer des milliers d’emplois. Énergie Est aurait pu créer des milliers d’emplois. L’oléoduc Trans Mountain aurait pu créer des milliers d’emplois. La construction de pipelines assure la création de milliers d’emplois. Tous les projets qui ont été annulés auraient pu créer des milliers d’emplois. Ce sont les plus grandes pertes d’emplois qu’on ait connues au sein de l’économie canadienne. Elles ont touché l’ensemble de l’industrie, mais elles n’ont pas attiré l’attention du premier ministre, du personnel du bureau du premier ministre ou du Bureau du Conseil privé — du tout.
Ma question au leader du gouvernement est la suivante : pourquoi y a-t-il deux poids, deux mesures? Sérieusement, qui peut croire le premier ministre, maintenant, quand il dit se battre pour protéger les emplois des Canadiens?
Encore une fois, je ne m’attarderai pas sur les exagérations. Je vais simplement rappeler — nous pourrons certainement en discuter davantage demain dans le contexte du budget — le bilan du gouvernement actuel en matière de création d’emplois. La croissance de l’emploi au pays est la meilleure du G7. Le taux de chômage est à son plus bas depuis de nombreuses années, et tant le premier ministre que le gouvernement continuent d’axer leurs efforts sur les emplois du secteur énergétique. C’est pour cette raison que le gouvernement, dans un geste sans précédent, a décidé d’acheter un pipeline et de faire le nécessaire pour que le Canada puisse exporter ses vastes ressources brutes sur le marché mondial, plutôt que d’être limité au marché nord-américain pour cet important produit.
Je crois qu’il est important que nous soyons tous conscients que nous avons le devoir, à titre de parlementaires, d’axer nos efforts sur l’emploi partout au Canada et dans tous les secteurs afin que les Canadiens puissent tirer profit de l’économie mondiale et des occasions qui découlent d’une meilleure intégration, de compétences plus poussées et plus spécialisées, ainsi que de l’apprentissage de compétences informatiques et technologiques, pour que la main-d’œuvre canadienne soit réellement connectée et qu’elle ait les outils pour se recycler et profiter des nouvelles perspectives qu’ouvre la nouvelle économie.
Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Sénateur Harder, nous avons été absents de cette enceinte pendant deux semaines. Je me demande si vous pouvez nous fournir quelques renseignements. Pourriez-vous nous préciser la chronologie des activités du comité de la Chambre des communes qui se penche sur l’affaire SNC-Lavalin, le nombre de témoins qui doivent encore comparaître, le nom de ces témoins et le moment où ils comparaîtront devant le comité? Ces renseignements m’aideront certainement à prendre des décisions plus tard ce soir concernant l’amendement que vous avez proposé et les motions dont nous discutions il y a deux semaines. Merci.
Je remercie l’honorable sénatrice de sa question. Elle saura que, comme les comités du Sénat, les comités de la Chambre des communes sont maîtres de leurs propres travaux. Je crois comprendre que le comité se réunira demain pour décider de son horaire et des témoins qu’il convoquera pour approfondir son étude. Je tiens aussi à souligner le travail qu’effectue actuellement le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique, qui, comme je l’ai déjà dit à plusieurs reprises, a le pouvoir, le mandat et le cadre juridique nécessaires pour faire avancer les enquêtes dans cette affaire.