DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS — Le courage politique
20 février 2020
Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui au nom de notre collègue le sénateur Daniel Christmas, qui, bien qu’il soit encore en deuil suite au décès tragique de son épouse, s’estime tenu de vous faire part d’une histoire de courage politique.
Tout récemment, en Nouvelle-Écosse, le premier ministre Stephen McNeil a fait preuve de courage politique en fermant l’usine de la papetière Northern Pulp pour respecter l’entente conclue avec la Première Nation de Pictou Landing. Le sénateur Christmas considère qu’il s’agit d’un geste admirable de courage politique qui lui a rappelé un geste similaire posé il y a 30 ans jour pour jour, le 20 février, et qui est resté gravé dans sa mémoire à tout jamais.
Les années 1980 ont été marquées par des grandes difficultés en Nouvelle-Écosse, notamment pour les Mi’kmaqs. Certains événements ont donné lieu à des affrontements, des arrestations et des poursuites judiciaires et ont suscité énormément de colère dans les médias. À toutes fins pratiques, il n’y avait ni dialogue ni relation entre les autorités provinciales et la communauté mi’kmaq. Pour couronner le tout, le cas de Donald Marshall Jr., libéré de prison en 1982, faisait la manchette. Cet homme avait été injustement détenu dans un établissement pénitentiaire fédéral pendant 11 ans pour un meurtre qu’il n’avait pas commis.
Cette tragédie ne s’est toutefois pas terminée là. Lorsque son cas a été examiné par la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse, Donald Marshall Jr. s’est de nouveau fait reprocher d’être à l’origine de sa malchance. Cette affaire a déclenché un véritable tollé. Le gouvernement provincial s’est enfin résigné à lancer une enquête publique afin de déterminer les raisons pour lesquelles Marshall avait été condamné à tort. L’enquête a débuté en 1988 à Sydney, là où le meurtre avait été commis. Pendant un an et demi, l’enquête a permis de lever le voile sur le lien déplorable — ou plutôt sur l’absence d’un tel lien — entre la Nouvelle-Écosse et les Mi’kmaqs.
Finalement rendu public en janvier 1990, le rapport d’enquête a rejeté entièrement la faute sur l’ensemble du système de justice de la Nouvelle-Écosse. Il a conclu de façon catégorique que Donald Marshall Jr. avait été victime de racisme.
Alors que la situation était tendue au maximum, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a fait une chose impensable ou, à tout le moins, totalement inattendue : il a présenté des excuses. Il aurait pu le faire en publiant un communiqué ou en organisant une conférence de presse. Au lieu de cela, le procureur général de la Nouvelle-Écosse de l’époque s’est rendu à Sydney et à Membertou pour rencontrer en personne la famille de Donald Marshall Jr. et lui présenter des excuses.
Le sénateur Christmas était dans la salle ce jour-là et il a été marqué à jamais par une telle démonstration extraordinaire de courage politique de la part du procureur général de la Nouvelle-Écosse de l’époque, qui était nul autre que notre estimé collègue le sénateur Tom McInnis, qui est aussi un ami du sénateur Christmas.
Trente ans plus tard, le sénateur Christmas estime que le geste posé par Tom McInnis ce jour-là est l’une des manifestations les plus mémorables de courage politique qu’il lui a été donné de voir.
Et il remercie son honorable collègue de son humilité et de sa bienveillance. Merci, Wela’loq.