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Projet de loi sur le cadre visant à réduire la récidive

Troisième lecture

21 juin 2021


L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) [ - ]

Propose, au nom de la sénatrice Martin, que le projet de loi C-228, Loi établissant un cadre fédéral visant à réduire la récidive, soit lu pour la troisième fois.

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat)

Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui au sujet du projet de loi C-228, Loi établissant un cadre fédéral visant à réduire la récidive.

Ce projet de loi a été présenté à l’autre endroit par le député Richard Bragdon. Il établit un cadre raisonnable afin d’appuyer et d’aider ceux qui réintègrent la société après avoir purgé une peine dans un établissement fédéral. Comme l’a indiqué la sénatrice Martin, la marraine du projet de loi au Sénat, ce projet de loi a bénéficié d’un appui important à l’autre endroit.

Le projet de loi C-228 demande au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile d’élaborer et de mettre en œuvre un cadre fédéral visant à réduire la récidive. Ce cadre prévoit des mesures visant à mettre sur pied des projets pilotes et à élaborer des programmes normalisés et fondés sur des données probantes ayant comme objectif de réduire la récidive; à favoriser la réinsertion sociale grâce à l’accès à des ressources adéquates et permanentes, y compris des possibilités d’emploi qui appuient des initiatives à caractère confessionnel et communautaire axées sur la réinsertion sociale; à étudier et appliquer les pratiques exemplaires internationales liées à la réduction de la récidive; et à évaluer et améliorer les instruments et les procédures d’évaluation des risques pour s’attaquer aux préjugés raciaux et culturels et veiller à ce que toutes les personnes qui sont incarcérées aient accès à des programmes adaptés.

Ce projet de loi est important car, tôt ou tard, presque tous les délinquants détenus dans des pénitenciers fédéraux canadiens seront remis en liberté dans la collectivité. Nous devons nous assurer que le moment venu, ces détenus seront bien préparés et bien équipés pour effectuer la transition avec succès.

Je crois que lors de leur libération, les contrevenants ne sont animés que de bonnes intentions. Toutefois, pour atteindre leurs objectifs, des services pertinents doivent être mis à leur disposition, tant pendant l’incarcération qu’après le retour dans la collectivité. Ils ont besoin de possibilités d’emploi, autrement comment peuvent-ils se réinsérer dans la société sans retomber dans la criminalité, aussi nobles que soient leurs intentions? On ne saurait trop insister sur l’importance des programmes de formation.

Le projet de loi C-228 prévoit un cadre qui permettrait au ministre de la Sécurité publique de collaborer avec des partenaires, notamment des ONG, des organismes confessionnels et du secteur privé et des groupes autochtones, et d’unir leurs efforts dans une approche holistique pour réduire le risque de récidive. L’objectif de ce cadre fédéral s’inscrit dans le droit fil de l’engagement du gouvernement d’offrir des ressources pour la réinsertion, de soutenir les programmes communautaires, notamment les programmes de centres de justice, et de s’attaquer à la surreprésentation des Noirs et des Autochtones dans le système de justice criminelle. Le projet de loi respecte également les priorités que le gouvernement a énoncées dans le dernier discours du Trône. Il s’agit notamment de présenter une mesure législative et de faire des investissements pour remédier aux inégalités systémiques à toutes les étapes du système de justice criminelle, de la déjudiciarisation à la détermination de la peine et de la réinsertion au casier judiciaire. Le projet de loi C-228 offrirait une occasion privilégiée et donnerait un mandat global en vue d’une vaste collaboration pour s’attaquer au problème complexe de la récidive et, partant, renforcer la sécurité publique.

Dans son plus récent rapport, l’Enquêteur correctionnel a souligné le besoin de fournir des ressources supplémentaires pour les services correctionnels communautaires et il a soulevé des préoccupations au sujet du nombre insuffisant de places dans les espaces communautaires. Il a aussi indiqué que des personnes sont souvent libérées dans la collectivité sans carte d’assurance-maladie ou autre pièce d’identité officielle. La vérificatrice générale a signalé des lacunes dans les services de santé et de soutien au logement, et le secteur du bénévolat a réclamé un meilleur accès à la mise en liberté sous condition, aux activités de préparation et de planification de la mise en liberté, à l’emploi, au logement et aux ressources en santé, avec un soutien adapté aux populations carcérales féminines, autochtones âgées et noires du Canada. La Société John Howard du Canada a exprimé sont appui au projet de loi C-228, soulignant que le cadre devrait s’attaquer à l’itinérance, au chômage, aux conditions arbitraires et aux traitements limités en santé mentale après l’incarcération.

Malheureusement, le Canada est incapable à l’heure actuelle de produire des données nationales sur la récidive. Chaque administration et chaque secteur possède ses propres informations. La collecte et l’évaluation des données ne sont pas faites de façon uniforme, et les données ne sont pas intégrées non plus. La fonction publique travaille avec Statistique Canada sur un projet pluriannuel qui vise à lier les données sur la justice criminelle aux rapports sur les indicateurs nationaux. Le projet vise aussi à lier éventuellement les données sur la justice criminelle aux données socioéconomiques pour mieux saisir les résultats de la réinsertion sociale. Cette information contribuera énormément à la production de rapports sur les interventions concernant les politiques et les programmes fondés sur des données probantes.

Le gouvernement est déterminé à soutenir la réinsertion et la réadaptation des contrevenants de manière sécuritaire et à réduire le taux de récidive pour préserver la sécurité de nos communautés. Bien que nous ayons augmenté les dépenses communautaires de 10,8 % depuis 2015-2016, de plus amples efforts doivent et devraient être déployés pour protéger la sécurité de nos communautés et la vie des personnes qui essaient de recommencer à zéro. Le projet de loi C-228 contribuerait à y parvenir en offrant un niveau de coordination et de coopération entre tous les ordres de gouvernement et toutes les organisations qui œuvrent à réduire la récidive et à offrir de l’aide à ceux qui réintègrent la collectivité.

Il y a des collègues dans cette enceinte qui connaissent bien mieux que moi les difficultés et les obstacles de ceux qui doivent réapprendre à vivre en société après leur libération et pourquoi c’est parfois une véritable bataille pour eux. Le projet de loi C-228 offre un certain degré de collaboration qui constitue un pas dans la bonne direction pour coordonner les diverses mesures d’aide et obtenir l’information requise afin de déterminer la meilleure marche à suivre. Le gouvernement appuie ce projet de loi d’initiative parlementaire ainsi que la majorité des députés à l’autre endroit. J’appuie le projet de loi C-228 pour toutes les raisons qui ont été présentées et je demande aux collègues dans cette enceinte d’en faire autant.

L’honorable Kim Pate [ - ]

Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui au sujet du projet de loi C-228, qui porte sur l’établissement d’un cadre fédéral visant à réduire la récidive. Essentiellement, le projet de loi exhorte le gouvernement et le Service correctionnel du Canada à s’acquitter de ce qui leur incombe déjà légalement. En effet, selon l’article 3 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition :

Le système correctionnel vise à contribuer au maintien d’une société juste, vivant en paix et en sécurité [...] en [...] en aidant [...] à la réadaptation des [prisonniers] et à leur réinsertion sociale [...]

Le gouvernement et Service correctionnel Canada n’ont pas besoin d’une nouvelle mesure législative pour intervenir à cet égard. Les modifications proposées dans le projet de loi C-228 aurait pu être mises en œuvre il y a près de 30 ans lorsque la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition a été promulguée comme une nouvelle loi sur les droits de la personne comportant de nombreuses dispositions qui rendaient non seulement possibles, mais aussi obligatoires, le soutien à la réinsertion et l’accès à des appuis communautaires. Pendant des décennies, on n’a pas réussi à insuffler une vie à ces dispositions.

Ce sont les plus marginalisés — les femmes, les personnes noires et autochtones, et d’autres membres de communautés racisées, les personnes handicapées et celles qui vivent sous le seuil de la pauvreté — qui ont, de façon disproportionnée, fait les frais de cet échec à pleinement mettre en œuvre la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition conformément à son objectif législatif. Les gens marginalisés ont eu et ont toujours de la difficulté à obtenir du soutien sur le plan communautaire, social, économique et en santé, que ce soit avant, pendant ou après une peine d’emprisonnement.

En raison de la terminologie employée dans ce projet de loi, il vaut la peine de prendre le temps de réfléchir au message que nous risquons d’envoyer en employant des expressions comme « prévention de la récidive » ou « prévention du crime », pour ce qui est de désigner des questions de droits fondamentaux de la personne et de droits garantis par la Charte. Les recherches ont démontré à de multiples reprises que les personnes libérées de prison ont besoin de trois choses : un logement, une communauté capable de les aider et un gagne-pain. Il ne s’agit pas d’outils spéciaux pour prévenir le crime. Il s’agit plutôt des mêmes choses que nous voulons tous et sans lesquelles nous ne pourrions nous épanouir.

En l’absence d’un accès adéquat à de telles mesures d’aide, 80 % des femmes se trouvant dans les prisons canadiennes y ont été envoyées en tentant de se sortir de la pauvreté. Imaginez un instant d’essayer de survivre à l’aide des programmes d’assistance sociale provinciaux et territoriaux, qui procurent des ressources bien en deçà de tout seuil de la pauvreté, au point de vous rendre infiniment vulnérable à la criminalisation et de vous laisser sans aucun moyen légal de vous procurer les produits de première nécessité, comme la nourriture, les vêtements ou un logement pour vos enfants. Pour les personnes criminalisées, un casier judiciaire constitue trop souvent un obstacle supplémentaire à l’emploi, à l’éducation, au logement et à la contribution à la communauté.

Malgré les difficultés et les obstacles qui sont trop souvent créés et maintenus par certaines politiques en matière de droit pénal, les données gouvernementales indiquent que la majorité des personnes qui quittent les pénitenciers fédéraux n’y retournent jamais. Par ailleurs, des résultats de recherche indiquent clairement que, après avoir passé un certain nombre d’années dans la collectivité, les gens qui ont un casier judiciaire ne sont pas plus susceptibles que la population en général de commettre une infraction criminelle.

Dans les derniers mois, les conditions d’isolement horribles qui ont été imposées dans les pénitenciers fédéraux à cause de la COVID-19 ont créé de nouvelles raisons de réclamer une libération, et j’ai vu des femmes autochtones que le Service correctionnel du Canada avait désignées comme des personnes dangereuses posant un risque élevé s’épanouir dans la collectivité lorsqu’elles en ont eu la possibilité. Les membres du Service correctionnel qui étaient d’abord pour le moins sceptiques quant à leurs chances de libération ont fini non seulement par les appuyer, mais aussi par reconnaître que les problèmes ne venaient pas de ces femmes, mais plutôt du contexte raciste et sexiste ainsi que des outils d’évaluation que le Service correctionnel continue d’employer.

Le succès qu’un si grand nombre de ces personnes ont connu dans la collectivité, malgré un manque systémique de ressources et de programmes d’accès communautaire dans les pénitenciers, en dit long sur leur détermination à contribuer de manière positive à leur collectivité. Cependant, on ne devrait pas dédouaner pour autant un système qui a l’obligation juridique de veiller à leur réinsertion sociale.

Le projet de loi C-228 nous dit à juste titre que le statu quo est inacceptable. Cependant, il est axé de façon très étroite sur une seule partie de la solution. L’obligation du système correctionnel d’appuyer la réinsertion sociale commence dès l’arrivée d’un délinquant en prison. Le projet de loi C-228 se concentre sur la période qui précède immédiatement la libération d’un délinquant. Entre ces deux moments, il y a une foule d’occasions cruciales pour aider les gens à se réinsérer avec succès en améliorant l’accès aux soutiens communautaires et aux mesures de libération que nous ne pouvons pas nous permettre de manquer.

Dans son rapport sur le projet de loi C-228, le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense a émis une observation à cet effet et exhorté, de concert avec le projet de loi C-228, le gouvernement à examiner plus rigoureusement les options de soutien à la réinsertion sociale qui existent déjà dans la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, en particulier les articles 29, 81 et 84. Cela fait écho au rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne sur les Droits de la personne des personnes purgeant une peine de ressort fédéral ainsi qu’aux amendements du Sénat au projet de loi C-83.

Les articles 29, 81 et 84 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition créent des possibilités pour libérer des détenus et renforcer le soutien communautaire pendant la peine d’emprisonnement. Ils font partie de cette loi depuis sa création il y a plusieurs décennies, mais ils ont rarement été utilisés dans la pratique.

L’article 29 autorise le transfèrement d’une personne d’une prison à un hôpital provincial ou territorial afin de recevoir les services de santé et de santé mentale dont elle a besoin dans un milieu communautaire et non correctionnel.

L’article 81 permet de transférer des détenus d’un pénitencier fédéral vers une collectivité autochtone pour y purger leur peine. L’intention de la disposition était de promouvoir les droits inhérents des peuples autochtones à l’autodétermination pour ce qui est des questions de justice pénale et de remédier à la surreprésentation des peuples autochtones dans les prisons canadiennes en créant des solutions au sein de la communauté pour remplacer l’incarcération et le placement en établissement.

L’article 84 permet également la libération conditionnelle et d’autres formes de libération conditionnelle.

Ces possibilités de réinsertion ont été injustement et indûment circonscrites par les autorités et les politiques correctionnelles. Par exemple, les autorités pénitentiaires ont indiqué aux communautés autochtones qui cherchaient à aider des détenus à sortir de prison aux termes de l’article 81 que l’on attendait d’elles qu’elles construisent une structure d’accueil plus aimable, plus douce et plus adaptée, mais néanmoins semblable à une prison, alors que ce n’est pas exigé par la loi. Entre-temps, le nombre d’Autochtones dans les prisons canadiennes a continué d’augmenter de manière exponentielle et précipitée.

Une réadaptation et une réinsertion sociale significatives devront être appuyées par des mesures visant à favoriser la décolonisation, la décriminalisation et la désincarcération dans le système canadien de justice pénale. Il faut ainsi reconnaître et défendre les droits inhérents des peuples autochtones à l’autonomie gouvernementale, ce qui inclut la décolonisation des systèmes juridiques pour intégrer pleinement des approches communautaires adaptées à la culture. Il faut ainsi respecter les pratiques et les lois autochtones, et mettre en œuvre des programmes comme un revenu minimum garanti pour reconnaître et combler les inégalités systémiques et la marginalisation économique. Nous devrions peut-être même insister sur les accords de suspension des poursuites, un privilège que nous réservons en ce moment aux sociétés. Imaginons à quel point il y aurait moins de gens judiciarisés et emprisonnés si nous mettions en œuvre les accords de suspension des poursuites pour les particuliers, et non seulement pour les sociétés. Dans les affaires qui sont actuellement devant les tribunaux, ce changement accorderait aux procureurs et aux juges le pouvoir discrétionnaire d’envisager d’autres voies que les poursuites et l’incarcération.

Le vécu des Autochtones et celui d’autres groupes qui ont été victimes de racisme systémique pourraient aider à éclairer ces approches. Nous pourrions aussi prévoir des mesures comme un mécanisme de surveillance judiciaire et de recours en cas de décisions illégales ou injustes du système correctionnel. Au bout du compte, changer la culture du système correctionnel pour respecter les droits de la personne est la façon la plus susceptible d’accroître la réinsertion sociale réussie de tous.

Le projet de loi C-228 est un petit pas redondant à un moment où il faut désespérément en faire plus. Continuons de travailler ensemble dans notre recherche de la justice pour tous.

Merci. Meegwetch.

L’honorable Patricia Bovey [ - ]

Honorables sénateurs et sénatrices, je prends la parole à partir de Winnipeg, territoire du Traité no 1, les terres traditionnelles des Anishnabeg, des Cris, des Oji-Cris, des Dénés et des Dakotas, lieu de naissance de la nation métisse et cœur de la patrie de la nation métisse.

J’appuie le projet de loi C-228, Loi établissant un cadre fédéral visant à réduire la récidive.

J’attire votre attention sur l’alinéa 2(2)a) du projet de loi C-228, qui précise que le cadre doit « [...] mettre sur pied des projets pilotes et élaborer des programmes normalisés et fondés sur des données probantes ayant comme objectif de réduire la récidive [...] ».

Je veux aussi signaler que l’alinéa 2(2)e) prévoit que le cadre doit inclure des mesures visant à :

[…] évaluer et améliorer les instruments et les procédures d’évaluation des risques pour s’attaquer aux préjugés raciaux et culturels et veiller à ce que toutes les personnes qui sont incarcérées aient accès à des programmes adaptés qui permettent de réduire la récidive.

Toutes les organisations à but non lucratif et les organisations autochtones devraient recevoir de l’aide afin de pouvoir mettre en œuvre des programmes ayant une signification spirituelle et culturelle particulière pour les personnes concernées.

Vous avez entendu le mantra de mon regretté époux, soit que « nous nous portons tous mieux lorsque nous sommes tous prospères ». Ce mantra et mon travail dans le milieu des arts m’incitent à parler du projet de loi C-228. Je le fais en l’honneur de la Journée nationale des peuples autochtones et du travail et des cultures remarquables de tous les artistes. Sénatrice McCallum, le fait que vous portez sur vous une plume d’aigle est important. Je vous en remercie. Votre honnêteté et votre leadership culturel doivent être applaudis. Ils revêtent une grande importance tant pour les Autochtones que pour les non-Autochtones.

Pourquoi est-ce que je parle du projet de loi C-228? Parce que je crois que nous avons la responsabilité d’aller au-delà des raisons de ces incarcérations, de permettre aux gens de découvrir leur patrimoine créatif et de développer des outils qui encouragent une interaction communautaire positive et une vie saine et significative.

Les programmes d’arts en prison et ceux où des artistes professionnels dispensent une formation produisent des résultats positifs et réduisent les taux de récidive et de criminalité.

Les programmes d’éducation dans les prisons préparent les détenus à la vie en société et les dotent des compétences nécessaires pour prévenir la récidive. Nous savons que de tels programmes ont déjà donné de bons résultats à l’échelle nationale et internationale. Je crois que revitaliser des anciens programmes d’artistes en résidence dans nos prisons — centres de détention fédéraux, provinciaux, pour femmes, pour hommes et pour jeunes — contribuerait au mieux-être de notre société.

Pendant des années, j’ai suivi les programmes d’arts ayant pour but de prévenir la criminalité et de réduire la récidive. Certains programmes sont élaborés pour les adultes; d’autres pour les jeunes.

Au cours de mes nombreuses années de recherche sur les programmes parascolaires communautaires, j’ai pu voir des résultats vraiment encourageants. Un programme d’avant-garde a été mis sur pied à Fort Myers, Floride. Dans le rapport Coming Up Taller publié en 1996, il est fait état des résultats remarquables du programme après à peine quelques années d’existence :

Le service de police de Fort Myers enregistre une baisse de 28 % du nombre d’arrestations de mineurs depuis la mise en œuvre du programme STARS qui a été primé [...]

Ce programme offre des activités récréatives et artistiques.

J. Weitz, du President’s Committee on the Arts and the Humanities, a souligné dans le même rapport :

La voie des arts, particulièrement le théâtre, constitue l’un des moyens les plus naturels et les plus efficaces pour aider les membres de bandes criminelles. De nouvelles valeurs émergent uniquement de nouvelles expériences, et les arts offrent un laboratoire unique où ils peuvent explorer en toute sécurité la vérité et les possibilités. Il est primordial de valider la sécurité émotionnelle.

Plus avant dans le rapport, on peut lire que le fait que les programmes artistiques permettent...

[...] aux jeunes d’accepter des responsabilités explique en partie l’efficacité de ces initiatives. “Les jeunes n’apprenent pas pour satisfaire une entité externe. Ils sont en charge du projet.”

Ces projets sont présentés à la collectivité, qui peut les voir et échanger [...] les jeunes sont responsables de leur succès.

D’autres publications tirent des conclusions similaires. Je songe notamment au rapport de l’organisme Youth on Youth qui conclut que l’art :

[...] permet aux jeunes de s’exprimer, de créer leur propre identité au lieu qu’elle soit modelée par de grandes institutions [...] Aucun résultat particulier n’est attendu, et rien n’est bien ou mal.

C’est particulièrement important pour les jeunes à risque qui sont marginalisés d’emblée.

Je devrais maintenant dire que je préfère parler non pas de jeunes à risque, mais de jeunes au potentiel encore inexploité.

Selon la vaste étude intitulée Making the Case for Youth Recreation menée en 2003 par la Dre Gina Browne, il ressort principalement que les programmes culturels et récréatifs peuvent réduire le coût des services sociaux et des services de police, ce qui tend à indiquer que les services faciles d’accès semblent s’autofinancer grâce à l’utilisation réduite des services sociaux et des services de santé comme la pédopsychologie, le travail social, les services de police et les services de probation. « On évalue l’économie à 500 $ par famille, sans compter que le nombre d’assistés sociaux est réduit de moitié! »

Une proposition de programme d’arts dans un centre de détention pour jeunes de Winnipeg a malheureusement été rejetée il y a quelques années. On m’a dit que si les jeunes créaient une œuvre artistique ensemble, cela pourrait « encourager des comportements négatifs ». Toutefois, le chef spirituel des Premières Nations de l’époque dans ce centre a dit que la création artistique était essentielle pour ces jeunes. Il m’a montré des tiroirs remplis d’œuvres que des jeunes avaient créées, mais qui n’avaient jamais été exposées. J’espère que l’on comprendra la grande importance de ces programmes. Dans ce cas précis, j’avais en coulisse des donateurs privés prêts à assurer le financement.

La Graffiti Gallery de Winnipeg est une source d’inspiration. Elle a été fondée en 1998 par Steve Wilson, qui n’est pas un artiste, mais un ancien agent de détention de l’Établissement de Stony Mountain qui détient un diplôme en travail social. Il savait qu’il y avait une meilleure façon de s’occuper des jeunes en difficulté; alors, grâce au pouvoir de la créativité positive, il a fondé un endroit unique à Winnipeg : un centre d’arts communautaire sans but lucratif pour les jeunes qui a pour but d’accroître le bien-être culturel de la collectivité et qui se concentre sur les programmes artistiques et les peintures murales ayant un thème juridique.

Les jeunes artistes se réunissent, travaillent, font de la recherche, échangent des idées, acquièrent des compétences et exposent leurs œuvres dans un climat propice, où les gens voient la valeur de leur travail. Il s’agit d’un outil puissant de développement communautaire, de changement social et de croissance personnelle. Sur le site Web des murales de Winnipeg, on commente le travail de cet ancien agent correctionnel :

Bien des jeunes qu’il rencontre ont de graves problèmes de confiance, surtout à l’égard des adultes ou des personnes qui sont dans une certaine position d’autorité. Certains d’entre eux ont peut-être eu des démêlés avec la justice ou ont été dépeints par d’autres comme des personnes qui s’en sont pris à leur collectivité.

J’ai parlé avec M. Wilson la semaine dernière. Il a dit ceci :

[…] Ces jeunes s’en prennent à la collectivité parce que c’est tout ce qu’ils savent faire. C’est parce que, à un très jeune âge, ils se faisaient attaquer par leurs concitoyens. […] Quand ils deviennent un peu plus âgés, il n’est donc pas surprenant qu’ils commencent à avoir des problèmes. Premièrement, ils tentent de s’éloigner des personnes qui les maltraitent et, deuxièmement, ils cherchent à établir des liens qui peuvent durer.

La Graffiti Gallery a travaillé avec diligence pour :

[…] rompre ce cycle et enseigner quelques techniques de peinture murale à des jeunes possédant déjà une certaine habileté. […] Les peintures murales sont l’une des meilleures façons de réintégrer dans la société des jeunes adultes et des jeunes à risque. […] Une telle expérience leur procure un sentiment d’accomplissement et leur donne confiance en eux-mêmes. De plus, les jeunes doivent s’affranchir des influences néfastes dans leur vie et se reprendre en main pour réaliser ce travail qui laissera un héritage durable dans le voisinage.

Les progrès de ces jeunes sont remarquables :

[Ils] proposent d’offrir quelque chose en retour à leur communauté pour l’aider à guérir par l’entremise d’une forme d’art public. Au final, un jeune qui était hostile à sa communauté est de retour pour peindre une fresque qui embellit son environnement tout en donnant à l’artiste un sentiment de fierté retrouvée [...] C’est une expérience positive tant pour l’artiste que pour la communauté, et cela peut engendrer d’autres changements.

Exposer leurs œuvres à la Graffiti Gallery leur permettent d’améliorer leur confiance en eux et leurs liens avec la communauté. Les jeunes artistes l’ont constaté et m’ont dit :

Eh bien, je peux faire autre chose à part enfreindre la loi; je peux attirer l’attention de manière positive avec mon art.

Depuis lors, un certain nombre d’autres programmes ont vu le jour, la plupart étant dirigés par des diplômés de l’Université du Manitoba. Ils promeuvent la compréhension culturelle par des vecteurs comme la broderie perlée, les fresques, les tambours et la peinture auprès de ces jeunes gens, et il s’avère que cela réduit les taux d’incarcération et de récidive.

J’ai récemment participé à un certain nombre de discussions concernant des projets d’exposition d’œuvres d’art créées par des détenus, et j’espère qu’ils obtiendront l’aide nécessaire. De telles expositions permettent à l’artiste de mettre ses idées à l’épreuve, de gagner de la confiance en soi et de donner au public l’occasion de comprendre les problèmes et les points de vue des détenus, de l’intérieur comme de l’extérieur, ainsi que leurs situations personnelles. Nous avons besoin de ces voix du changement. Nous devons comprendre que les projets d’art dans les espaces publics peuvent amener les personnes et les communautés à changer. C’est particulièrement important maintenant.

Lors de l’élaboration de la politique sur l’art public de Winnipeg, un policier de Winnipeg m’a appelé. Il voulait se joindre au comité de l’art public, non pas parce qu’il s’y connaissait en art — il a dit qu’il ne s’y connaissait pas — mais parce qu’il savait que l’art public permet de réduire la criminalité puisqu’il contribue à la fierté civique et que la plupart des gens respectent le travail créatif des autres. Il a contribué de manière significative à l’élaboration de la politique et, par la suite, il a continué d’être utile comme membre du comité de l’art public.

Les auteurs d’une étude américaine portant sur un programme de réinsertion réduisant la récidive en prison ont tiré des conclusions intéressantes :

Lorsqu’un organisme à but non lucratif du domaine des arts affirme avoir mis au point un programme de réinsertion des prisonniers qui réduit le taux de récidive à moins de 5 %, les experts en justice pénale se montrent incrédules. C’est pourtant ce qu’a fait Rehabilitation Through the Arts (RTA), un organisme à but non lucratif de l’État de New York. Son programme a permis d’améliorer le moral et la sécurité dans les prisons, d’amener la population carcérale à se comporter de manière plus respectueuse et à travailler de manière plus coopérative et d’aider les personnes incarcérées à acquérir les compétences nécessaires pour réussir leur réinsertion.

Le Department of Corrections and Community Supervision de l’État de New York a publié de manière indépendante des recherches montrant « [...] que les participants au programme commettaient moins d’infractions et qu’un grand nombre d’entre eux reprenaient leurs études. »

En 2017, le Bridge Prison Ministry de Brampton a exposé des œuvres d’art réalisées par des condamnés, notamment d’anciens condamnés. Les œuvres que j’ai vues sont impressionnantes, vraiment émouvantes, et traduisent une profonde souffrance, mais incarnent aussi l’espoir et l’humanité. Chers collègues, lorsque j’étais directeur de la galerie d’art du Grand Victoria, les prisonniers d’Albert Head nous ont aidés à construire des scènes et certaines installations. Certains prisonniers ont assisté au vernissage d’une exposition dans laquelle ils étaient les sujets d’un portraitiste vedette. Le même soir, nous avons inauguré une exposition de Jack Bush, un grand artiste canadien. Le président du conseil d’administration et le PDG de la banque commanditaire étaient présents. Un tambour d’harmonie avait été installé et, tout au long de la soirée, des cadres d’entreprise ont joué du tambour sans savoir qu’ils jouaient en compagnie de prisonniers, dont certains avaient été incarcérés pour vol de banque.

En terminant, je voudrais citer un article du Tyee au sujet du programme de l’Université de la Colombie-Britannique où des universitaires autochtones faisaient de la recherche dans le domaine des arts et de la culture pour des détenus. Ils remettaient des œuvres d’art et des trousses pour la tenue d’un journal aux Autochtones des prisons et des maisons de transition afin « [...] d’alléger l’impact combiné qu’ont l’incarcération et la pandémie sur la santé mentale », ce qui montre :

[...] l’importance des relations entre les communautés des Premières Nations et les détenus autochtones face à la surreprésentation de ces derniers dans les prisons de la Colombie-Britannique.

En décembre dernier, Emily van der Meulen et Jackie Omstead ont publié un rapport concernant une refonte des programmes d’arts dans les prisons. Le rapport affirmait ceci :

L’offre de programmes d’arts et d’autres programmes dans les prisons canadiennes est au mieux limitée. Même l’enquêteur correctionnel, l’ombudsman des prisonniers, s’est fait critique quant à la quantité limitée d’options intéressantes pour les prisonniers. Les programmes actuels sont surtout fondés sur la logique de la réadaptation et ont pour objectif de réduire le récidivisme.

Le travail lié à la production de ce rapport comprenait une évaluation d’un programme en arts de neuf semaines dans une prison pour femmes, programme qui a été couronné de succès.

Chers collègues, il y a beaucoup de travail à faire. Je suis pour les programmes dans les prisons et les programmes communautaires qui visent à réduire le récidivisme et à bâtir l’estime de soi, la confiance en soi et les compétences. Au fil des ans, de magnifiques œuvres d’art ont été produites dans les prisons et l’art peut contribuer à empêcher la criminalité. Faisons en sorte que le talent créatif soit utilisé à des fins constructives. Ces programmes sont essentiels, ils portent leurs fruits et ont de vastes retombées. Par conséquent, j’appuie ce projet de loi. Merci.

Son Honneur le Président [ - ]

Sénatrice Bovey, le sénateur Dagenais souhaite vous poser une question. Accepteriez-vous d’y répondre?

La sénatrice Bovey [ - ]

Oui, si j’ai assez de temps.

L’honorable Jean-Guy Dagenais [ - ]

Sénatrice Bovey, vous savez comme moi que, depuis un certain temps, il y a une augmentation des féminicides et que l’on fait tout pour empêcher l’augmentation de ces féminicides. Malheureusement, on sait qu’une majorité de ces féminicides est le fait de récidivistes. Je pense à ce qui s’est passé à Sainte-Foy, l’année dernière; je pense aussi à cette femme qui a été poignardée dans le cou, rue Monkland à Montréal, par un récidiviste qui venait de sortir de prison. Je songe également à M. André Livernoche, dont le fils a été assassiné par un prédateur sexuel qui venait de sortir de prison.

Que dit-on à ces familles quand on souhaite appuyer un projet de loi qui permet la réhabilitation des meurtriers, et ce, surtout maintenant, alors qu’il est impossible de nier qu’il y a une augmentation tragique des féminicides, et que ceux-ci sont souvent le fait de gens qui ont eu des démêlés avec la justice?

Que dit-on à ces familles?

Son Honneur le Président [ - ]

Sénatrice Bovey, vous n’avez que 40 secondes pour répondre à la question.

La sénatrice Bovey [ - ]

Je vous remercie de votre question. C’est une grande question et, en toute honnêteté, je ne pense pas que je puisse vraiment y répondre dans le temps de parole qu’il me reste. Je me contenterai de souligner ce que Steve Wilson m’a souvent dit : beaucoup de ces personnes qui ont pour la première fois des démêlés avec la justice le font en raison de l’éducation qu’elles ont reçue ou qu’elles n’ont pas reçue et des leçons qu’elles ont apprises ou tirées pendant leur jeunesse. C’est pourquoi ces programmes avec lesquels il travaille ont connu tant de succès. Je pense qu’il nous en faut davantage.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) [ - ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-228, Loi établissant un cadre fédéral visant à réduire la récidive.

Je tiens encore une fois à saluer le parrain du projet de loi, le député Richard Bragdon. Je le remercie d’avoir consacré des années à aider les autres et d’avoir présenté ce projet de loi pour réduire la récidive partout au Canada.

Je souligne également la contribution des députés au comité et leur vaste soutien du projet de loi.

Je félicite la présidente du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, la sénatrice Boniface, le vice-président le sénateur Boisvenu, la sénatrice Bovey pour ses observations et la sénatrice Pate, qui milite pour améliorer le sort des personnes dans le milieu carcéral et à l’extérieur de celui-ci. Nous l’avons entendue parler de ce sujet à maintes reprises. Je les remercie de leur leadership et de leur travail pour permettre un examen efficient et efficace de ce projet de loi au comité.

Je veux aussi remercier mes collègues et membres du comité des questions réfléchies qu’ils ont posées aux témoins et de leurs observations à l’étape de l’étude article par article. Finalement, je remercie le sénateur Jim Munson, le porte-parole bienveillant pour ce projet de loi, de son soutien et de son dévouement inébranlable afin de venir en aide à tant de gens.

Devant le comité sénatorial, le parrain du projet de loi, le député Richard Bragdon, a énoncé l’intention du projet de loi C-228 en ces termes :

[Le projet de loi vise] à résoudre le phénomène persistant de la porte tournante dans notre système carcéral et à mettre fin à ce cycle dangereux dans lequel des gens récidivent constamment. Un changement sociétal durable ne peut être accompli que si nous travaillons dans différents secteurs pour trouver des solutions significatives.

En comité, les témoins ont abondé dans le même sens et se sont en général montrés très favorables au projet de loi. Je me permets d’en citer quelques-uns.

Carmen Long, directrice générale, direction des programmes et réinsertion sociale des délinquants à Service correctionnel Canada, a dit :

[...] le Service correctionnel du Canada met vraiment l’accent sur la réinsertion sociale en toute sécurité des délinquants. Nous adoptons un certain nombre d’approches différentes pour gérer cela [...] lorsqu’on enseigne aux délinquants comment gérer ces facteurs, ils sont mieux en mesure de réussir leur réinsertion sociale.

L’honorable Graydon Nicholas, titulaire de la chaire dotée en études autochtones à l’Université St. Thomas et ancien lieutenant-gouverneur du Nouveau-Brunswick, a dit :

[...] de nombreuses études ont été réalisées pour recommander des changements fondamentaux au système de justice pénale, mais pas assez. Je tiens à féliciter le député Richard Bragdon et les autres députés qui ont appuyé cet important projet de loi.

Je vous en demande tout autant, c’est-à-dire votre contribution positive et votre appui au projet de loi C-228.

Catherine Latimer, directrice générale de la Société John Howard du Canada, a dit :

Nous appuyons avec enthousiasme le projet de loi C-228 […] Ce projet de loi nous donne une véritable occasion de travailler ensemble et de regrouper les pratiques exemplaires qui rendront nos collectivités plus sécuritaires.

Enfin, Franca Cortoni, professeure de psychologie criminelle de l’École de criminologie de l’Université de Montréal, a dit ceci :

Des systèmes communautaires qui soutiennent les délinquants dans leurs efforts de réintégration sont l’un des éléments qui se sont avérés efficaces pour réduire la récidive. C’est dans ce contexte que j’appuie pleinement le projet de loi C-228.

Honorables sénateurs, comme l’a déclaré le parrain du projet de loi, les témoins ont fait écho au fait que des efforts sont déployés et qu’il existe de bons programmes. Par conséquent, nous devons exploiter et coordonner toutes les bonnes mesures déployées et combler les lacunes. Le cadre national, tel que proposé dans le projet de loi C-228, est nécessaire pour aller de l’avant. Pour que le cadre soit un succès, il est essentiel que les gouvernements et les groupes de la société civile puissent travailler en collaboration sur sa mise en œuvre. Nous devons réduire le taux de récidivisme en aidant les délinquants à se réintégrer dans la collectivité, en aidant leur famille et en aidant la collectivité dont ils feront partie pour les années à venir.

Honorables sénateurs, j’espère que vous convenez de l’importance du projet de loi et je vous demande de l’appuyer à l’étape de la troisième lecture.

Son Honneur le Président [ - ]

Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Son Honneur le Président [ - ]

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

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