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Affaires juridiques et constitutionnelles

Motion tendant à autoriser le comité à étudier certaines questions liées à l’ancienne ministre de la Justice et procureure générale du Canada et à inviter des témoins--Recours au Règlement

2 avril 2019


L’honorable Donald Neil Plett [ + ]

Conformément au préavis donné le 21 mars 2019, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, les allégations graves et troublantes voulant que des personnes au sein du cabinet du premier ministre aient tenté de faire pression sur l’ancienne ministre de la Justice et procureure générale du Canada, l’honorable Jody Wilson-Raybould, C.P., députée, et d’entraver son indépendance, pouvant ainsi porter atteinte à l’intégrité de l’administration de la justice;

Que, dans le cadre de cette étude, et sans limiter le droit du comité d’inviter d’autres témoins s’il le juge opportun, le comité invite l’honorable Jody Wilson-Raybould, C.P., députée;

Que le comité soumette son rapport final au plus tard le 15 juin 2019;

Que le comité conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.

— Honorables sénateurs, j’aimerais dire quelques mots au sujet de ma motion. La leader adjointe me dit qu’il faut d’abord que je propose la motion. Avant que vous me réprimandiez, Votre Honneur, je propose la motion.

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat)

J’invoque le Règlement au sujet de cette motion, Votre Honneur, car à mon avis, elle est irrecevable. Je m’explique.

Comme vous le savez, honorables sénateurs, une motion à peu près semblable est déjà inscrite au Feuilleton. En février, le sénateur Smith a présenté la motion no 435, qui a fait l’objet d’un débat animé et qui attend présentement au Feuilleton que la présidence rende une décision à son sujet. La motion no 470 étant sensiblement la même que la motion no 435, les deux ne peuvent pas être inscrites au Feuilleton en même temps. Dans la mesure où les deux motions sont à peu près identiques et afin de préserver l’efficacité des délibérations, d’affirmer le droit qu’a le Sénat de gérer ses travaux de manière ordonnée et d’empêcher qu’on lui fasse perdre son temps, la motion no 470 ne peut être jugée recevable. Le simple gros bon sens nous dicte qu’on ne peut pas inonder le Feuilleton de motions à peu près identiques et poursuivant le même objectif. Si la motion no 470 était jugée recevable, il serait alors possible de présenter des centaines de motions de nature sensiblement similaire.

Au-delà des arguments relevant du bon sens, la décision que je cherche à obtenir de la présidence sur ce recours au Règlement s’appuie sur d’anciens principes parlementaires, les autorités en matière de procédure et les précédents pertinents les plus récents. Selon la règle interdisant d’anticiper qui s’applique aux Parlements suivant le modèle de Westminster, on ne peut pas présenter une motion qui porte sur un sujet figurant déjà au Feuilleton pour faire l’objet de plus amples discussions.

L’esprit de la règle interdisant d’anticiper se reflète explicitement dans deux dispositions du Règlement du Sénat. Selon l’article 4-2(5)b), une déclaration de sénateur ne doit pas anticiper un point inscrit à l’ordre du jour. Aussi, selon l’article 5-2, une interpellation ne doit pas se rapporter à un projet de loi ou à une autre affaire inscrits à l’ordre du jour.

La question à l’étude — une motion qui anticipe une autre motion figurant déjà au Feuilleton pour faire l’objet de plus amples discussions — n’est pas couverte explicitement dans le libellé du Règlement du Sénat. Cependant, l’analyse ne s’arrête pas là. L’une des règles d’or du Règlement du Sénat, la toute première de l’ouvrage, établit le principe encadrant la résolution des cas non prévus par le Règlement, c’est-à-dire les cas qui ne sont pas couverts par les règles codifiées.

L’article 1-1(2) se lit comme suit :

Dans les cas non prévus par le Règlement, les pratiques du Sénat, de ses comités et de la Chambre des communes s’appliquent avec les adaptations nécessaires. En outre, les pratiques d’autres assemblées semblables peuvent, au besoin, être utilisées.

Ainsi, lorsqu’une question liée à la procédure n’est pas abordée dans le Règlement du Sénat, les règles, les pratiques et les ouvrages de procédures de l’autre endroit et d’autres assemblées semblables, notamment d’autres assemblées dans la tradition de Westminster, peuvent être utilisés au besoin. Il nous revient donc d’aller voir au-delà du Sénat, à l’autre endroit ou dans d’autres organismes parlementaires.

Si on regarde ailleurs qu’à la Chambre des communes du Canada un instant, il convient de noter que l’interdiction d’anticiper est répandue dans les Parlements issus de la tradition de Westminster, notamment au Royaume-Uni, en Nouvelle-Zélande, en Australie et en Inde. Par exemple, au Royaume-Uni, l’article 28 du Règlement prévoit que l’anticipation est un motif valable pour juger un article à l’ordre du jour irrecevable. Il se lit comme suit :

Pour décider de la recevabilité d’un débat au motif d’anticipation, le Président examinera la probabilité que le sujet soit soulevé à la Chambre dans un délai raisonnable.

En Nouvelle-Zélande, l’article 110 interdit aux députés d’anticiper les discussions concernant les articles à l’ordre du jour.

En Inde, les travaux de la Chambre basse, la Lok Sabha, sont également régis par ce principe. L’article 343 du Règlement de la Lok Sabha prévoit ce qui suit :

Aucun député ne doit anticiper la discussion sur une question dont il a été donné préavis, à condition que, lorsqu’il décide s’il doit refuser ou non la discussion pour cause d’anticipation, le Président examine la probabilité que cette question soit soulevée à la Chambre dans un délai raisonnable.

Plus près de nous, à la page 161 de l’ouvrage Jurisprudence parlementaire de Beauchesne, 6e édition, on explique ceci :

[…] on ne peut aborder une question à l’avance si la démarche prévue est plus opportune que la nouvelle démarche proposée.

Le Beauchesne dit aussi ceci :

Lorsqu’il juge s’il y a lieu d’interrompre un débat parce qu’il anticipe sur une autre affaire inscrite au Feuilleton, le président doit tenir compte de la probabilité que la Chambre soit saisie dans un délai raisonnable de l’objet du débat anticipé.

La deuxième édition de l’ouvrage La procédure et les usages de la Chambre des communes de O’Brien et Bosc, publié en 2009, fournit des éclaircissements sur le but et l’application de la règle interdisant d’anticiper. J’en cite un extrait :

La règle découle du principe qui interdit de décider deux fois de la même question dans la même session.

L’ouvrage précise que la règle « ne s’applique pas aux motions ou projets de loi similaires ou identiques qui sont inscrits au Feuilleton des avis avant d’être mis en délibération. »

Autrement dit, le fait que deux motions ou projets de loi semblables figurent au Feuilleton ne signifie pas que la règle interdisant d’anticiper s’applique. Toutefois, la règle s’applique si l’une des deux a été proposée en cours de débat.

L’ouvrage d’O’Brien et Bosc précise bien que la règle interdisant d’anticiper :

[...] entre en jeu uniquement lorsqu’on examine l’une de deux motions similaires inscrites au Feuilleton. Par exemple, deux projets de loi portant sur le même sujet peuvent être inscrits au Feuilleton, mais un seul sera débattu [...]

L’ouvrage d’O’Brien et Bosc continue ainsi :

On peut soulever une objection lorsque la présidence propose la seconde motion dans la mesure où la première a déjà été proposée à la Chambre et est devenue un point à l’Ordre du jour.

C’est exactement le cas présentement, puisque la motion en substance identique du sénateur Smith figure à l’ordre du jour et porte le no 435 dans le Feuilleton.

Je reconnais que la règle interdisant d’anticiper est rarement mise en cause et qu’elle a rarement été invoquée au Sénat du Canada. À ma connaissance, il n’y a jamais eu de décision rendue au Sénat sur pareille question dans des circonstances semblables à celle qui nous occupe. Cela montre bien la nature extraordinaire et, à mon avis, inappropriée de la stratégie que cherche à employer l’opposition au moyen de cette motion.

Toutefois, même si la règle interdisant d’anticiper n’a que rarement été invoquée au Sénat, son existence a été reconnue dans des décisions rendues par d’anciens Présidents du Sénat. La décision la plus claire et la plus pertinente à ce sujet a été rendue par le Président Molgat en 2000 concernant les débats houleux qui ont eu lieu au Sénat à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi C-20, la loi sur la clarté. On avait alors invoqué le Règlement pour s’opposer à la présentation d’une motion visant à créer un comité spécial chargé d’étudier le projet de loi C-20 au motif que cette motion anticipait le résultat du vote sur la motion de deuxième lecture du projet de loi.

Le Président Molgat a décrété que la motion était recevable, mais, bien qu’il ait refusé d’appliquer la règle dans ce cas précis, il a dit très clairement que la règle interdisant d’anticiper est un principe essentiel qui s’applique bel et bien au Sénat et que le rappel au Règlement aurait été fondé si les deux motions avaient été semblables quant au fond.

Voici ce qu’a déclaré le Président Molgat :

[...] la règle interdisant d’anticiper n’est pas expressément énoncée dans le Règlement du Sénat ni celui de l’autre endroit, même si elle constitue un principe essentiel de nos usages. Beauchesne signale, aux commentaires 512(1) et (2) de sa Jurisprudence parlementaire, à la page 161 de la 6e édition, que l’interdiction d’anticiper découle du même principe que l’interdiction de soulever deux fois « la même question » au cours d’une session.

Il a ajouté ensuite :

Je serais disposé à accepter cet argument si on pouvait me prouver que les deux questions sont identiques ou même semblables quant au fond, mais ce n’est pas le cas. La motion portant deuxième lecture du projet de loi C-20 implique une décision sur le principe de la mesure et sur la question de savoir si le projet de loi justifie un examen plus approfondi de la part du Sénat. La motion portant création d’un comité spécial chargé d’examiner le projet de loi C-20 ne porte pas directement sur le principe ou la teneur du projet de loi, mais vise plutôt à prévoir une solution de rechange et la possibilité de déférer le projet de loi à un autre type de comité. Ces deux motions ne s’équivalent pas quant au fond, et la règle interdisant d’anticiper ne s’applique pas à leur étude.

Étant donné que les motions associées à la Loi sur la clarté étaient différentes de nature, l’une visant la deuxième lecture du projet de loi et l’autre, la création d’un comité spécial, le Président Molgat avait décidé de ne pas appliquer la règle interdisant d’anticiper. À l’inverse toutefois, je postule que l’on peut faire une distinction dans le cas qui nous occupe. Les motions nos 435 et 470 sont les mêmes en substance et la règle interdisant d’anticiper doit opérer pour disqualifier la motion no 470, notamment pour éviter des résultats absurdes et inefficaces.

D’aucuns diront que la motion no 470 est recevable parce qu’elle n’est pas identique à la motion no 435. L’argument n’est pas convaincant. Il n’est pas nécessaire que les deux motions soient identiques. La norme n’est pas celle de la copie conforme. Il faut plutôt essentiellement déterminer si elles sont substantiellement semblables.

L’objet essentiel de la règle interdisant d’anticiper est de soutenir le droit de la Chambre de gérer ses activités de façon ordonnée et d’éviter de gaspiller du temps. Par exemple, il y a un lien entre la règle interdisant d’anticiper et la même question, l’objet étant qu’une décision doit être prise sur un sujet donné. Il est évident que les motions nos 470 et 435 sont substantiellement semblables. La motion no 435 vise exactement les mêmes objectifs que la nouvelle motion, à savoir, et je vais maintenant citer des extraits des deux motions :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, les allégations graves et troublantes voulant que des personnes au sein du cabinet du premier ministre aient tenté de faire pression sur l’ancienne ministre de la Justice et procureure générale du Canada, l’honorable Jody Wilson-Raybould, C.P., députée, et d’entraver son indépendance, pouvant ainsi porter atteinte à l’intégrité de l’administration de la justice [...]

Si l’une de ces deux motions était adoptée, l’autre ne servirait plus à rien. Si l’une des deux était rejetée, l’autre deviendrait irrecevable selon la règle de la question résolue. C’est parce que les ordres de renvoi des deux motions qui visent à entreprendre cette étude sont identiques. De plus, dans les deux cas, la question serait renvoyée au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. La motion no 435 vise essentiellement à autoriser le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles à entreprendre une étude sur la question énoncée, qui est la même que dans la motion no 470.

La règle interdisant d’anticiper ne servirait à rien s’il était possible de la contourner en modifiant légèrement la liste des témoins ou en déplaçant la date du dépôt du rapport de quelques jours. Si la motion no 470 est jugée recevable, le sénateur Plett et ses collègues pourraient alors présenter des dizaines de motions très similaires, en changeant simplement la date du dépôt du rapport ou la combinaison des témoins. Le Sénat dans son ensemble devrait ensuite avoir un débat sur chacune des motions tous les jours de séance, sans égard au principe selon lequel les sénateurs n’ont qu’une occasion de prendre la parole sur un sujet donné et en dépit du fait qu’elles sont essentiellement la même proposition.

Devrait-on permettre au sénateur Housakos de présenter une troisième motion qui changerait la date du dépôt du rapport au 7 juin? Le sénateur Carignan devrait-il pouvoir présenter une quatrième motion pour ajouter l’ancienne ministre Philpott à la liste des témoins? Devrait-on autoriser la sénatrice Martin à présenter une cinquième motion qui repousserait simplement la date du dépôt du rapport au 21 juin? Dans un tel scénario, le Sénat deviendrait rapidement un théâtre absurde. C’est exactement ce que la règle interdisant d’anticiper cherche à empêcher.

De plus, si cette motion était déclarée irrecevable, le sénateur Plett ne perdrait pas de son droit sur le plan de la procédure. Le moyen approprié de modifier la date prévue dans la motion no 435 ou de retirer certains noms de la liste de témoins serait une motion d’amendement de la motion no 435. La motion no 470 a plutôt pour objet de contourner l’amendement qui devrait normalement être proposé et de se soustraire indirectement au principe voulant que les membres n’aient qu’une occasion d’intervenir sur une question. Cependant, si la motion no 435 était retirée, cette motion-ci pourrait alors être de nouveau présentée et serait recevable.

Mais en fin de compte, ce qui est le plus déterminant, c’est qu’il existe un précédent récent de l’autre endroit qui est tout à fait pertinent dans le cas qui nous occupe. Le 11 juin 2014, le Président de l’autre endroit a déclaré une motion irrecevable précisément parce qu’une autre motion très semblable figurait déjà au Feuilleton. Le député néo-démocrate de l’opposition de New Westminster—Burnaby a présenté une motion qu’il avait inscrite au Feuilleton pour donner instruction au Comité permanent de la justice et des droits de la personne de scinder le projet de loi C-13. Or, deux semaines avant, la députée néo-démocrate de Gatineau avait présenté une motion du même genre dont le débat avait été ajourné et qui était toujours inscrite au Feuilleton. Les deux motions étaient les mêmes à cinq mots près.

Peter Van Loan, qui était leader du gouvernement à la Chambre des communes à l’époque, soutenait que les deux motions étaient sensiblement les mêmes et qu’en raison de la règle interdisant d’anticiper, il n’était pas acceptable que le député de New Westminster—Burnaby propose la nouvelle motion. Le Président de l’autre endroit avait alors conclu :

J’ai bien écouté les points soulevés tantôt par le leader du gouvernement à la Chambre des communes, tantôt par le leader parlementaire de l’opposition officielle. Après avoir examiné la partie de l’ouvrage d’O’Brien et Bosc qu’ont largement invoquée les deux leaders pour étayer leurs arguments, il me semble que l’enjeu est de savoir si les motions sont sensiblement les mêmes.

Or, après avoir examiné les deux motions figurant au Feuilleton des avis, il me semble qu’effectivement, elles sont sensiblement les mêmes. Le leader du gouvernement à la Chambre a su convaincre la présidence que le principe qu’il cite est celui qui devrait guider la pratique à la Chambre. Par conséquent, nous n’accepterons pas cette motion pour l’instant.

Cette décision claire résout la question à l’étude, selon moi. Après tout, comment pourrait-on mettre en doute la sagesse de celui qui était alors député de Regina—Qu’Appelle et Président de la Chambre, Andrew Scheer? Je suis convaincu que les sénateurs d’en face considéreront qu’une décision de M. Scheer doit nettement faire autorité.

En bref, un rappel au Règlement concernant l’anticipation peut être soulevé dans ce cas, car cette deuxième motion, la motion no 470, est présentée, alors que la première, la motion no 435, a déjà été présentée et figure à l’ordre du jour, et les deux motions sont en grande partie similaires. Pour ces raisons, et en insistant plus particulièrement sur la décision informée de l’ancien Président Andrew Scheer, je considère que la motion qui vient d’être présentée devrait être jugée irrecevable.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) [ + ]

L’honorable sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Bien sûr.

La sénatrice Martin [ + ]

Je me pose une question. Vous venez de nous donner un exemple de précédent. Dans ce cas précis, est-ce que la première motion inscrite au Feuilleton avait fait l’objet d’un amendement visant à la vider de sa substance et à ne conserver que le premier mot? Ou y avait-il deux motions identiques? J’imagine qu’il existe une décision de la présidence, mais la situation actuelle est exceptionnelle. Je trouve aussi la situation absurde. Je n’ai jamais vu une motion être complètement vidée de substance. Je me demande simplement si la situation était semblable à la Chambre.

Eh bien, la situation à la Chambre concernait la même motion dont j’ai parlé pendant le débat. Les motions ont été jugées absolument semblables par le Président de l’époque. Cela ne tient pas compte de certains facteurs, comme si les motions avaient été modifiées ou étaient sujettes à modification, ou si des amendements avaient été proposés. La question porte sur la motion elle-même et c’est cela qui est au cœur du problème.

L’honorable Donald Neil Plett [ + ]

Je n’aurais manqué la séance d’aujourd’hui pour rien au monde. Nous avons eu des leçons aujourd’hui sur — comment le sénateur Harder a-t-il appelé ce fiasco? — une motion de programmation, ce que le Sénat n’a jamais vu en 152 ans.

On nous a présenté une motion aujourd’hui qui prévoit une allocation de temps pour tout le programme du gouvernement à toutes les étapes du processus, que ce soit à la première lecture, à la deuxième lecture, à l’étape du comité ou à la troisième lecture, ainsi que pour tout éventuel projet de loi qui pourrait nous parvenir.

Nous recevons maintenant une leçon sur des motions semblables, et le sénateur Harder, comme il le fait à la période des questions, accepte des questions, mais n’y donne pas de réponse.

La sénatrice Martin demande s’il y a un amendement qui vide complètement de sa substance la motion du sénateur Smith. Oui, c’est le cas, et cela fait l’objet d’un recours au Règlement, mais le Président n’a pas encore rendu sa décision. Espérons qu’il le fera sous peu.

Le sénateur Harder laisse un seul mot intact dans la motion, et il croit qu’il s’agit d’un amendement légitime. Pourtant, quand nous présentons une deuxième motion foncièrement différente, il grimpe dans les rideaux et, d’un air supérieur et rempli d’indignation, nous dit ce que nous devons faire et ne pas faire.

Votre Honneur, la règle interdisant d’anticiper est ancienne, et elle n’est plus rigoureusement observée dans la pratique parlementaire. Les autorités procédurales canadiennes estiment que les tentatives visant à l’appliquer se sont soldées par un échec. Le sénateur Harder aime bien citer l’O’Brien-Bosc. Même si cette règle fait partie du Règlement de la Chambre des communes britannique, elle n’a jamais figuré dans celui des Communes canadiennes. Qui plus est, personne n’a jamais réussi à faire appliquer la règle britannique dans le contexte canadien. Cette règle part du principe interdisant que la même question soit mise aux voix deux fois dans la même session.

La motion dont le Sénat est saisi, et dont nous espérons débattre sous peu, est bel et bien distincte de celle présentée par le sénateur Smith.

Ma motion, Votre Honneur, porte sur le fait que le cabinet du premier ministre a tenté de faire pression sur la ministre de la Justice et procureure générale, l’honorable Jody Wilson-Raybould, qui portait jusqu’à tout récemment les couleurs libérales. Elle invite seulement Mme Wilson-Raybould à comparaître devant le comité. Seulement Mme Wilson-Raybould.

La motion du sénateur Smith, quant à elle, donne instruction au Comité des affaires juridiques d’inviter plusieurs personnes à témoigner, et le sénateur Harder a proposé un amendement qui, en reconnaissant que le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique étudie la question, rendrait là encore la motion initiale caduque.

De plus, les deux motions pourraient être adoptées et ne pas être contradictoires. Ni la motion du sénateur Smith ni l’amendement du sénateur Harder n’ont été mis aux voix. Le Sénat n’a pas encore pris de décision et il y a effectivement un recours au Règlement en attente d’une décision concernant un amendement à la motion du sénateur Smith. Qu’une décision ait été prise ou non par le Sénat, il s’agit de deux motions distinctes et le débat devrait être autorisé pour les deux. Je vous remercie.

Son Honneur le Président [ + ]

Je remercie les honorables sénateurs de leurs commentaires sur ce recours au Règlement et je prends la question en délibéré.

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