PÉRIODE DES QUESTIONS — Le Conseil privé
Les restrictions imposées à l'opposition
5 juin 2019
Honorables sénateurs, ma question s’adresse au leader non affilié du gouvernement au Sénat.
Sénateur Harder, si vous me suivez sur Twitter — et je sais que oui —, vous devez savoir que je me montre souvent critique envers les médias, mais jamais autant qu’envers le gouvernement.
La liberté d’expression, voyez-vous, est un concept merveilleux. Malgré toutes les fois où j’ai pu critiquer les médias libres et indépendants, ils sont malgré tout essentiels à la démocratie, tout comme l’opposition au Parlement. C’est grâce à eux que nous pouvons demander des comptes aux gouvernements. Leur voix ne devrait donc jamais être muselée, même lorsque les critiques envers vous-même ou le gouvernement vous déplaisent au plus haut point.
Sénateur Harder, jusqu’où le gouvernement est-il prêt à aller pour faire taire la dissidence et l’opposition? Vous dites que vous croyez à la liberté et à l’indépendance de la presse, mais que s’est-il passé depuis quelques semaines? Votre chef a dit songer à imposer une charte numérique sans préciser ce qu’il compte faire pour censurer Internet. Il a nommé Jerry Dias au comité qui sera chargé de déterminer quels médias recevront leur part du plan d’aide qui leur est destiné et qui sera financé à même les coffres de l’État. Nous avons appris dernièrement que des fonctionnaires avaient prévenu les chantiers maritimes Irving que des journalistes s’intéressaient d’un peu trop près aux contrats qui les liaient au gouvernement, ce qui a poussé Irving à menacer les journalistes concernés de poursuites judiciaires. Les exemples comme celui-là semblent se multiplier ces jours-ci.
Sénateur Harder, jusqu’où le premier ministre Justin Trudeau et vous êtes-vous prêts à aller pour faire taire ceux qui osent critiquer le gouvernement?
Je remercie l’honorable sénateur de sa question.
Je regrette toutefois de briser ses illusions, mais je n’ai pas le moindre intérêt pour ses gazouillis ou pour son compte Twitter. Je ne le suis pas. Pour tout dire, je ne saurais même pas comment faire.
Vous partagez pourtant mes gazouillis.
Je suis désolé de vous décevoir à ce sujet.
Je trouve que les médias sociaux posent des difficultés sur le plan de la civilité et des discussions appropriées, mais il s’agit encore une fois d’une question de goût.
En tant qu’institution du Parlement, je pense que nous devons réfléchir à la façon dont les médias sociaux sont un instrument de haine et d’insurrection, si je peux m’exprimer ainsi. Comment les gens en abusent-ils? À cet égard, le gouvernement du Canada, en collaboration avec d’autres gouvernements de pays démocratiques libéraux aux vues similaires, réfléchit à des moyens d’agir face à cette préoccupation et de contrer les auteurs de discours haineux, les auteurs d’actes criminels haineux et le crime organisé, qui utilisent tous les médias sociaux pour miner les institutions démocratiques. Il s’agit d’une question qui devrait préoccuper le sénateur, et il pourrait peut-être publier un gazouillis sur ce sujet un jour.
Honorables collègues, monsieur le sénateur Harder, je suis désolé de vous l’apprendre, mais les abonnements aux comptes Twitter relèvent du domaine public. En plus de suivre mon compte, vous suivez celui de personnes qui partagent mes gazouillis. Toutefois, là n’est pas la question.
Le problème n’est pas seulement que le gouvernement essaie d’écraser l’opposition sous une avalanche de critiques; c’est qu’il ne se préoccupe pas de répondre aux questions. Vous ne cessez de dire qu’il est haineux de poser des questions au gouvernement, mais c’est notre droit, tout comme répondre aux questions est votre obligation. Je pense que nous savons tous jusqu’où le gouvernement est prêt à aller. Nous n’avons qu’à demander à l’ancienne procureure générale, Jody Wilson-Raybould, ou à l’ancienne ministre Jane Philpott ou, à ce compte-là, au vice-amiral Norman et à sa famille, dont la vie a été infernale au cours des deux dernières années. C’est tout simplement parce que le premier ministre n’accepte pas qu’on dénonce son hypocrisie.
Monsieur le sénateur Harder, pour la deuxième fois, qui, au sein du gouvernement du Canada, a donné à Irving Shipbuilding de l’information au sujet des questions des journalistes, et pourquoi? Là est la question.
Je me réjouis que le sénateur ait choisi une question.
Le sénateur peut simplement consulter la réponse du ministère, qui indique clairement que le gouvernement n’est pas responsable des échanges entre les fournisseurs et les médias et que la responsabilité appartient à l’entreprise en question, en l’occurrence Irving. La ministre responsable a insisté sur le fait qu’il incombe maintenant aux médias de réagir à la situation.