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La Loi sur la sécurité de la vieillesse

Projet de loi modificatif--Troisième lecture--Rejet de la motion d'amendement

3 mars 2022


Son Honneur le Président [ - ]

Sénatrice Cordy, lorsque nous avons interrompu le débat, hier, vous répondiez à une question. Voulez-vous continuer de répondre à des questions?

L’honorable Jane Cordy [ - ]

Non merci, monsieur le Président. Je crois avoir répondu à la plupart des questions qu’on aurait pu me poser sur ce projet de loi de 12 lignes.

Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui au sujet de l’amendement. Je suis fortement en désaccord avec cet amendement, car je n’en vois pas l’utilité. Nous en avons tous assez de cette pandémie et nous sommes tous frustrés par la lenteur du gouvernement et, parfois, son incapacité à gérer les questions pressantes du jour. Nous sommes également à juste titre préoccupés par le besoin de veiller à ce qu’on ne mette pas de côté notre rôle parlementaire qui consiste à examiner consciencieusement les mesures législatives parrainées par le gouvernement.

Nous sommes également conscients que, pendant la crise de la pandémie, certaines des mesures prises auraient pu, en rétrospective, être mieux planifiées, mieux exécutées et certainement beaucoup mieux expliquées.

Pour ce qui est du projet de loi C-12, mettons les choses au clair. On nous a dit que si ce projet de loi ne reçoit pas la sanction royale avant le 4 mars — autrement dit, demain —, les aînés dont la situation financière est la plus précaire ne recevront pas des sommes qui pourraient faire la différence entre chauffer leur maison et faire l’épicerie. C’est parce qu’il s’agit de la date butoir pour permettre à la machine bureaucratique de se mettre en branle. En ratant cette date, on jette volontairement du sable dans l’engrenage.

M. Groen, sous-ministre adjoint principal, a déclaré ceci dans son témoignage devant le Comité des affaires sociales :

[...] il n’y a aucun problème dans le projet de loi C-12. La date du 4 mars est importante. En raison de la pause annuelle pour la transition d’une année d’imposition à l’autre, nous ne traitons aucune demande de SRG présentement. Nous pourrons recommencer à traiter les demandes lorsque le fil de revenu sera réactivé, et il ne pourra être réactivé que lorsque nous saurons ce qu’il adviendra du projet de loi. Des dizaines de milliers d’aînés — et je n’exagère pas — seront désavantagés chaque semaine si le projet de loi n’est pas adopté d’ici le 4 mars.

Pendant l’examen du projet de loi C-12 par le Comité des affaires sociales, on nous a énuméré les terribles difficultés que cela occasionnerait. Chaque témoin de chaque organisme qui nous a parlé — CanAge, le Centre d’action pour la sécurité du revenu, Campagne 2000, le Réseau FADOQ et l’Association canadienne des individus retraités — nous a clairement dit que si nous n’adoptions pas le projet de loi C-12 à temps pour qu’il reçoive la sanction royale d’ici le 4 mars, environ 80 000 personnes âgées, ou plutôt aînés, subiraient d’importantes répercussions négatives. Je vais remplacer le terme « personnes âgées » par « aînés », car nos collègues autochtones utilisent le terme « aînés », et que cela rend mieux le respect que nous devrions vouer à ces personnes. Je ne vais donc plus utiliser le terme « personnes âgées ».

Honnêtement, nous n’avons pas assez de temps pour amender ce projet de loi et faire en sorte qu’il reçoive la sanction royale d’ici le 4 mars, soit demain.

Permettez-moi de vous éclairer sur la dure et triste réalité quotidienne de ces aînés. Pour ce faire, examinons les chiffres. Pour être admissible aux prestations du Supplément de revenu garanti, un aîné doit avoir un revenu annuel inférieur à 19 500 $. Honorables collègues, c’est le revenu que la plupart d’entre nous toucheront au cours des six prochaines semaines. Les prestations du Supplément de revenu garanti ne dépassent pas 950 $ par mois à peu près. Un aîné qui touche un revenu annuel entre 19 440 $ et 19 463,99 $ recevra une prestation mensuelle du Supplément de revenu garanti de 0,68 $ — ce qui n’est même pas suffisant pour un café chez Tim Horton. Si un aîné gagne moins de 24 $ — j’ai bien dit 24 $ —, il recevra alors le montant maximal des prestations, c’est-à-dire 959 $ par mois.

Comme vous le savez, le prix des articles de première nécessité augmente constamment, sans oublier le fait que la Banque du Canada a relevé les taux d’intérêt hier. La précarité financière dans laquelle tant d’aînés se retrouvent ne fera qu’empirer. À titre d’information, le prix moyen pour un logement d’une chambre à coucher à Vancouver est de 2 000 $ par mois — ce qui correspond à 24 000 $ annuellement. Toronto n’est pas très loin derrière. En outre, à Halifax, où j’habite, ce même logement coûte 1 500 $ par mois, ce qui totalise 18 000 $ par année. Nous savons tous faire le calcul.

Qui sont ces aînés les plus vulnérables qui ont bâti le Canada de leurs mains pour en faire le pays où il fait si bon vivre aujourd’hui?

Ce sont surtout des femmes. Il y a beaucoup de personnes racisées, de personnes handicapées, et de gens qui ont travaillé en première ligne depuis le début de la pandémie et auraient pu nous offrir des services ici, au Sénat. Désirons-nous vraiment leur refuser une somme d’argent qui peut faire la différence entre réussir à payer le loyer et se retrouver sans abri? Une somme qui peut faire la différence entre acheter des fruits et des légumes ou devoir s’en passer? Une somme qui peut faire la différence entre pouvoir prendre l’autobus pour aller faire les courses ou devoir se taper plusieurs kilomètres à pied?

L’amendement proposé vise à régler une erreur de renvoi qui est connue et qui a été clairement admise par la ministre et de hauts fonctionnaires. On nous a garanti qu’elle serait corrigée, et nous devons faire un suivi pour nous assurer que c’est bien le cas. Il existe des solutions qui ne mettront pas en péril l’adoption du projet de loi C-12. Ce projet de loi n’est pas le meilleur endroit où régler un problème pour lequel il existe déjà une solution administrative. Si nous appuyons l’amendement proposé, nous risquons, involontairement, de faire subir des conséquences injustes aux aînés les plus vulnérables. Personne parmi nous ne souhaite un tel résultat, selon moi. Nous devons agir avec compassion.

Je vais voter contre l’amendement et appuyer le projet de loi C-12 dans sa forme initiale, tel qu’il a été adopté à l’unanimité à l’autre endroit.

J’espère que les honorables sénateurs en feront autant.

Merci. Wela’lioq et d’akuju.

Son Honneur le Président [ - ]

Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer sur la motion d’amendement?

Son Honneur le Président [ - ]

Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Son Honneur le Président [ - ]

J’ai entendu un non. L’amendement est rejeté.

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