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Projet de loi visant à protéger les merveilles naturelles du Canada

Projet de loi modificatif--Troisième lecture

14 décembre 2023


L’honorable Karen Sorensen [ + ]

Propose que le projet de loi S-14, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux du Canada, la Loi sur les aires marines nationales de conservation du Canada, la Loi sur le parc urbain national de la Rouge et le Règlement sur la pêche dans les parcs nationaux du Canada, tel que modifié, soit lu pour la troisième fois.

 — Honorables sénateurs, je prends la parole à l’étape de la troisième lecture du projet de loi S-14, Loi visant à protéger les merveilles naturelles du Canada. Je reconnais aussi que nous sommes rassemblés sur le territoire non cédé des peuple algonquin anishinabe.

Je tiens d’abord à remercier mes collègues du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles de leur étude approfondie du projet de loi ainsi que des améliorations qu’ils ont su y apporter ensemble. Les amendements proposés permettront de mener à terme la création d’une réserve à vocation de parc national au Labrador et d’une aire marine nationale de conservation au Nunavut. Ils permettront aussi d’agrandir sept parcs nationaux et une réserve à vocation de parc national.

Les parcs et la réserve sont répartis dans l’ensemble du territoire canadien, et les agrandissements se feront par des modifications apportées à la Loi sur les parcs nationaux du Canada et à la Loi sur les aires marines nationales de conservation du Canada. Le projet de loi consolide aussi certaines dispositions associées à ces lois. Ces lois et les règlements connexes permettent de protéger un grand nombre d’endroits précieux que les Canadiens ont à cœur. Ils permettent aussi à l’Agence Parcs Canada de veiller sur tous les endroits dont elle a l’intendance afin d’y accueillir des gens de toutes les régions du Canada et du monde entier.

Chers collègues, nous envisageons ces agrandissements, et quelques améliorations, dans le but de clarifier et de renforcer les outils réglementaires que Parcs Canada emploie pour la protection et la conservation des aires dont il a la responsabilité alors que nous vivons une période importante. Nous constatons la perturbation des écosystèmes et la perte d’espèces animales partout au Canada, et la crise climatique exacerbe ces changements et les répercussions qu’ils ont sur les milieux naturels.

Cependant, quand on met ces milieux naturels à l’abri des répercussions des activités humaines et qu’on leur accorde la protection que confèrent les mesures législatives et les règlements ayant trait à Parcs Canada, ces milieux et les espèces qui s’y trouvent peuvent connaître un regain et il s’agit d’une mesure importante pour briser le cycle des dommages à l’environnement et de sa dégradation.

Dans mon discours aujourd’hui, je voudrais parler de ce qui nous a amenés à réfléchir à la modification des mesures législatives visant Parcs Canada. Je voudrais notamment attirer votre attention sur la façon dont Parcs Canada aborde la création de nouvelles aires protégées.

Il s’agit là d’un point important, car par le passé, le processus de création des sites de Parcs Canada ne tenait pas compte de l’importance de ces lieux pour les habitants de la région qui y vivaient depuis des générations, voire des siècles, dans le cas des Autochtones du Canada. Dans l’ensemble du pays, la création de nombreuses zones protégées a été mal vécue par les habitants des régions concernées. Nous en avons entendu quelques exemples dans le cadre du débat et de l’étude du projet de loi.

Nous avons beaucoup à faire à cet égard. Parcs Canada s’engage maintenant fermement à honorer les liens qui unissent ces sites et les Autochtones et à respecter les droits de ces derniers. Parcs Canada crée maintenant de nouveaux parcs de manière transparente et conviviale, dans le cadre d’un véritable partenariat avec tous les habitants des régions concernées et, notamment, avec les communautés des Premières Nations, des Inuits et des Métis partout au Canada.

Aujourd’hui, la création et la gestion des parcs nationaux sont un important levier de réconciliation et de collaboration.

Dans son expression la plus élémentaire, la création ou l’élargissement d’un parc national, d’une réserve à vocation de parc ou d’une aire marine de conservation est un processus simple en cinq étapes. La première étape consiste à choisir un site. Ce choix repose notamment sur des considérations telles que l’importance culturelle, la biodiversité et la protection de la connectivité écologique. La deuxième étape consiste à réaliser une étude de faisabilité. Elle implique de vastes consultations visant à évaluer le soutien des gouvernements et des communautés autochtones, des gouvernements provinciaux ou territoriaux et des collectivités locales, y compris les intervenants régionaux. Elle aboutit à l’élaboration d’une proposition de limites et d’un concept global pour le parc. La troisième étape est la négociation, au cours de laquelle toutes les parties concernées se mettent d’accord sur une vision de la zone protégée. La quatrième étape est la mise en place, lorsque des accords officiels sont signés, et la cinquième étape est la protection, au cours de laquelle les zones protégées sont inscrites dans la législation.

Avec la présentation du projet de loi S-14, les parcs, les réserves à vocation de parcs et les aires marines mentionnés dans le projet de loi ont atteint la cinquième et dernière étape du processus. Il s’agit de la partie la plus facile du processus, qui ne nécessite qu’un second examen objectif et quelques votes pour atteindre les principaux objectifs du projet de loi. Pour le reste, honorables collègues, le plus gros du travail a été fait pour nous.

Comme on peut l’imaginer, bien que les cinq étapes soient les mêmes pour tous les projets, chaque projet est mené dans des circonstances particulières qu’il faut prendre en considération et requiert la consultation d’un groupe différent de partenaires et d’intervenants. Nous l’avons vu, par exemple, dans les accords conclus avec l’Association inuite du Qikiqtani pour la création de l’aire marine nationale de conservation Tallurutiup Imanga.

Nous l’avons également constaté lorsqu’on a procédé à l’agrandissement du parc national Tuktut Nogait, parc dont la collectivité de Paulatuk avait proposé la création pour protéger les terrains de mise bas de la harde de caribous Bluenose-Ouest, et lorsque le Secrétariat du Sahtu a contribué grandement à l’agrandissement de la partie du parc réservée aux Sahtús en présentant une demande officielle à cette fin.

Nos partenaires dans ces importantes initiatives de protection comprennent beaucoup de groupes et de communautés autochtones. En effet, chacun des sept parcs et la réserve à vocation de parc, dont les limites seront officiellement agrandies grâce à ce projet de loi, sont le fruit de dialogues importants entre Parcs Canada et les communautés autochtones et non autochtones concernées.

La négociation d’accords sur la manière de protéger et de conserver l’espace naturel mène à des partenariats qui peuvent être appliqués ailleurs à nos entreprises sociales, culturelles et économiques. C’est grâce à de telles mesures que nous avançons sur la voie de la réconciliation.

Chers collègues, les avantages potentiels sont nombreux, mais il est plus nécessaire que jamais de protéger ces zones. Aujourd’hui, nous pouvons contribuer à faire en sorte qu’une superficie totale de 12 085 851 hectares jouisse de toutes les protections prévues par la Loi sur les parcs nationaux du Canada, la Loi sur les aires marines nationales de conservation du Canada et leurs règlements connexes. Cela comprend près de 220 000 hectares en tout pour agrandir les limites de parcs nationaux et de réserves à vocation de parc national existants, plus d’un million d’hectares dans la réserve à vocation de parc national des Monts Mealy et 10,8 millions d’hectares pour l’aire marine nationale de conservation Tallurutiup Imanga.

Le Canada a la responsabilité en matière de gérance de protéger les vastes étendues de terre et d’eau qui relèvent de sa compétence, tant pour la génération actuelle que pour les générations futures et tant pour les citoyens canadiens que pour la population mondiale.

Étant donné les effets croissants des changements climatiques et de la perte de biodiversité, les peuples autochtones, les groupes environnementaux, les collectivités locales, les gouvernements provinciaux et territoriaux et la population canadienne s’attendent à voir des progrès dans la protection de nos espaces naturels. Nous avons l’occasion de montrer que nous sommes à l’écoute et j’espère que tous les sénateurs se joindront à moi pour appuyer le projet de loi S-14. Merci. Hiy hiy.

L’honorable Michael L. MacDonald

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’étape de la troisième lecture du projet de loi S-14, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux du Canada, la Loi sur les aires marines nationales de conservation du Canada, la Loi sur le parc urbain national de la Rouge et le Règlement sur la pêche dans les parcs nationaux du Canada. Je le fais en tant que porte-parole favorable au projet de loi.

Le projet de loi propose des changements importants dans la gestion et la préservation du patrimoine naturel canadien. Le projet de loi S-14 apporte des changements importants à la Loi sur les parcs nationaux du Canada, notamment en créant une nouvelle réserve de parc national et en proposant des initiatives qui comprennent des règlements pour sa gestion et son administration.

En outre, le projet de loi prévoit l’agrandissement des limites de sept parcs nationaux et d’une réserve de parc national existants, ainsi que le changement de nom d’un parc. Il vise également à intensifier les mesures législatives contre le déversement ou le dépôt de substances nocives dans ces zones protégées.

Le projet de loi modifie également la Loi sur les aires marines nationales de conservation du Canada en mettant l’accent sur l’importance de protéger les zones ayant une riche biodiversité marine.

Enfin, le projet de loi propose de modifier la Loi sur le parc urbain national de la Rouge en durcissant les sanctions liées au déversement ou au dépôt de substances dans ce parc, ce qui permettra de le préserver pour les générations futures.

Avant de parler davantage de ce projet de loi et de formuler mes observations, je veux parler un peu de l’histoire et du développement de nos parcs nationaux, puisqu’ils existent d’un océan à l’autre, dans toutes les provinces et tous les territoires et qu’ils sont instinctivement très appréciés par tous les Canadiens.

Il y a actuellement 38 parcs nationaux, 10 réserves à vocation de parc national et un parc urbain national, qui sont tous protégés au titre de la Loi sur les parcs nationaux du Canada et qui sont administrés par Parcs Canada.

Le premier parc national a été créé en 1885 par le gouvernement conservateur de sir John A. Macdonald et portait initialement le nom de parc des Rocheuses. Il s’appelle maintenant parc national du Canada Banff et il est le plus ancien et le plus visité au Canada.

Dans ma province, la Nouvelle-Écosse, il y a deux parcs nationaux et une réserve de parc national, et les trois ne pourraient pas être plus différents. Visiter la réserve de parc national de l’Île‑de-Sable, établie par le gouvernement Harper en 2013, ce que j’ai eu la chance de faire deux fois, est une expérience unique. On peut y voir ses chevaux emblématiques et un des sites de nidification du pluvier siffleur, une espèce en voie de disparition. Le parc national Kejimkujik, situé à l’intérieur des terres dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, est un bassin versant d’une grande beauté qui renferme encore des forêts anciennes de l’Acadie et une flore unique à cette région. Le dernier, mais certainement pas le moindre, est le ​parc national des Hautes-Terres-du-Cap-Breton, dans mon coin de pays. C’est le plus ancien et le plus fréquenté de tous les parcs du Canada atlantique. Le Canada est un pays vaste et diversifié, et ces trois parcs situés dans une petite province représentent bien cette réalité.

Les Canadiens soutiennent leur système de parcs nationaux, et moi aussi. Toutefois, lorsque nous créons de nouveaux parcs nationaux, réserves de parc national et aires marines nationales de conservation et que nous élargissons les limites des parcs existants, nous devons veiller à ce que les erreurs du passé ne soient pas répétées lorsque nous traitons avec les gens qui vivent près des parcs et, à plus forte raison, ceux qui occupent le territoire visé par l’agrandissement ou la création des parcs.

J’ai été témoin de l’arrogance de l’État et de l’insensibilité des bureaucrates anonymes à l’endroit des habitants de Louisbourg, ma ville natale quand la décision de reconstruire partiellement la forteresse de Louisbourg a été prise au début des années 1960. Je me suis déjà exprimé à ce sujet à l’étape de la deuxième lecture, alors je ne vais pas me répéter. Le fait demeure que ma ville natale a été durement touchée par des expropriations massives qui ont eu pour conséquence de transformer un port maritime florissant en village défavorisé. Ce n’est pas seulement une question de perte de terres ou d’indemnité financière insuffisante, même si ces aspects ont joué un rôle déterminant. Il y a aussi le mépris total à l’égard de personnes relativement pauvres et impuissantes et le manque de respect pour leur patrimoine historique et social.

Ma famille, comme bien d’autres, a été directement affectée par ces actions. Ma grand-mère a été expropriée à l’âge de 85 ans et elle n’a reçu qu’une maigre compensation pécuniaire pour la terre familiale historique, dont les titres de propriété remontaient à la fin du XVIIIe siècle. Elle a reçu 4 000 $ pour 62 acres de terres allant de la rive portuaire jusqu’au camp de Wolfe, une zone où plus de 14 000 soldats — la plus grande force terrestre militaire jamais réunie sur le territoire que l’on appelle aujourd’hui le Canada — avaient installé leur campement en 1758, durant le deuxième siège de Louisbourg.

C’était une femme indépendante qui a dû se débrouiller avec peu d’argent dans la vie. Lorsqu’elle a été expropriée, elle a refusé de venir vivre chez nous, préférant louer un appartement un peu plus bas dans la rue. Sa maison de deux étages, probablement la plus vieille du coin, avait été construite au XVIIIe siècle. Le mur de la cuisine, entièrement fait de grès de plage, faisait face à l’ouest.

Lorsqu’elle a quitté sa maison, elle a d’abord décidé d’y laisser la majorité de ses biens et des souvenirs de famille. Peu après, nous avons constaté un matin que Parcs Canada avait rasé complètement la maison sans consulter ou prévenir qui que ce soit. Je n’oublierai jamais la tristesse dans les yeux de ma grand-mère ce jour-là, lorsque nous l’avons emmenée à l’ancienne maison familiale et qu’elle a constaté qu’il n’en restait plus rien. Tout avait été détruit et était irrécupérable, ce qui a été encore plus douloureux que l’expropriation elle-même. Le message envoyé à notre famille était clair : « Vous n’avez aucune valeur, votre histoire n’a aucune valeur et votre communauté n’a aucune valeur. »

J’ai toujours aimé l’histoire de la forteresse. J’ai toujours été fier de l’histoire de ma collectivité. Combien de Canadiens savent qu’en 1757 — l’année précédant le deuxième et dernier siège —, Louisbourg était le troisième port en importance en Amérique du Nord sur le plan du volume, derrière Boston et Philadelphie. New York devait se contenter de la quatrième place. La collectivité a fortement encouragé la reconstruction. C’était une époque enlevante pour la ville.

Il a fallu 25 ans pour bâtir la forteresse et elle a tenu moins de 15 ans, ce qui lui donne une durée de vie de 40 ans. Par contre, la communauté dont ma famille faisait partie avait plus de 200 ans. Il n’y avait toutefois aucun respect pour notre histoire et aucune reconnaissance envers notre communauté ou ceux qui l’avaient bâtie.

La décision de ne pas entretenir la route entre Louisbourg et Gabarus, qu’on prit également sans consulter les résidants et sans tenir compte d’eux, devint un autre symbole de cette approche désincarnée. Bien que la route fut une route provinciale, c’est Parcs Canada qui hérita de la responsabilité de l’entretenir, puisqu’elle était presque entièrement sur les terres du lieu historique. Ensuite, Parcs Canada cessa délibérément d’entretenir la route. L’organisme laissa la situation se détériorer jusqu’à ce qu’il puisse dire à la province, après plusieurs années, que la route était trop dangereuse et qu’on devait la fermer. En 1969, l’organisme érigea des barrières aux deux extrémités et celles-ci s’y trouvent toujours.

Tout cet épisode démontre comment on se soucie peu des répercussions des décisions administratives sur les êtres humains. Obnubilé par la protection et la conservation, Parcs Canada semble avoir oublié que des gens habitent dans ces espaces naturels ou aux environs. Je voudrais exprimer aujourd’hui les inquiétudes que j’éprouve encore concernant l’approche adoptée par Parcs Canada dans le contexte du projet de loi S-14, en particulier pour ce qui est de la gestion des accès aux parcs nationaux et des répercussions sur les populations environnantes. Malgré les assurances données par les fonctionnaires de Parcs Canada, je demeure sceptique au sujet de la méthode actuelle de gestion des accès, qui ne semble pas être très différente de celle qui était employée il y a 50 ans.

Chaque parc national et chaque population environnante a des problèmes et des caractéristiques qui lui sont propres. L’approche universelle qui est proposée ne saurait être adaptée à toute la variété de problèmes.

Par ailleurs, je m’inquiète de voir que le patrimoine des collectivités qui sont touchées par les modifications des parcs n’est pas reconnu à sa juste valeur et n’est pas préservé. L’histoire de West Louisbourg, Kennington Cove et Deep Cove, par exemple, semble avoir été effacée sans qu’il reste la moindre trace de leur existence passée. Les efforts actuels de Parcs Canada pour dialoguer avec les populations expropriées, notamment celle de Forillon, sont louables mais insuffisants, compte tenu de l’étendue et de la profondeur des répercussions historiques et culturelles.

Honorables sénateurs, je voudrais aussi parler d’une question qui a fait surface lors de l’étude en comité du projet de loi S-14. C’est une question qui concerne directement la nation innue et qui met en exergue les difficultés résultant de la gestion par le gouvernement des droits des peuples autochtones.

Nous avons entendu des témoignages et des arguments juridiques révélant des failles dans le processus d’élaboration du projet de loi, en particulier en ce qui concerne la consultation de la nation innue. Il est apparu clairement au comité que le gouvernement ne les a pas consultés de manière adéquate avant de présenter le projet de loi, ce qui a entraîné des frustrations et des conflits qui auraient pu être évités.

Le principal litige concernait l’intégration de la communauté NunatuKavut, reconnue comme « utilisateur traditionnel des terres » dans le texte du projet de loi. La nation innue — qui a joué un rôle crucial dans la création de la réserve du parc national des Monts Mealy par le projet de loi S-14 — s’est retrouvée dans une situation inattendue et problématique lorsqu’elle a appris l’inclusion soudaine d’un autre groupe non reconnu aux termes de l’article 35 de la Constitution canadienne. Ce traitement soulève des questions sur l’engagement du gouvernement à consulter les peuples autochtones, ainsi que sur sa compréhension de la dynamique complexe entre les différents groupes autochtones.

J’aimerais vous faire part d’un passage du témoignage de l’honorable Peter Penashue, négociateur au nom de la nation innue, devant le comité :

On ne nous a même pas consultés. En vertu de l’entente, pour toute modification proposée, nous devons être consultés. Nous l’avons appris par l’intermédiaire de gens qui faisaient de la recherche.

Je précise qu’un amendement a été présenté au comité pour supprimer la mention de la communauté de NunatuKavut dans le projet de loi S-14. Bien que la revendication de la communauté de NunatuKavut soit, au moins pour le moment, apparemment rejetée, l’inclusion de la communauté dans la première version du projet de loi était purement politique et le résultat du lobbying de partisans du Parti libéral ayant des relations d’initiés. Ce n’est pas une façon de rédiger un projet de loi ni de traiter les gens, et cela ne reflète certainement pas une approche respectueuse, consultative ou transparente.

La promesse de consultations et de participation des peuples autochtones, réitérée par le gouvernement, s’est avérée superficielle dans ce cas, mettant en évidence un écart important entre la théorie et la pratique.

J’aimerais également attirer votre attention sur le parallèle entre la gestion du projet de loi C-21 et celle du projet de loi S-14 concernant l’approche du gouvernement en matière de consultation des communautés autochtones.

La semaine dernière, au cours des débats sur le projet de loi C-21, un amendement proposé par mon collègue le sénateur Boisvenu — visant à garantir des consultations approfondies auprès des peuples autochtones — a été accueilli de façon négative par le représentant du gouvernement au Sénat. Cette réponse met en lumière une tendance inquiétante du gouvernement à négliger la voix des populations dans l’élaboration des politiques qui les concernent directement.

Pendant l’étude du projet de loi C-21, le ministre LeBlanc a prétendu devant le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants qu’il avait mené de vastes consultations auprès de divers groupes, y compris des groupes autochtones et des personnes directement touchées par la législation sur les armes à feu. Or, ce n’est pas ce qui ressort des témoignages entendus. Contrôleurs des armes à feu, représentants autochtones et autres parties intéressées : tous ont clairement dit qu’ils n’avaient pas été consultés adéquatement au sujet du projet de loi C-21, si tant est qu’ils l’aient été.

À la lumière de cette divergence pour le moins troublante, l’amendement proposé par le sénateur Boisvenu visait à corriger ce manquement en rendant la tenue de consultations obligatoire pour tous les règlements ayant une incidence sur les groupes, les communautés et les peuples autochtones. Cet amendement ne visait pas seulement à corriger le manque de consultations, il avait aussi pour objectif de faire concorder le processus législatif avec les promesses ostensibles du gouvernement.

Le rejet de cet amendement par le gouvernement soulève de profondes questions sur son réel attachement aux principes de la consultation et au respect des droits des peuples autochtones, pour ne pas dire des Canadiens en général.

Honorables sénateurs, la trajectoire qu’a connue le projet de loi S-14 me fait prendre conscience que nous devons approfondir nos consultations et que nous devrions sans doute inviter de nouveau la Chambre des communes à adopter une approche plus exhaustive en la matière. J’ai l’impression qu’à l’heure actuelle, ce projet de loi gagnerait à être soumis à d’autres points de vue et à un examen plus rigoureux.

Il est aussi essentiel que les secteurs industriel et minier, dont l’impact économique est considérable dans plusieurs régions touchées par le projet de loi S-14, soient plus souvent consultés. Leurs points de vue et leur connaissance particulière des difficultés et des possibilités qui sont associées à cette mesure législative sont nécessaires pour bien évaluer ses répercussions économiques et concrètes.

Dans le même ordre d’idées, il faut aussi tenir compte de l’opinion des maires et des responsables des petites villes. Ces gens représentent les localités qui seront directement touchées par le projet de loi S-14, alors leur compréhension des besoins et des enjeux locaux est essentielle pour évaluer l’incidence réelle que cette mesure législative aura sur leur quotidien.

L’exemple historique de Louisbourg, où des expropriations massives ont eu des conséquences dramatiques pour les gens du coin, devrait nous servir de leçon. Nous devons tirer des enseignements du passé si nous voulons éviter de répéter les mêmes erreurs avec le projet de loi S-14. Cette page de notre histoire montre qu’il faut bien planifier et consulter si l’on veut éviter les conséquences indésirables sur les localités, la gestion des terres, le patrimoine et la population.

En terminant, je prie mes collègues de reconnaître qu’il est nécessaire d’élargir et d’approfondir les consultations sur le projet de loi S-14. C’est notre devoir, à nous législateurs, de faire en sorte que tous les points de vue soient pris en compte afin d’en arriver à des lois équilibrées, réfléchies et bénéfiques pour l’ensemble de la population. Je vous remercie de l’attention que vous portez à ce dossier crucial.

Son Honneur la Présidente [ + ]

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi modifié, lu pour la troisième fois, est adopté.)

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