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L'apport commercial et économique des entreprises autochtones à l'économie du Canada

Interpellation--Suite du débat

21 novembre 2024


Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour participer au débat sur l’interpellation no 13, qui attire l’attention du Sénat sur les contributions continues des entreprises autochtones au commerce et à l’économie du Canada.

Je tiens à remercier le sénateur Klyne d’avoir lancé cette importante discussion, qui permet aux sénateurs de souligner les contributions essentielles et souvent négligées des Premières Nations, des Inuits, des Métis ainsi que des personnes et des entreprises non inscrites au bien-être économique du Canada.

En tant que sénatrice représentant le Manitoba, c’est avec grand plaisir que je prends la parole pour souligner les contributions des Premières Nations, des Métis, des Inuits ainsi que des personnes et des entreprises non inscrites à l’économie du Manitoba.

La source de renseignements sur laquelle je vais principalement m’appuyer est un rapport de 2019 intitulé Indigenous Contributions to the Manitoba Economy. Ce rapport exhaustif de plus de 250 pages a été produit grâce à un partenariat de la Manitoba’s Southern Chiefs’ Organization Inc., de la Manitoba Keewatinowi Okimakanak Inc. et du Rural Development Institute de l’Université de Brandon.

Comme l’indique le rapport, ses objectifs sont, en partie, les suivants :

Quantifier les sommes dépensées par les Autochtones et les Premières Nations du Manitoba afin de calculer leur contribution à l’économie provinciale.

Et :

Créer des projections de la population autochtone et de la main-d’œuvre.

Honorables sénateurs, il est important de noter que les contributions des Autochtones dans le secteur économique sont loin d’être nouvelles ou émergentes. Au contraire :

Les Premières Nations et les Inuits avaient établi des réseaux commerciaux et d’autres éléments des économies de marché en Amérique du Nord bien avant l’arrivée des Européens.

Après l’arrivée des Européens, l’économie du Manitoba a été établie par les chasseurs et les commerçants des Premières Nations et des Métis, qui ont été responsables du développement de l’économie provinciale grâce au commerce des fourrures. Cependant, les systèmes économiques coloniaux se sont rapidement enracinés dans l’ensemble du pays, et la plupart d’entre eux avaient été créés et mis en œuvre de manière à empêcher expressément les Premières Nations de participer et de contribuer à l’économie ou de minimiser leur participation et leur contribution.

Cette situation a été bien documentée et ne devrait pas être une surprise, car la nature restrictive de plusieurs mesures législatives essentielles, notamment la Loi sur les Indiens, la Loi sur la gestion financière des premières nations et la Loi sur la gestion des terres des premières nations, ont toutes imposé un fardeau indu aux Premières Nations quand elles ont tenté de tirer parti des possibilités économiques ou de lancer des projets de leur propre chef.

En 2022, le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de la Chambre des communes a publié son deuxième rapport, intitulé Obstacles au développement économique dans les communautés autochtones. J’encourage mes honorables collègues à examiner ce rapport, car il donne un petit aperçu des nombreux obstacles systémiques, qu’ils soient sociaux, administratifs ou législatifs, qui empêchent souvent les Premières Nations, les Inuits, les Métis et les Indiens non inscrits de participer plus activement à l’économie du Canada.

Le rapport du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord décrit avec beaucoup de précision ces innombrables obstacles et il indique ceci :

Surmonter les obstacles au développement économique dans les communautés autochtones contribuerait à la réconciliation économique et à l’amélioration des résultats socio-économiques des peuples autochtones. Ces obstacles continuent d’empêcher de nombreuses collectivités et entreprises inuites, métisses et des Premières Nations de participer pleinement à l’économie canadienne. Les obstacles au développement économique autochtone comprennent l’héritage du colonialisme, la non-reconnaissance de la compétence autochtone, les infrastructures inadéquates, les lourdeurs administratives, l’accès limité au capital et l’accès limité aux marchés publics fédéraux.

Chers collègues, c’est grâce à leur résilience indéfectible que les Premières Nations réussissent à s’adapter au nouveau contexte économique et à son évolution. De nouveaux entrepreneurs des Premières Nations continuent d’émerger; ils se consacrent souvent à un travail qui leur permet à la fois de produire des retombées financières et de promouvoir leur culture et leurs traditions.

De plus, les communautés des Premières Nations savent de mieux en mieux former des partenariats stratégiques avec divers gouvernements et diverses industries, ce qui les aide à instaurer des façons viables de créer leurs propres revenus.

Un rapport de 2019 sur les contributions des autochtones à l’économie du Manitoba dit ceci :

Les dirigeants autochtones adoptent et expriment de plus en plus le point de vue selon lequel, pour un développement économique réussi, il faut remplacer l’approche actuelle en la matière. Trop souvent, l’approche actuelle implique que d’autres imposent un programme de développement. Ici, le développement est présenté en termes purement économiques, comme un plus grand nombre d’emplois, un niveau de scolarité plus élevé et des revenus plus élevés. Cependant, pour de nombreux dirigeants et communautés autochtones, il faut privilégier une approche plus globale, où la valeur première du développement économique consiste à fournir un moyen de réinvestir dans la vie culturelle et les services sociaux de la communauté au bénéfice de tous […]

Je vais d’ailleurs en parler dans mon discours sur les consultations.

Une approche du développement économique conçue par les Autochtones commence à émerger. Elle met l’accent sur la réussite de la communauté plutôt que sur la réussite de l’individu et l’amélioration de la vie de tous plutôt que la création de disparités économiques. Cette approche comprend un point de vue qui tient compte de la communauté et qui est harmonisé avec les cultures autochtones.

Par conséquent, chers collègues, nous pouvons commencer à mieux comprendre le fait que les contributions économiques des Premières Nations, des Inuits, des Métis et des Indiens non inscrits au Canada sont beaucoup plus vastes que ce que bien des gens pourraient croire. Cela va bien au-delà des dollars et des cents de leur pouvoir d’achat individuel et collectif, de la valeur et des profits de leurs entreprises ou du nombre d’emplois qu’elles créent ou maintiennent. Les contributions que les gens apportent à l’économie canadienne commencent à avoir une incidence positive sur les valeurs et les principes fondamentaux sur lesquels ces entreprises et ces systèmes sont fondés.

Honorables sénateurs, lorsqu’on examine l’incidence que les Autochtones ont sur l’économie du Manitoba, il est utile de s’attarder d’abord aux données démographiques. En 2016, le Nord du Manitoba avait une population de 52 350 habitants, ce qui inclut les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Le Sud du Manitoba, lui, avait une population autochtone de 170 959 habitants. On arrive donc à une population totale de 223 310 habitants.

Pour étudier les dépenses, il est utile d’avoir les chiffres sur les ménages au sein de ces populations.

Dans le Nord, on estime qu’il y a 10 980 ménages, dont 27 % [...] vivent à l’extérieur des réserves. Dans le Sud, on estime qu’il y a 52 675 ménages, dont 85 % [...] vivent en dehors des réserves.

En 2016, les dépenses des ménages autochtones ont atteint 1 378,8 millions de dollars. Les ménages autochtones ont dépensé 493,4 millions de dollars dans le Nord [...] Dans le Sud, les dépenses des ménages ont totalisé 885,4 millions de dollars [...]

Pour mettre ces chiffres en perspective, chers collègues, le Manitoba a indiqué ces résultats :

En 2016, les retombées économiques des dépenses des ménages des Premières Nations de 1 378,8 millions de dollars ont contribué au PIB provincial à hauteur de 99,1 millions de dollars, créé ou maintenu 691 emplois et généré 38,7 millions de dollars en revenus de travail [...]

Honorables sénateurs, nous pouvons également prendre en compte une autre donnée sur la contribution des Premières Nations, des Métis, des Inuits et des Indiens non inscrits à l’économie du Manitoba : je parle des dépenses des gouvernements autochtones.

Le rapport Indigenous Contributions to the Manitoba Economy définit ainsi les dépenses des gouvernements autochtones :

[...] la rémunération, les charges et autres dépenses présentés dans les états financiers par les gouvernements des Premières Nations, les conseils tribaux et les organisations métisses et inuites [...]

Au cours de l’exercice 2015-2016, les dépenses des gouvernements autochtones se sont élevées à 1,45 milliard de dollars, dont 47 % dans le Nord et 53 % dans le Sud. Les effets de ces dépenses sur l’économie manitobaine sont considérables, puisque ces 1,45 milliard de dollars de dépenses ont eu une incidence de 953,2 millions de dollars sur le PIB, tout en créant ou en maintenant l’équivalent de 19 821 emplois et en contribuant à hauteur de 643,3 millions de dollars aux revenus de travail dans l’ensemble de l’économie manitobaine.

Chers collègues, au-delà des dépenses effectuées au Manitoba par les ménages et les gouvernements autochtones, les Premières Nations, les Métis, les Inuits et les Autochtones non inscrits contribuent également à l’économie provinciale du Manitoba par l’intermédiaire des entreprises autochtones. Cette mesure prend en compte les activités commerciales plus courantes, allant du tourisme à la construction. Cependant, elle prend également en compte des estimations des activités économiques plus traditionnelles, comme la chasse, la pêche et le piégeage. En ce qui concerne ces activités courantes, en 2016, le Manitoba pouvait s’enorgueillir de compter 706 entreprises autochtones, 87 dans le Nord et 619 dans le Sud.

Le rapport estime que ces 706 entreprises autochtones ont dépensé, collectivement, 6 milliards de dollars en 2016. Ces dépenses correspondent à une contribution de 1,1 milliard de dollars au PIB du Manitoba, à 13 688 emplois au Manitoba et à un revenu du travail de 566,4 millions de dollars.

Honorables sénateurs, pour résumer les différents constats présentés dans le rapport, en 2016, les Premières Nations, les Métis et les Inuits ainsi que leurs entreprises ont dépensé 9,3 milliards de dollars. Ils ont contribué à hauteur de 2,3 milliards de dollars au PIB du Manitoba, ce qui représente près de 4 % du PIB de la province. Leurs dépenses ont créé ou assuré plus de 35 700 emplois, soit 5,6 % des emplois dans la province. Ils ont versé 1,1 milliard de dollars de rémunérations à des travailleurs tout en payant 231 millions de dollars d’impôts, dont 43 % au gouvernement provincial et 57 % au gouvernement fédéral.

Ces chiffres, chers collègues, sont formidables. Ils représentent également la pointe de l’iceberg étant donné le potentiel de croissance dans ces différents domaines de contribution des Autochtones à l’économie du Canada.

Comme le souligne le rapport du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de 2022, il subsiste de nombreux obstacles majeurs pour les Premières Nations, les Métis, les Inuits et les Autochtones non inscrits dans ces domaines.

Les perspectives de croissance au Manitoba sont illimitées à mesure que de nouvelles possibilités se présentent, d’autant plus que la population autochtone est plus jeune que l’ensemble de la population manitobaine. Dans cette optique, la population autochtone restera essentielle à la concrétisation des perspectives économiques futures du Manitoba et du Canada.

Honorables sénateurs, il est essentiel de maintenir l’élan que les Premières Nations, les Inuits, les Métis et les peuples non inscrits ont pris grâce à leurs diverses contributions économiques. La voie la meilleure et la plus efficace pour libérer le plein potentiel des contributions économiques des Autochtones à...

Son Honneur la Présidente [ + ]

Sénatrice McCallum, je suis désolée de vous interrompre, mais votre temps de parole est écoulé.

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