Le Code criminel
Adoption de la motion d'amendement
11 février 2021
Par conséquent, honorables sénateurs, je propose l’amendement suivant :
Que le projet de loi C-7, tel que modifié, ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu’il soit modifié à nouveau, à l’article 3 :
a) à la page 8, par substitution, aux lignes 31 à 41, de ce qui suit :
« (2) Le passage de l’alinéa 241.31(3)a) de la même loi précédant le sous-alinéa (ii) est remplacé par ce qui suit :
a) pour régir la fourniture et la collecte de renseignements relatifs aux demandes d’aide médicale à mourir ou à la prestation de celle-ci, notamment :
(i) les renseignements qui doivent, à différentes étapes, être fournis par les médecins, les infirmiers praticiens, les personnes visées au paragraphe (1.1) qui ont la responsabilité de procéder aux évaluations préliminaires, les pharmaciens et les techniciens en pharmacie, ou par toute catégorie de ceux-ci, y compris :
(A) les éléments qui ont été considérés dans le cadre des évaluations — préliminaires ou non — de l’admissibilité d’une personne à l’aide médicale à mourir selon les critères prévus au paragraphe 241.2(1),
(B) les renseignements concernant la race de la personne qui demande ou reçoit l’aide médicale à mourir, si celle-ci consent à les fournir,
(2.1) L’alinéa 241.31(3)b) de la même loi est remplacé par ce qui suit :
b) pour régir l’utilisation, l’analyse et l’interprétation de ces renseignements, notamment pour cerner les iniquités fondées sur la race et la façon dont la race est liée à d’autres formes d’inégalités systémiques dans l’aide médicale à mourir;
b.1) pour régir la protection, la publication et la communication de ces renseignements; »,
b) à la page 9, par suppression des lignes 1 et 2 de la version française.
Honorables sénateurs, je me souviens de l’époque où les mesures d’action positive ont fait leur apparition au Canada. Les gens avaient beaucoup de questions et d’inquiétudes. Ils craignaient que ce genre de politiques n’incluent pas tout le monde et ne s’appliquent qu’aux femmes. Certains sont même allés jusqu’à parler de discrimination à rebours. Des Canadiens ont alors répliqué qu’il ne s’agissait pas de faire de la discrimination à rebours, mais de promouvoir l’équité, et c’est aussi le but de mon amendement.
Je vous exhorte aujourd’hui à appuyer cet amendement pour l’avenir de notre pays, pour assurer l’harmonie dans notre société, et pour mon petit-fils, Ayaan, qui écoute ces délibérations et qui m’a encouragée à proposer cet amendement.
Merci, honorables sénateurs.
Honorables sénateurs, l’honorable sénatrice Jaffer, avec l’appui de l’honorable sénatrice Pate, propose :
Que le projet de loi C-7, tel que modifié, ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu’il soit modifié à nouveau, à l’article 3 :
a) à la page 8, par substitution, aux lignes 31 à 41, de ce qui suit :
« (2) Le passage de l’alinéa 241.31(3)a) de la même loi précédant le sous-alinéa (ii) est remplacé par ce qui suit :
a) pour régir la fourniture et la collecte de renseignements relatifs aux demandes d’aide médicale à mourir ou à la prestation de celle-ci, notamment :
(i) les renseignements qui doivent, à différentes étapes, être fournis par les médecins, les infirmiers praticiens, les personnes visées au paragraphe (1.1) qui ont la responsabilité de procéder aux évaluations préliminaires, les pharmaciens et les techniciens en pharmacie, ou par toute catégorie de ceux-ci, y compris :
(A) les éléments qui ont été considérés dans le cadre des évaluations — préliminaires ou non — de l’admissibilité d’une personne à l’aide médicale à mourir selon les critères prévus au paragraphe 241.2(1),
(B) les renseignements concernant la race de la personne qui demande ou reçoit l’aide médicale à mourir, si celle-ci consent à les fournir,
(2.1) L’alinéa 241.31(3)b) de la même loi est remplacé par ce qui suit :
b) pour régir l’utilisation, l’analyse et l’interprétation de ces renseignements, notamment pour cerner les iniquités fondées sur la race et la façon dont la race est liée à d’autres formes d’inégalités systémiques dans l’aide médicale à mourir;
b.1) pour régir la protection, la publication et la communication de ces renseignements; »,
b) à la page 9, par suppression des lignes 1 et 2 de la version française.
Honorables sénateurs, je souhaite intervenir dans le débat sur le projet de loi C-7 et exprimer mon appui à l’amendement présenté par la sénatrice Jaffer, qui propose que Santé Canada recueille des renseignements sur la race d’une personne qui demande ou reçoit l’aide médicale à mourir, si celle-ci y consent.
L’analyse comparative entre les sexes plus, qui vise à évaluer les répercussions potentielles des réformes législatives sur les différents groupes de femmes, d’hommes et de personnes ayant une autre identité de genre, a permis de cerner un certain nombre de problèmes de santé qui touchent différemment les hommes et les femmes. Par exemple, il y a une plus grande proportion de femmes que d’hommes qui souffrent de troubles de l’humeur et de troubles anxieux généralisés, et une plus grande proportion d’hommes qui souffrent de toxicomanie.
Compte tenu du nombre de problèmes que cette approche d’analyse comparative binaire entre les sexes a permis de cerner, il est évident que l’analyse intersectionnelle contribue de façon importante à l’adoption de mesures législatives adaptées à la diversité culturelle qui caractérise notre pays.
Presque le quart de la population canadienne est racialisée. Honorables sénateurs, cela signifie que presque huit millions de Canadiens sont racialisés. Pourtant, en faisant mes recherches pour mon discours, j’ai constaté à quel point il y avait peu de données sur la santé qui soient fondées sur la race.
Comme l’Institut canadien d’information sur la santé l’a récemment indiqué :
Le manque de données fondées sur la race dans le secteur de la santé au Canada complique la mesure des inégalités en santé et la découverte des iniquités qui pourraient découler du racisme et de la discrimination.
En d’autres mots, à l’heure actuelle, nous n’avons pas accès à des données fondées sur la race concernant les Canadiens qui demandent ou qui reçoivent l’aide médicale à mourir. Autrement dit, cette mesure législative considère comme moins importants presque huit millions de Canadiens. Comme la sénatrice Jaffer l’a mentionné plus tôt cette semaine :
Nous avançons à l’aveuglette avec ce projet de loi pour défendre la vie de millions de personnes partout au Canada.
Un accès à de telles données nous permettrait de mieux cerner les iniquités fondées sur la race du point de vue de l’aide médicale à mourir en particulier, afin de savoir à quel point la race se conjugue à d’autres formes d’inégalité systémique.
Honorables sénateurs, comment pouvons-nous prendre une décision éclairée ou empêcher que des personnes racialisées ne subissent des préjudices sans savoir si le problème existe réellement? L’analyse comparative entre les sexes plus vise à cerner les conséquences potentielles des politiques, programmes et services sur divers groupes de femmes, d’hommes et de personnes de diverses identités de genre. La notion de « plus » signifie que l’analyse établit au départ que l’identité d’une personne ne se limite pas au genre et au sexe. Par conséquent, une analyse comparative entre les sexes plus est censée inclure la race, l’origine ethnique, l’âge et tout handicap mental ou physique. Toutefois, le rapport ne va pas au-delà des questions de santé mentale et du taux de suicide chez les populations autochtones.
Selon Sarah Jama, militante pour les droits des personnes handicapées, la voix des Canadiens handicapés vivant dans la pauvreté, dont beaucoup sont racialisés, a été exclue de la conversation. D’après le recensement de 2016, près de 21 % des Canadiens racialisés ont un faible revenu, comparativement à un peu plus de 12 % des Canadiens non racialisés.
J’exhorte l’ensemble des sénateurs à appuyer cet amendement afin que Santé Canada recueille de l’information sur la race de toute personne qui demande l’aide médicale à mourir ou la reçoit. Le multiculturalisme canadien n’est pas seulement un principe, c’est une réalité qui doit être prise en compte dans le projet de loi C-7. Si le gouvernement entend tenir sa promesse de mettre fin au racisme systémique, il doit commencer par recueillir suffisamment de données sur la question.
J’appuie l’amendement présenté par la sénatrice Jaffer parce qu’à défaut d’une analyse fondée sur la race, près d’un quart des Canadiens ne seront pas représentés dans le projet de loi C-7. Je vous remercie.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui en faveur de l’amendement au projet de loi C-7 que propose la sénatrice Jaffer. Cet amendement vise à recueillir des données sur la race des personnes demandant et recevant l’aide médicale à mourir.
Cet amendement me ramène en juin dernier, quand nous sommes tous intervenus dans cette enceinte pour dénoncer le racisme. Je veux rappeler à mes collègues que nous nous sommes réunis en comité plénier, que nous avons tenu un débat d’urgence sans précédent et que nous avons réclamé une enquête, qui est maintenant en cours. Autrement dit, nous avons inscrit la lutte contre le racisme à l’ordre du jour du Sénat.
Lors des débats sur cette question, la sénatrice Moodie a dit que le « racisme est une menace pour le pays et la stabilité de notre société ». La sénatrice Mégie, quant à elle, nous a rappelé que c’est notre rôle « de donner une voix à ces personnes qui demandent justice, et [qu’]il est de notre devoir, en qualité de sénateurs, d’agir ».
Je partage ce sentiment, mais nous devons maintenant aller au-delà des mots et des aspirations et adopter des mesures législatives concrètes.
Nous savons que ces mesures doivent reposer sur des données probantes. Nous savons que ce qui est mesuré retient l’attention et suscite l’action. Nous avons besoin de données, et nous devons les examiner sous un angle multidimensionnel en les désagrégeant afin que nous puissions connaître toute la vérité, et pas seulement des demi-vérités.
Beaucoup de sénateurs ont fait valoir ce point en juin. Maintenant, la motion de la sénatrice Jaffer propose de faire exactement ce que nous réclamions, à savoir de procéder à une collecte de données fondées sur la race. Au comité, le gouvernement a admis que, dans le cadre de son analyse comparative entre les sexes plus, il a omis d’effectuer une analyse exhaustive fondée sur la race des répercussions du projet de loi C-7 sur diverses communautés. Pourquoi? Je ne le sais pas, mais je pense avoir une idée.
Ce qui m’agace, c’est que la race — une caractéristique déterminante de la démographie canadienne, comme près d’un quart de la population canadienne est aujourd’hui issu d’une minorité raciale, et qui, selon les prévisions, représentera 36 % de la population du Canada au cours des 15 prochaines années — se résume à ce simple « plus » — qui ne veut pas dire grand chose d’ailleurs — à la fin du terme analyse comparative entre les sexes. Il n’est donc pas surprenant qu’elle soit oubliée dans les analyses et reléguée aux notes de bas de page.
C’est pourquoi l’amendement dont nous sommes saisis est axé sur la race, pour ainsi veiller à ce que la race ne soit pas oubliée. Quand on nous oublie et qu’on nous ignore à répétition, il n’est plus suffisant d’ajuster les voiles. Il faut naviguer dans une toute nouvelle direction. La sénatrice Jaffer dit qu’assez, c’est assez, et je suis d’accord avec elle.
Je veux être claire quant à ce que nous savons et ne savons pas. Nous savons qu’il y a du racisme au Canada. Nous savons qu’il est présent dans notre système de santé. Nous savons que les personnes ayant des origines différentes ont des expériences complètement différentes du système de soins de santé en fonction de leur race.
Nous en savons également un peu plus que cela. Nous savons que les déterminants sociaux de la santé, tels que la pauvreté, le logement et l’itinérance, sont d’importants facteurs contribuant aux problèmes de santé. Nous savons aussi qu’un nombre disproportionné de personnes racialisées vivent dans la pauvreté, n’ont pas de logement adéquat et présentent un bilan de santé moins bon, ce qui les oblige à recourir davantage au système de soins de santé, lequel, comme nous le savons, est raciste. Ainsi, comme vous pouvez le constater, le problème est vraiment pernicieux.
Cela dit, il y a beaucoup de choses que nous ignorons. Nous ne savons pas si les personnes vulnérables demanderont l’aide médicale à mourir ni si elles l’obtiendront. Nous ne savons pas si la race d’une personne érigera des obstacles individuels ou systémiques. Nous ne savons pas si le régime d’aide médicale à mourir sera appliqué de manière juste et équitable pour toutes les tranches de la population.
Le Canada est, il faut l’admettre, l’un des pays les plus inclusifs au monde. Toutefois, nous semblons avoir en aversion la collecte de données fondées sur la race. Pensez-y : le Royaume-Uni et les États-Unis ont tous deux été en mesure de déclarer, assez tôt dans la pandémie, que la COVID-19 avait une incidence disproportionnée sur les Noirs. En comparaison, au Canada, nous n’avions aucune idée si cette tranche de la population était touchée de manière disproportionnée ou pas, faute de données recueillies à l’échelle nationale. Je peux vous donner les données concernant ma ville, mais je doute que de telles données existent à l’échelle nationale.
Que vont donner toutes ces données? Elles permettront de prendre des décisions éclairées concernant l’aide médicale à mourir et d’asseoir nos interventions sur des faits. Elles aideront le gouvernement à affecter ses ressources de manière stratégique et efficace. Elles permettront de connaître les écueils et les obstacles associés à l’aide médicale à mourir. Elles se traduiront par la création de programmes et de services culturellement adaptés. Elles permettront à tous les groupes d’être traités équitablement et d’avoir accès à tous les services. L’égalité, voilà ce qu’elles vont donner.
Il va sans dire que le gouvernement devra se coordonner avec les provinces et les territoires, mais c’est ce que font les gouvernements de toute façon. Il ne faudrait surtout pas que quelques difficultés de mise en œuvre nous empêchent de faire ce que nous estimons être juste.
Je me permets de citer la sénatrice Moodie lors du débat d’urgence sur le racisme :
Je tiens à ce que les gens qui examineront un jour l’époque actuelle puissent voir que nous avons fait notre possible pour favoriser des changements importants et durables, que nous avons collaboré, et que nous avons mis de côté nos programmes politiques pour mieux écouter les Canadiens.
L’amendement de la sénatrice Jaffer n’a pas seulement de quoi élever le débat. Il est pratique, pragmatique, réaliste, nécessaire et il tombe à point. Tout ce qu’il nous reste à faire, c’est d’exercer collectivement notre volonté politique et sénatoriale. C’est ce que je vous invite à faire en votant pour cet amendement. Je vous remercie.
Honorables sénateurs, je souhaite aujourd’hui donner mon appui à l’amendement crucial que la sénatrice Jaffer propose d’apporter au projet de loi C-7 afin qu’on recueille des données désagrégées en fonction de la race.
Je vous remercie, sénatrice Jaffer, d’encourager si ardemment l’analyse en fonction de la race dans vos travaux en comité et d’avoir présenté cet amendement, qui nous offre l’occasion de créer un précédent, soit la collecte de données ventilées selon la race afin de mettre fin à cette tendance à laquelle nous assistons actuellement, c’est-à-dire cette inaction crasse lorsqu’il s’agit de s’attaquer de front au racisme systémique.
Pendant la présentation de ce projet de loi qui prévoit élargir l’accès à l’aide médicale à mourir, la ministre Qualtrough a réaffirmé ceci :
L’aide médicale à mourir est un enjeu qui relève des droits de la personne. Le projet de loi reconnaît l’égalité des droits à l’autonomie personnelle, et la valeur inhérente et égale de toute vie.
De toute évidence, la vie compte. Nous devons veiller à ce que cette mesure législative protège les Canadiens les plus vulnérables. Le racisme systémique à l’égard des Noirs a créé de telles disparités en matière de santé parmi les Canadiens noirs que nous devons tenir compte de la vulnérabilité des diverses communautés noires dans toutes les mesures législatives sur la santé. L’amendement proposé par la sénatrice Jaffer nous permettrait de disposer des renseignements nécessaires à la compréhension des répercussions à long terme de la loi sur l’aide médicale à mourir sur la vie des Noirs, des Autochtones et d’autres Canadiens racialisés. Je suis extrêmement préoccupée par le fait que sans un examen minutieux, nous courons le risque d’adopter une mesure législative qui fera en sorte que les Noirs et les communautés racialisées resteront invisibles dans les discussions sur la santé, les handicaps, le vieillissement et la pauvreté.
Le ministre Lametti a déclaré que « [l]’aide médicale à mourir est une question profondément personnelle qui touche de vraies personnes et de vraies familles ». Pour les Canadiens noirs, c’est aussi une question d’ordre communautaire.
Au comité, la sénatrice Jaffer a établi qu’une analyse raciale n’avait pas été réalisée sur ce sujet. Le ministre Lametti a expliqué qu’une analyse comparative entre les sexes plus avait été réalisée, mais qu’il n’y avait pas de données sur la race. Le lendemain, la conseillère exécutive principale au sous-ministre a précisé ceci :
[...] en ce qui concerne le régime fédéral de surveillance, nous ne collectons pas de données sur la race ni aucune autre information sur l’origine ethnique.
Comme l’a laissé entendre le ministre Lametti hier, nous devons faire mieux dans ce domaine et nous y veillerons. Nous avons pris bonne note de vos commentaires d’hier et nous les examinons très sérieusement.
Dans le récent discours du Trône, parmi les nombreuses mesures visant à lutter contre les inégalités systémiques, le gouvernement a promis de mettre en place « une approche pangouvernementale fondée sur une meilleure collecte de données désagrégées ». Malheureusement, nous avons appris qu’aucune analyse fondée sur la race n’a été réalisée pour le projet de loi C-7, faute de données sur le sujet. Or, l’analyse comparative entre les sexes plus n’est pas simplement une analyse de genre. L’élément « plus » est généralement oublié. Il faut donc mettre l’accent sur ce « plus » afin d’analyser pleinement les informations et d’éclairer correctement les décisions qui ont une incidence sur les Canadiens vulnérables confrontés à une marginalisation croisée.
Comme certains de mes collègues l’ont indiqué précédemment, ces Canadiens vulnérables constituent un quart de la population du pays.
Une analyse fondée sur la race n’est pas seulement une question de statistiques. Qu’en est-il de la consultation communautaire? Qu’en est-il des prévisions ou des résultats escomptés présentés par les témoins experts? Au printemps dernier, avant même de disposer de chiffres sur COVID-19, même en l’absence de données ventilées en fonction de la race, il a été possible de prévoir les disparités éventuelles dues aux disparités actuelles en matière de santé et d’emploi déjà présentes dans les communautés noires d’un bout à l’autre du Canada.
La liberté de choix figure parmi les principaux arguments invoqués dans le débat sur l’aide médicale à mourir. Comme la sénatrice Pate l’a mentionné à plusieurs reprises au cours des débats, certains Canadiens les plus marginalisés qui n’ont pas accès à des soins adéquats n’ont pas de choix. L’option entre vivre sans soins adéquats et l’aide médicale à mourir n’est pas du tout un choix. Je songe notamment aux nombreuses personnes des communautés néo-écossaises d’origine africaine qui sont confrontées à la fois aux facteurs de la race et du handicap, souvent affligées de maladies associées, et qui n’ont pas accès à...
Votre temps de parole est écoulé.
Merci, Votre Honneur. Je joins ma voix à celle de mes estimés collègues.
Compte tenu de la portée restreinte du projet de loi C-7, qui porte sur les dispositions du Code criminel relatives au suicide, aucun amendement ne permettra d’apporter les changements systémiques nécessaires pour veiller à ce que personne n’endure de souffrances intolérables ou n’envisage la mort en raison d’un accès inadéquat ou inégal aux ressources sanitaires et sociales et aux mesures d’aide au logement et au revenu.
Je félicite la sénatrice Jaffer de ses efforts pour garantir que le gouvernement nous indique au moins qui a recours au projet de loi C-7 et dans quelles circonstances.
Comme la juge Smith et la Cour suprême du Canada l’ont souligné dans l’arrêt Carter :
[...] un système de garanties soigneusement conçu et surveillé peut limiter les risques associés à l’aide médicale à mourir.
Au Comité des affaires juridiques, nous avons entendu des personnes handicapées ainsi que des personnes pauvres ou racialisées, qui ont dit que des médecins ou d’autres membres du personnel médical leur ont proposé une ordonnance de non-réanimation ou l’aide médicale à mourir avant de leur offrir des traitements.
Des témoins noirs et autochtones nous ont indiqué que, à cause du racisme anti-Autochtones et anti-Noirs dans le système de santé, on fait fi de la souffrance de ces personnes ou, pire encore, on s’en moque. On nous a aussi parlé de personnes qui étaient incapables d’avoir accès à des soins médicaux adéquats, qui souffraient inutilement et qui mourraient au sein du même système qui a contribué à perpétuer la stérilisation forcée et, en fait, le génocide.
L’amendement nous aidera à comprendre certains des effets du projet de loi. Malheureusement, il ne fera que faire ressortir les injustices, sans y remédier.
De toute évidence, je suis en faveur de la collecte de données ventilées selon la race. Nous avons également besoin de données sur les déterminants sociaux de la santé des personnes qui ne sont pas en fin de vie et qui demandent de l’aide médicale à mourir, notamment pour savoir s’il s’agit de personnes handicapées et si elles sont institutionnalisées.
Dans le même ordre d’idées, nous devons en savoir plus sur la nature et la disponibilité des solutions de rechange qui ont été ou, plus important encore, n’ont pas été offertes pour soulager la souffrance.
Le gouvernement nous a informés que la plupart des personnes en fin de vie qui ont reçu de l’aide médicale à mourir étaient aisées et qu’environ 80 % d’entre elles ont au moins un certain accès aux soins palliatifs. Or, cette information passe sous silence les circonstances dans lesquelles les soins ont été reçus ou la nature ou la qualité des soins à domicile, ainsi que les soutiens sociaux et économiques essentiels pour garantir un accès équitable.
Nous avons besoin de données précises sur les personnes à qui est offerte de l’aide dans le domaine de la santé, des services sociaux, de l’économie et du logement et qui en reçoivent. Lorsque ces solutions de rechange à l’aide médicale à mourir n’étaient pas disponibles, nous devons également savoir pourquoi c’était le cas, que ce soit en raison du coût, des délais d’attente ou du lieu de résidence.
En l’absence de mesures du gouvernement fédéral pour assurer un accès adéquat et équitable à ces soutiens, les Canadiens méritent très certainement de savoir comment le projet de loi C-7 fonctionnera. Meegwetch. Merci.
Merci, Votre Honneur. Je prends la parole aujourd’hui pour donner mon appui sans réserve à l’amendement que la sénatrice Jaffer propose d’apporter au projet de loi C-7. Je tiens tout d’abord à féliciter la sénatrice Jaffer de soulever avec autant d’ardeur les enjeux auxquels sont confrontés les Canadiens racialisés. Pendant toute la durée du débat entourant ce projet de loi, elle s’est notamment penchée sur la question de la collecte de données fondées sur la race, ce qui a permis de faire progresser le débat.
Je me réjouis de cet amendement, car il représente une réponse judicieuse à la demande des Canadiens noirs. Les sénateurs se souviendront qu’en juin de l’an dernier, le Caucus des parlementaires noirs a publié une déclaration dans laquelle il adressait plusieurs requêtes au gouvernement, dont la première portait sur la collecte et l’utilisation adéquate de données désagrégées. Ce communiqué a reçu l’appui de nombreux parlementaires, y compris parmi vous, chers collègues.
En décembre dernier, j’ai également participé aux consultations budgétaires du Caucus des parlementaires noirs. Au cours de ces réunions, des dizaines d’intervenants et d’organismes représentant les intérêts des Canadiens noirs nous ont dit que la collecte de données constitue une préoccupation essentielle.
Je souhaite prendre un instant pour expliquer très clairement pourquoi il est important de recueillir des données. Nous savons que les Canadiens racialisés subissent les graves conséquences du racisme systémique. Nous le savons en raison des preuves qui existent, mais aussi de la multitude de récits à ce sujet. Cependant, nous ne sommes pas au fait de la gravité exacte de ces conséquences négatives ni de la manière dont d’autres facteurs peuvent s’ajouter à la problématique du racisme.
La collecte de données fiables et pertinentes permet aux gouvernements et aux parlementaires de comprendre ce genre d’enjeux et d’élaborer des politiques éclairées. En l’absence de tels renseignements, les politiques gouvernementales seront toujours lacunaires et mal ciblées. En réalité, nous avançons à l’aveuglette. À mon avis, les données sont synonyme de pouvoir, et ces données peuvent être utilisées pour orienter nos politiques et faire pression.
Au printemps dernier, Kathy Hogarth, qui enseigne à l’Université de Waterloo, a déclaré la chose suivante dans une entrevue accordée à Global News :
Sans données, il ne s’agit que de spéculations, et tant que c’est le cas, on peut ignorer le problème. Il faut une méthode très rigoureuse de collecte de données qui examine les inégalités. Je vous garantis qu’il y a des inégalités; les conséquences ne sont pas les mêmes pour tous.
Honorables sénateurs, je pense que nous aurions bien voulu disposer de plus de données dans le cadre du débat sur le projet de loi C-7. En fait, je le sais parce que beaucoup d’entre vous ont soulevé ce point pendant le débat. Je pense que nous aurions préféré être mieux informés sur les conséquences que le projet de loi C-14 a eu sur les Canadiens racialisés depuis son entrée en vigueur.
Par ailleurs, il est très probable que nous devrons débattre certains aspects de l’aide médicale à mourir ou les étudier à nouveau dans les années à venir. L’amendement nous aiderait à éviter ce que beaucoup d’entre nous ont déploré en nous fournissant davantage de données afin que le débat et les propositions puissent être mesurés et efficaces.
Enfin, l’amendement respecte le droit des personnes de transmettre leurs données et il permettrait à toutes celles qui le souhaitent de ne pas les divulguer.
Trop souvent, les politiques sont élaborées sans disposer de l’ensemble des données pertinentes. Nous devons continuer d’améliorer l’accès à des données fiables et solides dans chaque système. Il s’agit d’un problème énorme, et bien qu’il y ait beaucoup à faire, je me réjouis des avancées, petites, mais significatives, comme celle-ci.
C’est ce que de nombreuses communautés demandaient, en particulier la communauté noire. C’est ainsi que l’on peut élaborer de bonnes politiques : en disposant de suffisamment de données pertinentes. C’est une amélioration. J’espère que vous appuierez cet amendement important. Je vous remercie.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer l’amendement de la sénatrice Jaffer au projet de loi C-7. Tout comme la sénatrice Jaffer, j’ai de sérieuses réserves et craintes à propos du fait qu’un projet de loi du gouvernement, portant sur un sujet aussi sensible que la vie et la mort des Canadiens, puisse comporter des lacunes aussi flagrantes quant aux analyses effectuées au début du processus d’élaboration et à la protection des personnes vulnérables et des membres des minorités qu’il offre.
Dans une lettre adressée au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles le 18 janvier, le ministre Lametti fait un très bref survol de l’analyse comparative entre les sexes plus qui a été effectuée pour le projet de loi C-7. Pour un autre projet de loi de moindre importance, on jugerait que l’ACS+ décrite est complètement inadéquate et incomplète. Or, l’analyse qui a été effectuée pour ce projet de loi très important sur des enjeux très délicats est totalement inacceptable, car elle ne permet pas de comprendre dans quelle mesure il affectera les personnes racialisées et les membres des autres minorités.
Sur le site Web de Condition féminine Canada, un site du gouvernement, l’ACS+ est, entre autres, définie comme :
« Le signe « plus » dans ACS+ reconnaît que l’ACS+ ne se limite pas aux différences biologiques (sexe) et socioculturelles (genre). Nous avons tous de multiples facteurs identitaires qui se recoupent et contribuent à faire de nous ce que nous sommes. L’ACS+ examine de nombreux autres facteurs identitaires comme la race, l’origine ethnique, la religion, l’âge, et les handicaps de nature physique ou mentale, et la façon dont leur interaction influence la manière dont nous pouvons ressentir les politiques et les initiatives gouvernementales. »
Chers collègues, l’analyse comparative entre les sexes plus est un outil qui est censé être utilisé au Canada depuis que notre pays a ratifié la Déclaration de Beijing des Nations unies sur les droits des femmes et qu’il a adopté le programme d’action connexe en 1995. En dépit de cela et du fait que cela fait 25 ans que nous avons signé cette déclaration, le Canada ne mène toujours pas d’analyse comparative entre les sexes plus sur tous les projets de loi. Elle est plutôt employée ici et là, au cas par cas. Ainsi, rien ne fait en sorte que l’équité et la protection sont pleinement étudiées et garanties, comme elles devraient l’être.
Honorables sénateurs, il convient également de mentionner que la lettre de mandat de tous les ministres contient l’énoncé suivant :
Nos décisions continueront d’être fondées sur des données probantes, de tenir compte des répercussions que les politiques ont sur l’ensemble des Canadiens et de respecter pleinement la Charte canadienne des droits et libertés. Vous soumettrez vos décisions à une analyse comparative entre les sexes plus (ACS+). Vous évaluerez les politiques publiques dans une perspective intersectionnelle afin de lutter contre les inégalités systémiques, dont le racisme systémique, les préjugés inconscients, la discrimination fondée sur le sexe, les obstacles auxquels font face les personnes handicapées, la discrimination contre les communautés LGBTQ2 et les inégalités vécues par toutes les populations vulnérables. Dans la mesure du possible, vous travaillerez à l’amélioration de la qualité et de la disponibilité des données désagrégées afin que toutes les communautés puissent bénéficier des décisions découlant de nos politiques.
Honorables sénateurs, tous les ministres doivent utiliser l’analyse comparative entre les sexes plus et s’efforcer d’améliorer la qualité et la disponibilité des données. Il est toutefois évident que le gouvernement ne s’est pas bien acquitté de cette tâche dans le contexte du projet de loi C-7. Je remercie la sénatrice Jaffer d’avoir présenté l’amendement à l’étude, qui inciterait le gouvernement à s’acquitter correctement de cette tâche.
La directive que voici figure dans la lettre de mandat de tous les ministres :
Il n’y a pas de relation plus importante pour moi et pour le Canada que celle que nous entretenons avec les peuples autochtones. Nous demeurons résolus à avancer, avec respect et dignité, sur la voie commune de la réconciliation. À l’instar de tous les ministres, vous devez continuer de contribuer à l’autodétermination, à l’élimination des différences socioéconomiques et à la suppression des obstacles systémiques auxquels sont confrontés les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Je m’attends à ce que, à titre de ministre, vous travailliez dans un partenariat intégral avec les peuples et les communautés autochtones dans le but de faire progresser la véritable réconciliation.
Chers collègues, ce passage exprime de beaux sentiments, mais, au final, les mots ne sont que du vent. Ils doivent être suivis de gestes concrets, sinon les membres des Premières Nations du Canada et les personnes handicapées seront toujours laissés pour compte et placés en situation de vulnérabilité. Le gouvernement n’a pas exercé une diligence raisonnable en ce qui concerne les consultations avec les Premières Nations et la communauté des personnes handicapées. Tenir une seule table ronde ne suffit pas. De plus, le gouvernement n’a pas appliqué l’analyse comparative entre les sexes plus à ce projet de loi crucial. Il a donc failli à son devoir de travailler dans un partenariat intégral avec les peuples autochtones et d’éliminer les obstacles systémiques auxquels ils sont confrontés.
Malgré les préoccupations que m’inspirent le projet de loi C-7 et l’absence de consultation adéquate, je félicite la sénatrice Jaffer de porter cet enjeu crucial à notre attention. J’encourage vivement les sénateurs à appuyer l’amendement proposé. Merci.
Merci, Votre Honneur. Je suis très heureuse d’avoir l’occasion d’intervenir. Je serai brève, car je suis très impressionnée par les discours prononcés avant le mien. Je félicite chacune de mes consœurs sénatrices qui sont intervenues jusqu’à présent. Le leadership des femmes dans ce dossier est remarquable.
En plus de remercier la sénatrice Jaffer de son initiative et d’indiquer mon appui envers celle-ci, je veux souligner que l’on donne le choix. En effet, si nous forcions qui que ce soit à désigner ses caractéristiques raciales dans le cadre de la collecte de données qui aurait lieu si l’amendement entre en vigueur, nous aurions un grave problème en matière des droits de la personne. Mais, en fait, la divulgation est tout à fait volontaire.
Certes, j’aimerais voir l’amendement inclure les personnes handicapées. Néanmoins, étant donné que les personnes pauvres et handicapées sont de plus en plus issues des communautés racialisées, il me semble qu’en tant que point de départ essentiel, concret et stratégique, il s’agit de l’amendement qu’il nous faut. Il mène à l’action et au changement en matière d’allocation des ressources, lesquelles ont toujours été bien moindres pour les personnes handicapées et, vraisemblablement, lorsque les conditions inadéquates étaient exacerbées par la race.
Merci, sénatrice Jaffer. Je suis honorée de donner mon appui à l’amendement. Meegwetch.
Honorables sénateurs, en tant que chercheuse professionnelle, je sais que, quel que soit le secteur, pour prendre de bonnes décisions, il faut des données récentes, exactes et pertinentes. Depuis que j’ai été nommée au Sénat, en 2018, j’ai souvent souhaité que le gouvernement recueille de meilleures données, notamment au sujet de la santé, de la pandémie de COVID et de l’égalité hommes-femmes. L’année dernière au printemps, alors que le Sénat s’intéressait à la question du racisme systémique, j’ai joint ma voix à celle de mes collègues pour réclamer qu’on recueille davantage de données désagrégées en fonction de la race et qu’on les analyse mieux.
Aujourd’hui, je parlerai de l’amendement sur la collecte des données que la sénatrice Jaffer souhaite apporter au projet de loi C-7. Je l’appuie sans réserve, car il écrirait dans la loi que les médecins, les infirmiers et les pharmaciens doivent recueillir de l’information sur la race des personnes qui demandent ou reçoivent l’aide médicale à mourir, si elles y consentent. Il serait alors possible de savoir s’il y a des inégalités raciales, d’en connaître l’ampleur et de recouper le tout avec les autres formes d’inégalités systémiques.
Je souscris tout à fait au principe de l’amendement, qui souhaite que l’on recueille des données liées à la race des personnes qui demandent et reçoivent l’aide médicale à mourir, mais j’aimerais néanmoins vous faire part de certaines réserves.
J’aurais aimé que cet amendement exige que l’on recueille également des données démographiques, y compris l’information nécessaire pour mieux comprendre les inégalités, dont les inégalités raciales. D’ailleurs, nous ne pouvons pas faire d’analyse intersectionnelle — c’est-à-dire analyser les rapports entre les inégalités raciales et les autres formes d’inégalité, comme le propose l’amendement — sans d’abord mesurer ces autres formes d’inégalité.
Je constate que cet amendement n’exige pas que l’on recueille de l’information sur le genre. Or, il faut que nous sachions s’il y a des inégalités fondées sur le genre dans la façon d’appliquer l’aide médicale à mourir. Par ailleurs, il faudrait absolument connaître l’âge, l’état d’invalidité et la situation socio-économique de la personne qui demande et reçoit l’aide médicale à mourir. Nous devons savoir si la personne qui demande et reçoit l’aide médicale à mourir a un statut autochtone, et nous devons recueillir et utiliser ces données en partenariat et en consultation avec les dirigeants autochtones. Habituellement, les données sur la race sont recueillies différemment et séparément des données sur le statut autochtone, conformément aux protocoles fédéraux. C’est un autre aspect dont j’aimerais que l’on tienne compte.
Honorables sénateurs, de nombreuses questions importantes ont été soulevées dans le cadre de notre débat sur le projet de loi C-7. Nous devons établir si les personnes défavorisées et vulnérables ainsi que les personnes handicapées de la société canadienne sont plus susceptibles de recevoir l’aide médicale à mourir. Ceux qui ont critiqué ce projet de loi avec éloquence pendant de nombreuses semaines ont fait valoir que nos responsabilités envers les Canadiens nous obligent à mieux comprendre ces réalités, et nous ne pourrons répondre à ces préoccupations que si nous avons toutes les données nécessaires.
Certains documents nous ont appris que l’âge, le sexe et le code postal sont collectés comme l’exige la réglementation de Santé Canada. Cependant, le fait que ces données sont collectées maintenant à l’égard de l’aide médicale à mourir ne garantit pas qu’elles le seront à l’avenir, c’est-à-dire après l’examen obligatoire prévu par le projet de loi C-7, qui débutera une fois que cette mesure législative sera adoptée. N’importe quel gouvernement, pour quelque raison que ce soit, pourrait à un certain moment modifier ou abandonner ces mesures.
De plus, comme je l’ai dit plus tôt, il faut collecter bien plus que l’âge, le sexe et le code postal. Il faut recueillir des données fondées sur la race, ce que propose l’amendement, mais il faut également collecter des données sur la situation socio-économique et les handicaps, entre autres. Il faut donc faire en sorte de recueillir davantage de données.
Je me désole que, faute de temps ou d’occasion, nous n’ayons pas pu concevoir un amendement ou un sous-amendement visant ces questions, afin de créer un régime de collecte de données plus vaste.
Sénateurs, voilà mes préoccupations. Je souhaite vivement remercier la sénatrice Jaffer d’avoir pris le temps de discuter de ces questions avec moi au cours des derniers jours, et avec une grande sensibilité. Je sais qu’elle partage mes préoccupations et mes intérêts. Je veux aussi la remercier d’avoir pris cette initiative importante, qui consiste à inclure la collecte de données fondées sur la race dans cette mesure législative, ainsi que pour sa volonté d’améliorer la collecte et de l’analyse des données fondées sur la race chaque fois que cela est possible.
Je vais appuyer cet amendement aujourd’hui. Il faut que la collecte des données fondées sur la race soit garantie, et j’ai hâte que l’examen parlementaire promis sur l’aide médicale à mourir se mette en branle pour que je puisse continuer à réclamer qu’on recueille des données plus vastes à l’égard de l’aide médicale à mourir. J’espère qu’on en tiendra compte dans le cadre de cet examen, à l’instar de tous les autres sujets importants qu’il faudra examiner.
Sénateurs, je vous remercie beaucoup de votre intérêt.
Honorables sénateurs, dans le cadre du débat sur l’amendement, je souhaite attirer votre attention sur une grave lacune du processus d’élaboration du projet de loi dont nous sommes saisis et de son prédécesseur. J’ai déjà pris la parole à ce sujet au Sénat au nom des Inuits du Nunavut, qui représentent 85 % des habitants du territoire.
Je tiens à être clair : le Canada a une obligation solennelle aux termes de l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, qui est consacré et protégé dans la Constitution. Selon l’article 35, le gouvernement du Canada a les obligations suivantes :
a. donner aux Inuit la possibilité de participer à l’élaboration des politiques sociales et culturelles ainsi qu’à la conception des programmes et services sociaux et culturels, y compris leurs modes de prestation, dans la région du Nunavut; et
b. s’efforcer de refléter les buts et objectifs des Inuit quand il met en place les politiques, programmes et services sociaux et culturels dans la région du Nunavut.
Il est clair qu’une telle consultation obligatoire de la part du Canada n’a absolument pas eu lieu au Nunavut selon la Nunavut Tunngavik et le Conseil du développement social du Nunavut, l’organisme qui aurait dû être consulté.
Ce n’est pas la première fois que le Canada fait fi de son obligation solennelle de mener des consultations à propos des nouveaux programmes et services sociaux ainsi que de leurs modes de prestation conformément au traité moderne de l’accord du Nunavut. Si la Couronne avait respecté son devoir, les difficultés que nous vivons maintenant par rapport aux questions linguistiques et interculturelles — la communication dans la langue maternelle de la grande majorité des habitants du Nunavut et la nécessité de comprendre et de respecter les valeurs et les pratiques traditionnelles des Inuits — auraient été évidentes et auraient peut-être été réglées.
À cet égard, je devrais aussi mentionner l’appel à l’action no 22 du rapport de la Commission de vérité et réconciliation :
Nous demandons aux intervenants qui sont à même d’apporter des changements au sein du système de soins de santé canadien de reconnaître la valeur des pratiques de guérison autochtones et d’utiliser ces pratiques dans le traitement de patients autochtones, en collaboration avec les aînés et les guérisseurs autochtones, lorsque ces patients en font la demande. Même si le gouvernement du Canada a adopté cet appel à l’action, il ne semble pas y avoir donné suite. De plus, le projet de loi n’en tient pas compte et ne le mentionne même pas.
Puisque l’inuktitut est le vecteur de ces pratiques et valeurs culturelles, il est essentiel de consulter les Inuits lors de l’élaboration et l’examen de tels programmes. À mon avis, ces consultations feraient probablement ressortir la nécessité d’un glossaire en inuktut, qui serait rédigé avec l’aide de traducteurs-interprètes expérimentés, comme il a été fait dans des domaines comme celui de la justice et dans d’autres domaines de la santé.
Je crois donc que cet amendement, qui reflète la négligence dont sont victimes les minorités, y compris les Inuits du Nunavut que je représente dans cette enceinte, permet de mettre en lumière l’importance de mener des consultations respectueuses, de recueillir des données et de tenir compte des expériences distinctes vécues par les Autochtones dans un milieu interculturel et dans un système de santé parfois insensible à leurs besoins. Ces consultations ont été promises dans le traité moderne qu’est l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, mais elles n’ont toujours pas eu lieu. Elles devraient être menées conjointement avec l’examen de la loi initiale sur l’aide médicale à mourir, qui avait été promis, mais n’a pas encore été réalisé.
Je ne fais pas partie de la sororité des sénatrices. Cependant, je veux exprimer mon appui à cet amendement et remercier la sénatrice Jaffer de l’avoir présenté.
Qujannamiik.
J’ai seulement quelques petites choses à ajouter. Je remercie la sénatrice Jaffer d’avoir présenté cet amendement. Je voterai pour l’amendement, car je conviens que nous avons besoin de l’information qu’il vise à obtenir.
Cela dit, j’aimerais poser la question suivante : pourquoi le Sénat continue-t-il, comme il l’a fait au cours des dernières années, d’adopter des amendements de tous genres en vue de recueillir des données et de réaliser des études sur le nombre de fois où des personnes vulnérables ont peut-être été victimes de discrimination ou de préjudices en raison des actions de l’État ou d’une nouvelle mesure législative fédérale? C’est ce qui s’est produit dans le cas des tests d’alcoolémie aléatoires et des contrôles d’identité, et maintenant, on nous présente encore un amendement.
Comme les nombreux sénateurs qui ont participé aux très longues réunions du Comité des affaires juridiques sur le projet de loi C-7 le savent, beaucoup de témoins autochtones et d’autres témoins ayant été victimes d’injustices fondées sur la race ont récemment comparu devant le comité pour exprimer leur désaccord quant au projet de loi C-7.
Alors, honorables sénateurs, au lieu de simplement recueillir des données sur ces réalités lorsque les projets de loi sont en œuvre, pourquoi les sénateurs ne votent-ils pas contre les mesures législatives discriminatoires et nuisibles du gouvernement à l’endroit des Canadiens vulnérables, notamment le projet de loi C-7, comme les témoins issus de populations vulnérables nous ont suppliés de le faire?
Honorables sénateurs, je prends la parole pour parler de l’amendement proposé par la sénatrice Jaffer. J’appuie tout à fait cet amendement. J’espère néanmoins, comme la sénatrice Dasko, qu’une fois le projet de loi adopté, si c’est le cas, il sera possible de recueillir des données ventilées selon la race pour inclure non seulement les Canadiens vulnérables, mais aussi ceux qui vivent dans des collectivités rurales et éloignées, notamment, comme l’a souligné le sénateur Patterson, les Autochtones, les Inuits et les autres groupes qui ont souvent un accès limité et difficile aux services de santé, qu’ils sont obligés d’obtenir loin de chez eux.
Comme la sénatrice Moodie l’a dit, il arrive trop souvent que nous manquions de données pour prendre nos décisions. Nous devons faire absolument tout notre possible pour apporter des changements qui nous bénéficieront tous sur le plan social et économique. À partir d’aujourd’hui, adoptons une nouvelle pratique qui fera que toutes les mesures législatives prendront en compte de meilleures données.
La plupart des Canadiens appuient le projet de loi C-7, mais certains — en particulier, les Canadiens vulnérables — craignent toujours ses conséquences. La collecte de données désagrégées est essentielle pour évaluer avec précision et exactitude la mise en œuvre du projet de loi C-7 au fil du temps, partout dans notre pays. Les données sont essentielles pour s’assurer que la mise en œuvre de ce projet de loi se fait adéquatement et pour que puissent avoir lieu à l’avenir de bonnes évaluations reposant sur les faits et non des craintes. Merci beaucoup, chers collègues.
Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?
Des voix : D’accord.
Une voix : Avec dissidence.
(La motion d’amendement de l’honorable sénatrice Jaffer est adoptée avec dissidence.)
Est-ce possible de noter une abstention, car je suis dans l’impossibilité de voter pour la motion?
Sénateur Gold, nous dirons que la motion a été adoptée avec dissidence. Les bleus incluront vos observations.
Merci.