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Le Code criminel—La Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés

Projet de loi modificatif--Deuxième lecture--Ajournement du débat

7 décembre 2021


L’honorable Salma Ataullahjan [ + ]

Propose que le projet de loi S-223, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (trafic d’organes humains), soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je prends la parole à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi S-223, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (trafic d’organes humains). Ceux qui savent compter se sont aperçus que c’est la quatrième fois que je présente ce projet de loi, et j’espère bien que ce sera la dernière.

Il y a moins de six mois, durant la dernière session parlementaire, le projet de loi S-204, qui ressemble en tous points au projet de loi que nous examinons aujourd’hui, a été adopté à l’unanimité au Sénat. Tous les partis l’ont également appuyé à l’autre endroit, mais il a malheureusement été retiré du Feuilleton pour des raisons indépendantes de notre volonté.

Honorables sénateurs, les Canadiens nous demandent désespérément d’adopter sans plus attendre ce projet de loi, qui résulte de 13 ans de travaux parlementaires. Pour ceux d’entre vous qui ne connaîtraient pas ce projet de loi, c’est avec plaisir que je vous en ferai un résumé.

Le projet de loi S-223 propose de renforcer la réponse du Canada à l’égard du trafic d’organes en créant de nouvelles infractions relatives à ce genre de comportement dans le Code criminel et d’étendre la compétence extraterritoriale à ces nouvelles infractions. De plus, il vise à modifier la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés afin de prévoir que, si le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration est d’avis qu’un résident permanent ou un étranger s’est livré à des activités liées au trafic d’organes humains, le résident permanent ou l’étranger est interdit de territoire.

À l’heure actuelle, il n’y a pas de loi au Canada qui interdit aux Canadiens d’aller à l’étranger, d’y acheter des organes en vue d’une transplantation, puis de retourner au Canada. C’est une honte, surtout quand on sait que le Canada s’est joint à la plupart des pays du monde pour condamner la vente d’organes et le tourisme de transplantation.

Plus de 100 pays ont adopté des mesures législatives pour interdire le trafic d’organes. De plus, plusieurs pays ont répondu en adoptant des mesures législatives qui renforcent les lois existantes qui interdisent le trafic et la vente d’organes. Nombre d’organismes gouvernementaux et professionnels ont conçu des initiatives pour encadrer la transplantation d’organes à l’échelle nationale et internationale et pour lutter contre le trafic d’organes. La Convention du Conseil de l’Europe contre le trafic d’organes humains est l’une de ces initiatives.

D’ici l’adoption de ce projet de loi, nous devrons nous fier uniquement au sens moral et éthique des gens pour dissuader les Canadiens de chercher et d’obtenir des organes à l’étranger. Malheureusement, nous savons que ces mesures dissuasives ne sont pas suffisantes.

En 2012, l’Organisation mondiale de la santé a affirmé qu’un organe était vendu de façon illégale toutes les heures. On estime que 10 000 transplantations d’organe illégales ont lieu chaque année à l’échelle mondiale, ce qui veut dire que, dans les 13 dernières années où nous avons tenté de mettre un terme au prélèvement et au trafic d’organes, il y a eu plus de 130 000 transplantations d’organe illégales.

En raison de la nature internationale du problème, qui fait que des personnes vulnérables sont exploitées pour répondre à la demande d’organes dans des pays comme le Canada, nous devons faire plus que d’infliger des peines. Nous devons agir maintenant en adoptant des mesures législatives. Quand ce sera fait, les auteurs de ces crimes sauront qu’ils peuvent être poursuivis au Canada et interdits de territoire.

Malgré notre incapacité à éradiquer les violations des droits de la personne partout dans le monde, nous pouvons changer les choses dans notre pays. Nous avons totalement le pouvoir de ne pas être complices du tourisme de transplantation à l’intérieur de nos frontières. Ce projet de loi est un pas dans la bonne direction pour éviter cette complicité.

Nous avons le pouvoir d’instaurer partout au pays les politiques tant souhaitées sur l’échiquier mondial à l’égard du droit international. En tant que parlementaires, peu importe le parti, nous pouvons — nous devons — apporter notre contribution. On ne peut plus attendre pour faire tout ce que nous pouvons afin d’enrayer cette horrible pratique répandue dans le monde. Merci.

Je remercie la sénatrice Ataullahjan. Honorables sénateurs, c’est la troisième fois que j’interviens en faveur du projet de loi de la sénatrice Ataullahjan. Je ne peux pas rajouter grand-chose à son sujet. Le tourisme de la transplantation d’organes en vue d’en tirer profit s’en prend aux plus vulnérables et aux plus pauvres, qui sont nombreux à en être victimes par désespoir. Cette pratique est en soi associée à un horrible élitisme des pays industrialisés.

Il existe beaucoup trop d’histoires d’enfants rendus aveugles ou d’hommes et de femmes pauvres contraints de donner leurs organes contre une somme qu’ils ne verront jamais ou de vivre avec des effets débilitants. Trop de prisonniers se font prélever des organes au profit d’individus qui peuvent se le permettre, comme s’ils vivaient dans un goulag à la Frankenstein. Le roman de Mary Shelley fait pâle figure en comparaison.

Ce projet de loi vise à prévenir le tourisme illégal de la transplantation d’organes en vue d’en tirer profit et à rendre cette activité criminelle et passible d’une peine au Canada. Rien ne me permet de croire que ce projet de loi ne pourrait pas être adopté par acclamation, comme ce fut le cas ici même à la dernière législature. Merci.

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