Le Code criminel
Projet de loi modificatif--Deuxième lecture--Débat
23 juin 2022
Propose que le projet de loi C-28, Loi modifiant le Code criminel (intoxication volontaire extrême), soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-28, Loi modifiant le Code criminel (intoxication volontaire extrême).
Le projet de loi répond aux décisions de la Cour suprême du Canada dans les affaires Brown, Sullivan et Chan, portant sur les situations rares, mais graves où une personne cause du tort à autrui alors qu’elle est dans un état d’intoxication volontaire extrême. Comme vous le savez, la cour a invalidé une disposition du Code criminel qui essentiellement interdisait d’invoquer l’intoxication volontaire comme défense.
La réponse législative choisie par le gouvernement et appuyée par l’autre endroit correspond exactement à la feuille de route législative que la Cour suprême du Canada a fournie dans l’affaire Brown. En bref, elle vise à ce que les personnes qui consomment négligemment des substances intoxicantes, perdent le contrôle et causent du tort à autrui puissent être tenues criminellement responsables de ces actes de violence.
Le projet de loi C-28 est court, mais important. Il cible un grave problème urgent d’une façon efficace qui garantit sa constitutionnalité. Il se fonde sur les principes fondamentaux du système de justice pénale au Canada. Il représente aussi une contribution responsable du Parlement à l’évolution constante du droit canadien sur la responsabilité criminelle et l’intoxication.
Dans mon intervention d’aujourd’hui, j’espère souligner le rôle sous-jacent de certains principes fondamentaux de la common law qui régissent la responsabilité légale; les rôles du Parlement et des tribunaux, et l’interaction ou le dialogue entre les deux; l’incidence de la Charte canadienne des droits et des libertés; les rôles du Barreau, des procureurs et des avocats de la défense dans les causes criminelles; au cœur du sujet, les victimes des crimes et les personnes accusées d’avoir commis des crimes.
J’espère aussi aborder plusieurs préoccupations importantes qui ont été soulevées concernant le projet de loi C-28, y compris les questions touchant l’efficacité, et que les comités du Sénat et de l’autre endroit pourront examiner plus à fond au moment de la rentrée parlementaire à l’automne.
Permettez-moi de commencer en situant le projet de loi C-28 dans son contexte juridique et politique immédiat.
Depuis que la cour a rendu ses décisions, il y a à peine plus de cinq semaines, de nombreuses personnes s’inquiètent que des actes de violence commis par une personne en état d’intoxication extrême risquent de demeurer impunis.
Plusieurs organismes ont notamment exprimé des préoccupations à l’égard des décisions qui pourraient changer notre façon de voir l’intoxication et la responsabilité pénale. Ces organisations s’inquiètent du message que cela envoie aux survivants d’agressions sexuelles et d’autres crimes violents.
On a réclamé des mesures législatives rapides, et le projet de loi C-28 répond à ces appels. Selon le gouvernement, il s’agit d’une mesure qui sera non seulement constitutionnelle, mais aussi efficace.
Chers collègues, permettez-moi d’être clair sur un point. Être en état d’ébriété n’est pas une défense valide pour commettre un acte criminel, comme une agression sexuelle. C’était la loi avant les décisions de la Cour suprême, c’est encore la loi aujourd’hui et cela restera la loi si le projet de loi C-28 est adopté.
Comme l’a déclaré la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R. c. Bouchard-Lebrun en 2011, le mode par défaut dans toutes les procédures pénales est qu’une personne est pénalement responsable de son comportement, même si elle est en état d’ébriété.
L’intoxication extrême est un état rare dans lequel une personne est inconsciente de sa conduite ou est incapable de la maîtriser.
La Cour suprême a décrit l’état d’intoxication extrême comme un « état voisin de l’automatisme ». Autrement dit, l’esprit n’est plus aux commandes du corps. Généralement, lorsque l’esprit n’est plus maître, une personne ne peut être tenue moralement responsable de ses actes; en droit, à la lumière de la Charte et des décisions judiciaires pertinentes, cette personne ne peut, généralement, être tenue légalement responsable.
À l’origine, la façon dont le droit pénal canadien traite l’intoxication est un legs de la common law d’Angleterre. L’arrêt Majewski de la Chambre des lords du Royaume-Uni a déterminé que l’intoxication volontaire, si extrême soit-elle, n’est pas une défense valable pour les crimes d’intention générale, tels que les voies de fait causant des lésions corporelles ou l’agression sexuelle. L’arrêt Leary, rendu en 1977 par la Cour suprême du Canada, a confirmé que tel était l’état du droit au Canada, et il en est demeuré ainsi jusqu’à la décision rendue par la Cour suprême du Canada en 1994 dans l’affaire Daviault.
L’affaire Daviault concernait la Charte et elle constitue un tournant en droit Canadien. Dans l’arrêt Daviault, la Cour suprême du Canada avait conclu qu’une défense d’intoxication extrême pour les crimes d’intention générale devait être permise afin que la common law soit conforme à la Charte, notamment en ce qui a trait au droit figurant à l’article 7, qui dit, au sujet du droit à la liberté, qu’il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale, et au paragraphe 11(d), concernant le droit à la présomption d’innocence. Plus particulièrement, la cour a affirmé que l’arrêt Leary violait la Charte parce qu’il permettait qu’un accusé soit reconnu coupable, même s’il avait agi de façon involontaire ou sans intentions criminelles.
Après l’arrêt Daviault, en 1995, le Parlement a adopté l’ancien projet de loi C-72, édictant l’article 33.1 du Code criminel. Chers collègues, voilà un exemple de l’interaction — ou du dialogue, devrais-je dire — entre les tribunaux et le gouvernement dont j’ai parlé plus tôt.
L’intention du législateur concernant l’article 33.1 était de limiter l’utilisation de la défense d’intoxication extrême dans les affaires concernant des infractions violentes en vue de protéger la population contre la violence commise par des personnes extrêmement intoxiquées et de favoriser la responsabilisation en évitant qu’un accusé puisse se soustraire à sa responsabilité criminelle quant aux gestes violents qu’il avait posés alors qu’il s’était volontairement intoxiqué de façon extrême.
Premièrement, l’article 33.1 visait à protéger la population contre la violence commise par des personnes extrêmement intoxiquées, en particulier les gens qui présentent un risque plus élevé de subir ce genre de violence.
Malheureusement, nous savons qu’il existe des liens clairs entre le caractère genré de la violence, en particulier la violence sexuelle et la violence entre partenaires intimes, et l’intoxication.
Selon une enquête menée par Statistique Canada en 2018, 63 % des femmes et des filles qui ont été tuées l’ont été par un agresseur intoxiqué. L’an dernier, l’Organisation mondiale de la santé a déterminé que l’usage nocif de l’alcool représentait un facteur de risque pour la violence sexuelle et la violence entre partenaires intimes.
Le deuxième objectif de l’article 33.1 était de tenir les gens responsables en veillant à ce qu’ils ne puissent pas échapper à la responsabilité pénale pour les crimes violents commis alors qu’ils étaient en état d’intoxication volontaire extrême. Les Canadiens s’attendent à ce que le système de justice tienne les gens responsables de leur comportement criminellement négligent.
Cela m’amène aux affaires Brown, Sullivan et Chan.
Dans les trois cas, la Cour suprême a dû se prononcer sur la constitutionnalité de l’article 33.1 compte tenu, d’une part, des principes de justice fondamentale et de la présomption d’innocence garantis à l’accusé par l’article 7 et l’alinéa 11d) de la Charte canadienne des droits et libertés et, d’autre part, des objectifs du Parlement de protéger les victimes d’actes violents commis par des individus en état d’ébriété, surtout les femmes et les enfants, et de tenir les auteurs responsables de leurs actes.
Avec votre permission, je vais expliquer en détail le raisonnement dans l’arrêt Brown, car ce raisonnement est essentiel pour comprendre pourquoi le gouvernement a pris l’orientation stratégique qu’il a prise et pourquoi d’autres orientations n’ont pas été prises ou ne devraient pas l’être parce qu’elles risqueraient fortement d’être jugées inconstitutionnelles.
Le juge Kasirer, qui a rédigé l’opinion de la Cour, a précisé que la décision de la Cour se limitait aux cas d’automatisme et qu’elle n’ouvrait en aucun cas la porte à la possibilité d’invoquer l’état d’ébriété comme défense. Il a écrit ceci :
En clair, selon le droit au Canada, l’intoxication sans automatisme n’est pas un moyen de défense opposable au type de crime violent en cause dans l’affaire qui nous occupe. Le sort des questions constitutionnelles dans les présents pourvois n’a aucune incidence sur la règle voulant que l’intoxication sans automatisme ne soit pas un moyen de défense opposable aux crimes violents d’intention générale au Canada.
Toutefois, la cour a conclu que l’article 33.1 avait violé la Charte, car il risquait d’entraîner la condamnation de personnes n’étant pas responsables de la violence au cœur des infractions dont elles pourraient être reconnues coupables. Selon la cour :
[...] l’accusé risque d’être déclaré coupable de l’infraction d’intention générale en cause — dans le cas de M. Brown, de voies de fait graves — en raison d’actes accomplis alors qu’il était incapable de commettre l’acte coupable (l’actus reus) ou d’avoir l’intention coupable (la men rea) requise pour justifier une déclaration de culpabilité et une peine. Un tel individu n’est pas tenu responsable d’actes qu’il a commis dans l’exercice de son libre-arbitre — y compris de son choix d’ingérer une substance intoxicante alors que ni le risque d’automatisme ni le risque de préjudice n’étaient nécessairement prévisibles. Au contraire, l’accusé est appelé à répondre du crime d’intention générale qu’il ne peut pas commettre volontairement ou délibérément, une infraction dont il peut être moralement innocent suivant le droit criminel ainsi que l’art. 7 et l’al. 11d). Priver une personne de sa liberté pour des actes involontaires commis alors qu’elle se trouvait dans un état s’apparentant à l’automatisme — des actes qui ne sauraient être criminels — viole les principes de justice fondamentale dans un système de justice criminelle fondé sur la responsabilité personnelle de chacun pour ses actes. À première vue, non seulement le libellé de l’art. 33.1 n’établit pas une faute constitutionnellement valide pour l’infraction visée à son troisième paragraphe, mais il crée ce qui équivaut à un crime de responsabilité absolue.
En déclarant l’article 33.1 inconstitutionnel et sans effet, la Cour suprême a créé un vide juridique et invité le Parlement à le combler. Par la même occasion, la cour a fourni au Parlement deux pistes de solution pour atteindre les objectifs liés à la lutte contre la violence occasionnée par l’intoxication extrême. Le gouvernement a suivi ces indications à la lettre dans le projet de loi C-28.
Aux paragraphes 10 et 11 de la décision de la Cour suprême dans l’affaire R. c. Brown, on retrouve ces pistes de solution. Je vous cite encore une fois un passage du juge Kasirer. Il a dit :
ll était loisible au Parlement d’adopter une disposition législative visant à tenir des personnes extrêmement intoxiquées responsables d’un crime violent lorsqu’elles ont choisi de créer le risque de préjudice en ingérant des substances intoxicantes.
Et plus loin, à l’article 11, il ajoute ceci :
Je suis conscient qu’il n’appartient pas aux tribunaux d’élaborer des politiques sociales, et encore moins de rédiger des lois à l’intention du Parlement, dès lors que les tribunaux ne sont pas conçus, sur le plan institutionnel, pour de telles tâches. Il est toutefois utile pour l’analyse qui suit de rappeler, comme l’ont fait remarquer les juges majoritaires dans l’arrêt Daviault lui-même (p. 100), et les juges majoritaires de la Cour d’appel dans l’arrêt Sullivan (par. 132), qu’il serait vraisemblablement loisible au Parlement de créer une infraction autonome d’intoxication criminelle. D’autres personnes, y compris le juge qui a tenu le voir-dire dans le cas qui nous occupe (2019 ABQB 770, par. 80 (CanLII)), ont suggéré qu’il serait possible de tenir l’auteur de ces actes responsable de l’infraction visée au par. 33.1(3) si la norme juridique de la négligence criminelle exigeait que l’on démontre à la fois que le risque d’une perte de maîtrise et le risque du préjudice en découlant étaient raisonnablement prévisibles. Dans l’un ou l’autre scénario, le Parlement édicterait une loi qui serait fondée sur « l’instinct moral » selon lequel la personne qui choisit de s’intoxiquer à l’extrême peut légitimement être tenue responsable d’avoir créé une situation où elle menace l’intégrité physique d’autrui [...]
Honorables sénateurs, le projet de loi C-28 vise essentiellement à mettre en œuvre la seconde piste de solution proposée par la Cour suprême — c’est-à-dire de se fonder sur les normes relatives à la négligence criminelle — afin de concrétiser les objectifs de l’ancien article 33.1, mais d’une manière qui tient compte des décisions de la Cour suprême et qui respecte la Charte.
En outre, le projet de loi C-28 conserve autant que possible le libellé précédemment utilisé dans la disposition et l’ensemble de la jurisprudence, réduisant ainsi l’incertitude et le risque de litige associés à un projet de loi qui modifie le droit constant existant. Depuis plus de 25 ans, ces mots décrivent des états voisins de l’automatisme ou de l’aliénation mentale, qui minent la responsabilité pénale d’une personne pour ses actes.
Certaines personnes ont dit craindre que la définition d’« intoxication extrême » proposée dans le projet de loi C-28 ne soit pas assez inclusive, c’est-à-dire que les personnes dans des états voisins de l’aliénation mentale puissent échapper à leur responsabilité. Chers collègues, je vous indique respectueusement que la Cour suprême du Canada elle-même a réglé cette question en 2011.
La Cour, dans l’affaire R. c. Bouchard-Lebrun, a fait disparaître la distinction entre « un état voisin de l’automatisme » et « un état voisin de l’aliénation mentale » en caractérisant à plusieurs reprises les mots utilisés dans l’ancienne disposition, l’article 33.1, comme englobant les états où la personne commet ce qui semble être un acte volontaire sous l’influence d’idées délirantes induites par la drogue. Il n’y a aucune raison de croire que les tribunaux limiteraient la portée du projet de loi C-28 ou qu’ils feraient obstacle à son objectif clair en interprétant étroitement la définition lorsque celle-ci offre suffisamment de souplesse pour s’adapter à l’évolution de la jurisprudence relative à l’automatisme.
En ce qui a trait à la défense d’automatisme sur laquelle la cour s’est penchée dans l’affaire R. c. Brown, elle ne s’applique que dans des circonstances rares et très précises, et ne concerne presque jamais l’intoxication par l’alcool seul. C’est en raison des différentes façons dont l’alcool affecte la capacité cognitive et motrice, comparativement aux autres drogues comme la psilocybine ou le LSD. On en a beaucoup discuté il y a 20 ans, lorsque le Parlement a adopté l’ancien article 33.1, et cela figure dans les décisions de la Cour suprême dans l’affaire Brown, dont le gouvernement s’inspire.
Chers collègues, le projet de loi C-28 affirme qu’il est juste et équitable de tenir ceux qui ont commis des crimes violents dans un état d’intoxication extrême responsables de leurs gestes s’ils ont fait preuve de négligence criminelle en consommant des substances toxiques. Nous pouvons tous convenir qu’il est inacceptable que des gens se mettent négligemment dans un état où ils ne peuvent pas contrôler leurs actions, et qu’ils échappent ensuite aux conséquences des préjudices qu’ils ont causés à d’autres. Comment cela fonctionnerait-il, en pratique, et de quelle manière le projet de loi C-28 répond-il aux préoccupations que nous avons entendues concernant son efficacité?
Il incombe à la Couronne de prouver tous les éléments essentiels du crime hors de tout doute raisonnable; tout doute raisonnable quant à la culpabilité de la personne doit mener à un acquittement. Ainsi fonctionne la présomption d’innocence, qui a été reconnue explicitement en common law par la Chambre des lords en 1935 dans l’arrêt Woolmington c. DPP , puis est entrée dans la Constitution du Canada en 1982 puisqu’elle figure dans la Charte des droits et libertés.
De plus, en vertu de plusieurs siècles de common law, pour que l’accusé soit reconnu coupable, la poursuite doit prouver qu’il a commis un acte volontaire interdit, ce qu’on appelle l’actus reus, et qu’il avait une intention criminelle, ou mens rea. En vertu de l’article 33.1 actuel, avant que le juge des faits puisse prendre en considération l’intoxication extrême comme défense, l’accusé doit présenter des preuves qui convainquent le juge que cette défense est vraisemblable. Il s’agit d’une question de droit que le juge doit trancher. Étant donné les paramètres établis dans les arrêts Daviault et Brown , l’accusé devra, pour satisfaire à ce critère, produire une preuve d’expert. La Couronne répondra en présentant sa propre preuve d’expert.
Chers collègues, d’un point de vue juridique, l’intoxication extrême est une défense rarement utilisée, notamment en raison du seuil de preuve initial requis — que je viens de décrire —, mais aussi en raison du fardeau juridique dont l’accusé doit s’acquitter. Pour se prévaloir de cette défense, l’accusé doit ultimement prouver, au moyen de témoignages d’expert et selon la prépondérance des probabilités, qu’il était vraisemblablement dans un état d’intoxication extrême s’apparentant à l’automatisme, par opposition à un simple état d’intoxication élevée.
Cette approche s’apparente à d’autres moyens de défense fondés sur l’incapacité d’une personne de connaître ou de contrôler ses actes, comme le moyen de défense fondé sur la non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux ou d’automatisme causé par un coup à la tête. Comme je l’ai dit, la question de savoir si les témoignages d’experts présentés sont suffisants pour faire valoir la défense doit être évaluée par le juge. S’il n’y a pas suffisamment de preuves pour répondre au critère de vraisemblance, le juge des faits — le jury s’il s’agit d’un procès avec jury — ne permettra pas du tout que la défense soit prise en compte. Cependant, s’il y a suffisamment de preuves pour satisfaire au fardeau de présentation, le jury recevra des instructions pour en tenir compte.
Cependant, ce n’est que la première étape. Pour que la défense fonctionne, l’accusé doit établir qu’il était vraisemblablement dans un état d’intoxication extrême au moment de l’agression. C’est ce qu’on appelle parfois un « renversement du fardeau de la preuve », car, normalement, l’accusé n’a pas besoin de prouver sa défense. En outre, cela doit être démontré selon la prépondérance des probabilités, ce qui est la façon de la loi de fixer une norme plus élevée, ce qui signifie que c’est plus probable qu’improbable. Pourquoi? C’est parce que l’accusé est le mieux placé pour présenter ce genre de preuve, et les tribunaux ont jugé que c’est acceptable sur le plan constitutionnel dans de tels cas. Le projet de loi C-28 laisse en place cette importante exigence pour l’établissement de la défense, et la défense continuera de porter ce lourd fardeau.
Si une personne établit qu’elle était dans un état d’intoxication extrême aux termes du projet de loi C-28, elle serait quand même tenue criminellement responsable si elle a agi avec négligence, c’est-à-dire si elle s’est écartée de façon marquée de la norme de diligence attendue d’une personne raisonnable dans les circonstances, en ce qui a trait à la consommation de substances intoxicantes. Le tribunal peut donc ensuite présenter une preuve pour établir la responsabilité du crime violent dont la personne est accusée en utilisant la voie de la négligence criminelle de l’article 33.1 qui est proposée dans le projet de loi C-28.
C’est sur cette question que des préoccupations ont été soulevées. À mon avis, l’état de la jurisprudence dans sa forme actuelle — des questions de droit bien établies et bien comprises par les juges et les avocats, les procureurs et la défense — prévoit déjà une réponse à ces préoccupations et, en tout respect, il appuie la proposition voulant que le projet de loi C-28 soit une réponse efficace aux cas où la défense de l’intoxication extrême peut être utilisée.
Permettez-moi de donner des précisions. La première question est la suivante : quelle est la norme de diligence que nous exigerions de l’accusé? Il s’agit de déterminer si une personne raisonnable aurait pu prévoir dans les mêmes circonstances que la consommation de substances intoxicantes pourrait provoquer une intoxication extrême et amener la personne à causer un préjudice à autrui. Il s’agit d’un critère objectif. Il se distingue de ce que l’accusé a effectivement prévu ou de son intention réelle.
La deuxième question porte sur l’évaluation de la conduite de l’accusé par rapport à la norme de diligence objective. Le projet de loi C-28 fournit des lignes directrices aux tribunaux sur la façon de mener cette analyse, exigeant qu’ils prennent en compte toute circonstance pertinente, notamment ce que la personne a fait ou n’a pas fait afin d’éviter ce risque.
L’expression « toute circonstance pertinente » reconnaît que la détermination de la négligence se fonde sur le contexte et les éléments de preuve. La cour évaluerait la conduite par rapport à ce qu’une personne raisonnable aurait fait, puis elle déterminerait si l’accusé n’a pas respecté cette norme selon les faits principaux de l’affaire donnée. Cela n’a rien de nouveau. Les tribunaux mènent régulièrement ce type d’évaluation dans d’autres domaines du droit criminel, notamment pour les infractions de négligence criminelle.
Par définition, la signification de « toute circonstance pertinente » varie d’un cas à l’autre. Sont inclus des facteurs comme la nature de la substance consommée et l’emplacement ou le contexte social où la consommation ou des actes ont eu lieu.
Dans l’un des passages de l’arrêt Brown que j’ai cités plus tôt, le juge Kasirer a fait allusion au juge qui a instruit le voir-dire au tribunal de première instance. En l’occurrence, il s’agissait du juge deWit, de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta, qui, au sujet de la preuve relative à cette question, a dit ceci, au paragraphe 82 de la décision :
Ce genre de preuve comprendrait, par exemple, l’expérience et les connaissances acquises par l’accusé sur les effets de certaines drogues ou de l’alcool.
Et voici ce qu’il faut retenir :
L’accusé devrait faire beaucoup plus que déclarer qu’il croyait pouvoir consommer la drogue ou l’alcool sans risque excessif. Il faudrait fournir la preuve qu’il était raisonnable de croire cela. Une telle exigence permettrait d’éviter qu’une personne innocente sur le plan moral soit inculpée et que l’on ne porte pas atteinte indûment à des droits garantis par la Charte.
Si la conduite de la personne, indépendamment de ce qu’elle a pu croire, supposer, prévoir ou vouloir, était déraisonnable, dans la mesure où elle ne correspondait pas à ce qu’une personne raisonnable devrait faire et à ce qu’elle devrait savoir, compte tenu des effets des drogues sur l’organisme et sur la capacité d’une personne à se contrôler, alors cette personne serait coupable du chef d’accusation qui pèse contre elle. C’est un critère objectif. Les tribunaux n’examineront pas cette question en fonction du point de vue de l’accusé, mais de celui d’un Canadien raisonnable, et ils se fonderont aussi sur l’information publiquement accessible. Les caractéristiques personnelles de l’accusé — hormis son incapacité — telles que ses antécédents ou son quotient intellectuel, ne sont pas pertinentes, et la Cour suprême l’a confirmé en 2022, dans l’arrêt R. c. Goforth.
Dans les arrêts rendus récemment à l’égard des affaires Brown, Sullivan et Chan, la Cour suprême a établi que la psilocybine — connue communément sous le nom de champignons magiques — avait contribué à l’intoxication extrême et au comportement violent, que cette substance ait été consommée seule, comme c’était le cas dans l’une des affaires, ou avec de l’alcool, comme dans les affaires Sullivan et Chan, ce qui a eu des conséquences tragiques.
Ces conclusions sont maintenant du domaine public, ce qui signifie que les Canadiens raisonnables devraient être conscients des risques liés à la prise de ces substances. Si le projet de loi C-28 est adopté, on peut s’attendre à ce que les tribunaux en tiennent compte, dans l’évaluation de ce qu’un accusé aurait dû savoir au sujet de l’ingestion de psilocybine, afin de déterminer si un accusé a fait preuve de négligence criminelle dans une future affaire impliquant des faits similaires à ceux présentés au tribunal dans les affaires Brown et Chan. Ce qu’il faut retenir, c’est que certains types de drogues peuvent avoir plus que d’autres le potentiel de conduire à une violence incontrôlée, tandis que d’autres présentent un risque très faible.
En revanche, prenons le cas d’une personne qui consomme un médicament d’ordonnance déclenchant une réaction extrême et imprévue qui aboutit à un état d’intoxication extrême. Alors qu’elle est dans cet état, la personne fait du mal à un membre de sa famille qui habite avec elle. Sur la base de tels faits, une personne raisonnable n’aurait eu aucun moyen d’anticiper cette violente perte de contrôle lorsqu’elle a choisi de prendre le médicament. Avec le projet de loi C-28, contrairement à l’ancienne disposition, l’intention de l’article 33.1 qui est proposé est qu’une telle personne puisse être acquittée. Les décisions dépendront des faits particuliers qui sont présentés au tribunal.
Honorables sénateurs, je comprends que certains s’inquiètent du fait que le nouveau critère exigeant la prévisibilité du préjudice serait indûment difficile à prouver. L’idée maîtresse de ce projet de loi est que les tribunaux pourront tenir une personne responsable de la perpétration d’un crime violent, comme une agression sexuelle, même si la défense d’intoxication extrême a été invoquée. Pour ce faire, les tribunaux devront conclure que l’accusé a fait preuve de négligence criminelle dans sa consommation d’une substance intoxicante.
Les amendements proposés au projet de loi C-28 n’exigent pas que le niveau de risque soit probable ni même plus probable qu’improbable. La question que la Couronne doit prouver n’est pas de savoir si l’accusé aurait dû savoir qu’une drogue particulière entraînerait une perte de contrôle et de la violence, mais si cette drogue pouvait entraîner une perte de contrôle et de la violence. Il s’agit de savoir si le risque est prévisible pour une personne raisonnable, c’est-à-dire le test objectif auquel j’ai fait référence.
De telles évaluations de risque sont des exercices d’équilibre. Ce n’est pas une science exacte. La norme proposée est flexible, et elle permet au tribunal de mettre l’accent sur la question cruciale qui, comme je l’ai dit, est si la personne s’écarte de façon marquée de la norme attendue d’une personne raisonnable, qui consiste à éviter de mettre en péril la vie d’autrui. Le procureur peut soutenir qu’une personne raisonnable se renseignerait sur les effets positifs et négatifs d’une substance intoxicante avant de la consommer, et qu’elle se soucierait également des préjudices qu’elle pourrait causer à autrui, de la façon dont certaines drogues pourraient agir sur son esprit et son comportement, ainsi que des actes de violence qu’elle pourrait commettre si elle ingère certaines drogues. Le procureur peut souligner d’autres cas impliquant une violente perte de contrôle pour étayer l’argument selon lequel un tel risque était prévisible dans l’affaire en cause.
Les arrêts Sullivan et Chan en sont des exemples parfaits. Le procureur peut également soutenir qu’on aurait pu déduire qu’il y aurait un risque de violence à cause de la perte possible de la maîtrise de soi. En effet, une personne n’étant pas maîtresse de ses actes ne peut pas s’empêcher de faire du mal aux autres, et cette perte de maîtrise de soi pourrait aussi mener à un risque de violence incontrôlée. Le jury peut se servir des éléments de preuve pour conclure si une personne raisonnable aurait prévu les risques de sa conduite et tenté de les éviter, et si la conduite de l’accusé a été conforme à la norme attendue ou si elle s’en est écartée considérablement.
Certains pourraient avancer que même avec le projet de loi C-28 , il reste trop difficile de condamner un délinquant gravement intoxiqué, qu’il devrait y avoir une présomption légale selon laquelle l’alcool, à lui seul, ne peut pas produire un état d’intoxication extrême, ou qu’il devrait y avoir un renversement du fardeau de la preuve exigeant que l’accusé prouve que la violence n’était pas prévisible. Tout comme le gouvernement, je comprends les motivations — importantes — à l’origine de ces suggestions et préoccupations. Soyez assurés que le gouvernement et le projet de loi C-28 ont un double objectif commun qui est de protéger les femmes et les filles vulnérables contre la violence et d’obliger les agresseurs à rendre des comptes.
Chers collègues, nous disposons d’une Charte des droits et libertés, et ces suggestions seraient probablement jugées inconstitutionnelles par les tribunaux pour des raisons qui ont été expliquées en détail par le juge Kasirer dans l’affaire Brown. Ces suggestions provoqueraient certainement une nouvelle série de contentieux reliés à la Charte — avec tout ce que cela implique — et entraîneraient de l’incertitude et de l’instabilité. En tout respect, chers collègues, il serait irresponsable que le Parlement adopte des mesures risquant de provoquer des contentieux, au lieu de suivre les recommandations claires de la Cour suprême du Canada. Le projet de loi C-28 constitue une solution plus responsable et sécuritaire, qui est cohérente et conforme aux décisions de la Cour suprême du Canada dans les affaires Brown, Sullivan et Chan.
Permettez-moi de citer le communiqué de presse de l’organisme Fonds d’action et d’éducation juridiques pour les femmes publié le 17 juin, dans lequel le projet de loi C-28 est décrit comme une « mesure législative approfondie, nuancée et constitutionnelle qui vient combler le vide juridique découlant des décisions [de la Cour suprême du Canada] ».
Le projet de loi C-28 reconnaît que tous les membres de la société ont la responsabilité de se protéger les uns les autres des risques prévisibles de leur comportement et ce texte permet de tenir les contrevenants responsables des torts qu’ils causent quand ils n’assument pas cette responsabilité.
Chers collègues, je conclurai en disant que je crois fermement que le projet de loi C-28 vient compléter le travail entamé par le Parlement en 1995, lorsque l’article 33.1 a été initialement promulgué. La modification est petite, mais importante et est conçue pour garder la loi intacte tout en laissant de la place aux rares exceptions restreintes comme l’exige la Constitution selon la Cour suprême. L’adoption de ce projet de loi permettrait de protéger les victimes de violence et les personnes qui pourraient en devenir victimes et de tenir les auteurs de crimes violents responsables de leurs actes.
Je suis fier de parrainer ce projet de loi et je vous exhorte à vous joindre à vos collègues de tous les partis qui, à l’autre endroit, l’ont appuyé à l’unanimité. Merci de votre bienveillante attention.
Sénateur Gold, je vous remercie de ce discours très intéressant. J’aurais aimé avoir le privilège d’être une étudiante dans l’un de vos cours de droit constitutionnel. J’espère que vous me pardonnerez si ma question semble plutôt simple, puisque je n’ai pas étudié en droit et que nous n’aurons pas la chance d’entendre des témoins.
J’aimerais comprendre quelle serait l’incidence de cette modification sur la détermination de la peine. S’il est déterminé d’avance que la personne est coupable de négligence criminelle, le juge en tiendrait-il compte dans la détermination de la peine? Ou le but est-il uniquement d’établir l’intention criminelle en soi?
Eh bien, vous auriez fait une excellente étudiante en droit, parce qu’il s’agit d’une excellente question. C’est d’ailleurs un des éléments qui était au cœur de la décision prise par le Parlement il y a 20 ans — il avait décidé de ne pas faire de l’intoxication de manière négligente une infraction, ce dont j’ai parlé brièvement comme étant une des solutions possibles.
La solution retenue dans le projet de loi C-28 assure le maintien de l’infraction dont la personne est accusée. Alors, si elle est accusée d’agression sexuelle, même si elle était complètement gelée ou complètement soûle, et qu’elle s’était mise dans cet état de façon négligente et que cela lui avait fait perdre le contrôle de ses actes, elle pourra tout de même être reconnue coupable d’agression sexuelle et passible des peines habituelles, avec ce que cela comporte de stigmatisation, si on peut employer ce terme, et de désapprobation sociale.
Il y a 20 ans, le ministre de la Justice de l’époque, Alan Rock, devait décider quelle voie choisir — on en a beaucoup débattu. Il avait dit tout haut qu’il craignait, comme bon nombre de juristes, que la création d’une infraction distincte d’intoxication par négligence criminelle offre ce qu’il appelait un « rabais d’ébriété » au contrevenant. Par définition, la peine aurait été moindre que pour l’agression sexuelle qui avait été commise. Il en aurait été de même pour la stigmatisation. En fait, même le juge Kasirer de la Cour suprême — dont j’ai longuement cité la décision, que je pourrais encore citer longuement — dit la même chose, 20 ans plus tard. En s’appuyant sur la jurisprudence, il dit qu’une infraction distincte n’atteindrait pas les deux objectifs du Parlement, toujours pertinents et valides, qui sous-tendent l’article 33.1. C’est une des raisons pour laquelle, il y a 20 ans, cette option n’a pas été choisie. C’est aussi une des raisons pour lesquelles le gouvernement actuel a choisi la deuxième voie établie par la cour. J’espère que cela répond à votre question.
Sénateur Gold, effectivement, avant l’affaire présentée devant la Cour suprême du Canada le mois dernier, la dernière fois que j’avais entendu parler de l’automatisme ou que j’y avais pensé, c’était probablement dans un cours de première année de droit pénal. Toutefois, nous sommes saisis d’une question très importante aujourd’hui, alors je suis heureuse que le projet de loi ait été présenté rapidement.
Ma question découle de la motion. Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, auquel je siège depuis un certain temps, devra étudier le sujet général et en faire rapport d’ici le mois de mars, puis le gouvernement disposera de 120 jours après le dépôt du rapport pour y donner suite.
Pouvez-vous nous donner des explications parce qu’il paraît un peu étrange de demander au Comité des affaires juridiques de préparer un rapport longtemps après les faits, soit des mois après l’adoption du projet de loi, puis de demander au gouvernement d’y donner suite. A-t-on l’intention de mener une étude plus approfondie qui pourrait mener à des amendements visant à renforcer le projet de loi? Pouvez-vous nous éclairer sur ce sujet? Merci.
C’est une excellente question et elle me donne l’occasion de faire le lien entre la partie du processus dont nous avons convenu plus tôt aujourd’hui et les préoccupations qui ont été soulevées tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du Sénat.
Je crois que c’est notre collègue le sénateur Boisvenu qui a demandé au ministre pourquoi il ne réglait pas simplement le problème temporairement avec la clause « de dérogation » et ne revenait pas ensuite avec une solution plus complète. Je ne veux pas faire dire au sénateur Boisvenu des choses qu’il n’a pas dites, mais des préoccupations ont été soulevées au sujet des mesures qu’il faut vraiment prendre dans ce dossier, c’est-à-dire jeter un regard neuf sur le rôle de l’intoxication dans la responsabilité pénale et porter une plus grande attention aux droits des victimes et à la nature sexospécifique du crime.
C’était une décision restreinte qui a créé une petite lacune. C’est comme le robinet qui fuit dans la salle de bain du troisième étage; ce n’est pas toute la maison qui s’écroule autour de nous.
Je pense que le fait de donner au Comité des affaires juridiques et constitutionnelles le temps de se pencher sur la question globale vise précisément à permettre aux sénateurs d’avoir l’avantage — pas nécessairement de façon exclusive, bien que je sois sûr que cela en fera partie — d’examiner le projet de loi, s’il est adopté, et la question dans son ensemble. Nous pourrons alors formuler des recommandations, entendre des témoins, apporter des contributions et faire notre devoir, ce que nous faisons bien, pour essayer d’améliorer la loi.
Chers collègues, il est aussi important de garder à l’esprit que nous ne formulons pas une simple « demande » au gouvernement de répondre dans les 120 jours. La motion est très claire et elle repose sur notre Règlement : le gouvernement a l’obligation de fournir une réponse dans les 120 jours. S’il ne le fait pas, le Règlement prévoit que l’affaire est renvoyée à un comité spécial; le gouvernement pourrait même risquer d’être l’auteur d’une atteinte au privilège parlementaire. C’est du sérieux. À ma connaissance, aucun gouvernement n’a manqué à ses obligations à cet égard.
On ne parle pas des examens parlementaires, à propos desquels on m’interpelle régulièrement lors de la période des questions, ce qui est tout à fait compréhensible. C’est une démarche sérieuse afin de permettre la tenue d’un second examen objectif digne de ce nom sur une question essentielle et complexe, dans la foulée d’une décision de la Cour suprême du Canada. Cette démarche requiert du temps. Je crois que nous sommes tous d’accord pour dire que ce problème doit être réglé sans tarder, comme le sénateur Plett l’a expliqué mieux que moi un peu plus tôt.
Je crois que le problème a été réglé correctement. Ni le gouvernement ni moi-même n’avons l’impression d’envoyer cette mesure législative là-bas pour que toutes les failles soient réglées. Des gens raisonnables auront peut-être un point de vue différent. Les débats mettront en lumière la diversité des opinions, ce que je respecte. Si l’étude menée par le Sénat détermine qu’il y aurait une meilleure façon de régler ce problème précis, elle sera proposée. Je crois, comme la sénatrice Lankin, que le gouvernement serait ouvert aux propositions visant à améliorer la solution. Il partage ces objectifs. Il a défendu la loi actuelle de son mieux, comme l’ont fait le Fonds d’action et d’éducation juridique pour les femmes et d’autres intervenants.
Le juge Kasirer, juriste aux immenses qualités que je respecte, et la cour, que je respecte tout autant, sont arrivés à un point de vue différent. En fait, de nombreux spécialistes disent depuis plusieurs décennies avoir certains doutes à propos de l’article 33.1. Les écrits spécialisés soulèvent des questions sur sa constitutionnalité depuis longtemps. Voilà où nous en sommes. J’espère que cela répond à votre question.
Je n’ai qu’une question très brève à ce sujet. Vous l’avez mentionné à la fin de votre intervention, mais une partie du rapport doit porter sur l’étude de l’article 33 et peut‑être son application à cette question. Étant donné qu’il s’agit d’une disposition tristement connue, dont personne ne veut vraiment dire le nom, le gouvernement va-t-il examiner sérieusement cette disposition particulière, qui a, bien sûr, été introduite dans la Constitution par le tout premier premier ministre Trudeau?
Vous parlez bien de la disposition de dérogation?
Oui.
J’ignore ce que le gouvernement ferait à cet égard. En bref, le tribunal a réagi rapidement avec cette mesure législative qui, selon lui, et selon moi, règle de façon satisfaisante le problème de l’évier ou des toilettes cassés ou toute autre image architecturale que j’ai utilisée. Je n’ai aucune raison de penser qu’ils ne vont pas essayer d’améliorer la loi si ce sont les recommandations qui ressortent de notre étude ou de celle de l’autre endroit.
Sénateur Gold, vous avez parrainé tant de projets de loi ces derniers temps. Vous avez fait un travail inestimable, et je tiens à vous féliciter à cet égard.
La question que je vais vous poser est d’une grande importance. Je sais que vous prenez toutes nos questions au sérieux, ne vous méprenez pas. Cependant, je suis très préoccupée parce que nous allons étudier cette mesure et nous allons aussi recevoir le rapport d’un comité de la Chambre des communes. Ma première question est la suivante : que se passera-t-il si nos deux rapports sont différents? Comment composerions-nous avec cette situation et quelle serait la suite des choses?
Je sais que vous ne pouvez que spéculer; j’en suis bien consciente. Cependant, si nous recevons un rapport de la Chambre des communes qui ne concorde pas avec nos vues, cela vaut-il même la peine que nous fassions un rapport?
Nous sommes maîtres de notre propre assemblée. Les comités sénatoriaux ont la réputation bien méritée de faire un travail sérieux. Tout d’abord, il est important que le comité prenne le travail au sérieux, et je sais que c’est ce qu’il fera, puis qu’il en définisse la portée. Il incombe au comité de déterminer l’ampleur de son étude.
Comme la sénatrice Lankin l’a signalé, la façon dont les choses ont été structurées — grâce aux modifications proposées par les sénateurs — permet à notre comité de commencer ses travaux, sans devoir les terminer avant de pouvoir examiner ce que d’autres ont pu dire. Nous pourrions entendre des opinions différentes. Il pourrait y avoir des points de contact. Qui sait?
Cependant, à mon avis, notre travail peut seulement être amélioré par les connaissances et les opinions des témoins, ainsi que par les renseignements provenant de l’autre endroit et les conclusions tirées par celui-ci.
Il incombe toutefois à la présidence, au comité directeur et à l’ensemble du comité de décider comment procéder.
Ce qui m’inquiète vraiment, c’est que le Sénat peut seulement faire des recommandations. C’est un processus très différent de ce que nous avons souvent fait par le passé. Habituellement, nous recevons le projet de loi, nous l’étudions au comité, puis il est renvoyé ici pour la troisième lecture. Cette fois-ci, les choses se déroulent tout à fait différemment, et il n’y a rien de mal à cela. Nous pouvons faire preuve de créativité. Toutefois, si nous formulons des recommandations, est-ce qu’on y donnera suite? Qu’adviendra-t-il d’elles? Dormiront-elles sur des tablettes?
Je vous remercie de la question.
Nous devons être clairs sur une chose : la motion qui a structuré notre débat d’aujourd’hui comprend également une étude future des questions plus vastes, mais nous votons sur le projet de loi aujourd’hui. Si vous appuyez le projet de loi tel qu’il est, alors veuillez voter en sa faveur. Je pense que le projet de loi est digne d’être appuyé, et j’ai fait de mon mieux pour essayer de le démontrer.
Donc, sénatrice Jaffer, avec tout le respect que je vous dois, ce n’est pas si différent d’autres choses que nous avons faites. Par exemple, en mai, nous avons adopté le projet de loi, mais nous avons reconnu que certaines questions méritaient qu’une décision soit prise. Dans ce cas, un comité parlementaire mixte devait étudier le projet de loi et faire rapport au Sénat.
La manière dont le gouvernement en place, quel que soit le parti qui le forme, répond à nos recommandations dépend de la qualité de ces dernières et de la réceptivité du gouvernement. Le gouvernement actuel est réceptif à l’idée d’améliorer le droit pénal. Il s’est montré réceptif à répondre immédiatement à la décision prise par la Cour suprême du Canada. Je suis persuadé que si le gouvernement actuel est toujours en place lorsque les rapports seront prêts, il fera preuve d’une grande réceptivité.
Sénateur Gold, votre temps de parole est écoulé. Bien que la sénatrice Pate souhaite poser une question, il n’y a plus de période supplémentaire de cinq minutes. Nous en avons convenu.
Sénateur Gold, merci beaucoup d’avoir tenté de défendre avec ardeur ce projet de loi qui ne me semble pas du tout correspondre à la réalité canadienne pour les femmes victimes de violence conjugale.
Je prends donc la parole aujourd’hui en tant que porte-parole du projet de loi C-28, Loi modifiant le Code criminel (intoxication volontaire extrême), qui a été déposé par l’honorable David Lametti, ministre de la Justice et procureur général du Canada.
Nous savons tous que le projet de loi C-28 est une réponse législative à la décision récente de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Brown, qui propose de réécrire l’article 33.1 du Code criminel afin de le rendre constitutionnel et d’y ajouter la notion de négligence. Cela signifie qu’une personne qui a volontairement et de manière imprudente consommé une quantité excessive de drogues et d’alcool, et dont il était raisonnablement prévisible qu’elle perde le contrôle d’elle-même et de ses actes, serait considérée comme coupable de négligence, et que cette personne pourrait être tenue criminellement responsable de ses actes.
Honorables sénateurs, j’émets des réserves sur l’initiative du gouvernement du Canada de déposer un projet de loi à la hâte et à la dernière minute après la décision de la Cour suprême du Canada d’invalider l’article 33.1 du Code criminel, qui empêchait un accusé d’utiliser l’intoxication volontaire extrême comme moyen de défense afin d’obtenir un verdict de non-responsabilité criminelle, voire un acquittement. Ce projet de loi ne semble répondre que partiellement à la décision de la Cour suprême et à ses commentaires.
Souvenez-vous, chers collègues, de l’aide médicale à mourir. En 2015, la Cour suprême a rendu une décision importante en demandant au Parlement de modifier le Code criminel pour y inclure des dispositions liées à l’aide médicale à mourir. Le gouvernement actuel a déposé la loi C-14 et a dû déposer ultérieurement le projet de loi C-7, parce que le projet de loi C-14 ne correspondait pas à la décision de la Cour suprême. Le projet de loi C-7 a été adopté et ne correspond toujours pas à la décision de la Cour suprême. On a confié à un comité le mandat de s’assurer que les prochains amendements se conformeront à la décision de la Cour suprême, sept ans plus tard. Ce projet de loi me semble du même acabit, c’est-à-dire qu’on risque de se revoir dans un an ou deux pour apporter des modifications à ce projet de loi, afin qu’il corresponde à la décision et aux commentaires de la Cour suprême.
Dans sa décision, la Cour suprême a jugé que l’article 33.1 du Code criminel était contraire à la Charte des droits et libertés. J’aimerais vous citer un passage important de cette décision :
Puisque l’art. 33.1 permet à un tribunal de déclarer un accusé coupable sans preuve de la [notion de] mens rea exigée par la Constitution, il viole l’art. 7 de la Charte. L’article 33.1 prévoit également que l’accusé est criminellement responsable de sa conduite involontaire. Comme l’absence de volonté écarte l’actus reus de l’infraction, la conduite involontaire n’est pas criminelle, et le droit reconnaît que l’exigence relative au caractère volontaire requis pour qu’une personne soit déclarée coupable d’un crime est un principe de justice fondamentale.
Cette même déclaration dit également ce qui suit :
L’article 33.1 viole aussi le droit garanti à l’accusé par l’al. 11d) de la Charte d’être présumé innocent tant qu’il n’est pas déclaré coupable. Pour faire déclarer l’accusé coupable, la Couronne doit prouver hors de tout doute raisonnable tous les éléments essentiels d’une infraction.
Honorables sénateurs, vous aurez compris que même si ma déception est évidente, à la suite de cette décision de la Cour suprême que je considère comme périlleuse pour la sécurité des femmes vivant dans un contexte de violence familiale, je ne reviendrai pas sur les raisons qui ont conduit la Cour suprême à invalider l’article 33.1 du Code criminel. Par contre, j’aimerais souligner la forte réprobation de l’opinion publique à l’égard de cette décision et à la portée qu’elle a sur les victimes d’actes criminels, malgré les éléments pertinents qu’elle contient.
Nous savons que les femmes sont les premières concernées par cette décision, car elles sont les principales victimes d’homicides et d’agressions sexuelles dans un contexte de violence conjugale.
Prenons l’affaire sur laquelle la Cour suprême a statué : un jeune homme qui avait consommé une forte quantité de drogue s’est introduit par effraction dans le domicile d’une femme et l’a violemment battue, lui laissant des séquelles permanentes. Cet homme se retrouve aujourd’hui acquitté du crime qu’il a commis sur une femme innocente. La victime a déclaré ce qui suit à la suite de cette décision :
Il est important de retenir que [cette décision] a des conséquences négatives sur les victimes de voies de fait graves au pays. Parmi elles, certaines ont perdu la vie en raison des suites de ces attaques.
Avec cette décision, un agresseur sexuel pourra utiliser l’intoxication volontaire comme moyen de défense lorsqu’il agressera sexuellement une femme après s’être volontairement drogué ou saoulé. Ce sera la même chose dans le cas d’un conjoint violent qui pourrait être reconnu non criminellement responsable ou même être acquitté pour avoir assassiné sa conjointe après s’être volontairement intoxiqué.
Je vous rappelle que dans une grande proportion des crimes liés à la violence familiale ou conjugale, la composante de l’intoxication est presque toujours présente. Les statistiques sont inquiétantes. Le Québec compte pour 22 % de la population canadienne et on y dénombrait, en 2018, 45 % des cas de non-responsabilité criminelle au Canada. Je crains que la décision de la Cour suprême n’ait pour effet d’ouvrir une nouvelle brèche quant à la possibilité d’utiliser la non-responsabilité criminelle pour acquitter les hommes violents.
Cette décision envoie un signal négatif aux femmes et aux victimes d’actes criminels et mine la confiance des Canadiennes et des Canadiens envers notre système de justice, je tiens à vous le souligner.
Cela étant dit, le ministre de la Justice a décidé d’y apporter une réponse législative au moyen du projet de loi C-28. Bien que je salue sa volonté de réagir rapidement à une décision qui est injuste envers les victimes, j’aimerais rappeler que rapidité n’est pas signe d’efficacité en matière de justice, surtout lorsque nous parlons d’un projet de loi qui modifie le Code criminel en réponse à une décision récente de la Cour suprême.
Le projet de loi C-28 sera adopté en l’espace d’une semaine seulement sans que nous ayons eu le temps de faire notre travail en l’étudiant en profondeur, pour nous assurer — c’est notre devoir de le faire — qu’il règle tous les problèmes soulevés par la Cour suprême que j’ai mentionnés plus tôt.
Notre objectif n’est pas d’adopter un projet de loi imparfait qui sera contesté devant les tribunaux et invalidé par la Cour suprême, mais, au contraire, d’adopter un texte de loi qui respecte la Charte et qui protège les victimes d’actes criminels.
D’ailleurs, hier, dans La Presse, Hugues Parent, professeur de droit à l’Université de Montréal, a indiqué que si le projet de loi est adopté dans sa forme actuelle, il y a de fortes chances qu’on puisse aisément contourner l’article 31. En fait, mon collègue le sénateur Carignan a posé des questions à ce sujet au sénateur Gold. Selon l’analyse de M. Parent, le projet de loi C-28 est fondé sur l’intoxication extrême qui s’apparente à l’automatisme, ce qui se limite à de très rares cas. Il avance que les avocats de la défense n’auront pas beaucoup de difficulté à contourner l’article 33.1 lorsqu’il s’agira de défendre des accusés en état de psychose, un comportement bien plus commun après la consommation excessive de drogues qu’il qualifie non pas d’« automatisme », mais d’« aliénation mentale ».
Cette faille majeure et préoccupante du projet de loi ne pourra pas être étudiée comme il se doit par le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles, qui pourrait y apporter les correctifs nécessaires. C’est un risque supplémentaire à la sécurité des femmes.
L’Association nationale Femmes et Droit, Hébergement femmes Canada et le Luke’s Place Support and Resource Centre for Women and Children ont indiqué, dans une lettre adressée aux sénateurs, que le manque de consultations de la part du gouvernement dans le cadre de ce projet de loi était inquiétant. Ces organismes ont également signifié avoir été consultés seulement quelques jours avant que le projet de loi ne soit déposé et ont précisé que les solutions de rechange qu’ils ont proposées n’ont pas fait l’objet de suivi et ne se retrouvent pas dans le projet de loi C-28. Je le répète : leurs propositions n’ont pas été entendues, même si leurs clientes sont les premières concernées par ce projet de loi. Si j’étais une femme aujourd’hui, je serais indignée et perturbée par le fait que ce projet de loi n’ait pas tenu compte de leurs préoccupations.
Honorables sénateurs, permettez-moi de vous citer un passage de cette lettre qui m’a particulièrement interpellé :
La défense de l’intoxication extrême est une défense qui est presque toujours avancée par les hommes qui commettent des violences à l’encontre des femmes.
Elles prennent le mot « toujours ».
De plus, les hommes responsables de violence contre les femmes sont généralement intoxiqués.
C’est comme je le disais plus tôt dans ma présentation.
Même si la barre est haute en matière de preuve pour que la défense d’intoxication extrême soit couronnée de succès, il ne faut pas sous-estimer l’impact réel de la disponibilité de cette défense sur les décisions d’inculpation et de poursuite. Le Parlement devrait agir rapidement pour s’assurer que les hommes accusés qui s’intoxiquent à l’extrême volontairement avant de commettre des violences fondées sur le genre soient tenus pour responsables.
Ce passage n’est que la continuité de ce qu’a dit la Cour suprême du Canada lorsqu’elle a rendu sa décision. En effet, en invalidant l’article 33.1, le plus haut tribunal de ce pays a indiqué au législateur une possibilité de légiférer afin de protéger les femmes et les victimes, et j’aimerais en citer un passage :
La protection des victimes de crimes violents — surtout à la lumière du droit à l’égalité et à la dignité des femmes et des enfants qui sont susceptibles d’être victimes de violences sexuelles et familiales aux mains de personnes intoxiquées — constitue un objectif social urgent et réel.
Or, dans le projet de loi C-28, je n’ai relevé aucune mesure urgente que celle de réécrire l’article 33.1. On ne traite aucunement des victimes ni des femmes. Cet objectif social urgent et réel reconnu par la Cour suprême n’est pas atteint au moyen du projet de loi C-28, car cette réponse législative ne propose aucune mesure concrète pour protéger les victimes de crimes violents, dont la majorité sont des femmes. Les mesures proposées ne visent qu’à tenter de colmater avec empressement la brèche créée par la décision de la Cour suprême sans tenir compte du problème de fond qui sévit au Canada, soit la violence faite aux femmes.
Je crois qu’il aurait été plus prudent de la part du ministre d’utiliser temporairement l’article 33 de la Charte canadienne des droits et libertés, qu’on appelle la « disposition dérogatoire », afin de déposer l’automne prochain un projet de loi qui répondrait aux attentes des groupes de victimes et d’annoncer des mesures législatives visant à mieux protéger les victimes de violence conjugale. J’aurais aimé que le ministre nous dise que le projet de loi est un premier pas et qu’il compte revenir l’automne prochain avec des mesures solides pour donner aux femmes, qui sont le plus souvent les victimes dans le domaine de la violence conjugale, des moyens de les protéger grâce au Code criminel. Le ministre a négligé cet aspect.
J’aimerais rappeler que 173 femmes ont été assassinées en 2021 et 160 en 2020, ce qui représente 333 femmes en deux ans, soit 30 % de plus qu’il y a trois ans. Il s’agit d’une augmentation de plus de 30 %, ce qui fait en sorte qu’on peut craindre que ce chiffre augmente au cours des prochaines années.
Vous comprendrez donc le malaise que j’éprouve, à titre de défenseur des victimes d’actes criminels et de défenseur des femmes victimes de violence, quant au fait que ce projet de loi ne s’attaque pas directement à ce fléau. Pourquoi le ministre n’a-t-il pas saisi cette occasion pour proposer des mesures concrètes, comme le Québec l’a fait récemment en adoptant le bracelet électronique pour les criminels qui sortiront de prison? Le Québec a créé des tribunaux spécialisés en matière de violence conjugale et de violence sexuelle. Pourquoi le ministre n’a-t-il pas annoncé de telles mesures immédiatement? Qu’attend donc le gouvernement pour agir?
Cela fait cinq ans que je vous parle, ici dans cette Chambre, de la violence faite aux femmes. On ne dira pas que le ministre n’était pas sensibilisé à cette situation. Mieux encore, l’autre endroit a adopté en juin le projet de loi C-233, déposé par la députée libérale Anju Dhillon, qui vise à autoriser l’usage du bracelet électronique partout au Canada. Pourquoi le ministre n’a-t-il pas intégré dans son projet de loi les mesures législatives proposées par la députée Dhillon? On aurait pu adopter en même temps les deux mesures. Si les mesures du projet de loi C-233 avaient été intégrées au projet de loi C-28, je crois que la majorité des groupes de victimes et des groupes de femmes l’auraient applaudi. Or, ce qu’on fait aujourd’hui, c’est plutôt de rendre les femmes encore plus inquiètes pour l’avenir.
Bien que je tienne à reconnaître que le gouvernement fédéral a eu la volonté d’agir dans ce dossier, je crois que ce projet de loi est imparfait et, surtout, qu’il ne va pas assez loin et risque de passer à côté de la cible qui était de mieux protéger les femmes au Canada.
Malgré mes critiques, j’ai l’intention d’appuyer l’adoption de ce projet de loi faute de mesures de rechange. Cependant, je continuerai à me battre pour qu’on puisse améliorer cette situation l’automne prochain et que les femmes soient protégées comme elles le méritent. Merci.
Honorables sénateurs, il est maintenant 18 heures. Conformément à l’article 3-3(1) du Règlement, je dois quitter le fauteuil jusqu’à 20 heures, à moins que nous convenions de poursuivre la séance. Si vous voulez suspendre la séance, veuillez dire « suspendre ».