DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS — Le décès de l'honorable Hugh Segal, C.M.
19 septembre 2023
Honorables sénateurs, en tant qu’ancienne collègue et amie de l’honorable Hugh Segal, j’ai à la fois le grand privilège et l’immense tristesse de lui rendre hommage aujourd’hui.
Notre amitié a débuté au petit matin, il y a une quarantaine d’années, dans les studios feutrés d’un réseau national de télévision. Chaque jeudi matin, nous étions réunis pour l’émission Canada AM. Aux quatre coins du pays, qu’importe leurs allégeances politiques, les gens aimaient Hugh pour sa vive intelligence politique, ses analyses précises et sa grande générosité. Comme l’a dit son ami, le libéral Tom Axworthy, on sortait toujours d’une rencontre avec lui le sourire aux lèvres et le cœur rempli d’espoir.
Bill Fox, l’un de ses amis conservateurs de longue date, disait aussi que :
[L]lorsque s’élevait un débat ou qu’il y avait des désaccords, Hugh y voyait toujours l’occasion d’amorcer une discussion, à la recherche d’un compromis.
Pour lui, le gouvernement devait délivrer les gens de la misère et de la peur, et c’est la raison pour laquelle il se battait pour le revenu de base garanti.
Comme il adhérait à la vision conservatrice de la nation et de l’entreprise, pour lui, la bonne gouvernance se situait au carrefour de la liberté de marché et de l’intérêt général.
Il déplorait le recul de la civilité et s’inquiétait des politiciens et des médias qui se font « marchands de polarisation », comme il le disait, et qui étouffent l’espoir et l’optimisme.
Hugh étudiait l’histoire, croyait au Commonwealth et à la monarchie, et surtout aux hommes et aux femmes des forces armées, dont les sacrifices ont permis de gagner et de préserver nos libertés.
Winston Churchill, que Hugh admirait, a dit un jour : « La peur est une réaction. Le courage est une décision. »
Hugh a mené une vie courageuse, avec des débuts très modestes : il avait un fort sens de la générosité, acquis auprès d’une mère qui a donné son bien le plus précieux — une simple boîte en bois — à une voisine pour alimenter le feu qui allait lui permettre de garder son enfant au chaud.
Hugh a toujours encouragé les négligés — non pas parce qu’ils l’étaient, mais pour la raison pour laquelle ils l’étaient.
Aujourd’hui, mes pensées se tournent vers la bataille la plus passionnée qu’il a menée dans cette enceinte. Il a donné une voix à ceux d’entre nous qui avaient été réduits au silence. Il a plaidé auprès des leaders de son parti pour qu’ils n’expulsent pas trois sénateurs sans respect des procédures, et il l’a fait non pas parce qu’il était mon ami — bien qu’il l’était certainement —, mais parce qu’il croyait dans les droits fondamentaux.
Dans son discours de départ à la retraite, il avait rappelé aux sénateurs la nature de leur rôle. Je le cite :
[...] par-dessus tout, que le Sénat défende l’importance centrale et incontestable de la primauté du droit, de l’application régulière de la loi et de la présomption d’innocence, ces pierres angulaires de notre mode de vie démocratique, peu importe ce que les forces obscures [...] pourraient chercher à nous dicter ou à nous imposer.
Hugh croyait non seulement à la primauté du droit, mais à la justice. Il a été l’incarnation même du service public, en plus d’être un citoyen engagé et l’heureux guerrier des causes qui lui tenaient le plus à cœur. J’estime qu’il n’y avait pas meilleur être humain que lui et je me console en sachant que son influence vivra encore longtemps dans le cœur de tous ceux qui ont eu le privilège d’être dans son cercle d’amis.