Enrayer la crise imminente de la résistance aux antimicrobiens : sénateur Ravalia
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À titre de médecin et maintenant à titre de sénateur, je suis de plus en plus inquiet de l’augmentation de la résistance aux antimicrobiens dans ma communauté, au Canada et dans le monde. Cette menace croissante exige une attention et des mesures urgentes de notre part.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit la résistance aux antimicrobiens (RAM) comme le moment où les bactéries, les virus, les champignons et les parasites ne réagissent plus aux médicaments conçus pour les traiter. Par conséquent, les antibiotiques, les antifongiques et d’autres traitements essentiels deviennent inefficaces, transformant les infections autrefois faciles à traiter en affections graves et potentiellement mortelles. La RAM est désormais reconnue comme l’une des principales menaces mondiales pour la santé publique, ce qui lui vaut le qualificatif de « pandémie silencieuse ».
La semaine du 18 au 24 novembre est la Semaine mondiale de la résistance aux antimicrobiens : une campagne mondiale visant à sensibiliser, à améliorer la compréhension à l’égard de la RAM et à promouvoir les pratiques exemplaires à cet effet au sein des parties prenantes de l’approche « Une seule santé » de l’OMS. L’objectif consiste à réduire l’émergence et la propagation d’infections résistantes aux médicaments qui mettent en danger la santé des personnes, des animaux et de notre environnement.
Les effets de la RAM se font déjà sentir dans tout le Canada. Selon un rapport de 2019 du Conseil des académies canadiennes, les infections résistantes ont été responsables de plus de 14 000 décès et ont coûté à notre système de santé plus de 2 milliards de dollars par an. En l’absence de mesures décisives, ces chiffres pourraient grimper en flèche. D’ici 2050, on estime que les taux de résistance pourraient atteindre 40 %, ce qui pourrait entraîner la perte de près de 396 000 vies canadiennes et une baisse de 388 milliards de dollars du PIB du pays.
Le thème de la semaine de sensibilisation de cette année, « Éduquer. Promouvoir. Agir maintenant. », constitue un appel à l’action pour chacun d’entre nous. Nous devons faire entendre notre voix, auprès des patients, des électeurs ou du grand public, pour souligner l’urgence de la lutte contre la RAM. La sensibilisation n’est pas seulement une responsabilité, il s’agit d’une étape essentielle pour préserver notre avenir.
Bien qu’il n’y ait pas de solution unique à la crise de la RAM, il existe des mesures que nous pouvons prendre immédiatement. L’un des outils les plus efficaces dont nous disposons est l’éducation. Les antibiotiques sont indispensables aux soins de santé modernes, mais leur utilisation excessive et abusive accélère le développement de la résistance. Nous devons changer la trame narrative : toutes les maladies ne nécessitent pas d’antibiotiques. Ces médicaments devraient être réservés aux cas où ils sont vraiment nécessaires, qu’il s’agisse de traiter des infections graves, de prévenir des complications au cours d’opérations chirurgicales ou de soutenir des patients vulnérables soumis à une chimiothérapie ou à une greffe d’organe.
Les professionnels de la santé ne connaissent que trop bien les difficultés liées à la gestion des infections résistantes, en particulier dans les populations vulnérables, telles que les personnes âgées ou celles souffrant de maladies chroniques. Une infection urinaire de routine, par exemple, peut rapidement dégénérer en septicémie potentiellement mortelle si elle résiste aux traitements disponibles. Cependant, un mauvais diagnostic ou une prescription inappropriée d’antibiotiques ne fait qu’aggraver le problème.
Même lorsque le bon diagnostic est posé, le Canada se mesure à un autre obstacle de taille : l’accès aux nouveaux antibiotiques. Notre pays est en train de prendre du retard. Sur les 18 derniers antibiotiques approuvés par la Food and Drug Administration américaine, seuls deux sont disponibles au Canada. Cet accès limité met en danger les patients et les fournisseurs de soins de santé. Lorsque des antibiotiques essentiels ne sont pas disponibles, les médecins doivent passer par un long processus bureaucratique pour les obtenir de l’étranger, un délai qui peut coûter des vies.
Cela nous amène à la nécessité urgente d’une action de plaidoyer. Nous devons donner la priorité à la santé des Canadiens et lever les obstacles qui limitent l’accès aux nouveaux traitements. Le gouvernement du Canada s’est engagé au niveau mondial, lors du G7 et du G20, à remédier aux défaillances du marché des antibiotiques, à renforcer la recherche et le développement dans le domaine de la RAM et à mettre sur le marché de nouveaux médicaments antibactériens. Malgré ces engagements, les progrès sont lents depuis 2021.
Puisque le Canada accueillera le prochain sommet du G7, nous avons une occasion unique de montrer l’exemple. En tant que nation, nous devons respecter nos engagements passés et encourager des mesures nouvelles et audacieuses. Nous devrions nous concentrer sur deux points : renforcer notre engagement à remédier aux défaillances du marché des antibiotiques et plaider en faveur d’investissements plus importants dans la recherche et le développement sur la RAM. Il s’agit de l’occasion de démontrer le leadership du Canada dans la lutte mondiale contre la RAM.
C’est maintenant qu’il faut agir; et notre action doit se poursuivre tout au long de l’année, au-delà de la semaine de sensibilisation du mois de novembre. Nous devons travailler sans relâche pour garantir l’accès à des antibiotiques nouveaux et efficaces et collaborer avec nos partenaires du G7 pour réaliser des progrès concrets.
Le Canada peut jouer un rôle de premier plan dans cette lutte cruciale. En donnant la priorité à l’éducation, à la sensibilisation et à la collaboration internationale, nous pouvons protéger la santé de nos concitoyens et préserver l’efficacité des traitements vitaux pour les générations à venir.
Le sénateur Mohamed-Iqbal Ravalia représente Terre-Neuve-et-Labrador. Ancien médecin de famille, il compte plus de trente ans d’expérience dans le domaine des soins de santé en milieu rural.
Cet article a été publié le 21 novembre 2024 dans le Hill Times (en anglais seulement).
À titre de médecin et maintenant à titre de sénateur, je suis de plus en plus inquiet de l’augmentation de la résistance aux antimicrobiens dans ma communauté, au Canada et dans le monde. Cette menace croissante exige une attention et des mesures urgentes de notre part.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit la résistance aux antimicrobiens (RAM) comme le moment où les bactéries, les virus, les champignons et les parasites ne réagissent plus aux médicaments conçus pour les traiter. Par conséquent, les antibiotiques, les antifongiques et d’autres traitements essentiels deviennent inefficaces, transformant les infections autrefois faciles à traiter en affections graves et potentiellement mortelles. La RAM est désormais reconnue comme l’une des principales menaces mondiales pour la santé publique, ce qui lui vaut le qualificatif de « pandémie silencieuse ».
La semaine du 18 au 24 novembre est la Semaine mondiale de la résistance aux antimicrobiens : une campagne mondiale visant à sensibiliser, à améliorer la compréhension à l’égard de la RAM et à promouvoir les pratiques exemplaires à cet effet au sein des parties prenantes de l’approche « Une seule santé » de l’OMS. L’objectif consiste à réduire l’émergence et la propagation d’infections résistantes aux médicaments qui mettent en danger la santé des personnes, des animaux et de notre environnement.
Les effets de la RAM se font déjà sentir dans tout le Canada. Selon un rapport de 2019 du Conseil des académies canadiennes, les infections résistantes ont été responsables de plus de 14 000 décès et ont coûté à notre système de santé plus de 2 milliards de dollars par an. En l’absence de mesures décisives, ces chiffres pourraient grimper en flèche. D’ici 2050, on estime que les taux de résistance pourraient atteindre 40 %, ce qui pourrait entraîner la perte de près de 396 000 vies canadiennes et une baisse de 388 milliards de dollars du PIB du pays.
Le thème de la semaine de sensibilisation de cette année, « Éduquer. Promouvoir. Agir maintenant. », constitue un appel à l’action pour chacun d’entre nous. Nous devons faire entendre notre voix, auprès des patients, des électeurs ou du grand public, pour souligner l’urgence de la lutte contre la RAM. La sensibilisation n’est pas seulement une responsabilité, il s’agit d’une étape essentielle pour préserver notre avenir.
Bien qu’il n’y ait pas de solution unique à la crise de la RAM, il existe des mesures que nous pouvons prendre immédiatement. L’un des outils les plus efficaces dont nous disposons est l’éducation. Les antibiotiques sont indispensables aux soins de santé modernes, mais leur utilisation excessive et abusive accélère le développement de la résistance. Nous devons changer la trame narrative : toutes les maladies ne nécessitent pas d’antibiotiques. Ces médicaments devraient être réservés aux cas où ils sont vraiment nécessaires, qu’il s’agisse de traiter des infections graves, de prévenir des complications au cours d’opérations chirurgicales ou de soutenir des patients vulnérables soumis à une chimiothérapie ou à une greffe d’organe.
Les professionnels de la santé ne connaissent que trop bien les difficultés liées à la gestion des infections résistantes, en particulier dans les populations vulnérables, telles que les personnes âgées ou celles souffrant de maladies chroniques. Une infection urinaire de routine, par exemple, peut rapidement dégénérer en septicémie potentiellement mortelle si elle résiste aux traitements disponibles. Cependant, un mauvais diagnostic ou une prescription inappropriée d’antibiotiques ne fait qu’aggraver le problème.
Même lorsque le bon diagnostic est posé, le Canada se mesure à un autre obstacle de taille : l’accès aux nouveaux antibiotiques. Notre pays est en train de prendre du retard. Sur les 18 derniers antibiotiques approuvés par la Food and Drug Administration américaine, seuls deux sont disponibles au Canada. Cet accès limité met en danger les patients et les fournisseurs de soins de santé. Lorsque des antibiotiques essentiels ne sont pas disponibles, les médecins doivent passer par un long processus bureaucratique pour les obtenir de l’étranger, un délai qui peut coûter des vies.
Cela nous amène à la nécessité urgente d’une action de plaidoyer. Nous devons donner la priorité à la santé des Canadiens et lever les obstacles qui limitent l’accès aux nouveaux traitements. Le gouvernement du Canada s’est engagé au niveau mondial, lors du G7 et du G20, à remédier aux défaillances du marché des antibiotiques, à renforcer la recherche et le développement dans le domaine de la RAM et à mettre sur le marché de nouveaux médicaments antibactériens. Malgré ces engagements, les progrès sont lents depuis 2021.
Puisque le Canada accueillera le prochain sommet du G7, nous avons une occasion unique de montrer l’exemple. En tant que nation, nous devons respecter nos engagements passés et encourager des mesures nouvelles et audacieuses. Nous devrions nous concentrer sur deux points : renforcer notre engagement à remédier aux défaillances du marché des antibiotiques et plaider en faveur d’investissements plus importants dans la recherche et le développement sur la RAM. Il s’agit de l’occasion de démontrer le leadership du Canada dans la lutte mondiale contre la RAM.
C’est maintenant qu’il faut agir; et notre action doit se poursuivre tout au long de l’année, au-delà de la semaine de sensibilisation du mois de novembre. Nous devons travailler sans relâche pour garantir l’accès à des antibiotiques nouveaux et efficaces et collaborer avec nos partenaires du G7 pour réaliser des progrès concrets.
Le Canada peut jouer un rôle de premier plan dans cette lutte cruciale. En donnant la priorité à l’éducation, à la sensibilisation et à la collaboration internationale, nous pouvons protéger la santé de nos concitoyens et préserver l’efficacité des traitements vitaux pour les générations à venir.
Le sénateur Mohamed-Iqbal Ravalia représente Terre-Neuve-et-Labrador. Ancien médecin de famille, il compte plus de trente ans d’expérience dans le domaine des soins de santé en milieu rural.
Cet article a été publié le 21 novembre 2024 dans le Hill Times (en anglais seulement).