Le succès de l’action climatique fédérale dépend de la réduction de l’influence fossile : sénatrice Galvez
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Lors du dépôt du budget fédéral, la ministre des finances déclarait que le Canada devait être un leader dans la transformation mondiale pour une économie verte. Malgré un vocabulaire ayant clairement viré au vert, les demi-mesures entreprises ne sont toujours pas à la hauteur de l’enjeu.
Les sondages démontrent qu’une majorité de Canadiens veulent que le Canada soit un chef de file dans la lutte contre les changements climatiques, mais croient aussi à tort que nous le sommes déjà. Pourtant, la réalité est que nous avons la plus forte augmentation d’émissions des pays du G7 dans les trois dernières décennies, dominée par l’augmentation de la production de combustibles fossiles dont les émissions ont augmenté de 87 % depuis 1990.
Les défenseurs de l’industrie pétrolière vantent leurs bénéfices socio-économiques pour le Canada, mais les chiffres colligés récemment par une universitaire (en anglais seulement) démontrent que, sur les 20 dernières années, alors que la production et les émissions atteignaient des sommets sans précédent, l’industrie éliminait des emplois pour sabrer les coûts, et les revenus publics issus de redevances et taxes diminuaient sérieusement. Bien avant la pandémie, les bénéfices et les emplois liés à cette industrie s’érodaient alors que les estimations des dommages locaux et climatiques qui y sont liés ne cessent d’augmenter. Malgré cela, nous sommes le plus grand supporteur financier public par habitant de l’industrie fossile du G20 (en anglais seulement).
Des recherches sur la transformation géopolitique nécessaire pour endiguer la crise climatique indiquent que le succès ou la défaite dépend du degré auquel les puissants lobbies fossiles arriveront à résister au changement. Cela est particulièrement important dans le contexte canadien où cette industrie exerce une pression constante par plus de 1 000 rencontres par année avec le gouvernement fédéral dans la dernière décennie.
Sous le vernis vert, les mesures liées à « l’économie propre » du budget fédéral chiffrées à 17,6 milliards de dollars représentent globalement 17 % du financement spécifique à la relance et moins de 3 % des dépenses budgétaires envisagées. Cela est bien loin derrière le plan climatique anticipé du président américain Joe Biden qui dévouerait l’équivalent de 38 % des mesures de relance post-COVID du pays, l’Union européenne qui entend consacrer 30 % du financement de relance à des mesures climatiques et l’Espagne consacrant 53 % de son budget (en anglais seulement) à une relance verte.
Ces mesures « vertes » fédérales équivalent à un peu moins du soutien octroyé au secteur fossile dans la dernière année seulement, selon une estimation d’un récent rapport (en anglais seulement) sur la base de données fédérales qui souffrent d’un sérieux déficit de transparence et d’une absence d’écoconditionnalité. De ces 17,6 milliards, les industries polluantes se voient octroyer cinq milliards d’un fonds qui vise la carboneutralité, en plus de trois milliards déjà engagés.
Nous devons craindre que l’industrie fossile capture une part importante de ces fonds — et nous y opposer. En effet, le tiers des investissements de Ressources naturelles Canada (en anglais seulement) dans la recherche et développement d’innovations énergétiques pour une économie propre dans la dernière décennie étaient associés à la chaîne de production fossile.
Ces mesures pourraient encourager la production d’hydrogène à partir de gaz plutôt qu’à partir d’énergie renouvelable qui produit dix fois moins d’émissions de gaz à effet de serre (GES). Les innovations dans les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique engendrent un plus grand potentiel transformationnel, de meilleurs rendements sociaux et environnementaux, et devraient être les seules à recevoir des investissements publics.
Ce n’est pas la seule issue possible pour un pays producteur pétrolier. En effet, le Royaume-Uni — véritable chef de file du G7 pour les réductions de GES — surpasse constamment ses objectifs, ayant réussi les deux tiers de ses réductions depuis que le pays devenait le premier à adopter une loi sur la responsabilité climatique en 2008. Ce succès est en grande partie dû à son comité expert qui conseille le gouvernement en toute indépendance, actuellement composé aux deux tiers d’universitaires et chercheurs. Le Québec appuie aussi depuis peu sa gouvernance climatique sur un comité d’experts indépendants composé de 75 % de scientifiques; la France 85 % de scientifiques. Le gouvernement fédéral, qui propose une loi similaire à celle du Royaume-Uni, a plutôt nommé un comité formé de parties prenantes qui inclut un seul scientifique sur 14 membres, malgré la rhétorique d’un gouvernement qui fonde ses décisions dans la science.
Le secteur fossile est la cause du cancer qui attaque l’atmosphère, poumon de la vie sur terre. Il n’a aucune place aux tables de négociations des solutions, tout comme l’industrie du tabac ne participe pas à la conception de la lutte contre le tabagisme. Cela est nécessaire pour enfin donner de l’air aux solutions et aux innovations qui sauront véritablement assurer notre avenir collectif.
La sénatrice Rosa Galvez représente la division de Bedford au Québec.
Cet article a été publié le 11 mai 2021 dans le journal Le Devoir.
Lors du dépôt du budget fédéral, la ministre des finances déclarait que le Canada devait être un leader dans la transformation mondiale pour une économie verte. Malgré un vocabulaire ayant clairement viré au vert, les demi-mesures entreprises ne sont toujours pas à la hauteur de l’enjeu.
Les sondages démontrent qu’une majorité de Canadiens veulent que le Canada soit un chef de file dans la lutte contre les changements climatiques, mais croient aussi à tort que nous le sommes déjà. Pourtant, la réalité est que nous avons la plus forte augmentation d’émissions des pays du G7 dans les trois dernières décennies, dominée par l’augmentation de la production de combustibles fossiles dont les émissions ont augmenté de 87 % depuis 1990.
Les défenseurs de l’industrie pétrolière vantent leurs bénéfices socio-économiques pour le Canada, mais les chiffres colligés récemment par une universitaire (en anglais seulement) démontrent que, sur les 20 dernières années, alors que la production et les émissions atteignaient des sommets sans précédent, l’industrie éliminait des emplois pour sabrer les coûts, et les revenus publics issus de redevances et taxes diminuaient sérieusement. Bien avant la pandémie, les bénéfices et les emplois liés à cette industrie s’érodaient alors que les estimations des dommages locaux et climatiques qui y sont liés ne cessent d’augmenter. Malgré cela, nous sommes le plus grand supporteur financier public par habitant de l’industrie fossile du G20 (en anglais seulement).
Des recherches sur la transformation géopolitique nécessaire pour endiguer la crise climatique indiquent que le succès ou la défaite dépend du degré auquel les puissants lobbies fossiles arriveront à résister au changement. Cela est particulièrement important dans le contexte canadien où cette industrie exerce une pression constante par plus de 1 000 rencontres par année avec le gouvernement fédéral dans la dernière décennie.
Sous le vernis vert, les mesures liées à « l’économie propre » du budget fédéral chiffrées à 17,6 milliards de dollars représentent globalement 17 % du financement spécifique à la relance et moins de 3 % des dépenses budgétaires envisagées. Cela est bien loin derrière le plan climatique anticipé du président américain Joe Biden qui dévouerait l’équivalent de 38 % des mesures de relance post-COVID du pays, l’Union européenne qui entend consacrer 30 % du financement de relance à des mesures climatiques et l’Espagne consacrant 53 % de son budget (en anglais seulement) à une relance verte.
Ces mesures « vertes » fédérales équivalent à un peu moins du soutien octroyé au secteur fossile dans la dernière année seulement, selon une estimation d’un récent rapport (en anglais seulement) sur la base de données fédérales qui souffrent d’un sérieux déficit de transparence et d’une absence d’écoconditionnalité. De ces 17,6 milliards, les industries polluantes se voient octroyer cinq milliards d’un fonds qui vise la carboneutralité, en plus de trois milliards déjà engagés.
Nous devons craindre que l’industrie fossile capture une part importante de ces fonds — et nous y opposer. En effet, le tiers des investissements de Ressources naturelles Canada (en anglais seulement) dans la recherche et développement d’innovations énergétiques pour une économie propre dans la dernière décennie étaient associés à la chaîne de production fossile.
Ces mesures pourraient encourager la production d’hydrogène à partir de gaz plutôt qu’à partir d’énergie renouvelable qui produit dix fois moins d’émissions de gaz à effet de serre (GES). Les innovations dans les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique engendrent un plus grand potentiel transformationnel, de meilleurs rendements sociaux et environnementaux, et devraient être les seules à recevoir des investissements publics.
Ce n’est pas la seule issue possible pour un pays producteur pétrolier. En effet, le Royaume-Uni — véritable chef de file du G7 pour les réductions de GES — surpasse constamment ses objectifs, ayant réussi les deux tiers de ses réductions depuis que le pays devenait le premier à adopter une loi sur la responsabilité climatique en 2008. Ce succès est en grande partie dû à son comité expert qui conseille le gouvernement en toute indépendance, actuellement composé aux deux tiers d’universitaires et chercheurs. Le Québec appuie aussi depuis peu sa gouvernance climatique sur un comité d’experts indépendants composé de 75 % de scientifiques; la France 85 % de scientifiques. Le gouvernement fédéral, qui propose une loi similaire à celle du Royaume-Uni, a plutôt nommé un comité formé de parties prenantes qui inclut un seul scientifique sur 14 membres, malgré la rhétorique d’un gouvernement qui fonde ses décisions dans la science.
Le secteur fossile est la cause du cancer qui attaque l’atmosphère, poumon de la vie sur terre. Il n’a aucune place aux tables de négociations des solutions, tout comme l’industrie du tabac ne participe pas à la conception de la lutte contre le tabagisme. Cela est nécessaire pour enfin donner de l’air aux solutions et aux innovations qui sauront véritablement assurer notre avenir collectif.
La sénatrice Rosa Galvez représente la division de Bedford au Québec.
Cet article a été publié le 11 mai 2021 dans le journal Le Devoir.