Les enfants méritent mieux — la réforme du système de détention liée à l’immigration fait fi du besoin de mécanismes de surveillance : Sénateurs Jaffer et Oh
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Bien des Canadiens seraient surpris d’apprendre que malgré la réputation mondiale de ce pays comme protecteur des droits des enfants, le gouvernement fédéral continue de rater la cible, et ce, à bien des égards. La détention inutile d’enfants par les autorités d’immigration en est un exemple poignant.
Depuis plus de 10 ans, nos lois énoncent clairement que les enfants ne devraient être détenus qu’en « dernier recours ». Pourtant, des centaines d’entre eux ont été placés dans des établissements qui rappellent les prisons à sécurité moyenne.
Ces enfants ne sont pas détenus pour des motifs de sécurité publique, mais plutôt pour des raisons de risques de fuite ou des problèmes d’identification. D’autres vivent dans un centre de détention sans y être officiellement détenus parce que leurs parents préfèrent qu’ils restent ensemble. Certains de ces enfants sont des citoyens canadiens.
Pour répondre aux préoccupations de longue date des législateurs, des militants et du public, le ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, a publié en novembre une directive ministérielle à l’intention de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) en vue d’améliorer les conditions des enfants pris dans notre système d’immigration.
Si la nouvelle direction n’interdit pas la détention de mineurs, elle impose néanmoins des barèmes plus stricts conformes aux obligations juridiques internationales du Canada. Plus particulièrement, elle interdit l’isolation des mineurs et demande que l’intérêt supérieur de l’enfant soit une considération primordiale dans toutes les décisions.
Dans sa directive, le ministre confie aussi à l’ASFC la tâche de chercher activement des solutions d’ordre communautaire à la détention des mineurs qu’elle a sous sa garde au lieu de les maintenir en détention et de les séparer de leur famille. Elle pourrait par exemple envisager la déclaration en personne ou vocale, la surveillance dans la communauté ou encore le cautionnement d’exécution ou en espèces.
S’il s’agit là d’un premier pas encourageant, le gouvernement doit toutefois donner à cette réforme les moyens nécessaires pour en assurer la mise en œuvre efficace et durable.
À l’heure actuelle, la Croix-Rouge a obtenu un contrat de deux ans pour surveiller les conditions de détention dans les établissements du pays; elle relèvera exclusivement des autorités responsables. Sans vouloir discréditer les efforts louables de cette organisation, disons que cet arrangement – qui offrira au public une simple publication d’un rapport annuel de ses constatations et recommandations – ne lui donne qu’une mince marge de manœuvre pour assurer une supervision indépendante.
Il serait possible de remédier à cette lacune grave en créant un organisme de surveillance externe, plutôt que subordonné, habilité à superviser les activités de l’ASFC et à enquêter sur les plaintes grâce à une loi claire.
De manière plus générale, le gouvernement devrait envisager de modifier les lois et les règlements du pays afin de réitérer que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions de détention qui touchent les enfants. De plus, le gouvernement devrait aussi offrir plus de formation et de ressources aux décideurs pour voir à ce qu’ils tiennent bien compte de l’intérêt supérieur des enfants.
En obligeant les futurs gouvernements à se conformer aux normes les plus élevées, ces changements auraient pour effet non seulement de faire de la détention des enfants une véritable mesure de dernier recours, mais aussi de favoriser l’uniformité au pays. À l’heure actuelle, les conditions varient grandement d’un établissement à l’autre, en particulier au chapitre des infrastructures, des services et des arguments avancés pour justifier la détention.
Un gouvernement qui dit croire fermement à l’ouverture, à la transparence et à la reddition de compte doit aller au-delà de la demi-mesure et se faire l’artisan de solutions durables.
En 2012, le Canada a été critiqué dans le monde entier à la suite de la publication d’un rapport cinglant du Comité des droits de l’enfant des Nations Unies sur le traitement réservé aux enfants dans son système d’immigration.
L’an prochain, le comité sera de retour au pays pour déterminer si des progrès ont été réalisés. En prenant ces mesures décisives, le Canada démontrerait qu’il peut et veut déployer des efforts supplémentaires pour que les enfants les plus vulnérables au pays soient traités avec dignité et respect.
C’est l’occasion ici pour le Canada de faire preuve d’un véritable sens du leadership et d’être à la hauteur de l’image qu’il se fait de lui-même.
La sénatrice Mobina S.B. Jaffer représente la Colombie-Britannique.
Avis aux lecteurs :
L’honorable sénateur Victor Oh a pris sa retraite du Sénat du Canada en juin 2024. Visitez le site web Parlinfo de la bibliothèque du parlement et apprenez-en davantage sur son travail au Parlement.
L’honorable sénatrice Mobina Jaffer a pris sa retraite du Sénat du Canada en août 2024. Visitez le site web Parlinfo de la bibliothèque du parlement et apprenez-en davantage sur son travail au Parlement.
Cet article a été publié le 27 novembre 2017 dans le journal The Hill Times (en anglais seulement).
Bien des Canadiens seraient surpris d’apprendre que malgré la réputation mondiale de ce pays comme protecteur des droits des enfants, le gouvernement fédéral continue de rater la cible, et ce, à bien des égards. La détention inutile d’enfants par les autorités d’immigration en est un exemple poignant.
Depuis plus de 10 ans, nos lois énoncent clairement que les enfants ne devraient être détenus qu’en « dernier recours ». Pourtant, des centaines d’entre eux ont été placés dans des établissements qui rappellent les prisons à sécurité moyenne.
Ces enfants ne sont pas détenus pour des motifs de sécurité publique, mais plutôt pour des raisons de risques de fuite ou des problèmes d’identification. D’autres vivent dans un centre de détention sans y être officiellement détenus parce que leurs parents préfèrent qu’ils restent ensemble. Certains de ces enfants sont des citoyens canadiens.
Pour répondre aux préoccupations de longue date des législateurs, des militants et du public, le ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, a publié en novembre une directive ministérielle à l’intention de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) en vue d’améliorer les conditions des enfants pris dans notre système d’immigration.
Si la nouvelle direction n’interdit pas la détention de mineurs, elle impose néanmoins des barèmes plus stricts conformes aux obligations juridiques internationales du Canada. Plus particulièrement, elle interdit l’isolation des mineurs et demande que l’intérêt supérieur de l’enfant soit une considération primordiale dans toutes les décisions.
Dans sa directive, le ministre confie aussi à l’ASFC la tâche de chercher activement des solutions d’ordre communautaire à la détention des mineurs qu’elle a sous sa garde au lieu de les maintenir en détention et de les séparer de leur famille. Elle pourrait par exemple envisager la déclaration en personne ou vocale, la surveillance dans la communauté ou encore le cautionnement d’exécution ou en espèces.
S’il s’agit là d’un premier pas encourageant, le gouvernement doit toutefois donner à cette réforme les moyens nécessaires pour en assurer la mise en œuvre efficace et durable.
À l’heure actuelle, la Croix-Rouge a obtenu un contrat de deux ans pour surveiller les conditions de détention dans les établissements du pays; elle relèvera exclusivement des autorités responsables. Sans vouloir discréditer les efforts louables de cette organisation, disons que cet arrangement – qui offrira au public une simple publication d’un rapport annuel de ses constatations et recommandations – ne lui donne qu’une mince marge de manœuvre pour assurer une supervision indépendante.
Il serait possible de remédier à cette lacune grave en créant un organisme de surveillance externe, plutôt que subordonné, habilité à superviser les activités de l’ASFC et à enquêter sur les plaintes grâce à une loi claire.
De manière plus générale, le gouvernement devrait envisager de modifier les lois et les règlements du pays afin de réitérer que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions de détention qui touchent les enfants. De plus, le gouvernement devrait aussi offrir plus de formation et de ressources aux décideurs pour voir à ce qu’ils tiennent bien compte de l’intérêt supérieur des enfants.
En obligeant les futurs gouvernements à se conformer aux normes les plus élevées, ces changements auraient pour effet non seulement de faire de la détention des enfants une véritable mesure de dernier recours, mais aussi de favoriser l’uniformité au pays. À l’heure actuelle, les conditions varient grandement d’un établissement à l’autre, en particulier au chapitre des infrastructures, des services et des arguments avancés pour justifier la détention.
Un gouvernement qui dit croire fermement à l’ouverture, à la transparence et à la reddition de compte doit aller au-delà de la demi-mesure et se faire l’artisan de solutions durables.
En 2012, le Canada a été critiqué dans le monde entier à la suite de la publication d’un rapport cinglant du Comité des droits de l’enfant des Nations Unies sur le traitement réservé aux enfants dans son système d’immigration.
L’an prochain, le comité sera de retour au pays pour déterminer si des progrès ont été réalisés. En prenant ces mesures décisives, le Canada démontrerait qu’il peut et veut déployer des efforts supplémentaires pour que les enfants les plus vulnérables au pays soient traités avec dignité et respect.
C’est l’occasion ici pour le Canada de faire preuve d’un véritable sens du leadership et d’être à la hauteur de l’image qu’il se fait de lui-même.
La sénatrice Mobina S.B. Jaffer représente la Colombie-Britannique.
Avis aux lecteurs :
L’honorable sénateur Victor Oh a pris sa retraite du Sénat du Canada en juin 2024. Visitez le site web Parlinfo de la bibliothèque du parlement et apprenez-en davantage sur son travail au Parlement.
L’honorable sénatrice Mobina Jaffer a pris sa retraite du Sénat du Canada en août 2024. Visitez le site web Parlinfo de la bibliothèque du parlement et apprenez-en davantage sur son travail au Parlement.
Cet article a été publié le 27 novembre 2017 dans le journal The Hill Times (en anglais seulement).