Les grèves ferroviaires et portuaires font dérailler l’économie : sénateur Lewis

Étiquettes
En tant qu’agriculteur, toute ma carrière a été marquée par des débrayages dans le secteur des transports. Pour les agriculteurs, les débrayages ont des conséquences réelles : dégradation de la qualité des céréales, pénalités pour non-livraison des produits conformément aux contrats, intérêts courus sur les prêts qui auraient été payés si les produits avaient été livrés, et clients internationaux qui se tournent vers des pays où les chaines d’approvisionnement sont plus fiables.
Et les producteurs agricoles ne sont pas les seuls à en faire les frais. Lorsqu’il y a un débrayage dans l’un des principaux ports canadiens, les entreprises qui expédient des marchandises conteneurisées et des exportations en vrac perdent un point d’accès essentiel aux marchés internationaux. En effet, un retard dans un port en raison d’un débrayage dans le secteur ferroviaire ou maritime peut entrainer des licenciements pour les employés des entreprises manufacturières, de construction et de vente qui ne peuvent pas s’approvisionner en intrants de production. Pour chaque journée de débrayage, il faut compter jusqu’à sept jours pour que le service reprenne normalement une fois le travail repris.
Cet automne, le Comité sénatorial des transports et des communications étudie les conflits de travail dans les secteurs ferroviaire et maritime sous réglementation fédérale. De toute évidence, le gouvernement fédéral reconnait le danger que représentent les grèves prolongées; Ian Lee, professeur adjoint à l’Université Carleton, a expliqué au comité que le gouvernement du Canada avait eu recours à un projet de loi de retour au travail à 37 reprises pour intervenir dans un conflit de travail entre 1950 et 2024. La grande majorité des grèves qui ont fait l’objet d’une loi de retour au travail ont eu lieu dans le secteur des transports.
Plus récemment, le gouvernement fédéral a renoncé à adopter une loi de retour au travail; à la place, les ministres du Travail ont utilisé leurs pouvoirs discrétionnaires en vertu de l’article 107 du Code canadien du travail pour intervenir dans les conflits de travail. En 2024 seulement, le gouvernement fédéral a eu recours à l’article 107 à sept reprises distinctes.
Les représentants syndicaux ont expliqué au comité que la grève permet aux travailleurs d’exercer des pressions économiques sur les employeurs. Mais, les grèves dans les secteurs ferroviaire et maritime ont des répercussions sur l’ensemble de l’économie canadienne, entrainant des pertes de salaire, de contrats et d’occasions pour les entreprises et les Canadiens qui ne sont pas représentés à la table des négociations.
Les syndicats et les employeurs ont tous deux déclaré au comité que le système actuel n’était pas adapté à son objectif. Tom Doran, premier vice-président de l’International Longshore and Warehouse Union, a dit au comité : « [L]e système est déréglé. Si les employeurs peuvent compter sur le gouvernement pour leur fournir constamment une porte de sortie, qu’il s’agisse du recours à l’article 107 ou de l’utilisation continue d’une loi forçant le retour au travail qui prévoit un arbitrage exécutoire [...], on ne s’attaque pas aux problèmes fondamentaux. »
Daniel Safayeni, président et chef de la direction de l’Association des Employeurs des transports et communications de régie fédérale, a dit au comité : « Nous sommes tous d’accord pour dire que le système actuel ne fonctionne pas et que le gouvernement a un rôle légitime à jouer, non pas pour imposer une issue, mais pour favoriser un règlement équitable et rapide des conflits, tout en maintenant les deux parties pleinement engagées dans le processus. »
Nous devons trouver un moyen de faire en sorte que les débrayages ne soient qu’un dernier recours. On pourrait s’inspirer de la loi américaine sur le travail dans les chemins de fer (Railway Labor Act, RLA, en anglais seulement), promulguée en 1926. Dans un aperçu de la loi, le Département américain des transports note : « Les objectifs de la RLA sont d’éviter toute interruption du commerce interétatique en prévoyant le règlement rapide des litiges entre les transporteurs et leurs employés et de protéger le droit des employés à s’organiser et à négocier collectivement. »
La législation américaine est efficace. Erik Loomis, historien du travail à l’université du Rhode Island, a écrit dans un article publié en 2022 dans The Conversation (en anglais seulement) que « les grèves qui entravent les transports sont rares aux États-Unis, et la dernière impliquant des cheminots remonte à trois décennies. »
Dans le Budget fédéral 2025, le gouvernement explique que pour « renforcer sa résilience économique à long terme, le Canada doit diversifier ses exportations ». De plus, il « reconnait l’interdépendance qui existe au sein de la chaine nationale d’approvisionnement du grain et il est déterminé à assurer un juste équilibre des intérêts. Il entend s’assurer que le système permet les investissements des entreprises et suscite la confiance quant à la capacité de répondre aux besoins en transport du secteur ».
Si le premier ministre Mark Carney souhaite diversifier les exportations et favoriser les investissements, il doit moderniser le Code canadien du travail afin de remédier à la fréquence des grèves ferroviaires et portuaires au Canada.
Le sénateur Todd Lewis est un agriculteur de quatrième génération et membre du Comité sénatorial des transports et des communications. Il représente la Saskatchewan.
Cet article a été publié dans le Hill Times le 26 novembre 2025 (en anglais seulement).
En tant qu’agriculteur, toute ma carrière a été marquée par des débrayages dans le secteur des transports. Pour les agriculteurs, les débrayages ont des conséquences réelles : dégradation de la qualité des céréales, pénalités pour non-livraison des produits conformément aux contrats, intérêts courus sur les prêts qui auraient été payés si les produits avaient été livrés, et clients internationaux qui se tournent vers des pays où les chaines d’approvisionnement sont plus fiables.
Et les producteurs agricoles ne sont pas les seuls à en faire les frais. Lorsqu’il y a un débrayage dans l’un des principaux ports canadiens, les entreprises qui expédient des marchandises conteneurisées et des exportations en vrac perdent un point d’accès essentiel aux marchés internationaux. En effet, un retard dans un port en raison d’un débrayage dans le secteur ferroviaire ou maritime peut entrainer des licenciements pour les employés des entreprises manufacturières, de construction et de vente qui ne peuvent pas s’approvisionner en intrants de production. Pour chaque journée de débrayage, il faut compter jusqu’à sept jours pour que le service reprenne normalement une fois le travail repris.
Cet automne, le Comité sénatorial des transports et des communications étudie les conflits de travail dans les secteurs ferroviaire et maritime sous réglementation fédérale. De toute évidence, le gouvernement fédéral reconnait le danger que représentent les grèves prolongées; Ian Lee, professeur adjoint à l’Université Carleton, a expliqué au comité que le gouvernement du Canada avait eu recours à un projet de loi de retour au travail à 37 reprises pour intervenir dans un conflit de travail entre 1950 et 2024. La grande majorité des grèves qui ont fait l’objet d’une loi de retour au travail ont eu lieu dans le secteur des transports.
Plus récemment, le gouvernement fédéral a renoncé à adopter une loi de retour au travail; à la place, les ministres du Travail ont utilisé leurs pouvoirs discrétionnaires en vertu de l’article 107 du Code canadien du travail pour intervenir dans les conflits de travail. En 2024 seulement, le gouvernement fédéral a eu recours à l’article 107 à sept reprises distinctes.
Les représentants syndicaux ont expliqué au comité que la grève permet aux travailleurs d’exercer des pressions économiques sur les employeurs. Mais, les grèves dans les secteurs ferroviaire et maritime ont des répercussions sur l’ensemble de l’économie canadienne, entrainant des pertes de salaire, de contrats et d’occasions pour les entreprises et les Canadiens qui ne sont pas représentés à la table des négociations.
Les syndicats et les employeurs ont tous deux déclaré au comité que le système actuel n’était pas adapté à son objectif. Tom Doran, premier vice-président de l’International Longshore and Warehouse Union, a dit au comité : « [L]e système est déréglé. Si les employeurs peuvent compter sur le gouvernement pour leur fournir constamment une porte de sortie, qu’il s’agisse du recours à l’article 107 ou de l’utilisation continue d’une loi forçant le retour au travail qui prévoit un arbitrage exécutoire [...], on ne s’attaque pas aux problèmes fondamentaux. »
Daniel Safayeni, président et chef de la direction de l’Association des Employeurs des transports et communications de régie fédérale, a dit au comité : « Nous sommes tous d’accord pour dire que le système actuel ne fonctionne pas et que le gouvernement a un rôle légitime à jouer, non pas pour imposer une issue, mais pour favoriser un règlement équitable et rapide des conflits, tout en maintenant les deux parties pleinement engagées dans le processus. »
Nous devons trouver un moyen de faire en sorte que les débrayages ne soient qu’un dernier recours. On pourrait s’inspirer de la loi américaine sur le travail dans les chemins de fer (Railway Labor Act, RLA, en anglais seulement), promulguée en 1926. Dans un aperçu de la loi, le Département américain des transports note : « Les objectifs de la RLA sont d’éviter toute interruption du commerce interétatique en prévoyant le règlement rapide des litiges entre les transporteurs et leurs employés et de protéger le droit des employés à s’organiser et à négocier collectivement. »
La législation américaine est efficace. Erik Loomis, historien du travail à l’université du Rhode Island, a écrit dans un article publié en 2022 dans The Conversation (en anglais seulement) que « les grèves qui entravent les transports sont rares aux États-Unis, et la dernière impliquant des cheminots remonte à trois décennies. »
Dans le Budget fédéral 2025, le gouvernement explique que pour « renforcer sa résilience économique à long terme, le Canada doit diversifier ses exportations ». De plus, il « reconnait l’interdépendance qui existe au sein de la chaine nationale d’approvisionnement du grain et il est déterminé à assurer un juste équilibre des intérêts. Il entend s’assurer que le système permet les investissements des entreprises et suscite la confiance quant à la capacité de répondre aux besoins en transport du secteur ».
Si le premier ministre Mark Carney souhaite diversifier les exportations et favoriser les investissements, il doit moderniser le Code canadien du travail afin de remédier à la fréquence des grèves ferroviaires et portuaires au Canada.
Le sénateur Todd Lewis est un agriculteur de quatrième génération et membre du Comité sénatorial des transports et des communications. Il représente la Saskatchewan.
Cet article a été publié dans le Hill Times le 26 novembre 2025 (en anglais seulement).