Délibérations du comité sénatorial permanent
des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie
Fascicule 7 - Témoignages du 25 mars 1998
OTTAWA, le mercredi 25 mars 1998
Le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, auquel est renvoyé le projet de loi S-8, Loi modifiant la Loi sur le tabac (réglementation du contenu), se réunit aujourd'hui à 15 h 30 pour en faire l'étude.
Le sénateur Lowell Murray (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Chers collègues, même si nous n'avons pas encore le quorum, le règlement nous autorise à entendre des témoignages sans le quorum. Un quorum est nécessaire pour prendre un vote mais comme nous sommes un peu en retard, j'ai pensé que nous pourrions commencer maintenant de façon à ne pas causer d'inconvénient aux témoins ou aux collègues.
Le comité se réunit pour étudier le projet de loi dont il a été saisi par le Sénat, c'est-à-dire le projet de loi S-8, loi modifiant la Loi sur le tabac (réglementation du tabac).
Vous vous souviendrez que vous avez déjà entendu le parrain du projet de loi, notre ancien collègue, l'honorable Stanley Haidasz, ainsi que les représentants de la GRC et de Revenu Canada.
Aujourd'hui, nous accueillons M. Eric LeGresley, conseiller juridique auprès de l'Association pour les droits des non-fumeurs. M. LeGresley est diplômé de l'École de droit de l'Université de Toronto et détient une maîtrise en droit de l'Université de Londres, en Angleterre. Il a également fait un M.Sc. en géologie. Dans le cadre de son travail pour l'Association pour les droits des non-fumeurs, il s'occupe principalement de questions juridiques de nature constitutionnelle et internationale et a été avocat pour le Service de recherche de la Bibliothèque du Parlement avant de faire des études supérieures en droit. Il s'est également beaucoup occupé de la question de l'emballage neutre des produits du tabac et s'est intéressé de près aux questions de droit constitutionnel relatives aux restrictions en matière de publicité du tabac et à l'élaboration de structures législatives et réglementaires concernant la publicité du tabac.
M. LeGresley nous a présenté un bref mémoire. Je suppose que vous allez nous le lire ou avez-vous d'autres commentaires à faire?
M. Eric LeGresley, conseiller juridique, Association pour les droits des non-fumeurs: J'aimerais ajouter des commentaires plutôt que reprendre textuellement le mémoire.
Je tiens tout d'abord à vous remercier de cette occasion de comparaître devant vous aujourd'hui. Le projet de loi S-8 est un important texte de loi.
La réglementation des médicaments a mis fin à l'ère des charlatans. Auparavant, les gens vendaient des produits auxquels ils attribuaient, implicitement et explicitement, toutes sortes de vertus. Or, non seulement avons-nous empêché les fabricants de ces produits de continuer à faire de la fausse représentation, mais nous avons commencé à établir des normes et des exigences en matière de sécurité et d'intérêt public que doivent respecter les fabricants.
Les automobiles en sont un bon exemple. Lorsque nous avons commencé à exiger que l'on munisse les automobiles de dispositifs de sécurité, entre autres de tableaux de bord coussinés, de meilleurs pare-chocs, de vitres sécuritaires, de ceintures de sécurité, nous avons innové.
Nous avons modifié fondamentalement le marché de l'automobile. Les compagnies d'automobiles ont commencé à se faire concurrence en vantant la sécurité de leurs produits. Nous pouvons faire la même chose pour le marché du tabac. Le projet de loi S-8 équivaut en quelque sorte à la toute première ceinture de sécurité pour les cigarettes.
Nous savons que le public s'inquiète de la sécurité des produits du tabac qu'il consomme et que les compagnies de tabac mettent en marché certains produits en misant sur la fausse perception des fumeurs à propos de la sécurité de leurs produits. Nous savons que les cigarettes «légères» et «douces» se vendent plus que les cigarettes régulières. Les compagnies utilisent des paquets de couleur pâle et qualifient ces cigarettes d'«ultra-légères» ou d'«ultra-douces», comparativement à leurs produits réguliers. Or, elles ne sont pas plus sûres que les produits réguliers, mais le public croit qu'elles le sont. Par conséquent, il existe un marché économique viable pour des produits réellement plus sûrs, si nous pouvons aider les compagnies de tabac à franchir l'obstacle.
Le véritable problème auquel font face les compagnies de tabac, c'est qu'en mettant sur le marché des produits plus sûrs, elles se trouvent à condamner tous leurs produits existants. Si elles veulent commercialiser convenablement un produit plus sûr, elles sont obligées de dire: «Ce produit ne vous tuera pas aussi vite que d'autres». À moins que nous commencions à les obliger à le faire, elles ne franchiront jamais ce premier obstacle. Nous n'atteindrons jamais le stade où les forces du marché agiront dans l'intérêt de la santé publique plutôt que dans le seul intérêt des actionnaires.
Nous nous retrouvons dans une situation étrange. Les produits du tabac sans fumée sont rares. Les compagnies se font concurrence de toutes sortes de façons, comme, par exemple, donner une saveur de cerise à ces produits pour les rendre plus agréables au goût pour les enfants. Elles se font concurrence en produisant des cigarettes dans un format beaucoup plus accessible aux jeunes. Elles pourraient enlever toutes les nitrosamines du produit, comme l'a fait un fabricant en Suède, et exercer une concurrence axée sur la sécurité de leurs produits.
À l'heure actuelle, nous avons affaire à un marché pervers où la concurrence s'exerce en fonction d'idées fausses que se fait la population sur la faible nocivité de certains produits ou en fonction d'illusions. Elles se font concurrence au niveau de l'emballage, en utilisant de jolis paquets de couleur pastel, destinés aux jeunes filles. Voilà comment s'exerce la concurrence sur le marché du tabac à l'heure actuelle. Le projet de loi S-8 nous permettra de nous engager dans une toute nouvelle voie.
Le principal problème en ce qui concerne le tabac, ce n'est pas la publicité, ni la commandite, pas plus que l'emballage. Le problème majeur, c'est la nocivité même du tabac. Si nous pouvions y remédier, la commandite ou la publicité ne nous poseraient pas problème. Je ne m'opposerais pas à la publicité sur le tabac si le produit était inoffensif. Si nous mettons l'accent sur cet aspect fondamental plutôt que sur l'emballage et la publicité, nous pourrons commencer à nous attaquer à ces problèmes. C'est l'orientation qu'est en train de prendre le contrôle du tabac dans le reste du monde. Si le Canada veut suivre le reste du monde, surtout les États-Unis, c'est ce que nous devrons faire au cours des dix prochaines années.
En ce qui concerne plus précisément le projet de loi S-8, il s'agira de déterminer si les limites proposées par le projet de loi constitue la meilleure option possible, et c'est une question qui n'est pas tranchée. J'approuve entièrement certaines d'entre elles. En ce qui concerne les autres, nous pourrions vouloir en discuter. Cependant, nous savons qu'il est inadmissible de continuer à laisser les fabricants de tabac décider des taux de nicotine et de goudron que devraient contenir leurs produits car ils ne prennent sûrement pas ces décisions dans l'intérêt de la santé des enfants ou des fumeurs. Ils prennent ces décisions en fonction de leur propre intérêt économique, qui est d'attirer de nouveaux fumeurs pour pouvoir continuer à leur vendre des produits le reste de leur vie abrégée.
Je ne crois pas toutefois que le projet de loi S-8 soit suffisant par lui-même. J'aimerais parler de la réglementation des taux de nicotine. Nous sommes devant un dilemme. Ce qui pourrait être dans l'intérêt des enfants qui commencent à fumer ne sera peut-être pas dans l'intérêt des six ou sept millions de fumeurs actuels au Canada qui ont besoin de nicotine tous les jours. Il est irresponsable de notre part de protéger des enfants tout en causant un tort supplémentaire aux fumeurs actuels. Cependant, ce serait une bien plus grande tragédie de laisser le contrôle des taux de nicotine entre les mains des compagnies de tabac et ne rien faire.
Nous savons que, malgré toutes les campagnes de sensibilisation faites de par le monde, nous n'arriverons pas à empêcher des jeunes de 12 et 13 ans d'essayer la cigarette. Cependant, nous pouvons prévenir le déclenchement de la dépendance. Le projet de loi S-8 sera d'une très grande utilité à cet égard en abaissant les niveaux de nicotine.
Toutefois un problème demeure, et nous risquons de l'exacerber chez les fumeurs actuels en réduisant considérablement les taux de nicotine. Le projet de loi S-8 doit s'accompagner d'une redéfinition de l'ensemble du marché du tabac afin d'encourager les compagnies de tabac, les compagnies pharmaceutiques et d'autres fabricants de produits de consommation, à entrer sur le marché du tabac et à créer un marché viable qui offrira au consommateur un choix réel de manière à favoriser l'arrivée d'un plus grand nombre de produits.
Voici un produit du tabac qu'une personne pourrait consommer une vingtaine de fois par jour toute sa vie parce qu'il ne produit pas d'oxyde de carbone. Elle développerait une accoutumance à la nicotine mais ce produit ne favoriserait pas les maladies du coeur, ni le cancer du poumon. Il s'agit de nicotine d'entretien pour le reste de votre vie. C'est le produit d'une compagnie pharmaceutique. La concurrence encouragerait alors l'introduction de nouvelles technologies.
Ce produit, qui provient d'une compagnie de tabac, ne brûle pas. Il permettra de réduire considérablement la fréquence du cancer du poumon mais augmentera probablement la fréquence des maladies du coeur. Ce n'est pas un produit inoffensif. C'est comme le modèle T de la génération d'automobiles avec laquelle nous nous retrouvons aujourd'hui. Nous devons créer un climat où les pressions concurrentielles encouragent les fabricants à fabriquer des produits encore plus sûrs -- non seulement parce qu'ils veulent sauver des vies mais parce qu'ils veulent vendre un plus grand nombre de produits et qu'ils veulent vendre ces produits en exerçant une concurrence axée sur la sécurité de leurs produits.
Le président: Vous ne voulez pas dire que l'accoutumance à la nicotine est inoffensive, n'est-ce pas?
M. LeGresley: Non. Je veux dire que six ou sept millions de gens ont développé une accoutumance et que nous ne pouvons pas les abandonner. Même si je ne veux pas voir une personne de plus accoutumée à la nicotine, j'aimerais que les personnes qui sont accoutumées à la nicotine aient plus de choix quant aux produits à utiliser.
Le président: M. LeGresley est conseiller juridique à temps plein auprès de l'Association pour les droits des non-fumeurs. J'ai lu cette note biographique pour le compte rendu.
Monsieur LeGresley, pourriez-vous nous parler un peu de l'Association pour les droits des non-fumeurs et nous indiquer le mandat qui vous est confié par votre charte?
M. LeGresley: L'Association pour les droits des non-fumeurs a été créée en 1974, à une époque où les non-fumeurs étaient exposés à la fumée de tabac dans divers endroits. Depuis, l'organisation a élargi la porté de son mandat et ne vise pas uniquement à protéger les droits des non-fumeurs mais à donner suite au problème du tabagisme en général. Un important aspect de notre rôle consiste à défendre l'intérêt public en ce qui concerne les questions de santé liées au tabac.
Le président: D'où viennent vos membres et comment devient-on membre de votre association? Combien de membres compte-t-elle?
M. LeGresley: Je n'ai pas les chiffres avec moi mais nous avons des membres de chaque province et territoire du pays. Nous avons des membres d'un océan à l'autre.
Le président: Se réunissent-ils ou communiquent-ils entre eux?
M. LeGresley: Nous devons tenir une assemblée générale annuelle. Donc il y a des réunions. Nous envoyons de l'information à nos membres mais l'organisation est surtout administrée par le personnel de nos bureaux, pas par les membres. Nous avons des bureaux à Toronto, à Ottawa et à Montréal.
Le président: Combien d'employés avez-vous?
M. LeGresley: Environ 12 ou 13.
Le président: Pour les trois bureaux?
M. LeGresley: Oui.
Le président: Vous êtes une organisation publique. Quel est votre budget annuel?
M. LeGresley: Il est d'environ un million de dollars. Je pourrai vous fournir plus tard un chiffre précis, mais c'est à peu près le montant de notre budget.
Le président: Ce budget est-il surtout destiné aux frais généraux ou à des activités de promotion?
M. LeGresley: C'est un budget axé surtout sur les salaires et les frais généraux plutôt que sur les activités de promotion.
Le président: Votre organisation a-t-elle un président?
M. LeGresley: Elle a un directeur exécutif.
Le président: Est-il un employé?
M. LeGresley: Oui. L'Association pour les droits des non-fumeurs a un président, c'est-à-dire le président du conseil d'administration.
Le président: Il y a donc un président et un conseil d'administration?
M. LeGresley: Oui.
Le président: Les employés à temps plein travaillent sous la direction du président et du conseil d'administration qui, je suppose, sont élus par les membres, n'est-ce pas?
M. LeGresley: Oui, c'est exact.
Le président: Comment l'organisation est-elle financée?
M. LeGresley: Elle est financée grâce aux cotisations des membres. Nous recevons des subventions de plusieurs paliers de gouvernement, les frais de cotisation des membres et ainsi de suite.
Le président: Par paliers de gouvernement, je suppose que vous voulez dire le ministère de la Santé?
M. LeGresley: Le gouvernement fédéral et le gouvernement de l'Ontario, et un plus petit montant du gouvernement du Québec, effectivement.
Le président: Est-ce que ce sont les seuls gouvernements provinciaux qui vous offrent une aide financière?
M. LeGresley: Oui, c'est exact.
Le président: Les membres proviennent de toutes les régions du pays?
M. LeGresley: C'est exact.
Le président: Je suppose que la majorité de votre budget provient de ces sources gouvernementales?
M. LeGresley: Probablement la majorité de notre budget, mais je ne suis pas celui qui s'occupe des finances de l'organisation.
Le président: Je comprends. Dans le cadre de votre travail de défense des droits, je suppose que vous communiquez avec les ministères provinciaux, fédéraux et même municipaux, puisqu'ils s'intéressent à ces questions?
M. LeGresley: Oui.
Le président: Vous indiquez ici dans votre mémoire que vous vous occupez principalement des questions juridiques de nature constitutionnelle et internationale pour l'association. J'aimerais en savoir plus à ce sujet. Pourriez-vous nous donner une idée générale de ces questions -- c'est-à-dire ces questions juridiques de nature constitutionnelle et internationale?
M. LeGresley: L'industrie du tabac est un détracteur très bien financé et vigoureux de toute réglementation qui la vise. Le paquet de cigarettes est le moyen publicitaire le plus efficace que possèdent les compagnies de tabac. Lorsque le gouvernement du Canada a envisagé des emballages génériques pour les cigarettes, l'industrie du tabac a soutenu que cela irait à l'encontre de la Convention de Paris sur la propriété industrielle ainsi que de certaines dispositions du GATT et l'ALENA. On m'a alors convoqué pour que je m'occupe de certaines questions de portée internationale ayant trait aux obligations commerciales du Canada si une législation en ce sens était présentée.
Le président: Ces questions n'ont pas été portées devant les tribunaux, n'est-pas?
M. LeGresley: On n'a pas vraiment donné suite à cette politique. Comme vous pouvez le constater, aujourd'hui les paquets de cigarettes ne sont pas génériques.
Le président: À votre avis, est-ce qu'un emballage générique ne violerait pas ces conventions internationales?
M. LeGresley: Non. À mon avis, l'emballage générique est une mesure justifiable si elle est prise de manière non discriminatoire.
Le président: Autrement dit, qu'elle s'applique à tous les fabricants mais je suppose qu'elle ne pourrait pas s'appliquer aux cigarettes importées?
M. LeGresley: J'estime qu'il n'y aurait aucun problème à l'appliquer aux cigarettes importées.
Le sénateur LeBreton: À la fin de la première page de votre mémoire, vous indiquez que le sénateur a jeté les assises du contrôle du tabac pour la prochaine décennie. Vous dites ensuite:
Afin de permettre au Canada de suivre le reste du monde, plus particulièrement les Américains, nous nous devons d'emprunter la voie établie par le projet de loi S-8.
Je trouve cette déclaration intéressante. En tant que Canadienne -- et c'est peut-être ainsi que nous nous sommes toujours perçus -- j'ai toujours cru que nous nous en tirions mieux que les États-Unis, et surtout que certains pays européens où le tabagisme semble beaucoup plus répandu dans les lieux publics et ainsi de suite.
J'aimerais que vous commentiez cette déclaration. Pourriez-vous nous dire si, à votre avis, nous sommes à la traîne des Américains dans ce domaine?
M. LeGresley: Oui, je le crois. Il y a environ trois ans, j'aurais répondu: «Non». Je conviens avec vous qu'historiquement, nous avons devancé les Américains, du moins au cours des 15 dernières années. J'aimerais que ce soit toujours le cas mais le pendule semble s'être déplacé assez nettement du côté des Américains à un moment où le Canada est en train de perdre du terrain.
Le sénateur LeBreton: Que font les Américains? Quelle preuve avez-vous à l'appui de cette déclaration, à savoir que nous sommes à la traîne des Américains?
M. LeGresly: Le 26 août 1996, la Food and Drug Administration a décidé que les produits du tabac relevaient de sa compétence en tant que produits servant à administrer des drogues. Les tribunaux n'ont pas encore tranché en la matière. Les Américains entament actuellement l'étape suivante de la lutte contre le tabagisme, c'est-à-dire qu'ils se détournent de l'emballage et de la publicité pour se concentrer sur le produit comme tel.
C'est ce que nous avons fait en adoptant la Loi sur le tabac. Les articles 5, 6 et 7 nous y autorisent, mais aucune mesure n'a encore été prise. Les États-Unis semblent faire preuve à cet égard d'un dynamisme qui ne semble pas s'être transmis au Canada.
À plusieurs égards moins importants, le Canada devance les États-Unis. Cependant, ces derniers rattrapent le temps perdu très rapidement en ce qui concerne la publicité du tabac. Nous accusons un énorme retard par rapport aux États-Unis pour ce qui est de la qualité de l'air à l'intérieur des bâtiments et ce, depuis longtemps.
Les Américains foncent à toute vapeur, et l'on ne peut pas vraiment dire que l'enthousiasme qui animait jadis les Canadiens existe encore.
Le sénateur LeBreton: Aux États-Unis, tout cela se fait sous l'égide du gouvernement fédéral, de sorte que les lois ne diffèrent pas d'un État à l'autre?
M. LeGresley: Non. Dans un régime fédéré comme celui des États-Unis, des mesures sont prises par les États, d'autres, par le gouvernement fédéral et d'autres encore, par les municipalités.
Le sénateur LeBreton: C'est difficile à croire. Je connais bien les États-Unis. Je m'étonne toujours du nombre de restaurants où les trois quarts des places sont réservées aux fumeurs. C'est peut-être dû à un sentiment de fierté canadien. Nous avons été les premiers à interdire le tabac à bord des avions, et je ne suis toujours pas convaincue que les Américains nous devancent là dessus.
Le président: Un élément m'échappe peut-être. Vous dites qu'en ce qui concerne la publicité et la commandite, par exemple, à l'échelle nationale, les États-Unis imposent des restrictions beaucoup plus sévères que les nôtres?
M. LeGresley: Non. Ce n'est pas ce que j'ai dit du tout. Je parlais en termes plus généraux, je parlais des tendances qui se manifestent. Ça bouge sur tous les fronts aux États-Unis, ainsi que le montrent le débat sur les procès et les règlements qui en ont résulté. Des pourparlers sont en cours avec l'industrie en vue de lui faire retirer sa publicité en certains lieux. On va donc plus loin que le Canada.
En règle générale, la situation de part et d'autre de la frontière est plutôt comparable. J'essayais de faire valoir que, selon moi, le Canada perd de son dynamisme alors que les États-Unis, eux, en gagnent, ce qui les met à peu près sur le même pied que nous pour l'instant.
Le sénateur LeBreton: Aux États-Unis, les fabricants de tabac commanditent d'importants événements sportifs. On peut voir de la publicité vantant les Virginia Slims dans les revues et des panneaux publicitaires de Malboro le long des routes. Il n'y en a pas au Canada.
M. LeGresley: En ce qui concerne la commandite -- et cela n'a rien à voir avec le projet de loi S-8 -- , quand j'ai mentionné la décision de la Food and Drug Administration, j'ai oublié de préciser qu'elle interdit la commandite du tabac à compter de 1998 aux États-Unis. Nous avons déposé un projet de loi par la suite en vue de limiter la grosseur des caractères sur l'emballage. Actuellement, le Canada continue d'autoriser la commandite de marques de produits du tabac alors que les États-Unis sont en train de l'éliminer complètement. La commandite de tous ces événements que vous avez mentionnés sera bientôt interdite aux États-Unis.
Le sénateur LeBreton: Je ne suis pas convaincue qu'il n'y en aura plus.
J'ai peut-être, à nouveau, une fausse impression de sécurité, mais vous avez dit:
Ce que nous pouvons par contre affirmer, c'est que les limites projetées dans le projet de loi S-8 sont nettement mieux que de ne rien faire du tout, comme c'est le cas actuellement.
Est-ce vraiment décidé -- que le goudron ne sera pas réglementé?
M. LeGresley: Vous pouvez mettre n'importe quelle quantité de goudron ou de nicotine dans les produits du tabac. Il existe beaucoup de preuves à l'appui. Voici un document qui a servi de preuve dans un des procès menés au Texas. Des dirigeants d'Imperial Tobacco ou d'Imasco, des Canadiens, y compris Purdy Crawford, alors pdg d'Imasco, étaient présents aux réunions où il était question d'introduire dans les produits canadiens la souche de tabac génétique Y-1 à teneur ultra-élevée en nicotine. Le fumeur canadien absorbe donc plus de nicotine. Ils en ont fait l'essai dans les cigarettes Player's. Ils ont envisagé aussi la possibilité d'ajouter de l'ammoniac dans leur produit et ils ont affirmé en avoir fait l'essai. L'ammoniac change le pH qui accroît la biodisponibilité, c'est-à-dire l'absorption par le fumeur de la nicotine.
Le président: Ils en ont fait l'essai au Canada, dites-vous?
M. LeGresley: Oui, ils l'ont fait.
Le président: Quel a été le résultat?
M. LeGresley: Il faut faire un petit peu de gymnastique mentale. Ils ont dit qu'ils avaient fini par retirer l'ammoniac et le Y-1 de leur produit.
Le président: Le produit a-t-il été mis en vente ou un règlement l'a-t-il interdit?
M. LeGresley: Non. Il n'y a pas de réglementation gouvernementale. Rien n'interdit d'ajouter cette souche ou un additif comme l'ammoniac qui a pour unique effet d'accroître la quantité de nicotine absorbée par le fumeur. Nul ne leur dictait ce qu'ils pouvaient faire et ne pas faire. Ils effectuaient leur choix en fonction de leur propre évaluation de ce qui permettrait de vendre plus de produits. Leur impératif n'est pas de protéger la santé des Canadiens, mais de vendre plus de produits afin d'accroître le rendement aux actionnaires.
Le président: Je comprends cela.
Le sénateur LeBreton: Je vous ai posé la question parce que nous avons entendu un témoin, la semaine dernière, qui a discuté avec nous de la possibilité d'abaisser la teneur en nicotine. Nous nous posions des questions au sujet des cigarettes contenant plus de nicotine qui seraient fabriquées ailleurs et pourraient ensuite être vendues ici. On nous a affirmé très clairement que, si cela se produisait, on analyserait le produit, comme on le fait toujours, et qu'on remarquerait rapidement que le produit vendu au Canada excédait les limites autorisées. Vous rappelez-vous le nom du témoin?
Le président: Oui.
Le sénateur LeBreton: C'est ce qui m'a fait croire qu'il existe au gouvernement un organisme -- peut-être est-ce Santé Canada -- qui empêche les fabricants de cigarettes d'ajouter n'importe quoi à leur produit.
M. LeGresley: Rien n'est interdit. Ainsi, la nicotine figure dans l'une des annexes à la Loi sur les aliments et drogues. C'est une exception, sauf lorsqu'elle se trouve dans un produit dit «naturel».
Le président: Je demanderais à M. LeGresley de nous laisser ce document. Il sera déposé comme pièce que pourront consulter les sénateurs.
M. LeGresley: Donc, la nicotine est effectivement réglementée, sauf lorsqu'elle se trouve dans une cigarette. Ainsi, il faut une ordonnance pour acheter le timbre, mais la cigarette est en vente libre. Quelle étrange situation! Le seul produit dont nous ne précisons pas la composition, pour lequel nous n'interdisons pas d'ingrédients et pour lequel nous n'en exigeons pas est celui qui tue lorsqu'il est utilisé selon les recommandations du fabricant.
Le président: L'incident dont vous avez parlé concernant Player's engageait des Canadiens membres de la direction d'Imperial Tobacco ou d'Imasco qui ont assisté à une réunion et qui ont discuté de la possibilité d'ajouter du goudron?
M. LeGresley: La discussion a porté sur plusieurs questions, y compris sur l'ajout de Y-1 et d'ammoniac dans les cigarettes canadiennes.
Le président: D'après le document que vous avez en main, on en a fait l'essai dans les cigarettes Player's au Canada?
M. LeGresley: C'est juste.
Le président: Vous dites aussi qu'après un bout de temps, la haute direction d'Imperial Tobacco ou d'Imasco a cessé d'en ajouter à son produit. Je serai curieux d'en connaître la raison. Le produit ne se vendait-il pas?
M. LeGresley: Il faudrait poser la question à Imperial Tobacco ou à Imasco. Ils ne me tiennent pas au courant de leur stratégie de marketing.
Le président: Vous n'avez pas creusé la question? Tout ce que vous en savez, c'est ce qu'on peut lire dans le document?
M. LeGresley: Tout ce que je sais, c'est que les dirigeants d'Imasco ou d'Imperial Tobacco -- j'ai oublié de quelle compagnie ils étaient à ce moment-là -- faisaient rapport aux autres filiales de leur société. Il s'agissait de réunions internationales de la grande famille américano-britannique du tabac, d'un consortium international du tabac. Ils ont signalé qu'ils avaient fait l'essai à la fois de l'ammoniac et de la souche Y-1 dans des produits canadiens et qu'ils avaient depuis cessé de le faire. Ils n'ont pas dit qu'ils en avaient fait l'essai dans les produits qui ont été mis en vente. Ils auraient pu faire des essais internes; je n'en suis pas sûr.
Le président: À quelle date a eu lieu cette réunion?
M. LeGresley: Je l'ignore. Je pourrais vous la trouver. Il existe une série de procès-verbaux couvrant une période de plus de dix ans. C'était durant les années 90.
Le président: Ce document est-il venu de témoignages faits dans le cadre d'une poursuite ou d'un procès au civil?
M. LeGresley: Il est tiré d'un procès qui a eu lieu il y a très longtemps au Texas lorsque le procureur général de l'État a poursuivi les compagnies de tabac américaines en vue de récupérer le coût des soins de santé entraînés par le tabagisme.
Le président: Êtes-vous engagé dans un pareil litige ici?
M. LeGresley: Il n'y a pas de poursuites entamées contre l'industrie canadienne du tabac actuellement.
Le président: Pourquoi?
M. LeGresley: Les raisons sont diverses. La Colombie-Britannique a déposé un projet de loi en vue de les faciliter. Tout d'abord, l'industrie du tabac ne semble pas aussi efficace pour empêcher l'adoption de lois au Canada qu'aux États-Unis. En vue d'obtenir des changements de fond aux États-Unis, il fallait opter pour la voie législative comme alternative.
De plus, la procédure au civil au Canada est différente de celle des États-Unis, particulièrement en ce qui concerne les coûts. Les poursuites sont une option moins souhaitable. Si vous perdez votre cause, vous pouvez vous retrouver à assumer les coûts de la défense de l'industrie du tabac. Il faut reconnaître que l'industrie obtiendra fort probablement gain de cause assez souvent.
Ensuite, le montant des dommages-intérêts alloués au Canada est beaucoup moins élevé qu'aux États-Unis.
Nous avons insisté davantage sur le côté fiscal comme mécanisme pour recouvrer les coûts, bien qu'à mon avis, il ne soit pas parfait. Il existe au Canada des moyens d'action politiques et économiques qui n'étaient pas possibles aux États-Unis. Voilà les principales raisons.
Le sénateur LeBreton: La source de ma confusion semble être que, la semaine dernière, nous avons entendu un témoin qui m'a donné carrément l'impression que le gouvernement analyse le contenu des cigarettes et en assure le suivi.
M. LeGresley: Je suis convaincu que Santé Canada et d'autres organismes canadiens analysent effectivement le contenu des cigarettes canadiennes et en assure le suivi. Par contre, ils n'interdisent pas aux fabricants de faire quoi que ce soit.
Le sénateur LeBreton: Voilà un fait intéressant!
Le sénateur Johnstone: Vous mentionnez plusieurs produits et affirmez qu'il serait souhaitable d'en abaisser la teneur en nicotine.
Le lobby du tabac dispose de moyens financiers considérables et il est très puissant. Faites-vous face à une forte résistance? Le fait d'abaisser la teneur en nicotine affecte-t-il leur viabilité ou le niveau de leurs profits?
M. LeGresley: Vous avez raison de croire que le produit est l'enjeu central.
Je suis d'accord avec le sénateur Haidasz qu'il faudrait abaisser la teneur en nicotine des produits consommés par les enfants, c'est-à-dire les nouveaux clients sur le marché. Nous pouvons réduire la probabilité qu'ils ne créent une dépendance à l'égard du produit si nous abaissons la teneur en nicotine en-deçà du seuil critique.
Je suis avocat. Je ne suis pas un expert des substances engendrant une dépendance. Je ne puis donc pas faire de suggestion quant au niveau absolu qu'il faut autoriser. Toutefois, l'effet que cela aura sur le reste du marché me préoccupe. L'abaissement de la teneur en nicotine de manière à réduire le nombre de nouveaux fumeurs sur le marché pourrait obliger le fumeur actuel à consommer plus de cigarettes pour obtenir la même dose de nicotine. Un pareil phénomène pourrait donner de l'expansion au marché et faire augmenter le chiffre d'affaires global, ce qui améliorerait la rentabilité des compagnies de tabac à court et à moyen terme, puisque leur clientèle se chiffre actuellement à 6 ou 7 millions de fumeurs.
En l'absence de nouveaux clients, à mesure que ces produits tueraient la clientèle actuelle et que d'autres clients cesseraient de fumer, elles verraient le nombre de fumeurs baisser même si le nombre de cigarettes consommées par chacun d'entre eux augmentait.
Le sénateur Johnstone: Vous êtes en train de dire que les fabricants de tabac pourraient même faire bon accueil à une réduction de la teneur en nicotine?
M. LeGresley: Je ne crois pas que les fabricants de tabac aient la vue si courte qu'ils souhaitent laisser les législateurs décider du contenu de leurs produits. Ils sortiront toutes leurs griffes en vue de vous empêcher de légiférer le produit. Ils adoreraient nous voir essayer d'interdire la publicité, d'entraver la liberté d'expression et toutes ces questions pour lesquelles ils estiment avoir une cause politique plausible. Je ne crois pas qu'ils veuillent aller jusqu'à dire: «Il faut réglementer les ingrédients de la confiture aux fraises, mais pas ce qui entre dans la fabrication des produits du Maurier». Ils perdraient cet argument. Ils cherchent donc à détourner notre attention. Même si les décisions entraînent une croissance du marché, ils savent que vous finirez par ajuster le tir et que vous mettrez en oeuvre des changements qui réduiront leur marché à long terme et feront baisser les décès et les incapacités causés par la consommation de leurs produits.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth: Est-ce que vous pensez réellement que ce projet de loi va changer la situation de tous les fumeurs? Si vous diminuez la nicotine dans les cigarettes, les personnes qui ont l'habitude de fumer en fumeront deux pour avoir la même quantité de nicotine.
Je ne crois pas que cette loi profitera à notre société, surtout à la nouvelle génération. Je crois plutôt en l'éducation. Les écoliers essaient la cigarette à 10 ou 12 ans. Ils sont accoutumés à ce niveau de nicotine. Ils n'achèteront pas de cigarettes des compagnies de tabac qui diminueront le contenu de la nicotine, puisqu'ils sont habitués à ce goût dans la cigarette.
Comme représentant de votre association, pensez-vous réellement qu'en changeant le contenu de la cigarette, on va améliorer la situation des fumeurs et les aider à prévenir des maladies, et cetera?
[Traduction]
M. LeGresley: Oui, je le crois.
Le projet de loi à l'étude porte sur quatre éléments que l'on trouve à l'article 3 du projet de loi et au paragraphe 6(1) de la Loi sur le tabac. L'alinéa a) est consacré à la nicotine, l'alinéa b), au tabac reconstitué, l'alinéa c), aux additifs et l'alinéa d), au goudron. Vous ne parlez que d'un seul des quatre éléments.
Je trouve la question de la nicotine préoccupante, moi aussi. J'y reviendrai. Par contre, mes préoccupations concernant les autres éléments sont beaucoup moins nombreuses.
Il serait merveilleux de pouvoir réduire la quantité de goudron qu'absorbent les enfants et les fumeurs. Ils ne fument pas pour obtenir leur dose de goudron. Il s'agit d'un sous-produit. En abaissant les niveaux de goudron, nous contribuerions à améliorer leur santé.
Je sais que des additifs entrent dans la composition des produits en vue, par exemple, d'en améliorer le goût. Ils n'ajoutent pas l'arôme de cerise pour rien. Nous aiderions les enfants si nous éliminions ce genre d'additif et empêchions les fabricants d'ajouter de l'ammoniac.
Nous savons que le tabac reconstitué est l'un des moyens qui leur permet de manipuler le produit. Ils veulent nous faire croire qu'il ne s'agit que d'un produit agricole emballé dans du papier, mais il s'agit en réalité d'un moyen d'administrer de la drogue conçu avec soin.
Le projet de loi à l'étude ne pose donc pas de problème à tous ces égards. Pour ce qui est de la nicotine, cependant, il faut être un peu plus prudent.
Je ne suis pas d'accord avec vous lorsque vous dites qu'en réduisant la teneur en nicotine du produit, nous n'aiderons pas les enfants. Au contraire, je crois qu'ils en profiteront, parce que ceux qui commencent à fumer ne le font pas pour absorber de la nicotine, mais bien pour s'affirmer comme adultes. Ils fument pour des raisons sociales plutôt que pour des raisons pharmacologiques. C'est ce qui arrive au jeune de 12 ans qui se met à fumer. Par contre, à 14 ans, il fume parce qu'il a besoin de nicotine.
Le fait de modifier les niveaux de nicotine pose un problème en ce qui concerne ceux qui y sont déjà habitués, mais pour ceux qui se mettent à fumer -- c'est-à-dire les enfants de 10, 11 et 12 ans, en réduisant la teneur en nicotine des cigarettes en deçà du seuil où l'on crée une dépendance, nous contribuerons à ce qu'ils fassent un meilleur choix lorsqu'ils auront 15 ou 16 ans, à cesser de fumer lorsqu'ils auront fini d'en faire l'expérience.
Le sénateur Ferretti Barth: Je persiste à croire qu'il faut mettre en place, dans les écoles, des programmes prévenant les jeunes des dangers de la cigarette.
J'ai déjà fumé et je continue.
[Français]
J'ai essayé de passer de la cigarette normale à la cigarette légère, mais je ne peux pas. J'ai la même réaction que les autres: les paquets de cigarettes légères, je les jette à la poubelle. Je préfère ne fumer dans une journée qu'une cigarette qui me donne de la satisfaction.
Il s'agit plus d'éduquer que de mener une telle bataille, parce qu'on va avoir une bataille formidable avec les compagnies de tabac. Elles n'accepteront jamais de diminuer les produits contenus dans la cigarette.
Même si les compagnies de tabac ont démontré un effort de compréhension en fabriquant des cigarettes légères, les gens ne se laissent pas influencer sur ce qu'ils veulent faire. Chacun a le droit d'avoir des faiblesses.
Nous devrions faire des programmes de prévention et d'éducation avec des petits groupes d'enfants et d'étudiants, pour entendre de vive voix leurs suggestions.
Les gens ne tiennent pas compte du fait qu'il y a plus ou moins de nicotine ou de goudron dans les cigarettes. C'est vraiment la prévention et l'éducation sur-le-champ qui donnent des résultats.
[Traduction]
M. LeGresley: Merci de vos observations. Je suis d'accord avec certaines; en effet, je pense que l'éducation est essentielle; par ailleurs, il ne suffit pas simplement d'obliger les gens à opter pour certains mode de vie, mais il faut les encourager à faire de bons choix.
La différence entre cette épidémie et toutes les autres, c'est que pas un seul groupe de défense ou de lobby n'encourage la peste. Il n'y a pas de groupe de promotion du VIH qui essaie de vous inciter à ne pas adopter de lois susceptibles d'atténuer ce fléau. Le lobby pro-VIH ne mène pas de campagne contre-éducative.
Je suis d'accord: on peut éduquer les enfants, de même que les adultes, mais il ne faut pas oublier qu'il existe au Canada une industrie de huit milliards de dollars par an qui fait de la contre-éducation afin d'inciter les gens à croire que ses produits ne sont pas aussi nocifs. C'est ce qui explique la mise en marché de cigarettes «ultra légères», qui permet de profiter de la fausse perception du public que ces produits sont moins nocifs. Cette industrie essaye de neutraliser tous nos efforts visant l'éducation des enfants. Nous sommes d'accord pour dire que l'éducation s'impose, mais reste à savoir si c'est la seule solution. Je ne le crois pas et je pense que nous devons nous occuper du produit lui-même.
Je suis d'accord avec ce que vous avez dit plus tôt, à savoir que les gens peuvent commencer par fumer deux cigarettes. C'est la raison pour laquelle une approche double s'impose: l'une visant à abaisser les taux de nicotine des produits auxquels les enfants ont accès; l'autre visant à offrir des alternatives viables aux fumeurs qui ont besoin de cette nicotine. Nous ne voulons pas qu'ils répondent à leurs besoins de nicotine en fumant plus de cigarettes, le taux de nicotine de chaque cigarette étant peu élevé.
Il faut leur offrir des produits de remplacement viables qui répondent autant à leurs besoins pharmacologiques que sociaux. Je ne parle pas ici uniquement du timbre à la nicotine, mais de la nicotine d'entretien pour le reste de la vie ou pour une longue période de temps, pas seulement de nicotine qui permette de cesser de fumer. L'approche adoptée doit être polyvalente.
Le sénateur LeBreton: À cet égard, cela ne complique-t-il pas simplement le problème? Êtes-vous en train de dire que la nicotine que l'on retrouverait ailleurs n'est pas aussi mauvaise que la nicotine des cigarettes?
M. LeGresley: Ce produit ne va pas vous tuer, mais peut créer une accoutumance à la nicotine. Cela peut être une porte d'entrée et il se peut que vous finissiez par fumer. Cela ne va pas vous donner le cancer du poumon ou de l'oesophage, ni non plus de maladie cardiaque, mais vous y serez accoutumé.
Le sénateur LeBreton: Quels en sont les effets secondaires?
M. LeGresley: Je ne le sais pas. Il faudrait entendre un spécialiste des effets de la nicotine. Ce n'est pas bon pour vous, mais cela ne vous tue pas, autant que je sache, sauf si vous en prenez des doses extrêmement importantes.
Le sénateur LeBreton: Je ne fume pas, mais il me semble que pour les fumeurs, le problème est plus vaste et il ne s'agit pas uniquement de proposer une solution de remplacement. Les gens fument pour se détendre, au cours de réceptions ou après un gros repas; ils sont toujours en mesure d'expliquer les raisons qui les poussent à fumer. Je ne sais pas si le fait de prendre une pilule ou de mâcher un morceau de gomme représente une solution.
M. LeGresley: Je suis d'accord avec vous, il faut répondre à leurs besoins au-delà des besoins physiologiques directs de nicotine.
Il n'y a pas de raison pour laquelle le distributeur de nicotine ne pourrait pas ressembler à un long tube blanc comme celui-ci. Il vous donne la dose de nicotine, sans être une cigarette traditionnelle. Il ne brûle pas de tabac, mais peut remplir bien des fonctions sociales des cigarettes.
Si nous le proposons à l'industrie du tabac ou à l'industrie pharmaceutique -- car je crois aussi que vous aurez de nouveaux clients parmi les sociétés pharmaceutiques -- il leur sera possible de fabriquer des produits qui répondront aux besoins de nicotine du consommateur de diverses façons. Peu importe le produit offert, le gouvernement doit dire: «Voici les objectifs à atteindre. Nous vous demandons de trouver un moyen d'offrir des produits dont le taux de nicotine ne dépasse pas «X».»
Il faudrait fixer les taux de nicotine de la même façon que nous fixons la consommation d'essence des automobiles. Il serait peut-être souhaitable que les ventes ne dépassent pas un certain taux de nicotine -- que nous pourrions abaisser progressivement.
Le président: Ce n'est pas ce que prévoit le projet de loi.
M. LeGresley: Vous avez raison. Toutefois, cela permettrait aux fabricants de mettre sur le marché des produits de nicotine susceptibles de répondre aux besoins des fumeurs sans qu'il ne leur soit nécessaire d'augmenter leur consommation de cigarettes. Il faudrait également avoir un chiffre pondéré de ventes permettant d'aller en deçà du seuil critique.
Le sénateur LeBreton: Il serait bon que ceux qui dépendent de la nicotine choisissent ce genre de produit et ne polluent pas l'atmosphère de tous.
En Ontario, on peut se procurer la Nicorette sans ordonnance, directement à la pharmacie. Avez-vous des données laissant croire que ceux qui essayent de cesser de fumer achètent des produits comme la Nicorette? Sait-on si les gens achètent leurs propres produits de nicotine pour répondre à leurs besoins sans avoir à fumer de cigarettes?
M. LeGresley: Oui, cela se fait, puisqu'il y a des entreprises commerciales qui vendent ces produits pour faire de l'argent.
Le plus important au sujet du projet de loi du sénateur Haidasz, c'est que pour la première fois on dit que l'on peut faire quelque chose au sujet du produit au lieu de laisser carte blanche aux fabricants. Il est toujours possible de s'entendre au sujet des taux de nicotine.
En ce qui concerne le tabac reconstitué -- c'est-à-dire, les additifs et le goudron -- nous ne sommes pas trop en désaccord. Nous le sommes peut-être au sujet des taux de nicotine, mais le plus important, c'est que c'est le gouvernement qui va commencer à contrôler les cigarettes, non les fabricants; ce sera à ces derniers de décider de la façon dont ils atteignent ces objectifs. C'est la raison pour laquelle le projet de loi S-8 est tellement important et nous mène sur la bonne voie. Ce n'est toutefois pas une solution définitive.
Lorsque nous avons présenté la Loi de l'impôt sur le revenu, nous savions qu'il y aurait des gens pour en contourner certains éléments; c'est la raison pour laquelle nous réexaminons souvent cette loi. Les sociétés de tabac ne vont pas rester sans réaction dès que l'on commencera à s'occuper de leurs produits. Elles vont essayer d'éviter certaines choses. Par exemple, si on ne contrôle pas les taux de nicotine dans toute la cigarette -- c'est-à-dire si on contrôle la nicotine dans le tabac seulement -- elles vont simplement retirer la nicotine du tabac et la mettre dans le papier.
Le sénateur LeBreton: Effectivement, ou dans le filtre.
M. LeGresley: Elles peuvent mettre la nicotine où elles le veulent. Toutefois, le projet de loi S-8 nous mène sur la bonne voie.
Le président: Vous comprenez les choix du comité: adopter le projet de loi sans amendement, l'adopter avec amendements ou ne pas l'adopter du tout.
Voulez-vous que ce projet de loi soit adopté tel quel?
M. LeGresley: Adopter ce projet de loi tel qu'il nous est présenté aujourd'hui vaut mieux que le statu quo. Je préférerais que les paragraphes 6.1)b), c) et d) soient adoptés et que nous nous attardions davantage sur les taux de nicotine à imposer.
Entre donner aux sociétés de tabac toute liberté en matière de taux de nicotine, et réglementer les taux de nicotine selon le projet de loi du sénateur Haidasz, je choisis le projet de loi.
J'ai quelques inquiétudes en ce qui concerne l'imposition d'un taux de nicotine, alors que le marché n'offre pas aux fumeurs d'autres produits de nicotine viables pour eux aux plans économique et social.
Le président: Avez-vous essayé d'apporter des amendements?
M. LeGresley: Non. Fixer les taux de nicotine est une question complexe. Je pourrais bien sûr dire que le taux de nicotine devrait être en deçà de celui correspondant au déclenchement de l'accoutumance.
Le président: Cela exigerait un projet de loi différent.
M. LeGresley: Je le comprends.
Le président: Je ne vous demande pas de rédiger quoi que ce soit, car nous avons nos propres rédacteurs. Je vous demande simplement si vous voulez proposer des amendements à ce projet de loi.
M. LeGresley: Non, le projet de loi sous son libellé actuel, me convient.
Le sénateur LeBreton: Vous avez fait une observation qui m'a paru curieuse, vous avez dit que le fait d'indiquer les taux que nous accepterions dans le tabac représente un pas dans la bonne direction. Vous avez ensuite parlé du papier et du filtre. Il se peut que je ne le comprenne pas très bien, mais il me semble que nous n'incluons ni le papier ni le filtre.
M. LeGresley: Si.
Le sénateur LeBreton: Permettez-moi de citer l'article 6.1:
Il est interdit de fabriquer un produit du tabac destiné à être fumé sauf si chaque gramme du produit, en grammes de tabac, à l'exclusion du poids du papier, de celui de l'emballage et de celui du filtre à la fois...
M. LeGresley: D'après la définition de «produit du tabac» de la Loi réglementant les produits du tabac, adoptée l'année dernière, cela inclut le papier de cigarette, les tubes, les filtres, et cetera.
Le sénateur LeBreton: Si j'étais fabricant de tabac, je regarderais cela de près. Peut-être faut-il le formuler plus clairement.
M. LeGresley: À mon avis, le libellé est clair.
Le président: Nous sommes à court de temps, monsieur LeGresley.
Avant de partir, j'aimerais vous donner la possibilité de nous dire ce que vous pensez du témoignage des représentants des Douanes et de Revenu Canada qui ont comparu la semaine dernière, à propos de l'impact éventuel sur la contrebande. Quel est votre avis, ou avez-vous des renseignements à cet égard?
M. LeGresley: Je n'ai pas lu le témoignage.
Le président: Ils n'ont pas été très ouverts, pour être francs. Selon eux, ce projet de loi, s'il est adopté, aura un impact et augmentera la menace de contrebande -- si vous voulez l'appeler ainsi -- mais ils ne pouvaient pas la quantifier. Avez-vous des idées à ce sujet?
M. LeGresley: Je crois que l'industrie du tabac fera tout ce qui est en son pouvoir pour renverser l'esprit de ce projet de loi. La contrebande des produits au Canada en serait sûrement facilitée.
Je ne me hasarderais pas à quantifier les niveaux de contrebande. Cela dépendrait beaucoup des autres mesures anti-contrebande adoptées.
Le président: Je vous remercie de nous avoir donné votre point de vue sur l'industrie du tabac.
Le sénateur LeBreton vient de me donner la phrase en question:
...la GRC et Revenu Canada estiment qu'une baisse notable de la teneur en goudrons ou en nicotine des produits du tabac inciterait vraisemblablement certains consommateurs à se tourner vers d'autres sources d'approvisionnement (peut-être la contrebande). Même si nous reconnaissons qu'il y a une corrélation entre la teneur en goudrons et en nicotine, et l'étendue de la contrebande, ni la GRC ni Revenu Canada n'est en mesure d'offrir une opinion d'expert sur l'ampleur de cette corrélation.
C'est donc ce qu'ils ont dit.
Nous accueillons notre prochain témoin, notre ancien collègue, M. Haidasz.
M. Haidasz, vous avez témoigné devant notre comité. Vous avez donné beaucoup de détails à la deuxième lecture et avez témoigné devant le comité lorsque nous avons commencé nos audiences sur la question. Nous avons également entendu des représentants du ministère de la Santé et ensuite, des représentants de la GRC et de Revenu Canada. Nous avons entendu aujourd'hui M. LeGresley, représentant l'Association pour les droits des non-fumeurs.
Si vous avez des observations à faire sur les témoignages entendus, je vous donne la possibilité de le faire au cours des quelques minutes qui nous restent aujourd'hui. J'inviterais ensuite les collègues à vous poser des questions, le cas échéant.
L'honorable Stanley Haidasz, c.p.: Merci de me donner l'occasion de comparaître une deuxième fois dans le cadre de l'étude de ce projet de loi.
Dans mon premier témoignage, j'ai indiqué que l'on avait oublié, par mégarde, de mentionner la vente des produits du tabac. Nous avons rédigé des amendements à cet effet, que nous voulons inclure dans le projet de loi.
Nous proposons d'amender le projet de loi S-8 en remplaçant dans la version anglaise le mot «manufacture» à la ligne 7 de la page 2, par les mots «manufacture or sell»; et en remplaçant dans la version française les mots «de fabriquer» à la ligne 7 de la page 2, par les mots «de fabriquer ou de vendre».
Nous proposons également d'amender le projet de loi S-8 à l'article 3 en remplaçant dans la version anglaise les mots «shall be manufactured» à la ligne 13 de la page, par les mots «shall be manufactured or sold»; et en remplaçant dans la version française les mots «de fabriquer» à la ligne 13 de la page 2, par les mots «de fabriquer ou de vendre».
Le sénateur LeBreton: Bien que la définition soit claire dans la Loi réglementant les produits du tabac, avez-vous des inquiétudes au sujet du libellé de l'article 6.1?
Il semble y avoir là une porte de sortie. Si l'on voulait passer outre au taux de nicotine, au lieu de mettre cette substance dans le produit du tabac, on pourrait la mettre dans le filtre ou le papier.
M. Gary D. Knight, attaché de recherche: Pendant plus de deux ans, nous avons beaucoup débattu de la question avec le conseiller juridique. À ce moment là d'ailleurs, le sénateur Haidasz a exprimé ses remerciements au conseiller juridique, devant le Sénat.
Les fabricants de tabac se sont montrés très astucieux. L'article 6.1 qui est proposé vise à s'assurer que les mesures de poids fixées comme acceptables pour un produit ne sont pas obtenues par suite de la division par un dénominateur trop lourd. Si vous avez un filtre lourd qui pèse un tiers de gramme et que le reste du produit pèse environ 1 gramme, la division par 1,3 donne un chiffre peu élevé. On peut alors avoir plus de nicotine et cependant arriver à un chiffre peu élevé. C'est la raison pour laquelle la terminologie est «en grammes de tabac».
Lorsque nous disons «à l'exclusion», cela renvoie vraiment à ce que nous «exprimons» et non à ce que nous faisons, lorsque nous parlons de la teneur réelle en éléments nocifs.
Cela permet-il de clarifier la question?
Le sénateur LeBreton: Je ne prétends pas être avocate, mais cela n'était pas clair. Si j'étais fabricant de tabac, je dirais: «Je vais simplement mettre la nicotine dans le papier ou le filtre.» Toutefois, j'accepte votre explication.
M. Knight: Dans la première définition, celle du «tabac reconstitué», on retrouve la même approche. «Tabac reconstitué» substance qui se dépose par sédimentation lorsque la substance d'un produit du tabac, à l'exception du papier ou de tout autre emballage ou filtre, est soumise à un test de flottation dans l'acétone ou tout autre solvant organique non acide, y compris l'eau et les alcools. Cela ne désigne pas l'acide nitrique qui ferait tout dissoudre.
La question est de savoir si les sédiments éventuels font partie du filtre. Nous ne voulons pas arriver ici à une telle conclusion. C'est en quelque sorte la même idée.
Nous parlons du contenu de la cigarette, y compris toute imprégnation du papier de la cigarette, de nicotine, d'ammoniaque ou d'autres composés azotés qui permettraient de rehausser l'absorption de nicotine.
Bien que ces choses soient mesurées, l'expression «en grammes», signifie chaque gramme du produit, à l'exclusion du poids du filtre et du papier.
Santé Canada devrait prendre deux cigarettes, en faire fumer une selon la méthode retenue, déterminer le niveau de nicotine produit et l'exprimer en milligrammes. Par quoi le résultat serait-il divisé? Il s'agirait de défaire la seconde cigarette, de déterminer le poids de tout ce qui se trouve dans le tube, à l'exclusion du papier.
Le sénateur Haidasz: J'aimerais ajouter quelque chose à mon témoignage en ce qui concerne les conclusions de M. Kaiserman du ministère de la Santé, du Bureau du contrôle du tabac, qui a déclaré que le ministère aimerait qu'on lui donne davantage de temps pour effectuer de nouvelles études sur les effets possibles d'une diminution de la teneur en nicotine et de la mesure dans laquelle cela inciterait les gens à fumer davantage.
Ces réserves exprimées par M. Kaiserman ne devraient pas empêcher le comité d'adopter le projet de loi. Le projet de loi autorise le ministre à modifier en tout temps la loi si d'autres tests ou études prouvent que ces modifications devraient être apportées.
Comme l'a dit le témoin précédent, nous devons commencer quelque part. Je commence donc en modifiant la quantité de nicotine et de goudron, plus particulièrement les additifs et le tabac reconstitué. Il nous faut commencer quelque part. Depuis que l'on fabrique du tabac, la nicotine et le goudron ont toujours été utilisés en grande quantité et constituent les principales substances toxiques. C'est la raison pour laquelle les gens développent une dépendance au tabac. Lorsqu'elles fument, elles respirent les goudrons nocifs. C'est ce qui cause les quelque 20 conditions cliniques de maladies associées au tabac ainsi que le cancer. C'est ce que nous essayons d'enrayer. Si nous ne commençons pas quelque part, dans les plus brefs délais, nous retardons, comme par le passé, l'inévitable: l'augmentation du nombre de fumeurs, du nombre de décès attribuables au tabagisme et des coûts plus élevés pour les soins de santé et l'économie canadienne. Nous devons enrayer le mal et il n'y a qu'une seule façon d'y parvenir: modifier les choses que nous savons nocives. Le projet de loi permet au ministre d'intervenir n'importe quand et d'apporter les modifications à la lumière des études qui ont été faites et qui devraient l'être en vue d'améliorer ce projet de loi.
Quelqu'un a parlé des niveaux de nicotine et de ses répercussions. Si les membres du comité peuvent mettre la main sur ce livre qui a été publié pour la Direction générale de la protection de la santé par la Société royale du Canada et qui s'intitule: Tabac, nicotine et toxicomanie, ils sauraient alors pourquoi, dans un premier temps, la nicotine est à ce point toxique et, dans un deuxième temps, le gouvernement doit en modifier les niveaux et les contrôler. Cette publication a été publiée le 31 août 1989.
Le président: Merci, docteur Haidasz.
M. Knight: Je veux faire un commentaire sur un point qui est ressorti au cours du dernier témoignage. Vous avez dit, lorsque vous avez interrogé le témoin précédent, que le projet de loi serait différent si vous deviez considérer cette approche qui consiste à commencer par une teneur plus élevée en nicotine et à avoir ensuite l'occasion de l'abaisser, pour utiliser l'expression de M. LeGresley.
Avec tout le respect que je vous dois, cela a été délibérément exposé à l'article 4 au premier sous-aliéna où il est question d'établir des normes applicables aux produits du tabac, notamment pour diminuer les quantités déterminées de nicotine.
Le président: Autrement dit, le gouverneur en conseil pourrait le faire?
M. Knight: C'est exact. Par exemple, si le ministre de la Santé proposait une modification visant à commencer à un niveau plus élevé que celui qui avait finalement été adopté, il pourrait toujours, par l'entremise du gouverneur en conseil, l'abaisser au niveau qu'il juge approprié à cette fin.
Le président: Je le vois maintenant.
Honorables sénateurs, nous allons lever la séance. Un amendement a été proposé par le parrain du projet de loi. À la première occasion, je demanderai aux collègues si l'un d'entre vous veut en proposer l'adoption. De toute manière, nous allons passer à l'étude article par article du projet de loi. Le président acceptera alors les motions qu'il s'agisse de faire rapport du projet de loi sans amendement, avec amendement ou de recommander son rejet. Ce sont les options qui s'offrent au comité en ce qui concerne la mesure législative.
Pour résumer, si c'est possible, nous procéderons mardi ou mercredi prochain à l'étude en question après avoir terminé notre étude des lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants. Sinon, nous devrons probablement attendre le 22 avril à moins d'organiser une séance spéciale entre-temps, mais notre temps est précieux ces jours-ci.
Dans les prochains jours, nos amis de la Bibliothèque du Parlement prépareront un court résumé des témoignages que nous avons entendus relativement à ce projet de loi afin de vous aider dans le cadre de l'examen et des consultations que vous effectuerez avec vos collègues des caucus.
Je vous remercie, docteur Haidasz, ainsi que monsieur Knight.
La séance est levée.