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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 35 - Témoignages


OTTAWA, le mardi 8 juin 1999

Le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit ce jour à 10 h 05 pour étudier les dimensions de la cohésion sociale au Canada dans le contexte de la mondialisation et des autres éléments économiques et structurels qui influent sur les niveaux de confiance et de réciprocité dans la population canadienne.

Le sénateur Mary Butts (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La vice-présidente: Notre témoin ce matin est le docteur Jim Stanford. Merci beaucoup d'être présent ici aujourd'hui. Je viens tout juste d'apprendre que vous venez de publier un nouveau livre. Je suis désolée que nous n'ayons pas pu nous en procurer des exemplaires sinon nous aurions fait la queue pour obtenir une dédicace.

Nous avons consacré plusieurs mois à l'étude de la cohésion sociale au Canada dans le contexte de la mondialisation et de la technologie. Nous avons entendu des témoins représentant de nombreuses institutions au Canada, notamment les chefs de file de certains de vos clients ou amis -- je ne sais pas quel qualificatif vous leur donneriez. Aujourd'hui, nous sommes impatients de connaître votre opinion ultime et éclairée afin de pouvoir compléter nos recherches. Nous espérons avoir gardé le meilleur pour la fin.

Si vous avez un exposé, nous nous ferons un plaisir de l'écouter. Ensuite, les membres du comité pourront vous poser leurs questions.

M. Jim Stanford, économiste, Travailleurs et travailleuses Canadiens de l'automobile: Merci beaucoup, honorables sénateurs, de m'avoir invité à venir vous rencontrer aujourd'hui. Je tiens à féliciter votre comité pour son initiative d'enquêter sur l'important sujet de la cohésion sociale. La synchronisation est bonne car des recherches fascinantes sur les avantages sociaux et économiques de la cohésion sociale sont en cours dans le milieu économique.

Les communautés qui ont des structures et des réseaux plus englobants et plus réciproques tendent également à être les collectivités qui sont les plus efficaces sur le plan économique. On reconnaît maintenant que la cohésion sociale peut avoir toutes sortes d'avantages économiques différents, depuis une participation plus élevée de la population active en descendant jusqu'au niveau micro-économique avec la création et la mise en application plus facile de contrats implicites.

L'idée que le capital social est un intrant économique précieux ou même indispensable est de plus en plus acceptée, même parmi les économistes conventionnels très traditionnels qui se transforment généralement en hystériques incontrôlables chaque fois que l'on prononce le mot «social». «Que signifie ce mot «social»?» disent-ils. «Il n'a aucun rapport avec l'offre et la demande». En fait, il s'avère qu'il a un grand rapport avec l'offre et la demande.

Votre comité arrive à la fin de cette étape de ses enquêtes, mais si vous n'avez pas encore eu la chance d'entendre le professeur Lars Osberg de l'Université Dalhousie, vous ratez quelque chose. Il dirige un projet interdisciplinaire qui a effectué des recherches fantastiques qui engendreront un livre sur les implications économiques de la cohésion sociale. L'Université de Toronto le publiera plus tard cette année.

De toute évidence, je partage les préoccupations qui ont motivé votre enquête sur l'effondrement de la cohésion sociale et de la solidarité dans la société canadienne et l'émergence d'inégalités au niveau des résultats et de l'accès qui sont persistantes et très préjudiciables dans les diverses régions et parmi les différents groupes sociaux au Canada.

Je ne pense pas que la mondialisation et les changements technologiques sont vraiment les causes profondes de ces problèmes. Nous avons connu la mondialisation et les changements technologiques à des degrés divers, plus ou moins continuellement, à peu près au cours des trois derniers siècles. Toutefois, durant ces processus, il y a eu des époques où la cohésion sociale s'est améliorée considérablement. De toute évidence, tant la mondialisation que la technologie soulèvent des questions d'adaptation et de changement et aussi de facilitation du changement et d'indemnisation des gens touchés par le changement, mais j'estime que ces problèmes devraient être assez gérables d'une manière bénéfique sur les plans social et économique, en autant que nous n'acceptons pas une mentalité de «chacun pour soi». Si nous laissons chacun survivre comme il peut dans le cadre d'une approche de type «loi de la jungle» où seuls les plus forts survivent, alors n'importe quel type de changement, découlant de la mondialisation ou des changements technologiques ou de n'importe quoi d'autre, entraînera des conséquences préjudiciables pour certains groupes de la société, et ces groupes s'opposeront tout naturellement de toutes leurs forces à ce changement.

Par ailleurs, si nous essayons de gérer et de réglementer le changement d'une façon plus bénéfique sur un plan universel, alors les possibilités offertes par ce changement pourront être saisies sans provoquer de dommages sociaux indus. Mais cela n'arrivera pas naturellement. Cela n'arrivera pas par suite de la magie des marchés libres. Cela n'arrivera que si, en tant que société, nous intervenons et nous choisissons ce résultat.

Permettez-moi de vous donner un exemple pour expliquer pourquoi je ne pense pas que la mondialisation et la technologie sont les causes profondes. Je mentionnerai une industrie qui est évidemment importante pour nous, l'industrie canadienne de l'automobile, dans laquelle travaillent un tiers des membres de notre syndicat. C'est peut-être la plus belle histoire à succès dans l'industrie au Canada. À l'heure actuelle, notre industrie automobile est fortement mondialisée. Elle a toujours fait partie intégrante du commerce international. Sans échanges avec l'étranger et sans investissements étrangers, cette industrie n'existerait pas au Canada. Les dizaines de milliers d'emplois directs et probablement les centaines de milliers d'emplois indirects qui dépendent de cette industrie n'existeraient pas.

Notre industrie a connu des changements fantastiques au niveau de la technologie et des investissements mondiaux. En matière de technologie, par exemple, pratiquement chaque chaîne de montage d'automobiles au Canada a été complètement démontée et remise à neuf au cours des années 90 avec un nouveau matériel qui dépend fortement des robots et d'autres moyens technologiques exigeant moins de main-d'oeuvre. Grâce à cet investissement, l'industrie canadienne est actuellement plus productive que l'industrie automobile américaine, d'après n'importe quelle mesure physique de la productivité que vous pouvez examiner. Il y a tout un débat au Canada à propos de la baisse de la productivité, mais l'industrie automobile est vraiment une exception à cette règle, et c'est grâce à cet investissement, grâce aux changements technologiques incorporés dans cet investissement, que notre industrie est si productive et si concurrentielle.

En tant que syndicat, au lieu d'essayer de nous opposer à ce changement technologique, nous reconnaissons en réalité qu'il y a un potentiel bénéfique incorporé dans cette technologie. Nous avons essayé de discuter avec les sociétés et de trouver des moyens de négocier et de réglementer explicitement l'implantation de ce changement technologique afin qu'il soit utile à nos membres au lieu de leur nuire, tout en venant en même temps en aide à l'ensemble de l'industrie.

Au cours des dernières décennies, nous avons mis fortement l'accent sur des mesures visant à réduire la semaine de travail, les heures normales de travail dans l'industrie. Le projet le plus innovateur est un programme que nous appelons le programme «spa», grâce auquel nos travailleurs des chaînes de montage obtiennent maintenant cinq semaines de congés payés programmés à intervalles réguliers. Ils obtiennent une semaine de congés payés approximativement tous les huit mois, et cela vient en supplément de leurs congés normaux, qui sont déjà assez généreux. Autrement dit, nous avons négocié cinq semaines supplémentaires de congés entre 1993 et aujourd'hui.

On reconnaît explicitement que cette nouvelle technologie a réduit la demande de travailleurs sur les chaînes d'assemblage. Sans mesures de ce genre, cela réduirait également la demande de travailleurs, et moins de Canadiens auraient accès à ce qui est un emploi relativement privilégié, à un bon emploi relativement bien rémunéré dans l'industrie automobile. Nous estimons que ces mesures ont créé au moins 2 000 emplois qui autrement n'existeraient pas dans les usines de montage d'automobiles, et ce sont de très bons emplois bien rémunérés.

Nous avons dû entraîner les sociétés à travers tout ce processus en faisant des pieds et des mains, et c'est la raison pour laquelle je dis que cela n'arrivera pas naturellement. Si on laisse cela aux forces de l'offre et de la demande des entreprises privées et des particuliers, ces genres de mesures, conçues explicitement pour régulariser le changement et s'assurer qu'il bénéficie aux gens au lieu de leur nuire, n'arriveront pas. Cela est arrivé dans un environnement réglementé dans lequel, en tant que syndicat, nous avons discuté avec les entreprises pour imposer des restrictions.

Ce ne sont pas tous les milieux de travail qui ont la chance d'avoir un syndicat ayant le pouvoir de négociation que nous détenons dans l'industrie automobile. C'est là que le gouvernement doit intervenir et jouer un rôle prépondérant.

En bref, le changement, qu'il découle de la mondialisation ou de la technologie ou de n'importe quoi d'autre, ne devrait pas constituer par lui-même et de lui-même une menace fondamentale pour la cohésion sociale. Dans leur grande majorité, les travailleurs ne s'opposent pas au changement par lui-même et de lui-même. Les travailleurs peuvent s'opposer à se faire vider les poches, mais c'est différent de l'opposition au changement. Si nous pouvons trouver des façons de garantir que les Canadiens moyens pourront partager les promesses de la mondialisation et de la technologie, alors le processus suivra son cours.

À mon avis, quel facteur a été important pour expliquer ce que la plupart d'entre nous conviendraient d'appeler la détérioration de la cohésion sociale au Canada? J'insisterai assurément sur ce que je considère comme des tendances très négatives dans la politique sociale et fiscale au Canada durant les années 90, en particulier les compressions radicales au niveau du soutien financier des paiements de transfert aux particuliers et aussi les paiements de transfert entre les paliers de gouvernement. Par exemple, le programme d'assurance-chômage verse en moyenne à peu près la moitié de ce qu'il versait en prestations par chômeur.

Durant la fin de semaine dernière, j'ai organisé un groupe de discussion lors des réunions de l'Association canadienne d'économique à Toronto. Nous avons entendu un exposé très intéressant et, d'une certaine façon, alarmant d'Alan Zeesman, directeur de recherches à DRHC ici même et qui pourrait constituer un témoin qui mériterait d'être entendu par votre comité. Il a démontré de façon assez convaincante que les restrictions au niveau de l'admissibilité aux prestations d'assurance-chômage avaient constitué une source capitale de progression de la pauvreté au Canada dans les années 90 et en particulier de la ghettoïsation croissante de la pauvreté -- c'est-à-dire de la concentration de la pauvreté dans des collectivités particulières identifiables dans diverses régions du pays.

Les compressions radicales dans les paiements de transfert de gouvernement à gouvernement ont également joué, à mon avis, un important rôle négatif. Toutes ces coupures sont en train d'être cimentées à long terme avec des réductions d'impôt qui, au niveau provincial, ont certainement bénéficié de façon disproportionnée aux salariés à revenu élevé. Si le gouvernement fédéral suit la tendance de provinces comme l'Ontario, je crains que nous assisterons à la même chose au niveau fédéral.

Je pense que toute cette tendance de la politique sociale et financière a définitivement favorisé et renforcé l'idée du «chacun pour soi» dans la société canadienne et a miné la capacité des programmes canadiens d'atténuer les effets du changement. Pour renverser cette tendance, je serais favorable à un réinvestissement d'une partie des excédents financiers imminents dans des programmes de promotion de la cohésion sociale, à la fois traditionnels comme l'assurance-chômage et nouveaux comme les soins à domicile ou l'assurance-médicaments dans le régime d'assurance-maladie ou un crédit d'impôt pour enfants ou d'autres formes de soutien pour les parents.

Un deuxième facteur est, à mon avis, sous-jacent à la baisse de la cohésion sociale, et c'est ce que je considère comme un déséquilibre croissant de la richesse financière au Canada, et les implications politiques, économiques et sociales de ce déséquilibre croissant.

Un stéréotype circule dans les annonces des fonds mutuels et des autres institutions et produits financiers, à savoir que le Canada est actuellement une nation d'investisseurs personnels, que nous avons tous un intérêt dans le marché boursier par le biais de nos fonds mutuels. Nous avions l'habitude d'ouvrir le journal le matin pour vérifier les résultats du hockey, mais maintenant nous l'ouvrons pour vérifier les scores des fonds mutuels, pour voir si nous avons gagné ou perdu un point au cours des transactions de la veille. J'estime que ce stéréotype est assez erroné et que l'industrie financière en fait délibérément la promotion, car elle aime prétendre que nous avons tous un intérêt dans les marchés et un intérêt à payer les commissions de 2 p. 100 que le secteur financier perçoit sur chaque transaction.

Malheureusement, il y a un manque de données sur la propriété de la richesse au Canada. Depuis 1994, Statistique Canada n'a pas publié de données officielles sur la répartition de la richesse financière. Vous savez que nous obtenons beaucoup de renseignements sur la répartition du revenu, qui est un concept avec lequel la plupart des Canadiens sont plus familiers mais nous ne recueillons pas de données officielles sur la répartition de la richesse. Cela changera l'an prochain. Statistique Canada a amorcé une nouvelle enquête sur ce sujet et nous devrions obtenir quelques données très intéressantes à ce propos. Entre-temps, même si on n'a pas la liste de la richesse, un éventail de sources indirectes, comme les déclarations d'impôt sur le revenu, énumèrent le revenu tiré de la richesse sous forme de dividendes, de paiement d'intérêts, de revenus d'investissements, et cetera. Nous avons des données sur les REER et les cotisants aux REER par niveau de revenu -- données qui sont tirées de sources comme la bourse et certaines des principales banques qui ont effectué des sondages publics sur la propriété de la richesse financière.

D'après toutes ces données, je me sens assez confiant pour vous dire qu'il semblerait que jusqu'à 40 p. 100 de toute la richesse financière nette au Canada appartiendrait seulement au 1 p. 100 supérieur, au 1 p. 100 des plus riches dans la société. Il s'agit là d'un degré d'inégalité absolument incroyable. Pensez à toutes les inquiétudes qui ont été provoquées, au Canada, par la répartition du revenu, et pourtant la répartition du revenu est beaucoup, beaucoup plus égale que cette répartition de la richesse.

L'ensemble du processus a bénéficié du versement de subventions publiques très importantes, croyez-le ou non, sous des formes comme l'appui très généreux au programme de RÉER et aux autres formes de subventions pour des investissements financiers personnels.

Je dirais que la conséquence pour la cohésion sociale, c'est que vous obtenez une source d'influence très concentrée: des gens qui ont un intérêt très grand et disproportionné dans le secteur financier et qui, en conséquence, seront favorables aux genres de politiques économiques et financières qui profiteront au secteur financier -- souvent, j'oserais dire, au détriment de ceux qui doivent en réalité gagner leur vie dans la véritable économie, celle qui produit les vrais biens et services que nous consommons, plutôt que l'économie qui fait le commerce des actifs financiers.

Vous constatez également un virage qui va de pair au niveau de la culture, en partie grâce aux publicités pour les fonds mutuels et les autres produits. Les gens commencent à identifier leur sécurité financière future au cours de la retraite à, par exemple, la taille de leur RÉER.

On peut dire brutalement que, pour la grande majorité des Canadiens, peu importe les efforts qu'ils ont déployés pour économiser surtout en vue d'alimenter ces RÉER, leur patrimoine personnel ne suffira tout simplement pas dans le milieu très coûteux du financement de leurs propres pensions. D'après ces données, j'estime que moins de 20 p. 100 des Canadiens ont un patrimoine financier personnel suffisant pour acheter une rente de retraite qui leur verserait 150 $ par mois à l'âge de 65 ans. Vous savez que 150 $ par mois, ce n'est pas une grosse somme pour vivre, et pourtant seulement un Canadien sur cinq a suffisamment de ressources privées pour financer même ce niveau catastrophique de pension mensuelle. La plupart des Canadiens devront se fier aux pensions publiques et aux pensions collectives qu'ils peuvent négocier ou obtenir par leur milieu de travail pour assurer la sécurité de leur retraite. Fait ironique, cette sorte de virage profinancier dans nos politiques économiques et même dans notre culture mine cependant le degré de confiance et le soutien pour ces programmes publics.

À mon avis, nous devrions commencer à déplacer nos politiques économiques et sociales en vue de minimiser l'influence et le rôle économique général des marchés financiers privés -- comme la bourse et cetera -- et assurément pour limiter et inverser l'importance croissante des marchés financiers dans notre politique sociale.

Nous sommes une économie fortement développée de 30 millions de Canadiens et notre gouvernement fédéral à lui seul empoche des centaines de milliards de dollars en revenus chaque année. Pourquoi devons-nous nous fier au marché boursier pour financer des éléments comme les bourses universitaires? Maintenant, nous avons des mesures comme le Programme des bourses du millénaire ou le Régime enregistré d'épargne-études qui se fient à ces marchés financiers pour financer un élément aussi crucial pour notre avenir économique et social que l'éducation de nos jeunes. Je pense que nous devons revenir à un système de politique sociale explicitement collectif, organisé publiquement et financé par des fonds publics dans ces domaines. Cela apporterait également une contribution à la cohésion sociale.

Nous pourrons approfondir certains sujets au cours de la discussion. Je vous remercie de votre attention, sénateurs, et j'attends avec impatience vos éventuelles questions.

Le sénateur Cohen: Vous nous avez donné beaucoup de matière à réflexion d'un point de vue totalement différent, ce que j'apprécie.

Vous avez mentionné que, lorsque les changements technologiques sont intervenus dans l'industrie automobile, vous aviez été heureux d'avoir le syndicat pour négocier et aider à réglementer les changements, tandis que la plupart des gens n'ont pas les avantages d'un syndicat. C'est là que vous pensez que le gouvernement devrait intervenir. Peut-être que vous pourriez préciser de quelle façon vous voyez les gouvernements participer à des entreprises qui changent en l'absence de syndicats.

M. Stanford: Du point de vue d'un syndicat, une chose que le gouvernement peut faire c'est de reconnaître le rôle inestimable que les syndicats jouent justement dans ce genre de situation. On dépeint souvent les syndicats comme des obstacles au changement, inefficaces sur le plan économique, et cetera. Mais, en fait, lorsque vous avez une bonne relation de travail, comme c'est notre cas avec certaines des compagnies automobiles, les syndicats peuvent s'avérer très efficaces pour s'assurer que le changement et la compétitivité se passent d'une façon bénéfique et relativement sans heurts. Honnêtement, j'estime que les compagnies avec lesquelles nous traitons bien, comme Chrysler ou Ford, reconnaîtraient aujourd'hui que le TCA est un facteur important de leur succès.

En général, cela relève de la compétence des provinces et sort de votre champ de compétence, mais les lois du travail ont définitivement pris une orientation antisyndicale durant les années 90, ce qui complique l'organisation des syndicats et les interventions qu'ils devraient faire. En conséquence, la proportion d'employés qui sont membres de syndicats a diminué au Canada, pas radicalement mais assez régulièrement durant les années 90, pour se situer aujourd'hui à environ 30 p. 100.

Lorsqu'il n'y a pas de syndicats, les gouvernements pourraient encore jouer un rôle en établissant un cadre de réglementation à l'intérieur duquel les entreprises seraient forcées de reconnaître et d'aborder les intérêts de leurs travailleurs, au lieu de considérer la main-d'oeuvre comme une sorte d'intrant jetable qu'ils prennent lorsqu'ils en ont besoin et qu'ils jettent lorsqu'ils n'en ont pas besoin. Lorsque quelque chose arrive, comme le changement technologique, combien d'entreprises en exercice aujourd'hui se contentent de choisir les employés qu'elles ne veulent pas et de les mettre à la porte? En grande majorité, elles sont autorisées à le faire en vertu de la législation du travail. Si nous avions de meilleures dispositions concernant les problèmes, tels que les avis de licenciement et la sécurité d'emploi et si nous avions des incitatifs pour encourager ou forcer les entreprises à essayer de négocier les questions de changement technologique d'une façon mutuelle avec leur population active au lieu de la considérer comme une dictature dans laquelle les travailleurs sont embauchés lorsqu'on a besoin d'eux et licenciés lorsqu'on n'a plus besoin d'eux, alors vous verriez le changement survenir d'une façon plus équilibrée.

Le sénateur Cohen: Comment pouvons-nous nous assurer que le chômage à long terme ne conduit pas à l'isolement social et à l'effondrement de tous nos réseaux sociaux qui relient vraiment l'individu à la collectivité?

M. Stanford: Il serait extrêmement difficile de s'assurer que le chômage à long terme n'a pas fait toutes ces choses. À l'heure actuelle, l'isolement social, la ghettoïsation, la pauvreté, le désespoir et le retrait de la vie économique sont exactement ce que vous attendriez du chômage à long terme.

La façon de résoudre le problème consiste à éliminer le chômage à long terme comme caractéristique de notre paysage macro-économique. Nous militerions pour un ensemble de mesures qui insisteraient, tant pour le volet demande que pour le volet offre du marché du travail, sur des mesures visant à réduire le chômage. La plupart des preuves laissent entendre qu'aujourd'hui ce problème de chômage à long terme ou structurel est en quelque sorte une situation salutaire.

Chaque fois que vous avez des niveaux élevés de chômage qui durent longtemps, ils finissent par se transformer en ce qu'on appelle un chômage structurel, simplement parce que les gens qui n'ont pas été présents sur le marché du travail depuis plusieurs années peuvent à l'origine posséder les compétences et les contacts et la compétitivité nécessaires pour réussir mais, après plusieurs années d'indisponibilité, ils commencent à perdre cette aptitude à opérer un retour. C'est la raison pour laquelle il est très important de faire ce que vous pouvez faire économiquement pour réduire le chômage.

Je serais en faveur de mesures comme une diminution des taux d'intérêt sur une base soutenue par la Banque du Canada et un peu moins inquiet au sujet d'une poussée de l'inflation qui est le prix à payer pour réduire le chômage d'une façon soutenue.

Au Canada, nous avons beaucoup de chemin à parcourir. Notre taux de chômage officiel se situe actuellement un peu au-dessus du 8 p. 100, mais cela ne tient pas compte des plusieurs centaines de milliers de gens qui se sont retirés du marché du travail officiellement depuis le début des années 90 et qui ne figurent donc plus dans les statistiques sur le marché du travail. Il nous faudra plusieurs années de resserrements du marché du travail pour faire baisser le taux de chômage et, élément plus important, pour ramener certaines de ces personnes sur le marché du travail. Si les emplois sont disponibles, s'il y a des employeurs qui ont vraiment des postes qu'ils ne peuvent pas combler, c'est là que vous constaterez que ces personnes qui n'ont pas le contexte, qui ne sont pas actuellement en haut de la liste, seront ramenées sur le marché du travail. Cela arrivera en fin de compte parce que les employeurs en ont besoin.

Le gouvernement peut venir en aide avec des mesures comme des programmes de recyclage et une aide à la recherche d'emploi, et cetera. Mais si les emplois ne sont pas disponibles du côté de la demande, ces mesures ne seront pas efficaces.

Le sénateur Cohen: Puis-je vous demander le nom de la personne que vous avez mentionnée comme ayant effectué beaucoup de travail à DRHC?

M. Stanford: En parlant de postes vacants, j'espère que je ne le mettrai pas dans l'embarras en disant cela, mais il se nomme Alan Zeesman. C'est un directeur de recherches à DRHC. Il a supervisé un certain nombre de projets portant sur les questions de répartition du revenu. En particulier, il a ciblé les compressions dans l'assurance-chômage comme facteur non seulement de la progression de la pauvreté, mais également de la concentration de la pauvreté dans certaines régions, dans certaines collectivités durement touchées.

La vice-présidente: À propos de l'information que vous venez tout juste de transmettre au sujet de votre propre syndicat, est-il plus facile de le faire avec un syndicat du secteur privé qu'avec un syndicat gouvernemental?

M. Stanford: Voulez-vous dire pour ce qui est de faciliter le changement?

La vice-présidente: Oui, et pour avoir la bonne relation dont vous avez parlé. Étant donné qu'il y a beaucoup de problèmes concernant les grèves et autres avec les travailleurs du secteur public, je me demande si cela fonctionne mieux dans le secteur privé.

M. Stanford: Sénateur, je ne contesterai pas ce point de vue. Il y a eu plusieurs problèmes avec des grèves dans le secteur privé également. Tant dans le secteur public que dans le secteur privé, la montée des conflits ouvriers que nous constatons à l'heure actuelle peut être largement attribuable au fonctionnement déséquilibré de notre économie pendant la majeure partie des années 90.

La vice-présidente: Quel est le secret de votre succès au sein du syndicat des travailleurs de l'automobile?

M. Stanford: Il y aurait deux choses. En premier lieu, nous fonctionnions dans un environnement économique relativement plus favorable. Nous avions des employeurs qui réussissaient plutôt bien, tandis que la plupart des syndicats du secteur public et de nombreux syndicats du secteur privé traitaient avec des employeurs qui étaient pris à la gorge sur le plan financier et qui étaient donc davantage opposés aux choses qui généralisent les avantages ou coûtent quelque chose aux employeurs. Cette résistance était beaucoup plus forte dans la fonction publique et aussi dans certains secteurs de l'industrie privée.

Le deuxième facteur serait, en toute équité, le syndicat lui-même. Nous sommes un syndicat fort. Nous avons des antécédents activistes chez nos membres qui sont disposés à s'impliquer et à faire grève quand il le faut. Nous sommes donc des membres actifs, mobilisés, informés et nous sommes disposés à accepter des enjeux, comme la négociation portant sur le changement technologique et le raccourcissement des heures de travail, que de nombreux syndicats éviteraient.

La résistance que nous avons rencontrée sur ce sujet ne provenait pas uniquement de l'employeur, permettez-moi de vous le dire. L'idée d'essayer explicitement de limiter le temps de travail comme moyen de partager les possibilités d'emploi dans cette industrie bien rémunérée est extrêmement controversée dans nos propres rangs. Nous avons plusieurs membres qui se lèvent chaque fois que nous faisons cela et qui disent: «Bon Dieu, les gars, que faites-vous? Vous essayez de retirer de l'argent de mes poches. Je souhaite gagner autant d'argent que je le peux ici». Ce n'est pas le genre de mentalité que nous encourageons en tant que syndicat, et nous nous battrons activement avec des factions de nos membres pour les ramener vers une approche plus englobante et solidaire du développement économique. Bon nombre de syndicats ne feront tout simplement pas cela parce qu'ils ne se sentent pas suffisamment en confiance dans leurs propres postes de leadership et dans leur propre intégrité organisationnelle pour aborder des questions controversées dans leurs propres rangs.

L'industrie automobile a constitué un exemple unique par le fait qu'elle a bien réussi et qu'elle possède ce que j'appellerais un syndicat à la fois progressiste et solide. On ne peut pas généraliser totalement ces deux facteurs au sein de l'économie canadienne, mais certaines des leçons que nous avons apprises pourraient certainement être appliquées ailleurs.

La vice-présidente: Autrement dit, votre leadership en est partiellement responsable.

M. Stanford: Lorsque je parle de «leadership», je ne veux pas forcément dire la personne qui se trouve au sommet, même si c'est également important. Je parle aussi de notre leadership local. Il s'agit des gens dans une usine à un endroit comme Windsor, par exemple. L'usine de minifourgonnettes, à Windsor (Ontario), emploie quelque 6 000 personnes. Durant des années, jusqu'au début de nos négociations sur ce genre de tendance, les employés de cette usine pouvaient faire autant d'heures supplémentaires qu'ils le voulaient. Il y avait là des gens qui travaillaient sept jours sur sept, en faisant des heures supplémentaires et en gagnant 80 000 $ par an. D'une certaine façon, les gens devenaient dépendants de cet argent au détriment, dirais-je, de la cohésion sociale même au sein de leurs propres familles et de leurs propres collectivités. De toute évidence, vous ne pouvez pas mener une vie saine et bien équilibrée si vous travaillez sept jours sur sept simplement pour faire autant d'heures supplémentaires que possible afin de pouvoir vous acheter un meilleur véhicule récréatif ou autre.

C'est pour cela que nous avions des chefs de file locaux dans les usines qui seraient sortis en réalité dans l'usine pour dire: «Pas question. Vous avez un bon travail bien rémunéré. Oui, vous pouvez faire quelques heures supplémentaires. Oui, vous voulez amasser de l'argent, mais nous devons penser à l'ensemble de notre collectivité. Nous devons penser à la prochaine génération.» Je suis persuadé que vous connaissez les difficultés rencontrées aujourd'hui par les jeunes pour trouver du travail dans les secteurs bien rémunérés de l'économie. En tant que syndicat, nous devons prendre quelques mesures proactives pour nous attaquer à ces déséquilibres. C'est une question farouchement controversée.

La démocratie syndicale est une chose amusante lorsque vous avez des membres actifs et informés. Je n'ai jamais vu des élections aussi farouchement contestées que celles que nous avons dans de nombreuses usines pour élire nos délégués locaux et nos chefs de file locaux. Ces personnes prennent le risque de partir en croisade et de militer pour une cause qui déclenche la controverse en faveur d'une approche économique plus vaste.

La vice-présidente: Pensez-vous que le fait de fabriquer des voitures et que la plupart des gens peuvent continuer à vivre avec la voiture qu'ils ont pour une autre année, contrairement aux industries essentielles, soit également un facteur? Je connais certains de vos syndiqués qui travaillent dans des foyers de personnes âgées ou dans des centres de soins spéciaux, par exemple, et c'est une catastrophe lorsque vous devez recourir à une grève. C'est une catastrophe pour les occupants et c'est une catastrophe pour le syndicat lui-même étant donné la publicité qu'il reçoit pour cela.

M. Stanford: Aucun syndicat ne prend une grève à la légère, croyez-moi. Faire grève est une chose difficile à faire, même lorsque le syndicat estime qu'il doit prendre ce genre de mesure ultime pour défendre sa position de négociation, parce que les membres perdent l'argent dont ils ont besoin pour payer leurs factures. Chaque fois que vous allez en grève, vous courez le risque que quelque chose vous explose en pleine figure, que l'entreprise ferme l'usine ou déménage ailleurs ou fasse autre chose.

Je ne pense pas qu'un syndicat prenne le droit de grève à la légère. Dans le secteur automobile, nous avons été chanceux par le fait que, dans la majorité des cas, nos relations de travail avec les compagnies ont été exemptes d'une interférence gouvernementale qui a été très unilatérale et en fin de compte assez dommageable. Dans bien des cas où un employeur prétend que ses services sont essentiels, au lieu de s'asseoir à la table et de négocier activement avec le syndicat pour essayer d'en arriver à un compromis mutuel, il se contente de faire appel au gouvernement pour déclarer ce service essentiel et s'assurer qu'il n'y aura pas de grève.

Nous le constatons actuellement avec les contrôleurs aériens au Canada, qui n'ont pas eu d'augmentation de salaire en huit ans. La date butoir pour leur grève est encore dans un mois, mais le Parlement leur interdira le droit de faire grève simplement parce qu'il craint les perturbations et ne veut pas revenir de vacances en juillet au cas où la grève des contrôleurs aériens serait déclenchée. C'est une attitude assez désinvolte maintenant en vigueur partout au pays. En Saskatchewan, même un gouvernement NPD, qui est censé être un ami des syndicats, a légiféré en quelques heures le retour au travail des infirmières.

Dans le secteur automobile, nous avons eu la liberté de trouver avec nos employeurs un terrain d'entente qui a du bons sens pour les deux parties. Le fait de travailler dans une industrie dans laquelle le gouvernement ne s'est pas ingéré de la même façon qu'ailleurs a été bénéfique. Je dirais que même dans les industries où le gouvernement doit clairement prendre des mesures à propos de certains services essentiels, le manque de respect qui a été démontré à l'endroit du droit de grève et des processus de libre négociation des conventions collectives par les gouvernements de tous les horizons politiques est, à long terme, très dommageable pour la capacité des employeurs et des syndicats de s'asseoir à une table et de trouver un terrain d'entente.

La vice-présidente: Est-ce que les syndicats que vous représentez encouragent les sociétés à investir dans le capital social, comme des garderies en milieu de travail ou des congés accordés à des travailleurs pour du travail bénévole et des choses du genre?

M. Stanford: Nous avons assurément essayé d'en faire une priorité dans nos négociations. Je répète que je ne veux pas trop faire mousser notre secteur, mais je pense vraiment que le TCA a été un chef de file pour ce qui est de cibler ces questions en minimisant en quelque sorte l'idée d'obtenir les plus hauts salaires possibles et en favorisant la canalisation d'une partie de l'attention et du pouvoir de négociation plutôt dans d'autres directions.

Nous avons été parmi les premiers à négocier des programmes de garderies en milieu de travail dans le secteur privé au début des années 90 pour mettre sur pied des garderies exploitées par les entreprises dans certaines des principales installations automobiles du sud de l'Ontario. Nous avons cherché à gagner des avantages comme les congés familiaux d'urgence pour les parents qui doivent manquer le travail à cause de leurs enfants malades et ces genres de choses.

Nous avons également mis l'accent sur l'apprentissage permanent par nos membres. Le stéréotype du col bleu illustre quelqu'un qui veut travailler et fabriquer des gadgets et ensuite rentrer chez lui et regarder la télévision. C'est un stéréotype très injuste. Même les ouvriers d'usine sont intéressés à apprendre des choses, à épanouir leur personnalité et à élargir leurs horizons par des moyens qui peuvent ou non avoir un impact direct sur leur rendement au travail. Toutes les preuves économiques démontrent que les gens qui font de l'apprentissage permanent et suivent des cours pour adultes ou des choses du genre sont plus motivés et plus interactifs socialement et donc de meilleurs travailleurs, même lorsque la matière qu'ils apprennent n'a aucun rapport direct avec leur travail.

Nous avons pris plusieurs initiatives en ce qui concerne nos propres programmes éducatifs internes. Nous avons un nouveau programme de congés d'études payés que nous avons bâti au cours des deux ou trois dernières décennies en négociant un fonds avec nos employeurs. Ces derniers versent un certain montant dans le fonds, disons 3 cents par heure travaillée, et ensuite le fonds sert à acheter des congés à un certain nombre de travailleurs pour fréquenter des cours, peut-être de quatre semaines, que nous organisons et dirigeons de façon indépendante en tant que syndicat dans nos propres installations éducatives à Fort Elgin en Ontario. Les cours portent sur toute une gamme de sujets allant de l'économie dans les industries concernées à des thèmes comme l'histoire du mouvement ouvrier ou à des choses sérieuses comme la mise en application de la santé et de la sécurité au travail et ce genre de sujets.

Chaque année, nous avons des centaines de nouveaux membres du TCA qui suivent ces cours en résidence que nous avons négociés. Les employeurs ne sont pas toujours satisfaits de la chose parce qu'ils pensent que les gens qui sortent des cours vont être des activistes syndicaux, et bon nombre le sont. Mais, par ailleurs, cela fait assurément la promotion du concept d'apprentissage permanent.

Nous avons essayé de faire de ces genres de politiques une priorité dans nos négociations et de minimiser l'obtention du salaire le plus élevé possible. C'est un élément intéressant pour un syndicat comme le nôtre dans une industrie comme l'automobile dans laquelle nous avons un certain pouvoir de négociation. Ces employeurs travaillent à pleine capacité à l'heure actuelle. Le Canada est un endroit extrêmement rentable pour eux. Si nous mettions tout l'accent uniquement sur l'obtention de l'augmentation salariale la plus élevée possible pour nos membres -- nous allons entrer dans une ronde de négociations cet automne avec les «trois grands» de l'industrie -- nous pourrions probablement aller chercher quelque chose comme 6 p. 100 par an sur trois ans. De toute évidence, les gens seraient heureux d'avoir 6 p. 100 dans leurs poches, mais nous minimisons explicitement la hausse salariale. Je dirai que nous allons essayer d'obtenir une bonne augmentation salariale cet automne de toute façon, mais tout en mettant davantage l'accent sur des choses qui, à notre avis, bâtiront la cohésion sociale, comme des régimes de pension qui permettraient aux gens de prendre leur retraite plus tôt, laissant ainsi la place à des jeunes pour entrer sur le marché du travail, de bons programmes complémentaires d'assurance et d'assurance-santé qui protègent les familles en cas de maladie ou autre, des programmes éducatifs et d'autres mesures.

Je répète que cela devient controversé dans nos propres rangs. Il y a des gens qui, à court terme, préféreraient voir affluer le plus d'argent possible dans leurs poches mais, à long terme, dans l'intérêt d'une union serrée et solide et de collectivités solides et homogènes dans lesquelles nous vivons, nous reconnaissons que nous devons adopter une approche plus large.

La vice-présidente: Dans un sens, vous bâtissez un syndicat modèle. Je me demande pourquoi vous allez chercher des travailleurs dans des foyers de soins spéciaux et autres services du genre. L'industrie automobile est unique; elle a deux ou trois concurrents, mais elle appartient aux Américains.

M. Stanford: En ce qui concerne la question de la propriété étrangère, je ne considère pas, à l'heure actuelle, la mondialisation comme un problème. Des gens viendront vous dire que c'est un monde global et qu'il n'y a rien que nous puissions faire, mais nous avons eu un secteur automobile mondialisé depuis que nous pouvons remonter dans nos souvenirs au Canada et nous avons en réalité très bien réussi avec cela. Je ne pense pas que le problème soit la mondialisation. Le problème réside dans les choix que vous faites en tant que société dans un monde global à propos du type de société que vous allez avoir.

Nous avons toutes sortes de choix que nous pouvons faire au Canada. L'idée que, parce que le monde est global, nous devons suivre une certaine démarche à l'emporte-pièce ne présentant pas d'options est assez erronée lorsque vous regardez l'expérience de différentes industries et de différentes régions et de différents pays dans le monde.

Dans quelle mesure nous, en tant que syndicat, sommes capables de prendre ce que nous faisons dans l'industrie automobile et de l'appliquer ailleurs, cela varie d'une industrie à l'autre. Nous avons étendu et diversifié notre syndicat. À l'heure actuelle, environ un tiers seulement de nos membres travaillent dans l'industrie automobile. Nous faisons des choses dans les services publics ou dans les services privés ou dans d'autres secteurs de la fabrication et du transport. Cela varie d'un cas à l'autre. Cela dépend beaucoup du pouvoir de négociation que nous avons en tant que syndicat, parce qu'aucune des choses dont je vous ai parlé ne sont des choses que des employeurs nous ont servies sur un plateau d'argent. Nous devons les obtenir des employeurs. Ce sont toutes des choses que nous avons négociées grâce à nos efforts organisés en tant que syndicat.

Ce que nous pouvons faire varie énormément selon la situation de l'industrie, les bénéfices qu'elle réalise, les tendances à l'embauche ou au licenciement. Cela dépend de la situation de notre syndicat et du niveau de conscientisation de nos membres dans différentes industries.

Le profil varie donc beaucoup mais nous avons essayé d'appliquer certains des principes de façon assez universelle. Ces principes englobent des mesures comme mettre l'accent sur les possibilités d'études et l'apprentissage permanent pour nos membres et, lorsque nous le pouvons, réduire les heures de travail pour attirer de nouveaux travailleurs au lieu de subir des licenciements. En tant que syndicat, nous essayons de faire quelque chose de différent mais le temps nous dira dans quelle mesure nous réussissons à prendre ce que nous avons réalisé dans le secteur automobile et à l'appliquer ailleurs.

Le sénateur Cools: Je vous félicite pour votre exposé. Au cours des dernières années, les syndicats, en particulier dans la fonction publique, sont devenus extrêmement politisés et politiques, et assez souvent plusieurs d'entre eux considèrent que leur objectif est d'embêter les gouvernements. Rappelez-vous, il y a bien des années, on pensait que les travailleurs civils et les fonctionnaires ne devaient pas être politisés. Avez-vous des remarques à faire concernant la politisation des syndicats dans les fonctions publiques?

M. Stanford: Ce n'est pas seulement dans les fonctions publiques que les syndicats sont devenus politisés. Notre syndicat s'est toujours considéré comme un syndicat politique. Si vous avez suivi l'élection ontarienne le mois dernier, vous savez que notre syndicat était en plein coeur de la bataille. J'oserais dire que c'est assez légitime.

Certaines des choses pour lesquelles nous militons -- les types de politiques, une approche plus vaste et plus englobante des indicateurs économiques et sociaux -- sont des choses qui ne peuvent pas être réalisées uniquement à la table de négociation avec un employeur individuel à la fois. Nous faisons ce que nous pouvons à la table de négociation, mais nous ne pouvons pas tout y faire et, élément tout aussi important, ce que nous faisons à la table de négociation dépend énormément du contexte institutionnel et juridique dans lequel se déroule la négociation. C'est la raison pour laquelle nous nous considérons, en tant que syndicat, comme ayant un intérêt très important dans la direction que prennent les politiques économiques, les lois du travail et les politiques sociales. Comme tout autre groupe dans la société, nous faisons ce que nous pouvons pour exercer cette influence, tout comme le milieu des affaires et d'autres organismes le font.

Le sénateur Cools: Vous n'avez pas vraiment répondu à ma question. Tout ce que vous avez dit c'est que votre syndicat est également très politisé. Quels sont les principes juridiques, constitutionnels, moraux et politiques sous-jacents au concept de la politisation des syndicats?

J'apprécie votre position. Je considère que votre syndicat est différent d'un syndicat de la fonction publique. Mais vous avez dit que vous le faisiez aussi. Ce que je veux savoir, c'est quelle justification et quelle pensée morale, juridique et politique se retrouvent derrière la politisation des syndicats. Si vous n'y avez pas réfléchi, je comprends cela. Mais je vous dis qu'à mon avis les syndicats du secteur privé sont différents de ceux de la fonction publique.

M. Stanford: Je ne suis pas le plus grand expert en la matière, mais je peux assurément tout au moins vous déclarer que les gens qui travaillent pour les gouvernements, que ce soit les enseignants, les fonctionnaires, les pompiers ou d'autre métiers, sont des citoyens et ont donc des droits fondamentaux démocratiques pour s'organiser et exprimer leurs points de vue. Je ne vois rien sortir de l'ordinaire à propos des positions adoptées par les syndicats de la fonction publique. En fait, étant donné les temps incroyablement difficiles que les fonctionnaires ont traversé dans les années 90 en termes de réductions de salaire, de problèmes dans leurs conditions de travail et de la suppression absolument sans précédent de leurs droits, en tant que syndicats, de faire grève et de s'organiser, je ne suis pas surpris que les syndicats du secteur public soient aussi politisés qu'ils le sont.

Le sénateur Cools: Nous n'avons pas du tout abordé ce sujet durant nos études sur la cohésion sociale. Très franchement, je n'y avais pas pensé jusqu'à aujourd'hui. Un certain comité, si ce n'est pas le nôtre, devrait à un moment donné étudier les syndicats et les développements sur le terrain au sein des syndicats.

N'oubliez pas que les syndicats ont vu le jour il y a des décennies à cause du vieux concept marxiste de la loi de la valeur, qui disait essentiellement que les employeurs riches réalisaient des bénéfices sur le dos des travailleurs pauvres. Très franchement, ces questions et ces préoccupations étaient extrêmement valables et les syndicats ont joué un rôle vital et important.

Puisque nous constatons que certaines de ces questions sont soulevées à maintes reprises, à un moment donné quelques-uns d'entre nous pourraient peut-être proposer que nous commencions à examiner la question, parce que je ne pense pas que nous ayions étudié les problèmes ou les situations auxquels font face les syndicats sur le terrain. Jusqu'à présent, au sein de notre comité, nous avons abordé des conclusions, mais je serais disposée à appuyer une étude pertinente afin que des gens comme M. Stanford et d'autres syndicats de la fonction publique puissent nous parler des problèmes qu'ils rencontrent dans un contexte où nous étudions la question.

La vice-présidente: Dans la même ligne de pensée que le sénateur Cools, j'aimerais ajouter une question supplémentaire, portant spécialement sur quelque chose qui se passe justement à l'heure actuelle autour de nous. Quelle est votre opinion sur l'utilisation des cotisations syndicales pour appuyer des partis politiques?

M. Stanford: De toute évidence, cette question a un rapport avec les derniers propos du sénateur Cools. En tant qu'organisations constituées démocratiquement, je dirais que les syndicats ont autant le droit que quiconque d'autre d'utiliser leurs ressources pour promouvoir les intérêts que les dirigeants des syndicats ont identifiés et priorisés.

Des entreprises dépensent leur argent à appuyer des causes politiques. En fait, elles dépensent beaucoup plus d'argent à appuyer des causes politiques que les syndicats. Notre syndicat est une organisation gérée démocratiquement. Nos leaders sont élus et je trouve tout naturel que nous supportions nos déclarations politiques avec des ressources, quelles soient non partisanes, dans le sens d'appuyer simplement de par la loi un sujet particulier, ou partisanes, dans le sens d'intervenir dans une campagne électorale.

La vice-présidente: Évidemment, l'argument contraire est que les membres de ce syndicat paient des cotisations non pas pour appuyer un parti politique mais parce que le syndicat le leur demande. Dans une société, par contre, l'ensemble du conseil d'administration pourrait décider de le faire. Je ne pense pas que l'analogie concorde bien.

M. Stanford: Je ne vois pas pourquoi. Je verse de l'argent à Bell Canada pour mon service téléphonique, et pourtant Bell Canada verse des centaines de milliers de dollars à des causes politiques.

La vice-présidente: Cette analogie ne concorde pas. Si j'adhère à un groupe et si je paie des cotisations à ce groupe, c'est pour les objectifs de ce groupe et ce n'est pas pour les objectifs d'un parti politique.

M. Stanford: Exact. Et quand je paie ma facture de téléphone, je la règle afin d'obtenir un service téléphonique, pas pour appuyer les causes politiques que Bell Canada supporte.

Le sénateur Cools: Mais pas tout à fait, monsieur Stanford. Lorsqu'un client paie Bell pour un téléphone, il achète un service de Bell.

C'est dommage que nous n'ayons pas pensé à ce sujet précis il y a deux ou trois semaines lorsque nous avons commencé. Sénateur Butts, ce dialogue démontre qu'il faudrait étudier cette question et commencer à annoncer les enjeux. Plusieurs générations se sont succédé depuis le jugement historique du juge Rand et c'est peut-être le moment idéal dans l'histoire pour commencer à étudier les enjeux et à entendre des gens comme ce témoin.

Le sénateur Wilson: J'aimerais appuyer les propos de M. Stanford. Vous adhérez à un groupe et quelle que soit la volonté finale du groupe, c'est ce que vous appuyez. Assez souvent, vous n'êtes pas d'accord. Vous pouvez adhérer à un parti politique et être assez souvent en désaccord avec ce que ce parti fait, mais vous ne vous retirez pas de ce parti. C'est une partie du prix à payer. Tout groupe humain a le pouvoir, à l'intérieur de sa propre constitution, de prendre de telles décisions. J'aurais tendance à appuyer ce qu'il dit.

La vice-présidente: Mais vous n'avez pas à verser des cotisations à un parti politique.

Le sénateur Wilson: Bien sûr que si, si vous en faites partie.

Le sénateur Lavoie-Roux: Vous pouvez payer vos propres cotisations à un parti politique, mais c'est la première fois que j'entends parler de verser des cotisations à un syndicat et que ce dernier les utilise ensuite pour appuyer un parti politique.

La vice-présidente: Dans la plupart des ateliers, vous devez adhérer au syndicat.

M. Stanford: En réalité, ce n'est pas vrai, madame le sénateur. En vertu de la formule Rand, les membres individuels ont le droit de choisir de ne pas adhérer au syndicat et ils peuvent s'organiser pour qu'un montant équivalent à leurs cotisations syndicales soit versé à une oeuvre de bienfaisance. Les membres du syndicat, qui ne sont pas satisfaits de voir le syndicat appuyer des causes politiques, peuvent faire d'autres choses. Il peuvent voter à l'intérieur du syndicat pour que ce dernier arrête de le faire ou, en fin de compte, ils peuvent voter en tant que travailleurs pour se retirer du syndicat et se décertifier de leur appartenance au syndicat.

Les membres des syndicats ont beaucoup de choix et de discrétion pour influencer les dépenses des syndicats -- probablement bien davantage que j'en ai sur la façon dont Bell Canada dépense son argent.

La vice-présidente: Le problème, c'est que la situation est différente dans chaque province. Vous parlez d'une loi provinciale. Dans de nombreuses provinces, les travailleurs ne disposent pas de toutes ces options. Cela présente beaucoup de problèmes au Canada.

Le sénateur Wilson: Toutefois, ce que je trouve intéressant, c'est que cet argument surgit surtout presque uniquement en relation avec les syndicats. Il ne surgit jamais en relation avec les sociétés. En tant qu'interlocuteur dans une société, je peux être en désaccord avec ce qu'elle fait mais la même objection n'est pas soulevée ici.

Le sénateur Cohen: Vous avez parlé de réduire les semaines de travail et vous avez dit que vous accordez cinq semaines de congés payés à vos travailleurs. Certains d'entre eux aimeraient travailler davantage pour mettre plus d'argent dans leurs poches. Comment calmez-vous les gens qui sont vraiment en colère parce que vous voulez faire ces changements pour être justes avec d'autres personnes au sein du syndicat? Cela me fascine vraiment. Peut-être que vous avez une formule magique que vous aimeriez partager avec nous. Pourquoi cela fonctionne-t-il si bien? Est-ce en raison de la poigne exercée au sommet?

M. Stanford: Ce n'est pas facile et ce n'est pas du tout certain que cela continuera à se passer de cette façon. Ce que nous pouvons faire en tant que syndicat dépend énormément du contexte social et politique dans lequel nous fonctionnons.

Jusqu'à présent, dans la plupart des cas, nous avons réussi à convaincre nos membres que c'est bon pour eux, pour leurs familles, pour leurs collectivités et pour leur syndicat. Si nous considérons que le travail du syndicat consiste à intervenir et à essayer de nous rendre le plus riche possible en tant qu'individus, nous aurons peut-être quelques succès à court terme mais nous nous isolerons, en tant que syndicat, des collectivités dans lesquelles nos membres vivent et nous limiterons en fin de compte nos succès.

Comme syndicat, nous avons considéré que notre objectif et notre rôle sont d'améliorer la qualité et l'égalité de l'ensemble de nos collectivités. Ce modèle est appelé le syndicalisme social, dans lequel le syndicat fixe ses objectifs de façon beaucoup plus large que d'essayer d'obtenir simplement le plus d'argent possible pour ses propres membres. C'est toujours un modèle controversé. En fait, l'orientation négative et plus individualiste et antihomogène de la société nous complique la tâche pour faire cela avec nos propres membres.

Je serai très franc avec vous. Lors de l'élection ontarienne, un pourcentage important de nos propres membres ont voté pour Mike Harris et pour les politiques qu'il propose, qui visent précisément à mettre plus d'argent dans vos propres poches au dépens de politiques et de structures qui feraient la promotion de la cohésion sociale. Lorsque ces politiques individualistes sont préconisées dans les médias, par notre chef et par les politiciens et assurément par les chefs de file du monde des affaires, la tâche devient plus difficile pour nous de dire: «Non, en tant que citoyen, en tant que travailleur et en tant que membre d'une collectivité, vous avez une responsabilité plus vaste que d'essayer simplement de mettre le plus d'argent possible dans vos poches.»

En tant que syndicat, nous avons quelques bonnes traditions et des sentiments fermes à propos d'un engagement envers la cohésion sociale, mais la direction que prend la société canadienne nous complique la tâche pour faire ce que nous pouvons comme syndicat, simplement à cause de l'orientation idéologique vers laquelle tendent nos membres. Cela existe en dehors des répercussions négatives de ces politiques en première ronde pour ce qui est des compressions dans les programmes sociaux.

Le sénateur Cohen: C'est effrayant.

M. Stanford: Par ailleurs, c'est également une occasion pour nous de montrer que le principe de la cohésion sociale est appuyé et peut être appuyé à la base de la société quand il est bien fait.

Le sénateur Cohen: Les revenus combinés des familles sont bloqués à un niveau fixe et même les personnes qui ont des emplois souffrent. Autrement, réduire les heures des travailleurs afin que d'autres puissent avoir une chance de gagner un salaire serait un moyen magnifique d'accroître l'égalité au sein de la population active. Mais ce ne sont que des promesses en l'air en attendant que nous augmentions les revenus ou le salaire minimum ou que nous remettions en place un régime équitable d'assurance-emploi.

M. Stanford: Il existe un potentiel formidable pour utiliser la réduction du temps de travail dans le but de réduire l'inégalité en diminuant le chômage et en donnant une chance à davantage de gens, surtout aux jeunes. Les emplois créés par notre programme de raccourcissement du temps de travail, à des endroits comme Windsor, ont figuré parmi les premiers bons emplois bien rémunérés dans l'industrie de l'automobile disponibles en plus d'une décennie auxquels des jeunes ont pu poser leur candidature. C'est l'une de nos réalisations les plus extraordinaires.

Par ailleurs, il y a des limites à ce que vous pouvez faire avec un temps de travail plus court et il y a des problèmes pour le faciliter. Les Hollandais ont connu des succès formidables au cours de cette décennie en essayant de réduire les heures de travail afin d'attirer plus de gens sur le marché du travail, et nous pouvons apprendre beaucoup de leur expérience. La Hollande est un minuscule pays dans un continent intégré dans un monde intégré, et elle a réalisé une expérience incroyable avec une politique motivée précisément par les préoccupations entourant la cohésion sociale. Il est clair que l'idée que nous n'avons pas de choix dans une économie globale est complètement fausse.

Le sénateur Poy: Docteur Stanford, vous avez mentionné que les travailleurs du TCA peuvent choisir de ne pas faire partie du syndicat. Qu'advient-il de leurs salaires? Lorsque les syndicats négocient des hausses salariales, leurs salaires sont-ils touchés également ou sont-ils exclus des négociations?

M. Stanford: En vertu de la clause de protection syndicale de la formule Rand qui est en vigueur dans la majorité du Canada, le syndicat négocie pour tout le monde dans l'unité de négociation. Si le syndicat négocie une hausse de salaire, tout le monde l'obtient, indépendamment de son adhésion au syndicat ou non. Cela crée un problème d'abstentionnisme avec des gens qui disent: «Pourquoi devrais-je payer pour le syndicat si j'obtiens le même salaire que tout le monde?» Pour résoudre ce problème, il y a une cinquantaine d'années le juge Rand a proposé un système en vertu duquel tous les salariés devraient payer un montant équivalent aux cotisations syndicales déduites de leur chèque de paye mais si, pour des motifs politiques, religieux ou autres, ils ne voulaient pas adhérer au syndicat et ne voulaient pas que leur argent aille au syndicat, ils pourraient le consacrer à une oeuvre de bienfaisance ou à une autre bonne cause. Cela a éliminé le problème de l'abstentionnisme sans forcer les gens à adhérer à un syndicat ou à donner leur argent à un syndicat.

Si les impôts n'étaient pas obligatoires, vous auriez un problème d'abstentionnisme avec les impôts. C'est la raison pour laquelle nous rendons les impôts obligatoires; autrement, nous ne pourrions pas récolter des impôts et financer des programmes sociaux.

Comme le sénateur l'a mentionnée, la loi est structurée différemment dans les différents secteurs de compétence, mais c'est le principe général en vigueur dans la majorité du pays.

Le sénateur Poy: Cela s'applique-t-il aux autres syndicats en dehors du TCA?

M. Stanford: Oui. Cela se retrouve dans le droit du travail en général. Toutefois, je vous répète que la mise en oeuvre spécifique dépend de la province dans laquelle vous vous trouvez.

La vice-présidente: Merci beaucoup, docteur Stanford. Vous avez jeté beaucoup de lumière sur plusieurs sujets que nous avons abordés. Je suis désolée de ne pas avoir eu le temps d'aborder toute la question des médias, car vous avez parlé de l'importance des médias, caricaturant la notion que nous pouvons tous investir dans ces choses et que nous pouvons tous obtenir notre part, alors qu'en fait ce n'est pas cela.

Je parcourais un article du quotidien The Vancouver Sun dans lequel vous êtes également, je pense, victime des médias. La manchette dit: «Un économiste syndical appuie les incitatifs fiscaux pour les entreprises». C'est injuste à moins d'expliquer ce que vous voulez que les entreprises fassent avec l'incitatif. Est-ce exact?

M. Stanford: J'ai en effet reçu plusieurs appels d'amis de Vancouver à propos de cette manchette.

La vice-présidente: C'est tellement évident, et je constate que beaucoup des éléments que vous nous avez apportés dépendent de l'intention de quelque chose, ce qui est un argument caché. Prenez les RÉER, par exemple: on les classe comme crédit et non comme déduction, ce qui est la même chose que pour l'argent versé aux partis politiques mais pas pour l'argent versé aux oeuvres de bienfaisance. Je trouve intéressant que l'on mette les RÉER dans une catégorie qui aide les riches bien davantage que les pauvres.

M. Stanford: Je suis d'accord avec vous.

Le sénateur Cohen: Vous validez assurément l'adage de John Kenneth Galbraith: Pour mettre à l'aise les affligés, nous devons affliger les gens à l'aise.

M. Stanford: Merci beaucoup, sénateurs, pour votre attention.

La séance est levée.


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