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NFFN - Comité permanent

Finances nationales


Délibérations du comité sénatorial permanent
des finances nationales

Fascicule 11 - Témoignages 


OTTAWA, le mercredi 18 juin 2003

Le Comité sénatorial permanent des finances, a qui a été confié à l'examen du projet de loi C-25, Loi modernisant le régime de l'emploi et des relations de travail dans la fonction publique, modifiant la Loi sur la gestion des finances publiques et la Loi sur le Centre canadien de gestion et apportant des modifications corrélatives à d'autres lois, se réunit ce jour à 18 h 18 pour examiner le projet de loi.

Le sénateur Lowell Murray (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Chers collègues, nous sommes saisis du projet de loi C-25, Loi de modernisation du régime de l'emploi et des relations de travail dans la fonction publique, modifiant la Loi sur la gestion des finances publiques et la Loi sur le centre Canadien de gestion et apportant des modifications à d'autres lois.

Il s'agit de notre deuxième réunion à propos de ce projet de loi. Hier matin, nous avons accueilli la présidente du Conseil du Trésor, Mme Robillard.

Aujourd'hui, nous sommes heureux d'accueillir le président de la Commission de la fonction publique, M. Scott Serson, qui est accompagné de Greg Gauld, de Raymond Crête et de Marie-Claude Turgeon.

Ce n'est pas la première fois que M. Serson témoigne devant notre comité, puisqu'il a travaillé pour plusieurs ministères, notamment pour le ministère des Finances, ainsi que pour des organismes centraux et qu'il a œuvré dans le domaine des relations fédérales-provinciales. En 1993, il a été nommé sous-ministre adjoint à Santé Canada; en 1994, il devenait sous-ministre adjoint et vice-président à Développement des ressources humaines Canada et, en 1995, il était nommé sous-ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien. Tous ces postes lui ont permis d'acquérir une formation qui était plus que suffisante pour justifier sa nomination à la tête de la Commission de la fonction publique du Canada.

On vous a remis le mémoire que M. Serson nous avait transmis d'avance. Nous l'avons fait circuler. J'espère que vous l'avez lu, parce que M. Serson ne va pas en faire la lecture complète pour la retranscription. Il va simplement nous en donner les grandes lignes et c'est d'ailleurs ce que je l'invite à faire maintenant.

M. Scott Serson, président, Commission de la fonction publique: Je suis heureux de me trouver devant vous ce soir pour vous présenter le point de vue de la Commission de la fonction publique à propos des dispositions du projet de loi C-25 qui concernent la dotation, dans le cadre de la nouvelle Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

[Français]

De nombreux sénateurs ont insisté sur l'importance du projet de loi. Ils ont souligné son lien avec une stabilité démocratique et un gouvernement responsable au Canada.

Notre fonction publique professionnelle est l'une des plus importantes dans tout le Canada. Elle garantit la stabilité dans la gouvernance du pays, même lorsqu'il y a un changement de gouvernement ou en temps de crise nationale ou internationale. La grande qualité de la fonction publique du Canada est due, en partie, au soin que nous mettons à choisir les fonctionnaires.

Notre présentation annonce les opinions de la commission concernant la nouvelle loi proposée. Je crois que vous en avez tous une copie.

[Traduction]

Je tiens à préciser d'emblée que notre mémoire et nos remarques d'aujourd'hui portent sur les dispositions du projet de loi qui concernent la dotation. Je me propose de vous présenter très brièvement la position globale de la CFP à ce sujet. Je passerai ensuite à quelques aspects intéressants comme l'impartialité politique et l'indépendance de la Commission. Je conclurai en vous exposant mon avis sur la nécessité de resserrer les relations entre la Commission et le Parlement dans l'avenir.

La Commission estime que ce projet de loi est excellent en ce qui concerne la dotation. Il est synonyme d'une souplesse accrue en dotation, souplesse grâce à laquelle les gestionnaires pourront réagir beaucoup plus rapidement aux besoins changeants de la population canadienne. Si nous sommes favorables aux changements qui visent à conférer un plus grand pouvoir discrétionnaire aux gestionnaires, nous avons toutefois revu le projet de loi pour nous assurer que ce surcroît de souplesse est compensé par des sauvegardes contre d'éventuels excès, comme le favoritisme politique ou bureaucratique. Au début, nous craignions que ce projet de loi ne permette pas d'atteindre l'équilibre voulu entre la souplesse de la gestion et la protection de l'équité et nous redoutions qu'il ouvre la porte à d'éventuels possibles.

[Français]

D'autres témoins ont aussi mentionné cette crainte au comité de la Chambre des communes, y compris plusieurs syndicats de la fonction publique. Je suis heureux que le comité de la Chambre ait recommandé de confier à la CFP le pouvoir de vérifier comment les gestionnaires utilisent leur autorité pour déterminer les qualifications, de manière à s'assurer que celles-ci constituent une base judicieuse pour la sélection.

Cet amendement renforce la capacité de la CFP de préserver l'intégrité du processus de nomination dans la fonction publique.

[Traduction]

Certes, on pourrait toujours envisager d'adopter d'autres mesures en vue de renforcer la reddition de comptes et de garantir l'efficacité de la CFP en tant qu'organisme indépendant de contrôle. Je vous mentionnerai plusieurs de ces mesures dans un instant. Ce que je veux vous dire, essentiellement, c'est que ce projet de loi est un pas dans la bonne direction étant donné qu'il va permettre de moderniser le système de gestion des ressources humaines à la fonction publique.

Comme je suis conscient que le Sénat va vouloir examiner ce projet de loi en détail, la Commission a décidé de lui adresser quelques recommandations dont l'objet est de nous protéger davantage contre le sectarisme politique, de renforcer l'indépendance de la Commission et de resserrer les liens qu'elle entretient avec le Parlement. Ces recommandations visent donc à améliorer le projet de loi et il ne faut pas y voir des solutions miracles qui permettront d'en corriger les défauts fondamentaux.

Notre première recommandation concerne donc la protection contre le sectarisme politique. Nous recommandons que la CFP ait la possibilité de ne pas nommer les ex-membres de cabinets de ministre à des postes de la fonction publique, si elle considère que cela pourrait porter atteinte à l'impartialité politique de la fonction publique. Je tiens à indiquer que le Comité des comptes publics de la Chambre des communes a également soulevé ce problème dans son récent rapport qui faisait suite à la vérification de la vérificatrice générale dans l'affaire Groupaction.

Deuxièmement, nous recommandons que la CFP soit investie du pouvoir voulu pour faire enquête au sujet d'éventuelles activités politiques irrégulières menées par des administrateurs généraux — à la suite d'allégations émanant non seulement d'un candidat à une élection, mais aussi d'autres personnes. Une modification semblable a été apportée par le comité de la Chambre, modification qui vise à autoriser la tenue d'enquêtes à propos d'activités irrégulières des fonctionnaires en général.

Le projet de loi renferme aussi plusieurs dispositions relatives à la structure et au fonctionnement de la CFP. Certaines pourraient, selon nous, entraver notre indépendance et notre efficacité. Nos recommandations 3 à 5 visent à renforcer l'indépendance de la Commission, à accroître l'efficacité de sa gouvernance et à resserrer ses liens avec le Parlement. Il est notamment question que le Parlement oriente la Commission au sujet des critères de nomination des commissaires; il est question du processus de nomination d'un président de la CFP à titre temporaire, dans le respect de la procédure de nomination du président à temps plein sous le grand sceau; nous recommandons aussi la nomination de commissaires à temps plein ou à temps partiel, selon les besoins de l'organisation.

[Français]

Enfin, dans notre recommandation 6, nous proposons que la CFP puisse déléguer une plus grande partie de ses pouvoirs, de ses fonctions aux administrateurs généraux, lorsqu'il y a lieu, pour la totalité ou pour une partie de la fonction publique.

Des pressions continues seront exercées pour que la CFP transfère, à l'avenir, ses fonctions liées au service. Par exemple, dans le domaine des programmes de perfectionnement professionnel destinés aux fonctionnaires, il est important que ceux-ci soient gérés en tenant compte des besoins de la fonction publique.

La CFP devrait avoir le pouvoir d'autoriser un administrateur général à offrir des services de ce genre aux autres ministères. Elle devrait aussi avoir le pouvoir de tenir compte de toutes les parties responsables au moyen d'un temps de délégation officielle qui préserve l'intégrité du processus de nomination.

Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.

Le sénateur Bolduc: On m'a dit que vous aviez des inquiétudes lors des deux années de débats relativement à ce projet de loi. Il semble maintenant que vous êtes d'accord avec le projet de loi. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vos inquiétudes sont disparues?

M. Serson: Au début, on pensait que le projet de loi aurait donné aux sous-ministres les responsabilités de la dotation. Cela pourrait être une bonne idée pour le futur. Notre commission se préoccupe du fait que ce serait la première fois que les sous-ministres seraient imputables au Parlement. On n'a pas pensé à toutes les ramifications, à toutes les implications de cette suggestion. On est content de toujours posséder le pouvoir de délégation.

Toutefois j'ai lu votre discours. On a essayé d'être conscients des besoins de la fonction publique. Pour cette raison, nous étions prêts à voir notre programme de recours devant un autre tribunal indépendant. Nous sommes prêts à transférer nos responsabilités pour l'apprentissage et le développement professionnel à une nouvelle école pour créer quelque chose de plus fort.

[Traduction]

Le sénateur Bolduc: J'aurais pensé qu'à l'occasion d'une négociation — excusez-moi d'employer le mot «négociation». Je sais que tout cela obéit à un souci pour l'intérêt du public — vous avez obtenu certains pouvoirs supplémentaires et vous en avez perdu d'autres. Si j'avais été à votre place, j'aurais essayé de faire passer l'idée de dotation par concours pour tous les postes dans la fonction publique. Comment envisagez-vous de vous protéger véritablement contre le favoritisme bureaucratique, si vous n'obligez pas les administrateurs généraux à appliquer le système de dotation par concours? La dotation par voie de concours permet d'évaluer le mérite relatif des candidats.

J'estime que c'est fondamental, parce que les administrateurs ne sont pas les propriétaires de la fonction publique, ils en sont simplement les fiduciaires. Or, cela n'est absolument pas clair dans le projet de loi.

M. Serson: Il convient de ne pas perdre de vue que beaucoup ont souligné que le système de dotation n'a pas vraiment changé en 35 ans. Un changement profond a toutefois été apporté en 1993 à l'occasion de l'ajout de la notion de «mérite individuel», notion voulant que l'on puisse évaluer un candidat par rapport à la norme de compétence énoncée.

Le sénateur Bolduc: J'ai du mal à m'y retrouver. Quand j'ai lu le projet de loi, je pensais qu'il codifiait les pratiques administratives depuis 1973. N'est-ce pas le cas?

M. Serson: Nous ne codifions pas une pratique administrative. Le principe du mérite individuel a été ajouté en 1993 dans la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

Tout ce que je puis dire, sénateur, c'est que cela me préoccupe. Dans l'avenir, la Commission de la fonction publique devra veiller à faire respecter l'équilibre entre les dotations par concours et les dotations sans concours, et elle devra en faire rapport au Parlement. Nous nous sommes engagés à le faire dans nos rapports annuels précédents et nous avons l'intention de continuer, parce que nous voulons maintenir cet équilibre.

Le sénateur Bolduc: J'ai lu le rapport du Bureau du vérificateur général sur l'une des fonctions que vous assumiez à l'époque, je veux parler des concours publics ouverts aux diplômés, des concours généraux pour être admis au sein de la fonction publique. Ce processus nous a permis de recruter des gens de qualité aux Affaires étrangères, aux Finances et dans bien d'autres ministères.

Je sais que les choses sont en réalité beaucoup plus complexes. Les gens ont accès aux informations sur les concours grâce à Internet. Les étudiants de toutes les universités canadiennes peuvent soumettre leurs candidatures mais il faudrait conserver d'une façon ou d'une autre les anciennes procédures. La fonction publique pourrait obtenir son quota de jeunes diplômés brillants. Je ne m'objecte pas à ce que les agents administratifs des ministères effectuent directement leur sélection. Je suis d'accord avec tout cela, à condition qu'ils soient tenus d'appliquer une forme ou une autre de concours.

Je n'entends pas par-là un concours national qui serait organisé systématiquement pour tous les postes. Cependant, il faudrait recruter les professionnels, les diplômés, ceux qui accèdent au premier palier de la fonction publique et qui vont ensuite faire partie des cadres des divers ministères, par voie de concours. C'est la procédure naturelle à suivre. Il peut y avoir deux, trois ou quatre bons économistes de niveau supérieur au ministère des Finances, éléments parmi lesquels on voudra choisir un directeur. Eh bien, j'estimerais normal que l'on n'autorise pas le sous-ministre adjoint à prendre une décision comme cela, sans faire de comparaison. Il devrait tout de même être obligé d'évaluer les gens. Voilà le genre de concours auquel je pense, surtout dans le cas des diplômés et aussi dans celui des cadres supérieurs de la fonction publique.

M. Serson: La seule garantie que je puis vous donner à cet égard, sénateur, c'est que la nouvelle loi permet de réaliser un équilibre intéressant et je crois savoir que les choses demeureront inchangées pour les prochaines incarnations de la Commission. Quel est le pourcentage de mesures de dotation réalisées par concours et quel est le pourcentage de celles réalisées sans concours. Comment ces pourcentages s'expliquent-ils?

J'ai l'intention de continuer à faire rapport à ce sujet au Parlement, et les parlementaires devront demeurer vigilants à cet égard.

Le sénateur Bolduc: Les hauts fonctionnaires — directeurs, directeurs généraux et sous-ministres adjoints — n'ont pas intérêt à tenir des concours, parce qu'ils veulent doter rapidement et efficacement les postes à combler et qu'ils veulent y voir les gens qui les intéressent. Nous savons comment ça fonctionne. Ces hauts fonctionnaires sont très tentés de faire nommer les gens qu'ils connaissent le mieux.

Il faut réaliser un équilibre entre l'efficacité de la dotation et ce que j'appelle l'application d'une «procédure nécessaire».

M. Serson: Je suis entièrement d'accord avec vous.

Le sénateur Bolduc: Vous devez jouer un rôle sur le plan de l'élaboration des politiques, même si cela n'est pas mentionné dans la loi, et vous devrez contrôler la chose.

M. Serson: Il est clair que nous allons devoir continuer à jouer un rôle sur le plan de l'élaboration des politiques en matière de nominations. Nous serons très heureux d'échanger avec les parlementaires à propos des politiques que nous avons l'intention d'appliquer à cet égard.

Ma seule hésitation, sénateur, est la suivante: en tant qu'ancien sous-ministre et en qualité de fonctionnaire ayant de longs états de service, je peux vous dire que la plupart des cadres de la fonction publique sont soumis à d'importantes pressions pour nommer en poste des gens compétents. Vous avez raison, ils ont ainsi tendance à prendre des raccourcis pour y parvenir. Peu importe, je crois que personne n'est prêt à sacrifier le critère de la compétence à cause du volume de travail à accomplir.

Le sénateur Bolduc: Il serait insensé, d'un côté, de donner à ces gens-là la possibilité d'appliquer une méthode efficace de sélection des candidats jeu et, d'un autre côté, de permettre aux candidats malchanceux de faire appel devant un tribunal qui prendrait des mois à rendre sa décision.

Quelle différence existe-t-il entre le rôle du tribunal de la dotation et votre rôle de vérificateur?

M. Serson: La nouvelle loi donne la possibilité d'en appeler auprès du tribunal de la dotation de la fonction publique. Les choses seraient légèrement différentes. Nous sommes convaincus que le groupe de travail a su cerner les désirs des fonctionnaires de disposer d'un processus moins formel dans le cadre duquel ils pourront poser des questions, ils pourront savoir pourquoi leur candidature n'a pas été retenue, pourquoi ils n'ont pas été sélectionnés. C'est même un des groupes de travail de nos comités qui a énoncé ce désir des fonctionnaires. Nous n'avons pas de problème sur ce plan.

Le tribunal de la dotation de la fonction publique sera, quant à lui, saisi de tous les cas d'abus de pouvoir, de favoritisme personnel et autres.

Le sénateur Bolduc: Allez-vous contrôler la procédure de recours?

M. Serson: On nous a confié un rôle de vérification élargi. Nous allons vérifier l'intégrité des procédures de dotation et nous assurer que les énoncés de qualité sont utilisés à bon escient. En outre, nous avons été ravis que la Chambre adopte un amendement qui nous permet de veiller à ce que les énoncés de qualité préparés par l'employeur, par le Conseil du Trésor ou par le sous-ministre, ne visent pas à favoriser tel ou tel candidat. Nous pourrons vérifier cet aspect.

Nous avons aussi été investis du pouvoir d'enquêter dans les cas de pressions politiques ou de fraude. Nous pourrons donc enquêter à la suite de toute plainte relative à des procédures de recrutement.

Nous avons été investis d'un ensemble de responsabilités très sérieuses.

M. Greg Gauld, vice-président, Politique et responsabilisation en matière de mérite, Commission de la fonction publique: Il existe une autre protection dans ce projet de loi, puisqu'il sera possible d'adresser une plainte au tribunal de la dotation relativement au processus de nomination choisi. Si ce processus n'est pas correctement annoncé ou qu'il prévoit une nomination sans concours, les gens pourront se plaindre s'ils ont l'impression que leurs droits ont été enfreints à cause de cela.

Le sénateur Bolduc: Oui, mais cela intervient après coup.

M. Gauld: Oui.

Le sénateur Bolduc: Si la fonction publique est tenue, en partant, d'appliquer un processus de dotation par concours, il n'y aurait plus de problème, ce système serait beaucoup plus sûr. En revanche, si les cadres peuvent ajouter des exigences relativement aux qualités recherchées, ils pourront définir le profil de la personne qu'ils recherchent.

M. Serson: Nous pourrons faire vérification et rendre compte à ce sujet. Si nos conclusions ne sont pas favorables, nous pourrons retirer la délégation de pouvoir du sous-ministre ou demander qu'elle soit modifiée. Rien n'est figé. Tout cela fera l'objet d'un examen de temps en temps, sur la foi de nos conclusions quant à la façon dont les cadres supérieurs se prévalent de ce pouvoir, ce qui constitue selon moi une protection considérable.

Le sénateur Bolduc: Vous allez continuer de fermer les yeux sur le processus de sélection des hauts fonctionnaires? C'est ce que je dois comprendre?

M. Serson: Nous voulons nous attaquer à cet aspect aussi. Nous faisons actuellement l'objet de pressions. Le projet de loi prévoit le transfert des programmes de perfectionnement à l'employeur. Nous avons des réserves relativement à cette proposition, parce que certains programmes de perfectionnement s'inscrivent dans le cadre du processus de sélection.

Nous avons hâte de pouvoir rencontrer régulièrement votre comité et un comité de la Chambre pour connaître vos vues au sujet du futur rôle de la Commission de la fonction publique. Cette loi va occasionner un ensemble de pressions qui vont s'exercer sur la Commission de la fonction publique dans son rôle de prestataire de services. Il conviendrait que nous obtenions l'avis des parlementaires pour savoir si une partie de ce rôle est liée au mérite ou à d'autres aspects sur lesquels nous devrions nous pencher ou si — sous réserve que nous soyons investis des pouvoirs voulus — nous ne pourrions pas transférer une partie de ce rôle à d'autres organismes, étant entendu que nous veillerons à ce qu'ils appliquent les normes appropriées de nomination.

Le sénateur Bolduc: Depuis 75 ans, c'est vous qui êtes les véritables administrateurs de la fonction publique. La fonction publique est une machine tout à fait spéciale qui s'administre elle-même. Depuis 65 ou 70 ans, vous en êtes les administrateurs. À la faveur de la syndicalisation, vous avez perdu une partie de vos pouvoirs en matière d'établissement des conditions de travail, mais vous en avez conservé une autre. Aujourd'hui, à la faveur de la délégation des pouvoirs en matière de personnel — ce qui n'est pas mauvais en soi — vous allez ressembler de plus en plus au Parlement. Vous allez devoir veiller à la façon dont toutes ces nouvelles règles sont appliquées afin que les responsables de la gestion du personnel, c'est-à-dire les administrateurs, se montrent très prudents dans l'exercice de leurs fonctions.

M. Serson: Avant, la Commission de la fonction publique était, dans la plupart des cas, chargée de vérifier les mesures de dotation a priori, ce qui me posait problème. Nous allons maintenant effectuer davantage de vérifications après coup. Nous voulons être certains que ce genre de vérification peut fonctionner. Pendant la période d'examen des programmes, la Commission de la fonction publique a renoncé à une grande partie de sa capacité de vérification pour insister davantage sur son rôle de centre de ressources. Nous en sommes à présent au stade où nous devons retrouver notre capacité sur le plan de la vérification.

Le sénateur Bolduc: J'espère qu'à l'occasion de ces changements de structure, le tribunal de la dotation ne vous remplacera pas. Ce serait un désastre.

[Français]

Le sénateur Gauthier: Vous avez parlé du patronage politique et du patronage bureaucratique. Tout le monde connaît le patronage politique. Le patronage bureaucratique n'est pas tellement connu et pourtant il se pratique continuellement.

En donnant aux gestionnaires des pouvoirs d'embauche qu'ils n'ont pas aujourd'hui, je pense qu'on leur transfère une responsabilité importante. En ce sens, j'appuie le sénateur Bolduc. Comment se fait-il que certaines personnes reconnues dans le domaine politique, ayant passé au moins trois ans dans un cabinet de ministre, aient un droit d'accès à la fonction publique par la porte d'en arrière? Ces gens traînent un certain bagage politique partisan avec eux. Comment se fait-ils qu'ils puissent occuper des postes supérieurs? Comment faites-vous la distinction? Vous avez dit tantôt que la Commission pouvait refuser la nomination d'une personne qui avait un bagage partisan.

M. Serson: La Commission désire avoir ce droit. Il fait partie de ses recommandations. Elle n'a pas ce droit puisque son seul droit est celui de la détermination de la qualification d'un individu. Elle a le pouvoir d'examiner les individus et de s'assurer qu'il peut accomplir les fonctions du poste. C'est son seul pouvoir décisionnel.

Le sénateur Gauthier: Monsieur Serson, actuellement l'individu en question ne passe pas à travers le processus normal de sélection, il a un statut particulier. Il n'est donc pas sujet à examen de votre part. Est-ce exact?

M. Serson: Oui.

Le sénateur Gauthier: Comment conservera-t-on l'indépendance et l'absolue non-partisanerie de cet individu s'il a déjà un bagage partisan lorsqu'il entre dans la fonction publique?

M. Serson: Ce droit existe dans la Loi sur l'emploi dans la fonction publique et ce, depuis 1967. Avec le contrôle sur le système de gestion, on peut s'assurer que les gens possèdent les qualifications requises pour un poste donné et on peut discuter avec eux des valeurs de la fonction publique. On peut faire en sorte qu'ils les comprennent bien.

Je connais plusieurs personnes qui sont entrées dans la fonction publique par cette voie et qui ont apporté une grande contribution. Je sais également que des gens pensent qu'il est préférable d'éliminer cette priorité. La Commission recommande d'avoir le droit de refuser un candidat qui sollicite un poste au sein d'un ministère lorsque la Commission croit qu'il y a un risque de diminuer l'impartialité de la fonction publique à cause de la relation du candidat avec le ministère ou le ministre lui-même.

Le sénateur Gauthier: Est-ce que les critères sont connus?

M. Serson: C'est une bonne question. Je crois que la Commission utilisera les mêmes critères qui sont utilisés dans le cas où un fonctionnaire voudrait participer à une campagne électorale. Ces critères sont ceux-ci. Quel est le niveau du poste? Quelles sont les responsabilités du fonctionnaire? Sont-elles reliées à la livraison d'un service ou à l'étude d'un dossier susceptible d'avoir une influence politique?

Le sénateur Gauthier: Existe-t-il un système comme le nôtre ailleurs dans le monde? Je connais les systèmes australien et britannique et je sais que cela n'est pas permis. Y a-t-il un autre système sur lequel on pourrait s'appuyer?

M. Serson: Je l'ignore.

Le sénateur Gauthier: Imaginez-vous, nous sommes l'exception au monde. Mme Robillard a témoigné au comité hier. Je lui ai demandé des détails sur les zones de sélection.

M. Serson: Sur les zones de concours.

Le sénateur Gauthier: Elle a dit que la Commission de la fonction publique établirait ces zones qui sont appelées à disparaître. On veut se débarrasser de ces zones et actuellement, c'est la Commission de la fonction publique qui les délimite.

Expliquez-moi comment vous allez vous y prendre pour éliminer les zones de sélection en commençant par une région comme les Maritimes. Allez-vous le faire par décret? Allez-vous ouvrir les compétitions à l'échelle nationale?

M. Serson: Notre intention est de le faire par postes. Nous sommes en train de créer et de mettre en place un système de recrutement électronique qui peut nous aider à gérer les demandes d'emploi qu'on aura avec un système national de zones de concours.

Le sénateur Gauthier: Je suis familier avec les projets pilotes que vous avez effectués. Vous n'avez pas le choix de commencer par des niveaux assez spécifiques.

Je suis l'un de ceux qui croient qu'on devrait éliminer ces zones. Je suis un peu frustré parce que vous avez commencé, à la tête, avec les gestionnaires. Lorsque vous arriverez aux cadres moyens et aux corps de métier, comment ferez-vous pour leur ouvrir la compétition?

M. Serson: Nous croyons que nous devons avoir une discussion avec les membres du Parlement et les sénateurs à ce sujet. J'ai des doutes que ce serait une sage utilisation des ressources des Canadiens que d'avoir un concours national à un tel niveau.

Mais nous sommes certains que pour les officiers, nous devons avoir les zones de sélection nationales.

[Traduction]

Le sénateur Comeau: J'ai cru comprendre que vous n'avez pas témoigné devant un comité parlementaire depuis sept ans.

M. Serson: Pas du tout, sénateur.

Le sénateur Comeau: J'ai lu ça quelque part.

M. Serson: Uniquement pour ce qui est questions relatives à la sélection. Nous sommes un organisme indépendant qui fait rapport au Parlement. À l'occasion, nous devons aider le Parlement, c'est-à-dire la Chambre et le Sénat. Quand nous avons comparu au sujet de ce projet de loi, j'ai déclaré au Comité des opérations gouvernementales que je n'avais pas été convoqué devant lui depuis sept ans. Pourtant, j'avais indiqué aux présidents et vice-présidents successifs notre désir d'entretenir les membres du comité de questions comme les régions nationales de sélection afin d'obtenir leur appui politique en sorte que nous puissions engager davantage de ressources sur ce plan.

Le président: Il parle de la Chambre des communes, sénateur.

Le sénateur Comeau: Moi, j'ai parlé du «Parlement».

M. Serson: J'ai témoigné devant votre comité au cours des deux dernières années.

Le sénateur Comeau: Je me suis mal exprimé. Je ne vois pas ce que l'on peut conclure du fait que vous n'avez pas témoigné devant la Chambre des communes depuis sept ans. Je crois que c'est quelque chose de tout à fait différent.

Parlez-moi un peu de la Commission de la fonction publique. Quelle est la procédure de nomination des commissaires? Est-ce par décret du Gouverneur en conseil?

M. Serson: Avant, c'était par décret du Gouverneur en conseil.

Le sénateur Comeau: Et je suppose que ça va continuer ainsi?

M. Serson: Non. Je dois vous annoncer certains changements, sénateur.

Nous sommes une commission de trois membres. La loi prévoit que nous devenions une commission composée d'un président à temps plein et d'un certain nombre de commissaires à temps partiel. L'une de nos recommandations porte sur cela, parce que nous entretenons des réserves à cause de la charge de travail et des doutes que nous entretenons vis- à-vis de l'efficacité de la formule proposée.

Nous avons cependant indiqué au groupe de travail que nous étions ouverts à des changements. Nous estimons avoir été déjà soumis à rude épreuve à l'occasion de la réforme des deux dernières années, si bien qu'une représentation ouverte et davantage nationale, plus diversifiée, pourrait nous donner plus de crédibilité.

Le sénateur Comeau: Cela ne s'inscrit-il pas dans le cadre de la modernisation envisagée?

M. Serson: Oui.

Le sénateur Comeau: Il y aura plus de...

M. Serson: ... de commissaires à temps partiel.

Le sénateur Comeau: On essaiera d'attirer des gens des différentes parties du pays pour obtenir une meilleure représentativité entre hommes et femmes et aussi sur le plan linguistique...

M. Serson: Nous avons recommandé d'adopter des critères...

Le sénateur Comeau: Il n'y en a pas pour l'instant?

M. Serson: Il est prévu de nommer des commissaires à temps partiel. Certains ont dit que cette formule allait ouvrir la porte aux nominations politiques. En réponse à ce genre de critique, nous avons recommandé que l'on adopte des critères qui permettraient d'éviter cela, parce qu'il est important que la Commission de la fonction publique soit perçue comme un organisme impartial par les députés et par les sénateurs.

Le sénateur Comeau: Pour resserrer les liens avec le Parlement, avez-vous envisagé la possibilité que le Parlement sanctionne les nominations à la tête de la Commission?

M. Serson: Le comité de la Chambre en a fait une recommandation qui a donné lieu à une modification au projet de loi.

M. Serson: Le président de la Commission de la fonction publique serait nommé sous le grand sceau, ce qui veut dire, si je comprends bien, que la nomination doit d'abord être examinée par la Chambre des communes et par le Sénat.

Le sénateur Comeau: Je ne sais pas si c'est vraiment ce que cela veut dire.

Le président: C'est ce que prévoit cette disposition.

Le sénateur Comeau: Dans votre présentation, vous avez brièvement parlé de la création d'une méga-école pour fonctionnaires. J'ai du mal à imaginer ce qu'elle sera. Vous auriez des gens de la Garde côtière au côté de cadres et d'électriciens. Tous les fonctionnaires se retrouveraient dans cette école qui serait administrée par la Commission de la fonction publique.

M. Serson: Je ne la décrirais pas ainsi, sénateur. Cette école sera le résultat de la fusion entre le Centre canadien de gestion et l'organisation de la Commission de la fonction publique qui assure la formation professionnelle. Ce centre forme les gestionnaires au leadership et il s'intéresse peu à peu aux cadres intermédiaires étant donné le rôle important qu'ils devront jouer dans le changement de culture à mettre en œuvre au sein de la fonction publique. Cette école ne sera pas le seul centre de formation et de perfectionnement de la fonction publique.

Le sénateur Comeau: J'espère que non.

M. Serson: Elle sera chargée d'offrir tous les cours importants pour la fonction publique en général, surtout pour l'employeur.

Le sénateur Comeau: Va-t-elle favoriser la progression des fonctionnaires et leur perfectionnement?

M. Serson: Elle serait chargée de dispenser une formation en leadership ainsi qu'une formation professionnelle de base.

Le sénateur Comeau: Il va falloir que je réfléchisse, parce que je ne suis pas d'accord avec l'idée d'une école interne. Je crois qu'il est plus intéressant d'envoyer les cadres supérieurs et intermédiaires dans différentes écoles plutôt que de tous les former dans un même moule.

M. Serson: Nous n'essaierons pas de vous convaincre, sénateur. Vous pourriez peut-être en parler avec le nouveau président de l'école.

Le sénateur Comeau: C'est ce que je ferai sans doute.

M. Serson: Nous avons obéi en cela au désir très profond exprimé par les fonctionnaires eux-mêmes qui voulaient faire profiter leurs collègues des autres échelons de ce genre de programme. Cette nouvelle école, suivant son orientation, sera chargée d'instaurer des liens avec les universités et les collèges communautaires. Ce n'est pas elle qui s'occupera de tout, parce qu'elle va essayer de s'appuyer sur d'autres établissements d'enseignement.

Le sénateur Comeau: Toutefois, nous savons ce qu'il adviendra une fois que vous aurez créé le noyau de ce futur empire. Il va échapper à tout contrôle. Les exemples abondent et je n'ai pas besoin de vous en donner.

Je veux revenir sur la question du transfert de vos responsabilités en matière d'engagement des directeurs adjoints. Je crois comprendre que vous allez conserver cette responsabilité, même si vous pouvez la déléguer.

M. Serson: Oui.

Le sénateur Comeau: J'ai toujours été intrigué par le concept de délégation de pouvoir, parce qu'en cas de problème, on peut toujours dire qu'on n'est pas responsable des erreurs du gestionnaire.

On ne peut jamais vraiment déléguer de responsabilité. Vous resterez pleinement responsable et vous aurez des comptes à rendre en cas de problème. D'autres ont dit que vous demeurerez responsable si quelqu'un nomme un membre de sa famille ou des amis. Vous ne pouvez donc pas déléguer vos responsabilités.

M. Serson: Le système actuel n'est pas idéal. Nous sommes tenus de rendre des comptes au Parlement. Nous n'avons pas beaucoup délégué de responsabilités en matière de recrutement des sous-ministres, mais dans le préambule de la loi, il est clairement indiqué que, si le Parlement adopte cette loi, nous serons tenus de faire davantage.

À quel genre de problèmes risquons-nous de nous heurter sur ce plan? Tout d'abord, en qualité d'organisme indépendant, il nous est très difficile d'obtenir des ressources du gouvernement du Canada, parce que nous ne sommes pas chapeautés par un ministre nous représentant au Cabinet. Cela fait quatre ans que j'essaie, en vain, de mettre sur pied un service de première classe, mais je n'y parviens pas parce que nous n'avons pas accès à suffisamment de ressources. Comme vous pouvez vous en douter, l'économie commençant à s'essouffler un peu après une période de surchauffe, nous sommes inondés de demandes d'emploi. C'est là un premier problème.

Pire encore, nous devons tout faire en même temps. Nous sommes devenus les boucs émissaires volontaires des cadres. Ils nous disent «Nous n'obtenons pas une formation suffisante de la Commission de la fonction publique». Ce sont les règles de la Commission qui sont en cause. L'actuelle Commission estime que cette nouvelle loi lui donnera l'occasion de changer son orientation, de se doter d'une nouvelle capacité sur les plans de la vérification et des enquêtes. Elle pourra atténuer, sans y renoncer complètement, ses principes politiques. Elle pourra déléguer aux sous- ministres, contrôler étroitement la façon dont ils appliquent leurs nouveaux pouvoirs délégués, faire rapport au Parlement sur les résultats et, en cas de problème constaté, modifier la délégation du ministère qui aurait commis des erreurs ou n'aurait pas suffisamment investi pour bien faire le travail, plutôt que de pénaliser les sous-ministres qui ne font pas un bon travail en leur appliquant une règle générale.

Le sénateur Comeau: À la façon dont je vois les choses, vous devrez maintenir un contact étroit et suivi avec les parlementaires. J'en comprends la raison.

M. Serson: Effectivement.

Le sénateur Comeau: Il faut toutefois mentionner que la Chambre des communes est extrêmement divisée à cause des partis de l'opposition. Il faut reconnaître que c'est l'opposition qui, en général, pose les questions les plus sérieuses. Loin de moi l'idée de m'en prendre à mes collègues du côté gouvernemental, mais nous avons une opposition plutôt forte à la Chambre tandis qu'elle est assez réduite au sénat. Certains d'entre nous assument des charges très importantes.

Cela m'inquiète, parce que si nous allons dans le sens du changement de régime qui se profile à la Chambre des communes, les choses ne seront peut-être pas très efficaces dans l'avenir. Nous sommes en train de modifier en profondeur la Commission de la fonction publique, à une époque où le Parlement ne fonctionne pas aussi bien qu'il le devrait. Cela m'inquiète.

M. Serson: J'ai parlé à des députés des deux côtés de la Chambre et je suis aussi préoccupé par le peu de ressources mis à leur disposition. Notre dossier peut effectivement les intéresser, mais ils finissent toujours par me dire: «Monsieur Serson, nous plions sous le nombre de dossiers et nous manquons de temps». Il s'agit là d'une considération importante.

Le sénateur Comeau: Consultez la Loi sur les élections et vous verrez ce qui va se passer la prochaine fois.

M. Serson: Le deuxième aspect concerne la structure de soutient aux comités. Je veux parler du comité de la Chambre chargé des opérations gouvernementales. Celui-ci ne dispose d'aucun personnel qui pourrait lui rappeler qu'il n'a pas vu de témoins de la Commission de la fonction publique depuis cinq ou six ans, par exemple. Or, ces députés sont ceux qui parlent de reddition de comptes des fonctionnaires et de systèmes de reddition de comptes. On n'a pas exigé de nous que rendions des comptes pendant tout ce temps là.

Le sénateur Comeau: La question des nominations de membres du personnel politique après trois ans de services — selon une procédure simplifiée — a été soulevée par d'autres témoins. Pourquoi ne recommandez-vous pas que l'on mette carrément un terme à cette façon de procéder, que l'on ne prenne plus de raccourcis? Si les gens veulent intégrer la fonction publique, on leur applique les mêmes règles qu'aux autres.

M. Serson: Nous n'avons pas eu beaucoup de temps pour réfléchir sur cette question. J'ai été surpris par le témoignage de Donald Savoie qui a formulé des arguments très convaincants devant le comité de la Chambre. Je vois le sénateur Gauthier acquiescer à ce que je viens de dire. Je serais heureux que nous débattions de toute cette question plus en détails.

Je vous ai parlé de ma propre expérience de fonctionnaire. Dans le cadre du débat actuel, nous nous sommes concentrés sur les points qui font le plus problème, ce qui revient à dire que, dans la majorité des cas, nous nous sommes intéressés à la situation des gens qui intègrent la fonction publique de façon prioritaire. Ce que nous craignons, ce n'est pas tant qu'ils ne soient pas qualifiés, mais c'est qu'ils puissent maintenir des liens avec un ministère qui était chapeauté par leur ministre, ministère qui les estimait compétents à un échelon relativement supérieur. Malheureusement, même cela peut donner lieu à des problèmes.

Le président: Monsieur Serson, ces gens-là peuvent intégrer la fonction publique après un certain nombre d'années de service, à condition qu'ils soient compétents, mais personne n'a le droit de prétendre à un emploi donné au sein de la fonction publique.

M. Serson: Vous avez raison. Toutefois, le sénateur, voici pourquoi nous sommes plutôt confus à cet égard: si ces gens-là font une demande d'emploi prioritaire et qu'ils présentent les qualités exigées, nous ne pouvons pas rejeter leur candidature sous prétexte que, même s'ils paraissent qualifiés, d'autres facteurs peuvent jouer contre eux. Nous pouvons le faire de façon non officielle et nous l'avons d'ailleurs déjà fait.

Le président: Soit dit en passant, j'aimerais qu'on me prouve que les excès sont fréquents.

M. Serson: Ce n'est pas ce que je prétends, sénateur Murray, je parle simplement de plusieurs cas qui se sont produits.

Le président: Il demeure que je pourrais vous donner toute une liste de gens qui ont été fonctionnaires, qui ont bénéficié de cette disposition et qui se sont ensuite révélés des fonctionnaires extrêmement compétents et loyaux, qui ont atteint les échelons les plus élevés de la fonction publique. Je pourrais vous donner une liste de gens qui émanaient des deux grands partis politiques ayant gouverné ce pays depuis la Confédération. Passons à autre chose.

[Français]

Le sénateur Ferretti Barth: Depuis plusieurs années, je siège au Comité des finances nationales et je me rappelle qu'en 1997, 1998 et en 1999, on a traversé une crise parce qu'il y avait une pénurie de candidats dans la fonction publique. Il n'y avait pas de relève. À ce moment, la commission a mis sur pied un programme qui s'appelait «La relève.»

Est-ce que ce programme existe toujours? Ce programme permettait de préparer les aspirants à la fonction publique à des postes plus importants avant que de hauts fonctionnaires ne partent à la retraite.

Ma question se rattache à la création d'une école de la fonction publique. Quels seront les gens qui auront la chance de faire partie de cette école? Allez-vous faire du recrutement dans les universités avec des concours? Cette école doit avoir une fonction très pratique et qui rapporte des résultats très précis.

Un aspirant à la fonction publique, à un poste très important ou moins important, selon les besoins de la fonction publique, doit-il fréquenter l'école de la fonction publique du Canada pour présenter sa demande d'embauche comme n'importe quelle autre personne?

M. Serson: Quant à la relève dans la fonction publique, il y a plusieurs programmes de recrutement et de développement. Il y a un programme pour les gestionnaires, un pour les économistes et un pour les spécialistes de la création de politiques.

Le programme pour les gestionnaires utilise les services de l'école, mais les deux organisations qu'on mettra ensemble pour créer la nouvelle école ont déjà leurs employés. Dans le futur, le projet de loi donne à l'école le droit d'engager ses recherchistes et ses professeurs pour une période déterminée. Mais ce n'est pas une partie de la loi que j'ai étudiée.

Je pense que l'école sera utilisée. Il y a trois programmes de gestion. Si vous faites partie de ces programmes, vous devez suivre les cours à l'école. Par la suite, l'école fonctionne sur la base des cours qui sont offerts. Les gestionnaires et les employés qui ont besoin de formation, d'apprentissage, peuvent demander des fonds pour s'inscrire à la formation.

Le sénateur Ferretti Barth: J'aurais peut-être dû poser cette question à Mme Robillard. Il existait déjà une institution pour la préparation des candidats à la fonction publique. Combien devra débourser le gouvernement pour la construction de cette nouvelle école?

M. Serson: Je ne peux pas répondre. Je ne suis par certain.

Le sénateur Ferretti Barth: Pour la préparation des candidats?

M. Serson: Les deux organisations seront fusionnées pour créer l'école. Ils ont un budget à l'heure actuelle. Notre organisation «développement et apprentissage Canada» travaille sur la base du recouvrement des coûts. Il y a eu un surplus durant les deux dernières années.

Le sénateur Ferretti Barth: Est-ce qu'il existe toujours une pénurie de candidats à la fonction publique?

M. Serson: Non.

Le sénateur Ferretti Barth: Alors, le programme pour la relève peut être aboli?

M. Serson: Je crois tout de même que nous devons être vigilants et regarder les qualifications de nos candidats. Je peux vous dire que depuis trois ans, on a eu une augmentation de 66 p. 100 des demandes pour les postes indéterminés. Pendant les derniers six mois, il y a eu huit millions de visites sur notre site web. La moyenne de demandes d'emploi pour un poste est de 73. C'est une moyenne, il y a beaucoup d'intérêt. Nous devons être vigilants et l'être, surtout dans la fonction publique, avec la relève de notre cadre de gestion.

Le sénateur Ferretti Barth: Avez-vous des réserves à formuler concernant la participation des fonctionnaires aux activités politiques?

M. Serson: Nous sommes satisfaits des amendements proposés par la Chambre des communes. Nous croyons que cela nous donnera suffisamment de flexibilité.

[Traduction]

Le sénateur Oliver: Je suis très intéressé par ce projet de loi parce que j'estime que le Canada bénéficie d'une excellente fonction publique. Les sous-ministres, les sous-ministres adjoints et les autres fonctionnaires avec qui j'ai eu l'occasion de traiter sont des gens de grande qualité, très instruits, qui favorisent le principe du mérite et qui échappent à toute influence politique.

Il ne nous arrive pas souvent d'être saisi d'une mesure comme le projet de loi C-25 qui vise à revoir complètement les structures de la fonction publique du Canada et à renouveler cette institution. Cette fois-ci, nous devons être sûrs de bien faire pour ne pas commettre d'erreurs. Il se peut que nous ayons à attendre encore très longtemps avant qu'une telle occasion se représente.

Cela étant posé, et étant donné que nous voulons retrouver dans ce texte de loi les piliers de notre culture, je veux vous poser certaines questions. En réponse au sénateur Bolduc, qui vous a questionné au sujet de vos pouvoirs et de votre rôle de chien de garde et de vérificateur, vous avez dit que vous aimeriez être appelé à témoigner de temps en temps devant les comités du Parlement, advenant que vous ayez besoin de plus d'argent.

Notre Comité des finances s'occupe des finances du gouvernement du Canada. Sous quelle forme aimeriez-vous recomparaître devant le Parlement pour obtenir plus d'argent, afin d'être plus efficace dans votre rôle de chien de garde? Quel processus envisageriez-vous à cet égard?

M. Serson: Dans les domaines que nous jugeons urgents ou dans des situations où nous estimons que les sénateurs et les députés veulent nous voir — par exemple sur des questions de sélection — nous aimerions pouvoir nous adresser à des parlementaires pour leur dire que nous avons, par exemple, déposé une demande au sujet du gouvernenement électronique, que celle-ci a été rejetée et que nous ne pouvons pas agir rapidement dans le dossier dont ils seraient saisis. Nous leur demanderions s'ils sont convaincus du bien-fondé de notre position et s'ils ne peuvent pas nous donner un coup de main en conséquence.

Je crois qu'une recommandation ou un rapport adressé au gouvernement serait extrêmement utile.

Le sénateur Oliver: Est-ce que cela exigerait un amendement particulier à ce projet de loi?

M. Serson: Je ne pense pas que ce soit absolument nécessaire. Nous avions proposé un amendement de cette nature à la Chambre afin de nous rapprocher un peu plus du genre de pouvoir dont dispose la vérificatrice générale, par exemple.

Le sénateur Oliver: La vérificatrice générale à ce pouvoir.

M. Serson: Cela a été rejeté pour une question technique parce qu'une telle disposition échappait à la portée générale du projet de loi.

Le sénateur Oliver: Aimeriez-vous être investi de ce pouvoir?

M. Serson: Oui. Nous l'avons demandé.

Le sénateur Oliver: Ma deuxième question concerne la question que vous soulevez dans votre document au sujet des commissaires à temps plein et à temps partiel. Certains témoins du comité de la Chambre des communes ont suggérer de ne rien changer, de conserver trois commissaires à temps plein pour avoir la certitude que ces personnes ne risquent pas d'être soumises à des pressions ou à des influences politiques.

Ne serait-ce pas une façon de régler ce problème? Y a-t-il suffisamment de travail pour trois commissaires ou est-ce que trois personnes, c'est trop?

M. Serson: Il y a suffisamment de travail pour tenir trois personnes occupées, sénateur.

Le sénateur Oliver: Trois personnes à temps plein?

M. Serson: Oui, je n'en doute pas. D'ailleurs, même si d'aucuns ont soutenu que nous sommes en train de perdre notre rôle d'institution de recours, à cause de l'indépendance des agents qui s'occupent de ce genre de chose, il faut savoir que nous consacrons très peu de temps à ce gendre de dossier de toute façon puisque nous ne nous intéressons qu'aux mesures de nature corrective.

Pour en revenir à ce que disait le sénateur Comeau, ce qui est important c'est que nous allons encore plus déléguer aux quelque 70 sous-ministres et chefs d'organismes. Si nous devons les tenir pleinement responsables de ce qu'ils font, nous devrons passer du temps sur place à nous entretenir avec eux au sujet de leurs responsabilités en matière de dotation et de recrutement pour nous assurer qu'ils les comprennent bien et qu'ils comprennent aussi les résultats de nos vérifications et de l'examen de leur auto-évaluation.

J'estime que cette fonction est plus exigeante.

Le sénateur Oliver: Pour être certains que la fonction publique et la Commission de la fonction publique échappent à toute influence extérieure, ne serait-il pas mieux de nommer trois commissaires à temps plein plutôt que, comme vous l'avez indiqué, d'en nommer un certain nombre à temps partiel qui pourraient, eux, être soumis à des influences?

M. Serson: Je me dois d'être honnête avec vous, sénateur. Si l'on nous garantissait que nous allons entretenir des liens plus étroits avec le Parlement — peut-être avec un président nommé sous le grand sceau — je vous dirais que la formule actuelle n'est pas mauvaise. D'ailleurs, elle fonctionne très bien.

Le sénateur Oliver: La formule actuelle?

M. Serson: Le fait d'avoir trois commissaires à temps plein.

Le sénateur Oliver: Mes dernières questions vont porter sur ce que vous avez plus tôt appelé, en réponse à une question du sénateur Comeau, le «changement de culture à la fonction publique». Je suis intéressé par cette culture. De quel genre de fonction publique voulez-vous pour que le Canada soit un grand pays?

La ministre a utilisé deux mots, qui ont été employés dans des discours du Trône et ailleurs: «représentativité» et «diversité». On ne retrouve nulle part ces deux notions dans cette mesure législative, si ce n'est dans le préambule, pour nous annoncer ce à quoi pourrait ressembler la fonction publique de demain.

Je vais vous placer un peu en contexte. C'est à cause de la sous-représentation des minorités visibles dans la population active canadienne qu'a été créé le Groupe de travail sur la participation des minorités visibles au sein de la fonction publique en avril 1999. Comme vous le savez, ce groupe de travail a déposé un rapport, le 12 avril 2000, où il est notamment question des changements à apporter à la fonction publique fédérale. Je sais que vous le connaissez.

Pour l'instant, les minorités visibles représentent environ 15 p. 100 de la population active canadienne. À la fonction publique, elles ne représentent que 7 p. 100. Ainsi, ces gens-là sont très nettement sous-représentés. Compte tenu de ce problème, ne pensez-vous pas qu'il faudrait prévoir certaines dispositions dans cette mesure afin de garantir l'application du principe du mérite aux minorités visibles?

M. Serson: Nous croyons que le préambule donne une idée claire du genre de fonction publique qui intéresse le Parlement. Je me permets cependant d'attirer votre attention sur le fait que le comité du secteur privé — le Comité consultatif sur les changements dans la fonction publique, qui conseille la Commission de la fonction publique et le Secrétariat du Conseil du Trésor sur la mise en œuvre des recommandations relatives au changement — a comparu devant le comité de la Chambre. Il a notamment recommandé d'inscrire la notion de diversité dans la loi, dans les dispositions concernant la définition du mérite, là où il est questions des sous-ministres qui doivent tenir compte des besoins futurs de la fonction publique. Si ces gens-là estimaient qu'il serait beaucoup plus utile de mentionner la question de la diversité à cet endroit, comme un des éléments des besoins futurs, pour traduire ouvertement le désir du Parlement.

Le sénateur Oliver: Vous reconnaissez donc que cela renforcerait la loi?

M. Serson: Oui.

Le sénateur Oliver: Ce projet de loi ne traite pas de la question de la transformation de la culture de la fonction publique afin qu'elle soit davantage en mesure de parvenir à l'excellence. Par exemple, la présidente du Conseil du Trésor a parlé de la nécessité d'appuyer les fonctionnaires par la mise en place d'une culture favorisant des valeurs comme l'apprentissage, l'innovation, l'inclusivité et la diversité, afin que la fonction publique contribue au mieux à la vie de la société canadienne.

Pensez-vous qu'il serait bon d'inclure une disposition prévoyant que tout candidat au poste de sous-ministre ou autre doive posséder des notions de diversité et de représentativité au sein de la fonction publique? Ne devrait-on pas être un peu plus précis à cet égard, faute de quoi nous pourrions encore traîner de l'arrière?

M. Serson: Il vaut la peine d'y réfléchir. Personnellement, je préférerais qu'on inscrive cela dans la définition du mérite, parce que le mérite est une qualité essentielle énoncée pour tous les postes de la fonction publique du Canada.

Le sénateur Oliver: Le greffier du Conseil privé, M. Himelfarb, s'est toujours préoccupé de représentativité. J'ai été déçu, étant donné sa réputation à cet égard, de ne rien trouver de particulier sur ce plan dans cette mesure législative, dans ce cadre législatif qu'est le projet de loi C-25, pour protéger l'adversité et la représentativité. Comment expliquez- vous cela?

M. Serson: Je ne puis l'expliquer.

Le sénateur Oliver: Cela ne vous choque pas?

M. Serson: Sénateur, vous devez comprendre que ce n'est pas notre projet de loi. Ce projet de loi a été produit par un groupe de travail. Nous avons été occasionnellement appelés à y participer et à donner notre avis. Il demeure que ce n'est pas notre projet de loi. Je ne sais pas du tout comment on en est arrivé là, ni ce qui s'est dit en coulisses parce que nous n'étions pas là. C'est le gouvernement qui a choisi de procéder ainsi.

J'ai exprimé ma frustration à cet égard. Je suis un fervent partisan de l'inclusivité et j'aurais préféré que l'on adopte une approche davantage collégiale pour préparer ce projet de loi.

Le président: Il demeure, monsieur Serson, que vous êtes soit le fiduciaire du Parlement, soit celui du gouvernement. Personnellement, je dirais que vous êtes le représentant du Parlement et je ne suis pas sûr que vous vouliez — ou que nous voulions — d'une approche collégiale avec la branche exécutive.

M. Serson: Vous avez peut-être raison, sénateur, mais comme j'ai appliqué la démarche collégiale pendant 28 ans, au cours d'une carrière extraordinaire, je dois vous dire que j'ai été quelque peu choqué par ce système, pour dire le moins.

Le sénateur Oliver: Pensez-vous que les erreurs, les omissions ou les défauts fondamentaux que l'on retrouve dans une loi cadre de cette importance touchent aux racines mêmes de la culture de la fonction publique et à l'avenir de la fonction publique du Canada?

Cela vous trouble-t-il autant que moi?

M. Serson: J'aimerais que le comité réfléchisse sur les recommandations formulées par le Comité consultatif sur la place aux changements. Il a notamment recommandé que la diversité soit mentionnée dans la définition du mérite.

Cela dit, je ne pense pas que ce projet de loi soit la solution définitive à la question du changement de culture. Je crois que c'est par la participation active des chefs de la fonction publique que nous parviendrons à réaliser un changement de culture, c'est en faisant en sorte que les fonctionnaires soient conscients du sérieux des sous-ministres à propos des dimensions d'inclusivité, de diversité et de représentativité, et c'est en exigeant des comptes des agents de placement.

Le sénateur Ringuette: J'ai lu soigneusement le document que vous nous aviez fait parvenir plus tôt. Je suis surpris d'entendre que votre institution n'a pas été appelée à participer davantage au processus du groupe de travail. La partie du projet de loi C-25 qui vous concerne — par rapport aux trois autres lois — est énorme. Ce projet de loi est lourd de conséquences, comme le sénateur Oliver l'a dit, sur les plans de la diversité et du changement de culture qui vont marquer la fonction publique dans les 25 prochaines années.

Je sais que vous avez pris part à des projets pilotes à Toronto. J'ai lu à ce sujet. Cependant, je n'ai rien vu à propos de la qualité du recrutement à l'occasion de ce projet de pilote ni des répercussions de cette qualité sur le plan des coûts de la formation pour le gouvernement du Canada.

Avez-vous quelque chose à nous dire à ce sujet?

M. Serson: Je vais demander à M. Crête de vous répondre, si vous me le permettez. Je ne crois pas que nous nous soyons livrés à une évaluation formelle de ce projet, sénateur. En revanche, je peux vous dire que tous les gestionnaires ayant participé à ce projet pilote de Toronto nous ont dit qu'ils étaient parvenus au niveau de qualité qu'ils voulaient. Ils nous ont exhortés à poursuivre ce projet pilote, parce qu'ils étaient très satisfaits des résultats.

[Français]

M. Raymond Crête, directeur général, Services de ressourcement, Service de recrutement et d'évaluation: Essentiellement c'est exact. Nous sommes en mesure de faire deux évaluations psychométriques pour s'assurer de la qualité des candidats, non seulement pour ceux qui participent au processus mais pour ceux qui sont sujets à de nouvelles barrières qui peuvent être mises en place.

[Traduction]

Nous sommes en train de faire deux évaluations. Une fois que le rapport aura été produit, nous serons en mesure de vous en dire davantage. Les résultats de sondages conduits auprès des cadres à propos du titre et de la qualité des candidats sont très encourageants.

Le sénateur Ringuette: Vous avez donc obtenu un plus grand succès que quand vous aviez voulu limiter les zones de recrutement? J'interprète ces propos comme voulant dire que les gestionnaires qui veulent ce genre de ressources sont tout à fait favorables au projet. Vous semblez nous dire que, hors du cadre d'un projet pilote, vous ne recevez pas ce genre de réactions favorables.

M. Serson: Je m'efforce de faire la distinction entre les deux aspects. Voilà pourquoi je veux que nous soyons prudents à propos de toute cette question de qualité. Les gestionnaires disent qu'ils ont effectué une évaluation sur un petit nombre de candidats qualifiés, quand nous utilisons la technologie de recrutement électronique ainsi que nos questionnaires pour réduire le nombre de candidatures. Sinon, nous de présélectionnons 20 p. 100 des candidats et acheminons le reste aux gestionnaires, à cause des ressources limitées dont nous disposons.

Comme je le disais, nous avons atteint un niveau de 174 demandes pour des concours sans qu'il soit nécessaire de passer à une sélection nationale. Les gestionnaires sont contents d'obtenir un plus petit nombre de candidats parfaitement qualifiés. C'est leur première réaction positive.

De plus, ils ne se sont pas plaints de la qualité du processus. Ils semblent très contents de cette qualité et ils veulent que les choses continuent ainsi. Je crois que nous avons affaire là à un bon équilibre dans les réactions des gestionnaires.

M. Gauld: Toronto est un test pour l'utilisation de la technologie, mais ce n'est pas une région nationale de sélection.

Le sénateur Ringuette: Je sais. Avez-vous appliqué des critères géographiques élargis pour le test?

M. Crête: Non. Aucun de ces projets pilotes n'a porté sur l'élargissement des zones de concours. Pour annoncer un emploi, les gestionnaires devront désormais préparer une affiche comportant quatre à six facteurs d'expérience. Un citoyen canadien pourra consulter l'affiche et décider s'il veut ou non se présenter, selon qu'il estime avoir ou pas l'expérience recherchée. Il s'agit d'une approche tous azimuts, parce que les Canadiens qui ne sont pas déjà fonctionnaires fédéraux ne connaissent pas forcément la terminologie utilisée au sein de la fonction publique. Cette nouvelle façon d'annoncer des emplois, grâce à ces nouveaux outils technologiques, nous permet de quantifier et de préciser — sous la forme d'un questionnaire — ce que nous recherchons et le type d'expérience qui nous intéresse pour chacun des facteurs énoncés.

Toutes les demandes d'emploi aboutissent chez nous. Chaque canadien est mieux informé et il peut mieux comprendre le genre d'emploi proposé. Les gestionnaires, quant à eux, peuvent avoir une meilleure idée de ce qu'ils recherchent chez les candidats, ce qui permet de sélectionner les meilleurs. On peut s'assurer que tout le monde comprend les exigences du poste et peut évaluer de façon réaliste s'il est en mesure ou non de s'y conformer, dès l'étape de l'annonce de l'emploi. Nous voulons cibler les bons candidats de façon plus efficace.

M. Gauld: La confusion vient peut-être du fait qu'à l'occasion de projets pilotes antérieurs, nous avions élargi la zone de concours dans le cadre d'un système manuel. Ces projets pilotes différents ont donné des résultats différents.

Le sénateur Ringuette: Combien d'employés avez-vous et quel est votre budget de fonctionnement?

M. Serson: Nous avons environ 1 400 employés et notre budget de fonctionnement est de 130 millions de dollars.

Le sénateur Ringuette: Qui décide de rendre public tel ou tel concours ou de le garder à l'interne?

M. Serson: C'est le gestionnaire.

Le sénateur Ringuette: Le gestionnaire au ministère?

M. Serson: Oui.

Le sénateur Ringuette: Est-ce que vous examinez les décisions prises?

M. Serson: Je ne veux pas vous faire croire que nous examinons actuellement toutes ces décisions de façon rigoureuse, sénateur. Nous nous fions aux rapports qui nous parviennent. Nous demandons aux sous-ministres et aux chefs des organismes de nous faire annuellement rapport au sujet de leurs pratiques de dotation dans le respect des ententes de délégation qui ont été conclues avec nous. Au cours des quatre dernières années, nous avons cherché à renforcer cette relation pour instaurer de meilleurs indicateurs. C'est la première année où nous allons obtenir des rapports de tous les ministères et organismes, soit 70 en tout. Nous nous en servirons de base afin d'apporter des améliorations au processus de présentation des rapports.

L'important, à cet égard, concerne la vérification prévue dans le projet de loi. Cela va nous être difficile. Voilà pourquoi j'en ai parlé dans ma présentation. Il y a dix ans, nous aurions eu 100 vérificateurs à la fonction publique. Aujourd'hui, nous en avons 7 ou 8. Cela ne suffit pas pour faire le genre de travail prescrit par le projet de loi. Il faudra nous donner davantage de ressources ou nous devrons en réaffecter.

Le sénateur Ringuette: Vous avez dit qu'au cours des trois dernières années, il y a eu une augmentation du 66 p. 100 du nombre d'emplois à durée indéterminée. Qui décide si un emploi doit être pour une durée indéterminée ou déterminée?

M. Serson: C'est le gestionnaire.

Cela dit, dans nos rapports annuels des deux ou trois dernières années, nous avons indiqué, tout comme la vérificatrice générale, que la planification des ressources humaines dans les ministères est, selon nous, inadéquate parce que l'on a engagé beaucoup trop d'employés pour une durée déterminée. En fait, le Conseil du Trésor a même adopté une nouvelle politique visant à limiter la durée des contrats. Nous avons essayé d'inciter les sous-ministres à se prévaloir davantage du programme de recrutement post-secondaire dont le sénateur Bolduc vient de parler. La vérificatrice générale vient de faire le point sur les progrès réalisés à ce chapitre et elle nous a plutôt bien notés. Nous souhaiterions que ce processus soit appliqué plus souvent pour engager des diplômés d'universités dans des postes à durées déterminées.

Le sénateur Ringuette: Il y a donc eu une augmentation de 66 p. 100 du nombre d'emplois pour durée indéterminée au cours des trois dernières années.

M. Serson: C'est 56 p. 100, excusez-moi.

Le sénateur Ringuette: Alors, corrigeons la retranscription, c'est 56 p. 100.

À quel chiffre cela correspond-t-il? C'est un pourcentage, mais quel est le nombre d'emplois pour durée indéterminée dont il est question? Vous pourriez aussi nous donner le nombre d'emplois pour durée déterminée.

M. Serson: Dans notre rapport annuel de l'exercice 2001-2002, il est fait mention de 5 000 postes dotés pour des durées indéterminées. Il y a eu 16 000 postes pour une période déterminée.

Le sénateur Ringuette: Êtes-vous en train nous dire que 21 000 personnes ont été recrutées par des gestionnaires sans aucune forme de concours?

M. Serson: Non. Nos chiffres indiquent que plus 80 p. 100 des personnes ont été engagées dans le cadre de procédures de recrutement par concours.

Le sénateur Ringuette: Dans cette définition, incluez-vous le nombre de concours remportés en fonction des critères d'admissibilité énoncés dans ce projet de loi?

Pouvons-nous de nouveau inviter ce monsieur?

Le président: Nous verrons comment les choses se déroulent. Le gouvernement voudrait que ce projet de loi soit adopté par le Parlement. Nous avons prévu neuf réunions à son sujet et nous en sommes à la deuxième. Nous aurons de nombreux autres témoins à convoquer. Si vous avez une autre question, c'est très bien, mais deux autres sénateurs sont sur ma liste. Je voudrais ajourner le plus près possible de 20 heures.

Le sénateur Oliver: Nous devrions peut-être faire revenir ce témoin avec des projets d'amendements.

Le président: J'estime qu'il nous a donné une assez bonne idée de ce qu'il a en tête.

Le sénateur Ringuette: Le problème du favoritisme bureaucratique n'est pas réglé dans le projet de loi. Les articles 68 et 69 traitent d'influence politique, pour le premier, et de fraude, pour le second.

Ne pensez-vous pas qu'il faudrait adopter un autre article pour traiter des plaintes qui vous sont adressées — à la Commission — sur des cas de favoritisme bureaucratique?

M. Serson: Nous n'avons pas vraiment vu de problème du côté du favoritisme bureaucratique, parce que nous nous sommes dit que le principal oubli de ce texte tient au fait que nous ne pourrons pas vérifier la façon dont les gestionnaires établissent les qualités et les facteurs supplémentaires en question. Je ne veux pas laisser entendre que le problème du favoritisme bureaucratique est très répandu à la fonction publique fédérale, mais quand il se produit, c'est parce que l'on exige certaines qualités afin de favoriser tel ou tel candidat.

Nous sommes réconfortés par le fait que la Chambre ait recommandé un amendement visant à nous conférer un pouvoir de vérification en la matière. Nous pourrons vérifier cela et faire rapport de nos conclusions. Nous pourrons faire des recommandations au sous-ministre. Si nous estimons que le problème est suffisamment grave et qu'il n'a pas été réglé, nous pourrons retirer la délégation de pouvoir au gestionnaire ou au chef d'organisme ou encore au sous- ministre. Cela nous a donc rassuré.

Nous n'allons sûrement pas nous opposer à un supplément de protection, advenant que l'on veuille nous confier un travail d'enquête après-coup.

Le sénateur Ringuette: Je n'ai vu nulle part la recherche d'un équilibre dans ces dispositions relatives à l'influence politique et à la fraude. On a beaucoup parlé de problème de favoritisme bureaucratique au cours des 10 dernières années. On a entendu parler d'un grand nombre d'affaires.

À la page 4 de votre mémoire, vous dites que, nonobstant les priorités accordées à la nomination du personnel des ministres, la CFP devrait avoir le pouvoir discrétionnaire de refuser une nomination quand elle considère que celle-ci risque d'être perçue comme étant contraire à l'impartialité politique de la fonction publique.

Cela étant posé, et étant donné que vous pouvez déléguer votre pouvoir aux administrateurs généraux, lesquels peuvent faire la même chose en déléguant aux gestionnaires, cela revient-il à dire que les gestionnaires devraient être mentionnés dans cette disposition sur la délégation des pouvoirs?

M. Serson: Non, excusez-moi. J'aurais dû être davantage précis dès le début. Nous avons conservé le droit de faire les nominations à l'échelon EX. Je ne dis pas que nous ne déléguons pas une partie de ce pouvoir mais, pour l'instant, c'est nous qui faisons ces nominations et, dans le futur régime, la Commission conservera sans doute le droit d'effectuer des nominations prioritaires pour du personnel politique à ce niveau, car c'est un aspect très délicat.

Le sénateur Ringuette: Quand avez-vous adressé votre première demande au Conseil du Trésor pour obtenir les fonds nécessaires afin d'éliminer le critère de zone de concours? J'ai vu les documents de référence pour l'année 2000. J'ai consulté ceux concernant l'année 2002. Quand cette demande a-t-elle été adressée au ministre?

M. Serson: Je crois que nous avons fait notre première demande en 2000 ou en 2001. Je pense que c'était en 2000, quand le gouvernement a lancé des appels d'offres pour le gouvernement en ligne. Nous avions alors réclamé 37,7 millions de dollars supplémentaires et nous en avons reçu un demi-million à partager avec DRHC.

Le sénateur Callbeck: Je ne suis pas membre régulière de ce comité, mais j'aimerais vous poser une question au sujet de la zone de concours.

À la façon dont je comprends les choses, une personne qui réside dans ma province, l'Île-du-Prince-Édouard, ou dans n'importe quelle autre province d'ailleurs, ne peut postuler un emploi à la fonction publique à Ottawa. Je sais qu'il y a des exceptions, on me dit environ 20 p. 100 des cas.

M. Serson: Vingt-trois.

Le sénateur Callbeck: Donc, on ne peut postuler à 77 p. 100 des emplois offerts à moins de résider dans votre province et de venir vivre ici. À ce moment-là, on peut postuler. Je crois savoir que vous voulez modifier cette disposition pour que tous les Canadiens et toutes les Canadiennes puissent briguer des emplois à Ottawa, peu importe leur lieu de résidence.

Est-ce que je me trompe? Sinon, pouvez-vous me dire dans combien de temps cela se fera? Quel est votre plan?

M. Serson: Vous avez raison de supposer cela, en ce sens que la Commission s'est engagée à mettre un terme à cette question de zone de concours en ce qui concerne les agents. J'aimerais discuter davantage avec les sénateurs et les députés du bien-fondé de l'application de ce changement aux niveaux de commis et de secrétaire. Je me demande si le fait de payer pour le déménagement de ces personnes serait de l'argent bien dépensé.

Nous avons accepté le principe voulant que les Canadiens aient tous le droit de postuler à un emploi à la fonction publique fédérale, quel que soit leur lieu de résidence. Nous essayons d'instaurer une situation où nous allons pouvoir faire face au volume de demandes. Nous avons déposé les résultats de quelques projets pilotes en novembre dernier.

Nous nous sommes engagés à faire rapport sur nos systèmes internes afin que l'on sache comment ils fonctionnent. Nous avons déposé tout cela la semaine dernière ou il y a deux semaines, et nous avons mis les députés et les sénateurs au courant de ce que nous faisions. Si nous obtenons les fonds réclamés — et je vous disais qu'il s'agirait d'une quarantaine de millions sur quatre ans — nous pourrons travailler très fort afin d'en arriver à ouvrir les niveaux d'agent à une zone de concours nationale. Pour cela, nous devrons ensuite appliquer une démarche progressive.

C'est ce que nous avons fait depuis que les députés ont commencé à discuter de cette question. D'abord, nous avons fait en sorte que les postes de cadres supérieurs soient tous ouverts à l'échelon national. Puis, nous avons relocalisé nos propres ressources internes — notre effectif — pour sélectionner les candidats afin de descendre jusqu'aux échelons d'agent; deuxièmement, nous avons retiré deux étapes pour les cadres supérieurs. C'est là où nous en sommes aujourd'hui.

Le sénateur Callbeck: Si je comprends bien, si vous obteniez 40 millions de dollars sur quatre ans, vous pourriez permettre à tous les Canadiens de postuler à un emploi d'agent, où qu'ils résident?

M. Serson: Oui. Je vous ai dit que la Commission s'était engagée à essayer d'y parvenir. Je ne vous garantis pas que nous y arriverons en quatre ans. Ce serait irresponsable de ma part, parce que nous devons composer avec une technologie nouvelle. Nous avons examiné la situation ici et aux États. Il semble que nous allons essayer de faire quelque chose que jamais personne n'a réussi à faire avant nous en Amérique du Nord.

Nous allons nous heurter à des problèmes d'ordre technologique. Nous allons notamment devoir créer les questionnaires dont M. Crête vous a parlé et nous allons devoir investir beaucoup de temps du côté des gestionnaires et des spécialistes des ressources humaines.

La vérificatrice générale et nous-mêmes avons parlé du problème d'effectif auquel nous serons confrontés dans les deux ou trois prochaines années. Nous allons inclure cela dans la nouvelle loi, mais ce projet va prendre beaucoup de temps, parce qu'il faudra non seulement apprendre le processus, mais qu'il faudra aussi aider les gestionnaires à s'ajuster à leurs nouvelles responsabilités accrues en matière de dotation.

Le président: Cela ne cesse de revenir. Le sénateur Comeau et le sénateur Oliver en ont déjà parlé et le président aussi. La Commission de la fonction publique est un organisme parmi d'autres qui devrait avoir des liens plus étroits avec le Parlement, comme la commissaire aux langues officielles, la vérificatrice générale et le commissaire aux droits de la personne.

Je pense qu'un comité du Sénat — peut-être le Comité sénatorial des règles, des procédures et des droits du Parlement — devrait s'intéresser à ces organismes et trouver une façon de resserrer nos liens avec eux. Si appliquions cette démarche, il y a de plus de chances que nous le fassions au niveau du Sénat qu'à celui de la Chambre, pour les raisons auxquelles M. Serson a fait allusion plus tôt, c'est-à-dire au fait qu'à cause de leur charge de travail, les députés n'ont pas le loisir de s'intéresser de façon soutenue à ce genre de dossier. Cependant, je crois que nous pourrions agir ainsi. Je pense que c'est ce que nous allons devoir faire.

Deuxièmement, afin de renforcer l'autonomie des organismes en question, il faut savoir que M. Serson, tout comme la commissaire aux langues officielles et la vérificatrice générale, doit obtenir son budget du gouvernement. Il nous faut trouver une façon différente de régler ce problème de budget. Je pense que nous pourrions appliquer la même procédure que celle nous suivons nous-mêmes — par le truchement du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, quand nous parlons de budget pour le Sénat — ou celle que la Chambre des communes a de son côté.

Cela aura des répercussions sur le plan des compétences dont nous aurons besoin. Il demeure que nous pourrions renforcer l'autonomie de ces organismes si le Parlement prenait leur budget sous son aile afin qu'ils n'aient pas à faire de courbettes. Ce n'est pas une simple question de perception, c'est une réalité.

Le sénateur Day: Je suis d'accord avec notre président et je me réjouis qu'il ait formulé tout cela de façon aussi précise et succincte. Je voulais revenir sur votre recommandation, contenue dans le gros document que vous nous avez fait remettre. Vous citez la vérificatrice générale sur la question du financement dont le président vient juste de parler. La vérificatrice dit que cela ressemble beaucoup au modèle anglais.

Pouvez-vous nous dire au juste ce qu'est ce modèle anglais?

M. Serson: Je devrais en être capable, malheureusement je crains de ne pas pouvoir.

Le sénateur Day: Pourriez-vous nous faire parvenir quelque chose plus tard? Cela nous permettrait de gagner du temps.

M. Serson: Nous pourrons nous renseigner et vous envoyer quelque chose.

Le sénateur Day: Notre comité étudie les budgets des dépenses. Nous n'avons pas pour habitude — mais je ne sais pas si c'est le cas des autres comités sénatoriaux — d'examiner le fonctionnement des entités du gouvernement et de faire des recommandations à leur sujet. Nous revoyons simplement les propositions dont nous sommes saisis afin de déterminer si elles sont justifiées et de leur donner éventuellement notre aval.

Proposez-vous que nous participions directement à un débat avec vous sur vos besoins avant que vous vous adressiez au ministre des Finances?

M. Serson: Ce que veut dire la déclaration du Bureau du vérificateur général, plus particulièrement de l'ex- vérificateur général, M. Desautels, c'est que, à l'heure où nous allons être de plus en plus des chiens de garde — d'après ce que semble indiquer ce projet de loi — nous allons assister à une sorte de tension croissante entre nous-mêmes et le gouvernement quant au degré selon lequel il voudra bien que nous exercions ce rôle de chien de garde en ce qui le concerne.

Cela nous ramène à la question de l'adéquation de nos ressources. Dès lors, il est important de faire valoir le point de vue du Sénat ou de la Chambre des communes sur notre rôle de vérificateur et d'avoir les ressources nécessaires pour ce faire.

Le sénateur Day: Nous devons traiter davantage de la question des ressources et voir si cela répond aux besoins du système parlementaire et à notre processus.

La Commission de la fonction publique donne-t-elle un coup de main au Bureau du vérificateur général pour recruter son personnel?

M. Serson: Non.

Le sénateur Day: Ce n'est pas ce que vous faites dans le cas de la Défense nationale?

M. Serson: Nous le faisons en ce qui concerne les civils.

Le sénateur Day: La Défense nationale, quand elle engage des militaires, applique ses propres règles et ses propres méthodes de recrutement. Est-ce la même chose pour les autres organismes, comme la Commission des droits de la personne?

M. Serson: Ces organismes relèvent de nous.

Le sénateur Day: Pourriez-vous m'envoyer une liste des organismes que vous aidez et de ceux que vous n'aidez pas?

M. Serson: Oui. Il y a des nuances et ce projet de loi en crée davantage encore. Par exemple, quand l'ADRC a été retirée de la portée de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, elle a réclamé la possibilité, pour ses employés, de se présenter à des concours de la fonction publique. La Commission de la fonction publique n'a pas été investie du pouvoir d'établir les normes de l'ADRC, mais elle a reçu le pouvoir d'examiner la façon dont la dotation se fait à l'Agence afin de s'assurer que les procédures sont compatibles avec celles de la fonction publique.

Le sénateur Day: J'ai effectivement remarqué quelque chose à ce propos dans la loi.

M. Serson: Cela s'applique à l'emploi.

Le sénateur Day: Est-ce qu'un organisme comme l'ADRC adopte vos plans et votre méthode pour engager son personnel, je veux parler de la sélection régionale?

M. Serson: Non. Elle a fait preuve d'innovation sur ce plan, ce qui milite en faveur du genre de souplesse accrue que prévoit ce projet de loi.

Le sénateur Day: Ainsi, ces organismes et entités du gouvernement fédéral n'appliquent pas la sélection régionale?

M. Serson: Excusez-moi. Je croyais que vous parliez du système de dotation en général. L'ADRC et les autres organismes fédéraux appliquent un système par zone de concours afin de limiter le volume des candidatures.

Le sénateur Day: C'est la même chose que ce que vous avez fait?

M. Crête: Oui.

Le sénateur Day: C'est le même système ou est-ce que l'ADRC a créé le sien?

M. Crête: C'est le même que celui prévu dans la loi actuelle.

Le président: Par manque de temps, le président n'a pas vraiment pu vous répondre. Je ne vais pas abuser de son temps, mais j'aimerais enchaîner sur la question du sénateur Day. Monsieur Serson, l'annexe 1 du projet de loi constitue les pages 274 à 276 qui sont intitulées «Secteurs de l'administration publique centrale». Cette section mentionne toute une série d'organismes, à commencer, en anglais, par l'Agence de promotion économique du Canada Atlantique — que je pensais être un ministère coiffé par un ministre — jusqu'au Tribunal des anciens combattants. Il s'agit donc des pages 274 à 276. Puis, aux pages 277 à 278, il y a une liste d'organismes distincts qui débute, toujours en anglais, par l'Agence des douanes et du revenu du Canada et qui va jusqu'aux Opérations des enquêtes statistiques, que je ne connais d'ailleurs pas.

Vous pourrez toujours me dire que je n'ai pas suffisamment bien lu le projet de loi et vous aurez raison, mais le fait que nous avons ici deux groupes d'organismes distincts, s'explique-t-il parce que ces groupes sont exemptés de certaines parties du projet de loi?

M. Serson: Je n'en suis pas certain.

Mme Marie-Claude Turgeon, avocate-conseil, Services juridiques, Commission de la fonction publique: Cette annexe a été renumérotée. À l'annexe 1, vous avez tous les ministères ou tous les éléments de l'administration publique centrale pour lesquels l'employeur est le Conseil du Trésor.

Le président: Ainsi, si tous les organismes et tous les ministères étaient énumérés, on trouverait Agriculture Canada, Pêches et Océans et ainsi de suite. Tout le monde y serait. A-t-on simplement énuméré ces organismes pour nous donner une idée de ce dont on parle?

Mme Turgeon: Ce serait très exhaustif comme liste.

M. Serson: Vous feriez mieux de poser cette question au groupe de travail.

Le président: C'est une question qui s'adresse aux rédacteurs du projet de loi.

M. Serson: Effectivement.

Le président: Mais voici la question que je vous pose à vous, j'aimerais que vous puissiez y répondre. Est-ce que ces deux groupes sont exclus de l'application d'une partie ou de toutes les dispositions de ce projet de loi?

Mme Turgeon: Oui. Certains organismes distincts tombent sous le coup de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique et d'autres pas. Ils sont tous investis d'un pouvoir de nomination.

Le président: Je vais terminer par le même sujet. Monsieur Serson, vous devez connaître une étude qui a pour titre «Le Parlement et la gestion des ressources humaines: le rôle de la Commission de la fonction publique en tant que mandataire du Parlement», étude qui a été réalisée pour le Centre canadien de gestion le 14 décembre 2001 par les professeurs C.E.S. Franks et J.E. Hodgetts. Je vais vous en citer un passage:

Pendant plus d'un demi-siècle, le Canada a eu deux fonctions publiques: l'une qui relevait de la Commission et l'autre pas. Ces dernières années, cette division s'est accrue à la faveur du transfert des programmes ministériels à des organismes spéciaux de service et d'autres formes d'essaimage. Les fonctions qui étaient auparavant assumées par la fonction publique ont été transférées à des organismes non ministériels de toutes sortes dont la Société canadienne des postes, NAV Canada, l'Agence d'inspection des aliments et drogues, Parcs Canada et Revenu Canada.

Le sénateur Bolduc et moi-même nous sommes opposés à cela.

Ces 10 dernières années, cela a occasionné une réduction de la taille de l'administration publique centrale qui a perdu près de 100 000 employés. À la fin de 1999, la fonction publique réduite ne comptait plus que 143 000 employés. Plus de 50 000 fonctionnaires avaient été transférés de la fonction publique centrale, pour laquelle le Conseil du Trésor et l'employeur et qui tombe sous le coup de la Commission de la fonction publique, a des employeurs distincts comme l'Agence des douanes et du revenu du Canada.

Je ne veux pas revenir sur tout cela, cependant il est dit ici que les organismes en question — même s'ils ne font pas partie de la fonction publique en vertu de la loi — remplissent tout de même des fonctions gouvernementales essentielles. Ils devraient être soumis aux mêmes normes de gestion des ressources humaines que le reste de l'administration publique centrale, par exemple sur le plan du mérite.

Pour s'assurer que les organismes d'État respectent les normes appropriées d'emploi au gouvernement, la Commission devrait avoir le pouvoir contrôler l'application du principe du mérite par les organismes spéciaux et garantir au Parlement que les pratiques de ces organismes en matière de ressources humaines sont conformes aux normes élevées que nous exigeons de l'administration publique centrale.

Le texte se poursuit, mais je ne veux pas vous le lire en entier.

Monsieur Serson, dans quelle mesure le projet de loi répond-il à cet objectif louable? Voulez-vous réagir de façon générale à propos de ce que dit ce texte sur ce qui s'est passé au sein de l'administration publique centrale ces dernières années?

M. Serson: Je pense que c'est là un élément important qu'il convient de contrôler. Je ne prétendrai pas qu'il faut réappliquer la Loi sur l'emploi dans la fonction publique à ces groupes, ni les règles qui en découlent, parce qu'ils ont établi leur propre régime. Toutefois, j'ai l'impression qu'il conviendrait, pour le Parlement, d'obtenir la garantie que la dotation et le recrutement dans ces organisations se font de la bonne façon.

Le président: Vous-même et la Commission êtes-vous en mesure de nous apporter cette garantie?

M. Serson: Non.

Le président: Pourquoi?

M. Serson: Parce que nous n'avons pas les ressources nécessaires. On ne nous l'a jamais demandé.

Le président: En avez-vous le pouvoir?

M. Serson: Je ne le pense pas.

Le sénateur Oliver: Pouvez-vous effectuer une vérification?

M. Serson: Non.

Le président: Et voilà! Je ne sais pas ce que ce projet de loi va permettre, mais il faudrait faire attention à cela.

M. Serson: Je veux préciser une chose. Vous vouliez savoir si ce projet de loi contient quoi que ce soit qui aille dans ce sens. On y reconnaît, d'une certaine façon, que cet aspect est très important. Comme le projet de loi ouvre la porte à certaines mesures de mutation et de dotation, nous aurons maintenant le pouvoir voulu d'examiner les procédures de dotation et de veiller à ce qu'elles soient conformes à la norme dans le cas d'une organisation désireuse de conclure un accord avec la fonction publique centrale pour que son personnel puisse être intégré à cette dernière.

Le président: C'est une action très indirecte. Ce n'est pas ce dont nous parlons.

M. Serson: Je voulais m'assurer que vous étiez au courant.

Mme Turgeon: Pour ce qui est des activités politiques, par exemple, certains employeurs tombent sous le coup des dispositions de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. C'est principalement le cas de l'ADRC. Vous avez aussi parlé de Parcs Canada. Ces organismes sont visés par la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

Je tiens aussi à mentionner qu'à la partie 8 du projet de loi, à l'article 123, on dit que le Gouverneur en conseil a le pouvoir de prendre des règlements afin que la Loi sur l'emploi dans la fonction publique s'applique en totalité ou en partie aux organisations en question.

Le président: M. Serson a indiqué que ce n'est pas vraiment vers cela que nous devrions nous diriger.

Mme Turgeon: Cela confère davantage de souplesse.

Le président: Vous n'appliqueriez pas de nouveau la LEFP à ces organismes.

M. Serson: Mme Turgeon dit que nous disposerions d'une certaine souplesse si nous agissions par le biais du Gouverneur en conseil.

Le président: Comment allons-nous nous y prendre pour mettre la Commission dans une position où elle sera en mesure d'assumer un rôle de contrôle et de surveillance à propos duquel elle pourra rendre compte au Parlement?

M. Serson: C'est une question très profonde que vous venez de poser, sénateur. Pourrions-nous prendre un peu de temps pour y réfléchir et vous faire parvenir notre réponse par écrit?

Le président: Oui.

Le sénateur Day: Dans votre réponse, monsieur Serson, pourriez-vous parler du nouvel article 11 qui donne mandat à la Commission d'effectuer des enquêtes et des vérifications et qui précise que la Commission devra s'acquitter, vis-à- vis de la fonction publique, de toutes les fonctions qui lui seront confiées par le Gouverneur en conseil, de même que des fonctions de vérification en vertu des articles 17, 18 et 19? Cela ne vous donne-t-il pas le pouvoir dont nous venons juste de parler?

Le sénateur Oliver: Il faudrait bien calculer les coûts de tout cela, parce qu'il faudra revoir le budget.

Le sénateur Day: Il existe toutes sortes de fonctions de vérification et il est possible d'effectuer des vérifications dans des domaines différents. Indiquez-nous où vous fixeriez la limite, en regard de tout ce dont nous venons de parler.

M. Serson: Tout à fait.

Le président: Eh bien, voilà qui a été un excellent début en compagnie du président et de ses collaborateurs.

M. Serson: Monsieur le président, nous avons été très heureux de participer au débat de ce soir. Cela signifie beaucoup pour les fonctionnaires que nous sommes.

Le président: Je puis vous garantir que ce projet de loi et toute la question de la fonction publique et de la Commission intéressent beaucoup le Sénat, comme en témoigne la présence d'un grand nombre de sénateurs ce soir, qui ne sont pas normalement membres du comité mais qui sont venus ici par simple intérêt.

Le sénateur Gauthier: Je tiens à rappeler à quel point il sera nécessaire qu'un comité sénatorial examine certains rapports annuels. Vous n'avez pas parlé des rapports annuels.

Le président: Non.

Le sénateur Gauthier: Warren Allmand, un ancien collègue, a récemment fait un discours lors de la première réunion des ombudsmans. Il a formulé une recommandation très intéressante à cette occasion, c'est-à-dire que le Sénat soit saisi de l'examen des rapports annuels.

Je sais d'expérience que les rapports de la Commission n'ont pas été examinés depuis plusieurs années. Ils ont été déposés et sont tombés dans l'oubli. M. Serson nous a indiqué qu'il n'avait pas été convoqué par le Parlement.

Le président: Nous avons bien commencé et je vous remercie beaucoup de votre participation.

La séance est levée.


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