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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 16 - Témoignages du 15 juin 2005


OTTAWA, le mercredi 15 juin 2005

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, auquel a été renvoyé le projet de loi S- 21, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants), se réunit aujourd'hui à 16 h 20 pour examiner le projet de loi.

Le sénateur Lise Bacon (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Nous examinons aujourd'hui le projet de loi S-21, Loi modifiant le Code criminel au sujet de la protection des enfants. Nous recevons Mme Carole Morency, avocate-conseil, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice du Canada. Je sais que nous vous avons fait attendre la semaine dernière et je m'excuse de vous avoir fait attendre aujourd'hui encore. Nous vous remercions de votre patience, madame Morency. Nous vous écouterons, puis nous vous poserons des questions. Je vous remercie d'être de nouveau avec nous.

Mme Carole Morency, avocate-conseil, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice Canada : Merci, madame la présidente; merci, mesdames et messieurs les sénateurs. C'est avec le même plaisir que j'ai observé vos travaux la semaine dernière et que je suis ici aujourd'hui.

Avec la permission du comité et de la présidente, j'aimerais faire une brève présentation liminaire pour vous donner un aperçu de la question et du contexte de l'article 43 au Canada, plus particulièrement d'un arrêt récent de la Cour suprême du Canada, parce qu'il est vraiment au cœur de toute la discussion dont est saisi le comité. Je m'excuse si je répète certains renseignements que vous avez déjà, mais je me suis dit qu'ils seraient utiles en guise d'aperçu général.

L'article 43 du Code criminel découle du devoir parental de la common law anglaise de prendre soin des enfants, de les protéger et de les éduquer. Ce devoir a été inscrit dans le premier Code criminel en 1892. Dans ce premier Code criminel, c'était l'article 55 et il s'intitulait Discipline des enfants. Son libellé était semblable à ce qu'on trouve aujourd'hui dans le Code criminel. Il se lisait comme suit :

Tout père et mère ou toute personne qui les remplace, tout maître d'école, instituteur ou patron, a le droit d'employer la force, sous forme de correction, contre un enfant, élève ou apprenti confié à ses soins, pourvu que cette force soit raisonnable dans les circonstances.

Cet article a été ensuite modifié en 1954 pour devenir le libellé exact que nous avons aujourd'hui, et son numéro a été changé en 1970, où il est devenu l'article 43. Depuis 1970, l'article 43 a conservé son numéro, donc, il est assez facile de suivre comment la jurisprudence s'est développée pour cet article.

En quoi consiste l'article 43? Je ne vais pas vous le relire. Le comité l'a déjà, mais il y a quelques éléments à souligner sur son fonctionnement. D'abord, l'article 43 est une disposition de défense limitée, pour un groupe limité et défini de personnes : seulement les parents, les enseignants et les personnes qui remplacent les parents. Il ne s'applique qu'à un but, soit la correction. Il n'est valable qu'en des circonstances limitées, c'est-à-dire lorsqu'il est raisonnable dans toutes les circonstances. Sans l'article 43, les parents qui donnent la fessée à un enfant, qui excluent un enfant d'une pièce pour « réfléchir », par exemple, ou qui mettent physiquement un enfant récalcitrant dans un siège d'auto font usage de force sans consentement, ce qui correspond à notre définition de voies de fait au Canada, seraient trouvés coupables de voies de fait.

Comme le comité le sait, l'article 43 a été interprété de diverses façons par les tribunaux au fil des ans, particulièrement en première instance, et toujours dans des affaires criminelles où des accusations étaient portées habituellement, ou le plus souvent, contre un parent ou un enseignant.

L'article 43 a été examiné par la Cour suprême à deux reprises. La première affaire remonte à 1984, il s'agissait de l'affaire Ogg-Moss, qui n'a pas mené à une contestation constitutionnelle de l'article 43. Dans cette affaire, la question posée au tribunal était la suivante : l'article 43 s'applique-t-il aux cas de discipline impliquant un adulte souffrant d'incapacité? Le tribunal a statué qu'il ne s'y appliquait pas.

Plus récemment, et c'est sans doute extrêmement important pour ce comité et pour beaucoup de témoins qui ont déjà comparu ici ou qui vont comparaître, la seconde affaire est celle de la Canadian Foundation for Children, Youth and the Law c. Procureur général du Canada. La Cour suprême a entendu cette affaire en juin 2003 et a rendu son jugement en janvier 2004. Je ne me propose pas de vous décrire cette décision dans mon exposé, mais j'aimerais mettre en relief quelques points importants de cette décision et de cette affaire. Pour commencer, c'était la contestation d'une disposition en vertu de la Charte, qui ne s'inscrivait pas dans le contexte d'une accusation en particulier. Autrement dit, elle découlait de ce qu'on appelle une requête présentée devant la Cour supérieure de justice de l'Ontario. Ainsi, la preuve a été présentée au tribunal, mais il s'agissait d'une preuve par affidavit et d'un contre-interrogatoire sur cette preuve.

À cet égard, je suis au courant de certains témoignages qui ont été présentés la semaine dernière, mais j'aimerais souligner que c'était probablement la première et la seule affaire au Canada, et je dirais même dans le monde, où l'on a rassemblé une aussi grande quantité de preuves sur les questions soumises au tribunal. Si l'on regarde le jugement du tribunal de première instance, on y lit que 25 experts ont fourni des preuves par affidavit et contre-interrogatoire sur le développement de l'enfant, les recherches empiriques en psychologie, la protection de l'enfant, les policiers, le rôle parental, les droits juridiques et de la personne et les éducateurs. Toutes ces preuves ont été présentées au tribunal et ont été vigoureusement évaluées et contestées grâce à un contre-interrogatoire qui a duré quatre mois. Pour la première fois, une immense quantité de preuves a été rassemblée et a fourni une occasion vraiment très intéressante à tous d'examiner l'information la plus récente sur la question, sur la façon dont l'article 43 s'applique, comment il ne fonctionne pas, les dernières preuves en science sociale, et cetera.

Il importe aussi de nous arrêter à l'utilisation du terme « fessée » dans cette affaire. C'est un terme communément utilisé et souvent répété dans les médias, qui a peut-être une signification différente pour beaucoup de gens, mais aux fins de cette affaire, nous avions convenu d'une définition, et c'est que ce qui a influencé tout le processus et a été débattu à toutes les instances devant les tribunaux. Pour cette affaire et cet examen, la définition acceptée par toutes les parties et tous les témoins était l'administration d'une tape de légère à modérée avec une main ouverte sur les fesses ou les extrémités, ce qui ne blesse pas. Il est important de la garder en tête, parce que lorsqu'on analyse des preuves de science sociale, bien souvent on ne fait pas la différence entre ce que nous considérerions tous, j'en suis sûre, comme un comportement violent et le type de conduite protégé dans des circonstances limitées, selon l'interprétation de l'article 43.

Il faut aussi souligner que l'examen du tribunal portait sur la constitutionnalité de la décision du Parlement de délimiter des circonstances dans lesquelles les parents et les enseignants des enfants peuvent recourir à la force légère, à des fins de correction, dans certaines situations, sans s'exposer à des sanctions pénales. Le tribunal ne se demandait pas si la fessée était une bonne ou une mauvaise chose. Devant le tribunal, la question était la suivante : l'article 43 est-il constitutionnel à la lumière de la Charte? La contestation s'inscrivait dans le contexte de l'article 7, qui protège la vie, la liberté et la sécurité de la personne et selon lequel il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale; de l'article 12, qui protège contre tous traitements ou peines cruels et inusités; et enfin, de l'article 15, qui porte sur les droits à l'égalité.

De même, à chaque instance, le tribunal s'est aussi posé la question suivante : l'article 43 est-il conforme aux obligations du Canada en vertu de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant? À chaque instance, la contestation a été rejetée. Je tiens à rappeler quelle était la position du gouvernement dans cette affaire. Elle est toujours restée la même et elle reste la même encore aujourd'hui. Le gouvernement n'admet ni n'autorise l'utilisation de la correction physique, et l'article 43 lui-même n'admet ni n'autorise la violence à l'endroit des enfants. Le type de conduite qui constitue de la violence à l'endroit des enfants est interdit par le Code criminel, et l'article 43, s'il est interprété et appliqué adéquatement, n'excuse pas ce type de conduite.

Le gouvernement fédéral a maintenu, et tous les experts des deux côtés étaient d'accord, qu'il n'était pas dans l'intérêt des enfants ni de la société canadienne de faire appliquer pleinement le droit criminel aux parents qui donnent une légère fessée ne créant pas de blessure à un enfant. Dans ce contexte, le tribunal a donné une série de lignes directrices sur l'interprétation de l'article 43. J'insiste sur le fait que ces lignes directrices reflètent tout à fait le consensus qu'ont atteint les spécialistes des sciences sociales sur la question, dont les preuves ont toutes été présentées aux tribunaux et acceptées à toutes les instances.

La constatation des faits et la conclusion de droit auxquelles est arrivée la Cour suprême font autorité. Le raisonnement justifiant cette décision est parfaitement compréhensible et donne lieu aux lignes directrices mentionnées. Le comité les connaît certainement, et je serai heureuse de répondre à toute question sur le sujet. Encore une fois, à chaque instance, le tribunal a établi que l'article 43 respectait les obligations du Canada en vertu de la convention.

Je vais souligner quelques autres points. Si nous comparons l'article 43 et la réaction du Canada dans ce dossier avec les lois et les réactions d'autres pays, nous devrons faire une comparaison complète des lois. Cette question était entière devant les tribunaux à chaque instance. La comparaison entre l'article 43 et une interdiction de droit civil qui ne porte pas de conséquences pénales ne constitue pas une comparaison complète. Il est injuste de comparer les devoirs et les responsabilités des parents dans le soin de leurs enfants avec les devoirs et les responsabilités des maris et femmes. Les tribunaux ont d'ailleurs mis ces différences en évidence. Également, le Canada protège les enfants à divers égards. Nous avons le Code criminel et les programmes sociaux fédéraux. La preuve en a été présentée aux tribunaux tout le long du processus. À l'échelle provinciale, il existe une loi et des programmes pour protéger les enfants. Ensemble, ils constituent un mécanisme détaillé pour protéger les enfants. Le système de justice pénale et le système de protection de l'enfant fonctionnent indépendamment l'un de l'autre, en fonction d'une norme différente, et dans chaque cas, ils peuvent justifier l'intervention de l'État pour protéger un enfant, pour tenir un parent responsable et bien souvent, particulièrement en vertu du régime de protection de l'enfant, pour contribuer à l'atteinte d'un objectif à plus long terme, celui d'aider la famille afin qu'elle puisse encadrer l'enfant et préserver le rôle des parents.

Le gouvernement continue de prendre des mesures pour éduquer les parents et les aider, afin de leur expliquer les enjeux, pas seulement au sujet de cette affaire, mais aussi afin de trouver des solutions de rechange pour les parents, y compris d'autres méthodes de discipline des enfants. Je reste toute disposée à donner au comité quelques exemples récents à cet égard et à répondre à vos questions.

Le sénateur Mercer : Je vous remercie de comparaître aujourd'hui. Vous avez parlé de la contestation de l'article 43 et de l'arrêt de la Cour suprême. Je serais curieux de savoir combien de fois l'article 43 a été utilisé et si l'opinion de Justice Canada a été appliquée trop souvent ou trop peu. Le projet de loi S-21 atténuera-t-il les problèmes ou les compliquera-t-il?

Mme Morency : Je n'ai pas de nombre d'accusations précis. Cependant, après la décision de la Cour suprême le 30 janvier 2004, nous avons vérifié combien d'affaires avaient été signalées par application de l'article 43 du Code criminel. Nous avons trouvé 12 affaires signalées, dont quatre venaient du Québec et huit, du reste du pays. Certaines sont citées dans les témoignages qui ont été présentés au comité la semaine dernière. Huit de ces affaires impliquaient des parents et quatre, des gardiens d'enfants ou des enseignants.

Si je peux me permettre d'utiliser cet exemple, l'article 43 n'est pas invoqué aussi fréquemment qu'on pourrait le croire. Cela n'aide pas le comité à comprendre combien d'accusations ont été portées ni combien de fois l'article 43 a été contesté sans qu'une décision ne soit publiée. De plus, cela ne nous renseigne pas sur le nombre de cas traités dans le système de protection des enfants.

Dans l'affaire sur l'article 43, des tableaux résumant toutes les affaires examinées à la lumière de l'article 43 au cours des 30 ou 40 dernières années, je crois, ont été présentés. Je n'ai pas réussi à mettre la main dessus avant ma présentation devant votre comité. Le nombre de cas signalés se situait sous la barre des 200, si je me rappelle bien. Les cas sont habituellement signalés au fur et à mesure. Je n'ai pas plus d'informations directes pour vous à ce sujet.

Nous voulons voir comment l'arrêt de la Cour suprême est interprété et appliqué en faisant le suivi de ces cas pour voir à quelle fréquence cet article est utilisé. L'arrêt de la Cour suprême est cité dans bien d'autres affaires que dans celles sur l'article 43, notamment les affaires sur la protection de l'enfant et d'autres poursuites en droit pénal sur certains des principes abordés par la majorité dans cet arrêt, dont la règle des minimes et d'autres aspects du jugement qui sont présentés très en détail. Je ne suis pas certaine d'avoir répondu à toutes vos questions.

Le sénateur Mercer : Oui, mais je risque de compliquer les choses. Lorsque vous dites qu'il y a eu 12 cas depuis le 30 janvier 2004, pourquoi avez-vous précisé que quatre d'entre eux venaient du Québec? Est-ce une indication que le problème est plus marqué au Québec? Je ne l'aurais pas cru.

Mme Morency : Non. D'après les preuves qui ont été présentées, y compris celles présentées par le sénateur Hervieux-Payette, et d'après certains sondages sur les comportements des parents au pays, nous savons que les parents du Québec sont moins portés que d'autres à utiliser la fessée ou d'autres formes de punition physique. Je m'attendrais à constater moins de cas au Québec, bien que cela n'ait rien de scientifique. Je dirais que cela arrive partout. Le problème n'est pas exclusif à une partie du pays. Je m'attendais à ce que les sondages sur les attitudes d'un bout à l'autre du pays montrent que dans certaines régions, la réaction à la question est différente, et c'est ce que j'ai compris.

Le sénateur Mercer : J'ai vu des chiffres qui laissent entendre que cette méthode de discipline n'est pas utilisée aussi souvent au Québec qu'ailleurs.

Nous avons parlé de 12 cas depuis le 30 janvier 2004, après la décision de la Cour suprême. Sur ces 12 cas, combien ont mené à des déclarations de culpabilité?

Mme Morency : Je ne les ai pas comptés de cette façon, parce qu'une déclaration de culpabilité ou un acquittement ne nous renseigne pas toujours sur la façon dont l'article 43 fonctionne. Je pourrais transmettre l'information au comité par écrit.

Le sénateur Mercer : C'est très bien, parce que cela mène à un facteur de complication. Nous parlons ici de 12 cas. Vous vous êtes demandée plus tôt combien de cas ont pu être traités par les organismes de protection de l'enfant et les autres dans les différentes régions du pays et avez mentionné que ces cas ne paraissent pas dans les statistiques de ces 12 affaires. Pour ces autres cas, aucune accusation n'a été portée, mais les policiers ou des sociétés d'aide aux enfants sont intervenus. Je trouve tout cela difficile de mon côté de la table. Je sais comment je vais voter sur ce projet de loi, mais je préférerais de loin qu'il y ait des statistiques pour me dire combien d'interventions il y a eu. Des gens sont venus ici nous raconter des histoires horribles où la police a été appelée parce que des enfants étaient victimes de violence et où la police est repartie sans rien faire. C'est la difficulté avec les services de police et l'interaction entre les organismes de protection de l'enfant et les familles, mais nous avons besoin de statistiques pour vérifier si ce que nous allons faire va fonctionner. Quelqu'un quelque part va devoir commencer à faire le compte des résultats.

Notre motif premier est de protéger les enfants, de nous assurer que leurs droits sont protégés et que leur sécurité l'est aussi. Je ne sais pas comment c'est réglé. Comment pouvons-nous inciter tous les organismes, les gouvernements et les services de police qui offrent des services aux Canadiens à prendre note des résultats pour que si nous réexaminons cet examen dans l'avenir, nous puissions nous demander quelles sont les statistiques depuis l'adoption du projet de loi S-21, s'il est adopté, et les analyser.

Supposons aussi que le projet de loi S-21 ne soit pas adopté, bien que j'espère de tout cœur qu'il le soit. Il serait important d'avoir des statistiques pour appuyer les arguments en faveur d'une version future du projet de loi S-21. Comment pouvons-nous faire en sorte que les intervenants prennent note des chiffres? Ce n'est pas une critique à votre endroit; vous m'avez donné les chiffres que vous avez. Je pense que le système devrait être en mesure de nous donner plus de statistiques pour nous dire combien d'appels les services de police ont reçus, combien d'interactions il y a eu avec les organismes de protection de l'enfant et combien de mesures correctives ont été prises, ainsi que leur degré de sévérité. Nous savons que les mesures correctives peuvent se situer n'importe où entre la mise en accusation des parents ou des gardiens, le retrait de l'enfant de son foyer, de sa garderie, d'une école ou d'ailleurs et une simple mesure de sensibilisation du parent ou de l'enfant sur ce qui se passe.

Mme Morency : Premièrement, les 12 cas dont j'ai parlé font partie de la jurisprudence concernant l'article 43 du Code criminel. Disposons-nous de statistiques à propos du nombre d'enfants qui sont victimes de mauvais traitements et des personnes qui infligent ces mauvais traitements? Oui, nous en avons. Statistique Canada publie des données à ce sujet annuellement. Un autre recueil dont nous disposons est le Rapport sur la violence familiale, qui est publié en juin ou juillet de chaque année. Il contient des données de référence qui pourraient servir à effectuer tout type de suivi à partir d'une certaine période. Ce rapport est préparé en vue d'appuyer l'Initiative de lutte contre la violence familiale du gouvernement fédéral. Il fait état, par exemple, du nombre d'enfants qui sont victimes de violence physique et sexuelle, en particulier par leurs parents, des membres de la famille ou des personnes qui sont proches de ces enfants. Est-ce que ce rapport présente un tableau complet de la situation à l'échelle du pays? Non, car le rapport est fondé sur la Déclaration uniforme de la criminalité, qui est, je crois, établie à environ 90 p. 100 à partir des rapports fournis par les services de police sur les infractions figurant dans le Code criminel, ainsi que sur l'Enquête sur les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes. Le rapport permet de connaître qui est le contrevenant, qui est la victime et quel est le lien qui existe entre eux; alors ces renseignements sont facilement accessibles.

Quant aux répercussions de l'article 43 sur les pratiques policières, la preuve à cet égard a été présentée par le gouvernement dans le cadre de l'affaire concernant l'article 43. La preuve a été présentée par voie d'un affidavit par un policier du service de police de Toronto chargé d'enseigner aux agents de police de la région de Toronto comment traiter les cas d'enfants victimes de mauvais traitements. Dans la preuve qu'il a présentée, il a déclaré que l'article 43 n'empêchait aucunement les policiers de traiter les allégations de mauvais traitements — l'enquête et les mises en accusation, le cas échéant.

Est-ce que des situations comme celles qu'a décrites Cheryl Milne pourraient se produire, à savoir le cas de la jeune fille qui s'est adressée à elle pour obtenir des conseils? Je crois que tout est possible, mais je ne peux pas parler de ce cas en particulier.

Il incomberait aux gouvernements provinciaux de vérifier comment les cas sont suivis. Il se peut qu'ils possèdent des statistiques à propos des interventions effectuées en vue de protéger l'enfant, qui peuvent avoir lieu indépendamment de la réponse du système de justice pénale. À l'échelon fédéral, une seule étude canadienne sur l'incidence des signalements a été publiée il y a quelques années, et la prochaine version sera diffusée à l'automne. Elle porte sur les signalements des cas d'enfants victimes de mauvais traitements. Je crois que le gouvernement a accès à des statistiques produites à différents échelons et dont il peut se servir pour vérifier comment les changements législatifs seront favorables aux enfants, qu'il s'agisse des changements découlant de la décision rendue par la Cour suprême du Canada ou découlant de ce projet de loi.

Le sénateur Joyal : Je ne sais pas si je devrais dire cela, mais, pendant que j'écoutais le témoin répondre aux questions du sénateur Mercer, j'avais en tête la célèbre histoire d'Aurore, l'enfant martyre, histoire qui sera bientôt portée au grand écran au Québec. Ce long métrage aura probablement des répercussions sur la façon dont les gens réagissent à l'utilisation de la force comme méthode de correction.

J'ai de nombreuses questions à poser. Premièrement, savez-vous si la Commission de réforme du droit a recommandé la modification ou la suppression de l'article 43 du Code criminel dans l'un ou l'autre de ses rapports? Je veux que vous répondiez à cette question aux fins du compte rendu.

Mme Morency : Oui, la Commission de réforme du droit a examiné la question, et la majorité de ses membres a recommandé que l'article 43 soit maintenu. Un seul membre a recommandé qu'il soit abrogé.

Le sénateur Joyal : C'était en quelle année?

Mme Morency : C'était en 1970, je crois.

La présidente : J'ai cette information sous les yeux; c'était en 1984.

Le sénateur Joyal : C'était il y a vingt ans. Deuxièmement, j'aimerais revenir à une question d'ordre philosophique. La conclusion à laquelle la Cour suprême est parvenue dans l'affaire Suresh, qui remonte à trois ans seulement, ne semble pas être définitive. Ce matin, j'ai lu les propos de l'ancienne juge Arbour, qui trouve malheureux que la Cour suprême ait autorisé la torture dans certaines circonstances particulières lorsqu'un immigrant est renvoyé dans son pays d'origine. Quand j'ai lu cela, je me suis dit que la Canadian Foundation for Children avait peut-être également fait une erreur.

Même si nous assumons que la Cour suprême n'a pas commis une erreur quand elle a conclu, dans un jugement majoritaire à six contre trois, qu'il ne s'agissait pas d'une violation de la Charte, ce qui a attiré mon attention, c'est l'argument qui a été présenté ici même, à savoir que, puisque nous n'acceptons pas l'usage de la force contre les femmes ou les personnes âgées, nous ne devrions pas accepter l'usage de la force contre les enfants, car ils sont eux aussi vulnérables. Dans ce contexte, il existe une définition logique de ce que j'appelle l'intégrité humaine qui pourrait justifier la suppression de l'article 43.

Cependant, comme je vous l'ai expliqué, et comme vous l'avez souligné vous-même, la Cour suprême a conclu que l'interprétation de la Charte depuis 2003 — c'est-à-dire la façon dont la Cour a interprété la législation canadienne et l'obligation internationale du Canada — ne va à l'encontre d'aucune obligation constitutionnelle ou internationale du Canada. Si tel est le cas, il doit bien y avoir des valeurs dans notre société qui font que nous n'acceptons pas l'usage de la force contre un être humain.

Quelle est votre réponse à cette question? Vous travaillez à la Section de la politique en matière de droit pénal; et il s'agit là d'une question de politique.

Mme Morency : Je suis aussi responsable des questions de violence conjugale, alors je suis bien renseignée à ce sujet. Je comprends qu'on cherche à établir des analogies.

Comme je l'ai dit lors de mon exposé, et comme l'ont constaté la Cour suprême et les tribunaux de toutes les instances inférieures, la relation qui existe entre les enfants et les parents est différente d'autres relations à plusieurs égards. Les parents ont la responsabilité de subvenir aux besoins de leurs enfants, de les soutenir, de leur donner de l'affection et de veiller à leur éducation. Cependant, en raison de leurs capacités, les enfants sont vulnérables et dépendent des autres. Ce qu'on a fait valoir devant la Cour dans le cadre de l'affaire concernant l'article 43, c'est que, à mesure que les capacités de l'enfant se développent et qu'il vieillit, la façon dont les parents s'acquittent de leurs responsabilités évolue. La relation change. Je crois que tout le monde comprend cela. C'est pourquoi les lignes directrices tiennent compte des différentes approches adoptées selon l'âge de l'enfant et de sa capacité à comprendre la méthode de correction utilisée et à en tirer des leçons.

La relation qui existe entre les enfants et les parents est particulière et elle est différente de la relation qui existe entre deux conjoints. Ce n'est pas le même genre de relation. Par exemple, en tant que parent, il se peut que j'aie à asseoir mon enfant dans son siège d'auto contre son gré. Je n'ai jamais à faire cela avec mon conjoint, mais je dois le faire avec mon enfant. Il se peut que mon enfant ne veuille pas revenir à la maison, mais je dois l'emmener pour son bien et sa propre sécurité.

Cela met en lumière la définition actuelle du terme « voies de fait » en droit pénal canadien, qui est similaire à celle qui prévaut au Royaume-Uni, laquelle tire aussi son origine de la common law. Il s'agit d'une définition très large. Les voies de fait se définissent comme toute application non consensuelle de la force. Techniquement, toucher une personne constitue une voie de fait. Dans le cas d'un enfant, je dois le toucher régulièrement. Premièrement, pour en prendre soin et, deuxièmement, pour lui donner de l'affection. À l'heure actuelle, l'article 43 prévoit une sphère très étroite. La décision rendue par la Cour suprême a considérablement clarifié et restreint l'interprétation de l'article 43.

Quant à savoir si la Cour a commis une erreur, je dois dire qu'il est vrai que six juges, donc la majorité, se sont prononcés en faveur du maintien de l'article 43. Bien qu'il ait suivi un processus différent d'interprétation, le juge Binnie en est arrivé à la même conclusion que la majorité.

La Cour suprême a rendu une décision à la majorité de sept contre deux. Je ne veux pas avancer quoi que ce soit à ce sujet. Les deux juges qui ont rendu un jugement différent de celui de la majorité ont suivi un processus d'interprétation différent. Je peux vous renvoyer à la décision rendue par Mme la juge Arbour. Elle souligne — je le répète, je ne tente pas de lui attribuer quoi que ce soit; je ne fais que lire la décision — la différence qui existe entre son approche et celle de la juge en chef en ce qui a trait à l'interprétation de la décision. Cela se trouve tout près du début du paragraphe 135 de la version anglaise du jugement rendu par Mme la juge Arbour. Elle reconnaît que l'approche qu'elle a employée pour interpréter l'article diffère de celle utilisée par la juge en chef. Au milieu du paragraphe, il est écrit ceci : « Affirmer, comme le fait la juge en chef, que le moyen de défense ne peut être opposé à une accusation plus grave que celle de voies de fait simples, que la disposition en cause ne saurait justifier l'emploi de la force pour corriger un enfant de moins de deux ans ou un adolescent et que l'emploi de la force comportant l'utilisation d'un objet n'est jamais raisonnable constitue un effort louable pour donner à la règle de droit en cause la signification qu'elle devrait avoir. »

Ce passage confirme avec certitude qu'elle a interprété l'article différemment. Je ne sais pas si cela laisse entendre qu'elle approuve dans une certaine mesure la conclusion, mais l'important, c'est que le jugement majoritaire à sept contre deux reflète une compréhension de la définition du terme « voies de fait » ainsi que de l'interaction qui existe entre un parent et un enfant; des responsabilités des parents et de la preuve qui a été présentée aux tribunaux de toutes les instances.

Le sénateur Joyal : D'un autre côté, si vous finissez de lire le paragraphe, vous verrez qu'il est écrit ceci : « Cependant, l'article 43 ne pourra recevoir une telle interprétation que si, dans son état actuel, il viole la Constitution et si, pour cette raison, une restriction de sa portée s'impose. En l'absence de telles contraintes constitutionnelles, le rôle des tribunaux ne consiste pas et n'a jamais consisté à élargir le champ de la responsabilité criminelle en limitant le recours aux moyens de défense prévus par le législateur. » En fait, le rôle des tribunaux est précisément le contraire.

Si le projet de loi n'est pas adopté, le moindre que nous puissions faire, c'est modifier l'article 43 en fonction non pas des lignes directrices, mais bien de l'interprétation; c'est ce qu'a dit la juge Arbour. Elle affirme qu'il existe des limites intrinsèques, mais que, si ces limites ne sont pas énoncées clairement, le Parlement devra modifier la loi. Bien que j'approuve entièrement les lignes directrices proposées par la Cour suprême visant les enfants de moins de 12 ans et les adolescents, qui interdisent de lancer des objets à la tête d'un enfant et qui prévoient un usage restreint de la force à des fins d'éducation, un usage de la force qui ne vise pas à faire mal à l'enfant ni à l'avilir et un usage de la force ayant un effet transitoire et insignifiant, il demeure que la force peut être utilisée. Cependant, on ne parle pas de la fessée.

Je conviens avec vous qu'une fessée — je ne sais pas quel mot vous avez employé — consiste en une petite tape. Cela ne me pose aucun problème, mais ce n'est pas ce sur quoi porte l'article. L'article 43 ne parle pas de la fessée; il parle de l'usage de la force. La force et la fessée sont deux choses distinctes. Si on veut limiter la force à la fessée, alors il faudrait l'énoncer à l'article 43.

J'estime que la Cour suprême a eu raison et tort à la fois, si l'article 43 demeure tel qu'il est. Comme l'un des témoins l'a dit : « Si nous devons prendre une décision, quelle sera-t-elle? » À mon avis, l'article 43, tel qu'il est rédigé en ce moment, n'envoie pas le bon message aux parents, car il reste inchangé. Comme vous l'avez dit vous-même, les décisions des tribunaux font état de tellement de restrictions que je suis tenté de proposer qu'on reformule l'article 43, à tout le moins. C'est le moindre que nous puissions faire. Ce n'est pas ce que semble vouloir le gouvernement, alors nous serons critiqués quoi que nous fassions. Nous sommes dans cette situation.

Certains de mes collègues sont d'avis que nous devrions abroger l'article 43, et ils ont fait valoir de bonnes raisons à cet égard. Cependant, j'ai de toutes aussi bonnes raisons pour penser que, si nous maintenons un moyen de défense dans le Code criminel à l'intention des parents qui donnent la fessée à leurs enfants, les limites devraient être énoncées très clairement de sorte que le processus de décision soit le même qui soit appliqué à l'échelle du pays.

La Cour suprême semble avoir exclu les instituteurs dans son interprétation de l'article 43. Ce qui signifie qu'il existe des catégories de personnes qui ne sont pas autorisées à utiliser le moyen de défense qu'est l'article 43.

Plutôt que de plaider en faveur du maintien de l'article 43, si nous voulons abonder dans le même sens que la majorité des juges, ne devrions-nous pas tenir compte de ce que la Cour a fait valoir dans son interprétation de l'article 43? Les parents ne consulteront pas le paragraphe 265 de la décision pour déterminer jusqu'où ils peuvent aller. Ce n'est pas réaliste de penser qu'ils le feront. Tous ceux qui sont responsables de l'application de la loi devraient connaître les limites.

Au départ, contrairement à mes collègues, je n'étais pas tout à fait en faveur du projet de loi, mais maintenant je tente de déterminer s'il s'agit de la bonne ou de la mauvaise chose à faire. Je ne crois pas que nous avons suffisamment de preuves qui nous permettent de croire que, si nous laissons les choses telles qu'elles sont, il y aura une amélioration sur le plan de la façon dont les parents envisagent l'utilisation de la force contre leurs enfants.

Mme Morency : Je conviens que les parents ne consulteront pas à tout moment un jugement de 335 pages ni le Code criminel pour déterminer les répercussions de diverses actions. L'une des options qui s'offrent au comité est de codifier la décision de la Cour suprême. Le Code criminel est interprété par les tribunaux. Les interprétations qui ont été faites de la loi et de la common law constituent la jurisprudence. La jurisprudence qui a été établie jusqu'à la décision rendue par la Cour suprême était fondée sur le type de conduite que la plupart des gens considèrent raisonnable. Bien sûr, il y a eu des exceptions, et la Cour suprême en a parlé. Bien qu'il n'y ait pas eu d'appel, et certaines décisions auraient peut- être été différentes aujourd'hui, dans la majorité des cas, la Cour suprême a suivi ces principes.

La décision rendue par la Cour suprême apporte des éclaircissements. Le comité devrait opter pour une formulation plus précise dans le Code. Cependant, il est courant que des interprétations du Code criminel contribuent à accroître notre compréhension de la façon dont le droit fonctionne.

Au cours de l'évolution de la jurisprudence, des cas problématiques qui semblent insensés aux yeux de nombreuses personnes sont survenus. En général, toutefois, les parents se comportent comme ils le devraient. Ils aiment leurs enfants et en prennent soin, et nous ne sommes pas confrontés à une montagne d'affaires liées à l'article 43. Il y en a, quoique nous aimerions qu'il n'y en ait aucune.

Le sénateur Joyal : On nous a dit que, dans son dernier rapport, le Comité des droits de l'homme des Nations Unies demande encore une fois au Canada de modifier l'article 43 du Code criminel pour qu'il puisse respecter son obligation en vertu de la Convention relative aux droits de l'enfant. On nous a dit que le ministère de la Justice a pris connaissance du rapport uniquement lorsque l'affaire a été présentée à la Cour et que, par conséquent, la Cour suprême n'a pas interprété correctement la Convention relative aux droits de l'enfant.

De nombreux pays ont modifié leurs lois pénales pour tenir compte de l'esprit de cette convention. Que pensez-vous de l'évaluation de la Cour suprême à l'égard de l'obligation du Canada en vertu de la Convention relative aux droits de l'enfant?

Mme Morency : Il est vrai que le Comité des droits des enfants des Nations Unies a publié ses dernières observations au sujet du respect des obligations du Canada en vertu de la Convention en 2003, à la suite de l'affaire dont a été saisie la Cour suprême en juin de cette année-là. Cependant, la juge Arbour a cité ces observations dans son opinion divergente; ce qui signifie qu'elles ont été étudiées par la Cour. Même si ces observations n'ont pas été officiellement étudiées par la Cour, la recommandation formulée par le Comité des Nations Unies était similaire à celle qu'il avait déjà formulée dans le cadre de la première ronde d'observations, qui avaient été officiellement étudiées par la Cour.

Par conséquent, les tribunaux de toutes les instances ont été saisis de ces observations et ils les ont pris en considération. À toutes les instances, les tribunaux se sont aussi penchés sur les obligations du Canada en vertu de la Convention et ils ont tous déterminé que la Convention n'exige pas de façon explicite qu'un pays interdise toute forme de châtiment corporel, quoiqu'il doive veiller à protéger les enfants.

L'article 19 oblige tous les pays signataires à prendre toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives qui s'imposent pour protéger les enfants contre toute forme de violence physique ou psychologique, de blessure, de mauvais traitement ou de négligence. Les tribunaux ont reconnu cette obligation, mais ils ne l'ont pas considérée comme une exigence explicite d'interdire le châtiment corporel ni comme une contrainte à l'égard de la façon dont un pays peut respecter ses obligations. Autrement dit, un pays peut veiller à prévenir les mauvais traitements et la négligence par l'entremise d'un certain nombre de mesures. Il ne doit pas nécessairement s'agir de mesures relatives au droit pénal ou au droit civil; il peut s'agir de programmes visant à soutenir les enfants et les parents.

Les tribunaux, à chaque palier, ont examiné la façon dont d'autres pays ont traité la question. Parmi les pays qui ont interdit le châtiment corporel ou la fessée, aucun n'a eu recours au droit pénal. Certains pays ont décrété des interdictions en vertu du droit civil ou du droit familial, mais leur violation n'entraîne aucune conséquence criminelle.

Par ailleurs, les lois pénales en vigueur dans d'autres pays utilisent une définition beaucoup plus restreinte du terme agression, définition qui englobe habituellement les dommages ou les préjudices corporels. Ce n'est pas le cas au Canada.

Le sénateur Joyal : Êtes-vous en train de dire que l'existence d'un moyen de défense limité au criminel permettrait de mieux protéger les enfants qu'une interdiction décrétée en vertu du droit civil

Mme Morency : La solution proposée par certains groupes, soit l'abrogation de l'article 43 pour mieux protéger l'intérêt de l'enfant, n'aboutira pas nécessairement à ce résultat. Tous les experts en sciences sociales, dans un sens comme dans l'autre, s'entendent pour dire que le type de conduite visé par l'article 43, selon l'interprétation qui lui est donné, se limite à la fessée ou à une tape sur la main, comme le précisent les lignes directrices en vigueur. Tous les experts s'accordent pour dire que les poursuites au pénal, dans ce cas-là, ne servent pas l'intérêt de l'enfant. Nous pouvons vous décrire, exemples à l'appui, les conséquences qu'entraînent les poursuites. Dans certains cas, elles s'avèrent néfastes non seulement pour l'enfant, mais également pour l'unité familiale. L'enfant souffre par ricochet pendant tout le processus.

Ce qui complique les choses, c'est que la Convention relative aux droits de l'enfant prévoit toute une série de droits pour l'enfant. L'intérêt supérieur de l'enfant constitue la considération primordiale, mais tous les autres droits sont pertinents. Offrir à un enfant un milieu familial stimulant et aider les parents pour qu'ils puissent assumer leurs responsabilités pour ce qui est d'élever les enfants, les éduquer, s'occuper d'eux, en font tous partie. Si l'on considère chacun de ces droits isolément et non pas dans un contexte plus vaste, on pourra difficilement arriver à servir, promouvoir ou protéger l'intérêt supérieur de l'enfant, surtout si l'on tient compte du fait que, d'après les éléments de preuve présentés au tribunal, cette approche limitée ne sert pas l'intérêt de l'enfant.

Pouvons-nous faire plus pour protéger les enfants? Bien entendu. J'ai fait allusion à certaines activités éducatives que nous appuyons. Devrions-nous faire plus? Absolument. Parfois, c'est le choix de l'instrument qui compte.

Le comité sait sans doute que la Commission de réforme du droit a entrepris une étude intitulée « Qu'est-ce qu'un crime? », qui consiste à examiner la façon dont la société devrait réglementer le comportement et par quels moyens. Il y a, bien sûr, le droit pénal, sauf qu'il ne constitue nécessairement l'unique solution ou celle qui est jugée la plus efficace. D'après les éléments de preuve présentés aux tribunaux à tous les paliers, l'éducation est considérée comme l'outil ou l'instrument qui s'avère le plus efficace pour arriver au type de comportement que nous souhaitons tous voir devenir réalité, soit la disparition de la fessée.

La présidente : J'aimerais revenir à ce que le sénateur Joyal a dit. Dans le paragraphe 62 du rapport de 2003, le comité invite le Canada à soumettre ses troisième et quatrième rapports d'étape d'ici le 11 janvier 2009. Si nous nous fions aux deux rapports antérieurs que le Canada a présentés au Comité des droits de l'enfant, nous pouvons conclure que, si aucune modification n'est apportée à l'article 43 du Code criminel, les Nations Unies vont, pour la troisième fois, dénoncer l'attitude du Canada pour ce qui est des châtiments corporels infligés aux enfants. Est-ce là une possibilité?

Mme Morency : Tout est possible. Quand nous avons comparu devant le comité à l'automne 2003, ils savaient que la décision était en attente. Ils connaissaient la position du gouvernement. Ils étaient au courant des efforts déployés aux paliers fédéral, provincial et territorial : mentionnons les mesures de protection de l'enfant, les programmes d'éducation, les programmes sociaux. Ils étaient conscients de tout cela. En fait, ils ont souvent félicité le Canada pour le leadership dont il fait preuve à ce chapitre.

Est-ce possible? Je le pense, compte tenu de la façon dont ils interprètent la convention. Encore une fois, le comité établi en vertu de la Convention relative aux droits de l'enfant est un organisme de surveillance. Il soulève des questions. Il cerne les problèmes, il fait des recommandations, il propose des solutions.

La décision de la Cour Suprême a fourni beaucoup d'éléments d'orientation et clarifié grandement les choses. Nous espérons être en mesure d'aller de l'avant et de laisser la loi suivre son cours. Quand vous apportez des modifications à une loi ou des changements par suite d'une décision de la Cour suprême, il faut du temps pour se familiariser avec ceux- ci. Nous essayons de faire passer le message.

Le ministère de la Justice collabore de près avec Santé Canada pour renseigner les parents, et pas seulement depuis la décision. Nous essayons depuis les années 90 de proposer aux parents des techniques parentales plus efficace : ne faites pas telle ou telle chose. Nous pouvons essayer d'en faire plus. Il n'existe pas de solution unique ou particulière dans ce cas-ci

La Suède, par exemple, a adopté une définition plus restreinte du terme agression et a également décrété une interdiction en vertu du droit civil qui est en vigueur depuis 1979. Or, malgré ces mesures, l'initiative qui a eu le plus d'impact sur les parents, et dont l'objectif était de les encourager à renoncer au recours à la force pour réprimander les enfants, a été la campagne de sensibilisation qu'a lancé le pays. Les chiffres compilés par Statistiques Suède ont été utilisés comme élément de preuve devant les tribunaux. D'après les données recueillies peu de temps après l'entrée en vigueur de l'interdiction décrétée en vertu du droit civil, la Suède n'a pas atteint l'objectif visé, qui était d'interdire la fessée, de réduire le nombre d'enfants victimes d'agression, de permettre aux enfants d'obtenir de meilleurs résultats à long terme du fait qu'ils ne sont plus disciplinés physiquement. En fait, dans les cinq années qui ont suivi, c'est tout le contraire qui s'est produit. Le nombre d'agressions a augmenté, surtout entre les jeunes et leurs pairs.

Que devons-nous conclure? Nous essayons de tirer des leçons des expériences des autres pays. Nous essayons de prendre au sérieux les opinions formulées par la communauté internationale, y compris le Comité des droits de l'enfant des Nations Unies. Nous essayons d'aborder le problème en tenant compte de notre contexte, de notre cadre constitutionnel, du partage des pouvoirs qui existe au Canada. Que pouvons-nous faire de concert avec nos homologues provinciaux pour régler la question? Il y a plusieurs choses que nous pouvons faire et que nous continuons de faire. Au nombre de celles-ci figure la campagne d'information menée à l'échelle internationale et nationale, qui semble être l'instrument de choix le plus efficace.

Le sénateur Joyal : J'interviendrai lors du second tour. Je ne veux pas monopoliser tout le temps de parole.

[Français]

Le sénateur Ringuette : Vous faites partie de la Section de la politique en matière de droit pénal. Est-ce que c'est la même section du ministère de la Justice qui a produit à maintes reprises le projet de loi sur la cruauté envers les animaux?

Mme Morency : Oui, mais ce n'est pas moi.

Le sénateur Ringuette : J'essaie juste d'essayer de comprendre l'organisation.

Le sénateur Joyal : La cruauté envers les animaux et les amendements au Code pénal.

Mme Morency : Je fais partie de la section et aussi de la section de la famille, enfants et adolescents. Je travaille dans les deux sections.

Le sénateur Ringuette : J'ai un peu de difficulté compte tenu de ce que vous venez de dire, sachant ce que, à maintes reprises, vos collègues de section ont essayé de nous faire accepter sur la cruauté envers les animaux. La section utilise exactement les mêmes mots.

[Traduction]

Vous dites que le libellé est le même que celui qui existait lorsque la loi est entrée en vigueur en 1954. Autrement dit, l'article 43 n'a pas été modifié depuis 51 ans. Or, la société a énormément évolué au cours de cette période. Vous avez parlé de ce que fait la Suède, de l'interdiction qu'elle a décrétée en vertu du droit civil. Au Canada, le droit civil relève de la compétence des provinces. Le libellé de l'article 43 n'a pas été modifié depuis 51 ans. Le ministère de la Justice espère que les provinces vont décréter une interdiction et, partant, le décharger de ses obligations internationales.

Mme Morency : C'est faux. Ce n'est pas ce que cherche le ministère. Comme nous l'avons indiqué aux tribunaux, la réponse du Canada n'a rien de singulier parce que nous avons des lois fédérales et des programmes fédéraux, des lois provinciales et des programmes provinciaux, pour mieux protéger les enfants. Aux termes des lois relatives à la protection de l'enfant qui sont en vigueur dans les provinces, lois qui ne relèvent pas du droit pénal, l'État peut intervenir pour protéger un enfant, si besoin est. La preuve doit être établie en fonction de la prépondérance des probabilités en droit civil. La protection de l'enfant est la considération primordiale. Ce n'est pas une norme qui relève du droit pénal, sauf que le droit pénal peut être invoqué si nécessaire.

La décision de la Cour suprême a eu pour effet de définir, de restreindre et de clarifier l'interprétation et l'application de l'article 43. Il est vrai que l'article n'a pas été modifié. Le fait qu'il est demeuré inchangé depuis son entrée en vigueur n'a pas empêché les parents au Canada de modifier leurs habitudes.

Les pratiques parentales ont beaucoup changé. Bien qu'il n'y ait eu aucune réforme législative de l'article 43 du Code criminel, la majorité des parents au Canada ne donnent pas de fessée à leurs enfants.

Le sénateur Ringuette : Vous laissez entendre que le libellé adopté en 1954 a servi de norme à la société canadienne. D'après les statistiques, les mauvais traitements infligés aux enfants par les parents étaient sans doute beaucoup plus fréquents à l'époque. N'êtes-vous pas d'accord?

Mme Morency : C'est ce que nous croyons comprendre.

Le sénateur Ringuette : En 1954, le libellé a servi de norme relativement aux mauvais traitements infligés aux enfants. Cet article existe depuis 50 ans. Devons-nous reformuler l'article 43 et ainsi établir une nouvelle norme pour les 50 années à venir?

Mme Morency : Encore une fois, le libellé de l'article 43 peut refléter les changements observés dans les pratiques parentales qui sont jugées raisonnables dans toutes les circonstances. Le comité peut choisir d'adopter une approche différente, mais si vous voulez que je vous explique comment les parents ont pu changer leurs pratiques alors qu'aucune modification législative...

Le sénateur Ringuette : Je ne suis pas d'accord. Vous avez dit que le libellé est le même depuis 50 ans. Aujourd'hui, plus de la majorité des parents canadiens se conforment à l'article. Vous avez convenu avec moi que ce n'était pas le cas en 1954. Il y a eu une évolution sociale par suite de l'adoption de la loi en 1954. Les parents, grâce à des programmes d'éducation, se sont progressivement conformés à la nouvelle norme. Croyez-vous que nous devons maintenant établir une nouvelle norme pour tenir compte des modalités de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, convention que nous avons entérinée?

Mme Morency : Je tiens à préciser que la loi n'a pas été modifiée en 1954. L'article 43 est demeuré pratiquement inchangé depuis sa codification, en 1892. Le chiffre a changé et quelques modifications d'ordre rédactionnel ont été apportées, mais l'effet est le même. Le libellé de l'article 43 est, grosso modo, le même. Le principe introduit dans l'article 43, d'après l'interprétation que lui en donnent la majorité des juges de la Cour suprême du Canada, indique, confirme et démontre que la norme de « mesure raisonnable dans les circonstances » est claire et bien définie. Le caractère raisonnable est un concept qui n'est ni nouveau, ni unique. Les tribunaux l'invoquent tout le temps, surtout dans le contexte du droit pénal. Le concept peut être adapté sans difficulté aux circonstances et aux changements observés dans les pratiques de la société.

D'après les éléments de preuve fournis au tribunal, bien que l'article 43 existe depuis toutes ces années et que son libellé n'ait pas été grandement modifié, la plupart des Canadiens ont, à l'égard du rôle parental, une approche qui diffère de celle qui avait cours en 1954. Quand on leur demande s'ils ont le droit de frapper leurs enfants à la tête ou d'adopter le genre de comportement dont nous avons été témoins dans certains cas, la plupart répondent non, que cette pratique est interdite.

Le sénateur Ringuette : Comment croyez-vous qu'ils arrivent à une telle conclusion? Excusez-moi mais, à mon avis, le gouvernement fédéral n'a rien fait au chapitre de l'éducation des parents. Ce sont surtout les décisions des tribunaux, décisions qui touchent les enfants, les parents, les enseignants, ainsi de suite, qui ont eu un impact éducatif. Voilà le processus d'éducation auquel a eu recours le gouvernement fédéral. Il n'a pas mis en place de programmes sur les pratiques parentales ou de programmes d'éducation, et n'a pas non plus créé une infraction qui comporte un élément matériel.

Mme Morency : Sauf votre respect, Santé Canada et Justice Canada ont mis sur pied des programmes d'éducation parentale qui sont généralement reconnus comme étant très positifs. Le conseil donné aux parents est le suivant : ne donnez pas la fessée à vos enfants parce qu'il existe des moyens plus efficaces de les discipliner. Ces programmes ont été bien reçus. Ceux qui existaient à l'époque et sur lesquels les experts se sont fondés pour fournir des éléments de preuve ont été reconnus par certains spécialistes en sciences sociales comme étant parmi les meilleurs. Je crois que M. Newell en a parlé quand il a témoigné devant le comité.

Il se peut fort bien qu'il y ait des membres du comité qui ne connaissent pas certains de ces programmes. Je pense que le sénateur Hervieux-Payette vous en a remis certains exemplaires.

La présidente : Certains.

Mme Morency : Par exemple, j'en ai un ici que je crois qu'elle a déjà fourni au comité. J'ai la copie papier, que je vais la remettre au greffier. On peut également y avoir accès sur le web — sur le site web de Santé Canada et sur celui de Justice Canada. Nous avons encouragé la mise sur pied d'un programme plus détaillé qui relève de l'initiative intitulée « Y'a personne de parfait », de Santé Canada. Nous avons également organisé une conférence pour renseigner les parents sur ce que dit la loi aujourd'hui.

Pouvons-nous faire plus? Comme nous l'avons déjà convenu, je pense que nous devrions et que nous pouvons faire plus. Toutefois, il est injuste de dire que nous n'avons rien fait. Nous avons pris certaines mesures.

Comme je l'ai mentionné, ce sont surtout les personnes qui ont de jeunes enfants, les parents, qui connaissent l'existence de nos programmes. Mes enfants sont jeunes, mais pas si jeunes, de sorte que ce n'est pas le genre d'informations que je vais essayer de trouver, sauf si cela cadre avec mon travail. Je sais que ces programmes ont été bien reçus et que nous essayons de trouver de nouvelles façons de faire passer le message.

Le sénateur Ringuette : J'aimerais en savoir plus sur votre réseau de distribution. Je ne pense pas qu'un parent, avant de discipliner physiquement ses enfants, va consulter le site web du ministère de la Justice pour savoir si cette pratique est acceptable ou non.

Mme Morency : Je ne sais pas si je suis en mesure de vous fournir des chiffres là-dessus. Je vais me renseigner. Toutefois, je ne peux, par exemple, vous dire combien de personnes essaient d'avoir accès à certains de ces programmes via Internet, un outil qui est de plus en plus populaire.

Par ailleurs, il existe plusieurs façons de nous renseigner et de renseigner les autres. Vous avez tout à fait raison : la notoriété qu'apportent certaines affaires à une question, les manchettes dont font l'objet certaines affaires, ont parfois pour effet de susciter une attention qui n'est pas celle que nous recherchons.

Si nous jetons un coup d'œil à la publicité que cette affaire, qui a été examinée par la Cour suprême du Canada, a généré, nous considérons qu'il s'agit là d'un des outils éducatifs les plus puissants que nous pouvons avoir dans ce dossier. Cette affaire a permis de réunir des experts de toutes les disciplines, de porter des questions et des éléments de preuve à l'attention de trois paliers de l'appareil judiciaire. Elle a donné lieu à une décision finale de la Cour suprême, et l'attention que lui ont accordé les médias a été très importante à tous les niveaux. Comme je l'ai mentionné, l'approche adoptée n'a pas toujours été très nuancée. Toutefois, l'attention apportée par les médias peu de temps après et depuis la décision de la Cour suprême a été plus positive que négative. Autrement dit, évitez ce genre de comportement.

Là encore, faudrait-il en faire plus? C'est ce que nous essayons de faire, mais j'aimerais suggérer au comité que cette affaire a beaucoup contribué à souligner les problèmes et à nous y sensibiliser.

Par ailleurs, il faut dire que la définition du type de conduite dont nous débattons est très large. D'un côté — et c'est ce qui s'est révélé devant les tribunaux également — nous ne faisons pas la différence entre le type de conduite criminelle très violente — battre un enfant, comme nous l'avons vu dans certaines des affaires dont ont été saisis les tribunaux; il ne s'agit pas de châtiments corporels ni non plus d'une question de discipline, même si un parent déclare : « J'essayais simplement de discipliner mon enfant. » Ce n'est pas l'objet de l'article 43, comme le déclare d'ailleurs la Cour suprême. Pour la cour, la définition vise uniquement ce type de conduite bien précis.

Si l'intention est de dire que nous ne voulons pas ce genre de conduite, que nous ne voulons pas promouvoir les mauvais traitements infligés aux enfants, c'est en fait exactement ce qui découle de la décision de la Cour suprême. Elle dit : « Ne le faites pas. Si vous adoptez cette conduite, en tant que parents, vous saurez que c'est une conduite que nous n'excuserons ni n'accepterons. » Dans sa majorité, la Cour suprême a déclaré qu'il peut y avoir quelques cas limites, mais les directives seront là pour guider les tribunaux dans l'application de cette norme. Au bout du compte, ce sont les tribunaux qui le décideront, non les parents. En tant qu'État, vous voulez ce contrôle afin que les tribunaux puissent se faire les arbitres de cette norme.

Je le répète, nous parlons d'une conduite très limitée dans des circonstances particulières. Ce qui est souvent signalé comme étant une manière de discipliner un enfant, ne l'est pas, même si des gens disent le contraire; la Cour suprême dit clairement que ce n'est pas de la discipline. Ce n'est pas ce dont il est question à l'article 43.

[Français]

Le sénateur Rivest : Cela arrive souvent dans des projets de loi où on parle beaucoup de la protection des droits des enfants. L'article 43 est un petit phénomène de rien du tout par rapport à l'ampleur du problème.

Ce que l'État ou le gouvernement fait pour protéger les enfants relève beaucoup plus de la Loi sur la protection de la jeunesse et de tout ce qui se fait à l'intérieur des provinces. Que l'on fasse intervenir ultimement, dans des cas très particuliers et très excessifs, le Code criminel, est une chose extrêmement limitée. Il faut le mettre en perspective. En fait, le nombre de cas qui ont été traités en cour, malgré tout l'intérêt du jugement de la Cour suprême et des distinctions qui y sont faites, ce n'est pas le problème.

Si le gouvernement fédéral voulait faire davantage pour aider les enfants — il le fait déjà dans différents programmes de transferts sociaux — je pense qu'il aurait intérêt, avant d'amender le Code criminel, à envoyer plus de fonds pour soutenir les efforts des gouvernements provinciaux au titre de la protection de la jeunesse. En termes de réalité et d'expression très concrète sur le terrain, on pourrait le faire.

Vous avez mentionné que les services de protection de la jeunesse des juridictions provinciales étaient un monde à part. Le Code criminel en est un autre. Vous dites qu'il n'y avait pas beaucoup de communications entre les uns et les autres parce que les gens qui travaillent avec les familles sont très conscients que le droit criminel, même dans les cas d'abus, n'est probablement pas la solution.

Comme vous l'avez mentionné, cela désunit, cela déstabilise la famille et ce n'est pas toujours dans l'intérêt de l'enfant. Le Code criminel ne peut pas tolérer la violence envers les enfant et il doit d'une façon ou de l'autre la sanctionner.

Vous avez parlé des commentaires faits par des organismes internationaux au sujet du Canada. Est-ce que ces commentaires posent un diagnostic sur la qualité de l'ensemble des services que les différents paliers de gouvernements au Canada portent à la protection de l'enfant ou s'ils le portent uniquement sur l'article 43?

Mme Morency : Permettez-moi de vous répondre en anglais.

[Traduction]

Tout d'abord, une correction ou une précision. Je n'ai pas voulu dire qu'il n'y a pas de communication entre le secteur du droit pénal et le secteur de la protection à l'enfance. J'essayais de souligner que les deux systèmes peuvent fonctionner indépendamment, avec des tests et des résultats différents. Toutefois, il est courant qu'au palier municipal, des protocoles lient les agences des services sociaux, de la police et de la protection à l'enfance. Pour préciser, je dirais qu'un appel peut arriver au service de protection à l'enfance et être transmis à la police, ou vice versa; grâce à de tels protocoles, toutes les agences concernées travaillent ensemble pour que, au bout du processus, on arrive au meilleur résultat pour l'enfant, pour la famille et pour la société.

Je ne peux pas expliquer comment le Comité des droits de l'enfant des Nations Unies est parvenu à ses conclusions, mais d'après les questions que nous avons reçues lorsque nous avons comparu devant ce comité la dernière fois, il semblerait qu'il ne se préoccupe pas de ce que le Canada propose de mettre en place en ce qui concerne l'article 43, par opposition à l'approche plus large, contextuelle, holistique que j'essaie de décrire aujourd'hui et dont il a été considérablement question devant les tribunaux où on disait que le Canada voulait remplir ses obligations à l'égard de la Convention des droits de l'enfant des NU. Il suffit d'examiner le libellé de la convention pour s'apercevoir qu'elle ne dit pas exclusivement « interdire les châtiments corporels. » Elle dit : « Protéger l'enfant contre la négligence, les mauvais traitements, la violence. » Chaque État peut s'y prendre différemment.

L'approche du Canada sera différente de celle de certains pays européens et des États-Unis, à certains égards, mais cela ne veut pas dire que notre réponse sera moindre, inefficace ou erronée. C'est une réponse qui reflète notre profil constitutionnel, les lois fédérales et provinciales et les programmes disponibles aux deux ordres de gouvernements. Cette information a été présentée devant les tribunaux pour dire que nous prenons beaucoup de mesures au niveau fédéral pour arriver au développement sain des enfants dans le cadre de toute une gamme de programmes. C'est ce qui fait partie de la réponse qui vise à promouvoir un développement meilleur et plus sûr pour nos enfants.

Peut-on en faire plus? C'est un instrument de choix. Le projet de loi C-2, dont votre comité va être saisi sous peu, propose plusieurs modifications au Code criminel afin de renforcer notre cadre juridique pour mieux protéger les enfants, notamment dans des situations de mauvais traitements et de négligence; il faut toutefois prévoir bien plus qu'un changement législatif pour arriver aux genres de meilleurs résultats que nous espérons tous.

Selon mon interprétation, la réponse du comité NU à ce sujet met davantage l'accent sur l'article 43 et moins sur la réponse plus vaste, contextuelle que nous avons à l'échelle du pays.

Le sénateur Joyal : Je ne veux pas épuiser la patience de mes collègues et du témoin, mais permettez-moi de vous dire que je ne suis pas d'accord avec l'une de vos dernières observations, quand vous avez dit que le comité ne renvoie pas spécifiquement aux châtiments corporels au Canada. Si je peux vous citer à propos du rapport du comité sur le Canada, vous avez dit : « le Comité note avec une profonde préoccupation que l'État partie, c'est-à-dire le Canada, n'a pas adopté de texte de loi à l'effet d'interdire expressément toutes les formes de châtiment corporel et n'a pris aucune mesure pour abroger l'article 43 du Code criminel, qui autorise les châtiments corporels. » On ne peut pas être plus clair.

Mme Morency : C'est ce que j'ai reconnu, à savoir qu'il a mis l'accent sur l'article 43 et pas sur grand-chose d'autre. S'il s'était penché sur certaines des autres mesures prises au Canada, il aurait appris ce qui se passe dans les écoles. Vous pouvez examiner l'état du droit dans les provinces et voir qu'en vertu de l'article 9, et de l'article 10 proposé — une fois qu'il sera adopté — nous aurons une mesure législative interdisant le recours aux châtiments corporels dans les écoles de toutes les provinces. Dans les municipalités, nous avons, plus souvent qu'autrement, des commissions scolaires qui n'admettent pas non plus le recours aux châtiments corporels.

Je suis complètement d'accord que le comité semble avoir mis l'accent sur l'article 43, essentiellement, et moins sur l'approche contextuelle.

Le sénateur Joyal : Lorsque notre comité a étudié le nouveau projet de loi sur la justice pénale, nous avons appris que 80 p. 100 des mauvais traitements infligés aux enfants le sont par les parents ou par des amis proches ou encore des membres de la famille — pas 1 ou 10 p. 100, mais 80 p. 100. Si nous voulons limiter ou abaisser le nombre des auteurs de ces mauvais traitements, c'est la famille immédiate — c'est-à-dire, les parents, les frères et sœurs, les parents immédiats qui ont des liens étroits avec la famille, les oncles, et cetera.

Je n'ai pas à citer la célèbre affaire Homolka, mais l'une des victimes de Bernardo était la sœur de son épouse. Lorsqu'on y pense, on ne peut s'empêcher de se demander : que devrait-on faire en matière de politique d'ordre pénal? Je parle ici de politique et non pas de cet article en particulier. Que devrait-on faire systématiquement pour diminuer les mauvais traitements infligés par la famille immédiate et les parents qui sont les auteurs du plus fort pourcentage de mauvais traitements infligés aux enfants? La plupart des gens travaillent aujourd'hui et très souvent, c'est un membre de la famille qui prend soins des enfants.

[Français]

Le gouvernement du Québec singulièrement a banni l'utilisation de la force dans les écoles. Ce n'est pas parce que ce n'est pas bon.

[Traduction]

Si on l'a interdit dans les écoles, pourquoi le permettre à la maison? Lorsque j'étais enfant, une religieuse à l'école primaire m'a frappé les doigts avec une règle. Plus tard, les Frères m'ont frappé les doigts avec une ceinture. Si on adopte des règles à l'école pour les gens qui ne sont pas les parents, mais qui sont responsables de la garde et de l'éducation des enfants, pourquoi tolèrerait-on, lorsque l'enfant rentre à la maison à 5 heures et dit :

[Français]

« Mon petit X, tu vas en avoir une ce soir! »

[Traduction]

Nous devons adopter la même approche. J'essaie d'être cohérent dans l'élaboration de politiques dans cet endroit. J'ai le plus grand respect pour le ministère de la Justice et je ne tiens pas ces propos uniquement parce que vous êtes ici aujourd'hui. Je me suis battu contre le ministère au sujet d'autres questions comme le droit de l'extradition, soit la peine infligée en cas d'extradition de Canadiens. Je me suis fortement opposé aux points de vue du ministère de la Justice à ce sujet. Le ministère avait fondé sa décision sur l'affaire Ming de 1991 et, en 2000, le tribunal est revenu sur sa décision.

Il ne faudrait pas se montrer peu disposé à envisager une autre série de cadres de politique si on veut parvenir à limiter l'incidence des mauvais traitements infligés à l'enfant, surtout lorsqu'ils ne sont pas tolérés pendant le plus grand nombre d'heures de la journée : c'est-à-dire, lorsque l'enfant est à l'école. J'essaie de concilier cette proposition avec une série de paramètres clairs en matière de politiques qui soient compatibles. Je ne veux pas vous citer hors contexte, mais vous avez dit : « N'adoptez pas ce genre de conduite. » Vous avez dit plus tôt qu'il n'est pas légitime de donner une fessée. Si tel est le cas, il n'y a rien d'autre à ajouter. Ce ne peut pas être légitime à la maison, ni non plus ailleurs. Si vous êtes contre les fessées, il faudrait dire : « Abrogeons cet article du Code criminel. »

Mme Morency : Permettez-moi de répondre à plusieurs des points soulevés. Premièrement, les interdictions mises en place dans les écoles sont ce qu'elles sont et n'équivalent pas à la portée du droit pénal. Ceci étant dit, la Cour suprême a déclaré, dans sa majorité, que l'article 43 ne peut pas être invoqué pour excuser la conduite des enseignants à des fins de correction, mais seulement lorsqu'ils ont recours à la force pour immobiliser un élève. Par exemple, un enseignant peut accompagner un élève au bureau du principal, ou quelque chose du genre. La décision permet d'être clair et cohérent, comme vous l'avez dit. Une interdiction n'a pas le même effet que le droit pénal.

Le type de conduite qu'un enseignant peut adopter à l'égard d'élèves est différent du type de conduite adoptée par un parent qui s'occupe quotidiennement d'un enfant. J'ajouterais à mes remarques sur la façon dont nous définissons les voies de fait et la responsabilité d'un parent que nous ne nous attendons pas à ce que les enseignants touchent physiquement les élèves de la même façon que les parents. Il y a une différence, reconnue par la décision de la Cour suprême.

Je suis d'accord avec vous lorsque vous dites que les enfants courent le plus grand risque de mauvais traitements de la part des membres de la famille et d'autres personnes qui leur sont très proches. Les statistiques le confirment. Une initiative fédérale sur la violence familiale a été lancée et Justice Canada y participe avec six autres ministères. C'est exactement le type de conduite que nous essayons de dénoncer. L'objectif de l'initiative consiste à renforcer le droit criminel, à développer les programmes et le matériel pédagogique et à faciliter davantage la compréhension pour que les victimes signalent ce qui leur arrive et bénéficient d'une aide à cet égard. Il s'agit d'une réponse vaste, multisectorielle.

Toutefois, le type de conduite que nous qualifions de violence familiale n'est pas le type de conduite dont traite l'article 43. Un parent qui brise les os de son enfant ou qui le bat de façon répétée n'affiche pas le genre de conduite que l'article 43 est censé excuser. L'article 43 traite d'un type de conduite très restreint afin que les parents puissent remplir leurs obligations à l'égard de leurs enfants sans craindre l'intervention de l'État dans le cas des actes mineurs que nous avons décrits.

Pour savoir s'il est illogique que le gouvernement prévoit différents seuils, nous utilisons cette approche dans plusieurs cas. Pour la conduite en état d'ébriété, par exemple, les campagnes de sensibilisation visant à inciter les gens à ne pas boire et conduire ont connu beaucoup de succès. Pourtant, le Code criminel prévoit un seuil en ce qui concerne le pouvoir de l'État de criminaliser ou d'interdire certains types de conduite. Pour ce qui est de la conduite en état d'ébriété, vous êtes soit en état d'ébriété, ce qui n'est pas la tolérance zéro, soit la concentration d'alcool dans votre sang est de .08. Les messages ne sont pas incompatibles. Il existe diverses façons d'invoquer le droit pénal lorsqu'on veut réagir fortement à un problème.

Cela revient aux questions d'instrument de choix. J'espérais que le rapport de la Commission du droit aurait été publié, mais ce n'est pas le cas. La Commission a produit un document de consultation et effectué quelques études — et propose d'en faire plus — sur la façon de traiter de ce type de conduite.

Le sénateur Joyal : Vous avez dit que dans la foulée de la décision de la Cour suprême, vous avez pris quelques initiatives. Je vais vous en indiquer certaines que, je crois, vous avez pu prendre, et je vous demanderai d'en parler.

Avez-vous envoyé avec le chèque d'allocation familiale un feuillet informant les parents de la loi au Canada au sujet du recours à la force à l'endroit des enfants? Avez-vous contacté les nouveaux parents dans les hôpitaux pour les informer, au moment critique, lorsqu'ils ont leur bébé dans les bras, que le recours à la force à l'endroit des nouveaux- nés est interdit? Dans quels domaines allez-vous faire campagne?

Mm Morency : Ce sont d'intéressantes propositions, et je me ferais un plaisir de les explorer davantage. Nous ne l'avons pas fait. Nous avons concentré nos énergies sur un partenariat avec Santé Canada pour renforcer le Programme « Y'a personne de parfait » afin de refléter les nouvelles normes. C'est un programme bien reconnu et bien établi doté de chaînes de distribution pour diffuser l'information.

Lorsque la décision a été rendue, le ministère a immédiatement publié un feuillet de documentation pour expliquer la décision et l'historique de l'affaire. Nous allons essayer de transmettre le message plus directement, en partenariat avec des groupes qui ont des réseaux bien établis.

Avant que la Cour suprême n'ait rendu sa décision, nous avions travaillé sur des questions similaires en envisageant d'autres possibilités. Par exemple, nous avons créé un partenariat avec Patrimoine Canada en vue de publier un manuel de formation pour les nouveaux arrivants au Canada au sujet de la loi relative aux soins apportés aux enfants. C'est un message important. Même s'il a été mis au point avant le jugement de la Cour suprême, nous avons pu nous inspirer de l'affaire, ainsi que de la décision de la cour d'appel et des directives; nous avons donc essayé d'en tenir compte le mieux possible dans ces documents.

Le sénateur Joyal : Avez-vous mis à l'ordre du jour de la Conférence annuelle fédérale-provinciale des ministres de la Justice et des Procureurs généraux la question de savoir comment cette décision a permis de présenter sous un jour nouveau l'administration de la justice au Canada? Comme l'administration de la justice est du ressort des provinces, il faut que celles-ci soient mises au courant de la nouvelle décision pour qu'elles puissent y donner suite dans leurs ministères.

Mme Morency : Ce n'est pas officiellement à l'ordre du jour de la Conférence des ministres fédéraux-provinciaux- territoriaux de la Justice. L'affaire a débuté en novembre 1998. J'ai eu l'occasion de faire des mises à jour depuis auprès des représentants fédéraux-provinciaux-territoriaux. Ce que vous dites est important et dépasse le secteur de la justice, puisqu'il s'agit d'englober les secteurs de l'éducation, de la santé et des services sociaux.

Le sénateur Joyal : Commençons par les procureurs généraux, puisqu'il s'agit d'une question relative au Code criminel, et non d'une question de droit relative à la protection de la jeunesse. Bien sûr, les répercussions se font sentir dans tout le système, mais c'est là que tout commence. L'interprétation a été modifiée d'une façon si limitée que les gens doivent comprendre exactement ce que cela signifie. Ce n'est pas clair si vous ne lisez pas la décision. Comme je l'ai dit, c'est une décision complexe et ce n'est pas tout le monde qui va prendre le temps de lire les 265 paragraphes ainsi que les remarques contradictoires des trois juges. Le grand public ne peut pas faire la même interprétation analytique que vous et d'autres autour de cette table.

Je ne suis pas encore convaincu que nous ayons fait tout ce qu'il est possible de faire pour lutter contre la violence à l'endroit des enfants, surtout depuis que cette décision peut être interprétée comme ne changeant absolument rien. Je peux me tromper, mais je crois que la décision a changé quelque chose de très important. Elle confirme une tendance qui se dessine au sein de la société : le recours à la force qui était auparavant admissible dans les écoles — et tout le monde autour de la table peut donner des exemples — est maintenant totalement exclu dans le cadre de l'éducation d'un enfant; c'est ce qui se dessine également au sein de la famille.

J'aimerais qu'on adopte la même tendance évolutionnaire, au lieu de se contenter de dire : « Eh bien, inutile de modifier le Code, laissons-le en l'état et essayons d'avertir les gens que quelque chose a changé, mais nous ne savons pas trop quoi. » Je me sentirais plus à l'aise si on me donnait l'assurance que suffisamment de mesures ont été prises et qu'on peut laisser le Code en l'état, que des initiatives sont prévues pour renforcer cette interprétation et pour faire en sorte que l'évolution, que nous remarquons au Canada depuis 20 ou 30 ans, correspond à l'orientation qu'appuie le gouvernement fédéral dans l'exercice de toutes ses fonctions.

Je suis d'accord. Je pense que nous pouvons essayer de faire plus pour sensibiliser les Canadiens à ces questions. Nous avons déjà pris beaucoup de mesures, et c'est l'affaire en question qui nous y a poussés. Parfois, il vaut la peine de laisser une affaire comme celle-ci se décanter quelque peu pour voir comment elle est interprétée.

J'aimerais redire que d'après notre témoignage devant la Cour, l'article 43, tel que la Cour suprême du Canada en a été saisie, n'empêchait pas la police de répondre à des allégations de mauvais traitements infligés aux enfants, de faire enquête et de porter des accusations. Il n'empêchait pas les travailleurs du service de la protection à l'enfance d'assumer leurs responsabilités.

Nous allons essayer de faire le suivi de l'article 43 et de voir comment la décision peut être appliquée, ainsi que le genre d'impact qu'elle comporte. Jusqu'à présent, sur les 12 affaires présentées en vertu de l'article 43, cinq ont donné lieu à des acquittements et cinq à des accusations. Dans le cas de l'une d'elles, il y a eu appel d'une condamnation, laquelle a cependant été confirmée. Dans le cas d'une autre, il y a eu appel d'un acquittement et un nouveau procès a été ordonné. Une de ces affaires s'est produite avant la décision, ce qui explique qu'il n'y ait pas eu de renvoi à celle-ci.

Dans le cas de ces 12 affaires, nous observons à l'heure actuelle des répercussions en ce qui a trait à la façon dont la décision est interprétée et appliquée. On y fait des renvois et on en tient compte. Ces affaires se répartissent comment suit : une à Terre-Neuve, une en Nouvelle-Écosse, une en Saskatchewan, une en Alberta, cinq au Québec et trois en Ontario. En règle générale, je pense que la décision de la Cour suprême a un impact, mais il est encore trop tôt pour se prononcer.

Est-ce progressiste et proactif? Est-ce tout ce qu'il faut faire? Je pense convenir avec vous et avec d'autres qu'il faudra en faire plus pour sensibiliser le public. Je vais examiner vos propositions et voir ce qu'il est possible de faire. Je me suis engagée à fournir, si je le peux, l'information de mes collègues de Santé Canada, s'ils en disposent au sujet de la distribution. Je peux également transmettre au greffier les derniers renseignements sur le rapport de l'an dernier relatif à la violence familiale, qui renferme des statistiques. Un autre est prévu sous peu portant sur les mauvais traitements infligés aux enfants. Je le redis, il ne s'agit pas du type de conduite dont nous parlons à l'article 43. Il s'agit néanmoins d'un sujet de préoccupation si l'on veut mieux protéger les enfants contre toute forme de mauvais traitements et de négligence.

La présidente : Peut-être pourriez-vous donner au greffier les noms relatifs aux affaires dont vous venez juste de parler.

[Français]

Le sénateur Rivest : Les sénateurs informent le citoyen des changements qui se sont produits, je pense que c'est important. Il y a plein d'agences de publicité à Montréal qui ont maintenant beaucoup de temps libre. Elles pourraient peut-être donner un coup de main.

Le sénateur Joyal : Contribuer bénévolement.

La présidente : Contribuer bénévolement au bien-être de la société.

Merci de votre patience avec nous aujourd'hui madame Morency. On a quand même davantage de connaissances de ce dossier avec votre prestation et les réponses que vous avez données à nos questions et même à nos commentaires. Cela valait la peine d'attendre un petit peu et de vous avoir avec nous pendant ces deux heures.

[Traduction]

Le sénateur Joyal : Nous devrions demander à nos collègues du comité qui n'ont pas pu participer à notre séance d'aujourd'hui de lire les réponses données par le témoin.

[Français]

La présidente : La plupart le font, sénateur Joyal, mais je pourrais quand même le mentionner.

[Traduction]

Demain matin, nous allons entendre un témoin à 10 h 45.

La séance est levée.


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