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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 15 - Témoignages


OTTAWA, jeudi 15 février 2007

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui à 11 h 50 pour examiner, afin d'en faire rapport, les obstacles au commerce international.

Le sénateur Jerahmiel S. Grafstein (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Je souhaite la bienvenue à mes collègues et aux témoins. Nous avons le plaisir de poursuivre notre étude courante des obstacles au commerce interprovincial. Nous souhaitons la bienvenue au public canadien qui peut suivre nos travaux à la télévision, d'un océan à l'autre. Je signale aux témoins qu'ils seront vus non seulement dans toutes les régions du Canada et d'Amérique du Nord, mais également dans le monde entier, sur Internet. Leurs propos seront répercutés dans le monde entier.

Le comité poursuit aujourd'hui son examen des obstacles au commerce interprovincial et interterritorial qui existent au Canada et se demande en particulier si ces obstacles au commerce, ces réglementations, limitent la croissance et la rentabilité des secteurs touchés. Nous examinerons également la possibilité pour les industries des provinces et territoires concernés de créer des régions économiques interprovinciales et interterritoriales et peut-être même transfrontalières avec les États-Unis afin d'accroître la prospérité et d'augmenter la productivité. Notre comité estime que la question des obstacles au commerce intérieur est extrêmement importante au moment où nous cherchons à bâtir un avenir prospère et concurrentiel, non seulement au Canada, mais aussi avec nos homologues au sud du pays et dans le monde entier. À notre avis, les obstacles contribuent souvent à augmenter les coûts d'exploitation des entreprises et, en bout de ligne, ceux des consommateurs et peuvent se traduire par des pratiques non efficientes qui entraînent une diminution de la compétitivité et de la productivité. Nous devons mettre l'accent sur les mesures qui contribueront à augmenter la productivité et la compétitivité et sur les obstacles au commerce intérieur qui nous empêchent d'une manière ou d'une autre d'atteindre ce but. Au Canada, le libre-échange avec les États-Unis est peut-être une réalité, et nous avons également signé des accords avec d'autres pays, mais le libre-échange n'existe pas vraiment à l'intérieur du pays.

Nous pensons que nos travaux sont importants à la lumière des déclarations faites par le ministre des Finances le 23 novembre. Le nouveau gouvernement conservateur est sur la même longueur d'onde que l'ancien gouvernement libéral et il s'est engagé à accorder une attention particulière à l'objet de notre étude qui vise à encourager une union économique canadienne plus forte en continuant à inciter les provinces et territoires à renforcer le commerce intérieur et la mobilité de la main-d'œuvre et à collaborer avec les provinces à la création d'un organe commun de réglementation des valeurs mobilières. Notre comité préconise depuis longtemps cette dernière initiative.

J'ai le plaisir d'accueillir aujourd'hui un nouveau membre au comité, le sénateur Ringuette du Nouveau-Brunswick, qui remplace le sénateur Hervieux-Payette. C'est en raison des services exemplaires qu'elle a rendus à notre comité que le sénateur Hervieux-Payette a été nommée leader de l'opposition au Sénat. Nous l'avons perdue, mais nous avons le plaisir d'accueillir le sénateur Ringuette. Un grand avenir vous attend, madame le sénateur. Et si vous faites bien votre travail ici, je suis sûr que le parti n'hésitera pas à vous accorder un poste plus prestigieux.

Je souhaite la bienvenue au vice-président, le sénateur Angus. Je suis particulièrement heureux de l'accueillir, étant donné que nous partageons le même point de vue sur ces questions et quant à l'importance des problèmes sur lesquels nous nous penchons.

Nous avons le plaisir d'accueillir Sean McPhee, président de l'Industrie de l'huile végétale du Canada, IHVC, et M. Bob Broeska, président de la Canadian Oilseed Processors Association, COPA. Je crois que M. McPhee va nous présenter un bref exposé.

Sean McPhee, président, Industrie de l'huile végétale du Canada (IHVC) : L'Industrie de l'huile végétale du Canada est une association commerciale verticale regroupant des cultivateurs, surtout des cultivateurs de canola de l'Ouest du Canada; des transformateurs intermédiaires qui triturent et raffinent l'huile entrant dans la composition de divers produits de consommation; et notre troisième groupe, au sommet de la chaîne d'approvisionnement, réunit les producteurs de produits de consommation tels que la margarine, l'huile de cuisson, les sauces à salade, les nappages fouettés et toute une gamme de produits essentiellement à base d'huile de soya et d'huile de canola.

Aujourd'hui, nous avons des nouvelles à vous apporter et je peux vous dire d'entrée de jeu qu'elles ne sont pas très bonnes, puisqu'elles font le constat d'un manque de volonté politique. Toutefois, il y a un message positif d'espoir et je veux m'assurer que ce message soit entendu et compris. Les membres de l'IHVC et moi-même, avant que j'occupe mes fonctions actuelles et lorsque j'étais consultant pour Unilever Canada, avons collaboré avec les gouvernements du pays en vue de créer un ensemble de lois favorables au commerce intérieur. Nous sommes parvenus à obtenir un consensus important sur la jurisprudence en matière de commerce intérieur. Il convient maintenant d'appliquer cette jurisprudence.

L'IHVC a vu le jour en 2002-2003, en partie en réaction à des problèmes de commerce interprovincial, notamment les efforts concernant la réglementation de la couleur de la margarine au Québec, à la fin des années 1990, action que j'avais dirigée à l'époque au nom d'Unilever. Cependant, il faut replacer la question de la couleur de la margarine au Québec dans un contexte plus large. Ces produits — tartinades et boissons qui sont un mélange de produits laitiers et d'huile végétale et les produits qualifiés d'analogues aux produits laitiers — sont des succédanés des produits laitiers traditionnels. Ils répondent à une demande diversifiée de produits de consommation sains, une demande émanant de nombreux Canadiens qui souffrent d'une intolérance au lactose et aux produits laitiers, tranche de la population que nous estimons à 20 p. 100.

Dans la documentation que je vous ai donnée hier, la première annexe fait un tour d'horizon des différents règlements qui, province par province, rendent pratiquement impossible pour un fabricant national de proposer ces produits sur le marché. Si vous vous reportez au tableau de l'annexe 1, vous remarquerez que seulement certaines provinces autorisent la fabrication et la vente de ces produits; certaines d'entre elles ne les autorisent que par dispense ministérielle; d'autres encore les interdisent expressément. De manière générale, le degré d'application des règlements varie considérablement. Certains règlements sont activement appliqués alors que d'autres ne le sont pas. À tous les règlements provinciaux s'appliquant à ces produits viennent s'ajouter les règlements fédéraux, en particulier les règlements découlant de la Loi sur les aliments et drogues administrés par Santé Canada.

Le problème exposé dans un document d'Agriculture Canada à peu près au moment dont je parle, soit la fin des années 1990, est que ces règlements provinciaux non uniformes empêchent les entreprises qui fabriquent ces produits d'atteindre un niveau concurrentiel optimal, tout simplement parce qu'il leur est impossible de réaliser des économies d'échelle.

Après avoir exposé le contexte, j'ai l'intention d'examiner de manière pratique notre tentative d'utiliser l'Accord sur le commerce intérieur, l'ACI, pour nous attaquer à ces trois obstacles au commerce. Je vais vous donner des exemples de trois obstacles auxquels je m'intéresse personnellement, dont deux au nom de l'Industrie de l'huile végétale du Canada.

Tout d'abord, pour revenir à la margarine, nous avons communiqué avec le Québec avant la date limite du 1er septembre 1997 fixée pour l'abrogation du règlement concernant la couleur de la margarine. Le gouvernement québécois a présenté un projet de loi et l'a tout simplement retiré par la suite. Nous nous sommes alors adressés à l'Ontario pour lui demander de contester cette décision par l'intermédiaire du processus de résolution de différends prévu par l'Accord sur le commerce intérieur. Les consultations sectorielles et en vertu du chapitre 17 ont duré cinq ans. Au cours de ces cinq années, les changements de ministres en Ontario et au Québec ont ramené le processus au point de départ, annulant les modestes progrès qui avaient été accomplis. À la demande des producteurs de lait de l'Ontario, un ministre avait refusé de débloquer le dossier, même si le gouvernement Harris s'était déjà engagé à le faire. Du côté québécois, on ne relevait aucune intention d'atteindre les objectifs de la consultation ni aucune cohérence à ce sujet.

En avril 2002, l'Ontario et le Québec ont accepté de se présenter devant un groupe spécial de règlement des différends et ont conjointement demandé au secrétariat du commerce intérieur de lancer le processus. L'Ontario ayant déposé sa présentation au groupe spécial en septembre 2002, le Québec fit savoir au secrétariat qu'en dépit de ses obligations découlant de l'ACI et de son engagement à l'égard de l'Ontario, il ne ferait pas de présentation au groupe spécial et ne présenterait pas d'experts. Au bout de cinq ans, la première série de négociations s'achevait sans résultat et sans recours. À cause du règlement québécois sur la couleur de la margarine, l'industrie de l'huile végétale allait continuer à essuyer des pertes d'environ 20 millions de dollars chaque année.

À peu près à la même époque, l'Ontario prit des mesures provisoires en vue d'abroger la Loi sur les produits oléagineux comestibles, la LPOC, loi qui interdit les produits dont j'ai parlé au début. La Colombie-Britannique et l'Alberta ont contesté la décision de l'Ontario dans ce domaine, à la demande de l'Industrie de l'huile végétale du Canada. Dans sa décision, le groupe spécial a conseillé à l'Ontario d'abroger la Loi sur les produits oléagineux comestibles, et la province a obtempéré.

Le groupe spécial a également conseillé à l'Ontario de ne pas adopter d'autres mesures commerciales restrictives analogues à celles de la LPOC. Le gouvernement de l'Ontario, et en particulier le ministre de l'Agriculture, a fait circuler une lettre, qui est incluse dans la documentation que vous avez devant vous, indiquant qu'il ne prendrait pas de telles mesures. Le jour même de l'abrogation de la Loi sur les produits oléagineux comestibles, le gouvernement de l'Ontario a apporté des amendements à la Loi sur le lait, reprenant tout simplement la plupart des mesures restrictives contenues dans la LPOC. Au cours des audiences du groupe spécial, on avait demandé au représentant de l'Ontario si son gouvernement avait l'intention de restaurer ces mesures restrictives en vertu de la Loi sur le lait. Le représentant de l'Ontario avait affirmé que ce ne serait pas le cas et pourtant, son gouvernement l'a fait quand même.

Le troisième obstacle au commerce s'est manifesté lors de la deuxième série de contestations du règlement québécois sur la couleur de la margarine. Cette fois, ce sont le Manitoba, l'Alberta et la Saskatchewan qui ont contesté ce règlement québécois. Le Québec a accepté de participer et s'est présenté devant le groupe spécial. Le groupe spécial s'est prononcé sans ambiguïté en faveur des provinces de l'Ouest, affirmant que « la mesure du Québec porte atteinte ou cause un préjudice aux fabricants de margarine ainsi qu'à leurs fournisseurs en amont » et demandant « Que le Québec abroge la mesure sans délai, et, en tout état de cause, au plus tard le 1er septembre 2005 ». Quelques jours avant cette échéance, j'ai reçu, en ma qualité de président de l'IHVC, une lettre du ministre de l'Agriculture du Québec dans laquelle il écrivait ceci :

[...] la décision du groupe spécial est importante pour le gouvernement du Québec qui procède actuellement à son examen. Pendant ce temps, la mesure concernant la margarine colorée demeure en vigueur et le gouvernement du Québec assure son application. Au moment approprié, nous informerons l'industrie de la décision du gouvernement concernant les recommandations du groupe spécial.

J'ai reçu cette lettre il y a un an et demi : ils doivent être toujours en train d'examiner la décision du groupe spécial, puisque le règlement est encore en place.

Voilà trois exemples de politiciens qui, franchement, se soustraient aux responsabilités qu'ils ont acceptées lorsqu'ils ont signé l'Accord sur le commerce intérieur. Mon industrie en subit des préjudices directs. Nous estimons que le règlement sur la couleur de la margarine a coûté environ 200 millions de dollars jusqu'à présent aux cultivateurs, transformateurs et fabricants de produits de consommation depuis que le Québec aurait dû abroger son règlement.

Le coût économique n'est pas le seul problème. Beaucoup de produits que j'ai mentionnés au début de mon exposé, ne peuvent être commercialisés. Le nouveau Guide alimentaire canadien, publié par Santé Canada, reconnaît la valeur nutritive de ces produits en ouvrant au nouveau groupe de produits alimentaires laitiers et produits de remplacement une catégorie antérieurement réservée aux produits laitiers. Malheureusement, à part des boissons au soya riches en vitamines, il est bien difficile de trouver d'autres produits de remplacement dans les magasins d'alimentation puisque de tels produits ne sont pas commercialisés en raison de l'anomalie réglementaire notée dans le tableau I que je vous ai présenté.

Pour terminer, je vais vous présenter quelques observations que je vais formuler de la manière la plus directe possible. En bafouant l'Accord sur le commerce intérieur, les deux plus grandes provinces de la Confédération ont trahi la population canadienne dans son désir collectif de bâtir une économie intérieure unifiée. Le gouvernement fédéral ne s'est absolument pas impliqué tout au long du processus des trois rapports du groupe spécial dont j'ai parlé. Lorsque nous avons demandé au gouvernement fédéral d'intervenir dans le différend relatif à la Loi sur les produits oléagineux comestibles, étant donné que le Comité fédéral-provincial-territorial de l'inspection agroalimentaire avait conclu que le gouvernement fédéral devrait imposer sa réglementation et que les provinces devraient éliminer la leur, le gouvernement fédéral nous a répondu que son intervention « ne serait pas utile ». Il est clair pour moi que le découpage des circonscriptions électorales favorise les régions rurales par rapport aux régions urbaines du Canada, donnant ainsi aux groupes de pression des producteurs primaires une influence démesurée sur la politique gouvernementale, aux dépens des entreprises de traitement en aval et des intérêts des consommateurs.

Il faudrait interpréter l'article 121 de la Constitution comme incluant les barrières non tarifaires. La responsabilité de l'ACI au sein du gouvernement est mal définie. À plusieurs reprises, le ministre ontarien chargé du commerce intérieur nous a affirmé que le ministre de l'Agriculture était responsable de ce dossier. À d'autres occasions, le ministre de l'Agriculture nous a dit que c'était son collègue qui était chargé de ces affaires.

L'Accord sur le commerce intérieur a été conclu pour les Canadiens, aussi bien les particuliers que les entreprises du secteur privé et pourtant, ils n'ont aucun recours si les gouvernements manquent à leurs responsabilités dans l'administration de l'accord. Les deux rapports du groupe spécial sur la margarine colorée et la LPOC ont eu pour conséquence d'assembler une abondante jurisprudence relative à l'ACI qui nous permettrait de progresser de manière significative dans la construction d'une économie nationale; et je sais que votre comité s'intéresse à l'économie nationale.

Brièvement, l'Industrie de l'huile végétale du Canada a participé à deux processus de résolution de différends de l'ACI. Les recommandations du premier sont restées totalement lettre morte et celles du second ont été partiellement appliquées. Il est impératif de renforcer considérablement l'accord afin de prévoir les recours appropriés lorsque certaines parties sont en infraction.

M. Broeska va vous présenter un commentaire concernant le commerce international.

Bob Broeska, président, Canadian Oilseed Processors Association (COPA), Industrie de l'huile végétale du Canada (IHVC) : Merci. Notre industrie achète directement des graines de canola et de soya aux cultivateurs et les transforme pour produire cinq millions de tonnes d'huile végétale et de tourteaux de protéines chaque année au Canada. L'industrie représente 6 milliards de dollars dans l'économie agricole canadienne et l'économie canadienne en général.

M. McPhee a commenté certains détails de l'Accord sur le commerce intérieur. Quant à moi, j'ai été membre du comité consultatif du ministre sur le commerce dans le cadre des discussions relatives à l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, de l'Uruguay Round sous l'égide de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, le GATT, et maintenant, je suis membre du comité consultatif du ministre sur le commerce, dans le cadre du cycle de négociations de Doha. Au cours de ces diverses négociations, nous estimons avoir accompli des progrès importants. Nous avons obtenu l'accès au marché américain pour les agriculteurs canadiens et les transformateurs canadiens de graines oléagineuses, et l'accès à l'immense marché chinois en pleine expansion grâce aux réductions des barrières commerciales et tarifaires lors de l'Uruguay Round sous l'égide du GATT. Désormais, nous cherchons à obtenir un meilleur accès aux marchés d'Asie, du Moyen-Orient et d'Amérique du Sud grâce au Programme de Doha.

Pendant ce temps, notre industrie a gagné un accès important à certains marchés et pourtant, dans le même temps, nous avons été incapables d'obtenir la libre distribution de nos produits dans les diverses régions du Canada. En dépit de nos efforts et d'importants investissements en temps et en main-d'œuvre, il semble que la volonté politique soit absente pour obtenir sur le marché canadien ce que nous souhaitons réaliser sur le marché international.

Nous pensons que le marché intérieur canadien peut offrir des avantages substantiels, non seulement à notre industrie, mais également à ceux qui résistent au changement. Je suis également président de l'Association internationale des transformateurs de graines oléagineuses. J'ai eu l'occasion de constater par moi-même combien la libéralisation des marchés provoque des changements dans le monde entier. Il arrive très souvent que des produits d'huile végétale et des produits laitiers soient commercialisés ensemble sur les marchés internationaux. L'évolution des principes de nutrition et des valeurs des consommateurs permet aux deux produits de coexister et de se compléter, de manière avantageuse pour l'un et pour l'autre.

Nous sommes convaincus que l'Accord sur le commerce intérieur devrait permettre ce type de croissance au Canada. Nous sommes ici pour encourager les sénateurs à réfléchir aux changements que l'on pourrait apporter à l'ACI pour que l'industrie ait un meilleur accès au marché commercial intérieur.

Le président : Pourriez-vous nous donner une idée de la taille de l'industrie? Vous nous avez indiqué le nombre de producteurs, mais pourriez-vous nous indiquer comment ce nombre se répartit en producteurs, transformateurs et fabricants de produits de consommation? Quelle est la taille de l'industrie dans son ensemble et combien de personnes emploie-t-elle?

M. McPhee : L'industrie représente chaque année plus de 10 milliards de dollars du produit intérieur brut. Je crois que les cultivateurs représentent environ 2 milliards à 3 milliards de dollars. Il me faudra confirmer ces chiffres pour le comité, puisque je ne les ai pas avec moi.

Le président : Vous pouvez nous donner une idée approximative, vérifier vos chiffres par la suite et nous les faire parvenir. Nous voulons savoir quels sont les segments de l'économie que cette industrie touche et à quel degré, afin de pouvoir comparer avec les secteurs qui risquent de se ressentir de la croissance de ce segment. À mon avis, c'est une question de macrodonnées.

M. Broeska : On compte plus de 200 000 cultivateurs de canola dans l'Ouest canadien et 25 000 cultivateurs de soya dans le Sud de l'Ontario. Ce secteur de base de l'industrie produit les graines oléagineuses qui alimentent l'industrie de la trituration. Les usines de trituration qui achètent ces graines auprès des cultivateurs sont situées en Ontario, au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta. Dix usines achètent cinq millions de tonnes de graines de soya et de canola auprès des cultivateurs et les transforment en huile végétale et en tourteaux de protéines. Ces usines vendent l'huile végétale à des raffineries ou la transforment elles-mêmes dans leurs propres raffineries. Il y a des raffineries au Québec, en Ontario, au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta. L'industrie de transformation des graines oléagineuses elle- même produit un volume annuel d'environ 6 milliards de dollars dans l'économie canadienne : 3 milliards de dollars de valeur ajoutée et de valeur de transformation que l'industrie retourne aux cultivateurs lors des achats de graines et 3 milliards de dollars en valeur commerciale, soit par remplacement des importations, soit par les recettes à l'exportation.

Le sénateur Massicotte : Ma question se rapporte à la margarine colorée. Le coût annuel que représente cette perte est-il de 20 millions de dollars?

M. Broeska : Oui : Nous avons estimé, en comparant cette part de marché à d'autres situations de marché analogues, que la part de marché perdue au Québec se chiffre à environ 20 millions de dollars par an.

M. McPhee : Pour illustrer ce point, précisons que la part de marché qu'occupe la margarine dans le marché combiné du beurre et de la margarine au Canada est d'environ 78 p. 100, alors qu'au Québec, elle se chiffre à environ 58 p. 100. La couleur de la margarine est le seul élément auquel on peut attribuer cette différence. Il est clair que le règlement québécois vise à donner au beurre une couleur plus attrayante qu'à la margarine.

À ces occasions économiques manquées en raison de la part de marché moins grande qu'occupe l'industrie vient s'ajouter le coût d'observation de la réglementation. Un fabricant national doit séparer ses chaînes de fabrication, conserver des stocks distincts et exploiter des systèmes de distribution distincts. Le plus grand fabricant national de margarine estime à 1,2 million de dollars par an le coût de cette exploitation séparée. Lorsqu'on ajoute les deux chiffres, la différence est d'environ 20 millions de dollars par année.

Le sénateur Massicotte : Vous dites que le manque à gagner est d'environ 20 millions de dollars. Vous affirmez que dans les autres provinces, 78 p. 100 des consommateurs achètent de la margarine, alors qu'au Québec, le pourcentage n'est que de 58 p. 100 et vous attribuez cette différence à la couleur de la margarine. Ai-je bien compris?

M. McPhee : Tout à fait : Ces 20 millions de dollars comprennent les coûts d'observation de la réglementation qui représentent environ 3 millions de dollars.

Le sénateur Massicotte : Avez-vous effectué des études sur la consommation au Québec qui révèlent que les consommateurs n'apprécient pas que la margarine ne soit pas colorée en jaune?

M. McPhee : Oui. Lorsque le problème s'est présenté, nous avons effectué un sondage d'opinion publique. Nous avons fait appel à un enquêteur professionnel qui a procédé à un sondage auprès d'un vaste échantillon de répondants. Les résultats du sondage ont révélé que 70 p. 100 des consommateurs québécois souhaitaient que le gouvernement abroge le règlement afin de pouvoir acheter de la margarine jaune à l'épicerie.

Le sénateur Massicotte : Je comprends cette observation. Tous les consommateurs veulent avoir plus de choix. Cependant, j'essayais de savoir si la différence de 12 p. 100 est due à la couleur de la margarine. Peut-on en déduire qu'une margarine plus jaune contribuerait à augmenter les ventes de 12 p. 100?

M. McPhee : Il n'est pas impossible de prouver un lien direct de cause à effet, mais nous nous sommes intéressés à la position différente sur le marché au Québec et aux facteurs révélés par ce type d'analyse par comparaison au reste du pays. L'apparence du produit est le facteur principal.

Le sénateur Angus : L'Industrie de l'huile végétale du Canada et la Canadian Oilseed Processors Association sont- elles deux entités distinctes?

M. Broeska : La Canadian Oilseed Processors Association que je représente est un regroupement d'entreprises qui achètent les graines de canola et les graines de soya directement auprès des cultivateurs et qui triturent ces graines afin de fabriquer de l'huile végétale et des tourteaux de protéines. Ces entreprises ont des usines un peu partout au Canada et expédient cette huile et ces tourteaux vers des marchés intérieurs et des marchés d'exportation. La Canadian Oilseed Processors Association est membre du groupe spécial d'intervention intitulé Industrie de l'huile végétale du Canada.

Le sénateur Angus : Il existe donc un lien entre les deux. Les membres de votre association sont-ils aussi membres de l'IHVC, qui est un groupe d'intervention de l'industrie?

M. Broeska : C'est exact.

Le sénateur Angus : Qui sont les membres de votre groupe?

M. McPhee : Nous comptons parmi nos membres la Canadian Canola Growers Association qui représente les cultivateurs de canola, surtout dans l'Ouest du Canada; la Canadian Oilseed Processors Association dont les sociétés membres sont la société Archer Daniels Midland Company, Bunge Canada, Cargill et Canbra Foods. Les autres membres sont Loders Croklaan, Unilever Canada et la Rich Products Corporation.

Le sénateur Angus : Monsieur McPhee, j'ai été intéressé par vos remarques au sujet des travaux que vous avez faits en vue de constituer une jurisprudence en faveur du libre-échange intérieur. L'article 121 a-t-il été invoqué dans certaines des causes?

M. McPhee : Non. Cependant, cette anomalie a été notée et on a fait remarquer à plusieurs reprises que l'article 121 n'avait pas été utilisé efficacement et que cette omission de la part du gouvernement fédéral depuis 1867 a eu pour résultat que les provinces adoptent des règlements qui ne sont pas cohérents sur le plan national. Dans le cas des trois expériences que j'ai relatées, le gouvernement fédéral n'est pas intervenu.

Le sénateur Angus : Est-ce qu'il y a beaucoup de barrières tarifaires intérieures qui devraient être interdites en vertu de l'article 121?

M. McPhee : À mon avis, oui.

Le président : Je précise, à l'intention des personnes qui nous regardent, que le sénateur Angus fait allusion à l'article 121 de la Loi constitutionnelle de 1867 qui se lit comme suit :

Tous les articles du cru, en provenance d'une province ou qui y sont produits ou fabriqués, seront, à dater de l'Union, admis en franchise dans chacune des autres provinces.

Cet article est essentiellement une mesure de libre-échange disposant que les articles produits dans une province puissent être achetés et vendus dans une autre province sans coût supplémentaire.

M. McPhee : C'est aussi mon interprétation.

Le sénateur Angus : La plupart des membres du comité ont une formation juridique et le texte nous paraît clair. Il n'a pas été invoqué. À votre avis, est-ce que cet article devrait s'opposer aux tarifs?

M. McPhee : Je ne suis pas un avocat mais j'ai souvent été en contact avec des avocats.

J'ai aussi pris part à la contestation juridique d'Unilever Canada qui a été entendue par la Cour suprême du Canada. Nous avions provoqué cette contestation en important de la margarine colorée au Québec, en infraction directe avec la loi.

Le juge de la cour supérieure avait accepté nos arguments, mais il avait jugé que notre argument concernant l'Accord sur le commerce intérieur ne s'appuyait pas suffisamment sur la loi québécoise.

La Cour d'appel du Québec avait confirmé ce point de vue et la Cour suprême du Canada également, notant que la Constitution autorise les provinces à imposer une réglementation, comme le Québec l'a fait dans le cas de la margarine colorée. Voilà le point de vue juridique exprimé par la Cour suprême du Canada.

Le sénateur Angus : Ce jugement était-il unanime?

M. McPhee : C'était une décision rendue à l'audience.

Le président : En quelle année?

M. McPhee : L'an dernier.

Le sénateur Angus : C'était la décision rendue par la Cour suprême?

M. McPhee : Oui.

Le sénateur Angus : C'était une décision rendue à l'audience, sans raisonnement de la cour?

Le sénateur Goldstein : Oui, la cour avait présenté son raisonnement.

M. McPhee : Permettez-moi de donner une précision importante à ce sujet : Quand on y réfléchit bien, je ne pense pas que cette décision soit très surprenante. Après m'être penché sur le débat entourant l'article 121 et après avoir lu les commentaires à ce sujet, il me semble que la décision n'est pas tellement surprenante. En effet, les provinces et le gouvernement fédéral ont signé l'Accord sur le commerce intérieur et ont déclaré explicitement qu'ils adopteraient des lois et des règlements conformes à l'engagement qu'ils ont pris dans le cadre de l'Accord sur le commerce intérieur. Or, ils n'ont pas respecté cet engagement. En vertu de leur engagement, ils auraient dû imposer une obligation analogue à celle qui leur incombe en matière de commerce international. Ils ont signé l'accord et se sont engagés à adopter des règlements en conformité des convictions et des obligations auxquelles ils avaient adhéré.

Le sénateur Angus : Le litige se rapportait-il à une interprétation de l'Accord sur le commerce intérieur plutôt qu'à la Constitution? Ça en a tout l'air. On dirait bien qu'ils ont éludé la question.

Nous avons déjà écrit une petite note afin de nous rappeler de demander à des spécialistes du droit constitutionnel de conseiller le comité au sujet de l'article 121. Vous avez fait allusion à d'autres principes de la jurisprudence commerciale internationale qui ont évolué au fil des années. Pouvez-vous nous mentionner quelques-uns de ces principes, s'il vous plaît?

M. McPhee : Un des principes qui me viennent à l'esprit est important. Et je crois qu'il confirme mon interprétation de l'accord qui comporte selon moi un engagement volontaire à faire en sorte que la portée de la réglementation soit conforme aux principes de l'accord.

L'auteur des conclusions du groupe spécial se rapportant à la contestation de la Loi sur les produits oléagineux comestibles de l'Ontario par la Colombie-Britannique et l'Alberta, a souligné fermement l'obligation pour les parties à l'accord d'honorer leurs engagements en matière de consultation. Les chapitres sectoriels concernant l'agriculture, l'énergie, etc., énoncent en détail les obligations de consultation qui incombent à chaque partie. Par ailleurs, le chapitre 17 qui porte sur la résolution des différends et qui encadre le recours au groupe spécial, est explicite sur la consultation, le préavis de toute intention de réglementer, et cetera, donnant à toutes les parties à l'accord la possibilité de commenter. Les membres du groupe spécial ont estimé que dans le cas de la Loi sur les produits oléagineux comestibles, l'Ontario n'avait pas eu une attitude appropriée et avait négligé ses obligations de consultation. Les membres du groupe spécial sont même allés plus loin, affirmant que toutes les parties n'avaient pas pris leurs engagements de consultation suffisamment au sérieux. C'est un exemple.

Le sénateur Angus : Monsieur Broeska, vous avez parlé du Programme de Doha et de la commercialisation des produits de votre industrie sur le marché international. Le comité peut-il déduire de vos commentaires que l'harmonisation de la réglementation dont bénéficie votre produit sur les marchés internationaux est plus grande qu'à l'intérieur de nos frontières et d'une province à l'autre?

M. Broeska : Il serait faux de dire que les obstacles ou les barrières tarifaires et non tarifaires n'existent pas sur les marchés mondiaux ou même sur le marché continental, dans une certaine mesure. Je voulais tout simplement faire une comparaison avec les négociations commerciales internationales afin de souligner tous les progrès accomplis à l'échelle mondiale, c'est-à-dire continentale et internationale, grâce à l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États- Unis et au GATT — et désormais grâce à l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC — alors que nous continuons à nous heurter aux mêmes obstacles sur le plan intérieur.

Avant la signature de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, nos huiles végétales n'avaient aucun débouché sur le marché américain. Jusque vers le milieu des années 1980, notre industrie n'avait jamais exporté un seul litre d'huile aux États-Unis. Grâce à l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, nous exportons désormais chaque année aux États-Unis d'importants volumes d'une valeur de plus d'un milliard de dollars.

Ensuite, nous avons négocié les conditions d'accès au marché chinois dans le cadre de l'Uruguay Round du GATT. Auparavant, nous n'avions pas accès à ce marché, sinon un accès illégal au marché gris. Nous avons désormais accès au marché chinois qui accueille le même type de produits que nous essayons de distribuer au Canada.

Le président : Quelle est votre expérience en Europe?

M. Broeska : L'expérience n'a pas été très concluante. Actuellement, notre accès au marché européen est limité, en raison essentiellement d'obstacles techniques au commerce et ces barrières nous sont imposées plutôt à cause de la modification génétique qu'en raison de la qualité de notre produit. Nous vendons des huiles végétales en Europe, mais ce sont essentiellement des huiles utilisées dans les biocarburants. Nos huiles ne sont pas autorisées comme produits alimentaires, à cause de la résistance à la modification génétique. Cependant, nous sommes prêts d'y parvenir et apparemment l'OMC à Genève nous a donné gain de cause dans un différend concernant un brevet. Je crois que nous allons obtenir l'accès au marché européen pour nos produits destinés à la consommation.

Le président : En résumé, en cas de différend en vertu d'un accord commercial international, il est possible de contester. Au Canada, il n'y a pas de restriction, mais absence d'exécution et vous ne pouvez même pas affirmer vos droits découlant du texte des divers accords. Mes commentaires préliminaires étaient justes. Le libre-échange existe pour votre produit aux États-Unis, mais pas au Canada.

M. Broeska : C'est exact. Il n'y a pas de solution. Le dispositif de résolution des différends prévu par l'Accord sur le commerce intérieur ne semble pas fonctionner. Nous savons tous que l'OMC et l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis ne sont pas exempts de problèmes, mais il semble possible de régler les différends, tout au moins dans le cas de nos produits.

Le sénateur Angus : Dans les deux exposés que vous avez présentés, les mots importants étaient « volonté politique ». Selon vous, le problème, mais aussi la solution, sont liés à la volonté politique. Il faut une forte volonté politique pour faire avancer les choses. Pouvez-vous nous donner plus de précisions à ce sujet? À quel niveau et sous quelle forme la volonté politique doit-elle se manifester?

M. McPhee : Les problèmes sont divers et interdépendants. Le Conseil de la Fédération tente actuellement d'adopter, selon ses propres termes, une approche pangouvernementale face à l'Accord sur le commerce intérieur. Dans notre cas, nous avons surtout eu affaire aux ministres de l'Agriculture. Or, au Canada, les ministres de l'Agriculture sont essentiellement sensibles aux revendications des groupes de pression des producteurs primaires, alors que l'Accord sur le commerce intérieur lie le gouvernement dans son ensemble et non pas tel ou tel ministre. Nous n'avons pas l'impression que l'Ontario et le Québec en particulier considèrent selon une approche pangouvernementale l'accord et les obligations qui en découlent. Nous avons eu affaire à des ministres de l'Agriculture qui sont préoccupés par les revendications des groupes de pression locaux. C'est un des grands problèmes.

Le président : Il s'agit d'une lutte entre producteurs et je suppose que le groupe de pression qui appuie ces mesures protectionnistes est le lobby des producteurs laitiers.

M. McPhee : Vous avez tout à fait raison.

Le président : De l'autre côté, il y a les producteurs du secteur agricole — l'industrie du canola et des graines oléagineuses. Quelle est la taille de ces deux secteurs agricoles?

M. McPhee : L'industrie laitière représente environ 4,5 milliards de dollars.

Le président : C'est beaucoup. Et combien de personnes cette industrie emploie-t-elle?

M. McPhee : Vingt mille.

Le président : C'est donc 20 000 personnes dans une industrie qui représente 5 milliards de dollars?

M. McPhee : Il s'agit de 4,5 milliards de dollars, oui.

Le président : Et combien sont les cultivateurs, qui appartiennent aussi au milieu agricole?

M. Broeska : Il y a environ 200 000 cultivateurs de canola dans l'Ouest du Canada et environ 25 000 cultivateurs de soya, surtout en Ontario.

Le président : Pourquoi votre groupe de pression n'a-t-il pas réussi aussi bien que le lobby des producteurs laitiers à éliminer ces obstacles? Est-ce une question de volonté politique?

M. McPhee : Nos cultivateurs se trouvent dans l'Ouest du Canada; les leurs sont dans l'Est du Canada.

Le président : Mais vous avez dit que certains de vos cultivateurs se trouvaient en Ontario et au Québec.

M. McPhee : La plus grande partie se trouve dans l'Ouest du Canada. Il y a aussi une autre façon de voir les choses : Les provinces qui présentent une grande concentration de secteurs à offre réglementée sont celles où nous rencontrons le plus de problèmes — et c'est bien entendu le cas de l'Ontario et du Québec.

L'observation des mécanismes de régulation de l'offre m'a permis de déceler une tendance qui consiste, en Ontario et au Québec en particulier, à faire appliquer la réglementation au-delà des objectifs énoncés ou des principes de régulation de l'offre — c'est-à-dire la commercialisation et la distribution des produits primaires. Il y a une tendance à déborder et à protéger ces produits jusqu'au niveau de la distribution dans les magasins de détail.

C'est exactement ce qu'a fait la Loi sur les produits oléagineux comestibles. Les amendements apportés à la Loi sur le lait en Ontario précisaient la composition des produits qui pouvaient être vendus sur le marché. Il me semble que cela ne relève pas ou ne devrait pas relever de la régulation de l'offre. La loi devient un instrument concurrentiel et protectionniste qui sert à écarter les produits que je représente du marché de l'Est canadien.

Le sénateur Goldstein : Merci à tous les deux pour vos excellents exposés. Nous les avons appréciés.

Nous nous sommes débattus avec les conséquences macroéconomiques des obstacles au commerce. Lorsque l'Alberta manque de main-d'œuvre et que le Québec connaît un important taux de chômage, les conséquences macroéconomiques sont graves si les travailleurs du Québec ne peuvent pas se rendre en Alberta pour combler les besoins en main-d'œuvre. Le coût de la main-d'œuvre augmente et la productivité est à la baisse — cela entraîne toutes sortes d'autres conséquences que vous connaissez certainement.

Dites-moi quelles seraient les conséquences macroéconomiques de l'ouverture des marchés ontariens et québécois grâce à l'élimination réelle des problèmes de réglementation concernant la couleur et autres. Je vous ai souvent entendus tous les deux utiliser les mots « accès » et moins souvent les mots « part de marché ». Est-ce une situation gagnant-perdant? Si vous parvenez à augmenter votre part du marché, celle de l'industrie du beurre diminuera d'autant. Ce serait les conséquences macroéconomiques.

M. McPhee : Sur le plan des coûts, je peux vous citer les coûts d'observation du règlement québécois concernant la couleur de la margarine.

Le sénateur Goldstein : Ces coûts se chiffrent à 1,2 million de dollars.

M. McPhee : En effet, mais c'est un coût — une perte sèche. Quant aux parts de marché, est-ce une situation gagnant-perdant? Je ne pense pas. Nous pensons que les consommateurs recherchent de plus en plus des produits novateurs, à valeur ajoutée.

Par exemple, certains produits dont je parle sont composés d'huile végétale et de produits laitiers, offrant une proportion moindre de graisse saturée et plus de matière grasse poly-insaturée, une composition qui joue un rôle dans la réduction des maladies cardiovasculaires. Nous pensons que le secteur des produits laitiers et celui de l'huile végétale bénéficieraient de la croissance du marché, pour le mieux-être des consommateurs. Je ne pense pas qu'il s'agisse d'un jeu à somme nulle. Je pense au contraire que cela représente un potentiel de croissance absolue du marché.

Le président : Quelle est la taille du marché aux États-Unis? Est-il dix fois plus grand que celui du Canada?

M. McPhee : Je pense que c'est une bonne évaluation pratique.

Le président : Les États-Unis représentent donc un formidable marché pour vos produits.

M. McPhee : Oui.

Le sénateur Goldstein : Cependant, la modification des lois québécoises et ontarienne ne serait pas utile à votre marché aux États-Unis.

M. McPhee : Ces lois ont quand même une incidence. Si un fabricant canadien ne peut pas pénétrer les marchés de l'Ontario et du Québec, il n'installera pas ses usines de production ici, mais plutôt en Pennsylvanie.

Les grandes multinationales de l'industrie alimentaire donnent fréquemment à une usine la mission d'assurer l'approvisionnement de tout le secteur nord-américain. Une telle mission ne serait jamais accordée à une usine canadienne qui serait dans l'impossibilité de desservir le plus grand marché du Canada. Cette usine serait choisie aux États-Unis.

Le président : J'ai une question supplémentaire concernant le coût unitaire; nous avons connu la même situation dans le cas de la bière. Je connais le dossier de la bière. Une seule brasserie installée dans n'importe quelle région du pays pourrait répondre à l'ensemble de la demande de bière au Canada, mais il faut offrir un choix de bières différentes. Et ce n'est pas uniquement une question de choix, il y a aussi le service aux grandes marques de bières.

Vous estimez, je suppose, que si vous aviez librement accès au marché national, vous pourriez réduire vos coûts unitaires et offrir une concurrence plus vive à des produits similaires aux États-Unis. Est-ce l'argument que vous avancez?

M. McPhee : J'ai cité le rapport d'Agriculture Canada; c'est, je crois, ce qu'on peut lire dans ce rapport.

Le sénateur Ringuette : Je n'ai pas les ambitions que vous avez évoquées dans vos remarques préliminaires. Mon ambition, à titre de membre du comité, est de présenter, autant que possible, des suggestions et commentaires productifs.

Vous nous avez décrit la part de marché qu'occupent au Canada la margarine et le beurre et vous avez souligné en particulier la part de ce marché au Québec. Ma première question est la suivante : Combien de vos membres approvisionnent-ils ce marché?

M. McPhee : Premièrement, le plus grand fabricant de margarine au Canada est Unilever qui occupe environ 65 à 70 p. 100 du marché de la margarine. Par conséquent, le marché est dominé par un fabricant. Parmalat est un autre fabricant de margarine, qui n'est pas membre de l'IHVC; c'est le seul autre important fabricant national.

M. Broeska me signale qu'il y a un autre fabricant de margarine parmi les membres de l'IHVC. Il s'agit de Cambra qui fabrique des produits comme Canola Harvest. Quant aux produits d'Unilever, ce sont bien sûr Becel, I Can't Believe It's Not Butter, Blue Bonnet et Fleishmann's.

Le sénateur Ringuette : Parmi ces succédanés laitiers, quels sont les produits que les États-Unis importeraient — produits primaires et divers éléments ajoutés dans la fabrication des produits de consommation?

M. McPhee : La margarine est l'exemple même du succédané laitier. Les États-Unis n'en importent pas en raison du contingent tarifaire élevé. Nous pouvons y exporter de petites quantités, mais les droits de douane sont de l'ordre de 300 p. 100.

Le sénateur Ringuette : J'essaie de confronter toutes ces informations à ce que vous avez dit un peu plus tôt, à savoir que pour augmenter votre production au Canada, les marchés de l'Ontario et du Québec doivent s'ouvrir.

Nous fabriquons actuellement presque la totalité des succédanés laitiers au Canada.

M. Broeska : C'est exact. Le commerce transfrontalier est extrêmement limité en raison des règlements provinciaux. Un marché qui applique de telles barrières techniques et tarifaires présente peu d'intérêt. Comme nous le savons tous, l'industrie qui applique un procédé de régulation de l'offre, se protège des autres pays en frappant les importations de droits de douane élevés. Nous disons que notre industrie et le marché national pourront réaliser des économies d'échelle, mais que le secteur laitier de l'industrie pourra également en bénéficier.

De manière générale, nous expédions de l'huile végétale du Canada vers les États-Unis. La plus grande partie de cette huile végétale entre dans la composition de produits mélangés, de produits analogues et de margarine, ainsi que dans des produits laitiers. Ce secteur du marché est en croissance. Les consommateurs réclament différents types de produits et pas seulement des produits traditionnels comme le lait et le beurre sans produits ajoutés. Les consommateurs recherchent des mélanges et des produits analogues qui correspondent mieux à leurs préférences nutritives et leur permettent d'adopter de meilleures habitudes d'alimentation. C'est ce que leur offrent les produits laitiers mélangés avec des huiles végétales. Jusqu'à présent, le choix de ces produits au Canada est limité et nous affirmons que les consommateurs canadiens devraient pouvoir bénéficier des produits à base d'huile végétale que nous offrons à des consommateurs de plus en plus nombreux à l'extérieur du Canada.

Le président : Il faut analyser la situation dans une perspective macroéconomique ainsi que sous l'angle microéconomique. Vous expédiez vos produits aux États-Unis plutôt que de fabriquer des produits à valeur ajoutée et de créer des emplois au Canada, à cause des restrictions appliquées sur le marché canadien.

M. Broeska : Tout à fait. Les produits que nous expédions aux États-Unis ne sont pas des produits transformés. Dans la plupart des cas, nous expédions en vrac, par train ou par camion, des huiles semi-raffinées ou même brutes qui seraient complètement transformées en produits à valeur ajoutée, produits mélangés, produits laitiers d'imitation, produits analogues ou margarine, prêts à la vente dans un magasin de détail.

Tant que nous n'aurons pas accès au marché national, les investisseurs susceptibles de s'intéresser à ce type d'usine se montreront réticents à investir dans un marché uniquement axé sur l'étranger.

Nous pensons qu'il est plus logique et plus rentable d'avoir sa principale base commerciale dans le marché national et de cultiver des marchés à l'étranger en guise de complément. En raison des restrictions sur le marché national, nous avons tendance à expédier nos produits à l'extérieur du pays vers des usines de transformation afin de créer des produits à valeur ajoutée à partir de nos exportations de produits bruts et de matières premières.

Le sénateur Ringuette : L'autre aspect de la question que vous a posée le sénateur Grafstein et à laquelle vous avez répondu est que les règlements provinciaux empêchent les importations transfrontalières. En éliminant les règlements provinciaux, nous ouvrirons la porte aux importations américaines. C'est un autre phénomène à prendre en considération.

Le président : Le sénateur Ringuette a soulevé une question importante. De la même manière que la diminution ou l'harmonisation des règlements au Canada permettrait aux Canadiens de fabriquer ces produits dans toutes les régions du pays, cette harmonisation de la réglementation ouvrirait également les portes aux produits américains et augmenterait la concurrence. Que répondez-vous à cela?

M. McPhee : Nous sommes favorables au libre-échange. Nous pensons que les produits fabriqués ici par des Canadiens, à partir de matières premières canadiennes selon la description de valeur ajoutée présentée par M. Broeska, seraient très concurrentiels, à la fois sur le marché canadien et comme produits d'exportation.

Le président : Je répète ma question. Seriez-vous prêts à affronter la concurrence si vous disposiez pour vos propres produits d'une plus grande part de marché au Canada?

M. Broeska : Absolument.

Le sénateur Ringuette : Je vais encore faire l'avocat du diable. Vous avez dit que si le marché canadien englobait l'Ontario et le Québec, cela justifierait la création d'une usine en Pennsylvanie pour approvisionner l'ensemble du marché canadien.

M. McPhee : Je voulais faire remarquer que l'industrie alimentaire a tendance à vouloir constituer une chaîne d'approvisionnement sur le marché nord-américain. Si l'on soustrait les deux tiers du marché canadien, il est clair que la filiale canadienne d'une société de distribution ne pourra être investie de la mission de desservir le marché nord- américain à partir d'une usine au Canada.

Le sénateur Ringuette : Parmi les membres de votre association que vous avez cités, je suppose que la Canadian Canola Growers Association et la Canadian Oilseed Processors Association sont des groupes essentiellement canadiens. Par contre, je ne connais pas les autres noms : Archer Daniels Midland, Bunge Canada, Canbra Foods, et cetera.

Parmi ces sociétés, combien ont-elles leur siège aux États-Unis?

M. McPhee : Commençons par les membres.

M. Broeska : Voilà : Bunge Canada, Cargill et ADM ont leurs sièges sociaux aux États-Unis mais ont d'importantes installations au Canada. Ces sociétés exploitent des usines de trituration et des raffineries d'huile végétale en Ontario, au Québec, au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta.

M. McPhee : Les sièges sociaux d'Unilever sont à Londres et à Rotterdam. Le siège canadien se trouve ici à Toronto. Le siège social de la Rich Products Corporation est à Buffalo (New York). Aarhus Karlshamn est au New Jersey. Loders Croklaan est installé dans l'Illinois.

Le président : Ce sont toutes essentiellement de grandes entreprises étrangères. Est-ce qu'il y a une grande entreprise canadienne ou deux dans ce secteur?

M. McPhee : Loders et Croklaan concentre ses activités dans le domaine de l'huile de palme. Les usines canadiennes et les membres de l'association de M. Broeska transforment essentiellement de l'huile de canola et de l'huile de soya. Comme je l'ai déjà dit, Unilever est installée ici. Le siège social de Canbra est en Alberta.

Le sénateur Meighen : Mes collègues ont posé la plus grande partie des questions. Je vais quand même en poser une. J'ai cru déceler, surtout chez vous, monsieur McPhee, une sorte de scepticisme et de résignation dans la voix. Cela peut d'ailleurs se comprendre aisément, puisque vous avez traité de ces questions des centaines de fois. Le résultat est toujours le même et cela doit être décourageant.

Vous affirmez que seule une volonté politique pourra briser ce cercle vicieux. Êtes-vous convaincu — et rien n'indique le contraire — que votre industrie et d'autres organes ont proposé d'autres moyens de résoudre ce problème par des mesures transitoires, des dispositions de temporisation ou d'autres mesures susceptibles d'inciter l'industrie laitière en particulier à envisager de changer sa position? Avez-vous pensé à de telles solutions ou croyez-vous que le problème ne pourra être réglé que si les politiciens à l'échelon provincial et à l'échelon fédéral prennent la décision d'intervenir?

M. McPhee : Lorsque je me tourne vers les marchés internationaux dans l'espoir de trouver une solution pour assurer le bon fonctionnement des ententes commerciales, je pense beaucoup aux mesures de rétorsion. Si le Québec ferme son marché à la margarine jaune à base de canola, pourquoi l'Alberta et la Colombie-Britannique seraient-elles tenues d'accepter le beurre du Québec?

Pourquoi ne pas exiger que le beurre vendu dans l'Ouest du Canada soit blanc? Voilà comment les différends sont parfois réglés sur la scène internationale. L'Accord sur le commerce intérieur prévoit des mesures commerciales de rétorsion.

Je pense que d'autres idées ont également été évoquées devant votre comité. Dans le cas des deux audiences de l'ACI auxquelles j'ai participé, si une des parties concernées refuse d'accepter les conclusions du groupe spécial, pourquoi la personne ou l'entreprise ne pourrait-elle pas introduire une action en dommages-intérêts?

M. Broeska : Je pourrais peut-être apporter un complément à la réponse de M. McPhee. Plusieurs fois on a reproché à notre groupe de vouloir prendre des mesures radicales contre la régulation de l'offre et en particulier contre l'industrie laitière.

Notre objectif n'est pas de contester les droits de l'industrie laitière, ni sa structure, ni sa capacité à commercialiser ses produits. Nous voulons tout simplement que les règles d'accès au marché soient équitables pour tous. Nous voulons pouvoir disposer des mêmes possibilités justes et équitables que l'industrie laitière afin de vendre nos produits à base d'huile végétale — mélanges, produits analogues ou suppléments. Nous souhaiterions disposer d'un mécanisme. Nous tentons constamment de faire valoir que dans la plupart des autres marchés du monde, les mélanges, les produits analogues et les suppléments offrent une façon d'accéder au marché de consommation sur une base juste et équitable.

Oui, le secteur laitier bénéficie d'un appui général. De par sa nature même, le secteur agricole exige l'appui des producteurs laitiers. Cependant, nous constatons que la plupart des pays sont également favorables au changement des préférences des consommateurs et autorisent ou encouragent des réglementations permettant à l'industrie laitière et à l'industrie des graines oléagineuses de coexister et de partager la croissance du marché. Les produits alimentaires proposant un mélange de produits laitiers et d'huile végétale sont en forte croissance sur le plan international. Nous ne contestons pas les droits des producteurs laitiers. Nous voulons tout simplement travailler en partenariat avec eux, mais nous n'avons pas encore trouvé la façon de le faire.

Le président : S'il n'y a pas d'autres questions, je vais lever la séance. Je remercie les témoins. Ils nous ont donné une perspective très intéressante sur les problèmes que nous continuons à aborder dans le cadre de notre étude. Nous avons l'intention de nous déplacer prochainement au Canada afin de nous rendre dans toutes les régions du pays pour examiner ces questions dans une perspective régionale ainsi que nationale. Nous sommes tout à fait décidés à ouvrir un débat politique sur cette question afin de préciser quelle serait la meilleure solution dans l'intérêt du Canada et de l'ensemble de la population canadienne et afin d'accroître la productivité de notre économie qui, nous le savons, traîne derrière celle de notre voisin du Sud.

Merci beaucoup. Nous aimerions recevoir tout autre commentaire que vous souhaiteriez formuler par écrit, soit des statistiques, soit des opinions juridiques. Veuillez les faire parvenir à notre greffier. Nous veillerons à ce que le comité soit tenu au courant. Nous concentrons notre attention sur cette question et nous avons l'intention de l'étudier attentivement afin de présenter des recommandations dans les intérêts supérieurs de l'ensemble de la population canadienne.

Le sénateur Angus : Puis-je vous poser une autre question avant que vous partiez? Le sénateur Grafstein et moi- même, ainsi que d'autres sénateurs et députés, étions à Washington la semaine dernière pour rencontrer les nouveaux intervenants, y compris le président du comité de l'agriculture. Nous avons beaucoup entendu parler des prix du maïs, de l'éthanol et du biodiesel et nous avons entendu dire que le canola plaçait le Canada en position avantageuse pour la production du biodiesel. Est-ce qu'il ne fait pas assez froid dans le Sud pour produire du canola?

M. Broeska : C'est tout à fait vrai.

Le vice-président : Apparemment, ces usines d'éthanol poussent comme des champignons, une par jour, ajoutant une autre source de revenus à une industrie qui connaît actuellement des difficultés.

M. Broeska : Oui.

Le vice-président : Avez-vous quelque chose à rajouter au sujet du problème de barrière commerciale intérieure dans le domaine de l'éthanol ou du biodiesel?

M. Broeska : Nous pensons que le biocarburant est sur le point de bouleverser complètement la situation de l'agriculture, non seulement aux États-Unis ou au Canada, mais dans le monde entier. Les agriculteurs vont désormais cultiver du maïs pour produire de l'éthanol, ainsi que du soya, du canola, du tournesol et de l'huile de palme pour fabriquer du biodiesel. Les biocarburants vont complètement révolutionner l'agriculture mondiale et nous pensons que ce n'est qu'un début. Les producteurs de récoltes en vue de la fabrication d'éthanol et les cultivateurs de récoltes nécessaires à la production de biodiesel se livreront une vive concurrence pour l'utilisation des terres, et on assistera également à une concurrence dans l'utilisation de ces produits à des fins alimentaires plutôt qu'à des fins de transformation en carburant.

Nous pensons que ce défi sera énorme et qu'il aura des incidences sur le commerce. L'Argentine et le Brésil, deux pays qui cultivent le sucre et le soya envisagent d'exporter de l'éthanol et du biocarburant en Europe et en Asie. La Malaysia produit déjà du biodiesel à partir d'huile de palme et exporte de grandes quantités de ce produit en Europe. L'Indonésie commence tout juste à s'intéresser à l'industrie de l'huile de palme et à la culture d'autres plantes exotiques entrant dans la production de biocarburants. Ce changement occasionnera une transformation radicale de la structure des échanges. Certains pays cesseront d'exporter des matières premières, des grains et des graines oléagineuses non transformés et exporteront sur les marchés internationaux des produits primaires, des huiles végétales et des biocarburants. D'ici quelques années, la structure des échanges aura changé de manière spectaculaire.

Vous avez raison : de nombreuses usines sont proposées, non seulement aux États-Unis, mais également en Europe, au Canada, en Amérique du Sud et dans certaines régions de l'Asie comme en Malaysia et en Indonésie. Une révolution de proportions gigantesques est actuellement en cours.

Le président : Encore une fois merci. Nous avons l'intention d'examiner aussi l'incidence qu'auront ces produits sur le commerce international, étant donné qu'ils compteront également dans le développement futur du Canada. Comme l'a dit le sénateur Angus, nous avons passé quelque temps à Washington. Nous avons abordé ces différentes questions avec nos collègues du Congrès, tant au Sénat qu'à la Chambre des représentants. Ils sont intéressés par les mêmes enjeux que nous et nous tenons à nous assurer qu'ils ne vont pas tenter de prendre le dessus.

La séance est levée.


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