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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 12 - Témoignages du 6 décembre 2006


OTTAWA, le mercredi 6 décembre 2006

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit ce jour à 16 h 13 pour étudier le financement du traitement de l'autisme.

Le sénateur Art Eggleton (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Nous poursuivons aujourd'hui notre examen des enjeux entourant l'autisme et, plus particulièrement, le rôle fédéral en matière de financement.

Nous entendrons deux groupes cet après-midi. Au cours de la première heure, nous recevrons les parents d'enfants autistiques et, au cours de la deuxième heure, nous entendrons des autistes eux-mêmes.

Avant de commencer avec notre premier panel, j'aimerais porter quelques informations à votre attention. Premièrement, une motion sur cette question a été adoptée hier par la Chambre des communes. Cette motion, présentée par Andy Scott, dit ceci :

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait adopter une stratégie nationale sur les troubles du spectre autistique, qui comporterait : a) l'établissement, en coopération avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, de normes nationales pour le traitement des troubles du spectre autistique et la prestation des services afférents; b) l'élaboration, aussi en coopération avec les gouvernements provinciaux, de méthodes novatrices de financement des soins pour ceux qui souffrent de troubles du spectre autistique; c) la consultation avec les gouvernements provinciaux et territoriaux et les autres intervenants pour établir un programme national de surveillance de l'autisme; d) le financement additionnel de la recherche sur le traitement des troubles du spectre autistique par le gouvernement fédéral.

Cela a été adopté par la Chambre et je crois savoir que tous les partis, à l'exception du Bloc, ont voté en faveur de ce texte hier. Le parti gouvernemental a voté pour, tout comme l'opposition. D'autres actions sont en cours. Nous examinons ici toute la question d'une stratégie nationale en vue de formuler une motion que nous enverrons au gouvernement.

Par ailleurs, sachez que la Chambre des représentants des États-Unis a adopté le Combatting Autism Act. Cette loi débloque près de 1 milliard de dollars sur les cinq prochaines années afin de combattre l'autisme par le biais de la recherche, du dépistage, de la détection et de l'intervention précoce.

Voilà donc deux nouvelles pour vous. Divers organes législatifs portent de plus en plus d'attention à cette question.

Ce premier panel est composé de quatre personnes. M. John Erb a étudié la psychologie à l'Université de Waterloo. Il a commencé à travailler avec des personnes atteintes de troubles mentaux et, après dix années passées en première ligne comme conseiller en établissement, a travaillé pour une administration municipale et géré une charge professionnelle de 200 personnes souffrant de diverses déficiences. Nombre d'entre elles étaient des enfants et jeunes adultes autistes. En 2000, il est devenu conseiller de direction dans un établissement résidentiel spécialisé dans le soin des autistes. Il continue à créer des programmes de traitement afin d'améliorer les aptitudes des autistes. Il met actuellement sur pied un centre de traitement sans but lucratif ayant pour mission de découvrir de meilleures méthodes pour améliorer la condition des autistes. Soyez le bienvenu, monsieur Erb.

Mme Lisa Simmermon a été pendant de nombreuses années, et est peut-être toujours, la directrice des relations publiques de Saskatchewan Families for Effective Autism Treatment, Inc., ou SASKFEAT, et est ancienne présidente de la Société canadienne d'autisme. Dans le milieu des années 1990, son fils, alors âgé de sept ans, a fait l'objet d'un diagnostic d'autisme. Pendant plus d'une décennie, elle a mené campagne pour l'accroissement de la recherche sur l'autisme au Canada et en faveur d'un programme provincial de traitement efficace de l'autisme en Saskatchewan.

La Dre Sheila Laredo est mère de trois enfants, dont deux, âgés de dix et huit ans, sont atteints d'autisme. Elle est docteure en médecine diplômée de l'Université de Toronto.

M. Andrew Kavchak habite Ottawa et est père de deux garçons, dont l'un est autiste. Peu après le diagnostic, et pendant que son fils était sur la liste d'attente du ministère des Services sociaux, M. Kavchak a commencé à intervenir auprès des autorités provinciales et fédérales en vue d'un accroissement des ressources et l'élimination des listes d'attente et la suppression des limites d'âge pour les soins, ainsi que la couverture par l'assurance-maladie des traitements de l'autisme tel que l'ACA, l'analyse comportementale appliquée, et l'ICI, l'intervention comportementale intensive, l'emploi de l'ACA dans les écoles et l'élaboration d'une stratégie nationale sur l'autisme.

Bienvenue à vous tous.

John Erb, à titre personnel : Je ne parle pas français et je vais donc parler en anglais, malheureusement.

Je travaille en première ligne avec les autistes depuis 20 ans. J'ai travaillé non seulement dans des foyers de groupe mais aussi au sein d'administrations municipales, tant dans les services en établissement que dans la recherche d'emplois assistés pour des personnes atteintes d'autisme. Actuellement, je suis consultant de direction et travaille à des programmes visant à améliorer les services résidentiels pour les autistes.

Je vais citer quelques chiffres intéressants. Ils sont tirés des normes d'assurance-maladie américaines actuelles, où il existe un nombre suffisant d'autistes pour que l'on ait fixé des normes relatives à la rémunération et aux services en établissement, et des choses de cette nature.

La difficulté avec l'autisme c'est qu'un très petit nombre des personnes atteintes ne pourront jamais occuper un emploi ordinaire. Même s'ils travaillent, pour la plupart il s'agira un emploi assisté. Certaines de ces personnes ont un comportement agressif, surtout pendant les années d'adolescence, et certaines le conservent pendant toutes leurs années adultes. Ces personnes ont besoin de programmes spécialisés. L'autisme n'est pas une forme standard d'arriération mentale; il exige de ce fait un traitement encore plus actif, avec un plus fort taux de thérapeutes par patient.

Aux États-Unis, l'assurance-maladie rémunère actuellement les prestataires de soins en établissement 12,83 $ de l'heure. Un programme de soins est établi pour chaque personne. Les autistes tendent à requérir davantage d'heures. Généralement, leurs programmes thérapeutiques couvrent une moyenne de 80 heures par semaine. Avec 52 semaines de soins, le total se chiffre à 53 000 $ par an. Je ne parle là que des services résidentiels de nuit. Les programmes de jour sont actuellement financés à hauteur de 70 $ pour un programme de quatre heures. Cela représente un coût hebdomadaire de 350 $, multiplié par 52 semaines, dont 18 000 $ par an. Le soin d'un autiste moyen coûte donc annuellement 71 489 $ aux États-Unis. Si la personne suit un programme thérapeutique de l'âge de 20 ans jusqu'à l'âge de 60 ans, cela fait 40 années pour un coût total de 2 859 000 $, sans compter l'inflation.

Le CDC, les Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis, chiffre le taux actuel de naissances d'autistes à un sur 166 naissances. Au Canada, cela représenterait un enfant autiste naissant toutes les quatre heures. Au Canada, nous pourrions voir cette année la naissance de 2 190 enfants autistes. À 2 859 000 $ par personne pour la durée de leur vie, ces enfants coûteraient au contribuable 6 262 000 000 $. Je ne parle là que du groupe d'enfants autistes naissant cette année. Le groupe de l'an prochain coûtera autant.

Le CDC avance que, de 1994 à 2003, la fréquence de l'autisme a été multipliée par six. Si cette tendance se poursuit, d'ici 2012, nous devons nous attendre à ce que le taux passe de un pour 166 naissances à un pour 28. Cela se traduirait par une naissance autistique toutes les 40 minutes au Canada, ou 13 000 naissances d'autistes par année en 2012. Ces personnes représenteraient un fardeau fiscal de quelque 37 milliards de dollars.

Ces chiffres ne comprennent pas le coût de l'éducation spécialisée jusqu'à l'âge de 20 ans, le coût des consultations médicales et visites d'hôpital ou le coût des médicaments. Ce sont là des chiffres sérieux à considérer et qui sont réalistes. C'est le coût réel du traitement standard en foyer résidentiel de groupe aux États-Unis, et le coût est comparable ici, au Canada.

L'une des raisons de ma présence ici aujourd'hui est que le Dr Jorgen Schlundt, directeur de la sécurité alimentaire de l'Organisation mondiale de la santé a lu un rapport que j'ai documenté et présenté aux Nations Unies en août. Le rapport que je lui ai adressé, et dont certains d'entre vous avez copie, traite spécifiquement de l'autisme à la page 19. Le rapport lui-même parle des dangers d'un additif alimentaire appelé glutamate monosodique, GMS.

La première partie du document traite du fait que le GMS est utilisé intentionnellement pour déclencher des crises épileptiques chez des cobayes, pour causer des lésions cérébrales, pour endommager les cellules oculaires. Dans plus de 500 études, on a employé du glutamate monosodique injecté sous la peau pour créer intentionnellement des sujets obèses et hyperinsulinaemiques. La substance déclenche et peut déclencher le diabète.

Je suis allé plus loin et ai suggéré l'existence d'un rapport entre l'autisme et le glutamate monosodique. Sur l'envers de la feuille intitulée « Coût de l'autisme » dans mon mémoire, vous trouverez quelques faits intéressants. L'un est que les personnes autistiques ont un cerveau plus volumineux; un taux de croissance anormalement rapide peut être un signal d'alarme précoce du risque d'autisme. Nombre de ces enfants ont une masse cérébrale plus lourde. Lorsqu'on les examine, on constate que leurs neurones sont disposés plus densément et qu'il y a une plus grande prolifération de cellules.

En juin 2006, une étude publiée par Schlett a fait la preuve que le glutamate accélère la croissance du cerveau et cause l'apparition de neurones supplémentaires dans le cerveau.

Je propose une théorie, et cherche à trouver un soutien et des recherches pour la confirmer, disant que le glutamate monosodique est susceptible d'accélérer la croissance du cerveau humain, particulièrement in utero, au cours des deux premiers mois de la gestation, lorsque le système nerveux central, le cerveau et les yeux se forment.

Un autre élément intéressant concernant le glutamate monosodique, c'est qu'on le rencontre dans divers vaccins. Le GMS est très commun. Je ne sais pas combien de personnes n'ont jamais mangé ou donné à manger à leurs enfants les produits que je montre ici : potage crème de champignon, croustilles aromatisées, Hamburger Helper, M. Noodles, ou du GMS sous sa forme pure, Accent, qui est utilisé aux Philippines. Là-bas, ils en mettent habituellement une à deux cuillérées à soupe dans un petit pain pour tuer un chien. Cela déclenche une crise épileptique et ils tuent ensuite le chien. Malheureusement, dans certaines régions des Philippines, ils mangent ce chien préassaisonné.

C'est pourquoi je fais valoir aujourd'hui que le glutamate monosodique est associé à suffisamment de dangers pour qu'on le retire des aliments. Je crois — et certaines des études que j'ai découvertes valident la thèse — que le glutamate accélère la croissance du cerveau et il n'est pas nécessaire d'ajouter cette substance à la nourriture de nos enfants.

Le troisième fait est que le glutamate monosodique est un additif couramment utilisé dans la restauration rapide et l'industrie alimentaire et est ajouté dans le but express de nous faire manger davantage du produit. Cet aveu vient de la Glutamate Association elle-même et on peut le lire sur son site Internet à l'adresse msgfacts.com.

Ma proposition en vue de réduire l'autisme consiste à introduire à la Chambre des communes un projet de loi imposant un moratoire à l'utilisation de l'additif alimentaire qu'est le monosodium glutamate et des additifs apparentés qui en contiennent; exigeant que les produits contenant du glutamate portent un avertissement à l'intention des femmes enceintes et(ou) allaitantes; imposant une taxe aux compagnies qui choisissent de continuer à utiliser le glutamate; et exigeant que tous les vaccins soient exempts d'ingrédients contenant du glutamate. Des recherches devraient être effectuées ciblant spécifiquement l'effet du glutamate sur le développement de l'enfant.

Des recherches devraient également être entreprises sur l'emploi de la mélatonine pour le traitement de l'autisme. Certaines études ont constaté des niveaux excessivement élevés de dopamine dans le fluide spinal des autistes. La mélatonine est le contre-agent naturel de la dopamine, cette dernière étant une substance chimique causant une forte hyperactivité, et la mélatonine étant un contre-agent naturel qui a pour effet de réduire cette tendance à l'hyperactivité. Dans les centres de traitement résidentiel que je supervise, j'ai constaté que la mélatonine aide les patients autistes à mieux se concentrer et réduit leur comportement obsessif-compulsif.

Lisa Simmermon, témoignage à titre personnel : Je suis mère d'un jeune homme autiste de 17 ans qui vit dans une province où il n'y a pas de programme provincial de traitement de l'autisme et où les familles doivent chercher par elles-mêmes, et souvent payer de leur poche, les différents éléments d'un programme complet de traitement de l'autisme.

L'absence de traitement et de services assurés pour les troubles du spectre de l'autisme, ou TSA, m'a amené à plus d'une décennie de travail bénévole sur cette question en vue d'amener et mon gouvernement provincial et le gouvernement fédéral à s'attaquer à ce problème de manière cohérente et coordonnée. Jusqu'à présent, je n'y ai pas réussi.

Cependant, le traitement n'est pas un sujet homogène. Un traitement efficace englobe, mais ne se limite pas à une intervention comportementale intensive, cette dernière pouvant suivre plusieurs méthodes : la thérapie de communication, qui combine l'orthophonie et la thérapie de communication augmentative ou alternative; l'ergothérapie et/ou physiothérapie pour traiter les problèmes musculaires et sensoriels inhérents au TSA; le suivi médical, notamment pour les nombreuses différences inhabituelles que la plupart des autistes présentent au niveau de leur système digestif, endocrinien, métabolique et immunitaire; et, parfois, des thérapies autres pour des problèmes particuliers.

Nous avons fait de notre mieux pour nous procurer divers éléments de ces thérapies, dans la mesure de nos moyens financiers limités, puisque notre revenu familial est inférieur au seuil de faible revenu de Statistique Canada. Lorsque mon fils avait trois ans, on nous a dit qu'il ne parlerait, n'apprendrait ou ne progresserait jamais. Il est maintenant un excellent élève et suit avec plusieurs de ses amis les cours de 12e année. Il envisage des études postsecondaires et réfléchit au travail et à la carrière qu'il voudrait avoir. Chaque thérapie que nous avons employée était fondée sur des études publiées confirmant son efficacité et son importance comme partie intégrante du traitement de l'autisme. Sans traitement, le pronostic pessimiste formulé par les experts que nous avons consultés en premier lieu se serait probablement réalisé. Cependant, la thérapie, bien que n'étant pas optimale, a ouvert un monde de possibilités et d'amitiés à notre fils, lui offrant un éventail beaucoup plus large de choix de vie. Bien que son autisme continue à lui poser de sérieuses difficultés et le contraigne à de nombreuses adaptations et à maints accommodements, il sait à quel point les traitements limités qu'il a suivis ont changé sa vie. Nous continuons à chercher des avenues pour obtenir les traitements médicalement nécessaires. Il existe maintenant une réelle perspective que notre fils puisse réaliser son potentiel et mettre à profit les merveilleuses aptitudes et capacités qui dérivent en bonne partie de son autisme même.

Les traitements dispensés à notre fils ont aussi grandement amélioré la vie des membres de sa famille. Lorsque notre fils était jeune et fréquentait l'école, il était indispensable qu'un parent soit disponible à tout moment pour l'aider, notamment en étant présent à l'école au cas où il deviendrait nécessaire de le ramener à la maison, ce qui était fréquent. Aussi, nous sommes devenus une famille avec un seul soutien économique, car je ne pouvais guère travailler qu'à temps partiel dans cette situation.

Les symptômes de notre fils étaient si graves qu'il me fallait être accompagnée d'un deuxième adulte lorsque nous quittions la maison avec lui, surtout en voiture. Cela a beaucoup limité mes possibilités de sortie avec mon fils. Lorsque mon mari et moi devions tous deux quitter la maison, notamment pour participer à des répétitions pour notre travail de musiciens, il nous fallait engager deux soignants et dispenser à ces derniers une formation spéciale afin qu'ils puissent rester en sécurité auprès de notre fils.

Chaque jour a été un énorme défi. L'impossibilité pour notre fils de dormir plus de quelques heures d'affilée signifiait que la nuit était loin d'être un moment de repos.

Étant donné que notre fils a un QI normal, l'accès nous était refusé aux soins de relève, jusqu'à l'intervention ministérielle qu'il nous a fallu deux ans pour obtenir. Étant donné que notre garçon n'était pas clairement suicidaire, nous n'avions pas accès à un pédopsychiatre jusqu'à ce que ses crises d'épilepsie aient permis à notre pédiatre d'imposer l'intervention d'un psychiatre en hospitalisant notre fils.

Bien que des tests de laboratoire, qui ne sont pas accessibles dans notre province et que nous avons dû payer de notre poche, aient prouvé que notre fils souffrait d'une multitude de troubles médicaux, nous ne pouvions pas et ne pouvons toujours pas obtenir une assistance médicale afin d'y remédier. Nous étions épuisés et avions peur pour l'avenir de notre fils et le nôtre.

Ensuite, nous avons acheté notre premier ordinateur et commencé à explorer le monde de l'information. Nous avons découvert des descriptions des difficultés de notre fils et avons pu nous renseigner sur l'autisme et son traitement. Nous avons essayé de nombreux éléments de traitements différents, nous avons lu avec voracité, nous avons travaillé avec nos médecins et fini par obtenir un diagnostic officiel lorsque notre fils a eu sept ans. Nous avons commencé à voir s'épanouir un garçon intelligent ayant le sens de l'humour et un œil attentif aux détails.

L'éducation scolaire n'a pas été une réussite, aussi nous nous sommes tournés vers l'enseignement à domicile en utilisant les méthodes pédagogiques axées sur l'ACA. Il y a un an, notre fils s'est classé dans les 25 p. 100 supérieurs des participants au concours canadien de mathématiques pour les élèves de son âge et, l'an dernier, il a été placé au 99e percentile pour l'expression écrite, ce qui prouve bien sa réussite académique.

Ses amitiés se sont étendues, ses intérêts se sont élargis, ses aptitudes se sont multipliées et sa faculté de jouir du monde environnant permet à mon mari et à moi-même d'en jouir de nouveau nous aussi.

J'ai pu consacrer du temps à militer pour de meilleurs services et traitements pour les personnes atteintes de TSA et notre fils a suffisamment mûri pour se débrouiller seul plusieurs heures d'affilée. Cette année, j'ai pu me consacrer plus à mon travail de musicienne. Pour notre famille, le traitement n'aide pas seulement notre fils à s'approcher de son potentiel, il aide aussi ses parents à réaliser le leur.

Je sais que vous m'avez invitée aujourd'hui pour parler des perspectives d'une famille vivant avec l'autisme, mais j'aimerais vous faire part du point de vue de mon fils, tel qu'il l'a couché par écrit à votre intention. Il a écrit cela en mon absence, et je n'ai donc rien fait pour l'aider à rédiger cela. Voici ce qu'il écrit :

Avant le traitement de mon autisme, je ne pouvais rien faire de ce que fait un enfant normal. Puis, avec la thérapie ACA, mes aptitudes se sont peu à peu améliorées, au point que j'ai pu faire le travail scolaire à la maison. Mais les études à l'école ont été désastreuses, car les écoles sont un milieu très stressant pour un enfant autiste. Lorsque j'étais en deuxième année, mes aptitudes académiques ont même diminué à cause du stress. C'est pourquoi ma mère m'a enseigné tout ce que je sais; c'était nécessaire pour que je puisse apprendre quoi que ce soit. Sans la thérapie, je serais incapable de rien faire dans le monde d'aujourd'hui.

J'avais d'autres choses encore à dire, mais je vais m'en tenir là pour l'instant.

Le président : Vous pourrez peut-être les dire en réponse aux questions.

Dre Sheila Laredo, à titre personnel : Je suis honorée de comparaître devant vous aujourd'hui. Je vous parle en tant que mère de trois enfants, dont deux atteints d'autisme, en tant qu'avocate plaidant une affaire et en tant que chercheuse. Je vais limiter mon propos au financement d'interventions à l'efficacité avérée, un domaine qui correspond et à mon expérience et à mon expertise.

Il est important de réfléchir à cela à l'heure où les gouvernements provinciaux commencent à revoir leurs politiques concernant les enfants autistes, comme c'est le cas en Ontario, où je vis. Je considère que le gouvernement fédéral peut jouer un rôle en veillant à ce que des normes uniformes, fondées sur l'expérience clinique, soient élaborées et mises en pratique à l'échelle du Canada.

En ce qui concerne mon expérience propre, lorsque le diagnostic a été posé pour mon premier enfant, notre famille a été atterrée. Alors que mon fils parlait beaucoup, tout ce qu'il savait faire c'était répéter ce que d'autres disaient. Il ne pouvait pas répondre. À l'âge de trois ans et demi, il portait toujours en couches, il faisait des crises de colère chaque jour, plusieurs fois par jour, passait son temps à allumer et éteindre les lumières et faisait tourner tous les objets qu'il pouvait attraper, fragiles ou non .Quelques mois après le diagnostic, lorsque nous avons vu que son jeune frère n'apprenait pas à parler, nous avons su que nous avions un deuxième enfant autiste.

Après ce diagnostic, j'ai pensé que je remplirais au mieux mon rôle de mère en jouant mon rôle de scientifique, afin de trouver un traitement efficace pour lui. Il ne m'a pas fallu longtemps pour me rendre compte que la documentation de pacotille sur l'Internet était remplie de messages contradictoires, confus et partiaux.

Je me suis plutôt tournée vers les ouvrages scientifiques. J'ai eu la chance de pouvoir le faire. C'est là où j'ai trouvé l'ACA. Mon parti pris est évident. Je suis médecin, docteure en épidémiologie clinique, ce qui signifie que je connais les méthodes de recherche. En dépit de la passion et des émotions de certains des témoins que vous avez entendus, je peux vous dire qu'il existe une façon objective d'évaluer la qualité de la documentation.

Dans mon mémoire, à l'annexe A, j'indique des résultats de recherche qui démontrent l'existence d'un consensus dans la documentation médicale, psychologique et pédagogique au sujet de l'efficacité des interventions, et il existe toute une hiérarchie de preuves, les essais avec échantillon de contrôle aléatoire étant les plus probants.

Les avis d'experts comme moi sont la forme de preuve la moins convaincante. C'est pourquoi je vous ai fourni toutes ces références pour appuyer mes dires.

Utilisant ces connaissances, j'ai ensuite passé en revue nombre des études dont je donne les références à l'annexe B, notamment les essais cliniques comparatifs avec groupes témoins aléatoires et non aléatoires de l'intervention ACA. Bien qu'aucune étude ne soit parfaite, il n'existe pas d'autres essais avec groupes témoins aléatoires sur d'autres interventions expérimentales, ni d'essais cliniques de grande envergure démontrant une efficacité aussi grande que celle de la thérapie ACA. Bien que d'aucuns considèrent cette recherche comme subjective, les résultats sont cohérents pour tous les groupes de recherche, tous les continents, toutes les tranches d'âge et tous les milieux, soit une école, un centre ou un domicile. D'autres thérapies, telles que la communication assistée et l'intégration auditive ne résistent pas à l'examen scientifique et d'autres interventions n'ont fait l'objet d'aucune recherche du tout.

En dépit de ces remarques positives, sachez que je n'ai aucun parti pris pour l'ACA. Dès qu'il sera prouvé qu'une autre méthode est plus efficace, soyez assurés que nous l'adopterons.

Une critique adressée à l'ACA, c'est qu'elle n'est pas efficace pour tout le monde. C'est probablement vrai. Le fait que tous les enfants ne seront pas guéris par l'ACA n'empêche pas que la majorité des enfants vont en retirer un bienfait considérable et concret. Mes enfants ont appris à lire, écrire et parler sans faire des crises constantes et à travailler dans une classe ordinaire. On ne devrait pas imposer à l'ACA des exigences plus grandes qu'aux autres interventions. Lorsqu'on administre une chimiothérapie pour le cancer ou des médicaments contre le cholestérol afin de prévenir les maladies cardiaques, nous visons une efficacité de 100 p. 100 mais sans y parvenir. L'ACA atteint et dépasse les normes fixées aux autres traitements.

Une autre critique adressée à l'ACA ou à l'ICI est qu'elles manqueraient à l'éthique parce qu'elles ne respectent pas l'individu autiste. J'applaudis les personnes qui ont si bien réussi qu'elles sont capables de vous parler aujourd'hui sans avoir eu recours à l'ACA. Malheureusement, la triste réalité est que ces personnes sont une infime minorité. L'existence de cas exceptionnels ne devrait pas fonder la politique pour la vaste majorité des autistes — des personnes comme mes fils.

Il nous a été difficile de pratiquer l'ACA. Nous n'avons guère trouvé d'aide auprès des autorités médicales et des organismes de services sociaux. D'autres membres de la famille nous ont enseigné comment mettre en place et exécuter un programme ACA. Nous avons réussi, car nous avions quantités d'avantages. Nous jouissons du fort soutien d'une famille élargie. Mon mari et moi sommes des professionnels et nos collègues nous ont maintes fois aidés. Nos enfants ont participé au Programme d'intervention sur l'autisme de l'Ontario.

En dépit de tout cela, nous avons dû nous battre. La majorité des familles ne bénéficient pas de ces avantages. Les pouvoirs publics peuvent aider. Ils ont commencé à le faire, mais cela reste insuffisant. Une intervention insuffisante fera que la plus grande partie des crédits pour l'autisme serviront à financer des soins en milieu de vie fortement assisté ou en milieu institutionnel, alors que l'on aurait pu enseigner aux enfants à vivre en autonomie. C'est un peu comme la parabole : donnez un poisson à un homme et vous le nourrirez pour la journée; enseignez-lui à pêcher, vous le nourrirez pour toujours. Cependant, d'aucuns prétendent que l'ACA coûte trop cher.

Peter Coyte est un économiste de la santé respecté à l'échelle internationale. Il a publié des données qui démontrent que l'économie moyenne réalisée sur la durée de vie d'un enfant traité par l'ACA, même en tenant compte du fait que tous les enfants ne sont pas guéris ni même n'en retireront de bienfaits, dépasse 1 000 $ par enfant. Il n'existe pratiquement pas d'interventions médicales qui représentent une économie. On les entreprend néanmoins. Par exemple, le diabète coûte 9 milliards de dollars par an aux Canadiens. Il ne s'agit pas de redistribuer les crédits pour la santé, mais plutôt de considérer les dépenses pour l'autisme dans le contexte des dépenses importantes pour la santé, sachant que les bienfaits sont frappants.

Le président : Pourrais-je vous demander de conclure?

Dre Laredo : Certainement. Il faut davantage de crédits de recherche. Cette recherche doit porter sur des programmes complets. Ces programmes complets doivent être examinés par comparaison à l'étalon or.

Des progrès ont été réalisés. Je recommande au gouvernement fédéral de chercher à assurer l'uniformité d'une province à l'autre pour ce qui est du diagnostic, du traitement par des méthodes à l'efficacité avérée et des délais d'attente. Les fonds de transfert fédéraux peuvent être assortis de la condition que les services fournis répondent aux normes nationales.

J'en aurais encore plus à dire, mais je m'en tiendrai là.

Le président : Merci beaucoup.

Andrew Kavchak, à titre personnel : Je remercie tous les membres du comité de cette invitation à comparaître. Lorsque j'ai déménagé à Ottawa, j'avais un contrat de recherche, en 1989 et 1990, avec le sénateur Richard Stanbury. Jamais je n'aurais cru à cette époque que je comparaîtrais un jour devant le comité. Je vous suis reconnaissant de cette occasion.

Permettez-moi de dire en passant que je ne suis pas du tout d'accord avec ceux qui critiquent le Sénat et lui reprochent d'être moins utile, peut-être, que d'autres organes. À la fin de 1990, j'ai rédigé beaucoup de discours contre la TPS pour le sénateur Stanbury. Je suis devenu suffisamment expert dans ce domaine pour être embauché par Revenu Canada. Je veux aussi remercier particulièrement le sénateur Munson pour tout le travail qu'il a accompli afin d'inscrire l'autisme à l'ordre du jour de ce comité.

Je suis ici à titre de parent d'un enfant autiste. En juillet dernier, lorsque j'ai appris que le Sénat a adopté une motion chargeant le comité d'étudier toute cette question, j'ai rédigé et présenté un mémoire au comité. Il est assez long et résume l'expérience vécue par ma famille et contient des recommandations fondées sur cette expérience. Le mémoire comporte aussi un certain nombre d'annexes contenant des documents que devraient connaître tous ceux qui se penchent sur la situation de l'autisme au Canada. Vous y trouverez en particulier un certain nombre de rapports et d'articles du plus haut intérêt.

En mai de cette année, votre comité a publié un rapport donnant à entendre qu'il existerait un désaccord sur la question de savoir si l'autisme est réellement une maladie ou une maladie mentale. Aussi, le comité ne s'est-il pas penché sur la question dans son rapport sur la santé mentale. Les parents comme moi en ont été profondément déçus. Sachez que l'American Psychiatric Association considère l'autisme comme un trouble; l'Organisation mondiale de la santé le considère comme une maladie. Les autorités ne doutent pas qu'il est un problème.

Je demande respectueusement au comité d'adresser un rapport au gouvernement. Lorsqu'il le fera — et je crois savoir que ce sera en mai prochain — j'espère que le rapport recommandera des mesures rapides afin que le traitement de l'autisme soit couvert par l'assurance-maladie dans le cadre d'une stratégie nationale sur l'autisme.

Ma femme et moi avons deux petits garçons. Le plus jeune est un enfant charmant qui est, malheureusement, gravement atteint d'autisme. Entre le moment où nous avons consulté notre médecin de famille avec notre fils de 18 mois, parce qu'il nous semblait que son développement était lent, et le moment où nous avons finalement pu consulter un spécialiste qui a posé le diagnostic d'autisme, il s'est écoulé plus d'un an. Dès le lendemain, nous nous sommes tournés vers le Programme d'intervention en autisme, qui n'est pas administré par le ministère de la Santé et des soins de longue durée et n'est pas couvert par le RAMO, ou Régime d'assurance-maladie de l'Ontario, mais est plutôt géré par le ministère des Services sociaux et communautaires. Ils nous ont dit : « Félicitations, vous êtes admissible à être inscrit sur la liste d'attente. La durée de l'attente? Nous ne savons pas. » Ils nous ont dit qu'il était dans notre intérêt de recourir au secteur privé pour le traitement ACA-ICI. C'était la première expérience de ma famille avec le système de soins de santé à deux vitesses. Nous étions dans le mauvais train.

On ne connaît ni la cause ni le remède de l'autisme, mais depuis l'étude retentissante du Dr Lovaas en 1987 le monde médical sait que 47 p. 100 des enfants autistes peuvent se développer au point que rien ne les distingue des autres enfants.

Pour le parent d'un enfant autiste, qui voit son enfant assis dans un coin, à se balancer, à tournoyer, sans parler ou communiquer et faisant des crises de colère, ces études apportent de l'espoir et tracent le chemin d'une action thérapeutique. De s'apercevoir ensuite que cette thérapie n'est pas disponible non seulement vous fend le cœur mais vous anéantit.

Comme je l'ai dit, nous nous sommes immédiatement adressés au secteur privé. Rien qu'au cours des 11 premiers mois, il nous en a coûté plus de 40 000 $.

Après 15 mois, nous avons demandé l'aide du Programme d'intervention préscolaire pour enfants autistes de l'Ontario, qui nous a contactés et nous a offert une assistance financière directe. Nous avons beaucoup apprécié, car nos économies s'épuisaient rapidement. On nous a dit aussi alors, soit pas moins de deux ans et demi après que nous ayons consulté notre médecin au sujet du problème, qu'à l'âge de cinq ans l'aide serait réduite de moitié, car l'enfant était censé être alors scolarisé à la demi-journée, quel que soit son état. À l'âge de six ans, l'aide financière cesserait totalement, quel que soit son état.

Je considère cela comme une forme de terrorisme d'État. Si notre enfant ne s'est pas suffisamment développé à l'âge de six ans, vers qui nous tournons-nous? Que faisons-nous? Quel est notre avenir? L'incertitude est absolument terrifiante. Bien que mon fils demeure handicapé et qu'il ait encore besoin de traitement, son état s'est beaucoup amélioré. Et c'est grâce à l'ICI, et nous savons que nous allons devoir poursuivre le traitement pendant encore plusieurs années.

J'aimerais traiter de deux aspects : l'évolution récente et les principaux arguments sans cesse invoqués pour bloquer nos tentatives de trouver de l'aide pour nos enfants.

Au début de 2004, peu après le diagnostic d'autisme, nous avions des raisons d'espérer. Le premier ministre de la province, Dalton McGuinty, a publié une lettre au cours de la dernière campagne électorale dans laquelle disait à la mère d'un enfant autiste que le retrait de l'aide à l'âge de six ans était discriminatoire et que s'il était élu, il supprimerait la limitation. De même, la cause Deskin-Wynberg, qui portait précisément sur le retrait de l'aide à l'âge de six ans, était en première instance à la Cour supérieure de l'Ontario et le jugement était attendu incessamment. Enfin, la cause Auton en Colombie-Britannique allait être entendue par la Cour suprême du Canada. Nous espérions qu'elle confirmerait les jugements des cours inférieures de la Colombie-Britannique et aurait des répercussions nationales.

Malheureusement, les espoirs suscités par ces développements ont été anéantis l'un après l'autre. Premièrement, le premier ministre McGuinty n'a pas tenu sa promesse électorale. Dans le mémoire, dans l'une des annexes, vous verrez le rapport du vérificateur général de 2004. La situation des listes d'attente est tout aussi désolante aujourd'hui. En outre, comme vous le savez, le jugement Deskin-Wynberg a fait l'objet d'un appel et est actuellement en instance à la Cour d'appel.

J'aimerais aborder certains des arguments que l'on ne cesse de nous opposer. Le premier est celui du champ de compétence. Le fait est que les provinces ont été négligentes. Dans le cas de mon fils, elles l'ont assurément été. Je connais beaucoup de parents qui pensent exactement la même chose. Le gouvernement fédéral joue un rôle énorme dans le domaine de la santé dans ce pays. Il négocie des accords relatifs à la santé, transfère des fonds, élabore des stratégies nationales comme la Stratégie nationale sur le cancer, et ce bien que le cancer soit déjà couvert par l'assurance-maladie dans toutes les provinces, et il est le maître d'œuvre de la Loi canadienne sur la santé. Le gouvernement fédéral possède de nombreux pouvoirs et leviers, notamment l'excédent budgétaire.

Qui veut la fin, veut les moyens. Le problème n'est pas le manque de compétence, c'est le manque de volonté politique. Comme vous l'a dit Jean Lewis, qui a témoigné ici il y a deux semaines, de nombreux parents à travers le Canada commencent à s'organiser et seront politiquement actifs lors de la prochaine élection fédérale et feront campagne dans des circonscriptions pivots pour faire élire des candidats qui s'engageront publiquement à modifier la Loi canadienne sur la santé de manière à faire couvrir le traitement de l'autisme par l'assurance-maladie.

En ce qui concerne l'argument voulant que la Loi canadienne sur la santé soit sacro-sainte et ne puisse être modifiée, il y a seulement quelques décennies l'homosexualité était un délit criminel en vertu du Code criminel du Canada. Tout récemment, le Parlement du Canada, engagé dans une course pour être le premier pays du monde à le faire, a modifié la définition du mariage qui était communément admise depuis des milliers d'années. Je ne vois pas pourquoi la Loi canadienne sur la santé ne pourrait être modifiée, sans attendre 1 000 ans, j'espère. Si c'est impossible, il existe d'autres façons de parvenir au même objectif. Des négociations peuvent être engagées avec les provinces. Le président a fait mention de la Combatting Autism Act que la Chambre des représentants américaine a adopté aujourd'hui; je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions avoir une loi sur la lutte contre l'autisme au Canada. Nous en avons certainement besoin.

Je conclurai par une citation d'un article qui se trouve à l'annexe D. Il provient d'un journal d'Ottawa et parle d'un monsieur somalien dont le fils a été retranché de la liste d'attente de traitement parce qu'il a eu le malheur de célébrer son sixième anniversaire avant de l'obtenir : « On nous traite ici comme en Somalie, sauf qu'en Somalie, ils n'ont pas de gouvernement. »

Nous avons besoin d'une stratégie nationale sur l'autisme, et nous en avons besoin immédiatement.

Le président : Merci beaucoup.

Nous avons reçu ici la ministre Chambers de l'Ontario. Elle nous a dit que le premier ministre a supprimé la limite d'âge de six ans.

Le sénateur Munson : Je reconnais que c'est très complexe. J'aimerais garder les choses aussi simples que possible. S'il y avait un centre national de formation, qui formerait les formateurs et qui paierait les formateurs? Je suis curieux. Vous parlez de thérapeutes. Il semble être très peu nombreux.

Le président : M. Erb s'efforce apparemment de créer un tel centre.

M. Erb : Le problème tient en partie au fait que nous abordons les choses selon une perspective très nationaliste. Il se fait beaucoup de recherches aux États-Unis et dans d'autres pays du monde et nous devrions en tirer parti. Un centre de traitement devrait faire appel aux spécialistes qui sont en train de se former eux-mêmes, la crème du monde médical est en train de monter en surface. Ce sont là les gens auxquels nous devrions faire appel et que nous devrions rassembler, et utiliser l'expertise américaine et étrangère afin que ce ne soit pas seulement le Canada qui investisse dans quelque chose pendant qu'un autre pays met son argent dans autre chose. Nous devrions mettre à profit le partage des connaissances.

M. Kavchak : Merci de poser cette question. J'ai une réponse double. Premièrement, nous avons certainement besoin de centres de formation à l'ACA et à l'ICI à travers tout le pays. Il en faudrait dans chaque province. Ma femme, qui est médecin de famille, a totalement abandonné sa carrière lorsque le diagnostic a été posé pour mon fils et a suivi un cours en ligne de Penn State, un cours hautement considéré qui débouche sur l'accréditation comme analyste du comportement auprès d'un ordre professionnel aux États-Unis. Il n'existe pas de tel ordre au Canada qui reconnaisse cette formation professionnelle et accorde cette accréditation. Ce cours a coûté 15 000 $ à ma femme. Elle a maintenant acquis certaines connaissances et peut gérer efficacement la thérapie de notre fils. Ce n'est évidemment pas à la portée de toutes les familles. Il faut davantage de formation.

En ce qui concerne l'affirmation de la ministre Chambers que l'exclusion à l'âge de six ans a été supprimée, si le gouvernement a bien fait cette annonce immédiatement après la décision de la Cour d'appel, il est illogique d'avoir adopté cette politique après avoir combattu cette famille bec et ongles en Cour d'appel. Le gouvernement utilise maintenant d'autres façons d'exclure les enfants du programme. J'en connais qui ont été exclus soit parce qu'ils progressaient trop soit parce qu'ils ne progressaient pas assez. À maintes reprises le gouvernement a exclu des enfants prématurément de ce programme. Je sais que la Dre Laredo pourra vous en parler également. Tout ce que dit le gouvernement ontarien est accueilli avec un grand scepticisme.

Dre Laredo : Il existe différents degrés de formation. Il faut prévoir plusieurs angles d'attaque. Il y a la formation pour ceux qui finiront au niveau de la maîtrise et du doctorat, pour les psychologues en mesure de superviser les programmes ACA, les thérapeutes supérieurs et les thérapeutes moniteurs. Tous ont besoin de formation.

Comment s'y prendre? Une stratégie nationale peut être un moyen. Il faut certainement une accréditation pour les psychologues. Existe-t-il un programme pour cela au Canada? Je n'en suis pas sûre. Pour les thérapeutes moniteurs, c'était le formateur. Il n'y a pas jusqu'à présent d'infrastructure d'ensemble pour faire les choses autrement. Ce sont plutôt les familles qui ont construit la capacité au niveau de la base, car il n'existait rien au-dessus.

Le sénateur Munson : Je pense qu'il faudra un flux de financement vers des centres de formation nationaux disséminés à travers le pays, au titre d'une stratégie nationale. Il faut conserver ce point focal. Sinon, ce sera toujours provincial, provincial, provincial.

Mme Simmermon : Je ne suis pas sûre que l'on puisse y échapper. C'est une réalité inéluctable dans ce pays. L'autre aspect, c'est que la formation ne doit pas se limiter à la seule ACA. Il faut aussi former des orthothérapeutes, des ergothérapeutes et des médecins afin qu'ils se familiarisent avec les problèmes médicaux des enfants autistes, problèmes qui ne sont pas soignés actuellement dans le système médical général. Il faut une formation dans beaucoup de domaines différents. On ne peut ignorer aucun d'eux. Il ne serait pas dans l'intérêt du pays d'avoir une stratégie nationale axée sur un seul aspect thérapeutique au détriment de tous les autres éléments absolument indispensables à un programme de traitement complet.

Le sénateur Callbeck : Le président a mentionné la motion préconisant une stratégie nationale adoptée hier à la Chambre des communes. Elle comportait quatre éléments, dont des normes nationales et le financement de la surveillance et de la recherche. Est-ce que, selon vous, une stratégie nationale devrait comporter d'autres éléments encore et, si oui, lesquels? Ma question s'adresse à vous tous.

Dre Laredo : Il faut clairement un financement pour l'intervention. À ce stade, on se contente du meilleur traitement disponible. Ce n'est peut-être pas le traitement idéal, mais actuellement c'est le meilleur disponible. Le système médical, de nos jours, n'a aucune excuse de ne pas mettre ce traitement à la disposition de tous les enfants. La province de résidence et les moyens financiers des parents ne devraient pas être une considération.

M. Kavchak : Je veux souligner que je souscris pleinement à ce que la Dre Laredo a dit. Le traitement est primordial et il est insuffisamment disponible. Il ne devrait pas y avoir de lacunes. C'est de la discrimination entre malades, à mon avis, et cela doit cesser.

Le président : Tout le monde est-il d'accord avec cela?

M. Erb : Un autre élément de la stratégie nationale pourrait être un crédit d'impôt plus important pour les parents d'enfants autistes, car il n'est que de quelques centaines de dollars par mois, alors que le parent moyen dépense de 10 000 $ à 30 000 $ par an. De nombreux parents ont dû se sacrifier pour que l'un des deux reste à la maison. Cela représente une économie énorme pour le système. Si ces parents baissaient les bras et disaient « Je suis incapable de m'occuper de cet enfant de huit ans », il en coûterait 5 000 $ par mois pour l'accueillir dans un établissement spécialisé. Il faudrait reconnaître le sacrifice des parents et leur donner l'incitation financière pour s'occuper de leurs enfants autant et aussi longtemps que possible.

Le sénateur Keon : J'ai une question rapide pour M. Erb, puis une question pour tout le groupe sur un sujet soulevé par M. Kavchak.

Monsieur Erb, je n'ai pas très bien suivi votre raisonnement. Vous avez dit que le problème coûtait 37 milliards de dollars. Ensuite, vous vous êtes lancé dans la biochimie du glutamate monosodique. J'aimerais voir la liste concernant le glutamate monosodique. Expliquez-moi ce que vous cherchez à démontrer avec vos chiffres.

M. Erb : Je montre que d'ici 2012, si nous avons 14 000 enfants autistes par an, et s'ils sont suffisamment touchés pour être placés en établissement de soins, chacune de ces personnes coûtera 2,6 millions de dollars de l'âge de 20 ans jusqu'à l'âge de 60 ans. Ce sont des soins très coûteux. Le chiffre de 26 milliards signifie que tous les enfants autistiques susceptibles de naître en 2012 coûteront 26 milliards de dollars sous forme de soins en établissement et de programmes de traitement au cours de leur vie. C'est pourquoi je dis que la meilleure utilisation de l'argent, ce sont des programmes de traitement qui améliorent leurs chances de vivre sans être institutionnalisés.

Le sénateur Keon : Monsieur Kavchak, vous avez soulevé de nouveau la question de l'ouverture de la Loi canadienne sur la santé. J'aimerais connaître l'avis de tous les témoins, mais il s'agit là d'une entreprise énormément complexe au départ, et ensuite tout de suite la file d'attente s'allonge. Chacun va venir réclamer un financement pour son entité favorite.

Il suffit, en réalité, de l'inscription comme service essentiel. Dans votre campagne, tenez-vous-en à ce thème plutôt que de parler d'ouvrir la Loi canadienne sur la santé. Une fois que la thérapie figure sur la liste des services essentiels, c'est terminé.

M. Kavchak : Je comprends les complexités. Pour nous, c'est un dernier recours. Cela n'a été nécessaire pour aucune autre maladie, trouble, syndrome ou affection. Nous demandons cela parce qu'aucune des provinces n'a ajouté l'autisme à la liste des services couverts par l'assurance-maladie. Nous admettons que l'objectif peut être réalisé par d'autres moyens aussi.

En septembre 2004, un accord sur la santé a été négocié au fil de quatre journées, avec 40 milliards de dollars sur la table. Le gouvernement fédéral, avec les provinces, a spécifié les délais d'attente pour diverses procédures médicales. D'autres parents se sont joints à moi pour manifester, avec une question tout simple sur nos pancartes : « Pourquoi l'autisme n'est-il pas sur la liste? » Nous pensons que des négociations sont possibles. Si les Américains peuvent adopter leur Combatting Autism Act, pourquoi le Parlement fédéral canadien ne peut-il en faire autant?

Le sénateur Cordy : Nous semblons toujours manquer de temps car nous sommes tous fascinés par ce sujet. J'entends parler de plus en plus de l'autisme. Lorsque j'étais enseignante et que je parlais à des gens en dehors du système éducatif, personne ne savait ce qu'était l'autisme. Aujourd'hui, les gens semblent davantage au courant. Vous avez fait un travail magnifique et su sensibiliser le public canadien à la situation de crise que représente l'autisme.

J'aimerais parler des silos que beaucoup de témoins ont mentionnés, soit le fait que les ministères ne travaillent pas nécessairement de concert. Madame Simmermon, vous avez enseigné à votre enfant à domicile parce que le milieu scolaire n'est pas nécessairement propice à un enfant autistique à cause de tous les stimulants, soit les lumières fluorescentes ou les couleurs et autres.

Dans quelle mesure les ministères de l'Éducation et de la Santé collaborent-ils? Nous avons tous parlé d'agir sous le régime de la Loi canadienne sur la santé, mais comment faire en sorte pour que d'autres ministères travaillent avec le ministère de la Santé dans l'intérêt des enfants, qui ensuite deviennent des adultes, comme vous l'avez rappelé, monsieur Erb? Comment amener différents niveaux de gouvernement et différents ministères à agir de manière concertée?

Mme Simmermon : La Dre Wendy Roberts a formulé une suggestion que j'ai trouvée extrêmement avisée. Comme mécanisme de concertation, elle préconise une réunion nationale de tous les ministères de chaque province et territoire s'occupant de différents aspects du traitement tant des enfants que des adultes atteints du trouble du spectre de l'autisme, afin que tous les acteurs au niveau gouvernemental soient réunis autour de la même table. Chaque province structure ses ministères différemment. Ce qui relève du ministère des Services sociaux et communautaires en Ontario relève du ministère de la Santé en Saskatchewan. Ce ne sont pas toujours les mêmes ministères d'un bout à l'autre du pays. Cette conférence pourrait être un mécanisme pour commencer à mettre en place une stratégie nationale.

Un autre aspect en rapport avec une stratégie nationale et les silos, vu que les statistiques constituent un très grand problème dans le domaine de la santé mentale en général, c'est que d'autres témoins demandent s'il faudrait une stratégie nationale sur l'autisme ou bien plutôt une stratégie nationale sur la santé mentale. Je ne pense pas que les deux s'excluent mutuellement. Je pense qu'une stratégie nationale sur l'autisme pourrait être un début, le premier élément d'une stratégie nationale sur la santé mentale qui pourrait englober des stratégies nationales sur toutes les autres maladies touchant le cerveau. Nous savons, d'après l'expérience américaine, que si vous avez une stratégie globale sur la santé mentale, vous en arrivez à négliger les problèmes liés à des troubles spécifiques. Les Américains sont maintenant obligés d'élaborer des stratégies spécifiques pour l'autisme. Pourquoi ne pas tirer les leçons de l'expérience de nos voisins et construire une stratégie pièce par pièce pour arriver à quelque chose de constructif pour tout le monde, y compris les pouvoirs publics?

Le président : Quelqu'un souhaite-t-il ajouter un mot à cela?

Dre Laredo : La question des silos est très importante. Si je puis parler brutalement, je crois que c'est une question d'argent. Si le ministère des Services à l'enfance et à la jeunesse est responsable, alors il y a un budget correspondant. Lorsqu'une chose relève du ministère de l'Éducation, il y a un budget. Mais en l'occurrence, le ministère de l'Éducation dit que c'est un traitement médical et que les écoles ne font pas de traitement médical. Le ministère de la Santé dit non, c'est un trouble psychologique. Chacun se décharge sur l'autre. Si nous avions un budget coordonné pour l'autisme plutôt que pour un ministère donné, nous verrions une meilleure coordination et coopération entre les ministères.

Le sénateur Cordy : Faites-le travail, un point c'est tout?

Dre Laredo : Absolument.

Mme Simmermon : Beaucoup dépend aussi de la personnalité des ministres et de leurs collaborateurs. C'est une chose que nous avons appris au fil d'une décennie.

Le président : Veuillez m'excuser, mais nous n'avons plus de temps. Nous pourrions continuer encore au moins une demi-heure. J'ai moi-même plusieurs questions mais, étant le président, je dois donner la préséance aux membres du comité.

Votre présence nous a été très utile. Vous avez beaucoup contribué à notre réflexion et à nos délibérations sur ce sujet. Nous entendons ici beaucoup d'autres témoins qui nous apportent une grande diversité d'optiques. Merci beaucoup d'être venus cet après-midi.

Notre deuxième groupe de témoins de la journée comprend des personnes ayant fait l'objet d'un diagnostic d'autisme. M. Kristian Hooker vient de Selkirk, au Manitoba. Il a fait des études d'assistant en éducation au Red River College. Il est membre du conseil d'administration de l'Autism Society Manitoba et de la Société canadienne d'autisme. Il est également le président du comité consultatif auprès de la Société canadienne d'autisme.

Mme Brigitte Harrisson est travailleuse sociale et consultante en TED. Elle travaille avec d'autres autistes, des familles et professionnels de la santé et de l'éducation. Elle est la vice-présidente canadienne de la SAtedI, Spectre Autistique troubles envahissants du développement International, la première association internationale francophone d'autistes, qui couvre plusieurs pays. Elle en a également été la présidente pendant deux ans.

M. Jason Oldford vient de Fredericton, au Nouveau-Brunswick. Il est né à Chatham, au Nouveau-Brunswick. Son diagnostic d'autisme remonte à 1974. Il est analyste du contrôle de la qualité des données.

M. Daniel Hatton vient de Hamilton, en Ontario. Son autisme a été diagnostiqué à l'âge de trois ans et demi. Il est considéré comme hautement fonctionnel, avec un QI normal et de bonnes aptitudes de communication verbale. Il est titulaire de plusieurs certificats et diplômes du Collège Sheridan et il a suivi des études d'horticulture au Collège Mohawk. Il travaille à temps plein dans une usine de confiserie.

Bienvenue à tous. Je crois savoir que Janet Hatton est ici également. Elle est la mère de Daniel Hatton. Elle nous a remis un texte exprimant son point de vue sur le sujet.

Kristian Hooker, à titre personnel : Merci de m'avoir invité à participer à cette enquête au sujet du financement du traitement de l'autisme. Ma mère, Lynn Hooker, est ici à mes côtés pour m'aider à interpréter certains termes, au besoin.

Premièrement, je tiens à dire qu'il n'existe aucun « guide » universel en matière d'autisme. Les degrés d'autisme varient énormément, tout comme les troubles du spectre de l'autisme. Pour vraiment bien comprendre l'autisme, il faut parler à des milliers de personnes et de familles.

L'un des principaux messages que je veux livrer au comité est que tous les Canadiens présentant des troubles du spectre de l'autisme sont des personnes uniques possédant des forces, des compétences, des aptitudes et des besoins différents. En tout cas, c'est ce que je pense. Je ne suis qu'une personne, mais voici mon histoire. Il y en a bien d'autres.

Au début, jusqu'à l'âge d'environ un an et demi, je semblais être un enfant « normal », mais c'est alors que j'ai commencé à craindre non seulement les étrangers et les endroits nouveaux, qui sont des craintes acceptables pour tout jeune enfant, mais également l'herbe, les sonneries de téléphone, les chansons interprétées en direct, les ballons et les œufs, pour ne vous donner que quelques exemples. J'allais également bientôt arrêter de parler, d'avoir un contact visuel avec les gens, de manger avec des personnes autres que des membres de ma famille, de jouer avec des jouets et d'écouter. C'est donc à l'âge de deux ans et demi que j'ai été déclaré atteint de troubles du spectre de l'autisme.

Pendant les premières années de ma vie, avant que je n'aille à l'école, j'avais suivi deux fois par semaine des séances de développement de l'enfant et une fois par semaine des séances d'ergothérapie. D'autre part, toujours pendant mes années de préscolarité, j'avais été inscrit au programme d'autisme au Centre de sciences de la santé à Winnipeg, au Manitoba, où j'ai participé à des activités de groupe et à des activités personnalisées. L'on m'a également fourni conseils et soutien à la maison. J'ai également participé à des programmes d'orthophonie avant d'aller à l'école. Après mon inscription à l'école, le programme de développement de l'enfant a pris fin. J'ai commencé à bénéficier de services d'orthophonie et d'ergothérapie livrés à l'école.

En deuxième année, j'ai commencé à recevoir des services d'ergothérapie offerts par l'école, mais ce n'était qu'une fois par mois, ce qui n'était pas suffisant. Mes parents ont donc fait appel au même orthophoniste, qui venait m'aider une fois par mois en dehors du milieu scolaire, et c'est ainsi que j'ai bénéficié de ses services deux fois par mois. Cela s'est poursuivi pendant plusieurs années, et pendant plusieurs semaines, l'été, j'allais à un camp d'été spécialisé.

Lorsqu'on m'a appris, à l'école primaire, que j'étais autiste, j'ai obtenu réponse à beaucoup de questions qui m'occupaient. J'avais toujours su que j'avais quelque chose de différent, mais je n'arrivais pas à savoir quoi exactement. Je sais que bon nombre de personnes atteintes d'un trouble du spectre de l'autisme se sentent isolées et complètement seules durant leur enfance. Cependant, je ne me souviens vraiment pas d'avoir ressenti cela. J'avais un groupe d'amis à l'école, des amis que je voyais aussi dans d'autres contextes sociaux, à l'extérieur de l'école.

À l'adolescence, grâce au service d'aide de mon école, j'ai pu rencontrer d'autres adolescents et des jeunes aussi atteints d'un trouble du spectre de l'autisme. J'ai également fait du bénévolat dans les écoles où ma mère travaillait. En plus des problèmes que vivaient les autres étudiants, comme trouver un équilibre entre le travail scolaire et les activités parascolaires et savoir résister aux pressions des pairs, j'ai aussi traversé des périodes de grande anxiété et de dépression. Heureusement, dans les moments plus difficiles, j'ai pu compter sur l'appui de nombreux amis et professeurs.

Après avoir obtenu mon diplôme d'études secondaires, je suis retourné à l'école pendant un an pour suivre un cours administratif, puis une formation d'aide-enseignant au collège. J'étais toujours fasciné par les choses que j'apprenais, qu'il s'agisse de connaissances acquises en classe ou de connaissances pratiques.

L'une des choses les plus importantes que j'ai apprises, c'est de savoir cacher mes faiblesses et tirer le maximum de mes talents et capacités. Prenons la musique, par exemple. Comme j'avais toujours eu un bon sens du rythme, j'ai exploité ce talent en devenant percussionniste dans divers groupes à l'école secondaire, ce qui m'a permis de me faire beaucoup d'amis.

Le fait de quitter le milieu scolaire et d'entrer dans le monde des adultes a été tout un défi, au début. Mes parents m'ont beaucoup aidé durant cette période de transition, m'aidant à m'inscrire au Collège de Red River et à me trouver un emploi par l'entremise du centre d'emploi de notre localité. Ils m'ont toujours soutenu, dans tout ce que je faisais. Je vis encore avec eux et je ne prévois pas déménager dans l'immédiat. Peut-être que dans quelques années, ou avant, j'emménagerai dans mon propre appartement, mais auparavant, j'aimerais retourner au collège et étudier l'animation par ordinateur afin de pouvoir gagner assez d'argent pour me payer mon propre logement.

À mes 18 ans, j'ai commencé à recevoir des prestations d'invalidité de 488 $ par mois, incluant mes frais médicaux, dentaires et de médicaments sur ordonnance. Ce montant devait également couvrir toutes mes dépenses de nourriture, d'habillement et de logement. En mai dernier, je me suis trouvé un emploi à temps partiel, et dès que j'ai gagné plus que ma prestation d'invalidité de 488 $, celle-ci a été supprimée, y compris les prestations de santé, de telle sorte que mes possibilités d'améliorer ma situation sont assez limitées.

Dans les situations de la vie courante, mes interactions avec les gens se passent bien. Il m'arrive parfois encore d'avoir l'esprit ailleurs ou de bouger les mains de façon répétitive, mais je suis capable de me contrôler en public et de garder ces gestes et attitudes pour les moments où je suis chez moi. Cela élimine le principal problème que j'éprouve en société.

J'ai souvent du mal à comprendre le langage parlé. Je comprends beaucoup mieux ce qui est écrit. Par exemple, lorsque je regarde la télévision, je suis plus à l'aise lorsqu'il y a du sous-titrage. Si les propos de tout le monde étaient sous-titrés, cela me simplifierait grandement la vie.

Un important problème pour les personnes souffrant d'un trouble du spectre de l'autisme tient à l'idée que les autres se font de la manière dont elles sont censées se comporter et de ce à quoi elles sont censées ressembler. Bon nombre de personnes atteintes d'un trouble du spectre de l'autisme pourraient éliminer ce stéréotype, mais en ont rarement la possibilité, surtout avec un grand nombre de gens. S'il est une chose que les gens devraient savoir au sujet des personnes atteintes d'un trouble du spectre de l'autisme, c'est que nous ne sommes pas vraiment différents des autres. Nous avons peut-être un petit quelque chose qui nous fait paraître uniques ou différents, mais ne sommes-nous pas tous uniques ou différents?

Récemment, beaucoup de groupes et d'organismes de défense des droits des autistes ont pris la parole pour dire ce que représentait le fait d'être autiste. C'est une bonne chose, je crois. Rien ne nous donne plus un sentiment de pouvoir que de défendre nos convictions; et rien ne donne plus espoir aux autres que de parler en leur nom lorsqu'ils ne peuvent le faire eux-mêmes.

Je suis présentement membre du conseil d'administration de la Société canadienne d'autisme et je suis également président du comité consultatif de la SCA sur les adultes atteints de troubles du spectre de l'autisme. Bien que je m'adresse à vous en mon nom personnel, j'ai pensé que cela vous intéresserait de savoir un petit peu quelque chose sur notre comité. Celui-ci est composé de six membres, le Dr Kevin Stoddart y jouant un rôle important en offrant conseils et avis. Notre comité livre ses conseils et sa perspective sur les questions relatives aux troubles du spectre de l'autisme au Conseil d'administration de la Société canadienne d'autisme. Un message important que notre comité souhaite communiquer est que la nécessité de traitements et de services appropriés pour les personnes atteintes de troubles du spectre de l'autisme ne s'arrête pas avec la fin de l'enfance. Nous continuons d'avoir besoin de traitements et de soutien une fois arrivés à l'âge adulte, par exemple services psychologiques, counselling, encadrement pédagogique et hébergement convenable et sécuritaire, pour ne nommer que quelques éléments.

Je m'estime très chanceux d'avoir pu accomplir tout ce que j'ai accompli jusqu'à maintenant dans ma vie. Je dois cependant dire que jamais je n'aurais pu y arriver seul. Si je remerciais toutes les personnes qui m'ont aidé, j'aurais sûrement à remercier plus de 150 personnes. Je me contenterai donc de remercier ici mes parents et mon frère de m'avoir donné leur plein appui. Ils ne m'auraient jamais permis de baisser les bras.

En conclusion, permettez que je dise qu'il n'existe aucun « guide » universel pour l'autisme. Il existe quantité de degrés différents d'autisme et différents troubles du spectre de l'autisme. Pour vraiment bien comprendre l'autisme, il vous faudrait parler à des milliers de personnes et de familles.

Merci de m'avoir écouté et de prendre au sérieux, dans le cadre de vos délibérations, les questions relatives aux troubles du spectre de l'autisme.

Le président : Merci beaucoup. Nous allons maintenant entendre Mme Harrisson.

[Français]

Brigitte Harrisson, à titre personnel : Je vous parlerai particulièrement de mon expérience au Québec, parce que vous n'aurez pas l'occasion d'entendre ces commentaires de la part d'autres personnes autistes.

Présentement, il se passe quelque chose dans notre province : depuis avril 2004, j'ai fait 232 formations, ateliers ou conférences avec plus de 12 000 personnes. Je suis invitée partout parce que j'ai eu le malheur d'expliquer comment fonctionne la structure autistique. Je travaille aussi avec des personnes autistes, notamment à l'association SAtedI, qui veut dire « Spectre Autistique troubles envahissants du développement International ». On l'a appelé ainsi parce que selon les pays, il y a différentes appellations, et comme c'est une association international, on devait rencontrer toutes les appellations. Je travaille autant avec les personnes autistes qu'avec les professionnels, que ce soit les pédopsychiatres, les orthophonistes, les ergothérapeutes, les éducateurs spécialisés, les travailleurs sociaux et les psychologues ou neuropsychologues, ou encore avec les familles. J'ai fait beaucoup de consultations à domicile. J'ai une énorme expérience. Je suis autant invitée par le ministère de la Santé que par celui de l'Éducation au Québec pour le réseau national d'expertise.

En venant ici, je me disais que les garçons parleraient probablement de leur expérience, ce qui est très bien. Je ferai rapport du constat que j'ai fait dans les deux dernières années, et j'ajouterais qu'en plus, j'enseigne l'instrumentation en troubles envahissant du développement, à l'université. Quelqu'un demandait, plus tôt qui ferait la formation. On s'est débrouillé avec ce problème et on a collé le fonctionnement autistique sur des choses déjà établies. Finalement, on s'est retrouvés avec une façon d'intervenir, un modèle continu d'intervention. Jusqu'à aujourd'hui, on a des résultats très intéressants.

Une des premières constatations que j'ai faite est que les gens lisent très mal l'autisme. J'ai l'impression de rêver depuis que je suis arrivée ici. Je comprends la détresse des parents; je comprends qu'on ait autant de difficulté comme adulte et autant les enfants. Je n'ai pas de mal à comprendre cet aspect. Il y a une très mauvaise lecture de faite, et dès le moment que la lecture est faite à partir d'une carte de non-autisme, vous ne pouvez pas asseoir les vrais besoins des personnes autistes, et les séparer des besoins de l'entourage. Il y a évidemment des besoins pour la fratrie, la famille. Je fais des tournées pour la Fédération québécoise de l'autisme. Je travaille beaucoup avec les familles. On fait d'ailleurs une tournée sur le deuil, sur le choc après diagnostic, et c'est très intéressant. Je n'exclue pas ces besoins.

Ce que je dis depuis le début, c'est qu'il se passe quelque chose. On s'aperçoit que cela fonctionne très bien au niveau de l'intervention. Les besoins sont toutefois mal ciblés. Donc forcément les méthodes et moyens sont mal construits.

Au niveau des traitements pour les 0 à 5 ans, d'abord et avant tout, cela prendrait un modèle de stimulation précoce adapté à l'autisme et non au non-autisme. L'analyse appliquée du comportement (ABA) n'est pas parfaite, je suis désolée. On s'en sert parce qu'on a rien d'autre présentement. On n'arrête pas de faire des ajustements. Il y a plein de petites filles qui font leur ABA qui m'appellent pour que je les conseille. Il y a des endroits qui ne fonctionnent pas parce qu'ils ne sont pas basés sur notre fonctionnement.

À partir de là, il ne serait pas compliqué d'ajuster ce système si une volonté nationale était présente. On aurait probablement un programme efficace et d'ailleurs, au Québec, nous sommes encouragés sur ce point.

Les choses ne vont pas très bien à l'école pour les 5 ans à 18 ans Ce n'est pas sur le plan académique que c'est difficile pour les autistes; cela n'a jamais été le problème. On ne parle pas le même langage que vous, mais on comprend très bien.

C'est sur le plan social que c'est plus difficile. Il y a un travail d'adaptation et non de réadaptation à faire. Une grande partie des autistes passent du continu au ponctuel. Certains sont très atteints et pour eux ce sera toujours plus difficile. Mais au niveau des adultes, le plus important est d'uniformiser les lois.

Des situations me sont rapportées où les adultes demandent une subvention pour une personne handicapée et cette subvention leur est refusée. Évidemment, lorsqu'on travaille on n'est plus handicapé, mais on nous refuse également une police d'assurance-automobile sous prétexte que l'on est handicapé. Il y a donc des failles.

Plusieurs pensent, à tort, que les autistes ont besoin d'aide à vie. Les gens souffrant d'autisme ont besoin d'une aide ponctuelle. En passant, j'en ai encore besoin. Cela m'a coûté 60 000 $ pour en arriver où je suis, et je n'y suis pas arrivée seule.

Grosso modo, c'est ce que j'avais à dire. Il est important de revenir à la base, parce que la trajectoire dévie et l'information disponible présentement n'a pas fini d'amener son lot de frustration.

[Traduction]

Jason Oldford, à titre personnel : C'est un honneur pour moi de m'adresser ici au comité. J'ai été diagnostiqué comme étant atteint d'autisme en 1974, alors que l'on savait peu de choses sur ce trouble. Je vais vous parler un petit peu de moi. Cela ne demandera pas beaucoup de temps. J'ai un certain nombre de choses à dire au sujet du financement du traitement.

Je souffre toujours de certaines faiblesses, du fait de mon autisme. Je citerai à titre d'exemple le contact visuel. Mes aptitudes sociales ne sont pas non plus parfaites. Elles ne se situent même pas au niveau de celles de Monsieur ou Madame Tout-le-Monde.

Du côté positif, mes aptitudes langagières se sont développées normalement. Je savais lire à l'âge de trois ans. Je connais des choses triviales que d'autres ne rêveraient jamais de connaître. J'ai parfois tendance à interpréter les choses de façon littérale.

Je détiens deux diplômes universitaires et j'ai fréquenté l'école publique aux côtés de tous les autres enfants. Je n'ai pas été inscrit en classe d'éducation spécialisée.

La raison pour laquelle j'ai accepté l'invitation de venir comparaître devant le comité est que je voulais vous dire ce que j'aimerais voir. J'aimerais voir les personnes très atteintes d'autisme devenir davantage comme moi, ou comme d'autres comme moi, c'est-à-dire atteindre un haut niveau de fonctionnalité. Cela peut arriver. J'y crois.

Le Canada compte environ 100 000 personnes atteintes d'une forme ou d'une autre d'autisme. Lorsque leurs parents ont reçu le diagnostic, ils ont tout de suite commencé à chercher un traitement. C'est ainsi qu'ils ont découvert l'ACA, ou analyse comportementale appliquée. C'est le seul traitement fondé sur des preuves qui soit disponible. Le seul inconvénient est qu'il coûte cher. Les gens n'en ont pas les moyens. C'est pourquoi ils recourent à leurs gouvernements provinciaux respectifs et essaient d'obtenir d'eux qu'ils s'en chargent. Cela n'a pas fonctionné comme ils l'avaient prévu.

L'autisme est un trouble permanent et incurable. Il existe plusieurs traitements. Un seul est fondé sur des preuves. Il n'existe pas de remède.

Les clés sont une intervention précoce, un diagnostic précoce et un dépistage précoce. Si le traitement commençait immédiatement après le diagnostic, ou peu après, l'enfant pourrait, en l'espace de trois ou quatre ans, être inscrit à l'école et peut-être ne pas avoir besoin d'ACA. Il pourrait faire son chemin, obtenir un diplôme de fin d'études secondaires, obtenir des diplômes universitaires et contribuer à la société.

J'ai été heureux hier lorsque j'ai entendu que la Chambre des communes avait adopté la motion M-172, en vue d'une stratégie nationale pour l'autisme. J'ai fêté mes 36 ans hier. Cette nouvelle dont je viens de faire état se classe parmi les meilleurs cadeaux d'anniversaire que je pourrais jamais recevoir.

Les provinces s'inquiètent de leurs ressources et du fait de devoir vivre selon leurs moyens. Je comprends qu'il faille que les provinces vivent selon leurs moyens. C'est là qu'intervient le gouvernement fédéral, qui apporte son aide. Si les gouvernements fédéral et provinciaux faisaient front commun et travaillaient main dans la main, ils trouveraient une solution à la situation du traitement de l'autisme que nous vivons dans ce pays, dans chaque province et territoire.

D'aucuns s'inquiètent de la possibilité que le traitement de l'autisme soit financé à même le régime d'assurance-maladie. Je serais en faveur de cela. En bout de ligne, c'est aux provinces et aux territoires que revient la responsabilité. Chacun a son propre régime d'assurance-maladie. Si des provinces décidaient de ne pas financer ce traitement par le biais de leur régime d'assurance-maladie, non seulement je dirais qu'elles font erreur, mais je pense qu'elles devraient pouvoir trouver de la place dans leurs budgets respectifs pour financer ce traitement.

Il y a également la question de l'éducation. Il nous faut des thérapeutes formés en analyse comportementale appliquée. Il nous faut dans nos écoles des personnes formées pour assurer des services d'ACA aux élèves et étudiants autistes. Il nous en faut en nombre suffisant afin qu'il n'y ait plus de listes d'attente.

J'ai entendu des histoires de personnes qui ont essayé de suivre des cours d'orthophonie et d'ergothérapie; certains m'ont dit avoir passé des mois, voire des années, sur des listes d'attente. D'autres attendent toujours. Il s'agit là d'un problème auquel il nous faut nous attaquer et qui doit être résolu.

L'ACA est un traitement coûteux. Vous avez sans doute entendu parler d'un chiffre de 60 000 $ par an par enfant. Cela correspond à 52 semaines par an, à raison de 40 heures par semaine, au coût de 30 $ l'heure.

Les parents eux-mêmes risquent la faillite lorsqu'ils doivent payer ces traitements de leur poche. Je comprends en tout cas pour ma part la situation dans laquelle ils se trouvent. Je n'en reviens pas qu'ils parviennent à couvrir le traitement dont leur enfant a besoin tout en continuant d'assurer tout le reste. Je ne sais vraiment pas comment ils font pour y parvenir. Ils y arrivent, je ne sais trop comment.

L'intervention, le dépistage et le diagnostic précoces peuvent paver la voie pour qu'un enfant réalise son plein potentiel et devienne productif dans la société. Si Ottawa et les provinces pouvaient travailler ensemble, nous aurions une solution.

Comme cela dé jà été mentionné, l'ACA n'est pas une solution parfaite. Selon des études, seuls 47 p. 100 des participants testés se sont démarqués par rapport aux autres, mais 47 p. 100, c'est beaucoup mieux que zéro.

Si les provinces et territoires et le gouvernement fédéral œuvraient tous ensemble là-dessus, cela déboucherait sur des solutions. Aucun des problèmes du monde n'a jamais été résolu par la dispute; aucun des problèmes du monde n'a jamais été résolu par l'inaction; aucun des problèmes du monde n'a jamais été résolu par l'inquiétude.

Si Ottawa pouvait s'organiser avec les provinces et territoires et en arriver à une solution — et j'ai confiance qu'ensemble ils le peuvent; j'ai confiance qu'ils peuvent réaliser cela —, songez simplement au nombre d'enfants qui ne seraient plus dans des foyers de groupe ou des institutions. Songez au nombre d'enfants qui pourraient contribuer à la société s'ils recevaient ce traitement. Si les provinces et Ottawa travaillaient ensemble, je sais que ce serait chose possible.

Le président : Merci. Si ce n'est pas trop tard, bon anniversaire.

Daniel Hatton, à titre personnel : Merci de m'avoir invité à venir m'entretenir avec vous. Je vais vous parler du financement et du traitement de l'autisme chez les adolescents et les adultes.

J'ai aujourd'hui 36 ans et on a diagnostiqué chez moi l'autisme à l'âge de trois ans et demi. Cela fait bien longtemps que Leo Kanner et Hans Asperger ont déposé leurs travaux de recherche sur les troubles du spectre de l'autisme. Depuis lors, le financement a été surtout concentré sur les enfants plutôt que sur les adultes et les adolescents à fonctionnalité élevée. L'on ne se soucie pas beaucoup de financer les soins à assurer à ces derniers, et cela me préoccupe.

Bien que de nombreuses personnes autistiques présentent des problèmes de comportement, j'étais pour ma part très heureux en tant qu'enfant. Vu que j'étais calme et que je me comportais apparemment bien, les enseignants n'ont pas relevé mon problème pendant toute la durée de ma scolarité.

Les adultes ayant des QI de 70 ou plus et de bonnes capacités d'expression verbale ne reçoivent aucun financement ni soutien scolaire en situation de groupe. Les enseignants doivent être davantage sensibles au travail de groupe.

J'étais résident de l'Ontario et je bénéficiais du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées. Le financement de ce programme doit être augmenté.

Le président : Merci beaucoup. Vous avez tous et chacun exposé des perspectives intéressantes dont nous allons pouvoir discuter avec vous.

Le sénateur Keon : J'ai été fasciné par vos exposés. Ce doit être extrêmement encourageant pour des parents vivant aujourd'hui avec des enfants autistiques de constater la façon dont vous quatre vous êtes tirés d'affaire ici aujourd'hui. Je vais aller droit au but, étant donné que de nombreux sénateurs souhaitent poser des questions.

Monsieur Oldford, vous avez parlé de la nécessité d'un programme social, à base assez large, que partageraient les pouvoirs fédéraux et provinciaux, le gouvernement fédéral assurant cependant le leadership. Il existe des précédents pour de tels programmes, que ce soit dans le domaine de la santé ou dans un contexte social plus général. Le gouvernement fédéral peut élaborer une stratégie et financer un programme dans le cadre d'une entente de temporisation avec les provinces. C'est ainsi qu'il le finance pendant cinq ou dix ans, avec une stratégie de transition pour que les provinces en assument la responsabilité. Est-ce cela que vous proposez?

J'inviterai tous les témoins à répondre. Il nous faut commencer à réfléchir à des initiatives utiles que nous pourrions recommander.

M. Oldford : Oui, je recommandais un leadership fédéral, le gouvernement fédéral et les provinces s'entendant sur quelque chose pour financer des traitements fondés sur des preuves. Le projet de loi qui a été adopté hier parlait de normes fondées sur des preuves. C'est bien. Il y est question d'élaborer des méthodes de financement novatrices, ce qui est également bien. J'ai lu une explication qui disait que cela signifie que les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral devront discuter de la façon de financer des traitements fondés sur des preuves.

Le seul traitement fondé sur des preuves qui existe à l'heure actuelle est l'ACA, mais il y a peut-être d'autres choses à venir. D'après ce que j'ai pu lire, je pense que, tôt ou tard, l'ACA ne sera plus seule dans la catégorie des traitements fondés sur des preuves. Si d'autres traitements fondés sur des preuves devaient voir le jour, je les appuierais également, surtout s'ils devaient coûter moins que ce que coûte l'ACA.

Les gouvernements doivent s'entendre sur la façon de financer un traitement qui a été validé par la science et qui est fondé sur des preuves.

[Français]

Mme Harrisson : J'aurais un point à ajouter. Si le gouvernement fédéral devenait effectivement le leader, tout en transférant plus tard ce programme aux provinces, il serait intéressant qu'il donne l'exemple et garde les autistes impliqués dans ces démarches de traitements.

Je vais répéter : il est vraiment important que les autistes qui sont plus autonomes, qui peuvent aider le fassent. Cela presse. C'est ce que nous constatons. Alors si vous êtes en mesure de démarrer quelque chose, si vous donnez le ton, c'est évident qu'après, cela pourra être suivi par les provinces.

[Traduction]

Le sénateur Munson : Monsieur Oldford, vous êtes du Nouveau-Brunswick. C'est une province formidable. Je tenais tout simplement à ce que cela figure au procès-verbal. Bien que je sois un sénateur de l'Ontario, mon cœur est au Nouveau-Brunswick.

Quelqu'un sait-il combien d'adultes atteints de troubles du spectre de l'autisme dans ce pays vivent en foyer collectif? Si vous ne le savez pas, ce n'est pas un problème. Quelqu'un sait-il quels genre de soins, de formation ou d'intervention existent? Vous tous êtes passés par le système et l'on y met tant l'accent sur les enfants. Il est important que vous nous livriez votre message ici aujourd'hui, pour nous dire quels genres d'interventions existent dans ce pays pour les personnes âgées de 18 ans et plus. Mes questions s'adressent à quiconque peut y répondre.

[Français]

Mme Harrisson : Il semblerait que les adultes n'existent pas. Depuis l'arrivée des traitements pour les enfants, cela a été très difficile d'avoir des statistiques. Je vous avoue que s'il y en avait eu on les aurait vues. Il n'y a rien. On n'est pas au courant des chiffres.

La plupart des adultes de notre génération n'ont pas eu d'aide. Avec mon expérience clinique, je ne pense pas que ce soit vrai que la majorité soit en institution. Je n'ai pas cette impression, mais bien l'impression que la majorité est à l'extérieur et de moins en moins en institution.

J'ai travaillé dans des centres de réadaptation avec des adultes qui sont sortis des institutions au Québec et qui avaient des gros bagages de vie. On est arrivés à faire certaines choses avec eux, mais ce n'est pas le cas de la majorité. On travaille beaucoup plus avec des adolescents et des adultes; l'identité autistique se passe à l'adolescence et c'est la pire période.

C'est toutefois très rare qu'on ait des références en institution sur les adultes. La plupart du temps, ils sont sortis des institutions. Il y en a dans les résidences, ce sont les cas les plus lourds qui n'ont jamais obtenu de services adéquats et qui étaient traités comme ayant une déficience intellectuelle à l'époque.

[Traduction]

M. Oldford : J'approuve tout ce qu'a dit Mme Harrisson. Je ne dispose d'aucune statistique quant au nombre d'adultes qui sont autistiques, qui vivent en foyer collectif ou en établissement. Je dirais qu'un petit nombre d'adultes autistes vivent dans des foyers de groupe ou en établissement. Je peux me tromper, mais je ne pense pas qu'ils soient très nombreux dans ce cas.

Lorsque vous lisez des publications sur l'autisme, vous lisez des choses au sujet d'enfants autistiques. L'autisme est diagnostiqué pendant l'enfance. Certains des types d'autisme à fonctionnalité supérieure peuvent être diagnostiqués à l'adolescence, voire même à l'âge adulte.

Les adultes continuent d'avoir besoin de traitement. Lors de la session qui a précédé celle-ci, les participants ont, entre autres choses, discuté des restrictions en matière d'âge. Je ne pense pas qu'il y ait lieu d'en avoir; cela est discriminatoire. Lorsqu'un enfant atteint l'âge de cinq ou six ans et continue d'avoir besoin de traitement, il ne devrait pas se le voir enlever. Il devrait continuer de bénéficier de traitement. La personne qui est diagnostiquée à l'âge adulte et qui a besoin de traitement devrait pouvoir en bénéficier.

Pour en revenir à la question du logement, comme je l'ai déjà dit, quiconque travaille avec des personnes autistes en foyer collectif ou en établissement doit avoir reçu la formation requise et savoir comment aborder l'autisme. Dans le cas contraire, la situation ne sera pas bonne. Il importe également qu'il y ait des logements convenables pour les personnes atteintes d'autisme, et ce pas simplement chez moi, au Nouveau-Brunswick, mais dans toutes les provinces du Canada.

Le président : La plupart des personnes atteintes de troubles du spectre de l'autisme vivent-elles à la maison avec leurs parents, ou bien sont-elles nombreuses à vivre de façon indépendante?

M. Oldford : Je dirais que bon nombre vivent avec leurs parents. J'ai vécu avec mes parents jusqu'en juillet dernier, lorsque mon frère et moi avons acheté une maison. J'aurais tendance à penser que la plupart des autistes vivent avec leur famille.

Cela m'amène à une autre question, celle de l'emploi. Lorsque les personnes autistiques arrivent à l'âge adulte, la plupart d'entre elles se retrouvent ou au chômage ou en situation de sous-emploi, ce qui explique pourquoi elles vivent avec leurs parents ou dans des foyers collectifs. Elles ne gagnent pas suffisamment d'argent pour être autosuffisantes. C'est malheureux. Cela aussi devrait être discuté dans le contexte de la question des traitements.

Le président : Monsieur Hooker, aimeriez-vous ajouter quelque chose?

M. Hooker : Lorsque j'étais jeune, j'ai eu des séances d'orthophonie, des séances d'ergothérapie, j'ai été envoyé à une clinique spécialisée dans le syndrome de l'angoisse ainsi qu'au Health Sciences Centre. Aujourd'hui, je suis des cours d'anglais de niveau avancé. C'est là la seule thérapie dont je bénéficie.

[Français]

Mme Harrisson : Il est probable que plus d'adultes pouvaient vivre en appartement avec des services de maintien à domicile, et plus on va s'occuper des vraies choses et plus ce sera possible. Présentement, ceux que l'on connaît vivent chez leurs parents ou pas loin.

[Traduction]

Le sénateur Munson : Il semble que les diagnostics d'autisme ne cessent de se multiplier. Le tout dernier chiffre est un cas d'autisme sur 166 naissances. Avec de tels diagnostics, nous allons ou payer aujourd'hui ou payer plus tard, et si nous payons plus tard, cela coûtera gros. Nous avons des statistiques sur les coûts en établissement, si la tendance devait se maintenir. Qu'en pensez-vous?

M. Oldford : Je suis d'accord avec vous là-dessus. J'ai entendu des gens, qui se battent pour obtenir un traitement, dire aux gouvernements, comme vous l'avez vous-même dit, sénateur Munson, que les gouvernements peuvent payer aujourd'hui ou payer plus tard. Nous comprenons que ce traitement est coûteux, mais si vous le payer aujourd'hui, voyez le rendement que vous obtiendrez sur votre investissement. Les personnes atteintes d'autisme pourront alors sortir dans le vrai monde et se trouver un emploi, ce qui stimulera l'économie. Ou bien vous pouvez payer plus tard, ce qui voudra dire que ces personnes iront dans des foyers collectifs et il en coûtera beaucoup plus cher aux contribuables de les y maintenir à long terme.

Le sénateur Cordy : Notre panel d'aujourd'hui a été excellent. Je vous remercie tous et chacun d'être venus. Monsieur Hooker, vous avez parlé de stéréotypes et du fait que cela puisse poser un gros problème pour les personnes atteintes de troubles du spectre de l'autisme. Votre comparution ici aujourd'hui pourrait faire changer d'avis beaucoup de personnes qui vous écoutent. Y a-t-il d'autres moyens de réduire les stéréotypes que les gens peuvent avoir?

M. Hooker : Vous voulez dire d'autres moyens pour d'autres personnes autistiques d'éliminer le stéréotype? La seule idée qui me vienne à l'esprit serait qu'on leur donne tout simplement l'occasion de parler en public, de participer à des émissions de télévision ou de radio, ou de se faire interviewer pour des articles de journaux, afin de favoriser la sensibilisation du public. Il s'agirait de communiquer un message du genre « Écoutez, nous ne sommes pas comme Rain Man ou les autres enfants atteints du trouble du spectre de l'autisme qu'on montre dans les revues ou les journaux et qui ont une très faible fonctionnalité, qui sont très agressifs et qui ne parlent pas. Nous pouvons également être très sociables, gentils, passionnés et intelligents ».

Le sénateur Cordy : Vous nous avez prouvé toutes ces choses ici aujourd'hui. Y a-t-il quelque chose que nous pourrions faire pour aider?

M. Hooker : La seule chose qui me vienne à l'esprit est de passer le mot.

M. Oldford : Il faudrait qu'il se fasse davantage de sensibilisation à l'autisme. Comme l'a mentionné M. Hooker, les gens sont nombreux à considérer que nous sommes des personnes à fonctionnalité limitée, car c'est ainsi qu'ils perçoivent l'autisme. C'est ce qu'ils voient à la télévision et dans les journaux. Ils se disent : « Quelle chance j'ai de ne pas avoir un enfant comme cela ». Même dans les cas les plus graves, l'autisme n'est pas la fin du monde.

Une façon de promouvoir la sensibilisation serait de parler de l'autisme dans des articles de journaux et à la télévision, comme l'a dit M. Hooker. Une autre possibilité serait que davantage de personnes atteintes de troubles du spectre de l'autisme soient invitées à prendre la parole lors de conférences. L'une des mesures qu'a annoncées la semaine dernière le gouvernement dans sa stratégie visant l'autisme est qu'il y aura l'an prochain un symposium national sur l'autisme. Lors de ce symposium national, quoi de mieux que d'y entendre des conférenciers et des conférencières autistes.

Le sénateur Fairbairn : Vous seriez un très bon choix; vous tous, en fait, seriez de bons choix comme conférenciers lors du symposium.

[Français]

Mme Harrisson : Vous essaierez de remarquer dans les prochaines semaines, les prochains mois, les prochaines années combien de fois les gens parlent de l'autisme sans considérer que les autistes pourraient en parler eux-mêmes. Cela fait des années que tout le monde parle à la place des autistes. Cela fait quelques années que plusieurs adultes attendent pour expliquer les vraies choses. Les gens se débattent autour. Comme je vous l'ai dit plus tôt, c'est assez incroyable : cette façon de fonctionner ne donnera jamais de résultats efficaces.

Je disais plus tôt au sénateur Keon que s'il y a quelque chose que vous pouvez faire c'est de vous assurer que les autistes seront présents dans les prochains mois, les prochaines années pour la suite des événements. C'est vital.

[Traduction]

M. Hatton : L'accent est principalement mis sur le soutien scolaire, surtout en cas de difficultés avec le travail de groupe. Il serait important de mieux financer la formation des enseignants, surtout aux fins de travail d'équipe. Les enseignants doivent comprendre que lorsqu'ils placent un élève autiste au sein d'un groupe, cet élève ne va pas forcément écouter. Il faudra qu'il soit mieux intégré. Par exemple, si l'élève est mieux préparé, alors peut-être que le travail de groupe pourra être bénéfique, mais ce ne sont pas tous les élèves autistes qui peuvent fonctionner en groupe, bien que ce soit une expérience d'apprentissage.

Le sénateur Cochrane : J'aimerais revenir sur ce que vous disiez, monsieur Hatton, au sujet de la nécessité d'aide individuelle et d'aide en équipe au sein du système scolaire. Auriez-vous en tête d'autres services qui seraient nécessaires pour les personnes atteintes d'autisme?

M. Hatton : L'autre élément important est que ce qui est nécessaire pour les enseignants l'est également pour les employeurs : il leur faut être mieux renseignés. Si je m'appuie sur ma propre expérience de travail, je suis doué d'un étrange don de dissimulation de nombre de mes comportements étranges.

Le sénateur Cochrane : Les gens doivent mieux comprendre l'autisme.

M. Hatton : Oui.

Le président : Quelqu'un d'autre aimerait-il répondre à cette question?

M. Oldford : Il importerait de donner une formation aux enseignants et aux employeurs. Cependant, en ce qui concerne le travail d'équipe, les personnes atteintes d'autisme préfèrent travailler seules. Lorsque vous insérez des personnes autistes dans une situation d'équipe, il arrive souvent qu'elles deviennent un peu difficiles et irascibles. Ce peut être parce que les autres membres de l'équipe n'acceptent pas leurs suggestions ou pour d'autres raisons encore. Il y a eu des histoires au sujet d'étudiants hautement fonctionnels qui devenaient agressifs en contexte scolaire. Ce n'est pas leur nature, mais c'est ce qui se passe lorsqu'ils se sentent frustrés du fait de ne pas pouvoir bien communiquer leurs sentiments. Dans bien des cas, l'enseignant enverra ces étudiants chez le directeur, leur imposera des retenues ou des suspensions, les renverra à la maison pour la journée, ce qui pose un problème de nos jours pour les parents, car dans le cas de la plupart des familles, les deux parents travaillent à l'extérieur.

Il importe donc d'offrir aux employeurs et aux enseignants une formation, afin qu'ils comprennent l'autisme et sachent comment agir. Il leur faut savoir comment composer avec les situations pouvant être provoquées par l'autisme.

[Français]

Mme Harrisson : J'ai écrit deux guides scolaires en français : un pour les adolescents et un pour les enfants. Il y a des besoins au niveau scolaire. C'est distribué partout sur la planète en ce moment. Il n'est pas réaliste de penser que tous les autistes vont avoir du un pour un. Ce que l'on constate, c'est qu'une intervention auprès d'autres enfants ne peut pas convenir pour les enfants autistes, mais quand on intervient auprès des autistes, cela convient tout à fait pour les autres enfants de la classe. Les enseignants nous disent qu'avec les moyens pédagogiques qu'on leur propose, plusieurs arrivent à bien intégrer des enfants autistes. Il y a beaucoup de choses à leur montrer là-dessus.

Au niveau pédagogique, les choses se sont beaucoup développées. Cela prend des programmes informatiques pour les autistes. Malheureusement, les gens ne savent pas se servir du programme Teach. Il faut que les gens apprennent à s'en servir. Ils s'en servent comme si les autistes avaient une déficience intellectuelle alors que cela ne relève pas du tout du même secteur; ce n'est pas du tout le même fonctionnement. On constate qu'après trois ou quatre mois les enseignants, qui ont essayé d'utiliser le programme Teach comme si c'était pour des enfants avec une déficience intellectuelle, paniquent parce que rien ne va plus. Parce que les enfants autistes ont besoin d'un programme académique à l'informatique beaucoup plus que le programme académique normal. L'informatique est important : au même titre que le sourd qui communique par le gestuel, nous on communique par le visuel. C'est la méthode la plus simple pour apprendre. Une fois que les gens ont compris, cela va beaucoup mieux. Les services d'orthopédagogie ne sont pas suffisants dans les écoles, mais ce n'est pas nouveau. On manque de personnel.

[Traduction]

M. Hooker : Lorsque je suis au travail, le meilleur moyen pour moi de comprendre les tâches qu'on aimerait que j'exécute dans la journée est qu'on me mette par écrit une liste d'instructions que je puisse lire. Je comprends mieux les tâches à accomplir lorsqu'on me les met sur papier.

Le sénateur Callbeck : Les témoignages de nos invités nous ont été très bénéfiques aujourd'hui et nous aideront dans l'élaboration des recommandations de notre rapport.

J'aimerais vous demander votre opinion au sujet du site Web. Le ministre a annoncé, en novembre, qu'il y aura sur le site Web de Santé Canada un nouveau volet destiné à aider le public à mieux comprendre l'autisme. Quels genres de renseignements devraient selon vous figurer sur ce site Web, afin que le public comprenne mieux?

M. Oldford : En gros, les mêmes choses qui figurent sur d'autres sites Web : les causes, les symptômes, les traitements, de quoi il s'agit.

[Français]

Mme Harrisson : On devrait y inclure des hyperliens vers des sites où se trouvent d'autres personnes autistes et des regroupements tels SAtedI. Ma seule recommandation serait de tenir ce site à jour. Les sites sur l'autisme sont, en général, très en retard sur la réalité. Ils contiennent beaucoup d'informations désuètes qui ajoutent à la confusion des parents et des adultes.

Les adultes nous arrivent, à l'association, avec toutes sortes d'explications qui ne tiennent pas debout. Cela est dû au fait que la mise à jour de l'information ne se fait pas. Le premier critère auquel devrait répondre un site web sur l'autisme serait la nécessité d'avoir une personne qui puisse le tenir à jour.

À la vitesse où les connaissances avancent présentement, on ne peut pas passer à côté de ce fait. Il est primordial de faire très attention avant de diffuser l'information. Il faut s'assurer de vérifier les sources avant d'affirmer qu'il s'agit d'une maladie mentale ou de qualifier cette condition comme j'ai pu entendre plus tôt et que je tenterai d'oublier.

Il faut s'assurer que les sources soient justes. On ne le dira jamais assez souvent, il faut passer par les autistes et non seulement par les gens qui les entourent, qui les observent et ne se fondent que sur leurs craintes.

Habituellement, les autistes sont beaucoup plus calmes que les personnes qui les entourent. Nous sommes d'ailleurs moins malheureux que ceux qui nous entourent.

[Traduction]

Le sénateur Fairbairn : Je vous écoute très attentivement. Je crois bien que j'ai beaucoup plus appris en vous écoutant ici cet après-midi que pendant toutes nos séances précédentes.

À vous écouter parler — tout d'abord en nous donnant de bons conseils —, et nous expliquer comment chacun d'entre vous a, à sa façon, réalisé quantité de belles choses, je me demande si cela s'est fait à l'intérieur ou à l'extérieur du cadre scolaire. Mme Harrisson travaille bien sûr en milieu scolaire, mais vous arrive-t-il, individuellement, d'aider de jeunes enfants et d'autres personnes qui éprouvent des difficultés? Vous faites manifestement un travail de toute première classe. Vous arrive-t-il jamais de vous trouver dans une situation dans laquelle vous pourriez offrir conseils et aide à d'autres qui éprouvent peut-être quelques difficultés?

M. Oldford : Je me trouve en effet parfois dans des situations comme celle que vous venez de décrire. Dans la plupart des cas, il s'agira de donner des conseils aux parents d'enfants autistes. Tout ce que je peux en fait leur livrer ce sont des mots d'encouragement. Je ne suis aucunement en mesure de leur dire de quelle façon élever leurs enfants.

La population autistique est assez importante, même dans une petite province comme le Nouveau-Brunswick. Le seul conseil que je puisse donner aux gens est de ne pas abandonner le combat.

M. Hooker : Cela fait quelque temps maintenant que je rends visite à des familles qui ont un enfant atteint de troubles du spectre de l'autisme, et que j'échange avec elles. Je leur donne des conseils en matière de comportement social approprié et de recherche d'emploi.

J'ai également une certaine expérience de l'enseignement individuel par un pair et j'ai fait du travail de relève auprès de familles. J'ai également fait du travail dans un centre de soutien fonctionnel communautaire local, où j'offrais non seulement des conseils aux gens, mais également mon amitié.

[Français]

Mme Harrisson : Pourriez-vous répéter votre question en une phrase, s'il vous plaît?

[Traduction]

Le sénateur Fairbairn : Vous appuyant sur vos compétences, aidez-vous d'autres autistes, surtout des jeunes gens, à progresser?

[Français]

Mme Harrisson : J'interviens auprès des jeunes depuis déjà 23 ans. J'ai élaboré une programmation. Je travaille actuellement avec des groupes d'adolescents. Il s'agit de groupes de jeunes âgés entre 14 et 18 ans et entre 9 et 12 ans. J'aide beaucoup de jeunes, de parents et d'intervenants. D'ailleurs, tout le monde est sur place pour donner un coup de pouce. Ce travail se fait dans une région du Québec. On peut constater des résultats très encourageants. Je fais cela sur une base régulière. C'est même devenu mon métier depuis deux ans et demi.

[Traduction]

Le sénateur Fairbairn : Je suis heureuse de l'entendre. Et qu'en est-il pour vous, monsieur Hatton?

M. Hatton : Quelle était la question?

Le sénateur Fairbairn : En vous écoutant simplement tous ici ce soir, j'ai constaté que vous avez beaucoup appris, et je me suis simplement demandée s'il vous arrivait de temps à autre d'aider d'autres personnes, surtout des enfants ou des autistes plus jeunes que vous, à se débrouiller comme vous l'avez fait — un petit peu comme ce que ferait un enseignant.

M. Hatton : Vous voulez dire en éduquant d'autres personnes?

Le sénateur Fairbairn : Oui, vous inspirant de ce que vous avez vous-même appris — transmettant ces connaissances à d'autres personnes, afin qu'elles aient de meilleures possibilités de progresser.

M. Hatton : Cela m'est déjà arrivé.

Le sénateur Fairbairn : Bien.

M. Hatton : J'ai, il y a de cela de nombreuses années, donné une conférence à la section locale de l'association pour l'autisme à Hamilton. C'était à l'époque où je terminais mon cours collégial en illustration.

Le sénateur Fairbairn : Cela est important. Merci beaucoup.

Le président : Merci à vous quatre. Vous nous avez livré de précieux renseignements. C'est la première fois que nous invitons à faire partie d'un panel quatre adultes autistes. Nous avons entendu beaucoup de parents nous parler d'enfants autistes, mais nous tenions également à nous entretenir avec des adultes chez qui l'on a diagnostiqué l'autisme. Votre participation nous a été des plus précieuses.

La séance est levée.


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