Délibérations du Sous-comité des Anciens combattants
Fascicule 3 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 7 février 2007
Le Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit ce jour à 12 h 13 afin de pencher sur les services et les avantages sociaux offerts aux membres des Forces canadiennes, aux anciens combattants, aux membres des missions de maintien de la paix et à leurs familles en reconnaissance des services rendus au Canada.
Le sénateur Michael A. Meighen (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : La séance d'aujourd'hui portera spécialement sur les activités commémoratives, les cimetières militaires et les monuments commémoratifs qui assurent la pérennité des accomplissements et sacrifices de nos anciens combattants.
Nous accueillons aujourd'hui le major général Clive Addy, président de la Fondation canadienne des champs de bataille, Bradley N. Hall, secrétaire général de la Commonwealth War Graves Commission, et, au nom du ministère des Anciens combattants, Robert Mercer, sous-ministre adjoint chargé de la commémoration de Vimy en 2007, qui est accompagné d'Émile Gallant, directeur par intérim des Mémoriaux nationaux et internationaux.
Je m'appelle Michael A. Meighen. Je suis sénateur de l'Ontario et président ce sous-comité. Avant de donner la parole aux témoins, je vais présenter les membres du sous-comité.
Malheureusement, le sénateur Kenny ne peut être avec nous aujourd'hui car il est malade mais nous avons le sénateur Atkins, de l'Ontario. À son arrivée au Sénat en 1986, il avait plusde 27 années d'expérience dans le secteur des communications. Il a été président de Camp Associates Advertising Limited, conseiller du premier ministre Davis de l'Ontario et conseiller de l'honorable Robert Stanfield, chef de l'opposition au palier fédéral, Il est également membre du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense.
Le vice-président du sous-comité est le sénateur Day duNouveau-Brunswick. Il préside le Comité sénatorialpermanent des finances nationales, est membre des barreaux du Nouveau-Brunswick, de l'Ontario et du Québec, et Fellow de l'Institut de la propriété intellectuelle du Canada. Il a étéprésident et PDG de l'Association des produits forestiers du Nouveau-Brunswick et président de l'Association des anciens du Club des Collèges militaires en royaux du Canada.
Cela représente la composition officielle de notre sous-comité mais nous avons aussi avec nous aujourd'hui le sénateur Downe qui, même s'il n'est pas membre, participe régulièrement à nos réunions. Il vient de l'Île-du-Prince- Édouard et a été nommé sénateur en 2003. Il est actuellement membre du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international et du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration.
C'est toujours avec grand plaisir que nous accueillons notre collègue du Québec le sénateur Dallaire, qui représente la Gaspésie et qui siège également au Comité sénatorial permanent des droits de la personne.
Nous avons aussi avec nous le sénateur Banks de l'Alberta, qui préside le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles et fait partie du comité qui nous chapeaute, le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense.
Les représentants du ministère seront heureux de répondre aux questions concernant Vimy, sauf celles concernant les invitations.Pour ce qui est de l'événement lui-même, je crois comprendre que c'est M. Mercer qui va nous en parler en détail.
Je donne maintenant la parole au major général Clive Addy, président de la Fondation canadienne des champs de bataille, pour sa déclaration liminaire.
[Français]
Major général Clive Addy, président, Fondation canadienne des champs de bataille : Monsieur le président, c'est un privilège pour moi de vous adresser la parole aujourd'hui et de vous informer des antécédents, du mandat et des succès de notre fondation depuis ses débuts. Je comprends que l'objectif de ma présence ici aujourd'hui est effectivement de contribuer aux réflexions sur les options et directions futures du gouvernement fédéral, au ministère des Anciens Combattants, en ce qui concerne le souvenir et la commémoration des sacrifices de nos anciens et de nos plus jeunes combattants.
La formule souple, concrète, intéressante et bien appliquée de nos voyages d'étude, qui nous a permis de visiter plusieurs champs de bataille, est un exemple réaliste, effectif et populaire des efforts pour assurer la commémoration de nos générations futures. Elle assure la pérennité de ce qui est inscrit sur le marbre noir de notre fontaine du jardin canadien, au Mémorial de Caen, qui se révèle une mission pour nous tous et non simplement une idée ou une réflexion saisonnière : Nulla dies umquam memori vos eximet aevo.
[Traduction]
« Rien ne vous effacera jamais de la mémoire du temps ».
Ça ne devrait pas vous surprendre. Il n'y a que quelques pas d'ici au Monument aux morts, et vous trouverez la même phrase gravée sur le Monument aux Valeureux inauguré récemment. Ces monuments ne sont que deux des nombreuses idées sorties du cerveau d'un Canadien remarquable et fidèle, dont la moindre n'a pas été le Musée canadien de la guerre. Je veux parler du fondateur de notre Fondation, conçue en 1992 par Hamilton Southam, membre de l'Ordre du Canada. Il avait vécu en France pendant quelques années. Il avait participé à la Deuxième Guerre mondiale comme officier observateur avancé dans le 22e régiment royal. À l'occasion des célébrations du 6 juin, il avait constaté que l'on rendait hommage aux Américains et aux Britanniques dans la ville de Caen mais pas aux Canadiens, alors que c'étaient eux qui avaient le plus contribué au débarquement et qui avaient libéré la ville de Caen. Dire que M. Southam est fier d'être Canadien serait largement en deçà de la vérité et c'est cette constatation, qui l'émut profondément, qui fut à l'origine de la Fondation canadienne des champs de bataille. Au départ, elle s'appelait la Fondation de la bataille de Normandie. Elle avait été fondéeen 1992 par quatre personnes.
Ces quatre personnes s'étaient réunies en 1992 au mess des officiers de l'armée, à Ottawa, avec une centaine d'autres et elles créèrent la Fondation de la bataille de Normandie dans le but de célébrer le 50e anniversaire de cette bataille, en 1994.
Le premier président était aussi une personne intéressante et un excellent Canadien également membre de l'Ordre du Canada, le général Roland Reid. Il avait été un combattant formidable pendant la Deuxième Guerre mondiale. C'était l'un de ceux qu'on appelait à l'époque les officiers « CANLOAN » et il avait combattu avec un régiment britannique. Le jour du débarquement, il s'était retrouvé sur notre flanc dans une brigade à côté des Canadiens, au commandement d'une compagnie. C'est une personne en remarquable qui a fait un excellent travail comme premier président de la Fondation.
Nous avons fait beaucoup de choses depuis lors. Notre mission consistant à faire le nécessaire pour que la présence du Canada soit reconnue en France n'a pas changé au cours des années.
L'une des choses les plus importantes qui ont été faites lors dece 50e anniversaire fut de créer le Jardin canadien du souvenir au Mémorial de Caen. Ce Jardin canadien du souvenir a été conçu par des étudiants canadiens en architecture et a été aménagé à un endroit qui s'appelle Le Mémorial et qui est en fait devenu le monument aux morts de la ville de Caen. Vous pouvez en voir une très mauvaise photo dans la documentation qui vous a étéremise. Les noms des localités sont importants. Il y a en Normandie 202 communes qui furent libérées par les Canadiens. Peu de Canadiens le savent, mais beaucoup de Normands ne l'oublient pas. C'était l'un des objectifs. Je constate en outre que ce site fut inauguré en 1995 par le premier ministre Jean Chrétien.
Le principal but de la Fondation était de rappeler, de commémorer et d'éduquer. Avec le temps, nous avons constaté qu'il était de plus en plus important de mettre l'accent sur le volet éducatif si l'on voulait préserver les volets de souvenir et de commémoration. Le premier groupe de nobles gouverneursde la Fondation se composait d'une trentaine de personnes dont 15 étaient des anciens combattants de la Deuxième Guerremondiale — des trois armes, Terre, Mer et Air; aujourd'hui, il y en a quelque 42 dont les noms figurent dans l'annexe du document que je vous ai remis. Sur ce nombre, quatre seulement sont des anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale qui faisaient partie du premier conseil, il y a 10 ans. Je crois que cela témoigne également du fait que les efforts que nous déployons revêtent de plus en plus d'importance à mesure que notre génération vieillit. Ce phénomène est inévitable et c'est en partie pourquoi nous avons remplacé le nom de la Fondation en 2003 par celui de Fondation canadienne des champs de bataille, afin de l'associer à la commémoration de toutes les batailles du XXe siècle, en commençant par celles de la première grande guerre.
Est-ce que la Fondation changera d'orientation à l'avenir, pour tenir compte d'autres batailles? Peut-être bien mais, pour le moment, nous tenons à mettre l'accent uniquement sur les batailles du XXe siècle. Cela signifie aussi que nous porterons le regard au-delà de la Normandie, bien sûr, puisqu'il y a eu des batailles dans les airs et sur les mers dans des pays comme l'Italie, la Birmanie, la Corée, et cetera.
En 1994, la Fondation a décerné ses premières boursesà 12 étudiants. Elle a reçu des contributions de grands donateurs et l'on avait envisagé à ce moment-là qu'un fonds en fiducie de 600 000 $ serait suffisant pour verser des bourses à une douzaine d'étudiants par an afin qu'ils aillent sur place mener des études. Quelles études, me demanderez-vous? Je vous le dirai dans un instant.
Les bourses ont débuté en 1994 avec ce premier groupe. Si vous allez sur notre site Web, ce que je vous encourage à faire, vous y verrez que quatre facteurs sont importants. Le premier est qu'il s'agit d'un concours national. Cette année, des étudiantsde 35 universités canadiennes y participeront. Le deuxième est que les étudiants assument une partie des dépenses. Ce n'est pas un voyage gratuit, ce qui exclut les touristes.
Les étudiants doivent faire trois choses. Ils doivent étudier une bataille opérationnelle de la Première ou de la Deuxième guerre mondiale, par exemple le Jour J, du point de vue de la logistique et de tous les autres paramètres. Ils doivent aussi étudier et présenter une bataille tactique : qu'est-il arrivé aux Seaforth Highlanders ou aux Calgary Highlanders? Troisièmement, et c'est l'aspect le plus chargé d'émotion selon les étudiants qui ont eu le privilège d'aller là-bas, ils doivent consulter la Commonwealth War Graves Commission et son extraordinaire site Web pour étudier le cas d'un des Canadiens enterrés dans l'un des cimetières, pour nous dire qui était cette personne, d'où elle venait, etc. Dans ce contexte, ils doivent aussi se pencher sur la famille actuelle de cette personne pour savoir qui en sont les membres, ce qu'ils ont fait, s'ils connaissaient leur cousin, oncle ou fils inhuméoutre-mer. Ayant assisté à des présentations là-bas, je peux vous dire que les séances se terminent souvent par des larmes, même de la part de certains vieux soldats et anciens combattants aguerris, ainsi que des étudiants. C'est très émotif.
Depuis la Fondation, nous sommes passés de 12 à 16 bourses et nous avons également rehaussé notre contribution car nous participons maintenant au projet avec Historica et Anciens combattants Canada. Le cours destiné aux enseignants du secondaire a été conçu pour développer l'enseignement de l'histoire militaire dans toutes nos écoles. C'est un élément important. Nous le faisons avec Historica, qui fait la sélection. Elle s'assure que la sélection est plus équitable et que son système de sélection est semblable au nôtre. Nous offrons une contribution financière.
Plus important encore, nous offrons la contribution d'organisateurs, d'enseignants et d'historiens. Notre Fondation est bénie à cet égard. Si vous examinez la liste des personnes ayant participé aux diverses tournées, vous y trouverez des noms comme Jack Granastein, Des Morton, Terry Copp, Marc Milner de l'Université du Nouveau-Brunswick, Michel Fortmann de l'Université de Montréal, et bien d'autres de tous les coins du Canada qui sont de très bons enseignants.
Je suis allé en janvier à Calgary et à Edmonton où j'ai eu la chance de rencontrer quatre professeurs. Ce qui m'a le plus frappé, c'est que le programme avait débuté en 1994 et que ces quatre professeurs sont des diplômés de la Fondation canadienne des champs de bataille qui ont aujourd'hui tous au moins un doctorat et enseignent dans les grandes universités de l'Alberta. Cela me confirme que notre programme est en train de bâtir un réseau qui sera solide, continu et efficace.
Je tiens à vous parler d'une personne en particulier car ce sont les gens qui font la différence. Il s'agit d'une femme qui s'appelle Laurel Halliday et qui est une mère vivant seule à Red Deer, en Alberta. C'est une personne de l'Ouest à 100 p. 100. Elle vit dans ce que j'appelle la ligne Mason-Dixon de l'Alberta, entre Edmonton et Calgary. Elle est originaire d'un milieu ouvrier. Elle avait retracé la vie d'un soldat du Fort Garry Horse, ce qui m'avait beaucoup impressionné à l'époque, mais elle avait également confessé qu'elle était de gauche sur le plan politique, ce qui, avait- elle ajouté, la rendait assez marginale. Une autre fois, elle a reçu son diplôme de doctorat des mains de David Burkeson, qui était son mentor. Elle a dit qu'elle n'avait jamais eu l'occasion de discuter avec lui et a ajouté que « je ne pense pas que nous serions d'accord socialement parlant ».
À mes yeux, cette personne reflète parfaitement ce que recherche la Fondation, c'est-à-dire à des personnes sensibles, qui ont des connaissances et du caractère et qui aiment leur pays.
Elles doivent aussi comprendre que la chose la plus importante que nous ayons faite en ce monde, en tant que Canadiens, est que nous avons continuellement fourni des volontaires — j'insiste bien, des volontaires — qui ont sacrifié leur vie pour quelque chose. Ils l'ont peut-être fait parce qu'ils avaient besoin d'un peu d'argent à l'époque mais je peux vous dire que, quand les balles commencent à siffler, ce genre de chose est vite oublié. Ces volontaires ont combattu comme personne, ils ont livré des batailles difficiles et ils continuent de le faire aujourd'hui.
C'est aussi ce que continue de faire notre Fondation canadienne des champs de bataille. Nous avons des sites que je vous ai montrés dans les différents documents. Nous contribuons aux plus importants et participons à des manifestations annuelles. Le premier site sur lequel nous nous rendons se trouve Place de l'Ancienne Boucherie, en plein cœur de la ville de Caen. C'est un site remarquable parce qu'il est très simple avec une pierre d'environ quatre pieds de haut sur laquelle on a apposé une plaque représentant l'arrivée du général Sydney Volpe Radley Walters, Croix militaire, sortant de son char. C'est au moment où il est sorti de son char que la ville a été libérée car c'est à ce moment-là que les gens sont sortis de leurs caves et de leurs abris pour remonter à l'air libre.
Quand nous étions là-bas, le président de la France a dit que Caen est « la ville martyre de la France » et il était sincère. Des photographies de l'époque montrent que la ville avait été complètement dévastée. Aujourd'hui, des Canadiens y vont, on leur rend hommage et on dépose chaque année des fleurs au monument. Le maire, son adjoint et tout le conseil municipal sont présents. Aujourd'hui encore, alors que les clameurs sont retombées, le maire attache beaucoup d'importance à cette célébration et il se fait un point d'honneur d'y participer.
L'autre est l'Abbaye d'Ardenne, dont nous pourrons peut-être parler un peu plus tard. C'est un endroit où la 12e division des Panzer SS dirigée par Kurt Meyer a assassiné cinq Canadiens dont le sacrifice est célébré chaque année. Lorsque nous prononçons leurs noms, les étudiants qui nous accompagnent posent une feuille d'érable sur le monument. C'est émouvant. Vous pourrez peut-être aussi m'interroger sur un homme merveilleux, M. Vicot. Il y a le monument et le mémoriallui-même, le Jardin, qui est le point focal de ce que nous faisons.
Une cinquantaine ou une soixantaine d'ouvrages ont été publiés, ainsi que 28 livres, 43 articles savants, 88 références académiques, 26 conférences publiques et 19 commentaires dans des journaux. C'est impressionnant. Je pourrais vous donner des précisions sur certains de ces documents, mais pas sur tous. Ce n'est qu'un exemple du travail effectué par nos diplômés.
Je vais conclure en rappelant à tout le monde que ce sont ses membres qui font la Fondation. C'est un organisme qui a été créé par un homme merveilleux, pour une bonne raison. Si vous examinez la composition de son conseil d'administration, à l'exception d'une personne dont le nom commence par la lettre A, vous verrez que ce sont tous des Canadiens exceptionnels qui sont très dévoués et qui donnent sans compter.
Il y a deux ans, les 600 000 $ sont passés à 650 000. Hier, nous avons atteint 937 000 $. Quand nous aurons atteint le million, nous pourrons subventionner les 16 bourses des étudiants quasiment à perpétuité. Pour dispenser des programmes au secondaire et poursuivre nos activités, nous aurons peut-être besoin d'une petite contribution. À notre époque, il est difficile aux organismes tels que les Fondations de recueillir de l'argent. Les gens sont peut-être plus prêts à donner quelque chose pour une bourse particulière puis à donner autre chose quelques années plus tard, et nous allons devoir trouver un équilibre.
Je ne saurais terminer sans remercier publiquement le ministère des Anciens combattants. Depuis la création de la Fondation canadienne des champs de bataille, le ministère nous a donné une aide considérable. Je pense que nous lui avons probablement rendu quelques services mais je tiens à dire que son appui a été indéfectible. Pendant de nombreuses années, les guides du Mémorial étaient complètement financés. Normalement, il s'agissait de diplômés de nos propres cours qui allaient au Mémorial l'été suivant et amenaient les Canadiens, des anciens combattants et des membres des familles pour leur expliquer la contribution du Canada là-bas.
La Commonwealth War Graves Commission a toujours eu beaucoup d'importance à nos yeux. Les étudiants qui visitent les cimetières réalisent immédiatement les soins, l'amour et l'attention accordée par cette organisation aux 5 000 Canadiens qui ont donné leur vie, surtout dans la bataille de Normandie qui s'est terminée le 29 août. Ces moments sont très important pour nous.
Je vous remercie de votre attention. J'ai certaines idées sur les endroits où nous devrions aller pour les commémorations des années à venir et je pourrais vous en parler en réponse à vos questions.
Si vous voulez savoir ce que ressentent nos étudiants, j'ai apporté des exemplaires de nos bulletins où vous trouverez des commentaires extraits de leurs rapports. Cette fois-ci, ce sont des commentaires du quatrième rapport. C'est seulement lorsque le cours est pratiquement terminé que nous disons aux étudiants qu'ils doivent produire un rapport sur ce qu'ils ont ressenti. Si vous voulez voir ces rapports, nous les mettrons à votre disposition.
Le président : Merci beaucoup, major général Addy. Les membres du comité sont parfaitement au courant de l'excellent travail de la Fondation canadienne des champs de bataille. Veuillez transmettre nos félicitations à votre conseil.
Avant d'ouvrir la période des questions, je donne la parole à M. Bradley Hall, de la Commonwealth War Graves Commission.
Bradley N. Hall, secrétaire général, Commonwealth War Graves Commission : Merci. Je suis le secrétaire général de l'agence canadienne de la Commonwealth War Graves Commission. Le titre est un peu ronflant et suggère l'existence d'une organisation bien plus grande qu'elle ne l'est en réalité, mais il me plaît bien.
Je suis un diplômé du Collège militaire royal de Saint-Jean ayant servi 21 ans dans l'armée canadienne. À ma retraite, en 1992, je me suis joint à la Commission et j'en suis le secrétaire général depuis 2003.
C'est un grand plaisir pour moi de comparaître aujourd'hui devant votre sous-comité, Je crois que la Commission n'est pas assez bien connue au Canada étant donné que la plupart des gens qui souhaitent obtenir des renseignements sur les soldats morts au champ d'honneur s'adressent au ministère pertinent, celui des Anciens combattants. À la Commission, nous avons tendance à travailler en coulisses et à ne pas faire notre propre promotion, en comptant surtout sur la bonne volonté résultant de notre travail, que nous espérons bien fait.
Le mandat de la Commission est clair et se trouve dans sa Charte royale de la Première Guerre mondiale. Il s'agit de marquer et d'entretenir les tombes des membres des Forces du Commonwealth tombés pendant les deux guerres, de construire et d'entretenir des monuments commémoratifs pour ceux dont les tombes sont inconnues, et de tenir des registres et des dossiers. Les coûts seront partagés par les gouvernements partenaires — l'Australie, Canada, l'Inde, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni et l'Afrique du Sud — proportionnellement au nombre de leurs tombes.
Les périodes de guerre sont clairement définies : du 4 août1914 au 31 août 1921, et du 3 septembre 1939 au 31 décembre 1947. Ces périodes ont été retenues dans le cadre d'une entente et correspondent aux dates du début et de la fin des deux guerres : par exemple, les dates officielles de la fin de la Première Guerre mondiale plutôt que la date de l'armistice, et une période correspondant aux longues périodes de démobilisation des vastes forces armées des gouvernements participants, en tenant compte des morts ultérieures à cause du service militaire.
Je tiens à souligner les principes fondamentaux sur lesquels repose le travail de la Commission. Ces principes sont les suivants : que l'on commémore chaque mort individuellement en inscrivant son nom sur une pierre tombale ou sur un monument commémoratif; que les pierres tombales et monuments commémoratifs soient permanents; que les pierres tombales soient uniformes; et qu'il n'y ait aucune distinction de rang civil ou militaire, de race ou de religion. Bien que ces principes puissent paraître évidents aujourd'hui, il faut savoir que l'on faisait avant la Première Guerre mondiale une nette distinction sociale dans la commémoration des victimes de guerre de l'empire britannique. Ces principes de la Commission soulignent le sacrifice commun de tous ceux qui ont donné leur vie, quelles que soient leurs caractéristiques.
Ces principes sont également la principale raison pour laquelle le Canada, avec ses partenaires du Commonwealth, a adopté une politique de non-rapatriement de ses victimes de guerre, politique qu'il a maintenue jusque dans les années 70, même pour ses victimes en temps de paix. Finalement, c'est un principe que la Commission a demandé au Canada de réitérer lorsque le gouvernement lui a demandé de rapatrier la dépouille d'un soldat inconnu, ce que le Canada a fait.
Comme je l'ai dit, la Commission est financée essentiellement par les subventions annuelles des gouvernements participants. La contribution annuelle du Canada représente environ 10 p. 100 de notre budget total soit environ 8 millions de dollars pour l'exercice budgétaire en cours.
Les 110 000 victimes de guerre du Canada sont inhuméesdans quelque 6 500 cimetières répartis dans 73 pays — sur un total de 1 700 000 victimes de guerre du Commonwealth dont nous entretenons les tombes dans 23 000 cimetières de 150 pays. La somme susmentionnée représente 74 $ par victime de guerre commémorée d'une manière que tout le monde approuve.
Combien de temps durera l'organisation? Selon sa Charte royale, la Commission a été créée à perpétuité et j'ai peine à imaginer le premier gouvernement qui osera lever la main, si je peux m'exprimer ainsi, pour déclarer qu'il ne souhaite plus appuyer notre mandat.
Les employés de la Commission estiment que leur travail consiste à s'acquitter d'une dette d'honneur et je sais que la grande majorité des Canadiens convient que s'acquitter de cette dette est un devoir.
Sur le plan opérationnel, la Commission est organisée en secteurs ou agences relevant du siège social situé à Maidenhead, au Royaume-Uni. Les cimetières et monuments commémoratifs sont vraiment du Commonwealth, ils ne sont pas nationaux et, même s'il y a une référence nationale dans leur nom, cela n'est aucunement l'indication d'une responsabilité ou d'une propriété nationale.
Par exemple, les cimetières de guerre canadiens deBeny-sur-Mer et de Holten sont des cimetières de la Commission. Leur entretien et leur propriété dans les pays d'accueil que sont la France et les Pays-Bas relèvent de la Commission, pas du Canada, et c'est la Commission qui a la responsabilité de les gérer.
Il est intéressant de signaler qu'il n'existe dans le monde entier que deux cimetières de la Commission où seuls des Canadiens sont enterrés. Il s'agit du cimetière d'Agira en Sicile et d'un petit cimetière de 44 sépultures à Contalmaison, en France.
Les services des agences sont des tâches que nous exécutons pour nos gouvernements partenaires ou, à l'occasion, des associations de régiments, en plus de nos tâches relevant de notre charte. Par exemple, nous aidons le Canada en assurant l'entretien de Vimy, de Beaumont-Hamel et d'autres lieux de commémoration de champs de bataille de la Première guerre mondiale du Canada et de Terre-Neuve en France et en Belgique.
Nous entretenons aussi les tombes d'après-guerre de militaires canadiens et de personnes à charge qui ont été inhuméesoutre-mer lorsque la politique canadienne de non-rapatriement des restes était toujours en vigueur, c'est-à- dire jusque dans les années 70. Cela vaut par exemple pour certaines des premières victimes des Forces d'urgence des Nations unies inhumées dans le cimetière de guerre de Gaza.
La Commission n'assume pas de responsabilité au sujet de la Corée. L'ONU entretient un cimetière séparé à Busan. Par contre, nous nous occupons des victimes de guerre du Commonwealth de la guerre de Corée qui ont perdu la vie au Japon et sont inhumées au cimetière de guerre de Yokohama.
Depuis environ un an, la Commission a été engagée à contrat par le ministère britannique de la Défense pour entretenir des tombes de la guerre sud-africaine situées en Afrique du Sud. Le Canada, par le truchement du ministère des Anciens combattants, s'assure que ses propres tombes de cette guerre sont entretenues dans le cadre du même contrat passé pour une période initiale de cinq ans.
Nous agissons toujours dans une certaine mesure avec deux ministères canadiens dans les cas d'identification de dépouilles. Quand de nouvelles dépouilles sont découvertes, la responsabilité appartient au ministère de la Défense nationale, Direction Histoire et patrimoine. Si la dépouille a déjà été inhumée, c'est à dire s'il y a déjà une théorie d'identification, c'est le ministère des Anciens combattants qui devient responsable. Je souligne à nouveau que notre politique n'a pas changé, ni celle du Canada : aucune exhumation ni aucun rapatriement de dépouille ne sont autorisés.
En qualité de secrétaire général de l'agence canadienne, mon objectif est d'assurer l'exécution de la charte de la Commission en Amérique du Nord. Au fond, je gère une PME qui ressemble plus à un organisme à but non lucratif qu'à un ministère gouvernemental. Bien sûr, nous sommes tous des employés de la Commission, pas du gouvernement du Canada.
J'ai huit employés permanents et quatre ou cinq employés saisonniers. Mon mandat porte sur la commémorationde 19 000 victimes de guerre de 3 300 cimetières et sur cinq principaux monuments commémoratifs à Halifax, Ottawa, Victoria, Montréal et St-John's. Il porte aussi sur une pierre du souvenir au cimetière Brookside de Winnipeg, ainsi quesur 26 Croix du Sacrifice. Ces deux types de monuments sont courants dans les cimetières de guerre d'outre-mer.
Des victimes de guerre ont été inhumées dans tous les États américains saufs trois, l'Arkansas, le Delaware et le Nevada, ainsi que dans toutes les provinces du Canada et au Yukon. Ce sont surtout des dépouilles de Canadiens mais il y a aussi un nombre non négligeable de dépouilles d'autres citoyens du Commonwealth, essentiellement du Air Training Plan du Commonwealth britannique et du Arnold Plan américain de la Deuxième Guerre mondiale, ainsi que de citoyens américains ayant servi sous le drapeau canadien. Pourquoi ces dépouilles ont-elles été inhumées ici malgré la politique de non-rapatriement qui était et reste en vigueur? La maladie, des accidents en cours d'entraînement ou des décès après le retour mais pendant les années de guerre ont tous contribué à cette situation. Il y a plus de victimes de guerre canadiennes inhumées au Canada qu'en Italie, aux Pays-Bas, en Allemagne et à Hong Kong pris ensemble. Je dis souvent qu'il s'agit là du coût caché de la guerre.
Nous avons des relations importantes avec le ministère des Anciens combattants, avec le grand public et avec la presse. Nous recevons chaque année des milliers de demandes de renseignements, bien que cet aspect de notre travail ait changé depuis que nous avons placé nos registres sur notre site Web en 1999. Par exemple, rien qu'au mois d'octobre, ce site a été consulté 450 000 fois. Aujourd'hui, nous consacrons beaucoup de temps à la vérification de dossiers.
Nous assurons aussi l'entretien de tombes d'anciens combattants au Canada même dans le cadre d'un accord officiel avec le ministère des Anciens combattants. Depuis le 1er janvier 2004, nous avons effectué un inventaire des tombes d'anciens combattants dans tout le pays au nom du ministère. Cet inventaire fait maintenant l'objet d'un contrat supplémentaire d'entretien cyclique qui sera mis en œuvre progressivement, province par province, à mesure que les tombes seront répertoriées.
Finalement, il vaut la peine de mentionner que le ministère de la Défense nationale, le ministère des Anciens combattants, la Fondation du cimetière de Beechwood et la Commonwealth War Graves Commission sont convenus de collaborer et de relier leurs activités à ce qu'on appelle aujourd'hui simplement le Cimetière militaire national, qui n'est pas la même chose que le Cimetière militaire national des Forces canadiennes.
La Commission n'est pas un organisme étranger. Du point de vue de la politique concernant les victimes des deux guerres mondiales, la Commission est le Canada, et vice versa. Elle exprime essentiellement le fait que des nations du Commonwealth partageant le même point de vue ont décidé de collaborer pour le traitement et la commémoration des victimes des deux guerres mondiales. La Commission a fait la preuve de son efficacité opérationnelle et ses normes d'entretien sont admirées dans le monde entier. C'est une organisation qui est surveillée àdifférents niveaux, si l'on veut. Son conseil se compose de hauts-commissaires des gouvernements participants résidant à Londres et d'un certain nombre de personnes de renom nommées par décret royale pour des périodes fixes. Le ministère britannique de la Défense, qui est notre principal bailleur de fonds, fait des vérifications, et d'autres sont exécutées par notre propre cabinet britannique de vérification, Grant Thornton. Finalement, d'un point de vue strictement canadien, le ministère des Anciens combattants — qui subventionne annuellement la Commission par le truchement d'un crédit budgétaire — surveille nos budgets et nos dépenses, et son personnel assiste à notre assemblée annuelle de contrôle financier.
Le Canada en a pour son argent. Pour une dépense annuellede 74 $ par tombe, les victimes des deux guerres mondiales sont commémorées d'une manière qui est universellement approuvée. Comme notre organisation est d'ampleur mondiale et a du personnel dans de nombreux pays, nous pouvons aussi aider ACC dans d'autres tâches non reliées à notre charte. Par exemple, j'ai déjà mentionné l'entretien des monuments de guerre du Canada et de Terre-Neuve. Nous nous occupons également de tombes non reliées aux guerres en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique avant que le Canada modifie sa politique de rapatriement, et de certains projets ponctuels tels que l'entretien des lieux à l'Abbaye d'Ardenne, en France, ainsi que le récent projet de restauration de Vimy pour lequel nous avons fourni un technicien, donné des conseils et formé les personnes chargées de graver à nouveau les noms.
Mon bureau tient à prêter assistance à ACC de toutes les manières possibles, et deux contrats sont actuellement en vigueur pour du travail concernant les tombes d'anciens combattants au Canada.
Nous sommes continuellement en contact avec des Canadiens souhaitant obtenir des renseignements, nous distribuons des brochures et des fiches d'information de l'un et, en fait, nous prêtons tout simplement une oreille sympathique aux gens qui appellent de temps en temps notre bureau.
Nous publions notre rapport en novembre et j'en ai remis des exemplaires au greffier du comité. Quand on me demande ce que fait la Commission, je réponds que mon organisation protège une partie importante du patrimoine du Canada, son patrimoine militaire, et que j'en suis très fier.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Hall. C'était un exposé utile, avec beaucoup d'informations.
Messieurs, nous avons environ une demi-heure pour la période de questions et nous allons là commencer avec le vice-président du sous-comité, le sénateur Day.
Le sénateur Day : Nous pensons tous que vous faites un travail extrêmement important et nous vous en remercions.
Chacun de vous peut-il me dire comment vous évitez les dédoublements d'efforts? Je songe par exemple à la Fondation canadienne des champs de bataille. Je ne crois pas, général Addy, que vous vous occupiez de tombes mais plutôt de monuments. Par exemple, vous avez parlé de l'Abbaye d'Ardenne en nous invitant d'ailleurs à vous poser des questions à ce sujet. Toutefois, M. Hall nous a dit que sa Commission a aussi quelque chose à voir avec l'Abbaye d'Ardenne. Pourriez-vous m'expliquer la situation et me dire s'il y a double emploi?
Mgén Addy : Nous prêtons notre aide aux unités qui veulent commémorer diverses batailles, par exemple. En ce qui concerne les monuments aux morts ou les pierres tombales, nous signalons de temps en temps certaines choses au personnel responsable mais c'est tout. Il y a manifestement une différence entre s'occuper des cimetières des victimes de guerre et s'occuper d'une plaque commémorant le lieu d'une bataille ou quelque chose comme ça. Il s'agit dans les deux cas de commémoration mais avec une différence importante dont nous sommes parfaitement conscients. Nous travaillons en coopération et l'Abbaye d'Ardenne en est un excellent exemple. L'Abbaye d'Ardenne a débuté il y a des années quand le commandant d'un bataillon de la 4e brigade d'infanterie canadienne qui s'était rendu sur place s'est demandé pourquoi il n'y avait rien pour commémorer les Canadiens. Il a fini par construire ce petit monument. Ceux d'entre vous qui y êtes allés savez qu'il est très simple mais il est toutefois parfaitement adéquat, à mon avis. C'est très émouvant. Comme il y a des anciens combattants de plus en plus âgés qui se rendent sur place, il faut assurer leur sécurité. Si vous êtes allé là-bas, vous avez vu les racines des arbres qui deviennent de plus en plus grands et qui posent un danger. Notre but était de mettre un peu d'ordre sur le site et d'en rehausser la sécurité tout en en préservant l'atmosphère bucolique avec le caractère solennel des arbres à la périphérie de l'abbaye d'Ardenne. Telle était l'intention. Anciens combattants Canada s'intéressait au projet à l'époque et nous a demandé de l'aide. Il a fallu le faire pour améliorer la signalisation du site et afin d'éviter les accidents. Il y avait quelques petits critères de cette nature. Comme les gens qui sont en Europe connaissent les entrepreneurs et ont des relations avec les autorités locales, M. Hall et son groupe ont proposé de nous aider, en particulier avec l'abbaye d'Ardenne. C'est de là qu'est venue cette relation.
Voilà comment je vois les différences, sénateur. Il y a une différence très claire avec ce que fait la Commonwealth War Graves Commission. La Commission fait un travail exceptionnel et nous n'avons aucunement l'intention de lui faire concurrence. La relation entre Anciens combattants Canada et la Fondation repose sur une bonne compréhension mutuelle des rôles respectifs. Notre rôle principal est d'éduquer les Canadiens et de dispenser un service aux diverses unités en ce qui concerne les plaques commémoratives et les sites, ce qui est également utile pour l'éducation. Voilà le contexte général.
M. Hall : De notre côté, nous avons deux types d'activités : des activités de service comme agence — les monuments et les cimetières — et du travail à contrat. Comme nous sommes en contact dans le monde entier avec des gens qui savent travailler la pierre, nous passons des contrats avec eux pour aider les gouvernements participants. Normalement, Anciens combattants Canada nous attribuera un contrat, en dehors de notre travail de charte, pour des tâches particulières. C'est exactement comme l'a dit le major général Addy. Il s'est adressé à ACC qui a pris contact avec nous et nous avons fait le travail puis avons été rémunérés.
Le sénateur Day : Dans votre exposé, vous avez parlé de Canadiens inhumés en Sicile et en France. Qu'y a-t-il de particulier dans ces deux cas?
M. Hall : Je voulais simplement décrire la relation avec les pays hôtes concernant qui possède les terrains où sont situés les cimetières et les monuments aux morts. Les terrains appartiennent à la Commission. Ces cimetières ont été remis à la Commission alors que l'armée canadienne avançait dans ces pays pendant la Deuxième Guerre mondiale, ce qui signifie qu'ils nous appartiennent. Nous les possédons.
Le sénateur Day : Exemple, le monument de Vimy, après la Première Guerre mondiale.
M. Hall : Vimy est un peu différent dans la mesure où c'est un monument national canadien qui appartient à ACC et dont ACC assume la responsabilité. Toutefois, nous disons souvent, à la Commission, que la seule erreur commise par notre fondateur fut de permettre la commémoration de certaines personnes en gravant leur nom sur des monuments nationaux. À Vimy, par exemple, nous nous acquittons de notre mandat en commémorant les individus, dont les noms sont gravés, mais nous le faisons pour un monument national canadien. Nous assumons la même responsabilité pour ceux qui ont perdu la vie dans les Flandres. Leurs noms sont gravés sur le monument de la Commission à Ypres.
Le sénateur Day : Général Addy, vous avez dit qu'à l'avenir la Fondation canadienne des champs de bataille s'occupera d'éducation et de champs de bataille ailleurs qu'en Normandie.
Mgén Addy : C'est déjà le cas, en Italie. En 2002, nous sommes allés en Italie et nous avons l'intention d'y retourner. Nous préparons aussi un voyage combinant la Corée, Hong Kong et la Birmanie, si possible. Ce serait le prochain. Je prévois une visite intéressante avec M. Marc Milner de l'Université du Nouveau-Brunswick. Beaucoup de Canadiens ont servi dans la marine et dans l'armée de l'air et, comme il est difficile de faire une tournée des champs de batailles lorsque les combats se sont déroulés dans les airs ou sur les mers, nous songeons à organiser une tournée des lieux d'entraînement en Amérique du Nord. Ensuite, nous irions en Angleterre visiter le commandement des bombardiers de la RAF et l'un des ports puis, si tout marche bien, nous terminerions à Mourmansk. Voilà certains des projets que nous envisageons et, même si aucun n'a encore fait l'objet de discussions détaillées, des gens très brillants pèsent actuellement le pour et le contre. Il y a des citoyens canadiens qui sont très intéressés. L'un de mes camarades de classe, Michael Potter, m'a dit : « Si vous voulez que vos étudiants voient l'un des vieux avions en vol, prévenez-nous et nous nous en occuperons; je leur offrirai même le déjeuner ».
Ce sont des relations humaines de cette nature qui rendent l'expérience enrichissante et aussi complète que possible.
Cela dit, je laisserai à mes successeurs le soin de s'occuper de ce qu'il faudra faire dans 10 ans ou 20 ans pour nos concitoyens qui sont actuellement en Afghanistan. Notre rôle à nous est de nous concentrer sur les lieux que nous avons l'intention de visiter. Je n'ai aucun doute qu'on ira au-delà de ça dans les années à venir.
Le sénateur Day : À titre d'information, Michael Potter est cet homme qui a un hangar avec un vieil avion à Gatineau, dans la région de l'Outaouais.
Le sénateur Atkins : Merci, messieurs. Je vous félicite de votre excellent travail. J'ai une question à poser à M. Hall. Est-ceque 8 millions de dollars sont suffisants pour ce que vous faites?
M. Hall : Pour le moment, oui. Comme tout le monde, nous dressons un budget annuel et nous tenons ensuite des assemblées de contrôle financier, à l'automne. Ensuite, nous nous adressons aux gouvernements participants — par exemple, à Anciens combattants Canada. Nous discutons du budget et de nos besoins immédiats et futurs. Neuf fois sur 10, les gouvernements participants nous donnent l'argent dont nous avons besoin sans discuter. Ils sont très généreux. La contribution du Canada est particulièrement appréciée.
Par exemple, vous comprendrez que beaucoup de nos pierres tombales de la Première Guerre mondiale, qui ont aujourd'hui plus de 90 ans, commencent à se détériorer, avec les pluies acides et tout le reste. Une année, nous avons demandé une augmentation de crédit spéciale pour payer des équipes de graveurs de pierres dans divers pays car c'était plus efficient que de remplacer complètement les pierres tombales. Les gouvernements participants n'ont pas hésité à financer ce projet. Ma réponse est donc oui.
Le sénateur Atkins : C'est une bonne chose.
Monsieur Mercer, nous sommes sur le point de célébrerle 90e anniversaire de Vimy. Pourriez-vous nous exposer les plans d'ACC à ce sujet?
Robert Mercer, sous-ministre adjoint, Événement Vimy 2007, Anciens combattants Canada : Avec plaisir. Je peux peut-être aussi vous donner un bref aperçu de ce qui se passera à la mi-avril en Europe et au Canada. En Europe, il y aura deux événements principaux pour commémorer le 90e anniversaire de la bataille de la crête de Vimy, qui fut une bataille importante.
Pour vous donner une idée de son importance, nous avons perdu plus de 10 000 Canadiens en quatre jours seulement,dont 3 598 le premier jour. On dit souvent que cette bataille a marqué la naissance de notre nation. Ce qui est incontestable, c'est qu'elle a été un point tournant pour les Alliés pendant la Première Guerre mondiale et a valu au Canada sa place parmi les signataires du Traité de Versailles. Vous voyez que c'est très important.
Nous allons également consacrer le monument de Vimy après avoir dépensé 20 millions de dollars pour le restaurer au cours des cinq dernières années. La délégation du Canada comprendra environ 135 personnes. C'est le projet actuel. La délégation se rassemblera ici même, à Ottawa, le 4 avril et partira pour l'Europe le soir du cinq.
Il y aura quatre événements principaux. Le samedi 7 avril, nous procéderons peut-être à l'inhumation des restes de deux soldats canadiens, restes qui avait été trouvés il y a déjà un certain temps. Nous n'avons pas encore la confirmation absolue que ce sont des Canadiens mais il semble que oui. Le ministère de la Défense nationale s'occupe de la question. Si nous obtenons bientôt confirmation, il y aura une cérémonie d'inhumation de ces soldats le samedi.
Une autre activité sera organisée par la ville d'Arras, qui est près de Vimy — une activité avec l'armée canadienne célébrant la libération de cette ville. Outre la délégation du Canada, le ministère de la Défense nationale a investi de l'argent dans la commémoration de Vimy en Europe. Nous allons envoyer plus de 300 membres des Forces canadiennes participer aux divers événements.
Nous aurons également une cérémonie officielle d'allumage des lumières — parce qu'un nouveau système d'éclairage a été installé au monument de Vimy. Ensuite, le 9 avril, nous prévoyons accueillir environ 25 000 personnes à Vimy. Ce sera énorme. Nous attendons plus de 4 000 étudiants de tout le Canada. Ce sont des étudiants qui recueillent eux-mêmes l'argent nécessaire avec l'aide de leurs écoles pour se rendre là-bas. Leur nombre augmente de jour en jour.
Pour ce qui est de la délégation, elle comprendra un petitgroupe accompagnant le ministre. Une invitation officielle sera adressée à 15 associations d'anciens combattants du Canada, comme d'habitude. Nous emmènerons 20 anciens combattants à Vimy. Nous nous attendons aussi à ce que d'autres soient présents sur place, pour toutes sortes d'autres raisons, mais le gouvernement du Canada financera le passage de 20 d'entre eux dont 16 ont été choisis par les principales organisations d'anciens combattants du Canada.
Le sénateur Atkins : Ce ne seront pas tous des anciens combattants de la Première Guerre?
M. Mercer : Hélas non car il ne reste plus que trois anciens combattants de la Première Guerre au Canada et aucun ne sera apte à faire un tel voyage. Le benjamin a 105 ans, je crois.
Nous choisirons quatre membres des Forces canadiennes — quatre seulement car 300 viendront aux frais du ministère de la Défense nationale, ce qui veut dire que les Forces canadiennes seront bien représentées. Les quatre que nous choisirons pour Vimy représenteront les quatre régiments dont un membre a obtenu la Croix de Victoria à cette occasion. Voilà le sens de cette sélection.
Il y aura en outre 20 membres de la GRC. Il y aura un personnel imposant — 25 à 28 personnes — pour appuyer la délégation mais surtout pour appuyer les événements qui se tiendront là-bas.
Au Canada, il y aura une cérémonie au Cénotaphe. Il y aura sans doute également d'autres cérémonies dans nos provinces et territoires, dans toutes les capitales, qui sont actuellement en cours de préparation. Plus de 25 événements distincts sont prévus au Canada.
Le président : Ne serait-il pas possible d'avoir au moins une photographie, si ce n'est un message, de l'un des trois survivants de la Première Guerre mondiale, ou même des trois, pendant la cérémonie elle-même à Vimy?
M. Mercer : C'est une bonne idée. Je vais voir si c'est possible.
Le sénateur Atkins : En ce qui concerne la délégation, combien de ces personnes savent qu'elles iront là-bas? Je connais les agents de la GRC qui doivent y aller car ils ont été informés il y a déjà longtemps mais qu'en est-il des autres?
M. Mercer : Les 15 organisations d'anciens combattants sont au courant — elles ont été informées il y a déjà plusieurs semaines par téléphone. Elles recevront une lettre d'invitation officielle que notre ministre a signée hier, je crois.
En outre, le processus de sélection au sein des organisations d'anciens combattants est déjà bien avancé. Certaines d'entre elles, comme la Légion, ont déjà fourni la liste des anciens combattants choisis.
Le sénateur Atkins : Y aura-t-il des députés dans la délégation?
M. Mercer : Il y aura la délégation du ministre, comprenant actuellement le ministre, un sous-ministre et peut-être une ou deux personnes de soutien.
Pour ce qui est des députés et des sénateurs, qu'il s'agisse de représentants du gouvernement ou de l'opposition, c'est une question qu'il faudrait poser à notre ministre. On a déjà réfléchi à la composition de la délégation mais aucune décision définitive n'a encore été prise.
Le sénateur Atkins : Je suppose qu'elle le sera bientôt?
M. Mercer : Oui.
Le président : Je pourrais peut-être en parler au ministre pour voir où il en est dans sa réflexion à ce sujet.
Le sénateur Day : Il connaît notre intérêt.
Le président : En effet. Je vais quand même prendre contact avec lui pour voir si je peux obtenir quelques précisions et je vous les communiquerai immédiatement.
Le sénateur Atkins : Tout ce que je peux ajouter, c'est que je suis probablement le seul membre du parlement ayant un descendant direct qui s'est battu à Vimy.
Le président : Votre père?
Le sénateur Atkins : Oui, et je pense que ça devrait compter dans ce cas.
Le sénateur Dallaire : Et du bon parti.
M. Mercer : Vous seul pouvez dire cela, sénateur Dallaire. Je peux ajouter que cet événement suscite un intérêt considérable, dépassant largement tout ce que nous aurions pu imaginer.
Nous avons reçu des demandes de tout le pays — de gens qui étaient là comme étudiants à la cérémonie d'inaugurationen 1936. Ce ne sont plus des étudiants — certains ont plus de 80 ans — mais ils souhaitent se rendre à Vimy. Nous avons toutes sortes d'histoires de gens ayant des parents qui se sont battus à Vimy.
Comme les budgets sont limités, nous ne pourrons pas emmener tous ceux qui voudraient y aller mais je pense qu'il est utile de vous dire que nous recevons des demandes de tout le pays. Il y a un intérêt incroyable.
Le président : Je crois comprendre qu'il y aura au moins autant d'étudiants que ceux qui ont perdu la vie à Vimy qui vont allerlà-bas en ayant recueilli de l'argent eux-mêmes.
M. Mercer : C'est exact. C'est un bon commentaire sur la commémoration en général. Il y a toutes sortes d'histoires à raconter mais, en 1936, 8 000 anciens combattants — environ 6 000 du Canada et 2 000 étant des Canadiens du Royaume-Uni — sont allés à la cérémonie inaugurale. Ils ne sont plus parmi nous aujourd'hui.
En 2007, pour montrer aux anciens combattants que leur héritage est protégé et leur survivra, plus de 4 000 jeunes de tout le pays iront là-bas. Ils y apprendront beaucoup. Ils ne feront pas qu'assister à la cérémonie. Ils réaliseront des projets spéciaux pour leurs écoles au sujet de la bataille de la crête de Vimy.
Le président : Les cérémonies seront-elles télédiffusées au Canada?
M. Mercer : Oui.
Le sénateur Atkins : Vous n'avez pas dit que la Reine y sera aussi.
M. Mercer : Je ne l'ai pas dit parce que je n'ai pas encore eu de confirmation officielle mais Sa Majesté la Reine a été invitée. Plusieurs autres chefs d'états l'ont été aussi, comme le président de la France. Il s'agit simplement maintenant de recevoir les confirmations définitives pour pouvoir publier la liste des chefs d'État qui seront présents.
Le sénateur Downe : Je voudrais revenir sur une remarque de M. Hall, bien que je soupçonne que la réponse viendra sans doute des gens du ministère des Anciens combattants. Je m'intéresse à l'entretien des tombes de ceux qui se sont battus pendant la Guerre des Boers, bien que je constate que le nom a maintenant été remplacé par Guerre sud- africaine.
Évidemment, cette guerre ne tombe pas dans le mandat de votre Commission qui a été établi en août 1914. Toutefois, dans votre rapport annuel et dans votre exposé d'aujourd'hui, vous avez parlé du travail que vous avez commencé en Afrique du Sud. Pourriez-vous nous donner des précisions? Assurez-vous l'entretien des tombes des Canadiens tués dans cette guerre?
M. Hall : Oui. C'est quelque chose que nous faisons commesous-traitant. Comme l'agence canadienne, il y a une agencesud-africaine avec un secrétaire qui a été établie pour entretenir les tombes des deux grandes guerres en Afrique du Sud et en Namibie. C'est le territoire d'action de cette agence.
L'exigence nationale du Canada est qu'on entretienne les tombes de ceux qui sont tombés dans la Guerre sud- africaine, qu'on appelait autrefois la Guerre des Boers. Notre organisation était déjà sur place et le ministère des Anciens combattants est venu nous voir avec le ministère de la Défense du Royaume-Uni pour nous demander si nous pouvions nous charger de ce travail, comme agence de service. Nous avons dit que oui et nous avons signé un contrat de cinq ans. Nous faisons le travail avec du personnel de la Commission.
Le sénateur Downe : Ce travail ne fait pas partie des 8 millions de dollars. C'est en plus?
M. Hall : Non, c'est un contrat.
Le sénateur Downe : Y a-t-il d'autres pays, monsieur Mercer, où les tombes de Canadiens ne sont pas entretenues par la Commonwealth War Graves Commission?
M. Mercer : Oui, il y a nos tombes en Corée, par exemple. Des Commissions ont été mises sur pied au sujet de ces tombes et elles suivent les mêmes normes que la Commonwealth War Graves Commission.
Le sénateur Downe : Il y a quelques années, on craignait que les tombes sud-africaines soient laissées à l'abandon. À l'heure actuelle, y a-t-il dans certains pays des tombes ayant besoin d'une attention supplémentaire?
M. Mercer : Oui, mais pas dans la même mesure qu'en Corée. Pendant plusieurs années, il y a eu du vandalisme là- bas. Nous sommes efforcés de trouver le meilleur arrangement possible pour garantir que ces tombes soient bien entretenues. On a beaucoup parlé récemment d'un cas de vandalisme remontant à il y a un an. Nous avons décidé que le problème pourrait être réglé si nous passions cette entente avec la Commonwealth War Graves Commission et c'est ce qui s'est passé.
Quand il y a un problème concernant l'état d'une tombe canadienne n'importe où dans le monde, nous sommes là immédiatement pour trouver une solution. Il peut y avoir des problèmes. Il peut y avoir du vandalisme. Il y a déjà eu des bombes explosant accidentellement et endommageant des tombes canadiennes.
Le sénateur Downe : Le rapport annuel de la Commonwealth War Graves Commission est-il disponible dans les deux langues officielles?
M. Hall : Il est intéressant que vous posiez cette question car le rapport est disponible en français pour la première fois cette année. Comme nous ne sommes pas des employés du gouvernement fédéral, nous n'avons pas à suivre ses lignes directrices sur le bilinguisme. La plupart des informations dont les gens peuvent avoir besoin sont accessibles par le site Web d'Anciens combattants Canada, qui est bilingue.
Nous publions notre rapport annuel en hollandais, en français, en allemand et dans plusieurs autres langues de pays où nous avons un public et de grandes concentrations de tombes. Mon bureau s'efforce de respecter la politique concernant les deux langues officielles du Canada. Nous allons bientôt lancer un site Web bilingue.
J'ai apporté avec moi des documents supplémentaires montrant le français et l'anglais. En fait, j'ai apporté plusieurs exemplaires en français du rapport annuel de la Commission, que nous n'avons reçu qu'après l'invitation à participer à cette séance.
Le sénateur Dallaire : Je voudrais vous poser une question d'ordre historique et une autre concernant l'avenir.
Vimy est le symbole de la maturation du Canada comme nation. C'est aussi un instrument d'unité nationale et une référence historique importante pour les nouveaux Canadiens qui essayent de comprendre leur nouveau pays.
Comment « canadianiser » Vimy au Canada? Toute une série d'événements sont prévus au Canada, je n'en donnerai pas la liste, mais avoir ce grand monument là-bas n'établit pas nécessairement le lien avec le Canada même. Quand j'ai fait partie du comité de révision de la rénovation de Vimy, j'ai dit que nous devrions rapporter ici certains éléments de cette commémoration — quelque chose de plus que les monuments ou les éléments se trouvant au Musée de la guerre.
Dans 10 ans, nous célébrerons le centenaire de cette bataille. Si l'on voulait faire quelque chose d'important, par exemple en fabriquer une réplique ou moderniser le monument sur notre propre territoire, pour qu'il fasse partie de notre patrimoine, il faudrait environ 10 ans pour obtenir les fonds. Dans le cadre du 90e anniversaire, ne pourrait-on mettre immédiatement sur pied un comité chargé de planifier le centenaire et de créer quelque chose de permanent au Canada même?
M. Mercer : Pour le moment, ce n'est pas dans les plans, mais c'est intéressant. Si nous voulions faire vers une sorte de rapatriement de Vimy, en quelque sorte, pour assurer une plus grande visibilité du monument au Canada même, nous devrions d'abord jauger l'intérêt collectif. Ensuite, le gouvernement pourrait envisager d'établir des partenariats.
Votre idée de ramener Vimy au Canada est intéressante. Nous disons généralement cela des monuments commémoratifs dispersés dans le monde. Nous nous occupons actuellement d'un projet qui devrait vous intéresser. Nous préparons une visite virtuelle du monument de Vimy sur notre site web. C'est quelque chose qui coûte cher mais qui permettra aux Canadiens de visiter eux-mêmes le monument, virtuellement, en montant les marches, en regardant les statues et en comprenant le sens despylônes. Ce sera une autre manière de diffuser le message. En outre, près de 4 000 étudiants reviendront avec toutes sortes d'informations et garderont vivante l'idée de Vimy dans leurs propres collectivités, comme ils l'ont déjà fait en recueillant de l'argent pour faire le voyage.
Sénateur Dallaire, certaines choses sont prévues pour mettre plus l'accent sur la commémoration au Canada même de ce que nous avons fait outre-mer.
Le sénateur Dallaire : Je suis 100 p. 100 avec vous là-dessus. Ma seule crainte est que nous ne devrions pas attendrela 99e année pour préparer le centenaire. Nous pouvons commencer dès maintenant à dresser des plans réalistes pour une modernisation ou une stylisation du monument. Je suis tout à fait en faveur de l'idée de créer une « Association des amis de Vimy ». Quand j'étais vice-commandant de l'armée, j'ai tenté de convaincre l'association militaire de créer une telle association en nommant des ex-commandants de l'armée à son conseil. J'espère que le gouvernement n'attendra pas que la société s'en occupe le même. Le gouvernement devrait déjà planifier le centenaire.
Je veux maintenant m'adresser au major général Addy, avec la Fondation canadienne des champs de bataille, le Fonds du Souvenir, les cimetières nationaux, Anciens combattants Canada et la nouvelle politique dont a parlé M. Hall au sujet du rapatriement des restes. Au fond, la politique actuelle est que nous n'allons plus enterrer nos morts outre-mer. Quelqu'un pourrait peut-être soulever une question de compétence à ce sujet mais ça n'a jamais été un facteur de cette politique : nous les ramenons tous.
Comment ces choses sont-elles toutes reliées pour un futur processus de commémoration? Y a-t-il un organisme qui prend le concept des tombes de guerre du Commonwealth en disant : « Nous allons nous engager au sujet des opérations complexes de l'avenir. Qu'allons-nous faire au sujet des nouvelles générations d'anciens combattants? Comment allons-nous les commémorer? »
Nous ne pourrons pas ériger des monuments en Afghanistan ou y aménager des cairns comme nous l'avons fait dans d'autres pays. Pourtant, ces missions sont très réelles pour les Canadiens, tout comme les victimes. La question est de savoir comment on commémore ce sacrifice à l'humanité par rapport au sacrifice consenti pour nous défendre pendant la Première Guerre mondiale et la Deuxième Guerre mondiale. Nous nous sacrifions aujourd'hui non seulement pour nous défendre mais pour faire avancer l'humanité. Comment allons-nous commémorer cela sur notre territoire, à part le monument que nous avons maintenant pour l'ONU?
Mgén Addy : La commémoration n'est pas qu'une affaire de cimetières.
C'est plus que ça. C'est montrer aux étudiants ce qui s'est passé et diffuser l'information dans les écoles. Ce qui compte le plus, à nos yeux, ce sont les gens. Ce que fait M. Hall, c'est qu'il assure le respect dans les différents cimetières, comme nous l'avons fait au cimetière de Beechwood.
Avec le temps, et à mesure que changent nos politiques, on procède à de petits aménagements. J'ai la conviction que la chose la plus importante pour la commémoration, quels que soient le lieu ou le moment, est d'assurer l'enseignement de l'histoire dans nos écoles, notamment de notre histoire militaire. C'est difficile au palier fédéral.
J'aimerais revenir sur un élément qui me semble important. Terry Copp et Michel Fortmann ont mis sur pied il y a deux ans le premier cours d'histoire militaire canadienne donnant droit à un crédit et ce cours comprend des visites de champs de bataille. Ce genre d'effort vaut l'investissement.
Comment envisageons-nous l'avenir? Lorsque la Fondation de la bataille de Normandie est devenue la Fondation canadienne des champs de bataille, je pense qu'avec les éléments dont vous avez parlé, l'existence de conflits dans diverses régions du monde demeurera importante. Permettez-moi de dire, sénateur, que ces activités ne concernent pas notre propre sécurité. Elles concernent la sécurité du monde, j'en conviens. Je pense que l'histoire du Canada, dans le contexte qui nous intéresse, est axée sur des contributions personnelles et nationales et sur notre propre psyché de Canadiens. C'est un enchaînement continu.
Je n'irai pas plus loin car je pense que chaque génération a quelque chose à apporter dans ce domaine. Nous examinons ce genre de choses. Par exemple, nous nous penchons sur le cas de la Bosnie et des autres conflits plus récents qui sont aujourd'hui plus des éléments de nouvelles que d'histoire. Ces choses feront plus tard partie de la Fondation.
En ce qui concerne les cimetières, je ne veux rien enlever à M. Hall mais je peux vous dire que je suis absolument abasourdi partout où je vais. J'ai eu la chance de visiter certains pays du Pacifique au nom des Forces canadiennes, comme Hong Kong. J'ai été impressionné par le travail qui est fait là-bas. J'ai aussi été impressionné par un endroit qui s'appelle l'Union de Myanmar, qui est dirigé par des pirates. Le seul endroit propre dans ce pays est le cimetière entretenu par la Commonwealth War Graves Commission. C'est effrayant. Je n'en dirai pas plus.
M. Hall : Strictement parlant, nous sommes bloqués dans le passé.
Le sénateur Dallaire : C'est pourquoi je ne m'inquiète pas à votre sujet. Je m'inquiète plus au sujet des autres.
M. Hall : Quand on nous présente une demande, nous agissons. Par exemple, nous avons aménagé le cimetière des Malouines pour les Britanniques lors de la guerre du même nom. Quand le cimetière militaire national du Canada a été conçu, le commandant Davidson est venu nous voir et a demandé conseil à la Commonwealth War Graves Commission pour la conception et l'architecture. Comme nous nous limitons aux cimetières, nous voyons les quatre partenaires travaillant ensemble, c'est-à-dire la Défense nationale, ACC, le cimetière de Beechwood et nous.
Mgén Addy : Mais il y a aussi d'autres acteurs. Il y a par exemple la Fondation de Juno. Il y a beaucoup de Fondations. Si l'objectif est de centraliser toutes ces choses-là, quand vous parlez de bénévoles, vous pouvez bien en faire la proposition si vous voulez mais vous aurez plus...
Le sénateur Dallaire : J'essaye plus de comprendre les besoins futurs et comment vous y préparez nationalement.
Êtes-vous en faveur du positionnement d'un garde permanent au Monument national de la guerre, maintenant qu'il y a là un soldat inconnu?
Mgén Addy : Oui, mais je ne voudrais pas être à sa place aujourd'hui.
Le président : Merci beaucoup. Je regrette de devoir interrompre cette discussion car je suis sûr qu'il y a encore des questions à poser mais, comme la séance du Sénat doit débuter dans cinq minutes, nous allons devoir mettre fin à la réunion.
Je remercie à nouveau tous les témoins d'aujourd'hui. La séance a été très utile et constructive. Nous pourrons peut- être vous poser d'autres questions directement. Nous attendons avec intérêt les célébrations de Vimy et la recélébration le lundi de Pâques. J'espère que nous pourrons y être en chair et en os mais, sinon, sachez que nous y serons en pensée.
Je demande aux sénateurs de rester 30 secondes car je veux vous donner une indication de nos travaux futurs.
La séance est levée.