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VETE

Sous-comité des anciens combattants

 

Délibérations du Sous-comité des Anciens combattants

Fascicule 3 - Témoignages du 6 février 2008


OTTAWA, le mercredi 6 février 2008

Le Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui, à 12 h 4, pour étudier les services et les avantages sociaux offerts aux membres des Forces canadiennes, aux anciens combattants, aux membres des missions de maintien de la paix et à leurs familles en reconnaissance des services rendus au Canada.

Le sénateur Michael A. Meighen (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Je déclare la séance ouverte. Nous avons actuellement avec nous le sénateur Kenny, président du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, et le sénateur Banks, qui siègent tous les deux à ce comité depuis un certain temps. Nous attendons l'arrivée d'autres sénateurs.

Nous allons commencer sans plus tarder. Nous accueillons aujourd'hui un témoin distingué, le colonel (à la retraite) Patrick Stogran, qui a pris sa retraite en 2007 après une longue carrière dans les Forces canadiennes pour assumer son poste actuel d'ombudsman des vétérans. Il s'agit d'un poste nouveau qui a été créé récemment. En conséquence, l'objet de la présente réunion est de mieux comprendre le rôle et les fonctions de l'ombudsman des vétérans dans l'optique de la mise en oeuvre de la nouvelle Charte des anciens combattants et de la Déclaration des droits des anciens combattants.

L'ombudsman des vétérans est un agent impartial et indépendant chargé d'aider les anciens combattants à se faire entendre et à défendre leurs intérêts. La nomination vise également à rehausser le degré de sensibilisation aux besoins et préoccupations des anciens combattants et à donner à ces derniers le sentiment que leur point de vue est important. L'ombudsman a le mandat de faire respecter la Déclaration des droits des anciens combattants et de se pencher sur les problèmes particuliers et systémiques qui en découlent.

Colonel Stogran, bienvenue au comité. Je crois que vous avez une brève déclaration et j'espère que vous serez ensuite disponible pour répondre aux questions.

Le colonel (à la retraite) Patrick Stogran, ombudsman des vétérans, Anciens Combattants Canada : Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner ici aujourd'hui.

Je vais me présenter et expliquer les principes selon lesquels je fonctionne, comme je l'ai fait devant le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, résumer nos progrès à ce jour et faire des observations sur notre bureau et notre environnement fonctionnel d'aujourd'hui.

Je ne peux pas nier que ce fut difficile de quitter les Forces canadiennes. Être un soldat n'a jamais été un travail pour moi, c'était un mode de vie. Tout au long de ma carrière, je n'ai jamais perdu de vue le fait qu'il me faudrait un jour quitter l'armée et commencer à travailler pour gagner ma vie, mais je n'ai jamais eu hâte que ce jour vienne. Cependant, il ne m'a pas fallu longtemps pour décider d'accepter l'offre de devenir le premier ombudsman des vétérans du Canada. S'il y a des gens que je respecte autant que nos hommes et femmes en uniforme, ce sont nos anciens combattants. Ce poste représente l'occasion de redonner à cette communauté de manière utile et durable. Pour moi, c'est un travail que j'adore.

[Français]

J'ai résisté à l'attitude bureaucratique pendant toute ma carrière militaire, et ce, malgré le fait que la bureaucratie qui, ne parvenant que très rarement à s'implanter dans les unités de combat des Forces armées canadiennes, existait au siège social. Je ne peux donc penser à aucune autre position pour laquelle je serais mieux équipé afin de combattre la bureaucratie qui frustre nos vétérans.

[Traduction]

Ma priorité, depuis que j'ai accepté cette nomination, a été de voyager aux quatre coins du pays et de rencontrer le plus grand nombre possible de vétérans, de défenseurs de leurs droits et de groupes. À ce jour, j'ai aussi visité l'établissement de soins de longue durée à l'Hôpital Sainte-Anne, près de Montréal, l'Hôpital Sunnybrook à Toronto, l'Hôpital Colonel Belcher de Calgary et le Centre de santé Perley-Rideau pour anciens combattants à Ottawa. Je me suis familiarisé avec le système de soutien des militaires souffrant de blessures ou de stress opérationnel et j'ai visité Anciens Combattants Canada à Charlottetown et plusieurs des bureaux de district. De plus, je me suis plongé dans l'apprentissage du travail d'un ombudsman et j'ai analysé divers exemples de bureaux d'ombudsman.

Anciens Combattants Canada a joué un rôle actif dans la création du Bureau de l'ombudsman des vétérans. Un personnel réduit a travaillé pendant plusieurs mois avant ma nomination pour étudier l'ombudsman du MDN, rédiger des organigrammes et des descriptions de poste, établir l'infrastructure et même recevoir et consigner des plaintes de clients; à ce jour, nous en avons déjà presque 300. Nous avons embauché des employés nommés pour une période déterminée pour recevoir et examiner ces plaintes des clients en vue d'identifier des dossiers où nous pouvons obtenir des succès à court terme. Nous étudions aussi des dossiers qui pourraient devenir nos premières analyses pleine grandeur des problèmes systémiques. J'envisage avec optimisme que nous aurons ce que j'appellerais une « capacité opérationnelle intermédiaire » au cours des prochains mois et que nous serons pleinement opérationnels à la fin de l'automne.

Une autre leçon que la vie m'a enseignée abondamment est que le processus d'embauche est extrêmement lourd dans la fonction publique. Je m'attendais à ce que cela prenne du temps, mais je pensais quand même que, à cette date-ci, je serais en train d'examiner des curriculum vitae en vue d'embaucher un directeur général des opérations.

Ayant travaillé au niveau opérationnel pendant toute ma vie professionnelle, j'adopte une approche de commandement face à ce poste. Dans ce but, ma place sera dans les tranchées, aux côtés des vétérans, et je serai leur chef de file. Je cherche actuellement un directeur général des opérations qui aura une approche complémentaire à la mienne : quelqu'un de tenace, un véritable « pitbull » qui maîtrise bien les mécanismes gouvernementaux et qui soit capable de se dégager des contraintes bureaucratiques et d'effectuer des changements. L'inefficience et les retards semblent être des critiques récurrentes à Anciens Combattants Canada. Par conséquent, je vais m'efforcer de faire en sorte que la marque de commerce de notre bureau soit un cycle rapide et efficace de décision et d'action.

Il a été relativement facile d'établir les descriptions de fonctions des postes de cadres supérieurs. Il a été plus difficile d'identifier un modèle de première ligne susceptible de satisfaire au mieux les besoins de notre communauté de vétérans. Nos employés de première ligne et la manière dont ils accueilleront nos vétérans, ainsi que les processus sur lesquels ils pourront compter, seront l'image de notre bureau qui s'imposera aux yeux de tous. Nous devons éviter de devenir une organisation de bureaucrates ou de gens qui perçoivent leur travail comme étant des rouages d'une bureaucratie. Il nous faut des gens qui sont au service du public dans le vrai sens du terme, ainsi qu'un processus simplifié permettant de raccourcir les délais dans tous les dossiers.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, la consultation a été une autre caractéristique de mon travail d'ombudsman jusqu'à maintenant, et je vais continuer dans le même sens. Il est important que j'acquière et maintienne une profonde empathie avec les anciens combattants et que je demeure bien au fait des questions qui leur posent des difficultés. Par ailleurs, au sujet de mes relations avec le gouvernement, l'indépendance sera une troisième caractéristique que je protégerai énergiquement. C'est d'une importance cruciale si je veux empêcher que la commodité politique ou bureaucratique vienne jamais obscurcir mon objectivité ou faire obstacle au traitement juste et équitable de nos anciens combattants.

Bien que nos responsabilités soient énoncées dans notre mandat, notre pouvoir d'exécuter ce mandat émanera de notre crédibilité. Pour être crédibles, nous devons veiller à faire ce qui suit : faire enquête de manière impartiale et approfondie sur toutes les plaintes et tous les problèmes; examiner attentivement tous les faits relatifs à une affaire, de manière réfléchie et équilibrée; et offrir des recommandations pragmatiques et pratiques. En dernière analyse, je pense que tout gouvernement serait malvenu de ne pas tenir compte de toute suggestion légitime que je pourrais faire pour favoriser le mieux-être de ceux qui ont servi notre pays. Je dis cela parce qu'aujourd'hui, la majorité des Canadiens ont beaucoup de compassion et d'empathie pour le sort de nos anciens combattants.

Enfin, un principe fondamental que je veux respecter dans tout l'exercice consistant à concevoir et mettre en oeuvre les processus et structures de notre bureau sera d'établir et de maintenir des relations personnelles avec les gens qui feront appel à nos services. Cela dépendra de la culture que nous mettrons en place quand nous recruterons de nouveaux employés. La culture ne peut pas être favorisée par un quelconque processus, structure ou politique. C'est une responsabilité de leadership à tous les niveaux et cela demeurera ma principale préoccupation ces jours-ci, alors que nous sommes en train de monter le bureau.

On a laissé entendre qu'en l'absence d'une loi habilitante, l'ombudsman des vétérans n'a pas les pouvoirs nécessaires pour exercer une influence sensible sur la résolution des problèmes qui touchent la vie de nos anciens combattants. Je soutiens que cela reste à voir. Je peux assurément comprendre qu'une loi peut faciliter le travail d'un bureau donné, mais je pense que l'ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes a à son actif de belles réalisations en l'absence d'une telle loi. De plus, je peux discerner des cas où la loi aurait pu se révéler une contrainte davantage qu'une liberté. En dépit du dur labeur de l'équipe provisoire qui a jeté les bases du bureau, nous avons dû reconsidérer certaines hypothèses de base sur lesquelles leur travail était fondé.

De même, compte tenu de tout ce que j'ai appris jusqu'à maintenant, je suis confiant que si, à un moment donné, j'estime qu'il nous faut une loi, je suis maintenant très bien placé pour conseiller précisément le législateur quant à la teneur d'une telle loi. Je peux donner l'assurance au comité que je n'hésiterai pas à la réclamer si j'en vois le besoin.

Je m'empresse toutefois d'ajouter une autre de mes révélations de ces derniers mois. Il ne doit y avoir aucun doute que la capacité du Bureau de l'ombudsman des vétérans de réaliser son mandat sans avoir le pouvoir de forcer la divulgation de la documentation pertinente et sans pouvoir exiger la disponibilité du personnel ministériel dépendra principalement de la collaboration des hauts fonctionnaires du ministère.

Une autre critique a été formulée, à savoir que l'ombudsman des vétérans ne va pas intercéder dans le processus de révision et d'appel. Au contraire, je suis heureux que notre bureau va fonctionner en marge du processus de révision et d'appel. J'ai soutenu que, s'il y a des problèmes systémiques dans le processus de décision, le fait d'introduire encore un autre intervenant ou un autre niveau de décision serait une solution typiquement bureaucratique qui ne ferait que traiter les symptômes au lieu de s'attaquer à la cause profonde. Le mandat du Bureau de l'ombudsman des vétérans nous permettra de nous attaquer aux problèmes systémiques et aux questions émergentes, ce qui, à mon avis, offre amplement de possibilités pour rendre le processus actuel de révision et d'appel plus efficace, si le besoin s'en fait sentir.

[Français]

En conclusion, je désire à nouveau exprimer ma sincère gratitude envers le comité pour cette invitation à comparaître aujourd'hui. J'anticipe coopérer avec les membres du comité afin d'assurer que ceux qui ont si bien servi notre pays soient traités de façon juste et équitable, et avec tout le respect qui leur est dû.

[Traduction]

Le président : Merci, colonel. C'était très utile. Pendant que vous faisiez votre allocution, deux autres sénateurs se sont joints à nous : le sénateur Nancy Ruth, de l'Ontario et le sénateur Day, du Nouveau-Brunswick.

Nous avons maintenant un effectif complet des membres du comité. Je suis certain qu'il y aura beaucoup de questions. Je vais demander au sénateur Nancy Ruth de commencer.

Le sénateur Nancy Ruth : Je suis nouvelle au comité et je ne connais donc pas bien le dossier.

J'essaie de comprendre comment l'on fonctionne aux Anciens Combattants. Après avoir lu les documents que nous avons reçus, je crois comprendre que vous vous occupez seulement de problèmes systémiques de droit ou de discrimination. Est-ce le cas?

Dans l'affirmative, quel genre d'avocats embaucherez-vous? De plus, combien d'argent avez-vous et comment en obtiendrez-vous davantage?

Le président : Des avocats ou de l'argent?

Le sénateur Nancy Ruth : Eh bien, de l'argent.

Ma dernière question est celle-ci : Êtes-vous le dernier recours en appel pour un ancien combattant?

Col Stogran : Ce serait simplifier à outrance de dire que nous nous occupons seulement de problèmes systémiques. Il est préférable de dire que nous ne nous mêlons pas du processus d'adjudication. Cela dit, nous sommes chargés de faire respecter la Déclaration des droits des anciens combattants et aussi de répondre aux plaintes de nos clients.

Nous n'avons pas le droit de nous mêler d'un dossier tant qu'un client n'a pas épuisé tous les recours en appel.

Cependant, nous pouvons nous pencher sur les cas de mauvaise administration dans les dossiers de révision et d'appel. Du point de vue juridique, nous ne pouvons pas contester les décisions judiciaires. Encore une fois, je dirai toutefois que mon interprétation de cela est celle-ci : c'est peut-être légal, c'est peut-être conforme, mais est-ce juste? Il y a parfois des injustices alors même que tout est légal. D'après moi, notre bureau est chargé de s'assurer que les anciens combattants soient traités comme il faut et tout est affaire de justice.

Chose certaine, nous avons un excédent budgétaire cette année. On nous a accordé environ 5,3 millions de dollars pour l'année, mais c'était en prévision de l'ouverture du bureau en avril, alors que ce n'est qu'en novembre que nous avons finalement pu nous mettre en marche. Je soupçonne que ce serait un montant adéquat pour nous permettre de fonctionner. Je suis actuellement en train d'apporter des retouches à mon plan d'activité et d'identifier exactement quels sont les besoins. En me fondant sur ce que j'ai appris depuis deux mois quant au rôle d'un ombudsman, j'ai mis au point une organisation qui, à mon avis, répondra aux besoins de première ligne dans nos relations avec les anciens combattants. Je suis actuellement en train d'évaluer combien cela coûtera.

Pour ce qui est d'obtenir plus d'argent, mon service est considéré comme une direction générale du ministère. Le ministère a le mandat de me fournir tous les services ministériels, sauf les services juridiques et de communications; c'est un arrangement du genre donnant-donnant dans le cadre duquel les services sont payés au fur et à mesure. J'ai rencontré justement le sous-ministre hier soir pour discuter de cette question et de la façon dont nous allons procéder.

Au sujet du dernier recours d'appel, j'ai répondu à cela. Nous ne nous mêlons pas du processus de décision. Nous nous penchons sur les processus et les cas de mauvaise administration.

Le sénateur Nancy Ruth : Je voudrais faire une suggestion, car c'est tout un nouvel univers pour moi. En théorie, le sénateur Meighen est peut-être mon commandant, mais c'est moi qui ai posé les questions et j'aurais aimé que vous me regardiez en y répondant. Si les relations avec le ministère et les anciens combattants vous semblent importantes, je vous invite à réfléchir à cela.

Le président : Voulez-vous attendre au deuxième tour pour poser d'autres questions, ou en avez-vous d'autres à poser tout de suite?

Le sénateur Nancy Ruth : Non, je vais attendre et écouter.

[Français]

Le président : Permettez-moi de signaler la présence d'un membre honoraire de notre comité, le sénateur Dallaire, qui a toujours porté un grand intérêt à nos délibérations. Je vous souhaite la bienvenue, cher collègue.

[Traduction]

Le sénateur Day : Merci, colonel, d'avoir assumé cette responsabilité au nom des anciens combattants. Nous vous sommes reconnaissants des efforts que vous déployez. Je sais que vous ferez du bon travail.

Premièrement, je voudrais vous interroger sur vos liens avec la Légion royale canadienne. Quand nous avons discuté dans le passé d'un ombudsman des vétérans, la Légion a toujours fait savoir clairement qu'elle considérait que c'était là son rôle. En posant cette question, je vous donne le signal que vous avez peut-être du travail de relations publiques à faire à cet égard.

Col Stogran : Monsieur le président, au risque de trahir mon manque d'expérience en matière de témoignage devant des comités, je m'excuse si j'ai offusqué qui que ce soit. Je suis les conseils qu'on m'a donnés.

Au sujet de mes relations avec la Légion, peu de temps après mon retour d'Afghanistan où j'ai servi comme officier, j'ai communiqué avec la direction nationale de la Légion en vue d'offrir mes services. J'estimais que le rôle de la Légion n'était pas bien compris par les jeunes soldats qui sont déployés aujourd'hui en Afghanistan. Je crois que le rôle de la Légion deviendra plus important pour ces jeunes gens au cours des prochaines années et j'ai donc établi des liens étroits avec la direction nationale avant d'assumer mes fonctions actuelles. Je connais bien tous les principaux intervenants et je comprends leur problématique.

Pour ce qui est de mes liens avec eux à titre d'ombudsman des vétérans, je ne veux nullement les dénigrer ou diminuer leur importance, mais je les considère comme un autre groupe de défense des droits. Il n'y a pas unanimité là-dessus parmi les diverses associations d'anciens combattants; elles ne font pas toutes partie de la Légion royale canadienne. En fait, beaucoup de groupes qui ne se considèrent pas chapeautés par la Légion font du très bon travail au nom des anciens combattants qu'ils défendent.

Il est vrai que j'ai un certain défi à relever en matière de relations publiques. J'ai l'intention de faire en sorte que mon comité consultatif compte des représentants des diverses communautés d'anciens combattants et non pas de chacun des groupes d'intervention. Cependant, je ferai certainement appel à tous les groupes d'intervention pour leur demander de me fournir des noms de gens qui peuvent bien représenter les besoins des anciens combattants. En théorie, n'importe laquelle des associations pourrait compter cinq ou six personnes qui seraient nommées membres de mon conseil.

J'ajoute un dernier point : nous allons commencer le 5 novembre en tenant une séance d'information à laquelle nous invitons des représentants du plus grand nombre possible de groupes et de particuliers, tous ceux que je pourrai identifier, afin de leur faire part de ma philosophie opérationnelle. Je veux leur montrer que je suis inclusif, que je les traite tous également et que je suis tout à fait disposé à recevoir des critiques constructives ou des conseils de la part de n'importe lequel d'entre eux.

Le sénateur Day : Je compte en entendre davantage au sujet de cette relation à l'avenir.

Changement de sujet, nous avons appris en nous entretenant avec des représentants d'Anciens Combattants Canada que le rôle du ministère avait été étendu à des membres des forces armées qui sont encore en service et qui prévoient prendre leur retraite pour une raison quelconque. Le ministère communiquera avec ces militaires qui sont toujours en service ou en uniforme pour les conseiller sur leurs droits et s'assurer qu'ils obtiennent les services voulus.

Allez-vous contrôler les relations entre les forces armées et Anciens Combattants Canada pendant cette période de transition, pendant laquelle les militaires sont encore en uniforme?

Col Stogran : Absolument. Je vais faire un contrôle le plus étroit possible des soldats qui sont toujours en service et de leur transition dans le domaine des anciens combattants. Il y a une vaste zone floue, mais beaucoup d'efforts sont déployés pour corriger cette lacune. Il y a même une zone floue entre moi-même et l'ombudsman du MDN.

Qu'il suffise de dire que l'une des mesures que j'ai prises et que nous allons mettre en oeuvre au cours des prochains mois, c'est d'ouvrir ma propre page Facebook. Durant mes visites à la Légion, j'ai saisi toutes les occasions de m'entretenir avec de jeunes soldats qui revenaient d'Afghanistan. Je les ai encouragés à s'inscrire à la Légion et peut-être même à fonder eux-mêmes une section. Ils me répondaient : « Êtes-vous sur Facebook? », parce qu'ils ont tous leur page.

J'espère lancer un dialogue avec ces jeunes gens et les encourager à nous faire part de leurs commentaires. En dernière analyse, tant que des problèmes ne sont pas portés à l'attention de notre bureau, nous devons faire attention de nous en mêler, de crainte d'être accusés d'être nous-mêmes un groupe d'intervention. Nous répondons aux besoins de notre clientèle.

Le sénateur Day : Quelle relation aurez-vous avec l'ombudsman du MDN en termes de budget? Vous avez dit qu'il y a une zone floue. Pouvez-vous comparer le budget de l'ombudsman du MDN au vôtre?

Col Stogran : Je ne peux pas entrer dans les détails. Cependant, l'approche de notre bureau a été de suivre les recommandations du groupe de travail qui a été mis en place. Essentiellement, j'ai proposé que l'ombudsman des vétérans soit une copie conforme de l'ombudsman du MDN. Les responsables ont décidé arbitrairement d'en réduire la taille et la portée pour qu'elles se rapprochent plutôt des nouveaux ombudsmans qui vont être créés dans les domaines de la fiscalité, des victimes de crime et de TPSGC. Sans connaître les détails exacts, je peux dire que nous avons à peu près la moitié de la taille et que mon rang est considérablement inférieur à celui de l'ombudsman du MDN.

Le président : Pour éclairer ma lanterne et renseigner tous ceux qui nous écoutent, pouvez-vous nous dire ce que représente l'acronyme que vous venez d'utiliser : TPSGC?

Col Stogran : Travaux publics et Services gouvernementaux Canada.

Le sénateur Day : Il s'agit donc de l'ombudsman dans le domaine des acquisitions.

Col Stogran : Oui.

Le sénateur Day : Ce poste n'a pas encore été créé, bien qu'on l'ait promis il y a deux ans.

Col Stogran : J'étais à une conférence la semaine dernière et j'ai rencontré des gens de ce bureau. J'ai travaillé en étroite collaboration avec l'ombudsman du MDN. J'ai l'impression que, si nous devons donner suite à un nombre de plaintes correspondant le moindrement au volume que nous prévoyons, le bureau n'est pas d'une taille suffisante. Nous prévoyons que notre volume sera le double de celui du MDN.

D'après mon expérience à ce jour relativement aux plaintes très diversifiées qui nous sont adressées — et je remonte à l'époque de mon service actif dans les forces armées, quand j'étais dans la chaîne de commandement et que j'avais des soldats qui se tournaient vers l'ombudsman du MDN, et j'ai moi-même fait l'objet de deux ou trois enquêtes de l'ombudsman du MDN — nos plaintes sont souvent beaucoup plus complexes. L'un de mes plus grands défis sera d'informer les nombreux vétérans qui peuvent avoir une idée fausse de ce à quoi ils ont droit en fait de services aux anciens combattants. Ce n'est pas de leur faute s'ils ont cette idée fausse, parce qu'il y a tout un fouillis de jargon juridique qui émane de ce bureau. Cela veut dire que les communications, le travail de terrain auprès des anciens combattants seront un énorme problème.

Comme je l'ai dit dans mon allocution, je ne veux pas que les anciens combattants s'imaginent qu'ils pourront téléphoner à un numéro central et devenir automatiquement un dossier ou un numéro avec lequel on communiquera à notre convenance. Je veux plutôt établir un dialogue permanent avec eux et leur faire sentir qu'il y a quelque part quelqu'un qui défend leurs intérêts. Dans sa configuration actuelle, notre service n'aura pas une taille suffisante pour offrir ce type de service à nos anciens combattants qui le méritent.

Le sénateur Day : Je suis entièrement d'accord avec vous. Je soupçonne que vous irez bientôt dire à quelqu'un qu'il vous est impossible de faire face au volume de travail avec le budget et le personnel dont vous disposez. Actuellement, vous faites partie du ministère des Anciens Combattants et vous plaiderez donc votre cause devant le sous-ministre. Je vous dis que nous allons suivre de près votre travail. Notre comité est toujours ouvert à vos commentaires et vous pourrez nous dire comment cela se passe. L'indépendance est d'ailleurs un aspect important. Si vous estimez ne pas pouvoir faire votre travail de manière indépendante au nom des anciens combattants à cause de la place de votre bureau dans l'organigramme, nous aimerions vous entendre nous le dire à l'avenir.

Le sénateur Banks : Je suis content de vous revoir. Ma question est précise et ciblée et traite de la nature de vos relations avec le MDN; je veux savoir si vous devez obligatoirement passer par l'ombudsman du MDN, ou bien si vous avez d'autres relations avec le ministère de la Défense nationale. Je vous pose cette question à cause d'une affaire que vous connaissez, je le sais, des gens qui ont été jugés par le MDN — et non pas par le ministère des Anciens Combattants — non admissibles à certaines prestations parce qu'il leur manquait quelques jours de service pour avoir le nombre minimum requis. L'écart s'expliquait par le fait que les personnes en question avaient été prêtées, détachées ou enfin s'étaient vu offrir l'occasion durant la dernière guerre de devenir instructeurs du Programme d'entraînement aérien du Commonwealth. Ils ont offert ce service après avoir servi dans l'Aviation royale canadienne, comme on l'appelait à l'époque, dans le cadre de ce qui, je le suppose, était un contrat de service offert au programme britannique par les écoles de pilotage, ce qui était assez courant un peu partout au Canada. À la fin du programme, les personnes en question ont repris du service et ont reçu leur congé, ayant servi pendant le nombre d'années requis. Cependant, on a jugé que ces personnes n'avaient pas droit à certains avantages auxquels les anciens combattants avaient autrement droit, parce que le nombre de jours qu'ils avaient passé au total dans l'ARC ne correspondait pas au minimum nécessaire.

Je voudrais savoir si nous pourrions retenir vos services pour défendre la cause de ces personnes qui se retrouvent dans cette situation. Pourriez-vous nous être utile à cet égard?

Col Stogran : Bien sûr, je réponds immédiatement : « Oui, monsieur. » Je dois toutefois apporter une réserve quand on me demande d'être un « défenseur », parce qu'en dernière analyse, je suis le défenseur du traitement juste et équitable. Dans mes relations avec le ministère de la Défense nationale, j'ai eu des contacts avec diverses personnes, mais, dans la mesure du possible, j'essaie de passer par les services de l'ombudsman du MDN qui a le mandat de creuser les dossiers et de fouiller là où nous n'en avons pas le droit. Je fais confiance au bureau de l'ombudsman du MDN qui, en tout cas à en juger par ses succès passés, adopte une attitude de justice envers les anciens combattants.

Cela dit, beaucoup de questions se recoupent. Vous avez évoqué un cas. Il y en a un autre, celui d'une veuve qui se plaint que le dossier médical de son mari a été détruit illégalement dans les années 1970. En conséquence, elle-même et son conjoint n'ont pas reçu des prestations de pension auxquelles ils avaient droit. Dans le premier cas, sans vouloir donner aux anciens combattants l'impression que nous transmettons leurs dossiers et oublions leurs cas, nous travaillons en étroite collaboration avec l'ombudsman du MDN pour établir s'ils ont été traités avec justice au départ. C'est le premier aspect à prendre en compte. Au risque de m'exposer à des critiques non fondées, quand il s'agit de mon propre fief, c'est moi qui déciderai si le ministère des Anciens Combattants les traite avec justice. Dans un premier temps, ils se fient à la documentation du MDN mais en fin de compte, pour quelque raison que ce soit, nous pouvons exercer une latitude et traiter un ancien combattant de la manière qui nous paraît juste. C'est à ce point précis que je ramasserais mon sabre et sonnerais la charge.

Le sénateur Banks : Des représentants du MDN ont comparu devant le comité et expliqué que, bien qu'ils sympathisent avec les personnes visées dans les affaires que j'ai décrites, la décision officielle de déclarer que quelqu'un est un ancien combattant et est admissible n'est pas prise par les Anciens combattants, mais bien par le MDN. Par conséquent, c'est dans cette direction que nous orientons nos efforts. J'espère pouvoir poursuivre ce dossier à un moment donné avec l'ombudsman du MDN.

Col Stogran : Je voudrais ajouter une observation. C'est peut-être exact, c'est peut-être conforme à la politique et à la définition juridique, mais est-ce juste? Cela reste à voir.

Le sénateur Banks : Tout est là. Je vous demande humblement votre aide dans ce dossier au nom des anciens combattants. Ce sont bel et bien des anciens combattants puisqu'il leur manque seulement quelques jours. Je suis content que vous ayez remarqué que nous, dans cette enceinte, nous nous adressons vraiment la parole, par opposition à l'autre endroit où ils ne le font pas.

Le président : Pour que ce soit bien clair dans mon esprit, peu importe les subtilités juridiques ou les règlements, vous considérez que c'est votre travail d'être le défenseur de la justice.

Col Stogran : Oui, cela résume bien la situation.

Le président : Nous n'avons pas trop à nous inquiéter de ce que les avocats vont dire. Au moins, ce n'est pas le fin mot de l'histoire.

Le sénateur Dallaire : Je m'excuse d'être en retard. J'étais au caucus. Colonel Stogran, je suis extrêmement content de vous voir occuper ce poste. On a bien choisi et je ne vous souhaite rien d'autre que le meilleur succès. Votre sens du devoir, de la justice et de la loyauté seront mis à l'épreuve dans l'accomplissement de votre mission.

Où allez-vous établir votre bureau?

Col Stogran : Nous sommes situés à la place de la Constitution, au 360, rue Albert, à Ottawa, mais une partie de notre personnel administratif et d'accueil sera situé à Charlottetown.

Le sénateur Dallaire : Allez-vous voyager entre les deux villes?

Col Stogran : Oui.

Le sénateur Dallaire : Votre présence à Charlottetown est cruciale parce que, même si les grands patrons sont ici, l'appareil administratif est là-bas. J'espère que vous examinerez cet aspect.

Allez-vous vous pencher sur les politiques même si vous ne recevez aucune plainte? Par exemple, vous arrivez juste au moment où l'on met en vigueur la nouvelle Charte des anciens combattants. Cette charte a été rédigée pour donner au ministre énormément de souplesse, contrairement à la charte précédente, qui était contraignante et spécifique et qui ne donnait pas beaucoup de marge de manoeuvre au ministre ou au personnel. Celle-ci a été rédigée en posant au départ que le ministre doit manoeuvrer avec souplesse, ce qui veut dire qu'un ministre peut rapidement se faire emberlificoter par le personnel.

Comme le ministre a beaucoup de marge de manoeuvre, cela donne aux fonctionnaires l'espace voulu pour rédiger leurs propres règles et dire : « Voici ce que nous voulons faire. Aucune autre loi ne nous limite. Nous pouvons créer des processus et des systèmes qui pourraient être pires que ce que nous avions auparavant. »

Étant donné votre mandat, êtes-vous en mesure de dire que vous contrôlerez en tout temps la manière dont la charte est interprétée, dont les procédures sont établies et que vous allez vérifier si l'on respecte l'esprit de la charte, ou bien commencera-t-on à voir le règne des manoeuvres bureaucratiques?

Col Stogran : Premièrement, je suis autorisé à entreprendre des enquêtes de mon propre chef. Deuxièmement, bien sûr, la nouvelle Charte des anciens combattants est déjà sur notre écran radar. Nous avons reçu une importante plainte d'un militaire qui a été blessé récemment en Afghanistan. Ses graves blessures étaient exactement les mêmes que celles d'un collègue à lui qui a été blessé aux termes de la Loi sur les services de guerre. Il craint qu'on l'ait laissé tomber.

Nous recueillons des renseignements sur cette plainte qui fait l'objet de l'une de nos études en cours et nous voulons nous assurer que justice soit faite.

L'une des préoccupations ou complications est que le Groupe consultatif sur la nouvelle Charte des anciens combattants retravaille le dossier au fur et à mesure. Notre bureau n'a pas encore eu la chance de se mettre vraiment au fait de tous les tenants et aboutissants de ce dossier, parce que c'est évolutif.

Au sujet des règlements et politiques qui pourraient échapper à l'interprétation de la loi, c'est exactement là où j'interviens. Au départ, en prenant connaissance de mes fonctions, j'ai pensé que ce serait très différent du travail de l'ombudsman du ministère de la Défense nationale en ce sens qu'au MDN, l'ombudsman sert quasiment de représentant syndical, parce qu'il s'occupe des clients à l'intérieur du ministère. Mes clients seraient plutôt analogues à ceux de l'ombudsman du MDN quand il a affaire à des Afghans, à l'extérieur du ministère.

J'ai constaté durant mes visites que certains employés de première ligne des services aux anciens combattants m'ont pris à part pour me dire : « Quand vous serez bien installé, venez nous parler et nous vous décrirons certains problèmes auxquels il faut remédier ici. »

J'ai le sentiment qu'une fois que nous aurons établi notre crédibilité et aurons démontré que la confidentialité est un pilier que nous allons soutenir, les employés de première ligne se sentiront à l'aise de venir nous voir lorsque les politiques en question ne reflètent peut-être pas les besoins des anciens combattants, du moins d'après leur perception. Tel est mon mandat.

Le sénateur Dallaire : Cela veut-il dire que vous pouvez remplir un rôle semblable à celui d'un ombudsman relativement aux problèmes du personnel et pas seulement pour les clients, ou bien seriez-vous empêché de le faire à cause des syndicats de la fonction publique?

Col Stogran : Pour les syndicats de la fonction publique, je ne sais pas trop, mais je vais certainement étendre la portée de mon mandat si mes soupçons sont avérés et que nous commençons à recevoir des plaintes de fonctionnaires. Mon mandat comme tel vise strictement les clients qui reçoivent des services du ministère des Anciens Combattants.

Le sénateur Dallaire : Vous ne seriez pas en mesure d'en prendre l'initiative, mais pourriez-vous, en application du processus d'examen et d'interprétation des politiques, communiquer avec le fonctionnaire et l'entendre?

Col Stogran : Oui. Nous avons travaillé ensemble dans le passé. Je vais continuer jusqu'à ce que quelqu'un m'en empêche. Pour moi, l'absence d'instructions m'ouvre des portes, pourvu que je ne viole pas certains principes.

Le sénateur Dallaire : Je voulais seulement signaler pour le compte rendu que nous avons discuté de cette question.

Au sujet du groupe consultatif, il est à l'origine de la réforme et l'on a maintenant créé un nouveau groupe chargé de vérifier la mise en oeuvre de la charte. Dans sa composition et son rôle, le groupe consultatif est-il en rapport avec le ministre ou seulement le sous-ministre? Vous relevez du ministre, n'est-ce pas?

Col Stogran : Oui. Quant aux relations du groupe consultatif, je ne peux pas me prononcer là-dessus.

Le sénateur Dallaire : C'est un élément crucial, un outil utile pour superviser le tout.

La Déclaration des droits des anciens combattants, qui est un élément majeur, signée par le premier ministre Harper et le ministre Thompson, n'est pas un projet de loi, n'est-ce pas? C'est une déclaration.

En lançant tout le processus, nous voulions conclure un contrat social entre la population du Canada, par l'entremise du gouvernement, et les hommes et femmes en uniforme, y compris les membres de la GRC — un contrat social qui serait une déclaration. Nous avons la charte, qui va dans cette direction, mais nous n'avons toujours pas, même si ce document existe, une déclaration fondamentale comportant une clause de responsabilité illimitée entre les militaires et maintenant la GRC et la population du Canada.

Examinez-vous cette possibilité, envisagez-vous d'autres exigences qui pourraient en découler, ou bien est-ce que je vous lance simplement un indice? S'il s'agit seulement d'un indice, c'est déjà bien.

Col Stogran : J'ai compris le message.

Le sénateur Dallaire : Merci.

Le MDN a actuellement une politique selon laquelle lorsque des militaires sont blessés, on les garde presque automatiquement pendant trois ans, quasiment sans leur poser de questions, et l'on tente d'assurer leur rétablissement, leur redéploiement, et cetera. C'est seulement si c'est à l'avantage des deux parties que les militaires ne restent pas et que le MDN en fait moins que cela.

J'en reviens à la question du sénateur Day. Quand des hommes sont blessés, on ouvre leurs dossiers, ils sont en uniforme, mais ils doivent s'adresser aux Anciens combattants. Ils ont droit aux pensions et tout le reste. Quelle est la procédure pour que vous puissiez surveiller ce que la personne vous dit de ses problèmes, par opposition à ce qu'elle raconte au MDN? Y aura-t-il un mécanisme d'arbitrage si vous en arrivez à une solution différente quant à la manière dont la personne doit être traitée?

Col Stogran : C'est une bonne question. Nous ne sommes pas tombés sur un cas comme celui-là. À l'heure actuelle, il n'existe aucune autorité supérieure. D'aucuns ont laissé entendre qu'il faudrait un ombudsman fédéral qui chapeauterait l'ensemble de ces divers services, mais pour ce qui est de me prononcer là-dessus, ce serait bien au-dessus de mon échelle salariale.

C'est peut-être naïveté de ma part, mais il me semble difficile d'imaginer des ombudsmans qui ne donnent pas tous le même son de cloche, dépendant évidemment des personnes qui occupent les postes. Depuis que je me renseigne sur la profession d'ombudsman, je ne cesse de m'étonner de leur éthique irréprochable, même dans des circonstances comme à l'intérieur des universités, où ils ne sont guère plus qu'un service des plaintes, mais ils ont toujours une norme très élevée.

Chose certaine, je n'ai pas été confronté à cette situation et, sur la question de savoir si un arbitrage sera nécessaire à l'avenir, je ne peux pas me prononcer.

Le sénateur Dallaire : Je pose la question parce qu'il pourrait arriver que des clients n'ayant pas un sens de l'éthique trop solide vous dressent l'un contre l'autre. Il pourrait y avoir des frictions et ce serait intéressant de voir comment le différend serait réglé. Il pourrait y avoir conflit entre deux ministres. La synergie entre vous deux pourrait être extraordinaire, si c'est possible, pour résoudre ces problèmes.

Col Stogran : La Loi sur la pension de retraite des Forces canadiennes pourrait être source de friction parce qu'elle a une incidence sur les anciens combattants.

Le sénateur Dallaire : Au sujet des dossiers de la GRC, avez-vous rencontré les gens de l'association de la GRC et cette bande de bandits qu'on y trouve?

Col Stogran : Oui.

Le sénateur Dallaire : Et sont-ils à l'aise avec votre position?

Col Stogran : Oui. À l'heure actuelle, nous n'avons aucun dossier ouvert relativement à des membres de la GRC. Bill Gidley, qui est directeur général de l'Association des vétérans de la GRC, me dit que tout va bien dans l'association. Leur grande préoccupation à l'heure actuelle est qu'ils voudraient pour leurs vétérans un arrangement leur donnant le statut de VIP. C'est tout ce que je sais de la GRC actuellement.

Le sénateur Dallaire : Le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) a été la source de beaucoup de controverse depuis de nombreuses années, pas nécessairement à cause de ses solutions proposées, quoique nous interjetons appel de temps à autre, mais souvent à cause de sa composition, des gens qui en font partie. Des rumeurs ont circulé quant à un changement et, apparemment, les ex-membres des Forces canadiennes et de la GRC ne sont pas appréciés comme membres. Ce seront de plus en plus des spécialistes du droit, notamment des avocats.

Au départ, le Tribunal était censé faire des examens du point de vue humain et pas seulement technique ou juridique. C'était un organisme à visage humain, formé d'êtres humains qui pouvaient examiner les cas et aboutir à une conclusion.

Serez-vous en mesure de vous pencher sur les politiques d'embauche du Tribunal et les principes qu'il applique? Pourriez-vous aller aussi loin?

Col Stogran : Si je me fie à mon instinct, oui, si cela empiète sur le domaine du traitement juste de nos anciens combattants. Pour ce qui est de l'approche, nous adopterions une approche plus globale; au lieu d'examiner seulement le Tribunal des anciens combattants, nous ferions peut-être une comparaison avec d'autres entités quasi judiciaires au Canada et dans des pays alliés, par exemple.

Mon intervention ne se limiterait pas à un simple commentaire sur le tribunal lui-même. Je dis cela parce qu'il y a des plaintes qui vont dans l'autre sens, selon lesquelles on serait un peu trop informel, on ne ferait pas assez appel à des médecins et des gens qui n'ont pas les compétences voulues prononcent des jugements sans comprendre les répercussions médicales. C'est une question de préséance.

Le sénateur Dallaire : Historiquement, les pires membres de ces commissions ont été les militaires, parce qu'ils estimaient que ces gens-là étaient des plaignards et qu'ils voulaient seulement profiter du système. Il y a eu un changement complet dans les années 1970, mais aujourd'hui, il y a un mouvement tendant à paqueter le tribunal d'avocats. Ce serait une orientation épouvantable. Il faut un équilibre entre les médecins et les avocats, mais aussi des praticiens.

Col Stogran : C'est l'un des domaines dans lesquels nous recueillons actuellement des faits. Nous avons eu des plaintes de la nature dont on a déjà discuté et d'autres, par exemple que les précédents n'auraient pas été respectés. La définition légiférée de « bénéfice du doute » n'est pas appliquée. À l'heure actuelle, nous ménageons nos munitions et nous contentons de recueillir des renseignements.

Une fois que nous serons fonctionnels, je veux consacrer mon attention et nos ressources humaines aux dossiers d'anciens combattants qui peuvent avoir subi un tort ou avoir été lésés, notamment lorsque l'âge ou l'infirmité sont en cause. Nous examinons les cas au fur et à mesure qu'ils nous sont présentés. Certains sont médiatisés, mais nous voulons nous assurer que, lorsque nous consacrerons nos ressources à des dossiers, ceux qui en bénéficieront seront les gens qui en ont le plus grand besoin.

Le sénateur Dallaire : Au sujet des médias, il y a le revers de la médaille. Quand nous avons eu l'ombudsman de la Défense nationale, au début, tous les généraux voulaient le museler. Nous nous sommes radoucis avec le temps, mais le titulaire du poste a été en mesure de communiquer énormément avec les médias.

Dans votre mandat, précise-t-on une limite quant à ce que vous pouvez dire aux médias, comme dans le cas des fonctionnaires du Conseil du Trésor quand ils discutent des politiques, ou bien avez-vous toute liberté de manoeuvre pour utiliser les médias?

Col Stogran : À l'heure actuelle, je n'ai aucune contrainte ou limitation quant à mon accès aux médias. Cela représente une flèche dans mon carquois qui donne plus de mordant à notre organisation, en dépit du fait que j'ai établi d'assez bonnes relations au cours de mon séjour en Afghanistan avec plusieurs des journalistes les plus réputés au Canada. Ce sera assurément un avantage pour nous.

Le sénateur Dallaire : Merci beaucoup pour vos réponses et je vous souhaite le meilleur succès.

Le président : À titre d'information, avez-vous été nommé à titre amovible?

Col Stogran : Oui.

Le président : Le mandat n'est pas pour une durée déterminée?

Col Stogran : C'est trois ans, renouvelable, et je peux être destitué pour raisons valables.

Le président : Renouvelable une fois ou deux?

Col Stogran : En fait, je n'ai rien envisagé au-delà de mon premier mandat de trois ans.

Le président : Vous êtes tellement jeune que je pensais que vous envisageriez d'en faire deux.

Col Stogran : Je pense que mon mandat sera un succès si l'on ne me renouvelle pas pour trois autres années.

Le président : Votre succès sera complet si vous n'avez rien à faire. En fait, cela ne témoignerait pas tellement de votre succès, mais du succès des Anciens combattants. Nous avons beau vivre d'espoir, je doute que ce soit le cas.

Pouvez-vous expliquer votre place dans la hiérarchie, d'abord au regard de la loi et, peut-être plus important encore, de quelle manière vous voyez cela d'un point de vue non juridique? Évidemment, il y a des liens hiérarchiques non juridiques qui pourraient peut-être donner de meilleurs résultats si l'on était tenu de s'en tenir strictement à la loi. Dites-moi d'abord comment cela se présente aux yeux de la loi.

Col Stogran : Je relève du ministre. Je suis tenu par mon mandat de remettre un rapport annuel. Il est présenté au Parlement, mais je le remets par l'entremise du ministre. Le ministre a 60 jours pour l'examiner, après quoi il doit être présenté. Je suppose qu'il est présenté sans qu'on y apporte des corrections.

Je relève donc du ministre. Je suis comptable devant le sous-ministre pour certaines fonctions financières et intégrées. Jusqu'à maintenant, je n'ai pas fait rapport à quiconque. Le ministre m'a donné carte blanche pour établir le bureau.

Le président : Par exemple, dans le cas que le sénateur Banks décrivait, supposons que vous en êtes saisi ou que vous prenez l'initiative, examinez l'affaire et décidez qu'il était injuste que cet homme se voie refuser une pension. Même si, légalement, il ne remplissait pas les exigences minimales de service, pour les raisons que l'on a expliquées, vous trouvez que c'était une décision injuste. Supposons que vous appreniez cette décision dans un mois. Que ferez-vous alors? Attendrez-vous à la fin de l'année pour en faire état dans votre rapport?

Col Stogran : Je voudrais revenir à ce que disait le sénateur Dallaire quant à la manière dont fonctionnait initialement l'ombudsman du MDN, car il a eu énormément de succès grâce à cette approche. J'ai le plus grand respect pour M. Morin. Il a été un mentor pour moi ces derniers mois. Il avait coutume d'utiliser l'expression « chaîne de commandement » de manière sarcastique et cela irritait les membres de la chaîne de commandement.

Mon approche était d'éviter ce type de confrontation. Mon personnel m'a averti d'utiliser un peu moins le mot « bureaucrate » et davantage « fonctionnaire. »

J'ai l'intention de travailler le plus possible à l'arrière-plan. Si une affaire qui est dévoilée au grand jour est injuste de façon flagrante, ma première démarche serait de m'adresser au service en cause pour essayer d'en arriver à une solution avant que cela devienne public.

Je suis autorisé à présenter en tout temps un rapport sur une question quelconque, de la manière que je jugerai appropriée. C'est seulement notre rapport annuel, qui sortira à l'automne, que l'on nous ordonne de présenter par l'entremise du ministre.

Le président : Par conséquent, vous avez le sentiment que les pressions morales et les rencontres en tête-à-tête sont les méthodes que vous envisageriez avant d'emprunter la voie juridique pour obtenir du succès. Au moment où vous êtes saisi d'un dossier, est-il dans le domaine public d'une manière quelconque? Si quelqu'un vous demande si vous faites enquête sur le cas de M. Untel, êtes-vous autorisé à répondre?

Col Stogran : Non. Nous essayons de maintenir la confidentialité non seulement des plaignants, mais aussi des témoins et de tous les intéressés. Il faut parfois discuter de certaines questions, mais nous essayons de protéger la confidentialité.

Le président : Et si je déposais une demande d'accès à l'information?

Col Stogran : C'est une autre histoire. Tout dépendrait évidemment de ce que stipule la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels; il faudrait voir si vous seriez autorisé à obtenir ce renseignement.

Le président : Je comprends que je m'écarte de votre mandat.

Le sénateur Kenny : Colonel, je voudrais une précision sur ce que vous avez répondu au sénateur Meighen au sujet de la nature de votre nomination. Vous avez d'abord dit que vous étiez nommé à titre amovible, mais vous avez ensuite ajouté que vous étiez révocable seulement pour une raison valable.

Col Stogran : Je me suis trompé. Je peux faire l'objet d'une révocation motivée.

Le sénateur Banks : Au sujet de la question posée par le président, je lis ici un passage tiré de votre mandat, sauf erreur. Le paragraphe 10(1) dit :

L'ombudsman peut produire des rapports, avec ou sans recommandations, en tout temps, à l'égard de tout examen ou de toute autre question qui relève de son mandat.

Le paragraphe 10(5) dit :

Il peut publier tout rapport, autre que le rapport annuel...

ce serait alors un rapport envisagé au paragraphe 10(1).

... à l'expiration d'une période de 60 jours après sa présentation au ministre.

Le paragraphe 10(1) est-il assujetti au paragraphe 10(5)?

Col Stogran : Pas d'après mon interprétation.

Le sénateur Banks : Pas d'après la mienne non plus, mais vous le sauriez mieux que moi.

Col Stogran : Je n'ai pas encore été mis à l'épreuve.

Le président : Je suis certain que l'on ne vous prendra pas en défaut.

Le sénateur Nancy Ruth : Colonel, pourriez-vous me décrire d'autres cas qui pourraient vous être présentés, pour que j'aie une meilleure idée de votre travail?

Col Stogran : Un exemple qui me vient à l'esprit est celui de neuf lettres qui ont été échangées entre les services des anciens combattants et une personne pour recevoir 60 $. Nous pensions avoir réglé cela une fois pour toute à l'automne, mais nous avons reçu une plainte supplémentaire au printemps.

Le problème des prestations liées à la perte auditive est un thème récurrent.

Le sénateur Nancy Ruth : Voulez-vous dire qu'ils n'arrivent pas à obtenir satisfaction en recourant à d'autres mécanismes disponibles?

Col Stogran : Oui, ou bien la documentation existante n'attribue pas nécessairement la perte auditive au service. Par exemple, un plaignant a travaillé au Corps royal canadien des transmissions. Autrefois, avant que l'on dispose d'un suppresseur de bruit de fond, il portait un casque d'écoute qui lui envoyait constamment un bruit strident à l'oreille. Il n'a jamais signalé le problème. C'était simplement comme ça, il n'avait pas le choix, il devait porter le casque d'écoute. Mais aujourd'hui, son ouïe est très mauvaise et il est convaincu que c'est à cause de ce problème. Cela n'avait jamais été documenté pendant qu'il était dans les forces armées.

Le président : N'a-t-on pas récemment assoupli les exigences pour établir la perte auditive?

Col Stogran : Oui, mais je ne saurais dire quelle en est l'incidence sur cette personne.

Le président : Je ne parle pas de ce cas en particulier, mais on a reconnu de manière générale l'existence d'un problème et il y a eu un assouplissement.

Col Stogran : Oui, c'est exact.

Il y a eu des plaintes relatives à la nouvelle Charte des anciens combattants, comme on l'a dit. Certains estiment que les avantages financiers ne sont pas aussi bons dans le système actuel, et nous recueillons des renseignements là-dessus.

Je ne sais trop pourquoi, mais j'ai comme un blanc, même si j'ai 300 plaintes sur mon pupitre.

Le sénateur Nancy Ruth : Ça va. J'ai l'impression que vous êtes décidé à travailler en coulisse en faisant le moins de bruit possible, plutôt que de faire des interventions tonitruantes, à moins que vous n'y soyez obligé. C'est une bonne idée.

Je vous ai demandé quel genre d'avocats vous alliez embaucher parce que je voulais savoir si vous feriez du droit du travail ou si vous vous aventureriez dans le droit constitutionnel. Vous avez beaucoup insisté sur le fait que tout doit être juste et légal, mais l'impression que vous me donnez est d'être un homme qui s'intéresse surtout à ce qui est juste et équitable. Or pour obtenir que tout soit « juste et équitable », il faut souvent s'adresser aux tribunaux. Ce n'est pas discret.

Col Stogran : J'ai un conseiller juridique assez haut placé et un personnel juridique pour me conseiller. Cependant, ce n'est pas dans la nature des choses pour nous de s'adresser aux tribunaux. Notre travail consiste à identifier les cas de mauvaise administration, lorsque des gens n'ont pas été traités comme il faut. En fait, pour un ombudsman, il faut éviter de devenir partie de la solution parce qu'alors on devient partie du problème. L'objectif est de rendre un jugement et de formuler des recommandations. On veut être une tierce partie et ne pas se laisser entraîner à mettre la main à la pâte pour résoudre soi-même le problème.

Je n'entrevois pas être jamais partie à des litiges juridiques. Cela dit, j'ai un personnel juridique qui veillera à ce que je ne me laisse pas entraîner dans l'illégalité.

Le sénateur Nancy Ruth : Combien de personnes compte votre personnel juridique?

Col Stogran : Il y a un avocat et un technicien juridique.

Le sénateur Nancy Ruth : Merci.

Le président : N'avez-vous pas dit en réponse à ma question que, quels que soient les aspects juridiques d'une affaire, vous vous attardez essentiellement à la justice et à l'équité et, même si vous déterminez qu'une décision est tout à fait légale, elle pourrait quand même être injuste et pourrait donc vous amener à dire qu'une situation est injuste et ne doit pas être acceptée comme telle?

Col Stogran : Oui. Certains cas ont été soumis aux tribunaux qui ont jugé que tout était conforme à la loi, mais je crois qu'il y a d'autres moyens juridiques qui pourraient être plus justes pour la personne en cause.

Nous devons faire attention de ne pas nous ingérer dans le processus de décision aux niveaux administratif et judiciaire mais, en même temps, il y a place pour des interventions de la part de l'ombudsman qui peut se prononcer sur la justice d'une décision quelconque, même si celle-ci peut être tout à fait conforme à la loi.

Le sénateur Dallaire : L'idée de la Charte des anciens combattants était d'accorder au ministre une latitude beaucoup plus grande en matière de décisions sans avoir à recourir à des procédures juridiques. Si cela fonctionne bien et si le personnel n'a pas créé une pléthore de règles et de règlements subordonnés à l'esprit de la charte, le ministre devrait maintenant être en mesure de prendre lui-même un très grand nombre de décisions, alors qu'il était auparavant forcé d'emprunter la voie juridique.

Nous essayons de lui donner l'occasion d'éviter de recourir à la loi. Nous craignons que les services juridiques se mêlent des appels, parce qu'ils abordent le problème avec une attitude complètement différente.

Le président : Si tout fonctionnait de cette manière, comme c'est le cas, vous n'auriez pas grand-chose à faire.

Le sénateur Dallaire : Si le colonel Stogran est en mesure de contrôler la mise en place des règles et règlements créés par le ministère en conséquence de la charte, il va s'en apercevoir si l'on a bâti un empire permettant à quelqu'un, à un niveau quelconque, de décider que quelqu'un n'aura aucune aide, car les fonctionnaires auront les pouvoirs ministériels. Le moindre indice d'une telle situation détruirait tout l'édifice. Un ombudsman était un élément important de la nouvelle charte et ce fut une sage décision de créer ce poste.

Le sénateur Banks : Je vois ici un chapitre intitulé « Limites du mandat. » L'alinéa 5e) stipule que vous ne pouvez examiner toute question qui relève de la compétence exclusive de la Gendarmerie royale du Canada et qui n'a pas été formellement confiée au ministère des Anciens Combattants.

De quoi s'agit-il?

Ma deuxième question porte sur l'exemple que vous avez donné au sénateur Nancy Ruth, celui du type qui affirme avoir subi une perte auditive. Le ministre a mis en place le règlement en vertu duquel la décision a été prise de l'exclure du bénéfice des prestations, et cet ancien combattant a le droit de demander une révision et un appel en s'adressant au Tribunal des anciens combattants. Or l'alinéa 5a) dit que vous ne pouvez examiner une telle décision. L'ombudsman ne peut examiner « toute décision du ministre pour laquelle un droit de révision ou d'appel peut être exercé devant le Tribunal. »

Posons une situation hypothétique : un ancien combattant dit qu'il a subi une perte auditive et le ministre ou quelqu'un en son nom a décidé qu'il n'est pas admissible aux prestations; l'ancien combattant a le droit de demander la révision de son cas ou de faire appel en s'adressant au tribunal. Est-il exact que vous ne pouvez pas examiner ce dossier?

Col Stogran : Oui. Essentiellement, nous ne devons pas intervenir tant qu'un plaignant n'a pas épuisé toutes les possibilités en matière de révision et d'appel.

Le sénateur Banks : Une fois que ce droit de révision ou d'appel a été exercé, vous pouvez alors entreprendre un examen?

Col Stogran : Du point de vue administratif, oui, pour vérifier que la personne a été traitée avec justice tout au long du processus.

Le sénateur Banks : Donc, l'interdiction prend fin au moment où le tribunal prend une décision que vous jugez injuste? Vous pouvez alors examiner la situation?

Col Stogran : Si l'intéressé est passé par le processus de révision et d'appel, oui. Il peut aller jusqu'à la Cour fédérale qui rendrait une décision, ce qui est arrivé à l'occasion.

Le sénateur Banks : La Police montée.

Col Stogran : Oui, je n'ai pas les détails des services fournis dans ce dossier, mais je peux vous faire parvenir ce renseignement. D'après mes conversations avec les gens de l'association de la GRC, tout baigne dans l'huile maintenant. Je me suis intéressé à d'autres dossiers.

Le sénateur Banks : Je vous serais reconnaissant si vous pouviez faire parvenir cela au greffier, à votre convenance.

Le sénateur Day : J'ai ici le document que le brigadier-général Cox nous a fait remettre. Il est intitulé JUS suivi d'un chiffre. Cela veut-il dire « Justice »? Est-ce un numéro de la Gazette du Canada? Je lis : « Attendu que, conformément à... la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, le gouverneur en conseil peut nommer un conseiller spécial à un ministre » . Ensuite, on ajoute que vous êtes cette personne qui a été nommée conseiller spécial du ministre. Cela décrit-il le processus administratif de votre nomination, ou bien cela a-t-il été publié dans la Gazette pour que ce soit du domaine public? Ce document énonce-t-il les modalités de votre emploi?

Col Stogran : Oui.

Le sénateur Day : Dans ce cas, on peut supposer que ces conditions peuvent être modifiées par le gouverneur en conseil en tout temps et de la même manière, si l'on veut apporter une modification? On ne s'adresserait pas au Parlement, par exemple, et nous, à titre de législateurs, n'en serions pas saisis et nous ne pourrions pas formuler des observations? Ce n'est pas un règlement, ce n'est pas une loi?

Col Stogran : C'est bien ainsi que je vois les choses.

Le sénateur Day : Ceci énonce votre mandat, et vous êtes un conseiller spécial du ministre?

Col Stogran : Oui.

Le sénateur Day : On a évoqué tout à l'heure votre rapport prévu à la partie 9 intitulée « Responsabilité et rapport annuel » : vous devez rendre compte directement au ministre et lui faire rapport, à titre de conseiller spécial du ministre. L'ombudsman présente un rapport annuel, et vous vous demandez si le ministre pourrait le modifier. Je ne vois pas comment le ministre pourrait le faire, car on dit que le ministre dépose le rapport devant le Parlement. Toutefois, on ne précise pas quand il doit le faire. On dit seulement qu'il doit le déposer à un moment donné. Je ne vois aucune limite de temps.

Col Stogran : Je crois savoir qu'il doit le déposer dans les 60 jours.

Le sénateur Day : Cela s'applique à tout autre rapport que vous voudriez lui remettre. C'est dans la partie 10. Pour votre rapport annuel, si le ministre ne l'aime pas, il peut le garder par devers lui. Il ne le change pas, mais vous ne pouvez pas le publier tant que le ministre ne l'a pas déposé devant le Parlement et il n'y a aucune limite de temps pour ce faire.

Le sénateur Banks : Cela dépend de la définition que l'on donne de l'expression « le ministre le dépose. »

Le sénateur Day : On dit bien « le dépose », mais sans aucune limite.

Col Stogran : Une chose est claire : mon interprétation de tout cela est celle d'un simple soldat et je n'ai pas encore mon avocat dans mon effectif.

Le sénateur Day : Vous avez dit que vous avez un avocat et un technicien juridique. C'est dans votre budget?

Col Stogran : Oui.

Le sénateur Day : La même chose pour la personne chargée des communications; c'est dans votre budget et pas dans celui des anciens combattants?

Col Stogran : Oui.

Le sénateur Day : Vous avez le droit de publier d'autres rapports en tout temps et je pense que c'est un droit important. L'ombudsman peut produire des rapports, avec ou sans recommandations, en tout temps, et l'on ajoute au paragraphe 10(5) : « Il peut publier tout rapport, autre que le rapport annuel, à l'expiration d'une période de 60 jours après sa présentation au ministre. »

C'est la période de 60 jours dont nous parlions tout à l'heure. Tout rapport, autre que le rapport annuel, peut être publié dans les 60 jours.

Le sénateur Banks : Excusez-moi, sénateur Day. Quand j'ai posé cette question, le colonel a répondu qu'il ne croyait pas que le paragraphe 10(1) était assujetti au paragraphe 10(5).

Le sénateur Day : Il voudra peut-être en discuter avec son conseiller juridique. Je soupçonne qu'un avocat dirait que cela peut s'interpréter d'une autre manière.

Le sénateur Banks : Cela se prête à l'interprétation.

Le sénateur Day : Ce qui me préoccupe, colonel, c'est ce que je disais tout à l'heure au sujet de votre indépendance. Pour que vous soyez efficace dans cette fonction et capable de commenter les programmes gouvernementaux et ministériels, ce que vous êtes censé pouvoir faire d'après votre mandat, et pour pouvoir vous prononcer sur les décisions du tribunal et les problèmes systémiques qui pourraient en découler, il me semble que vous êtes lié de très près au ministre à titre de conseiller.

Je tiens à m'assurer que, dans l'établissement de votre service et de votre organisation, vous aurez l'indépendance voulue, l'indépendance financière, que vous aurez un budget préétabli qui ne pourra pas vous être enlevé si l'on n'aime pas ce que vous faites. Nous ne voulons pas que cela arrive. Nous voulons que vous vous sentiez libre de commenter tout problème systémique découlant des activités du tribunal et du ministère. Vous avez le mandat de le faire, mais il y a énormément de contrôles quant à la manière dont vous accomplissez ce mandat.

Col Stogran : Oui. Je m'en inquiète pour mon successeur. Je ne vois pas que cela constituera nécessairement un obstacle dans ma façon de mener mes activités. Je n'ai pas rencontré le ministre depuis qu'il a annoncé ma nomination en octobre dernier. J'ai fait tout cela sans subir la moindre influence ni contrainte.

Hier, j'ai rencontré le sous-ministre. J'ai rédigé l'ébauche d'un protocole d'entente établissant nos rapports fonctionnels.

Les services ministériels ont un protocole d'entente séparé. J'ai rédigé ma propre version et l'une de mes inquiétudes est que mon indépendance pourrait être limitée par les services ministériels. Nous avons eu une longue discussion hier soir. Je tiens à avoir un représentant qui sera présent aux réunions administratives des cadres supérieurs, afin d'être certain que rien de ce qui sera discuté ou décidé ne viendra limiter ma capacité d'accomplir mon mandat. Il est vrai qu'il y a des possibilités à cet égard. Comme je l'ai dit, personnellement, je n'accepterai rien de moins. C'est à ces conditions, si l'on peut dire, que j'ai accepté le poste. Mais j'ai quelques inquiétudes à ce sujet concernant mon futur remplaçant.

Le sénateur Day : La raison pour laquelle je demandais si votre responsable des communications relevait de vous, c'est que vous comprendrez que bien des gens qui occupent des postes semblables au vôtre, comme les membres de la Commission canadienne de sûreté nucléaire et le vérificateur général — je ne veux pas les appeler des fonctionnaires du Parlement, mais ce sont des agents qui sont censés être indépendants du gouvernement — constatent parfois qu'ils ne peuvent absolument rien faire à moins de pouvoir publier leurs rapports et avoir l'opinion publique de leur côté dans certains dossiers.

On vous demande d'examiner les questions systémiques et de dénoncer tout problème systémique que vous discernez relativement à des programmes qui sont en fait des programmes du gouvernement, du ministère. Il est important que vous établissiez solidement votre capacité d'exercer votre mandat.

Col Stogran : Oui. J'ai bien l'intention de commencer à mettre ma capacité à l'épreuve au cours des prochaines semaines dans le cadre d'enquêtes sur les problèmes systémiques que nous percevons. J'ai veillé à ce que notre capacité de communication soit suffisante pour fonctionner indépendamment du ministre. Je suis conscient que nous pourrions produire un plan de communication pour dénoncer une situation et que les communicateurs ministériels pourraient tenter de présenter la situation sous un angle différent, ce qui pourrait créer un énorme conflit d'intérêts. Je suis confiant que nous avons une indépendance complète à cet égard. Je pense que l'ombudsman de l'Ontario est très bien placé parce que ses pouvoirs sont établis par la loi et qu'un simple document de trois pages lui donne le droit d'assigner des gens à comparaître et de forcer la présentation de documents. Il y a possibilité que l'on abuse des services de l'ombudsman. Je peux seulement dire que je suis tout à fait conscient de cela, mais que je suis également confiant d'être capable de mener mes affaires et de dénoncer une telle situation éventuelle.

Le sénateur Day : Nous avons également confiance en votre capacité.

Col Stogran : Merci.

Le président : Nous devrions terminer assez rapidement. Le sénateur Nancy Ruth sera la dernière intervenante.

Le sénateur Nancy Ruth : Au sujet de la GRC, parmi les éléments que vous ne pouvez pas examiner, il y a toute question qui relève de la compétence exclusive de la GRC et qui n'a pas été formellement confiée au ministère. Le ministère des Anciens Combattants s'occupe-t-il des pensions de la GRC et de tout le reste?

Col Stogran : Non, seulement de certains éléments.

Le sénateur Nancy Ruth : Pourriez-vous ajouter cela à la réponse que vous fournirez au sénateur Banks?

Col Stogran : Oui.

Le président : Merci, colonel Stogran. Vous avez fait allusion à des groupes de bénévoles avec lesquels vous êtes en contact. Pourriez-vous nous en donner une liste? Cela nous aiderait à identifier des gens à qui nous pourrions demander de venir témoigner devant nous.

Col Stogran : Vous faites allusion à la séance d'information en mars?

Le président : Vous avez dit que vous aviez une liste de groupes d'intervention bénévoles?

Col Stogran : Oui.

Le président : Pourriez-vous la remettre au greffier?

Col Stogran : Oui.

Le président : Honorables sénateurs, la semaine prochaine, le 13 février, nous entendrons le témoignage de la Légion royale canadienne, dont la date a été changée. J'espère que vous pourrez être présents. Ensuite, nous ne nous réunirons plus avant le 27 février. Je sais que tous les sénateurs voudront être à l'heure pour entendre le ministre. Nous aurons peut-être une réunion le 5 mars pour discuter des travaux futurs et des budgets. Pour diverses raisons, je doute que nous puissions voyager d'ici la fin mars. Le 5 mars, nous aurons l'occasion de passer en revue notre charge de travail pour la nouvelle année financière.

Y a-t-il d'autres questions, observations ou avertissements?

Le sénateur Kenny : Je ne pense pas que vous serez ici le 5 mars.

Le président : Peut-être pas, mais personne n'est indispensable. Le comité sera peut-être absent au complet. Merci, honorables sénateurs. Je déclare que la séance est levée.

La séance est levée.


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